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Croissance urbaine et enjeux fonciers dans le nord du département de rufisque: cas des communes de Tivaouane-Peulh-Niague et Bambilor


par Alassane Niang
ESEA ex ENEA - DESS 2016
  

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II. Impact de la dynamique d'habitat sur les espaces agricole.

L'avancée du bâti et la consolidation de l'usage d'habitat sur les terres de la zone ont pour conséquence la réduction des espaces agricoles.

1. La réduction des espaces agricoles

Trois étapes marquent l'occupation des espaces agricoles dans le département de Rufisque, conditionnées en grande partie par les dynamiques démographique.

-La première époque se place dans les années 1978-1999.

Elle est caractérisée par les premières vagues d'exodes ruraux dans la région de Dakar. Cette époque coïncidait aussi avec la politique de peuplements initiés par certains chefs de village dans la zone (Niague-Peulh) pour permettre aux villages de survivre et se développer. Dans cette première époque, les surfaces importantes qu'occupaient les espaces agricoles s'expliquaient par la pratique de la culture vivrière. La zone n'avait qu'un centre urbain qui était la ville de Rufisque entourée par de petits villages. La pratique de la culture vivrière s'expliquait par le fait que les populations issues de l'exode rural ne voulaient pas changer leurs habitudes et continuaient ainsi à mener ce type de culture. Les terres étaient moins convoitées, la valeur foncière était très faible, à cause, d'un faible taux de la population dans la région, presque toutes les grandes villes de la région de Dakar avaient un double aspect urbain et rural.

-Mais cette situation changea dans les années 1999 et 2000 avec une forte urbanisation dans le département de Rufisque qui impacta négativement sur les surfaces de cultures qui perdirent 1/32 (GRDR ,2015) de leur superficie. Ces années 2000 ont coïncidé avec les différents

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programmes de logement de l'état (relogements des victimes de l'inondation et de l'autoroute à péage).

Durant notre enquête la majeur partie des ménages trouve que la croissance démographique à Dakar et sa banlieue constitue l'une des déterminantes de la spéculation foncière dans leur zone. Cette croissance démographique a fini par causer la cherté du logement ce qui a poussé une certaine catégorie de la classe moyenne à se déplacer vers les villes secondaires et surtout dans la bande rurale du département de Rufisque qui s'est entretemps fortement connecté avec le centre-ville de Dakar grâce aux infrastructures routiers et aux outils de transports disponibles et moins coûteux. Les populations ont alors changé de types de cultures en adoptant le maraîchage, l'arboriculture à cause d'un climat favorable et de la baisse de la pluviométrie sur les années.

-2013 - 2020: la forte urbanisation notée dans les années 99 à 2000 s'est plus qu'accentuée avec l'enjeu que constituent l'accès au logement et la volonté de l'Etat de désengorger Dakar, avec la création de pôles urbains dans le département de Rufisque. Aujourd'hui, la région de Dakar perd en moyenne 60 ha de terres agricoles par an5. Malgré qu'il vise à promouvoir l'agro-business et l'éco-tourisme, le pôle urbain de lac rose promeut l'accès aux logements. Cette politique même si elle semble maîtrisée et équilibrée, crée des dynamiques hors de contrôle au-delà du pôle, et qui sont du ressort des promoteurs, des propriétaires terriens, qui voyant que leur terre n'est pas en sécurité, le vendent pour des projets de lotissements. Ainsi, beaucoup de terres qui servaient aux activités agricoles furent aménagés, morcelés aux bénéfices de l'habitat. Les superficies emblavées pour le maraîchage dans la région de Dakar sont passées de 617 ha en 2004 à 6,97 ha 2014, ce qui représente un recul de 610 ha en valeur absolue en dix ans 6 .Selon les statistiques tirées de nos cartes d'occupation du sol des deux communes 2531,16 hectares restent pour l'instant comme espace agricole dans la commune de Tivaouane-Peulh -Niague, environs 5% de la superficie. La superficie occupée par l'agriculture est sensiblement plus forte dans la commune de Bambilor avec 9% de la superficie, environ 4440,15 hectares. Les grands espaces comme le titre foncier Berthin qui englobait beaucoup de vergers, sont en train d'être morcelés. Une partie des villages à forte activité agricole, comme le village de Mbeye connaisse une réduction de leurs espaces agricoles et un changement d'usage progressif de leur terre en usage d'habitation. Cependant, l'activité

5 Diop.D (isra) panel sur « le foncier agricole face à l'urbanisation ». 2018

6 Situation Economique et Sociale de la région de Dakar (Service Régional de la Statistique et de la Démographie de Dakar : 2004 et 2014).

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agricole persiste toujours dans les villages se situant vers le Nord des deux communes, cela s'explique par un taux d'urbanisation faible et un manque de services pouvant favoriser d'autres activités comme le commerce ou les métiers d'artisanats. Ces villages n'ont pas encore fait l'objet d'une convoitise de la part des promoteurs et le prix du mètre carré dans ces zones est relativement bas. La rentabilité de l'activité agricole ne pousse pas encore dans ces contrées, les propriétaires à vendre leur terre.

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Carte n° 2 : Occupation du sol de la commune de Tivaouane-Peulh -Niague

Sources : United State Geological Survey(USGS) ESA : SENTNEL 2 Février 2020

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Carte n° 3 : Occupation du sol de la commune de Bambilor

Sources : United State Geological Survey(USGS) ESA : SENTNEL 2 Février 2020

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Tableau no 6 : Statistique des occupations du sol

TIVAOUANE-PEULH -NIAGUE

BAMBILOR

Noms-class

Area/hectare

Pourcentage

Area/hectare

Pourcentage

ZONE

MARAICHERE

2531,16

5%

4440,15

9%

PLAN D'EAU

5857,2

10%

2710,44

6%

BANDE DE FILAOS

3476,25

6%

1344,42

3%

TRAIT DE COTE

3063,87

5%

75,6

0%

SABLE DUNAIRE

3407,58

6%

80,82

0%

ESPACE NU

24890,13

44%

60850,26

49%

ZONE BATI

13503,6

24%

13548,06

27%

Sources : United State Geological Survey(USGS) ESA : SENTNEL 2 Février 2020

Chapitre III: Les instruments et organes de réglementation du foncier.

I. Les instruments de réglementations et de planifications. A. Le cadre juridique

A.1 Un cadre juridique réglementé par l'Etat.

1. : L'avènement de la loi sur le domaine national et ces compléments.

L'instauration de la loi sur le domaine national en 1964 a montré que la majeure partie des terres n'était pas immatriculée, environs 99 % des terres étaient encore considérés comme faisant partie du domaine national. Cette situation prouvait le rejet de la population locale des politiques foncière initiées par le régime colonial.

Cette absence d'appropriation des politiques foncières par les populations a continué avec la loi sur le domaine national qui était plus pour l'Etat un moyen de consolider son autorité en diminuant le pouvoir des chefs coutumiers et préserver ainsi l'intégrité du territoire qu'une politique inclusive prenant en compte les spécificités et les aspirations de tous les acteurs.

Ainsi, dans l'esprit du législateur, la LDN devait contribuer à supprimer la propriété coutumière et à permettre à l'Etat de mener son projet de développement économique du pays, ce qui explique en partie les défiances des populations surtout dans les zones rurales. Cependant, malgré ces manquements dans sa mise en oeuvre, la loi sur le domaine national a

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permis une meilleure équité dans l'accès des terres en donnant la priorité à ceux qui la mettent en valeur 11.

La loi sur le domaine nationale modifiée en 1972 avec l'institution des communautés rurales est caractérisée par une division des terres en deux catégories à savoir : - Les terres du domaine national, sont toutes les terres qui n'ont pas fait l'objet d'immatriculation. Le domaine national couvrait à l'époque 98 % du territoire sénégalais, ces terres sont détenus par l'Etat qui s'assure de leur utilisation et leur mise en valeur rationnelles, conformément aux plans de développement et aux programmes d'aménagement. Leur appropriation est régie par la loi qui donne à l'Etat la primauté de les immatriculer. Les terres du domaine nationales sont divisées en quatre catégories :

Ø Les zones urbaines

Ø Les zones du terroir

Ø Les zones pionnières

Ø Les zones classées

La réforme qui avait institué les communautés rurales en 1972. Cette réforme comportait des conditions qui encadreraient l'utilisation des terres qui doivent revenir aux ressortissants du terroir Article 17 et ceux qui le mettent en valeur. D'autres lois vont renforcer le statut des communautés en institutionnalisant certains métiers propres dans les zones rurales7, ainsi, elles vont reposer sur :

Ø La protection des droits d'exploitation des acteurs ruraux et des droits fonciers des communautés rurales ;

Ø La cessibilité encadrée de la terre pour permettre une mobilité foncière favorisant la création d'exploitations plus viables ;

Ø La transmissibilité successorale des terres pour encourager l'investissement durable dans l'exploitation familiale ;

Ø L'utilisation de la terre comme garantie pour l'obtention du crédit. Elle permettait de sécuriser les zones agricoles et de pâturages, la création du permis d'exploitant dans les zones rurales de la commune aussi permettait de sécuriser les espaces agricoles dans les périphéries. Ainsi, ce permis d'exploiter8 est délivré de plein droit aux personnes domiciliées sur le territoire de la commune qui exploitaient personnellement à des fins

7 .La loi Sylvio-pastoral ou Loasp a été adoptée en 2007

8 La création du comité rural dans les zones urbaines

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agricoles Art. 189.

2. La loi sur le domaine de l'Etat

Le domaine de l'Etat régi par la loi 1976, organise les biens et droits mobiliers et immobiliers qui appartiennent à l'Etat. Le domaine de l'Etat est composé par :

Le domaine public, qui comprend le domaine naturel et artificiel.

Le domaine public peut faire l'objet d'un déclassement .Le déclassement a pour effet d'enlever à un immeuble son caractère de domanialité publique et de le faire entrer, s'il est immatriculé, dans le domaine privé, ou dans le cas contraire, dans le domaine national. L'immeuble déclassé et incorporé au domaine national peut faire l'objet d'une réquisition d'immatriculation au nom de l'Etat sans formalités préalables. Le déclassement entraîne l'annulation de plein droit des titres d'occupation de la dépendance du domaine public déclassée.

Le domaine privé s'est les biens et droits mobiliers et immobiliers acquis par l'Etat à titre gratuit ou onéreux selon les modes du droit commun.

Le domaine privé, donne aussi la possibilité à l'Etat de désaffecter ou affecter son domaine à ses services décentralisés et déconcentrés. Mais cette loi du domaine de l'Etat touche aussi le domaine privé de l'Etat non affecté qui concerne les personnes privés. L'Etat peut donner ses biens immobiliers privés non affectés avec une condition de mise en valeur pour la personne qui en fait la demande. Cette procédure peut prendre la forme d'une convention de location administrative ou l'attributaire est tenue au paiement d'une redevance tout en étant, en phase avec les plans de développement, d'urbanisme et d'aménagement. Ces types de conventions administratives peuvent être des baux emphytéotique ou ordinaire, de droit d'habiter, droit de superficie ou de concession.

La loi sur le domaine de l'Etat , consacre aussi l'autorisation par l'Etat de la vente de terrains domaniaux situés en zone urbaine destinés à l'habitation10, ce qui a été repris par le décret n°87271 du 03 Mars 1987 .il s'agissait à l'époque de céder les terrains attribués par voie de bail (ordinaire ou emphytéotique), droit de superficie ou permis d'habiter et qui se trouvaient

9 Décret n°66-858 du 07 Novembre 1966 portant application de l'article 5 de la loi n°64-46 du 17 Juin 1964 relative au domaine national et fixant les conditions de l'administration des terres du domaine national à vocation agricole dans les zones urbaines.

10 Décret n°87-271 du 03 Mars 1987 portant application de la loi n°87-11 du 24 Février 1987 autorisant la vente de terrains domaniaux situés en zones urbaines destinés à l'habitation.

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dans des zones urbaines qui disposaient d'un plan directeur d'urbanisme, ce pour avoir une croissance urbaine ordonnée et maîtrisée.

A.2 L'amélioration des procédures du régime de l'immatriculation.

1. L'évolution du régime de l'immatriculation

Le cadre juridique qui réglemente le foncier au Sénégal ne s'est pas démarré avec l'adoption de la loi sur le domaine national, bien au contraire. La loi sur le domaine national est le fruit d'un long processus qui a trouvé ses origines dans la période coloniale avec l'adoption du code civil de 1830. En effet, ce code donnait la primeur au français et assimilé pour régir les tractations juridiques et économique portant sur des immeubles qui se produisaient ou même s'étaient produites entre ces Français assimilés et les autochtones africaines .Mais la réforme n'eut pas le succès escompté à cause du fait qu'elle laissait de côté les tenures coutumières et les droits fonciers coutumiers. Le législateur voulut corriger ce manquement et c'est dans les années 1900, qu'il instaura le régime de l'immatriculation au livre foncier. Ce régime se basait sur l'inscription en principe de tous les droits réels consacrés par le droit français et les coutumes africaines. Cette nouvelle réforme mettait en exergue la propriété individuelle en omettant la propriété collective si importante dans les droits fonciers coutumiers africains. Elle essaya de diluer les droits coutumiers africains sur le droit positif. Le décret du 8 octobre 1925 alla dans ce sens en organisant la constatation et l'établissement des droits fonciers coutumiers.

Mais le droit sur la propriété foncière va connaître un tournant important avec ce décret du 26 juillet 1932 qui remplace le décret du 24 juillet 1906 qui avait auparavant remplacé le décret du 20 juillet 1900 abrogé. Ce décret du 26 juillet 1932 va organiser la propriété foncière en assurant aux titulaires la garantie des droits réels qu'ils possèdent sur les immeubles, et en leur délivrant un titre foncier définitif et inattaquable. Il permettait de mettre à la disposition du public toutes les informations relatives à la propriété immobilière, de faciliter les transactions et d'assurer la sécurité du crédit.

Il y va aussi de la reconnaissance du droit coutumier par le décret du 20 mars 1955 après plusieurs tentatives vaines de noyer le droit coutumier. Ce décret va consacrer la reconnaissance

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du droit coutumier en stipulant que leurs titulaires sont libres de les conserver, que nul ne peut les obliger à les céder à moins d'une expropriation pour cause d'utilité publique. En dehors de la consécration du droit foncier coutumier, ce décret va aussi organiser la propriété en différenciant les droits de groupes privés et le droit privé ce qui est une prise en compte de l'aspect collectif de la propriété propre au droit coutumier. Ce long processus de politique foncière, montre les tentatives infructueuses des autorités coloniales pour faire adopter le régime foncier colonial au détriment du droit coutumier. Mais la procédure de l'immatriculation va être réactualisée et assouplie par la loi du 30 Mars 2011 portant régime de la propriété foncière qui va organiser les procédures d'immatriculations et garantir ainsi le droit des citoyens tout en enterrant pour de bons les derniers espoirs du droit coutumier sous l'autel de la loi sur le domaine national . Cette loi du 30 Mars 2011 va essayer sur la forme et sur le fond ,d'harmoniser la loi sur le domaine national et le décret de 1932 en abrogeant l'article 4 du décret du 26 juillet 1932 qui autorise « l'immatriculation des immeubles aux livres fonciers quel que-soit I 'état ou le statut des propriétaires ou détenteurs », et confirmer ainsi la loi sur le domaine national qui donne le pouvoir à l'Etat comme seul habilité à requérir à l'immatriculation à son nom des immeubles aux livres fonciers . Cette corrélation entre la loi sur le domaine national et le décret de 1932 concerne aussi avec la correction « des fonds de terre bâtis ou non bâtis » qui étaient seuls susceptibles d'immatriculation sur les livres fonciers, par « les dépendances du domaine national en nature de terrains bâtis ou non bâtis ». La loi sur le régime de la propriété foncière a aussi supprimé le droit à l'opposition d'immatriculation.

Toutefois la loi sur la propriété foncière maintient le service de la conservation de la propriété et des droits fonciers qui assure aux titulaires la garantie des droits réels qu'ils possèdent sur les immeubles soumis au régime de l'immatriculation.

En dehors de ce cadre juridique d'autres instruments connexes encadrent de manière rationnelle l'utilisation du foncier. Il s'agit du code de l'urbanisme qui veille à un bon équilibre de l'occupation du sol urbain, le code de l'environnement qui protège les zones sensibles dans un contexte d'urbanisation fort. Mais il existe des instruments qui sont plus actifs dans la mesure où elle participe à la mise en place d'un véritable mécanisme d'auto-régulation, ces instruments sont laissés à l'initiative de l'Etat ou de ces organes décentralisés.

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A.1 Un cadre juridique inadapté

1. Les imprécisions de la loi sur le domaine national

Au-delà d'avoir permis à l'Etat de s'imposer comme seul titulaire des terres au détriment des tenants du pouvoir traditionnel et des anciens maîtres de la terre, la loi sur le domaine national au fur et à mesure de sa mise en vigueur a soulevé des incohérences et des limites dans les zones rurales et dans les zones urbaines.

Ø Dans les zones rurales :

Il s'agissait dans les zones rurales d'une difficulté d'interprétation liée à l'imprécision des textes. La notion de mise en valeur par exemple des terres du domaine national a causé une interprétation selon les appréciations des conseils ruraux qui pouvaient refuser l'affectation de terres destinées à l'élevage sous prétexte qu'il ne s'agissait pas d'une mise en valeur. Aucune réglementation claire n'était venue encadrer l'exercice par les conseillers ruraux de ses pouvoirs d'affectation et désaffectation. De même que la condition d'être membres de la communauté pour accéder à la terre était aussi laissée à l'appréciation des conseillers ruraux. Certains voyaient dans cette condition d'abord une volonté d'exclure des Sénégalais sur des portions des terres du domaine national. Ensuite, freiner le développement des communautés rurales qui ne pouvaient de ce fait bénéficier d'investissement par exemple dans le secteur agricole de personnes étrangères à la communauté.

Même s'ils étaient vus par certains comme des dispositions qui permettaient de protéger les ressources de la communauté, ces deux conditions, pour utiliser les terres du domaine dans les zones rurales ont soulevé de nombreuses critiques.

Par ailleurs, l'autre incohérence résidait dans le système de transmission des terres du terroir. Il était injuste que les héritiers de l'affectataire d'une terre de culture soient obligés de demander au Conseil rural une nouvelle délibération d'affectation telle énoncée dans les textes.

Ø Dans les zones urbaines :

Dans les zones urbaines la méconnaissance des populations de la procédure de la loi sur le domaine national a été une opportunité pour l'Etat d'immatriculer des terres. Le droit d'immatriculer, reconnu pendant six mois aux personnes qui avaient mis en valeur leurs terres au moment de l'entrée en vigueur de cette loi n'ont pas été suffisamment vulgarisées. Elles ne pouvaient donc pas véritablement en profiter parce qu'elles n'en étaient pas informées. C'est une première source d'injustice parce que beaucoup de ces terres ont été ou pouvaient être immatriculées par l'Etat.

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La deuxième injustice découle de l'abrogation par cette loi des articles 83 et 90 alinéa 13 du décret du 26 juillet 1932 qui avaient instauré les certificats administratifs. Ils étaient délivrés par le Délégué du Gouverneur du Sénégal aux « détenteurs indigènes de terres » qui ont pu établir « par la procédure de l'immatriculation, l'absence de droits opposables à ceux qu'ils invoquent ».

L'abrogation de ces articles ne pouvait avoir et n'a jamais eu pour effet de ne rendre nuls les certificats administratifs déjà délivrés par l'autorité coloniale. Mais certains hauts fonctionnaires de l'Etat s'en sont contentés pour s'autoriser à les ignorer royalement, leur ôtant toute valeur juridique. Par conséquent, ils ont considéré que les terres concernées appartiennent au domaine national et en ont requis l'immatriculation au nom de l'Etat qui y a ensuite consenti des baux au profit de quelques initiés.

2. Le caractère nébuleux des procédures d'immatriculation

Ce caractère nébuleux est mis en exergue par les conflits fonciers qui opposent sur des terres de vastes superficies, les détenteurs de baux et de titres fonciers aux populations locales, munies d'actes de délibérations ou même bénéficiaire d'une légitimité coutumière, longuement installées dans une zone et ayant valorisé ces terres par d'importants investissements. Ce caractère soulève même l'inutilité des avis publics des enquêtés Commodo et Incommodo, lorsqu'ils ne sont pas destinés aux populations de la zone concernée par l'immatriculation. Ces avis publics, réfugiés sous la coupe du dicton « nul n'est censé ignoré la loi », posent les germes de futurs conflits fonciers. En effet, les modes de transmissions des avis d'ouvertures d'enquête ne sont pas portées à la connaissance des principaux concernés. Ils sont dénoncés par les victimes qui disent ne pas être informé de ces enquêtes qui se font à leurs insu et qui ne les donnent pas l'occasion de faire des réclamations. Les avis ne sont pas adaptés aux canaux de communication dans certaines zones.

En effet, les moyens de communications pour ces types d'avis devaient être adaptés à celui des villages ou les lieux de cultes, les places publiques sont des lieux de rassemblement et de partage de l'information. Ces avis d'enquête commodo et incommodo devraient donner une place de choix aux chefs de villages et aux délégués de quartiers ainsi que les conseils de quartiers et dans une échelle plus large, impliquer les communes concernées. Ces conflits sur les natures juridiques des terres posent aussi un problème d'équité sur le domaine de l'Etat et sur le domaine national quant à la priorisation de l'accès à la terre aux premiers occupants.

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La mise en valeur des terres du domaine national et du domaine de l'Etat est une obligation pour toute demande d'immatriculation. Mais avec la recrudescence de ces conflits et la démolition par la Dscos, des constructions des populations, fruits de lourds investissement au bénéfice d'individus munis d'actes de baux récents et délivrés après que les populations se soient déjà installées sur la parcelle, et même parfois tout en légalité, révèlent des incohérences sur l'interprétation de la loi au profit des plus forts, ce qui remet en question la pertinence d'octroyer des baux sur des terres déjà mises en valeur par ceux qui les ont occupées sous réserve qu'ils ne disposent pas d'actes de propriété.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe