WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La postérité de l'empereur Tibère (XVIIIème- XXIème siècle)


par Thomas Min-Tung
Université du Havre - Master 2 « Cultures, Espaces et Sociétés Urbaines et Portuaires » 2015
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

III - La Vie de Tibère

La plupart des Modernes désireux d'étudier les Césars comparent implicitement les sources anciennes pour se faire leur propre opinion sur la véritable personnalité des princes. Mais rares sont les études à y être consacrées : à notre connaissance, il n'existe que l'ouvrage de Manfred Baar, Das Bild des Kaisers Tiberius bei Tacitus, Sueton und Cassius Dio (1990), en langue allemande et dont aucune traduction n'a été apportée. Non que le propos soit inintéressant ou trop ardu, mais il est difficile de mettre sur un pied d'égalité des auteurs qui, selon l'historiographie, ont des qualités toutes différentes : va-t-on accorder la même place aux Annales de Tacite qu'aux compliments de Velleius ? De même, ils ne suivent pas le même objectif ni le même plan : Tacite, en annaliste, est attaché au respect de la chronologie, Suétone n'y porte aucune attention et Velleius ne traite pas des événements fâcheux cités par ses « rivaux ». Toutefois, Roger Vailland, dans Suétone, Les Douze Césars (1967), met en évidence un plan commun aux auteurs de l'Antiquité. S'intéressant à une seule de nos sources majeures, il reconstitue un fil rouge commun à chacune des Vies, en huit temps.

Nous ne cherchons pas ici à opposer les quatre sources définies comme « majeures » les unes aux autres : le propos serait fastidieux et là n'est pas le propos principal de notre étude. Nous nous contenterons de les relier selon le plan de R. Vailland, afin de déceler des poncifs communs, ceux là même qui ont influencé des siècles d'historiographie. Nous commencions ce chapitre par la biographie de Tibère telle que la présenterait un Moderne tenant de résumer la vie de cet homme, nous le terminons par une biographie constituée d'éléments structurants, communs à chaque César, de l'évolution de la vie d'un prince, de sa jeunesse prometteuse à sa fin odieuse.

a. Vie avant le pouvoir

39. Vailland 1967, p. 171

26

En premier lieu, « le César est un homme comme un autre ». Tout comme le disait G. Maranon, auteur que nous citerons abondamment dans cette étude : « Les empereurs, que cela plaise ou non à la légende, meurent parfois comme de simples mortels40». Si le prince a une position privilégiée, une ascendance illustre, des richesses abondantes, il n'est ni plus ni moins humain que ses sujets. Ainsi Suétone présente le physique de chaque César, comme pour « démystifier » les personnages : du corps parsemé de taches d'Auguste41 à l'excroissance au flanc de Galba42 en passant par les cheveux rares de Caligula43, le corps du souverain n'est pas meilleur que celui d'autrui. Même désir de ne pas mettre le prince sur un piédestal chez Tacite : les vies des Césars furent falsifiées par la crainte durant leur règne puis par la haine après leur mort, et un bon historien - ce que Tacite souhaite être - se doit de restituer la vérité « sans colère comme sans faveur44».

Ensuite, « Avant d'atteindre le pouvoir suprême, la plupart des Césars manifestent de grandes qualités militaires et politiques ». C'est un fait : tous reconnaissent l'implication de Tibère dans les campagnes en Germanie et en Pannonie, et ne peuvent que saluer ses valeurs. Suétone rapporte les actions militaires d'un soldat valeureux, tribun militaire chez les Cantabres puis général en Germanie et en Pannonie45, livrant des combats glorieux sans rechercher la flatterie personnelle : à la mort de Varus, il diffère la date de son triomphe et refuse des titres honorifiques46. Sur les campagnes de Tibère, on peut se reposer sur le récit de Velleius Paterculus : il a combattu à ses côtés et garde un profond respect pour son général. Dans ce souci de glorifier son supérieur hiérarchique, Paterculus prend une liberté d'écriture, présentant la mission en Arménie comme un succès total (« il pénétra en Arménie avec ses légions, rangea ce pays sous la domination du peuple romain et en remit le sceptre au roi Artavasde47 ») : en réalité il n'eut qu'à soutenir celui dont les partisans avaient déjà occis le rival. Il fait longuement le récit des campagnes en Germanie (XCV.-XCVII. pour la période précédent son entrée dans les rangs de l'armée, CIV.-CVI. pour leurs combats communs) et en Pannonie (CX.-CXV.). L'auteur ne tarit pas d'éloges sur les réussites des troupes romaines qui « parcoururent la Germanie entière ; [vainquant] des peuples aux noms presque inconnus et la nation des Cauches rentra dans l'obéissance. Toute leur armée, foule immense de jeunes hommes aux corps gigantesques, se soumit, bien qu'elle fût protégée par la nature du terrain ; entourée de soldats dont les

40. Maranon 1956, p. 175

41. Suétone, Auguste, LXXX.

42. Suétone, Galba, XXI.

43. Suétone, Caligula, L.

44. Tacite, Livre I., I.

45. Suétone, Tibère, IX.

46. Ibid., XVI.-XVII.

47. Velleius Paterculus, XCIV.

27

armes étincelaient, elle vint se prosterner, avec ses chefs, devant le tribunal de Tibère.48 » Toujours selon lui, Tibère était un homme illustre, « remarquable par sa naissance, sa beauté, sa taille, ses excellentes études et sa grande intelligence » ayant déjà l'apparence d'un prince dans sa jeunesse49. Cet homme vertueux, il le servit « pendant neuf années consécutives, soit comme préfet, soit comme légat » et fut « témoin de ses divins exploits (...) [ne croyant] pas qu'il puisse être donné à un homme de voir une nouvelle fois un spectacle semblable à celui dont [il jouit], quand, dans la région la plus peuplée de l'Italie, dans toute l'étendue des provinces de Gaule, tous, revoyant leur vieux général, dont les mérites et les vertus avaient fait un César avant qu'il en reçût le nom, se félicitaient pour eux-mêmes plus encore que pour lui.50 ». Ces valeurs, Auguste les a reconnu. Malgré son désamour pour Tibère, il l'adopte dans l'intérêt de l'État51.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite