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La postérité de l'empereur Tibère (XVIIIème- XXIème siècle)


par Thomas Min-Tung
Université du Havre - Master 2 « Cultures, Espaces et Sociétés Urbaines et Portuaires » 2015
  

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b. L'impact politique de l'exil à Rhodes

L'exil de Tibère est une surprise. Lui qui descend d'une des familles les plus réputées de Rome, est associé à la famille impériale et a bénéficié de pouvoirs consulaires - une situation que n'aurait pu prévoir son père, le républicain en fuite - abandonne brutalement toutes ces distinctions. Auguste flattait toutefois son ambition : il l'avait fait consul aux côtés de Cnéius Pison, lui avait accordé cinq années de puissance tribunitienne et allait l'envoyer combattre en Arménie. Mais Tibère refuse ces honneurs :

- Je n'accepterai plus de mission, lointaine ou non.

- Plus de mission ? Que veux-tu donc faire ?

- Me retirer dans un endroit écarté où je puisse vivre à ma guise. Lire et étudier.

Auguste le fixe avec commisération.

- Je vois bien que tu as besoin de repos. Va donc à Sorrente dans la villa que Mécène m'a léguée. Il disait que

185. Adams 1894, p. 77 :

« I am unhinged--undone !

I can no more. I must get hence and know

The balm of quiet nature, and purity

Of simple lives. (...)

It is not days and weeks, not months, but years,

But years and ages that my void soul craves.

Void ? It is dead. My body perishes too. . . .

I stood by Drusus, by my brother's side,

And held his hand, and saw the wide world lose him

And all that made its emptiness seem dear.

Sire, I have striven too much and borne too much.

I pray you let me go--release me. »

186. Massie 1998, p. 140

187. Beulé 1868, p. 132

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c'est la plus belle demeure d'Italie. Un séjour de détente te fera du bien.

- Non. Je veux renoncer à touts mes charges, répliqua Tibère en bombant le torse.

- Renoncer à tes charges ? Si c'est une plaisanterie, elle est de très mauvais goût !

- Je ne plaisante pas. Je ne veux plus exercer mes fonctions. Je te présente ma démission.188

Lidia Storoni-Mazzolani évoque un événement ultérieur dont l'acteur principal était Caius César. Celui-ci, peu de temps avant sa mort, avait demandé à être libéré de ses fonctions pour devenir un simple particulier en Syrie. L'auteur suppose qu'il ait prononcé ces propos alors que sa maladie était arrivée à un seuil critique, ce repos étant une alternative à la mort, ou qu'il ait contracté, comme Tibère, un dégoût du principat et un attrait pour une civilisation que la politique n'aurait pas encore pu pervertir189.

Auguste semble dépassé par les événements : celui en qui il avait placé sa confiance vient de l'abandonner. Croyant d'abord à un propos dicté par la colère, il en aurait réalisé le sérieux après les quatre jours de grève de la faim de Tibère. Il est alors à l'apogée de sa puissance, et les événements ne font que le confronter à un échec imminent. Son bras droit l'a trahi, sa fille lui fait honte, il est à la fois le plus puissant et le plus malheureux des hommes190. Pensons également qu'en tant que prince, que maître du monde, il ait vu comme un affront odieux de s'opposer à lui, de lui rappeler qu'il n'était pas tout puissant et ne pouvait pas tout contrôler. C'est cette image que véhiculent Les Mémoires de Tibère :

- C'est une mission de la plus haute importance, et où tu récolteras beaucoup de gloire...

- Non, dis-je. J'en ai assez. J'abandonne.

- Comment ? Tu te rends compte de ce que tu dis ? C'est de la trahison !

- Non. En aucun cas. En aucun des sens du mot. Et si tu ne comprends pas, c'est bien malheureux, mais ma

décision est claire et irrévocable.

Je le laissai ainsi, la bouche ouverte. Je me demandais quand quelqu'un lui avait parlé ainsi pour la dernière fois.191

Livie a du être également bouleversée dans ses ambitions : comment a-t-elle réagi à l'exil de son fils, à l'abandon de celui qu'elle cherchait depuis son enfance à promouvoir ? Pour Charles Beulé, Tibère était comme mort pour elle du jour où il l'avait abandonné192. Mais si elle voulait conserver sa puissance après la mort d'Auguste, elle était forcée de trouver un intermédiaire entre elle et le pouvoir. A son retour de Rhodes, Tibère avait un nouveau moyen de pression sur sa mère : elle avait

188. Franceschini 2000, p. 267

189. Storoni-Mazzolani 1986, p. 98

190. Kornemann 1962, p. 28

191. Massie 1998, p. 136-137

192. Beulé 1868, p. 154-155

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eu le chance de le voir revenir vers elle une fois, elle ne pouvait permettre un nouveau départ et devait alors le protéger de son mieux193.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault