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Les politiques publiques de gestion de la diversité culturelle dans les processus de construction de la paix en afrique centrale


par JERVE SIGNI TSAGHO
Institut Des Relations Internationales du Cameroun  - Master 2 en Relations Internationales  0000
  

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Paragraphe 2: Les obstacles aux politiques publiques de gestion de la diversité culturelle en Afrique Centrale

Dans tout Etat, et pas seulement en Afrique, l'enjeu central de la compétition politique reste « le partage du gâteau national ». La différence avec les systèmes politiques occidentaux, c'est qu'en raison de la patrimonialisation de l'Etat africain, la compétition pour les ressources est beaucoup plus immédiate et directe185. Les sociétés africaines étant foncièrement plurielles, la diversité pose des problèmes de gouvernance politique et de gestion sociale dans tous les domaines. N'étant pas homogènes, elles produisent certes des idées progressistes, mais aussi des tendances régressives186. Les interactions entre l'État d'un côté, et la société et les différents groupes qui la composent de l'autre deviennent de ce fait essentielles pour gérer la diversité. Cela ne va pas sans toutefois rencontrer des obstacles qu'il convient de relever. Ceux-ci peuvent être de nature politique(A), économique(B), ou socio-culturel (C).

A- Les obstacles politiques à la gestion de la diversité culturelle en Afrique Centrale

La décolonisation en Afrique a produit des régimes et des systèmes politiques à la fois faibles et très centralisés, peu désireux ou incapables de remporter le soutien d'une population politiquement, socialement et culturellement peu soudée par le projet de construction d'un État-nation. L'Afrique cultive depuis longtemps le présidentialisme, un système de pouvoir

184 Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Département pour le développement international, Institut pour la justice et la réconciliation (IJR) et Institut de recherche et de dialogue pour la paix, Kigali, 2010.

185 Jean-François MEDARD, « Autoritarismes et démocraties en Afrique noire » in Politique Africaine no 43, 1991, P. 92-104.

186 Maurice KAMTO, « Le droit des peuples à disposer d'eux même : entre fétichisme idéologique et glissements juridiques », Annuaire Africain de droit international, vol 14, n°1, 2006, PP.219-243.

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fortement personnalisé, qui trouve nombre de ses célèbres représentants en Afrique centrale187. Dans ces États où les pouvoirs économiques et politiques se concentrent dans les mains de la minorité dirigeante, la rébellion devient le moyen de revendication le plus efficace. Celles-ci se traduisent le plus souvent par des guerres civiles ou par des conflits opposant des gouvernements à des groupes rebelles dont l'unique ambition est le contrôle du pouvoir politique188.

La mauvaise gouvernance semble laisser passer l'État comme un acteur d'insécurité pour la population civile jugée indésirable, nuisible ou dangereuse.189. En effet, l'organisation de l'État en Afrique Centrale est un enjeu politique, et une sorte de marchandise autour de laquelle gravitent les gouvernants et les fonctionnaires exploitant la faiblesse du système à leur propre profit. Comme partout en Afrique, l'État en Afrique centrale a été bâti sur un modèle d'administration très centralisé à la tête de l'État avec une concentration des pouvoirs entre les mains de l'exécutif, le chef de celui-ci étant par ailleurs chef du parti au pouvoir. Malgré des textes et des discours prônant la décentralisation, l'autonomisation des collectivités territoriales et des organisations politiques est perçue comme un risque d'affaiblissement du pouvoir central avec comme conséquence majeure la perte de ses « rentes » et autres avantages au profit des « autres ».

L'Afrique centrale presque dans son entièreté s'était plongée après les indépendances dans une forme de compétition politique entre les partis politiques ou les classes sociales qui privilégiaient la force comme principal moyen opératoire. Ainsi, plusieurs foyers de tensions se sont déclarés : Il s'agit de l'Angola, du Burundi, de la Centrafrique, du Congo Brazzaville, de la RDC, du Tchad ou de la RCA. Ces changements sont aussi bien l'oeuvre des militaires que des civils. La récurrence des conflits due à la course au pouvoir peut s'expliquer à travers les propos de l'ancien Secrétaire général des Nations-Unies, Kofi ANNAN: « L'État postcolonial, n'a pas renoncé aux mécanismes d'asservissement mis en place par l'État

187 Francis IKOME, Personnalisation of power, postregimes instability and human insecurity in Central Africa, Institute of insecurity studies of South Africa, cité par le Rapport du PNUD, L'Afrique Centrale, une région en retard,; Mars 2017.

188 Jean-François BAYART, Idem.

189 Alain DUBRESSON et Jean-Pierre RAISON, L'Afrique subsaharienne : une géographie du changement, Armand Colin, Paris, 1998. p. 32-37.

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colonial, mise en place de classes prédatrices qui aggravent la lutte pour le contrôle des moyens de l'État »190.

Le sentiment selon lequel le pouvoir politique est dominé par les membres d'un seul groupe peut être facteur de tensions et d'instabilité. Or l'on sait depuis ARISTOTE que les lois fortes protègent les plus faibles, que l'affaiblissement du règne de la loi favorise les plus puissants, et que les sociétés où le contrôle social est défaillant fragilisent les plus vulnérables. Ceci est particulièrement important dans les sociétés qui sont soumises à des tensions et revendications, ou qui sortent d'un conflit ou d'une crise, car cela montre que tous les groupes de la société, aussi bien ceux qui détenaient auparavant le pouvoir que ceux qui ont pu se trouver exclus des structures politiques sont représentés et peuvent jouer pleinement leur rôle dans l'élaboration des décisions les concernant. La participation effective et véritable de tous les groupes à la vie politique peut être un élément déterminant pour éviter les conflits violents.

Les turbulences et violences politiques qui affectent cycliquement une partie de l'Afrique Centrale sont aussi un symptôme des mutations et ajustements qui traversent les sociétés africaines confrontées à diverses contraintes internes aux cours de ces dernières décennies: Aspirations démocratiques, demandes d'autonomie politique pour motifs identitaires ou pour un meilleur partage des ressources, défis d'une adaptation au contexte de la mondialisation (dérégulation, questionnement et redéfinition du rôle de l'État). Ce schéma confrontant les acteurs locaux à l'État national en crise se trouve également travaillé par la montée de réseaux transnationaux (diasporas, entreprises multinationales notamment minières et pétrolières, puissances régionales ou internationales) organisés dans un jeu complexe d'alliances ou d'allégeance en tensions pour la conquête de ressources ou la redéfinition des rapports d'influence.

Les institutions étatiques dont les actions devraient être impartiales pour garantir l'égalité de tous devant la loi sont dès lors occultées. Elles perdent leur rôle d'équilibre des pouvoirs pour servir le monarque. Le contrôle de l'appareil de l'État est pour les forces politiques un enjeu stratégique de lutte pour le pouvoir dans la mesure où l'État est un acteur économique

190 Koffi ANNAN, « Les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durable en Afrique », Rapport ONU, New York, mai 1998.

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prépondérant, créant des monopoles dans des secteurs économiques clés dont les entreprises publiques entretiennent le mythe de l'État providence191.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus