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Les sociétés anonymes dans la législation haïtienne. Entre favoritisme et rigorisme.


par Maniela SEJOUR
Université d'Etat d'Haiti - Licence en droit 2012
  

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LISTE DES ABREVIATIONS

AAN : Autorité Aéroportuaire Nationale

AGD : Administration Générale des Douanes

APN : Autorité Portuaire Nationale

BNC : Banque Nationale de Crédit

BNRH : Banque Nationale de la République d'Haiti

BRH : Banque de la République d'Haïti

CCAH : Chambre de Conciliation et d'Arbitrage d'Haïti

CCIH : Chambre de Commerce et d'Industrie d'Haïti

CFI : Centre de Facilitation des Investissements

CIP : Carte d'Identité Professionnelle

DDHC : Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen

DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l'Homme

DGI : Direction Générale des Impôts.

IRI : Impôt sur le Revenu Individuel

IS : Impôt sur les Sociétés

MAEC : Ministère des Affaires Etrangères et des Cultes

MCI : Ministère du Commerce et de l'Industrie

MEF : Ministère de l'Economie et des Finances

MJSP : Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique

PDG : Président-Directeur Général

SA : Société Anonyme

TPI : Tribunal de Première Instance

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INTRODUCTION

La législation s'entend d'un ensemble des normes juridiques dans un pays ou dans un domaine déterminé. Elle est constituée de lois et d'autres règles à caractère obligatoire. C'est le droit positif qui prévoit et régit les activités dans un Etat donné et/ou dans un domaine spécifique1.

Le droit positif Haïtien est composé des règles de la constitution en vigueur, des lois, des décrets-lois, des décrets et d'autres règlements administratifs. A l'instar de ces normes proprement internes il y a les accords, traités, et conventions internationaux signés et ratifiés par Haïti. Selon l'article 276.2 de la Constitution du 29 Mars 1987, les traités, ou accords internationaux, une fois sanctionnés et ratifiés dans les formes prévues par la constitution, font partie de la législation du pays et abrogent toutes les lois qui leur sont contraires. Par ailleurs, grâce à l'influence du droit anglo-saxon sur le droit romano-germanique, la jurisprudence tient une place de plus en plus importante dans la législation. La règle de droit édictée par le législateur est théorique tant qu'elle n'est pas appliquée par le juge. Il revient à ce dernier d'interpréter et de compléter les manquements de la loi dans ses jugements. Ainsi, les arrêts de la Cour de Cassation peuvent servir de précédents et même d'arguments pour des jugements ultérieurs. C'est ainsi qu'on arrive à parler de droit jurisprudentiel. D'où l'inclusion de la jurisprudence dans le droit positif.

La législation haïtienne fait autorité sur toute l'étendue du territoire car la loi est générale et impersonnelle. Elle est de ce fait opposable à toute personne, physique ou morale, sujet de droit haïtien ayant son domicile en Haïti. Il faut souligner que pour les personnes morales, certaines conditions légales doivent être remplies pour qu'elles acquièrent la personnalité juridique et devenir des sujets de droit.

Avant le 20e siècle, seules les personnes physiques faisaient véritablement objet de la législation. Elles payaient l'impôt sur le revenu individuel (IRI) et jouissaient des prérogatives du droit subjectif. Avec le développement du secteur économique et financier au 20e siècle, l'impôt sur les sociétés (IS) a été créé à l'intention des sociétés commerciales aux Etats-Unis, puis dans d'autres pays2. Bien sur, les privilèges qui vont avec n'ont pas manqué de surgir. Avec la

1 - REY-DEBOVE, Josette (sous la direction de) : Le Robert Méthodique, édition Le Robert, Paris, 1990. 2- TROTABAS, Louis et COTTERET, Jean-Marie : Droit Fiscal, 8e édition Dalloz, Paris, page 8.

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survenue de la loi fiscale, la législation venait à s'occuper des personnes physiques et des personnes morales en ce qui a trait à leurs droits et à leurs obligations. Haïti n'a pas trainé le pas. Dès lors, le droit haïtien s'est imposé aux simples citoyens comme aux sociétés commerciales et leurs accorde à tous les deux des privilèges.

En Haïti, la loi prévoit deux types de sociétés commerciales :

1- Les sociétés de personnes : sociétés en nom collectif et sociétés en commandite simple. (Article 40 du code de commerce).

2- Les sociétés de capitaux : sociétés anonymes et sociétés en commandite par actions. (Article 41 du code de commerce).

En ce qui a trait aux sociétés par actions, seules les sociétés anonymes ont une existence réelle selon les prescrits de l'article 20 du code de commerce. Les sociétés de personnes sont dites transparentes et celles de capitaux, opaques. Elles ne bénéficient pas du même régime fiscal, ni des mêmes privilèges. Elles sont régies différemment car selon la doctrine, les enjeux et les intérêts ne sont pas forcément similaires.

Les faveurs accordées aux sociétés anonymes concernent les droits et privilèges exorbitants de fonctionnement dont ces sociétés jouissent. Elles sont seules à jouir des prérogatives des droits subjectifs pour les personnes morales. Elles jouissent du droit de propriété dans toutes ses dimensions, avec quelques nuances pour les sociétés anonymes étrangères établies en Haïti ou y ayant une succursale ou une filiale. Plusieurs auteurs sont d'avis qu'elles sont le mode d'organisation qui a le plus accès aux faveurs spéciales de la loi. Elles ont également des spécificités exclusivement attribuables à elles sur tous les aspects considérés, de la constitution à la dissolution.

Paradoxalement, il y a un rigorisme dans le régime fiscal haïtien quant aux sociétés anonymes. Elles sont les grandes perdantes du fisc par rapport aux autres types de sociétés. L'un des grands principes du droit fiscal est l'égalité devant l'impôt. C'est un principe constitutionnel1. Suivant ce principe, il n'y a pas de discrimination devant le fisc. Or, les sociétés anonymes sont désavantagées par rapport aux sociétés de personnes. Tant les sociétés anonymes ont des

1 - Article 219 de la Constitution du 29 Mars 1987.

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avantages, surtout dans le cadre des droits patrimoniaux, tant elles subissent l'inégalité devant l'administration fiscale. Et cette discrimination devant l'administration fiscale se situe à un double niveau. En premier lieu, il y a une disparité entre l'impôt sur le revenu individuel, et l'impôt sur les sociétés. Les sociétés de personnes sont soumises à l'impôt sur le revenu individuel, car elles sont considérées transparentes. Celles de capitaux, sont assujetties à l'impôt sur les sociétés. Deuxièmement, il y a la question de la double imposition économique. La société anonyme est imposée, et chaque actionnaire est distinctement imposé sur ses revenus provenant de toutes les sources, dont les fameux bénéfices industriels et commerciaux de la société dont il est actionnaire.

Ces rigueurs sur l'imposition de la société anonyme méritent l'attention dans la mesure où elles mettent en évidence le système de deux poids deux mesures qui existe dans leur régime juridique. Plus subtil encore, ce système donne à la fois des faveurs et met des exigences dans tout ce qui a un rapport à la société anonyme. De leur constitution à leur dissolution, la loi fixe des conditions irritantes et éreintantes qui pourraient décourager les plus convaincus, simultanément, il y a des avantages qui leur sont exclusivement accordées. Les procédures de constitution sont lourdes et les règles et conditions de la vie sociale d'une société anonyme ne sont pas des plus souples. Mais là aussi, il y a des privilèges de fonctionnement. Les droits et les obligations sont assujettis à des règles souples, et à des règles rigides.

Cette dichotomie législative interpelle les forces vives de la nation. En effet, on s'interroge de plus en plus sur la pertinence de certains prescrits légaux ou encore, de leur justesse. Les procédures de constitution, les règles de fonctionnement, l'imposition, rien n'échappe à la remise en question. On n'est pas encore arrivé à contester la jouissance des prérogatives spéciales, mais le débat fait rage sur les rigueurs contraignantes et le déphasage entre les deux. Une fois de plus, on se posera la question : « Que gagne l'Etat à appliquer un régime juridique à double tendance sur les sociétés anonymes?» Et une fois de plus, la question des sociétés anonymes sera discutée.

Les actionnaires des sociétés anonymes, ceux à qui elles profitent, et tous ceux qui ont un intérêt généralement quelconque dans leur essor s'opposent avec force au rigorisme imposé aux S.A. Ces partisans ont des arguments assez convaincants pour qu'on élimine le gros des charges fiscales et autres obstacles à l'épanouissement de leurs sociétés sans pour autant renoncer aux intéressants privilèges qui leur sont accordés. Ils soutiennent le principe de l'égalité devant

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l'impôt et le fait qu'on doit faciliter les investissements en assouplissant les procédures trop sévères. Ne doit-on pas alléger les procédures ? La facilitation des investissements peut-elle se réaliser quand les contraintes sont aussi nombreuses pour constituer et faire fonctionner une S.A ? Que fait-on de l'égalité devant le fisc ? Pourquoi veut-on discriminer les S.A par le particularisme du régime juridique qui les cadre ? Et d'ailleurs pense-t-on que les S.A sont si particuliers qu'il leur faut un régime spécial tout en avantages et en obstacles, surtout en obstacles ? Est-ce le moment, en ces temps de compétition internationale sans pitié de restreindre l'accès aux investissements ? Les contraintes imposées aux S.A n'avantagent en rien le pays, pensent-ils.

Il se trouve cependant que les législateurs, administrateurs et autres acteurs du fisc ou du gouvernement, ont également des arguments de taille. Aujourd'hui on reconnait les vertus de certaines rigueurs qui découragent les fraudeurs et ceux qui veulent bénéficier de tous les avantages sans jamais avoir à respecter leurs obligations. C'est tout à fait légitime d'octroyer des faveurs aux S.A., car, elles jouent un grand rôle dans la vie financière et économique du pays, mais elles doivent remplir toutes les exigences légales que requière leur statut. Qu'entend-on par discrimination ? Les S.A. ne doivent-elles pas contribuer plus grandement de par l'importance et le volume de leurs activités ? Ne doit-on pas mettre des barrières dans les procédures pour éviter la prolifération de petites affaires douteuses qui ne veulent que profiter des faveurs spéciales de la loi pour les S.A. ? Pourquoi ne se plaint-on pas des privilèges sans précédent qui leur sont donnés ? Ne peut-on pas comprendre que les lois tiennent en général compte des réalités de l'objet sur lequel elles portent ?

Il est à parier que la discussion sera vive sur la spécificité du régime juridique des sociétés anonymes. Et comme on peut le constater, répondre à la question « Pourquoi cette dualité de la législation haïtienne sur les sociétés anonymes ? » est loin d'être une tache facile.

Les sociétés anonymes qui peuvent être proprement commerciales (celles dont l'objet est le commerce), industrielles, financières ou de service sont considérées comme le coeur des principales activités économiques réalisées en Haïti. Elles sont doublement importantes pour ce secteur d'activités. Uno, elles engendrent la création d'emplois directs et indirects. Secundo, elles fournissent des prestations fiscales. Ce qui, bien entendu, favorise la redistribution des richesses en termes d'érection de structures sociales et d'infrastructures destinées à l'usage de tous. De ce fait, ces sociétés participent activement au circuit économique et aident à

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l'établissement de structures de base grâce à leur quota dans les finances et le trésor publics. Et on n'est pas sans savoir l'importance capitale de l'économie pour le développement d'un pays.

Cependant, nonobstant notre intérêt pour cet aspect de la question, ce n'est pas seulement les enjeux et perspectives économiques qui ont nourri notre préoccupation. C'est plutôt le cadre légal qui les contient qui a le plus suscité notre intérêt. Quand une partie de la législation présente de sérieux avantages pour les S.A, l'autre partie les défavorise. C'est ce traitement spécifique -(qu'il consiste en faveurs ou en rigueurs) qui accompagne la constitution, régit le fonctionnement, détermine les droits, et fixe les obligations- des sociétés anonymes par la législation haïtienne qui nous intéresse dans ce travail de recherche. Notre étude portera sur ce double aspect de la question, ou du moins, ce régime particulier de favoritisme et de rigorisme dans la constitution, la vie sociale, les droits et les obligations des S.A.

On croit que la législation singulière attribuée aux sociétés anonymes est due à leurs caractéristiques typiques. Nos recherches vont confirmer ou infirmer la véracité d'une telle hypothèse. Mais peut importe, on veut dans ce travail démontrer la nécessité de la mise en place d'une législation univoque et modernisée sur les sociétés anonymes. Pour ce faire, on utilisera simultanément les méthodes historique, analytique, exégétique, comparative et quantitative dans les quatre chapitres qui le constituent. Le premier chapitre présentera la constitution, le deuxième abordera la vie sociale, le troisième parlera des droits et le quatrième étalera les obligations fiscales des sociétés anonymes. Puisse ce travail porter sa contribution dans l'incitation au changement en Haïti !

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore