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De l'avoir pour la valorisation de l'être. essai de compréhension de l'être et l'avoir chez Gabriel Marcel


par Ange TEZANGI AZAKALA
Université Saint-Augustin de Kinshasa - Grade en philosophie 2020
  

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II. 3. L'AMBIVALENCE DE L'AVOIR

De l'opposition susmentionnée, se dégage une tension entre l'intériorité et l'extériorité qui s'exerce dans la personne impliquée dans la relation de l'avoir. Cette tension naît du choc entre l'extériorité qui caractérise tout avoir et de l'effort d'intériorisation déployé par l'homme face au désir de posséder et surtout de mal gérer cet avoir. Il est tout à fait certainqu'il y a un lien entre l'homme et la chose qu'il possède, ce lien n'est pas comme stipule Marcel, une simple conjonction externe, cette chose atteint ce dernier dans son intériorité et s'identifie essentiellement à lui57(*), comme déjà présenté. En effet, Gabriel Marcel nous instruit à ce propos en ces termes : « ce bien en tant qu'une chose soumise aux vicissitudes propres aux choses, peut-être perdu, détruit. Il devient ainsi le centre d'une sorte de tourbillon de craintes, d'anxiétés, par-là se traduit précisément la tension liée (sic) à l'ordre de l'avoir »58(*).

D'autre part, un secret comme cas typique ne peut être traité comme un avoir que dans la mesure où le sujet le garde ou qu'il peut le trahir : c'est en même temps qu'il est sien et mérite d'être exposable, arrachable. Le secret entendu au sens de l'engagement et tel qu'employé ici ne fait pas mention de notre réflexion dans ce travail. Ainsi, Marcel estime que « l'avoir ne se situe donc pas du tout dans un registre(...) où l'intériorité et l'extériorité ne se laissent plus réellement séparer(...) ce qui importe, c'est la tension entre l'une et l'autre »59(*). Ainsi, cette exposition pour se dérouler, nécessite la présence d'autrui. Remarquons en outre que cet autre que moi-même peut être considéré comme une menace qu'il faut écarter afin de garantir la protection de son bien.

II. 4. AVOIR ET SUPPRESSION DE L'AUTRE

Dans l'opposition qui marque le bien possédé, nous supposons nécessairement la présence du qui et du quid, c'est-à-dire qu'il n'y a d'avoir que pour un sujet60(*). Mais cette permanence se veut par essence menacée du fait même de la tension avec l'autre. Dans la dynamique des possessions, nous percevons comme menace l'autre en tant qu'autre, l'autre qui peut être le monde en lui-même et en face duquel on se sent douloureusement soi. Car, comme le dira Marcel, « cet objet exposé qui est mien peut être arraché ou altéré avec l'autre »61(*). Pour garder son bien et éviter qu'il soit arraché, il faut créer l'indifférence vis-à-vis de l'autre, créer une attitude de sabotage entendu ici, un renvoi dos à dos, car l'un est jugé archaïque et conflictuel et l'autre contemporain et souple. Cela entraîne également la crise de l'être.

Dans cette lutte, l'homme devient le centre de tant d'inquiétudes et de craintes. Et dans la mesure où l'avoir peut lui être arraché, le possesseur tente de l'incorporer ; de s'y attacher fermement, de former avec lui un complexe unique et indécomposable, supprimant ainsi l'espace pour l'autre, comme le dit Marcel, en manifestant des comportements d'indifférence De cet attachement, il résulte que lorsque l'avoir n'est pas maintenu dans son rôle de dépendance, le sujet possesseur est asservi, voir exclu.

Par ailleurs, l'homme dans sa possession se trouve souvent en face de choses parmi lesquelles certaines  entretiennent avec lui des relations d'une nature spéciale et mystérieuse62(*). Ces biens ne lui sont pas seulement extérieurs, mais aussi intérieurs. G. Marcel le souligne quand il prône que : « l'homme s'attache à ces objets comme s'il y avait entre ceux-ci et lui communication par dedans mais cette communication pose problème où l'homme ne la gère pas bien et la laisse sublimée sur son être63(*). En d'autres mots, nous pouvons dire que les objets dont dispose l'homme l'atteignent. Et dans la mesure où l'être est attaché à ces derniers sans maîtrise, il est manifeste qu'ils exercent sur lui une puissance que cet attachement même leur confère et qui s'accroît avec lui.

Notons en plus que l'avoir implique le pouvoir de disposer. C'est pourquoi l'homme ne peut disposer de son bien que dans la mesure de son pouvoir. Ainsi posséder un bien présuppose en effet, les capacités et les limites d'appropriation. De cette façon, le bien ou l'avoir fait de l'homme un être puissant, doué de pouvoir et de force qui influe sur les autres. En d'autres termes, si la personne qui possède quelque chose (un bien) tente toujours «  d'intérioriser et s'incorporer à l'avoir en s'y accrochant sans mesure, son être devient assimilable à ce bien »64(*). Dans ce sens, « l'avoir tend à se sublimer, à se transmuer en être »65(*).

Il en va de même dans une situation ouvrière causée par la technique. En effet, dans un monde soumis au primat de la technique, les ouvriers sont réduits non seulement à un ensemble de fonctions, ou simplement assimilables à la machine ; mais encore, la majeure partie des ouvriers ne se rendent plus compte de leur état, soit ils ont perdu la capacité et/ou la possibilité de réfléchir sur leurs propres conditions, soit ils sont séduits et aliénés, par l'émancipation de la technologie.

Ce faisant, la mentalité technologique crée un sous-homme ayant perdu la capacité de réflexion et de discernement dont les attributs sont caricaturés de la vie contrefaite. On a ainsi tendance à oublier dans le rapport politique, économique, et industriel la considération de la dignité de l'autre en tant que personne. Tout dépend alors de la conception qu'on se fait de la personne. Dans un tel monde,« l'archétype humain, c'est l'homme dont le rendement est objectivement discernable qui vaut tant de dollars » c'est-à-dire, en fin de compte, celui dont l'activité est plus assimilable à celle d'une machine. C'est sur le modèle de la machine que l'homme est plus couramment pensé(...) »66(*). Partant de ce constat, l'ouvrier se sent mal à l'aise dans son existence, dépouillé de son ipséité, comme le dira G. Marcel. La dégradation menace l'intégrité humaine, tandis que la technique tente de la réduire à rien. L'homme moderne se trouve devant un embarras de choix, ne sachant plus à quoi s'en tenir entre l'important et l'accessoire.

* 57G. MARCEL, Être et avoir, op.cit., p. 201.

* 58Ibid., p. 203-204.

* 59Ibid.

* 60 Cf. G. MARCEL, Être et Avoir, op.cit. p. 204.

* 61Ibid.

* 62 Cf. Ibid.

* 63Ibid., p. 206.

* 64G. MARCEL, Être et avoir, op.cit., p. 207.

* 65Ibid., p. 208.

* 66 R. TROISFONTAINES, op.cit., p. 86.

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