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La légalite des moyens de preuve dans le procès pénal en droit français et libanais


par Ali Ataya
Ecole doctorale 88 Pierre Couvrat (Poitiers) - Droit et Sciences Politique, Université du Maine - Thèse de doctorat en Droit privé 2013
  

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C. La légalité va réduire strictement la liberté de preuve

39. La confrontation nécessaire entre légalité et liberté. Il s'agit d'une confrontation inévitable et nécessaire à ne pas négliger dans l'État de droit entre le principe de la liberté de la preuve pénale et celui de la légalité. Mme Marie-Emma Boursier affirme l'exigence absolue du respect du principe de la légalité dans la recherche et l'administration des preuves pénales qui sont régies par les principes de liberté et de légalité : « il est établi que

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la recherche de la preuve pénale doit respecter la légalité ». Cependant, tant que la preuve pénale est libre, la question logique qui se pose est : pourquoi le principe de la légalité de la preuve pénale est-il placé en confrontation avec la liberté de la preuve ? En vérité, la liberté de la preuve pénale ne peut pas être une liberté absolue, extrême et sans restriction pour la simple raison que la liberté excessive dans la recherche de la preuve pénale menace les droits et les libertés des individus protégés par la loi, soit avec des dispositions constitutionnelles soit avec des lois communes. Par conséquent, cette liberté dans la recherche de la preuve doit être

organisée avec une légalité juridique 296 , ou, en d'autres termes, elle doit être permise et basée sur un texte juridique lui conférant une légalité. Par conséquent, le rôle du Code de procédure pénale se souciant essentiellement du sujet de la preuve pénale devient évident, étant donné que les lois sont le seul déterminant des procédures que les autorités publiques et judiciaires

293 Cass crim. 19 juin 1989, B.C., n° 261, p. 648.

294 H. Leclerc, « Les limites de la liberté de la preuve. Aspects actuels en France », in R.S.C., 1992, p. 15.

295 M.-E. Boursier, Le principe de loyauté en droit processuel, Dalloz, 2003, p. 96.

296 V. en ce sens : Ph. Conte et P. Maistre Du Chambon, Procédure pénale, 4e éd., Armand Colin, Paris, 2002, n° 64, p. 40 : 3enwan 3an « Le principe de la légalité de la preuve : « En amont de la question de la détermination tant des modes de preuve que de la valeur de chacun d'eux, se pose celle de savoir comment on procède à la recherche et à l'administration des preuves devant les juges : il n'est pas tout d'admettre telle preuve et de l'abandonner à l'appréciation souveraine du juge, encore faut-il savoir comment elle a été obtenue pour décider s'il pouvait en être fait état devant un tribunal. Cette difficulté est double : faut-il, tout d'abord, réglementer la recherche de la preuve, pour lui assigner certaines limites ? La réponse est évidente : la fin ne justifiant pas les moyens, la procédure pénale française consacre le principe de la légalité, corollaire du principe de la liberté de preuve. ».

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ont le droit de mener et de réaliser dans le but de rechercher la preuve. Cela signifie-t-il que la recherche de la preuve ne dispose pas de liberté dans le cadre du droit pénal ? Évidemment pas, car la preuve pénale est libre, notamment dans le choix par l'autorité publique et judiciaire chargée de la recherche de la preuve pénale des moyens sélectionnés parmi plusieurs méthodes et procédures permises juridiquement dans les textes de lois, ou en d'autres termes

parmi les moyens permis explicitement par la loi298. Par conséquent, la liberté de la preuve est pratiquée ou appliquée en conformité avec les limites fixées par le législateur, ou par les principes juridiques généraux. Conformément aux idées précédentes, le principe général est la liberté de la preuve dans le domaine pénal, en tenant compte des contraintes et des contrôles contenus dans le principe de la légalité des moyens et des procédures au cours de la recherche et la production de la preuve pénale. Il convient de préciser que ces limites ne constituent pas une exception à la liberté de la preuve, mais plutôt des restrictions et des contrôles associés à celle-ci et l'entourant en permanence sans s'en éloigner. Ils sont assez différents des exceptions relatives au principe de la liberté de la preuve pénale décidées par le législateur à titre d'exception, et qui sont de deux types : celles qui sont liées plus précisément à la façon d'obtenir la preuve d'une infraction spécifique et celles qui concernent la prédétermination de la valeur probante de quelques preuves. Ces deux hypothèses ne se rapportent nullement, de près ou de loin, au principe de la légalité de la preuve pénale, ce qu'il faut prendre en considération avec soin et prudence afin d'éviter de confondre le principe de

297 V. en ce sens : le Conseil constitutionnel français a considéré dans la décision n° 2010-25 QPC du 16 septembre 2010 : §10. « Considérant, en premier lieu, que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale ; que, s'agissant de la procédure pénale, cette exigence s'impose notamment pour éviter une rigueur non nécessaire lors de la recherche des auteurs d'infractions » ; §11. « Considérant, en second lieu, qu'il appartient au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d'autre part, la protection des droits et libertés constitutionnellement garantis, au nombre desquels figurent le respect de la vie privée, protégé par l'article 2 de la Déclaration de 1789, le respect de la présomption d'innocence, le principe de dignité de la personne humaine, ainsi que la liberté individuelle que l'article 66 place sous la protection de l'autorité judiciaire ; qu'ainsi, si le législateur peut prévoir des mesures d'investigation spéciales en vue de constater des crimes et délits d'une gravité et d'une complexité particulières, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs, c'est sous réserve que ces mesures soient conduites dans le respect des prérogatives de l'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle en vertu de l'article 66 de la Constitution, et que les restrictions qu'elles apportent aux droits et libertés constitutionnellement garantis soient nécessaires à la manifestation de la vérité, proportionnées à la gravité et à la complexité des infractions commises et n'introduisent pas de discriminations injustifiées ».

298 V. R. Legros, «La preuve légale en droit pénal», in J.T., Editeurs : maison Ferd. Larcier S.A., Bruxelles, numéro 5055, 28 octobre 1978, pp. 589-595, V. spec. p. 591 : « En droit pénal comme en droit civil, la loi a adopté un régime légal de preuves : d'une part, elle détermine, dans les deux domaines, un ensemble de preuves admises par elle, les éléments de preuves que le juge peut retenir, elle exige que ces preuves soient administrées suivant certaines formes, et, parfois, elle précise la force probante à leur attribuer : d'autre part, et toujours dans les deux domaines, la loi laisse au juge une certaine liberté d'appréciation indispensable, à ne pas confondre ni avec l'idée d'une preuve libre ou morale, ni avec l'intime conviction ».

la légalité de la preuve pénale avec les quelques exceptions contenues dans la loi sur le principe de la liberté de la preuve. La problématique soulevée dans la liberté de la preuve pénale donne une réponse claire et sans équivoque à la question suivante : quels sont les contraintes et les contrôles entourant le principe de la liberté de la preuve pénale?

§ 2. La légalité, une garantie procédurale substantielle

40. Pas de liberté sans légalité dans la recherche des preuves. La légalité dans la recherche et l'administration de la preuve pénale constitue un moyen de protection des droits substantiels parce que recourir à une notion absolue ou souveraine du principe de la liberté dans la recherche de la preuve met en péril les différents droits qui composent le droit à un procès équitable. Il est reconnu que le principe de la liberté de la preuve comporte

normalement des limites imposées par des principes généraux non écrits 299 . La légalité comme principe essentiel de la procédure pénale tient une telle place dans le droit de la preuve que « le principe de la liberté de la preuve pénale [...] apparaît finalement d'une application

circonscrite »

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. En effet, au-delà de la seule légalité formelle, la légalité de la preuve pénale

implique le « respect des valeurs fondamentales de la civilisation »

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. Une mesure d'enquête

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visant à rechercher des éléments de preuve peut menacer les droits de l'individu si elle est absolument libre. Le principe de légalité représente la frontière entre l'efficacité de la recherche de preuve et le respect des droits substantiels qui doivent être protégés. La légalité dans la recherche de la preuve est considérée comme un correctif nécessaire à la liberté de la preuve en matière pénale en assurant plusieurs garanties procédurales dans l'intérêt de la personne poursuivie. Le prévenu ou l'accusé doit naturellement bénéficier de plusieurs garanties essentielles qui sont strictement liées au droit de la preuve dont la violation ou l'inobservation entraîne l'illégalité de la preuve.

299 V. R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, t. 2, Procédure pénale, 4e éd., 1989, n° 129, p. 162 ; G. Stefani, G. Levasseur et B. Bouloc, Procédure pénale, 23e éd., Dalloz, 2012, n° 145, p. 124 ; Ph. Conte et P. Maistre Du Chambon, Procédure pénale, 4e éd., Armand Colin, Paris, 2002, n° 48, p. 32 ; P. Bouzat, « La loyauté dans la recherche des preuves », in Mélanges Hugueney, 1964, pp. 155 et s. ; H. Leclerc, « Les limites de la liberté de la preuve : aspects actuels en France », in R.S.C., 1992, pp. 15 et s.

300 S. Guinchard et J. Buisson, Procédure pénale, 9e édition, LEXIS NEXIS/LITEC, 2013, n° 552, p. 572.

301 Stefani, G. Levasseur et B. Bouloc, Procédure pénale, 23e éd., Dalloz, 2012, n° 145, p. 124.

. A. L'encadrement par la loi des mesures portant atteinte aux droits fondamentaux

41. Les règles de la procédure pénale visent à garantir les libertés individuelles. Le procès criminel constitue « un instrument de recherche de la vérité permettant la punition du

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coupable et la libération de l'innocent ». Ce qui précède est vrai, mais incomplet, parce que la procédure pénale vise à protéger la société par la mise en oeuvre du droit pénal afin de découvrir l'infraction et sanctionner son auteur, mais vise également à garantir la liberté individuelle et les droits de défense de la personne poursuivie qui est présumée innocente tant qu'elle n'est pas déclarée coupable. Il faut donc lui permettre d'exercer ses droits de la défense

et de se protéger contre la menace d'un procès pénal

303

. Il est possible de dire que le

principe de la légalité de la preuve pénale, dans son aspect formel ou matériel est devenu une garantie procédurale fondamentale irremplaçable vis-à-vis du suspect, défendeur ou accusé, le protégeant personnellement ainsi que sa libre volonté durant toutes les phases du procès pénal, en protégeant également ses droits et lui permettant enfin de les exercer. « Les enquêteurs sont tenus au respect des principes fondamentaux et des textes notamment ceux qui organisent le

respect de la vie privée ou encore les droits de la défense »

304

. Il est donc constaté que le

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principe de la légalité de la preuve pénale est la seule garantie du respect des droits de l'homme, tant en termes d'intégrité physique que de volonté, ce qui l'empêche donc d'être forcé à fournir des preuves contre lui ou contre son gré, et entrave également la violation de son droit à la vie privée ou encore de ses droits à la défense légalement consacrés

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et relatifs à la preuve pénale.

302 P. Arguin, « Les règles procédurales entourant la recevabilité des déclarations extrajudiciaires », in Les Cahiers de droit, vol. 32, n° 1, 1991, pp. 103-152, V. spec. p. 105.

303 V. en ce sens : M. Trevidic, « La recherche de la preuve en droit français », in La preuve au coeur du débat judiciaire: discovery, cross-examination et expertise contradictoire regards croisés franco-américains, Colloque du 24 mars 2010 organisee par l'association France-Ameriques (a.f.d.d.) : « L'une des fonctions principales du code de procédure pénale est d'ailleurs de protéger les citoyens contre la puissance publique, de mettre des limites aux importants pouvoirs d'investigation de celle-ci ».

304 V. Lesclous, « Enquête préliminaire », in J.-Cl. Procédure pénale, Art. 75 à 78, Fasc. 20, n° 49.

305 V. H. Leclerc, « Les limites de la liberté de la preuve. Aspects actuels en France », in Revue de science criminelle, 1992, p. 15 : « La preuve est libre mais la doctrine est unanime : toutes les preuves ne sont pas admissibles et tous les moyens ne sont pas bons pour les réunir. La loi fixe des limites. La morale et les principes aussi ».

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon