1.1.4. Intégration socioéconomique des
refugiés
Aujourd'hui, l'intégration des réfugiés
est au coeur des préoccupations des États et des organismes
internationaux. En effet, le terme « intégration »
résume les différents processus d'inclusion économique,
spatiale et culturelle des individus dans la société d'accueil,
malgré qu'elle soit une lourde charge pour les zones d'accueil.
Pour WALI WALI C (ibid.) le terme intégration est
utilisé pour l'incorporation progressive des étrangers dans une
société d'accueil sans que cela soit une fusion, c'est un
accompagnement pour que la personne qui arrive puisse trouver sa place dans la
société d'accueil en vue de parvenir à une cohabitation et
une acceptation mutuelle entre lui et les populations autochtones.
C'est entre 1960 et 1990 que la solution de l'installation sur
place ou l'intégration a été largement adoptée par
le HCR pour promouvoir l'autonomie de réfugiés sur le plan
économique et social, car leur intégration dans le pays d'accueil
permet au HCR de mettre fin à ses activités (BEIGBEDER Y,
1999),
Pour faciliter l'intégration des réfugiés
et leur protection internationale et pour rechercher des solutions durables
à leurs problèmes, plusieurs institutions ont vu le jour. Tout
d'abord à la fin de la seconde guerre mondiale, l'Organisations des
Nations Unies (ONU) met en place l'Organisation International des
Réfugiés(OIR) en 1947 pour apporter aide et assistances aux
personnes qui fuient les guerres (BELLO AMADOU M, 2018).
En 1951 s'en est suivie la convention de Genève et son
protocole additionnel en 1967, à New York, qui a été
élaboré et signé afin de corriger les limites de la
Convention de 1951 (idem).
Á l'échelle de l'Afrique plusieurs
conférences régionales ont été convoquées
par rapport à l'afflux de réfugiés et de leur installation
sur place :
- En 1967 s'est tenue à Addis-Abeba une
conférence internationale qui souligne les aspects légaux,
économiques et sociaux du problème de réfugiés en
Afrique ;
- En 1969, a eu lieu l'assemblée de l'Organisation de
l'Unité Africaine(OUA) régissant
les aspects propres aux problèmes de
réfugiés et de leur installation en Afrique ;
- En 1979, s'est tenu la conférence d'Arusha(Tanzanie)
pour évoquer également la question de l'intégration et de
l'autonomie de réfugiés ;
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- En 1981 et 1984 se sont tenues respectivement deux
conférences à Ciara (Genève) pour débattre sur
l'assistance aux réfugiés et aux pays d'accueil pour faciliter
l'intégration.
En outre, conformément à la convention de
Genève de 1951, le HCR propose trois solutions durables pour les
réfugiés. Ces solutions sont le rapatriement librement consenti :
qui consiste à faire retourner les réfugiés dans leurs
pays d'origine avec leur consentement, dans la sécurité et la
dignité ; ensuite l'intégration sur place : il s'agit d'aider les
réfugiés à s'intégrer dans le premier pays
d'accueil ; et enfin la réinstallation qui consiste à orienter
les réfugiés vers un autre pays qui accepte de les accueillir
à titre permanent. Cependant, en réponse aux inquiétudes
des pays du Nord (bailleurs du HCR) qui ne sont plus prêts à
envisager la réinstallation en masse de population refugiée, le
HCR propose que le rapatriement soit désormais la solution durable
privilégiée,(FRESIA M, idem ).
Et selon toujours le même auteur, pour s'intégrer
les réfugiés utilisent les liens de solidarités locales et
parentales et aussi les liens de solidarités conventionnelles nationales
et internationales.
Pour VATZ LAAROUSSI M (2009), plusieurs opportunités
peuvent faciliter l'intégration des réfugiés au sein de la
population locale notamment l'emploi, le contact social, le logement
l'accès aux services de santé et l'éducation. Le
réseau social est particulièrement le facteur important dans le
cadre de leur intégration, il peut être organisé ou non et
les relations à l'intérieur des réseaux sont
diversifiés, (LEMIEUX V, 1999).
Les réseaux se forment dès l'arrivée des
immigrants, lors des premiers contacts avec les résidents de la
collectivité d'accueil et avec les organismes d'accueil. La formation
continue tout au long de leurs parcours migratoires. Ces réseaux sont
constitués de cinq groupes : la famille, les amis, les parrains,
l'hôte et les nouveaux amis du même groupe culturel (VATZ LAAROUSSI
M, idem.).
Plusieurs chercheurs notamment LASSAILLY JACOB V (ibid.),
montrent que l'intégration est relative aux réfugiés selon
leur temps d'arrivée, leur ethnicité et l'espace d'accueil. Il
est plus facile pour les réfugiés qui arrivent en premier dans le
lieu d'accueil de s'intégrer que ceux qui viennent par la suite.
DAROIS J (1989) montre dans ses recherches comment les
réfugiés d'Asie au Québec se sont intégrés
en fonction de leur date d'arrivée dans la population hôte. Par
contre pour CHARLAND M(2006) les réfugiés s'intègrent
à travers l'intervention des organismes humanitaires dans leur processus
d'intégration, c'est via ces organismes que les réfugiés
tissent des relations avec la population locale.
Lorsque les réfugiés traversent une
frontière, ils se dirigent vers les villages et les villes où se
trouvent leurs familles. Quelle qu'en soit la destination, le choix du
lieu ne se fait pas au hasard car les réfugiés empruntent des
itinéraires familiers (COLEMAN L, 2014), l'acceptation des
refugiés par les autochtones dépendent des proximités
culturelles et linguistiques.
D'après VATZ LAAROUSSI M (ibid.), la possibilité
d'emplois et de revenus satisfaisants, le sentiment d'être reconnu
professionnellement et socialement, la présence d'un réseau de
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soutien, la proximité d'un milieu scolaire,
l'accès à des services de santé, la présence
d'organismes d'accueil et d'intégration disponibles et efficaces,
l'ouverture des organismes ou instances locales à la participation des
migrants représentent des facteurs d'intégration et de
rétention.
Ainsi, derrière l'intégration formelle
recommandée par les institutions nationales et internationales, se forme
un autre type qui se fait de manière informelle à travers des
liens sociaux ou familiaux. Il est important de soutenir les pays qui
choisissent de régler la situation des réfugiés au plan
local à travers l'intégration qui est une décision
souveraine et une option devant être prise par les États d'accueil
sur la base de leurs obligations en vertu des traités et des principes
relatifs aux droits humains (BEIGBEDER Y, 1999).
C'est pourquoi depuis quelques années le HCR en
collaboration avec le Niger met en oeuvre une politique tournée vers
l'installation sur place comme solution d'accueil de longue durée. Cette
forme d'assistance est décrite par BEIGBEDER Y (idem), en ces
termes : « Dans la mesure du possible, l'aide à l'installation
sur place prend la forme de projet visant à promouvoir l'autonomie des
réfugiés sur le plan socioéconomique et leur
intégration dans le pays d'asile »
En effet, l'intégration locale comporte plusieurs
dimensions notamment économique, sociale, politique et culturelle...etc.
Cependant, selon COLEMAN L (idem) les facteurs socioéconomiques sont
indispensables à l'intégration des immigrants, donc ce qu'il faut
comprendre à ce niveau est que la question de l'emploi et la
présence de personnes issues du même groupe (familles, amis et
membres de la communauté) sont les facteurs principaux
d'intégration.
Le «capital d'employabilité » est la
principale dimension économique de l'intégration. Elle se
réfère à toute l'infrastructure qui permet
d'accéder à l'emploi, que ce soit la présence
d'établissement postsecondaire, de l'accès au logement et au
service de santé, du transport en commun et de tous les programmes
offerts par les organismes gouvernementaux. Ce sont aussi les
possibilités d'emploi, le coût de la vie, le niveau de
compétence qu'un individu possède par rapport au marché de
l'emploi ainsi que l'ouverture des employeurs envers l'immigration (LAMBERT E
2014).
En fait, les facteurs socioéconomiques permettent de
faire le lien entre le travail et l'appartenance à sa propre
communauté. Par contre pour d'autres organisations humanitaires qui
accueillent les réfugiés les dimensions économiques et
sociales ne sont pas forcément liés. Et elles ne sont pas aussi
à sens unique, c'est-à-dire que l'intégration ne concerne
pas seulement les réfugiés mais y compris la
société d'accueil.
Les réfugiés et les populations d'accueil nouent
des relations souvent conflictuelles et bénéfiques. En effet,
selon FRESIA M (ibid) les réfugiés pratiquent des
activités commerciales qui sont souvent bénéfiques aux
autochtones, l'auteur montre aussi la vente des produits alimentaires
distribués par les organismes humanitaires aux réfugiés
dans les localités d'accueil. Cette dernière profite aussi
à la population d'accueil.
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