WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La Cour internationale de justice et la problématique des droits de l'homme


par Parfait Oumba
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master en droits de l'homme et action humanitaire 2005
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B - La pratique hésitante de la norme de jus cogens

Dans son avis consultatif sur la licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, la Cour a pris soin d'éviter de se prononcer sur la reconnaissance du caractère de jus cogens, alors même qu'elle insiste sur des principes fondamentaux, cardinaux et intransgressibles. La Cour constate qu'il a été soutenu que ces principes et règles de droit humanitaire font partie du jus cogens, mais elle affirme qu'elle « n'a pas à se prononcer sur ce point »55(*). Cependant, dans sa déclaration, le Président Bedjaoui considère qu' « il ne fait pas doute ... que la plupart des principes et règles du droit humanitaire...font partie jus cogens »56(*).

Pour résoudre les malentendus quant à la difficulté d'identifier une norme comme impérative, l'article 66 de la Convention de Vienne stipule qu'en cas de différend concernant l'application ou l'interprétation des articles 53 et 54, et s'il n'est pas réglé dans un délai de douze mois à dater du jour où il est constaté, toute partie « peut, par une requête, le soumettre à la décision de la Cour internationale de justice, à moins que les parties ne décident d'un commun accord de soumettre le différend à l'arbitrage »57(*). Michel VIRALLY estime pour sa part, qu'il existe de grandes difficultés pratiques d'application du jus cogens, car celui-ci « ne constitue pas (...) du droit naturel. Il évolue en fonction de la situation socio-historique de la société internationale et des modifications intervenues dans les conceptions politiques, éthiques, idéologiques qui s'y rapportent. En d'autres termes, les normes de jus cogens sont des normes de droit positif »58(*).

Les effets de l'imprécision de la norme de jus cogens ont entraînés, de nombreuses controverses ainsi par exemple, la France n'a pas adopté la Convention de Vienne sur le droit des traités par opposition à l'introduction du jus cogens. Selon le délégué français, « il n'est pas pensable, d'admettre l'existence présente et à venir d'une loi suprême et de lui attacher des effets aussi graves que d'entraîner la nullité ab initio des accords internationaux, sans définir la substance de cette règle de droit positif, les conditions de son développement et le contrôle de son application »59(*).

Malgré une certaine ambiguïté et une hésitation dans la mise en oeuvre des normes de jus cogens, il faut noter que celles-ci sont d'une portée capitale dans le sens où, deux caractères leur sont propres : en premier, les règles de jus cogens sont toutes prohibitives ; en second lieu elles ont une forte connotation éthique dans la mesure où le jus cogens tend à rendre supérieur certaines valeurs. Ces caractères sont fondamentaux puisqu'ils ont contribués sans aucun doute, à l'acceptation progressive de l'idée qu'il existe en droit international contemporain des normes qui, étant de nature impérative et non dispositive, se placent au-dessus de la volonté des Etats. L'évolution en faveur de l'existence de règles de jus cogens est certainement irrésistible, parce qu'elle répond à une nécessité du monde international d'aujourd'hui : la promotion des valeurs morales, comme celles de la solidarité et de la dignité humaine, en faisant du respect de certaines obligations fondamentales par chacun des Etats, l'affaire de tous.

La notion de jus cogens investit, le juge énonciateur de l'éthique sociale, d'une magistrature non plus seulement technique mais également morale, « la Cour juge le droit, et ne peut tenir compte des principes moraux que dans la mesure où on leur a donné une forme suffisante. Le droit dit-on, répond à une nécessité sociale, mais c'est précisément pour cette raison qu'il ne peut y répondre que dans le cadre et à l'intérieur des limites de la disciplines qu'il constitue »60(*).

Le juge ne dit plus seulement le droit, parce qu'il affirme en même temps les exigences étiques élémentaires de la vie communautaire. Toute la charge idéologique contenue dans le droit originaire et dérivé de l'organisation des Nations Unies l'incite à rappeler leurs devoirs aux Etats et l'on comprend alors que la Cour incline à prendre quelque hauteur par rapport aux conduites étatiques, face aux incohérences de la pratique des idéologies ou la rivalité des intérêts.

L'affirmation du jus cogens place en effet le juge au coeur d'une tension contradictoire entre, d'une part une société encore entièrement attachée au subjectivisme des souverainetés, concurrentes, ayant spontanément bâti un système de normes contingentes et dérogeables, et, d'autre part l'introduction au sein de ce système d'un droit par définition objectif, marqué par l'impérativité de sa nécessité sociale61(*).

La Cour internationale de justice, en usant de la norme de jus cogens, non seulement limite la souveraineté des Etats, mais rend aussi service à la communauté internationale, la Cour sert les intérêts de l'humanité : ceux de l'Homme et de tous les hommes62(*).

* 55 CIJ, Licéité de la menace ou de l'emploi des armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, Rec., 1996, p. 258.

* 56 Ibidem, p. 273.

* 57 Article 66 de la Convention de Vienne sur le droit de traités du 23 mai 1969.

* 58 Michel VIRALLY, « Réflexions sur le jus cogens », AFDI, 1996, pp. 15-16.

Voir aussi l'article 71 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969, notamment en ce qui concerne la survenance d'une norme de jus cogens.

* 59 Débats A/Conf.39/II p. 326 §6.

* 60 CIJ, Affaire du Sud ouest africain (Ethiopie contre Afrique du Sud ; Libéria contre Afrique du Sud), arrêt du 18 juillet 1966, Rec., 1966, p. 34.

* 61 Jean COMBACAU, « Droit international, bric-à-brac ou système ? », Archives des philosophies de droit, pp. 85-105.

* 62 D. COLLARD, « Premières réflexions sur le traité des traités », in journal international, n°2, avril, mai, juin, 1970.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore