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L'aménagement des droits des actionnaires après l'ordonnance du 24 juin 2004


par Julien Carsantier
Université Paris Dauphine - DEA 122 2005
  

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(2) La technique de l'augmentation de capital « au fil de l'eau »

85. - L'article L. 225-136 du Code de commerce précise, dans son 2° : « Toutefois, dans la limite de 10 % du capital social par an, l'assemblée générale extraordinaire peut autoriser le conseil d'administration ou le directoire à fixer le prix d'émission selon des modalités qu'elle détermine au vu d'un rapport du conseil d'administration ou du directoire, et d'un rapport spécial du commissaire aux comptes [...] ».

Ainsi est permise l'augmentation de capital dite « au fil de l'eau » ou « en continu », afin de permettre aux sociétés d'émettre une partie de leurs titres dans les meilleures conditions, sans toutefois porter atteinte de façon trop importante aux droits des actionnaires que la règle de fixation du prix a pour but de protéger.

86. - Une telle possibilité était déjà permise dans l'hypothèse d'un rachat d'actions207(*), et l'on avait remarqué qu'il était paradoxal d'encadrer fortement l'émission de titres nouveaux et de laisser quasiment libre la cession de titres existants auto-détenus208(*).

Cette flexibilité nouvelle vient mettre un terme aux incertitudes qui pouvaient entourer les equity lines, ces programmes d'émission « en continu » permettant à une société d'émettre, en plusieurs tranches à sa discrétion, des actions qui sont souscrites par un établissement de crédit puis replacées, dans la mesure du possible, par ce dernier dans le marché209(*). Afin d'éviter certains impacts négatifs potentiels des lignes de crédit actions sur le marché, la Commission des opérations de bourse avait précisé le régime applicable aux equity lines210(*). La question juridique essentielle soulevée par ce mécanisme était celle de l'éventuelle fraude à la loi211(*) - n'y avait-t-il pas détournement de procédure ? L'ordonnance du 24 juin 2004 ôte les doutes en la matière et permet aujourd'hui d'envisager sans risque le placement direct des titres de capital auprès du public.

Néanmoins, les equity lines ont eu à ce jour un succès mitigé. Elles sont réservées à des sociétés de petite ou moyenne taille, ayant un fort besoin de financement en capital (biotechnologie, haute technologie), et présentant un profil de croissance possible. Les autres émetteurs, qui représentent la grande majorité et comprennent les grandes sociétés françaises, continueront probablement à privilégier la réalisation d'augmentations de capital largement ouvertes à leurs actionnaires et qui permettent d'optimiser le prix de souscription - plutôt que d'entériner une décote systématique, quel qu'en soit le montant. Les débats autour des equity lines ont en tout état de cause été importants et ont été les catalyseurs de la volonté de réforme des règles relatives aux augmentations de capital.

87. - La flexibilité accordée par l'ordonnance s'applique sous la triple condition que les valeurs mobilières à émettre de manière immédiate ou différée soient assimilables aux titres de capital admis aux négociations sur un marché réglementé, que l'assemblée générale ait prévu les modalités de fixation du prix d'émission et que soit respectée la limite d'émission de 10% du capital par an.

Il semble que cette autorisation puisse être conférée au conseil d'administration ou au directoire pour une durée maximale de 26 mois212(*), quand bien même le seuil de 10 % est apprécié annuellement. En effet, il s'agit d'une délégation de compétence, dès lors que l'organe de direction a l'initiative de la décision de réaliser ou non la ou les augmentations de capital selon les conditions du marché213(*).

Au résultat, le conseil ou le directoire pourra, si délégation maximum lui est donnée, augmenter librement le capital pendant trois exercices consécutifs, ce qui permet une augmentation totale de 33,10 %. La société cotée est de moins en moins conçue comme un groupement de personnes et de plus en plus comme une technique de financement, ce qui n'est que la traduction de la réalité.

88. - L'application de la limite de « 10 % du capital sociale par an » soulève deux autres difficultés d'interprétation.

S'agissant de l'assiette du taux de 10 % : s'agit-il du capital émis à la date de l'assemblée générale ayant autorisé le conseil d'administration ou le directoire à procéder aux augmentations de capital « en continu », ou du capital émis lors de l'utilisation par le conseil d'administration ou le directoire de cette autorisation, permettant ainsi de tenir compte des éventuelles variations du capital ? L'assemblée générale devrait avoir toute liberté pour prévoir l'un ou l'autre, aucune règle d'ordre public ne semblant limiter cette faculté. En l'absence de précision par l'assemblée générale, il semblerait logique de se référer au capital émis à la date de la décision de délégation par l'assemblée générale qui devrait le mieux traduire la volonté des actionnaires214(*).

S'agissant de la période de référence : s'agit-il d'une année glissante, la période de référence étant la période d'un an précédent toute nouvelle émission, ou d'une année fixe à compter de la date de l'assemblée générale ? La logique imposerait, pour éviter des augmentations brutales de capital à la charnière des années fixes, de retenir une année glissante215(*).

89. - Ces observations faites, il convient de préciser qu'en cas d'émission « au fil de l'eau », le législateur a prévu différentes protections de l'actionnaire de la société émettrice216(*).

90. - Restait enfin le cas des émissions par appel public à l'épargne avec suppression du droit préférentiel de souscription dans les sociétés cotées. L'article L. 225-136 nouveau du Code de commerce apporte ici quelques assouplissements, à savoir la suppression de la référence aux capitaux propres et à l'expertise.

* 207 Art. L. 225-209 C. com.

* 208 V. D. BOMPOINT, « La réforme des procédures d'appel public à l'épargne. La règle des «dix parmi les vingt« », art. préc.

* 209 V. « Les nouvelles formes d'augmentation de capital par tirage de lignes d'actions (equity lines) », Bull. ANSA 2003, n° 3231. - Les equity lines ont été réalisées jusqu'à présent sur la base d'une émission de bons de souscription d'actions réservée à un établissement de crédit. Cette émission est réalisée avec suppression du droit préférentiel de souscription et est réservée à personne dénommée en application de l'article L. 225-138 du Code de commerce. Le prix de souscription des bons est symbolique (entre 0,0001 et 0,01 euros par bon) et le prix d'exercice est égal à une moyenne de cours pendant une période de référence (5 jours de bourse consécutifs par exemple) précédent l'exercice des bons sur laquelle est appliquée une décote (10 % par exemple). Une convention est conclue entre l'émetteur et l'établissement de crédit pour encadrer l'exercice des bons de souscription d'actions par ce dernier. L'établissement de crédit n'a pas vocation à conserver les actions ainsi souscrites mais à les placer dans le marché, à ses risques. La décote calculée sur la moyenne des cours sur la période de référence est supposée donner à l'établissement de crédit la marge nécessaire pour éviter de réaliser une perte sur ce placement. La rémunération de l'établissement de crédit correspond à des commissions auxquelles s'ajoute la plus-value éventuelle réalisée lors de la cession dans le marché des actions résultant de l'exercice des bons de souscription d'actions.

* 210 Communiqué relatif à des projets d'augmentation de capital (equity lines) du 25 juillet 2001, Bull. COB 2001, n° 359, p. 51.

* 211 Sur cette question, v. P.-Y. CHABERT, « Les augmentations de capital après l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales », art. préc., n° 65.

* 212 Par référence à l'article L. 225-129-2 du Code de commerce relatif aux délégations de compétence.

* 213 En ce sens, M. BANDRAC, P. BIROTHEAU, C. DEBIN, J.-P. DOM, S. GAILLET, F. LE ROQUAIS et M. SUPIOT, « Le régime et l'émission des valeurs mobilières après les ordonnances de 2004 », art. préc., p. 23.

* 214 En ce sens, P.-Y. CHABERT, « Les augmentations de capital après l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales », art. préc., n° 68 ; A. COURET et H. LE NABASQUE, Valeurs mobilières - Augmentations de capital - Nouveau régime - Ordonnance des 25 mars et 24 juin 2004, op. préc., n° 344.

* 215 En ce sens, P.-Y. CHABERT, « Les augmentations de capital après l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales », art. préc., n° 68.

* 216 Infra nos 385, 389.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984