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L'aménagement des droits des actionnaires après l'ordonnance du 24 juin 2004


par Julien Carsantier
Université Paris Dauphine - DEA 122 2005
  

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(iii) La protection de certains porteurs de titres de créance ou de titres de capital

230. - Antérieurement à l'ordonnance du 24 juin 2004, en cas d'obligation convertible, la société émettrice ne pouvait pas « modifier la répartition des bénéfices »429(*), sauf le cas de création d'actions à dividende prioritaire430(*). Le même dispositif existait pour les autres valeurs mobilières composées431(*). Il s'agissait là de protéger les porteurs de tels titres.

231. - L'ordonnance a repris ce dispositif en l'assouplissant. L'article L. 228-98 du Code de commerce énonce en effet, au deuxième alinéa : « [la société émettrice] ne peut [...] modifier les règles de répartition de ses bénéfices [...] à moins d'y être autorisée par le contrat d'émission [...] et sous réserve de prendre les dispositions nécessaires au maintien des droits des titulaires des valeurs mobilières donnant accès au capital dans les conditions définies à l'article L. 228-99 ».

L'alinéa suivant ajoute, à propos des actions de préférence : « Sous ces mêmes réserves, elle peut cependant créer des actions de préférence ».

232. - Il semble que la protection des droits des porteurs doive être garantie alors même que l'émission des actions de préférence serait réservée. Toutefois, cette conclusion a pour conséquence d'accorder plus de droits à des actionnaires potentiels qu'aux actionnaires existants. Pour certains auteurs, une telle protection des droits des porteurs ne paraît avoir de sens que dans la mesure où la création des actions de préférence affecte la répartition des bénéfices comme semble le suggérer l'article L. 228-99, alinéa 1er in fine du Code de commerce432(*).

233. - Il y a également lieu de veiller à la protection des actionnaires de préférence préexistants. Il peut en effet arriver qu'après avoir émis des actions de préférence assorties de droits financiers particuliers, la société souhaite accorder une priorité supérieure à de nouvelles actions de préférence, dégradant en quelque sorte le statut des porteurs de la catégorie initiale.

Cela pose le problème de la protection des porteurs d'actions de préférence en général ; aussi, nous renvoyons aux développements ultérieurs consacrés à cette protection433(*).

(iv) L'émission dans le cadre d'un groupe de sociétés

234. - L'émission d'actions de préférence dans le cadre de groupes de sociétés434(*) appelle quelques exigences particulières, en plus de celles mentionnées dans les développements précédents.

235. - Il y a d'abord une condition de fond, qui tient à l'existence d'un lien majoritaire en capital435(*) : les actions de préférence de la mère peuvent conférer des droits particuliers dans la filiale, ou réciproquement, si la première détient plus de la moitié du capital de la seconde436(*) - ce qui est le critère même de la définition de la filiale selon l'article L. 233-1 du Code de commerce.

L'article L. 228-13 vise la possession directe et indirecte. La notion de possession indirecte doit s'apprécier en chaîne, société par société437(*). Ainsi, chaque société doit détenir au moins la moitié du capital de la suivante pour que la détention indirecte soit caractérisée. Inversement, si l'une des sociétés détient moins de 50 % du capital de la société suivante, la détention indirecte ne peut être caractérisée, la chaîne des détentions majoritaires étant rompue438(*).

Cette exigence de lien en capital n'est pas une simple contrainte contemporaine de l'émission, mais une condition devant être satisfaite pendant toute la durée de vie des actions de préférence439(*).

236. - En revanche, la forme de la société tierce est indifférente : dès lors que la société émettrice est une société par actions, la nature de la société tierce - filiale ou holding - importe peu440(*). Il pourra s'agir d'une société civile ou commerciale, parmi ces dernières la SAS offrant des facilités propres à permettre plus aisément l'exercice des droits particuliers dont l'action de préférence est assortie.

L'article L. 228-13, alinéa 3 du Code de commerce prévoit toutefois l'intervention du commissaire aux comptes de la société tierce. Aussi, la société tierce, quelle que soit sa forme, devra être dotée d'un commissaire aux comptes ou devra en désigner un préalablement. En outre, son régime propre ne devra évidemment pas faire obstacle à l'exécution en son sein des droits particuliers attachés aux actions de préférence.

237. - S'agissant des conditions de forme, l'émission d'actions de préférence suit, chez la société émettrice, le même régime que celui applicable lorsque les droits particuliers sont exercés au sein de la société émettrice elle-même441(*).

Par ailleurs, aux termes de l'article L. 228-13, alinéa 2 du Code de commerce, l'assemblée générale extraordinaire de la société tierce doit autoriser l'émission442(*), statuant au vu du rapport spécial du commissaire aux comptes443(*). Cette décision reconnaît l'existence des actions de préférence et l'opposabilité des droits particuliers dont elles sont dotées444(*).

238. - Alors que la procédure des avantages particuliers doit éventuellement être respectée au niveau de la société émettrice, par application de l'article L. 228-15 du Code de commerce445(*), rien n'est dit s'agissant de l'assemblée d'autorisation au sein de la société tierce. Le silence du législateur ne saurait cependant valoir dispense d'observer ladite procédure dès lors que les conditions en sont remplies446(*).

Cette conclusion ne vaut que si la société tierce est une société par actions et parmi celles-ci faut-il encore traiter distinctement la SAS, au sein de laquelle les dispositions particulières relatives aux droits politiques ne constituent pas des avantages particuliers447(*).

239. - L'émission d'actions de préférence dans une SAS est d'ailleurs loin de présenter le même intérêt que dans une SA et suscite, en outre, diverses interrogations qui n'ont, semble-t-il, pas été anticipées par les rédacteurs de l'ordonnance du 24 juin 2004.

On peut y voir là une limite à la liberté contractuelle offerte par les actions de préférence, tout comme l'on se doit de garder à l'esprit qu'il n'est pas possible de créer des actions de préférence au contenu divers sans veiller à respecter l'ordre public, et notamment celui du droit des sociétés.

* 429 Ancien art. L. 225-161, al. 5 C. com.

* 430 A la condition toutefois de réserver les droits des obligataires qui opteraient pour la conversion.

* 431 Anciens art. L. 225-153 et L. 225-174 C. com.

* 432 A. GUENGANT, D. DAVODET, P. ENGEL et S. DE VENDEUIL, « Valeurs mobilières donnant accès au capital après l'ordonnance du 24 juin 2004 », JCP E 2005, 1129.

* 433 Infra n° 280 et s.

* 434 V. supra n° 182 et s.

* 435 Art. L. 228-13 C. com.

* 436 Le nombre de droits de vote est indifférent.

* 437 En ce sens, A. GUENGANT, D. DAVODET, P. ENGEL, S. de VENDEUIL et S. LE PAVEC, « Actions de préférence : questions de praticiens (2ème partie) », art. préc., p. 1216.

* 438 Par exemple, A détient 51 % de B qui détient 30 % de C, A détient également 30 % de C ; le calcul de la détention se fait par addition des participations dans C ; la société A détient indirectement plus de la moitié du capital de la société C par addition de se participation directe dans la société C et de sa participation indirecte dans la société C par l'intermédiaire de la société B

* 439 Supra n° 192.

* 440 En ce sens, A. GUENGANT, D. DAVODET, P. ENGEL, S. de VENDEUIL et S. LE PAVEC, « Actions de préférence : questions de praticiens (2ème partie) », art. préc., p. 1217 ; A. VIANDIER, « Les actions de préférence », art. préc., p. 1533.

* 441 Supra n° 222 à 224.

* 442 Il s'agit de la décision d'autorisation, et non de la décision d'émission qui, elle, intervient au niveau de la société émettrice.

* 443 Art. L. 228-13, al. 3 C. Com. - Le contenu de ce rapport n'est pas précisé par le décret du 10 février 2005. Selon A. GUENGANT, D. DAVODET, P. ENGEL, S. de VENDEUIL et S. LE PAVEC, « Actions de préférence : questions de praticiens (2ème partie) », art. préc., p. 1217, le rapport doit préciser, l'incidence de l'opération sur la situation des titulaires de titres de capital et éventuellement sur celle des titulaires de valeurs mobilières donnant accès au capital.

* 444 Faute de disposition expresse, l'absence de décision de la société tierce n'est pas une cause de nullité. Il faut donc considérer que les droits particuliers assortissant les actions de préférence ne seront pas opposables, donc exerçables, dans la société tierce, si l'autorisation n'a pas été accordée ou si elle l'a été par une résolution imparfaite.

* 445 Supra n° 225 et s.

* 446 En ce sens, A. GUENGANT, D. DAVODET, P. ENGEL, S. de VENDEUIL et S. LE PAVEC, « Actions de préférence : questions de praticiens (2ème partie) », art. préc., p. 1217 ; A. VIANDIER, « Les actions de préférence », art. préc., p. 1533.

* 447 Infra n° 262 et n° 263.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand