Février 1999
Carine JEZEQUEL
Alexandra LEMENICIER
Ludovic BLIN
LA PROTECTION DE LA PROPRIÉTÉ
INTELLECTUELLE FACE AUX NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION ET DE LA
COMMUNICATION
SOMMAIRE
INTRODUCTION
3
I / PERSISTANCE DES GRANDS PRINCIPES DE LA
LÉGISLATION ACTUELLE POUR ENCADRER LA PROTECTION DE LA
PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE SUR INTERNET
4
A. LA PROPRIÉTÉ LITTÉRAIRE ET
ARTISTIQUE OU DROITS D'AUTEUR ET DROITS VOISINS
4
1) LES oeUVRES PROTÉGÉES SUR INTERNET
4
2) LE DROIT PATRIMONIAL
5
3) LE DROIT MORAL
6
4) LA RÉPRESSION DES INFRACTIONS
8
B. LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE
8
1) DROIT DES BREVETS
9
2) DROIT DES MARQUES ET NOM DE DOMAINE :
9
II / DIFFICULTÉS D'APPLICATION DES
RÈGLES JURIDIQUES SUR INTERNET
11
A. DIFFICULTÉS DANS L'APPLICATION DU DROIT
D'AUTEUR FACE À CERTAINES CATÉGORIES D'oeUVRES
11
1) LES oeUVRES MULTIMÉDIA
11
2) LES LOGICIELS
12
3) LES BASES DE DONNÉES
12
4) LES PHOTOGRAPHIES SUR INTERNET
12
5) LES ARTICLES DE PRESSE ON-LINE
13
B. LES DIFFICULTÉS D'APPLICATION DE LA
LÉGISLATION LIÉES À LA DIMENSION INTERNATIONALE D'INTERNET
13
1) LES CONFLITS DE DROITS NATIONAUX EN MATIÈRE DE
DROIT D'AUTEUR
13
2) LE DROIT DES BREVETS : UN NIVEAU DE PROTECTION
HÉTÉROGÈNE
15
3) LES CONFLITS DE DROITS NATIONAUX ET DE RÉGIMES
JURIDIQUES EN MATIÈRE DE NOMS DE DOMAINES.
15
III / LA DIVERSITÉS DES SOLUTIONS
18
A) LA CONCILIATION ENTRE LA FACILITÉ DE
COMMUNICATION ET LES PRINCIPES DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE.
18
1) LE RÉSEAU DOIT S'ADAPTER
AU DROIT
18
2) LE DROIT DOIT S'ADAPTER AU RÉSEAU
19
B) LA NÉCESSITÉ D'UNE ENTENTE
INTERNATIONALE
20
1) L'AUTORÉGULATION
20
2) LA COOPÉRATION INTERNATIONALE
21
INTRODUCTION
Le développement récent des nouvelles
technologies, et plus particulièrement d'Internet, bouleverse
considérablement la conception classique des échanges et des
relations entre les hommes : tout type d'information circule entre tous les
utilisateurs, sur l'ensemble de la planète, de façon rapide et
immatérielle. Les caractéristiques d'Internet, qui en font un
réseau mondial et complètement décentralisé, lui
permettent de s'affranchir à la fois du temps et de l'espace. Le
réseau ne connaît pas de frontières, et aucune structure
n'a vocation à le diriger globalement. Il en découle une
apparente liberté ainsi qu'une absence de contrôle administratif
du comportement des différents acteurs en présence. Pour autant,
on ne peut parler de vide juridique sur Internet, la loi existe et est
censée s'y appliquer comme ailleurs.
En matière de propriété intellectuelle,
la question du droit sur Internet semble particulièrement
prégnante, en raison des moyens qui y sont offerts pour la piller. Elle
apparaît comme déterminante pour apporter la confiance
nécessaire, entre les différents acteurs, à l'essor du
commerce électronique. On constate en effet qu'à l'heure
actuelle, tant les éditeurs traditionnels que les producteurs de musique
ou d'oeuvres audiovisuelles demeurent réticents à proposer leurs
oeuvres sur le réseau.
La législation dans ce domaine est-elle suffisamment
protectrice et adaptée au développement d'échanges de
biens intégrant de la propriété intellectuelle ou, au
contraire, constitue-t-elle un frein et dissuade-t-elle les acteurs de prendre
parti dans ce type de marché ? Il semble que les principes du droit
de la propriété intellectuelle soient tout à fait
applicables à Internet et ne nécessitent pas de remise en cause
globale, néanmoins, des problèmes dans l'application de ces
principes demeurent et impliquent des aménagements particuliers.
Nous retracerons, tout d'abord, les grandes lignes du droit de
la propriété intellectuelle, tout en s'attachant à montrer
dans quelle mesure celui-ci peut encadrer les échanges entre
internautes. Dans ce cadre, nous examinerons d'une part, la
propriété littéraire et artistique, c'est-à-dire
les droits d'auteur et les droits voisins, et d'autre part, la
propriété industrielle et notamment le droit des marques et le
droit portant sur les brevets. Dans les deux cas, nous mettrons en
évidence la spécificité de la législation
française (par rapport aux législations anglo-saxonnes).
Ensuite, nous évoquerons divers problèmes
d'application des règles. Nous relèverons, d'une part, les
difficultés liées à l'apparition de nouvelles
catégories d'oeuvres ou à la numérisation de
catégories d'oeuvres déjà existantes. Nous examinerons,
d'autre part, certains conflits de droits nationaux engendrés par un
manque d'harmonisation et par l'existence de différents degrés de
protection des législations selon les pays. En effet, Internet remet en
cause la capacité des Etats à faire respecter leur
législation car il ignore les frontières.
Enfin, nous envisagerons différentes solutions pour
protéger la propriété intellectuelle de la manière
la plus adaptée. Il faut notamment, prendre garde à ce que la
protection de la propriété intellectuelle ne s'oppose pas
à l'intérêt général et puisse favoriser la
circulation des oeuvres de l'esprit et des créations industrielles. D'un
côté, le réseau doit s'adapter au droit, par le biais de
solutions techniques avancées, telles que la cryptographie ; de
l'autre le droit lui aussi doit s'adapter au réseau et être
modifié dans certains cas précis. Enfin, nous verrons
l'indispensable entente internationale qui doit s'opérer entre les pays,
soit par l'autorégulation, soit par des conventions et accords
internationaux.
I / Persistance des grands principes de la législation
actuelle pour encadrer la protection de la propriété
intellectuelle sur Internet
A. La
propriété littéraire et artistique ou droits d'auteur et
droits voisins
Historiquement, le droit d'auteur fut conçu comme une
matière souple, et a su absorber l'avènement de la photographie,
du cinéma, de la radio, puis des satellites. On peut donc espérer
qu'il saura faire face à la généralisation des nouvelles
technologies de l'information et de la communication, et en particulier
d'Internet.
En France, les droits d'auteur et droits voisins
(c'est-à-dire les droits des artistes interprètes et des
producteurs de vidéogrammes et de phonogrammes), également
appelés droit de la propriété littéraire et
artistique, sont régis par la loi du 11 mars 1957, ainsi que celle du 3
juillet 1985 et intégrés dans le code de la
propriété intellectuelle, grâce à la loi du premier
juillet 1992. Nous nous attacherons à mettre en évidence, dans
cette partie, la spécificité du droit français, qui,
contrairement au droit anglo-saxon, reconnaît à l'auteur un droit
moral sur son oeuvre.
Nous examinerons, dans un premier temps, quelles sont les
oeuvres protégées par le droit d'auteur sur Internet. Puis, dans
un tel contexte, nous détaillerons les deux grandes composantes de ce
droit : droit patrimonial et droit moral. Enfin, nous verrons quels
sont les recours possibles face aux infractions.
1)
Les oeuvres protégées sur Internet
En vertu de l'article L112-1 du Code de la
propriété intellectuelle, les droits d'auteurs s'appliquent
à toute oeuvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme
d'expression, le mérite ou la destination. En conséquence,
toutes les données ou informations que l'on rencontre sur Internet ne
sont pas protégées par le droit d'auteur, mais le champ
d'application de la propriété littéraire et artistique
demeure très large, car il comprend toutes les oeuvres de l'esprit
à caractère original, c'est-à-dire empreintes de la
personnalité de leur auteur.
Ainsi, les textes, de toute nature, diffusés sur le
réseau (extraits d'ouvrages littéraires ou scientifiques,
articles journalistiques, discours publics...) sont protégés par
le droit d'auteur. De même pour les images fixes ou animées
(photographies, reproductions d'oeuvres d'art, images de synthèse...),
pour la musique (mais les sons en tant que tels ne sont pas
protégés), et pour toute oeuvre audiovisuelle,
c'est-à-dire toute oeuvre constituée d'une séquence
animée d'images sonorisées ou non.
Le Multimédia est une catégorie d'oeuvre,
récemment apparue, qui bénéficie du droit d'auteur et dont
une des définitions se trouve dans le rapport Théry de
1994 sur les autoroutes de l'information: « Le multimédia
est un ensemble de services interactifs utilisant le seul support
numérique, pour le traitement et la transmission de l'information dans
toutes ses formes : textes, données, sons, images. ».
Ainsi la catégorie d'oeuvre multimédia intègre les CD-ROMS
interactifs, mais aussi les sites Web sur Internet. Généralement,
l'oeuvre multimédia est une oeuvre composite, au sens du Code,
c'est-à-dire une oeuvre originale dans laquelle une oeuvre
préexistante a été incorporée sans la collaboration
de l'auteur de cette dernière. Le régime juridique de l'oeuvre
composite établit qu'elle est la propriété de l'auteur qui
l'a réalisée, sous réserve des droits de l'auteur de
l'oeuvre préexistante.
Les logiciels sont entrés dans la catégorie des
oeuvres protégées par le droit d'auteur grâce à la
loi du 3 juillet 1985. De plus, en 1994, le législateur a
transposé la directive européenne du 14 mai 1991 relative
à la protection juridique des programmes d'ordinateurs, et qui permet de
protéger non seulement le logiciel, mais également les travaux
préparatoires de conception aboutissant au développement du
programme. De plus, afin de lutter contre le pillage des oeuvres informatiques,
le Code dispose que toute reproduction autre que la copie de sauvegarde
établie par l'utilisateur, ainsi que toute utilisation d'un logiciel
sans autorisation expresse de l'auteur est rigoureusement illicite.
2)
Le droit patrimonial
Ce droit permet à l'auteur d'une oeuvre d'obtenir une
rémunération pour l'exploitation de celle-ci, et de
déterminer de quelle façon elle sera utilisée. Il comprend
notamment le droit de reproduction et celui de
représentation : toute représentation ou reproduction,
intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur ou de ses
ayants droit, est illicite et qualifiée de contrefaçon. Il en est
de même pour la traduction, l'adaptation, l'arrangement par n'importe
quel procédé d'une oeuvre originale.
Ces droits consistent en la possibilité pour l'auteur
de communiquer l'oeuvre au public par un procédé quelconque. Or,
en vertu du Code de la propriété intellectuelle, il existe deux
moyens de communication d'une oeuvre au public :
la fixation matérielle de l'oeuvre permettant une
communication indirecte au public : il s'agit de la reproduction qui
s'effectue donc par l'intermédiaire d'un support (numérique ou
non).
une communication ne nécessitant aucun support,
caractérisée par l'utilisation d'un vecteur de
télécommunication : il s'agit alors de la
représentation.
· Le droit de reproduction d'une oeuvre sur
Internet :
La présence d'une oeuvre sur Internet implique
préalablement sa numérisation. Or, un tel acte correspond non
seulement à une reproduction de l'oeuvre, mais aussi à son
adaptation, du fait de la transformation de données analogiques en
données binaires. A cet égard, le Livre vert de la Commission
européenne sur les droits d'auteur et les droits voisins (juillet 1995)
établit que la numérisation d'une oeuvre doit tomber sous
l'empire du droit de reproduction, de même que le chargement de celle-ci
sur la mémoire centrale d'un ordinateur.
La numérisation d'une oeuvre doit donc être
préalablement autorisée par le titulaire des droits sur celle-ci
et n'est pas susceptible de bénéficier de l'exception pour copie
privée, généralement autorisée par la loi.
Dernièrement, des étudiants avaient
numérisé des textes et extraits de chansons de Jacques Brel, puis
les avaient installé sur leur page Web sans aucune autorisation. Ils ont
été condamnés. L'un des problèmes soulevés
par cette affaire était de savoir si l'exception de copie à usage
privé était applicable, à l'encontre du droit de
reproduction des auteurs. Cependant, le Code de la propriété
intellectuelle énonce que la copie réservée à
l'usage privé est licite à condition de ne pas être
destinée à une utilisation collective, or justement la vocation
d'Internet est de permettre à des tiers connectés de visiter les
pages Web privées et d'en prendre éventuellement copie.
En outre, une simple cession du droit de reproduction sur
support papier n'implique pas automatiquement le droit de numérisation,
ce qui explique la nécessité, pour les éditeurs
classiques, de renégocier les contrats qui les lient aux auteurs
concernés.
· Le droit de représentation des
oeuvres sur Internet :
Il semble indéniable que la numérisation
entraînant l'apparition des données sur l'écran des
internautes, constitue une communication par télédiffusion. En
effet tout procédé de télécommunication permettant
la diffusion de sons, d'images ou autres données de toute nature, est
considéré comme une télédiffusion constitutive
d'une représentation.
La mise à disposition de créations sur le
réseau, via une page Web, constitue donc bien un acte de
représentation à l'égard des utilisateurs du
réseau. Mais peut-on considérer que les utilisateurs d'Internet
correspondent à la notion de « public », alors
même que ce qui les caractérise, c'est leur dispersion en une
multitude de lieux privés, et leur action positive et volontaire de se
connecter à tel ou tel site ? Les décisions
jurisprudentielles vont dans ce sens et tendent à considérer que
la mise à disposition d'une oeuvre sur Internet crée
automatiquement un public éventuel ou
« virtuel ».
La mise en ligne d'une création sans autorisation de
l'auteur constitue donc une violation de son droit de représentation.
Il existe une exception au droit de représentation,
il s'agit du droit de citation, contenu dans l'article L122-5 du Code de la
propriété intellectuelle : « les analyses et
courtes citations, sous réserve de l'indication du nom de l'auteur et de
la source, sont autorisées quand elles sont justifiées par le
caractère critique, polémique, pédagogique ou
d'information de l'oeuvre à laquelle elles sont
incorporées. »
Est-il alors possible de réaliser une oeuvre
constituée d'un grand nombre de citations ?
Ce problème a été soulevé lors
d'une affaire Microfor/Le Monde : la société
Microfor avait réalisé une banque de données
comprenant des résumés d'articles de presse, sans consentement du
journal Le Monde. Les magistrats ont jugé que les résumés,
constitués uniquement de courtes citations de l'oeuvre, ne dispensaient
pas le lecteur de recourir à l'original, et que l'ensemble de cette
publication avait le caractère d'une oeuvre d'information.
Ainsi, la mise en place d'un site Web constitué de
plusieurs résumés ou citations d'oeuvres préexistantes,
dans le but d'illustrer un thème déterminé, n'enfreint pas
nécessairement les règles de la propriété
littéraire et artistique. Ce genre de site se rencontre souvent sur le
réseau, et ne fait pas l'objet de procédures judiciaires
systématiques.
3)
Le droit moral
Le droit moral garantit à l'auteur que son oeuvre ne
sera pas déformée, et que sa paternité sur celle-ci sera
constamment reconnue. En droit français, les droits moraux ont la
particularité d'être perpétuels et inaliénables.
Seul l'auteur de son vivant, puis ses héritiers après sa mort,
ont la possibilité de les revendiquer. Ce droit est constitué du
droit de première divulgation et du droit au respect du nom et de
l'intégrité de l'oeuvre.
Le droit de première divulgation implique que seul
l'auteur peut rendre publique son oeuvre, et en autoriser l'exploitation. Il y
aura donc atteinte au droit moral, dès lors que la numérisation
d'une oeuvre ou sa diffusion sur Internet auront été
réalisées sans l'accord de l'auteur.
Le droit au respect du nom de l'auteur et de la
qualité de l'oeuvre vise à assurer la paternité d'une
oeuvre à son auteur et à la protéger dans son
intégrité, afin d'éviter qu'elle soit
dénaturée, modifiée ou altérée. Or la
numérisation facilite les manipulations et transformations, que ce soit
d'un texte, d'une image ou d'une musique, ce qui a pour conséquence de
fausser la connaissance de l'oeuvre telle qu'elle a été
créée.
Un abus du droit de citation peut également provoquer
une dénaturation de l'oeuvre ou un détournement par rapport
à son sens premier. Par exemple, une portion de photographie au sein
d'un site dont le sujet n'a rien en commun avec cette dernière,
correspondrait à une mutilation de la photographie. Il y alors atteinte
au droit moral de l'auteur puisque l'utilisation qui est faite de l'oeuvre ne
permet pas d'en rendre compte dans sa globalité initiale.
De même, l'atteinte au droit moral, via la citation,
peut se rencontrer sur le réseau à travers certains liens
hypertextes. Le danger réside dans la possibilité d'utiliser une
information sortie de son contexte, au profit d'un site sans rapport avec le
précédent, et cela sans même que l'usager ne s'en rende
compte. A ce sujet, certains fournisseurs d'hébergement de pages Web
font paraître un avertissement autorisant ce type de liaison uniquement
au niveau de la première page (d'accueil), mais interdisant les liens
renvoyant à d'autres éléments.
· Différences entre le droit
français et le droit anglo-saxon
Deux conceptions du droit d'auteur
s'affrontent : la conception anglo-saxonne qui prévaut en
Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, en Australie et en Nouvelle Zélande et
la conception européenne et continentale (et d'origine française)
qui prévaut en France, en Belgique, en Espagne, au Portugal, en Italie
et aussi en Allemagne, en Autriche, en Suisse et dans les pays scandinaves.
Le droit d'auteur anglo-saxon, appelé
« copyright », assimile l'oeuvre à une marchandise
dont le créateur est dépossédé lorsqu'il la
cède, alors que, comme nous venons de le montrer, le droit
français accorde à l'auteur des droits moraux inaliénables
sur le fruit de son travail.
La notion de copyright, proche de celle du brevet, est
basée sur des principes beaucoup plus pragmatiques que le droit d'auteur
et met l'accent sur la propagation de l'oeuvre. Voici les principales
différences que l'on peut relever :
Alors qu'en France, le droit naît de la
création, les pays anglo-saxons ont une législation beaucoup plus
formaliste que la nôtre : l'auteur ne bénéficie de
droits qu'à partir du moment où il a enregistré son oeuvre
auprès d'un organisme prévu à cet effet. Aux Etats-Unis,
l'omission du dépôt et de l'enregistrement ne prive pas l'auteur
de protection mais à défaut de s'y conformer, il n'est pas
possible d'agir en contrefaçon.
En France les contrats sont fortement encadrés par la
loi, alors que dans les pays anglo-saxons, et surtout aux Etats-Unis, ils sont
peu réglementés.
Le critère d'originalité, d'où
naît la protection, est plus strict en France qu'aux Etats-Unis où
l'oeuvre doit simplement ne pas être copiée et
révéler un minimum de créativité.
En étant basé sur la dimension économique
de l'oeuvre et en ne reconnaissant pas de droit moral à un auteur, la
notion anglo-saxonne de copyright est sans doute mieux adaptée à
la diffusion d'oeuvres sur Internet, car il semble relativement
inévitable que celle-ci ne s'accompagne pas de modifications ou
d'altérations de l'oeuvre.
4)
la répression des infractions
Toute reproduction, représentation ou diffusion, par
quelque moyen que ce soit, d'une oeuvre de l'esprit en violation des droits de
l'auteur définis par la loi, constitue une contrefaçon.
L'auteur a donc le choix entre exercer des poursuites civiles,
pour obtenir des dommages-intérêts en contrepartie de son
préjudice moral et patrimonial, ou intenter des poursuites
pénales sur le fondement du délit de contrefaçon. Il faut
pour cela que le délit soit constaté en France, ce qui ne pose
aucune difficulté en pratique. En effet, n'importe quel site appartenant
au réseau mondial qu'est Internet, est susceptible d'être
appréhendé à partir de n'importe quel ordinateur
connecté en France. Cependant, la fermeture du site Web litigieux
décidée par un juge, n'aura d'efficacité que si ce site
est hébergé par un serveur situé en France.
En raison de la modeste présence de la langue
française sur le réseau, il semble réaliste de
considérer que la majorité des atteintes aux droits des auteurs
français seront physiquement rattachées à des sites
hébergés par des serveurs domiciliés sur notre territoire.
En outre, la plus grande partie des infractions est due à l'ignorance
des règles et non à une volonté
délibérée de nuire, d'où l'importance de
l'information et de la sensibilisation du public à ce sujet.
La plupart des pays possèdent une législation
interne en matière de droit d'auteur, même si les règles
sont rarement identiques. Mais il existe des Etats beaucoup plus laxistes au
niveau de poursuite des infractions dans ce domaine. Heureusement, deux
conventions internationales regroupant plus de quatre-vingt pays et ayant pour
vocation de permettre une protection minimale et quasi planétaire des
oeuvres de l'esprit ont été conclues : Il s'agit de la
Convention de Berne du 9 octobre 1886 placée sous
l'égide de l'Organisation Mondiale de la Propriété
Intellectuelle (OMPI), et de celle de Genève datant du
6 septembre 1952, organisée par l'U.N.E.S.C.O.
B.
La propriété industrielle
Le droit de la propriété industrielle,
deuxième volet de la propriété intellectuelle, se regroupe
en trois catégories : les droits portant sur les
créations industrielles, sur les signes distinctifs et sur la
concurrence déloyale.
Nous examinerons en particulier deux points qui se rattachent
à notre sujet : le droit des brevets, composante du droit des
créations industrielles et le droit des marques et des noms de domaine,
appartenant au droit sur les signes distinctifs.
1)
Droit des brevets
Le brevet est un titre qui confère à son
titulaire, pour une période de 20 ans à compter du
dépôt et sur un territoire donné, le droit d'interdire
à quiconque la reproduction (c'est-à-dire la fabrication,
l'utilisation ou la commercialisation) de l'invention. Le titulaire du brevet
peut céder son brevet à un tiers, ou en concéder une
licence d'exploitation, généralement contre
rémunération. Le monopole n'est accordé que sous
réserve que le brevet soit entretenu, c'est-à-dire que des taxes
de maintien en vigueur soient payées régulièrement. En
contrepartie, l'invention sera divulguée et enrichira ainsi le
patrimoine collectif de connaissances.
Les dépôts peuvent se faire en France, mais aussi
à l'étranger ou en international. Le brevet européen est
délivré par L'Office européen des Brevets après une
procédure d'examen unique désignant tout ou partie des pays ayant
ratifié la Convention sur le brevet européen (soit 19 Etats). Il
est également possible de procéder à une
réservation dans plusieurs pays, via une demande internationale de
brevet, déposée en vertu du PCT (traité de
coopération en matière de brevets entre 96 Etats). La demande
internationale indique les Etats contractants pour lesquels une protection est
demandée, puis la demande est validée par des dépôts
dans chacun les pays retenus.
Cependant, les entreprises occidentales ne voient souvent dans
les brevets qu'une manière vieille et peu efficace de protéger
leurs inventions et leur savoir-faire contre un éventuel piratage. Ce
problème est d'autant plus prégnant dans un contexte de
mondialisation, d'apparition de nouveaux modes de production, tel que la mise
ne place de réseaux de recherche entre entreprises, et de nouveaux mode
de diffusion des connaissances, en particulier sur Internet, car les risques
d'imitation et de contrefaçon sont accrus. La protection de la
propriété industrielle tient donc une place importante dans la
mise en place de coopérations technologiques complexes, car elle fournit
la base juridique indispensable tant à la protection du savoir-faire et
des connaissances acquises qu'à l'appropriation de connaissances
nouvelles.
2)
Droit des marques et nom de domaine :
Chaque ordinateur relié à Internet
possède une adresse électronique, représentée par
une suite de quatre chiffres séparés par des points. Mais, un
système a été réalisé, permettant de faire
correspondre à chaque adresse I.P une adresse symbolique composée
de mots entrecoupés de points : il s'agit du Domain
Name System (D.N.S), organisé en zones de nommages nationales
et internationales .
Il existe quatre zones à vocation
internationale et qui sont gérées par l'INTERNIC :
«.com » pour les activités commerciales,
«.net » pour les instances participant au fonctionnement
d'Internet, «.int » pour les organisations internationales, et
«.org » pour les associations.
Concernant les zones à caractère national,
chaque pays possède une antenne du Network Information Center (N.I.C)
responsable de la gestion des noms de domaines pour l'Etat correspondant. Elles
sont identifiées par un code à deux lettres (exemple :
«.fr » pour la France). En France, c'est l'Institut National de
Recherche en Information et Automatique (I.N.R.I.A) qui gère depuis 1987
la zone «.fr», sous la tutelle du Ministère de l'industrie.
Une entreprise disposant d'un service Web aura tout
intérêt à adopter un nom de domaine composé de sa
raison sociale ou de son nom commercial, afin d'être facilement
reconnaissable par l'internaute. On saisit donc clairement tout l'enjeu qu'il y
a pour les entreprises de se faire un attribuer une adresse
électronique, d'autant plus que l'homonymie est ici impossible.
En France, c'est le N.I.C-France qui attribue les noms de
domaine. Cet organisme applique certaines règles, en particulier celles
de la Charte du nommage Internet en France, qui implique que le nom choisi ait
un lien étroit avec le demandeur : il doit correspondre au nom de
l'organisme déposant, à son sigle, ou encore à une marque
déposée par lui. De plus, le N.I.C-France applique le principe du
« premier arrivé, premier servi », ce qui signifie qu'il
vérifie que le nom sollicité n'a pas déjà
été attribué, afin d'éviter tout risque
d'homonymie.
Pour l'enregistrement d'un nom de domaine de la zone
« .com », il convient de contacter l'INTERNIC,
géré aux Etats-Unis par une organisation appelée Network
Solutions Incorporation (N.S.I). Comme pour la hiérarchie
française, on appliquera la règle du « premier
arrivé, premier servi », mais cette fois, il ne sera pas
exigé que le nom désiré corresponde à une marque,
un sigle, ou au nom du demandeur. Cependant, le N.S.I demandera au
requérant de garantir qu'il utilisera ce nom dans un but légitime
et que cela ne porte pas atteinte, à sa connaissance, aux droits
d'autrui.
Si, en soi, l'identification d'un site Internet ne
confère aucun droit de propriété intellectuelle, il peut
arriver qu'un nom de domaine soit considéré comme une
contrefaçon, s'il reprend au profit du détenteur
l'intitulé d'une marque préexistante. De même, l'usage du
nom d'une société concurrente peut poser problème.
Conclusion :
D'une façon générale, le droit actuel en
matière de propriété intellectuelle est capable d'encadrer
les échanges sur Internet. Il n'est donc pas nécessaire de
créer un droit virtuel ou numérique spécifique, comme cela
paraît envisagé dans certains pays tels que les Etats-Unis ou le
Japon. Au contraire, cela nuirait à l'unité
conceptuelle du droit d'auteur et obligerait le législateur à
d'incessantes adaptations afin de suivre les évolutions
technologiques.
Cependant, des difficultés apparaissent au niveau de
l'application de la loi, notamment en raison de l'apparition de nouveaux usages
(nouvelles catégories d'oeuvres, numérisation de
catégories plus anciennes) et de la dimension internationale d'Internet.
II / Difficultés d'application des règles
juridiques sur Internet
A.
Difficultés dans l'application du droit d'auteur face à
certaines catégories d'oeuvres
Les droits d'auteur apparaissent parfois comme
inadaptés aux nouvelles catégories d'oeuvres ou simplement
à la numérisation de catégories plus anciennes. Sans
nécessiter la création d'un droit spécifique pour ces
catégories, il convient de relever les aménagements
réglementaires qui ont été réalisés ou
devraient l'être, sous peine de voir la loi inapplicable ou bien de
paralyser l'activité créatrice des plus entreprenants.
1) Les oeuvres
multimédia
Un produit multimédia apparaît comme un produit
d'une nouvelle génération, qui doit être
protégé, bien qu'il ait du mal à s'intégrer dans
les schémas classiques du droit d'auteur.
· L'imprécision dans la cession des
droits d'auteur
Le produit multimédia étant
généralement le fruit du travail d'un ou plusieurs
salariés, il faut s'interroger sur la protection des auteurs liés
par un contrat de travail, et en particulier sur les conditions du transfert
des droits patrimoniaux à l'employeur.
Pendant longtemps, une partie de la jurisprudence a
adopté une position favorable à l'employeur, malgré les
dispositions légales, en admettant l'idée d'une cession implicite
dès lors que celle-ci est limitée à l'activité
normale de l'entreprise, et que les salariés soient auteurs d'oeuvres
créées dans le cadre d'un contrat de travail. La Chambre civile
de la Cour de Cassation semble avoir mis fin à cette position dans un
arrêt du 16 Décembre 1992. Il faut donc considérer
qu'à priori, il ne peut y avoir ni cession automatique, ni cession
tacite des droits du salarié. Une clause particulière du contrat
de travail devra éclaircir cette situation.
· Les difficultés dans la
détermination des auteurs
En matière de jeu sur support multimédia, la
difficulté réside dans la détermination, parmi tous les
intervenants sur le jeu, de ceux qui peuvent revendiquer la qualité
d'auteur. Par exemple, l'auteur du logiciel, c'est-à-dire du moteur
informatique ne peut revendiquer le statut d'auteur. Par contre, pour les
auteurs à l'origine de la création du jeu multimédia, leur
qualité d'auteur découlera du type de prestation qu'ils auront
effectué, ce qui est assez imprécis et difficile à
évaluer. Ainsi, un infographiste peut réclamer le statut
d'auteur, si son intervention ne se borne pas uniquement à de la
retouche d'images, mais qu'il élabore de toutes pièces des images
et des séquences animées. L'éditeur de jeu doit donc,
dès l'élaboration du jeu, définir par contrat la mission
de chacun. Cependant, il doit éviter de conférer le statut
d'auteur à trop d'intervenants au risque de voir se multiplier les
sources de litiges, notamment en matière de droit moral.
2) Les logiciels
Dans leur grande majorité, les logiciels et programmes
d'ordinateurs sont aujourd'hui des créations réalisées par
des salariés. La loi a ici attribué les prérogatives
patrimoniales du droit d'auteur à l'employeur et gelé les
prérogatives morales de l'auteur, se démarquant du droit d'auteur
classique pour se rapprocher de la notion de copyright
En effet, par la loi 10 mai 1994 du code de la
Propriété Intellectuelle, l'employeur est le titulaire du
logiciel créé par un employé dans l'exercice habituel de
son activité professionnelle ou à la suite de recherches
spécifiquement confiées à l'employé et qui
n'entrent pas dans ses fonctions habituelles. Le salarié reste certes
investi de son droit moral sur sa création, mais celui-ci se limite
à la faculté de revendiquer la paternité de la conception
et de la réalisation.
D'autre part, les logiciels sont théoriquement
protégés par le droit d'auteur et non par le droit des brevets
mais, dans la pratique, l'Office Européen des Brevets accepte parfois de
breveter une invention utilisant un logiciel et l'accord APDIC (Accord sur les
aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au
commerce) n'exclut pas non plus la brevetabilité des logiciels. La
situation actuelle accepte donc les deux types de protection, mais il semble
nécessaire de clarifier cette situation, qui peut être à
l'origine d'ambiguïtés notamment au niveau du cumul des deux
protections.
3) Les bases de
données
Si la mise en place d'une base de données est un projet
lourd financièrement, et important pour la productivité de
l'entreprise, on comprend alors la nécessité d'une protection
juridique efficace et adaptée à ce type d'investissement.
Le Parlement et le Conseil européen ont adopté
le 11 mars 1996 une directive élargissant le droit d'auteur aux bases de
données et fondée sur un régime particulier, qui dissocie
le contenu et la structure d'une telle oeuvre. Le contenu d'une base de
données, ne présentant aucune originalité (puisque
constitué de données chiffrées ou factuelles), est
protégé par un droit sui generis ; la structure, se
concevant d'avantage comme le fruit d'un travail intellectuel original, est
protégée par le droit d'auteur. En effet, la sélection des
informations et l'organisation du contenu correspondent à l'expression
d'une logique, propre à l'auteur de la base. A titre d'illustration, la
Cour d'appel de Paris a considéré, à propos d'un annuaire,
qu'il était protégeable non pour les adresses qui le composent,
mais du fait de la « présentation géaée la qui
en est faite ».
L'esprit de ce droit spécifique consiste donc en la
protection des données en tant que source d'informations, et ce
mécanisme à pour vocation de pallier à
l'inadéquation du droit d'auteur dans la défense des
investissements économiques d'un créateur de base de
données
4)
Les photographies sur Internet
La mise en ligne d'une photographie met en jeu à la
fois le droit patrimonial de l'auteur et son droit moral. La consultation de
sites Web fait apparaître que ce dernier est souvent
malmené : le nom de l'auteur est souvent oublié, les photos
sont modifiées ou recadrées sans autorisation, cela en raison des
nombreuses possibilités offertes par l'ordinateur.
Une adaptation du droit moral dans le secteur, en pleine
expansion, de l'imagerie semble donc nécessaire, au risque de voir la
règle juridique violée et ridiculisée.
Ainsi la réduction d'une photographie induite par sa
numérisation et pour des raisons techniques (de manque de place), ne
devrait pas constituer une atteinte au droit moral de l'auteur. De même
pour le recadrage d'une photo effectué pour des raisons techniques.
En ce qui concerne le pillage du droit patrimonial de
l'auteur d'une photographie, un moyen simple peut consister, lors de la
première divulgation sur le réseau, en l'utilisation d'une faible
résolution de l'image, afin que sa réutilisation soit
dépourvue de tout intérêt esthétique. Ce
mécanisme purement informatique autoriserait les auteurs d'oeuvres
visuelles à mettre en ligne un certain nombre de leurs créations,
sans craindre de piratage intensif.
5)
Les articles de presse on-line
Qu'en est-il de la mise en ligne d'articles de
journalistes ? La cession sur support papier d'un article peut-elle
entraîner implicitement sa numérisation sur le site du
journal ?
L'ordonnance rendue par le Tribunal de Grande Instance de
Strasbourg en faveur des journalistes des Dernières nouvelles
d'Alsace en février 1998 apporte un premier élément
de réponse. Le tribunal a jugé que le journaliste limite la
cession de son droit d'auteur à une première publication et que
la reproduction de l'oeuvre d'un journaliste dans un autre périodique
est soumise à autorisation.
Toutefois, il n'existe pas de règle
générale et chaque journal invente sa propre solution. Ainsi,
Le Monde a signé en 1996 avec les représentants syndicaux,
un accord valable deux ans stipulant que l'autorisation accordée
à l'éditeur pour la réutilisation d'articles sur Minitel,
Internet ou CD-Roms se fait en contrepartie financière. Cependant, de
nombreux éditeurs sont attachés à la notion de copyright
à l'anglo-saxone, qui leur permet de considérer le contenu d'un
journal comme une oeuvre collective, susceptible d'être dupliquée
sur différents supports. Le Syndicat de la presse parisienne et le
Syndicat de la presse quotidienne régionale envisagent de demander au
gouvernement de modifier la loi sur le droit d'auteur sans ce sens.
B.
Les difficultés d'application de la législation liées
à la dimension internationale d'Internet
Si les règles existent en matière de
propriété intellectuelle, il est facile d'y contrevenir,
notamment en raison de la mondialisation du réseau et de la coexistence
de législations différentes, plus ou moins protectrices.
1)
Les conflits de droits nationaux en matière de droit d'auteur
En ce qui concerne les oeuvres protégées, c'est
l'auteur qui décide d'autoriser la mise à disposition du public
de ses oeuvres. Cependant, il faut admettre que dès qu'une oeuvre
d'auteur protégée est numérisée, et mise en
circulation sur Internet, l'auteur perd tout contrôle sur sa diffusion.
Récemment, le groupe de rock U2 a vu ses derniers morceaux
diffusés sans qu'il en ait le contrôle.
L'auteur pourrait codifier son oeuvre, pour permettre
d'identifier son origine, son lieu de première publication, d'anticiper
les utilisations possibles de son oeuvre sur Internet afin de chiffrer la
rémunération qui lui serait due. Mais comment circonscrire
précisément le périmètre d'exploitation de l'oeuvre
sur Internet ? Il ne s'agit pas d'un acte simple. Comment appliquer les
règles de droits d'auteur alors que le délit a lieu dans un pays
qui a une législation différente ?
En effet, le cloisonnement des législations
révèle d'importantes disparités. Certains Etats, en
particulier les pays asiatiques, sont beaucoup plus laxistes en matière
de poursuites des infractions. Un impératif est donc tout d'abord de
définir la loi applicable, celle du pays émetteur ou celle du
pays récepteur :
Dans le cadre d'un contrat, la loi applicable est celle que
les parties ont adoptée, sous réserve des règles et
conventions internationales.
En matière de responsabilité civile
extracontractuelle, la loi applicable est celle du lieu où le fait
dommageable s'est produit (lieu générateur du dommage ou lieu
où il s'est produit).
La loi pénale applicable dépend des Etats. En
France, selon le Code Pénal, « la loi pénale
française est applicable aux infractions commises sur le territoire de
la République. L'infraction est réputée commise sur le
territoire de la République, dès lors qu'un de ses faits
constitutifs a eu lieu sur ce territoire. ». Cependant,
l'identification et l'incrimination d'un prévenu est rendue difficile en
raison de l'utilisation de techniques d'anonymat. De plus, l'entraide
répressive internationale est limitée par la règle de la
double incrimination (qui existe en droit français), qui ne facilite la
poursuite que pour des infractions répondant à une qualification
pénale dans les deux Etats concernés. Dès lors,
l'existence de paradis électroniques n'est pas à
négliger.
La répression des fraudes est d'autant plus
compliquée à mettre en oeuvre qu'il est très difficile de
localiser un serveur qui diffuse une oeuvre sans autorisation. Tout le monde
peut diffuser de chez lui, avec un ordinateur connecté à Internet
et ensuite délocaliser son serveur. Ainsi, quand Pascal Barbraud s'est
vu interdire la mise à disposition du livre du Docteur Gubler sur
Internet, il a menacé de le mettre sur un serveur en République
Tchèque.
Une solution est de réunir des pays autour d'une
convention afin d'harmoniser certaines règles de droit. Ainsi une
convention a eu lieu à Genève en Décembre 1996, pour
s'interroger sur une éventuelle extension des droits d'auteur aux
recopies successives d'une oeuvre. Les opérateurs de réseau et de
sites Internet désiraient que toute donnée publiée une
première fois sur le Net devienne une donnée publique, compte
tenu des recopies inévitables dues aux caractéristiques
techniques d'Internet. A l'inverse, les producteurs étaient partisans
d'une extension du droit de reproduction aux recopies même transitoires
et même en l'absence de transfert chez l'utilisateur final.
2)
Le droit des brevets : un niveau de protection
hétérogène
L'obtention d'une protection juridique sur un brevet est un
leurre si, dans la pratique, il n'est pas possible de la faire respecter. Or
beaucoup d'entreprises mettent en doute l'efficacité de la protection
quand il s'agit de faire cesser et de réprimer la contrefaçon, en
particulier dans certains pays d'Asie.
De ce point de vue, les règles de
propriété industrielle en Europe sont jugées
inadéquates, voire dissuasives, par de nombreuses entreprises. Leur
évolution est nécessaire afin que des projets plus
stratégiques puissent être soutenus. En effet, le brevet est par
excellence l'outil de protection de l'innovation technologique, et sans doute
celui que la France et ses entreprises utilisent le moins bien.
Afin de faciliter la diffusion et l'accès à
l'information, un projet de réseau mondial d'information, baptisé
WIPOnet, a été approuvé dernièrement par les Etats
membres de l'OMPI. Le but de cette initiative est de créer des bases de
données de qualité, pouvant être mises sur le réseau
en toute sécurité par le biais de bibliothèques
numériques permettant d'extraire des données relatives aux
demandes internationales de brevet publiés. Il est ensuite
envisagé de procéder au dépôt électronique
des demandes internationales de brevet, permettant ainsi d'abaisser le
coût du dépôt. A l'échelle européenne,
l'Organisation européenne des brevets met à disposition
près de 30 millions de documents de brevets publiés dans les 19
pays membres, afin de promouvoir l'innovation dans les entreprises
européennes.
Au niveau national, une adaptation du système
judiciaire paraît nécessaire. Il faut notamment examiner les
possibilités de réévaluer les dommages et
intérêts accordés aux victimes de la contrefaçon. En
effet, en France, les indemnités sont fondées sur la
réparation du préjudice subi par le breveté et non pas,
comme aux Etats-Unis, sur la confiscation des bénéfices illicites
réalisés par le contrefacteur. Il convient donc d'engager une
réflexion sur ce thème, de façon à rendre les
sanctions plus dissuasives.
Aux Etats-Unis, la création en 1982 d'une cour
d'appel unique au niveau fédéral pour les brevets et le
triplement des sanctions financières infligées au contrefacteur
«délibéré et conscient» ont beaucoup
contribué à rendre confiance dans le brevet et à
développer son utilisation.
3)
Les conflits de droits nationaux et de régimes juridiques en
matière de noms de domaines.
· Un conflit de régimes
juridiques
La coexistence des différentes procédures
d'enregistrement de nom de domaine a été l'occasion de conflits
importants entre entreprises, en raison de l'utilisation par des tiers de leur
marque sans autorisation préalable. Ainsi, certaines entreprises se sont
vu refuser l'emploi de leur propre marque pour leur site personnel. Elles ont
été obligées de négocier d'importantes transactions
financières afin de pouvoir employer leur marque, antérieurement
enregistrée à l'Internic sous le suffixe
« .com ». Ainsi, après le rachat de Digital et de
son moteur de recherche appelé Altavista, Compacq a dû payer 3
millions de dollars à la société anglaise Alta Vista
Corporation. Cette possibilité de gains substantiels explique que des
entreprises spécialisées mais aussi des particuliers,
déposent des noms de domaine par pure spéculation. Ce piratage
est rendu possible par le fossé existant entre le droit des marques et
le droit des télécommunications. La règle dans le domaine
des Télécommunications et appliquée par l'Internic, est
celle du « premier arrivé, premier possesseur »,
alors que le droit des marques est fondé sur le principe de
spécialité. Cela signifie qu'une marque est déposée
et protégée pour désigner les produits ou services
visés à son enregistrement.
Le 12 mars 1998, le tribunal de Grande Instance de Paris a
considéré, dans ce genre d'affaire, que reconnaître la
thèse du « premier arrivé, premier servi »
est incontestablement préjudiciable à la société la
plus ancienne, qui se trouve ainsi dépossédée sur Internet
de la dénomination sociale qui l'individualise dans l'ensemble de son
existence et de ses activités, alors qu'elle jouit d'un véritable
droit de propriété sur celui-ci.
· Un conflit de droits nationaux
La grande diversité des pratiques dans la gestion des
différents noms de domaines (que ce soit au niveau de la nature de
l'organisation responsable de la gestion, de la protection du droit des
marques, des conditions d'enregistrement des noms de domaine) est à
l'origine de conflits au niveau international.
Suite à l'augmentation de ce type de
conflits, le NSI a élaboré une charte le 9 Septembre 1996, dont
le but est de prévoir des modes de règlement des litiges
concernant les noms de domaines. Elle prévoit la possibilité pour
le titulaire d'une marque, de déposer une réclamation
auprès du NSI, lorsqu'il aura été constaté
l'enregistrement par un tiers d'un nom de domaine comparable à cette
marque déposée. Le NSI adressera alors une mise en demeure au
déposant du nom litigieux, le contraignant à fournir dans les
trente jours un justificatif démontrant sa titularité sur sa
marque. Si l'organisme ou la société en question ne parvient pas
à se justifier, le NSI lui demandera d'abandonner le nom de domaine. En
cas de refus, le nom de domaine litigieux sera mis en attente et aucune des
parties ne pourra l'utiliser jusqu'à ce qu'elles trouvent un terrain
d'entente ou qu'un juge ait tranché l'affaire.
Une entreprise française pourrait
bénéficier d'une telle procédure, dans
l'éventualité ou une firme étrangère enregistre un
nom similaire à sa marque au sein de la zone
« .com ». Cependant, le dispositif risque de s'alourdir,
puisqu'il faudra soit diligenter une procédure dans l'Etat de
l'entreprise contrevenante, soit obtenir la reconnaissance de la
décision juridictionnelle française devant le tribunal
étranger.
Au niveau de la zone « .fr », le
contrôle effectué par le N.I.C-France permet d'éliminer les
cas de fraude manifeste. L'enregistrement comme nom de domaine de la
dénomination sociale d'une société concurrente sera
impossible. Rappelons qu'en vertu de l'article L711-4 du Code de la
propriété intellectuelle, il est interdit d'adopter un signe ou
une marque, s'il existe un risque de confusion avec une dénomination
sociale ou une enseigne déjà connue sur le territoire.
Cependant, des conflits peuvent survenir entre marques
similaires désignant des produits différents, mais qui souhaitent
utiliser le même nom de domaine sur le réseau. C'est pourquoi, une
société désireuse d'enregistrer le nom de son site Web
aura tout intérêt à déposer simultanément la
marque correspondante. Il semble effectivement qu'en cas de litige, une marque
déposée sera plus facilement prise en compte par un tribunal ou
le N.S.I, plutôt qu'un simple nom commercial.
Quant aux titulaires de marques françaises, souhaitant
une extension internationale, ils devront adresser une demande à
l'I.N.P.I qui sera transmise à l'O.M.P.I. Il faut cependant rappeler,
que les pays anglo-saxons et en particulier les Etats-Unis, n'adhèrent
pas aux traités administrés par l'O.M.P.I.
Enfin, la Convention de l'Union de Paris du 20 mars 1883,
où adhèrent cette fois les Etats-Unis, a mis en place un
mécanisme de priorité, autorisant le déposant d'un
enregistrement national, à procéder à des
dépôts dans les autres pays membres, dans un délai de six
mois.
On constate que le système actuel de gestion des noms
de domaines sur Internet ne pourra satisfaire longtemps tous les titulaires de
marques, ou les entités désireuses de protéger leur
dénomination sociale. « La création d'une instance
réellement internationale devient une nécessité, On peut
imaginer une structure dépendant de l'OMC afin de régler ce genre
de problèmes » estime Pierre Reboul, président de
l'Electronic Business Group.
Conclusion :
Les divers problèmes d'application qui viennent
d'être évoqués peuvent néanmoins être
résolus, tout au moins en partie. La plus grande des difficultés
réside dans le caractère transfrontalier d'Internet face au
morcellement des législations. Plusieurs solutions sont à
envisager, qu'elles soient d'ordre techniques (cryptographie), juridiques,
politiques (coopérations internationales) ou économiques
(autorégulation).
III / La diversités
des solutions
Le nouveau mode de communication qu'Internet introduit
à pour particularité essentielle un accès à
l'information grandement facilité. Il s'affranchit des contraintes de
distances et de temps, des frontières, et offre à tous un
égal accès à l'information qui constitue sa richesse.
Le droit de la propriété intellectuelle, qui
vise à réglementer la création et la transmission des
oeuvres de l'esprit doit donc se mettre en accord avec ces nouvelles
facilités. Il appartient de même à la technique de
faciliter l'application des règles déjà existantes, qui,
on l'a vu, peuvent dans la plupart des cas s'appliquer. Cependant, le
caractère transfrontalier du réseau implique une
coopération internationale, non seulement des états, mais aussi
des utilisateurs, qui doit déboucher sur une harmonisation des
règles.
La conciliation entre la facilité de communication
offerte par le réseau et les principes de la propriété
intellectuelle devra donc se faire par le biais d'une coopération
internationale.
A) La conciliation entre la
facilité de communication et les principes de la propriété
intellectuelle.
Les nouvelles facilités de communication offertes par
le réseau provoquent ou sont susceptibles de provoquer de nombreuses
atteintes au droit de la propriété intellectuelle, mais, le
réseau des réseaux offre aussi des opportunités
culturelles très importantes. Il paraît donc souhaitable de
concilier les principes de la liberté d'information et de la
liberté d'expression, qui sont à la base du développement
d'Internet, avec les principes du droit de la propriété
intellectuelle, et notamment la protection des auteurs. Le réseau doit
donc s'adapter au droit, et le droit doit s'adapter au réseau.
1) Le réseau doit
s'adapter au droit
Comme nous l'avons déjà évoqué, la
numérisation de l'information et la disparition du support
matériel ont pour conséquence une nouvelle facilité de
circulation, de modification, d'altération de l'information qui s'offre
à tous. C'est ainsi que, d'une part, elle peut être facilement
copiée ou modifiée, ce qui entraîne de nombreuse atteintes
potentielles au droit d'auteur, concernant le respect de
l'intégrité de l'oeuvre, mais aussi le droit de reproduction.
D'autre part, le développement du télétravail et des
transmissions de données entre les différents sites d'une
entreprises entraîne un accroissement considérable du risque de
vol de données et donc d'atteintes à la propriété
intellectuelle. Ainsi, de nombreuses entreprises utilisent des ordinateurs
reliés au réseau dans le cadre de leurs programmes de
Recherche-Développement ou de conception de nouveaux produits, ce qui
peut conduire à des litiges concernant le droit de la
propriété industrielle et plus particulièrement le droit
des brevets.
Par exemple, la firme américaine Boeing, a conçu
son dernier avion à partir de plusieurs bureaux d'études distants
de plusieurs milliers de kilomètres et reliés entre eux par le
réseau.
Pour encourager le développement des activités
économiques, par la protection de la propriété
intellectuelle, le réseau se doit donc d'offrir des solutions techniques
de sécurité concernant la transmission et le stockage des
informations, mais aussi l'authentification des documents. On peut penser, par
exemple, à l'utilisation de la cryptographie RSA (Rivest Shamir Adleman)
aussi nommée cryptographie asymétrique. Celle-ci fonctionne avec
deux clés : une clé public et une clé privé.
Les deux sont utilisées pour le cryptage, et la clé privée
sert à décrypter. Ce système permet aussi bien de
sécuriser les données (à l'instar des autres
systèmes de cryptage), mais aussi d'authentifier les documents,
éventuellement grâce au concours de serveurs de clés
publiques, en créant une véritable signature électronique.
Cependant, la cryptographie n'est pas encore totalement
libéralisée. Il paraît aussi souhaitable de conserver une
certaine liberté de communication. Le réseau, par
l'avancée technologique qu'il apporte, doit donc aussi contraindre le
droit à s'adapter.
2) Le droit doit s'adapter au
réseau
· Les tempéraments apportés au
droit d'auteur :
Le droit de la propriété littéraire et
artistique est assorti de tempéraments visant à promouvoir la
liberté d'expression, liberté fondamentale, et à favoriser
la circulation de l'information. C'est ainsi qu'en France, le Code de la
Propriété Intellectuelle, dans l'art. L122-5, définit des
tempéraments au droit d'auteur, tels que, la copie à usage
privé. Il faudrait donc apporter de nouveaux tempéraments aux
droits d'auteurs, plus adaptés à la nature du réseau.
(Pour éviter des problèmes tels que l'assignation de
propriétaires de pages Web personnelles qui reprennent des oeuvres
protégées, souvent sans savoir qu'ils sont dans
l'illégalité). En effet le concept de copie à usage
privé est peu adapté au monde digital car, d'une part,
il permet le téléchargement et donc offre une grande
facilité de duplication, et d'autre part, il introduit une
difficulté dans la distinction entre privé et public (On peut
penser au procédé des listes de diffusion).
Il paraît donc logique d'apporter des
tempéraments au droit d'auteur qui seraient définis selon l'usage
des oeuvres. Ainsi, le droit anglo-saxon autorise la reproduction des oeuvres
protégées par le copyright si elle ne nuit pas à l'auteur.
Cette exception d'usage loyal (ou fair use) implique la possibilité de
faire des copies à usage privé pour le propriétaire de
l'oeuvre, mais aussi pour d'autres personnes, si cette copie est
utilisée à des fins de recherche ou d'enseignement. Cette
exception fait l'objet d'une jurisprudence au cas par cas, ce qui la rend
difficile à systématiser. Néanmoins, le critère de
l'usage non lucratif peut souvent induire son application. En outre, le
développement du concept de shareware, souvent utilisé pour les
logiciels, introduit une nouvelle exception. Dans ce cas, l'utilisateur peut
se servir d'un programme pour l'essayer et ne doit rétribuer l'auteur
que s'il s'en sert réellement. Il s'agit donc d'une nouvelle exception
au droit d'auteur qui s'est développée
« naturellement », et avec l'accord des auteurs.
On peut aussi regretter que la jurisprudence française
dans le cadre de l'affaire Microfor / Le Monde qui autorisait les
abstracts et résumés d'oeuvres d'autrui n'ait pas
été reprise par la directive européenne de 1996 sur les
banques de données.
Cette question reste donc en suspens et nécessitera
dans l'avenir une réponse adaptée au nouvel environnement,
d'autant plus que les textes internationaux sont flous. En particulier, la
convention de Berne, laisse la plupart du temps aux états membres, la
faculté d'adopter des dispositions concernant les tempéraments
à apporter aux droits d'auteur.
· L'épuisement international des droits
d'auteurs
Les fabricants de logiciel commercialisent leurs produits
à des prix différents selon les pays, tout en interdisant par le
biais d'accord de licence les importations parallèles.
Mais, au vu des facilités de transfert de
données qu'offre Internet, comment empêcher réellement les
importations parallèles tout en maintenant une politique de prix
réduits pour les pays en voie de développement ? En d'autres
termes, la vente d'un logiciel implique-t-elle un transfert de
propriété ? (Qui permettrait au propriétaire de
revendre son exemplaire). Dans l'affirmative, l'auteur perd alors son droit sur
l'ouvrage vendu.
On peut noter que ni l'accord ADPIC, ni la commission
européenne n'apportent de solution à ce problème. Or, il
s'agira probablement d'un point crucial quant à l'accès des pays
en voie de développement à la société de
l'information. Il est néanmoins possible de considérer que
l'achat d'une oeuvre protégée correspond à l'achat d'un
droit d'usage, en principe non cessible.
Dans tous les cas, il paraît nécessaire d'adopter
une position claire sur ce sujet, au niveau international, pour permettre aux
fabricants de pratiquer des prix inférieurs pour les pays en voie de
développement, et donc de développer le commerce
électronique avec ces pays.
Néanmoins les adaptations juridiques nécessaires
à la société de l'information devront
impérativement se faire au niveau international.
B) La
nécessité d'une entente internationale
Le réseau Internet a souvent été
considéré comme une zone de non droit parce que l'application de
dispositions légales préexistantes se heurte à de
multiples difficultés, notamment en raison de son caractère
international et la multiplicité de ses acteurs. C'est ainsi qu'un
autocontrôle semble préférable au système classique
des réglementations législatives contraignantes. Celui-ci doit
s'appuyer sur les règles de droit déjà en vigueur. Pour le
mettre en place d'une manière efficace, une coopération
internationale des états est indispensable, de manière à
unifier les règles.
1)
L'autorégulation
L'autorégulation vise à obtenir de la
communauté des internautes une application efficace des principes de la
propriété intellectuelle. Elle s'adresse non seulement aux
titulaires des droits, mais aussi aux utilisateurs et aux
intermédiaires. Il faut donc mettre en place des institutions propres au
réseau, qui ont pour but l'information et la responsabilisation des
acteurs, ainsi que la prévention et le règlement des litiges.
· Information et responsabilisation
Tout d'abord, la création d'une charte de l'Internet,
devant être respectée par tous les acteurs du réseau
(producteurs de contenu, intermédiaires) semble souhaitable. Elle
permettrait ainsi de clarifier les règles applicables et conduirait les
sites hébergeant des pages web à exiger de leurs clients le
respect des principes de la propriété intellectuelle. Diverses
propositions ont été déjà formulées, comme
celle de la commission Beaussant qui a remis en mars 1997 au gouvernement une
proposition de charte de l'Internet, celle de l'Association canadienne des
Fournisseurs d'Internet (A.C.F.I) ou encore celle de l'association des
providers britanniques (I.S.P.A.).
· Prévention
La création de dispositifs visant à
prévenir les conflits par le biais d'une harmonisation des
procédures est essentielle. Il faut donc évoquer les
récentes initiatives que sont l'ICANN et le réseau mondial de
l'OMPI. L'ICANN est une structure chargée d'administrer la politique de
nommage des sites Internet. Il lui revient d'harmoniser les règles de
nommage avec le droit international des marques de manière à
éviter les pratiques de « cybersquatting ». Le
réseau mondial d'information de l'OMPI doit, lui, relier les
différents offices de propriété intellectuelle, et
permettre à terme le dépôt électronique des demandes
internationales de brevets. Ces deux structures devraient permettre de
résoudre les problèmes touchant la propriété
industrielle (droit des marques, droit des brevets). En outre, la
création d'un observatoire international du réseau, a l'instar du
rôle joué en France par l'union des fabricants (UNIFAB) peut
permettre de déceler les atteintes à la propriété
intellectuelle.
· Arbitrage
Une instance d'arbitrage permet d'éviter les instances
judiciaires. Cela permet un règlement non conflictuel des litiges mais
surtout, évite les conflits entre les lois des différents pays,
ce qui est particulièrement appréciable en matière de
droit appliqué à Internet. C'est ainsi que dans le cadre de
l'OMPI, un mécanisme de règlement accéléré
des litiges a été institué auprès de la commission
INTERDEPOSIT. Cette procédure, dite de « médiation et
d'arbitrage en ligne », a vocation à régler le plus
rapidement possible les différends survenus entre internautes en
matière de droits de propriété intellectuelle et se
déroule en une phase de médiation et une phase d'arbitrage. On
peut aussi citer l'initiative du Centre de Recherche en Droit Privé de
l'université de Montréal qui a développé un projet
expérimental de résolution des litiges dans le cyberespace
appelé cybertribunal, ainsi que le « virtual magistrate
project », développé par L'A.A.A., une association
d'arbitrage américaine.
Mais la mise en place et la pérennité de ces
institutions ne peut se faire que par la voie d'une coopération au
niveau internationale.
2) La coopération
internationale
La coopération doit être mondiale, mais il
appartient avant tout aux pays européens de se mettre d'accord entre
eux.
· Au niveau européen
Dans le domaine de la propriété industrielle,
le droit communautaire a d'ors et déjà institué des
processus de dépôt de marques et de brevets à
l'échelle de l'union européenne. Ainsi, l'Office des brevets de
Munich délivre des brevets dont les effets s'étendent à
tous les pays de l'Union Européenne, l'office d'harmonisation
d'Alicante effectuant un travail similaire dans le domaine des marques. Il faut
donc systématiquement encourager les dépôts de marques et
brevets européens afin de remplacer à terme (au moins pour ce qui
touche à Internet) les offices nationaux par les deux institutions
précédemment citées. De même, il paraît
souhaitable de développer les projets de dépôt en ligne
tels que EASY et MIPEX. Par contre, dans le domaine de la
propriété littéraire et artistique, la législation
communautaire présente encore des lacunes. Néanmoins, la
commission travaille à une harmonisation des législations des
états membres et a publié le livre vert sur le droit d'auteur et
les droits voisins dans la société de l'information en 1996,
ainsi qu'un projet de directive en 1997. De plus la directive de 1996 sur les
banques de données aborde certains aspects du droit d'auteur.
L'Union Européenne semble avoir réellement pris
conscience de l'importance d'une législation communautaire sur la
propriété intellectuelle, ce qui peut et doit lui donner une
bonne position dans les négociations qui auront probablement lieu au
plan international.
· Au niveau mondial
La protection de la propriété intellectuelle
n'a cessé de s'affirmer depuis la convention de Berne dans les pays
industrialisés, et depuis les accords ADPIC conclus dans le cadre du
GATT en 1993, dans les pays en voie de développement. Mais les
problèmes soulevés par l'avènement d'Internet et de la
société de l'information vont probablement conduire à de
nouvelles négociations internationales sous l'impulsion de l'OMPI. C'est
ainsi que se met en place l'ICANN, solution aux problèmes de nommage.
Mais on a vu que de nombreux problèmes ne trouvaient de solution qu'au
niveau international. De nouvelles négociations auront lieu, donnant
probablement naissance à de nouvelles autorités de
régulation
BIBLIOGRAPHIE
· Livre
Propriété Littéraire et artistique et
droits voisins, Claude Colombet, (8ème édition),
DALLOZ
Grands principes du droit d'auteur - Approche de droit
comparé, Claude Colombet Ed. LITEC
Rapport du conseil d'état sur la société
de l'information
Livre vert sur le droit d'auteur dans la société
de l'information, Commission Européenne
Avis du comité économique et social sur le livre
vert
· Articles
* Les droits d'auteur passent à l'ère du
numérique, Le Figaro, 24/12/96
* Un rapport du Conseil d'Etat estime qu'Internet n'a pas
besoin d'un droit spécifique, Le Monde, 09/09/98
* Les problèmes juridiques posés par Internet,
les problèmes liés au respect de la loi sur Internet, La
Correspondance de la presse, 11/09/98
* Internet : une jurisprudence déjà
abondante, Les Echos, 23/09/98
* La base de données est susceptible d'être
protégée par les droits d'auteur, La Tribune, 17/11/98
* Les marques sont confrontées au piratage sur les
adresses Internet, La Tribune, 23/11/98
* La presse s'interroge sur les droits d'auteur liés
aux médias électroniques, Le Monde, 06/02/98
* Internet, droit d'auteur et photographie,
Légipresse, Novembre 1997
* Mission Lorentz sur le commerce électronique, groupe
propriété intellectuelle et nommage
* Quelle culture dans le cyber espace et quels droits
intellectuels pour cette cyber culture ?
* Jérome HUET - Recueil Dalloz 98 Chroniques p.185
* Pour une épure de la propriété
intellectuelle, Michel VIVANT
· Articles Internet
- Noms de domaine et droit des marques, avril 1997,
http://www.fgassocies.com/
- Les aspects juridiques d'Internet, novembre 1998,
http://www.fgassocies.com/
- Internet « hors-la-loi » ?,
juillet 1996, http://www.fgassocies.com/
- Les logiciels crées par les employés :
un droit d'auteur échappant à leur auteur
http://www.fgassocies.com/,
- La mise sur Internet sans autorisation d'une oeuvre
protégée est une contrefaçon, novembre 1996
http://www.fgassocies.com/,
- Maîtriser les contraintes de la cession des droits
pour le multimédia, octobre 1996 http://www.fgassocies.com/,
- Jeux Multimédia : auteurs d'un genre
nouveau ?, http://www.fgassocies.com/
- Les droits de l'employeur, producteur d'une oeuvre
multimédia réalisée par un salarié,
http://www.fgassocies.com/
- Politique des brevets : éléments
généraux, janvier 1997, http://www.chez.com
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