WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le régime juridique des étrangers au Cameroun


par Martine AHANDA TANA
Chaire UNESCO des droits de la personne et de la démocratie de l'université d'Abomey-Calavi de Cotonou au Bénin - DEA droits de la personne et de la démocratie 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

b) Les discriminations dans la politique de l'emploi

Dans tout Etat, le candidat à l'emploi doit prouver à l'employeur qu'il a le niveau d'instruction exigé. Ainsi, la politique de l'emploi tient compte des droits à l'instruction et à l'éducation prônés par les articles 26 de la DUDH et 13 du PIDESC. C'est en vertu de ces dispositions que, pour ce qui est des établissements publics en particulier, les étrangers réguliers bénéficient de l'enseignement au Cameroun au même titre que les nationaux. A l'université de Yaoundé II, par exemple, les droits universitaires s'élèvent à cinquante mille francs CFA pour tous sans aucune distinction. Cet effort de l'Etat mérite tout de même d'être souligné car dans d'autres pays à l'instar du Bénin, il existe encore un traitement très différencié. A l'université d'Abomey-Calavi notamment, les droits universitaires s'élèvent à quinze mille francs CFA pour le national et trois cent mille francs CFA pour les étrangers réguliers99(*). L'ampleur de ce déséquilibre dans l'exercice du droit à l'éducation laisse perplexe car une telle attitude donne l'impression que cet Etat exclut les étrangers de classe sociale pauvre du bénéfice de l'enseignement supérieur. Or le Bénin n'ignore pas l'importance de ce droit dans l'épanouissement social futur des intéressés.

En ce qui concerne le Cameroun, une fois ses études terminées, l'étranger est sujet à moult discriminations dans la recherche de l'emploi. Les Etats sont le plus souvent hostiles à l'entrée des étrangers dans la fonction publique100(*). Aussi, nous sommes-nous interrogée sur la réglementation de l'emploi dans le secteur privé ainsi que pour ce qui est du statut des travailleurs exerçant dans le secteur public mais régis par le Code camerounais du travail. L'étude du cas des travailleurs migrants démontre notamment qu'ils ne trouvent pas satisfaction dans l'ensemble car l'Etat ne se conforme ni à la législation universelle, ni à celle communautaire.

En effet, en vertu de la protection universelle du travailleur migrant, les règles de l'OIT consacrent l'égalité de travail entre les nationaux et les étrangers sans aucune discrimination. Or, le Cameroun s'en écarte totalement. Contrairement aux nationaux, les étrangers demandeurs d'emploi doivent remplir certaines conditions fixées par le décret de 1990. A titre d'exemple, les travailleurs nationaux bénéficient d'une priorité d'emploi car les étrangers ne peuvent travailler qu'après visa de leur contrat par le ministre du travail. L'article 27 de la loi n°92/007 du 14/08/1992 portant Code du travail au Cameroun reprend d'ailleurs cette disposition du décret. Nous pouvons parler, à juste titre, de la « camerounisation de l'emploi ». 29 % des étrangers interrogés se plaignent d'ailleurs des violations de nombreux droits de la deuxième génération, à l'instar du droit au travail. Ils affirment n'avoir pas obtenu un emploi parce qu'ils sont des étrangers, malgré leur qualification. Ce sont des pratiques xénophobes  car contraires à la constitution de 1996 qui dispose pourtant dans son préambule que « tout homme a le droit de travailler ». Par ailleurs, un décret pris le 22 novembre 1993 leur interdit de travailler dans le secteur informel101(*). Ce décret est  contraire au préambule de la constitution du 18 janvier 1996 qui affirme que « tout homme a le devoir de travailler ». Or, cela n'est pas le cas dans d'autres pays. En Suisse par exemple, les immigrés sont sur-représentés dans le secteur informel par rapport aux nationaux : 60 à 80 % du personnel de nettoyage sont des expatriés. En France c'est pareil car, du moment qu'ils sont en règle, nous retrouvons surtout les immigrés parmi les balayeurs de rues et les serveurs de restaurants102(*).

En outre, dans la protection communautaire du travailleur migrant, les ressortissants des Etats membres de la CEMAC sont des bénéficiaires privilégiés du droit au travail. Pourtant, il n'en est rien dans les faits car les nationaux des cinq autres Etats membres ne sont pas épargnés par les discriminations relevées précédemment. Quand ils ont pu obtenir un emploi, les immigrés de la sous-région ne sont généralement pas affiliés à la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS). Or, il s'agit d'une structure de l'Etat en charge de la sécurité sociale103(*) de tous les travailleurs qui relèvent du Code du travail. Nous citerons le cas des travailleurs migrants de nationalité tchadienne qui ne sont ni immatriculés à la CNPS, ni protégés par un quelconque syndicat104(*), contrairement à l'article 8(1)(a) du PIDESC.

S'il semble très aisé de défendre le droit d'accès des étrangers à la justice et à l'emploi, le débat est encore houleux pour ce qui est de l'exercice du droit de vote.

* 99 Toutefois, il faut préciser que les ressortissants des Etats membres des différentes communautés auxquelles est partie le Bénin, ont un régime moins défavorable que les étrangers tiers. De plus, les réfugiés payent le même taux de scolarité que les nationaux.

* 100 Par exemple, l'article 39(4) du Traité de Rome instituant la Communauté Européenne, autorise les Etats membres à mettre sur pied des réglementations appropriées réservant pour leurs nationaux les emplois dans l'administration publique. Les emplois concernés sont liés à l'exercice de la puissance publique et à l'attribution des responsabilités pour la sauvegarde des intérêts généraux de l'Etat. Voir DOLLA (Patrick), Libre circulation des personnes et citoyenneté européenne : enjeux et perspectives, Bruxelles, Bruylant, 1998, pp. 43-47.

* 101 Il s'agit de l'exercice de certains métiers assez lucratifs que les Etats rangent dans la catégorie des petites et moyennes entreprises (P.M.E). Nous pouvons citer, sans exhaustivité, la coiffure et la couture.

* 102 WINDISCH (Uli), Immigration: quelle intégration ? Quels droits politiques ? Lausanne, L'Age d'homme, 2000, pp. 63-64.

* 103 Il s'agit d'un ensemble de privilèges dont bénéficient obligatoirement tous les travailleurs régis par le Code du travail institué en 1992. Sans prétendre à l'exhaustivité, nous pouvons citer les allocations familiales, les assurances maladies, les crédits scolaires et les pensions retraites.

* 104 MBAÏNAYE (Bétoubam), Dossier sur les Tchadiens du Cameroun - première partie « quand l'eldorado se transforme en cauchemar », IN Revue de presse tchadienne « Laltchad presse », 09 février 2004. ( http://www.ialtchad.com/dossiertchadiensducameroun.htm).

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille