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Le régime juridique des étrangers au Cameroun


par Martine AHANDA TANA
Chaire UNESCO des droits de la personne et de la démocratie de l'université d'Abomey-Calavi de Cotonou au Bénin - DEA droits de la personne et de la démocratie 2004
  

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CONCLUSION

La situation peu enviable des immigrés vivant au Cameroun suscite une réflexion sur les moyens appropriés à mettre en oeuvre pour améliorer leurs conditions de vie. En effet, à ce stade final de la recherche, nous constatons que leurs droits sont violés suite aux insuffisances des législations communautaires et internes. Ces résultats vérifient ainsi les hypothèses avancées au début de la présente étude.

Aussi, sans vouloir prétendre à l'exhaustivité, il sied de formuler quelques suggestions qui constituent notre apport à la recherche de solutions durables à la question du régime juridique des étrangers au Cameroun.

Ainsi, par rapport aux failles de la législation interne, des solutions de droit et de fait sont envisageables :

Sur le plan du droit, nous en notons deux principales.

En premier lieu, il est impératif de réformer de nombreux textes juridiques, spécialement la constitution du 18 janvier 1996 du fait qu'elle souffre de nombreuses imperfections ayant un impact négatif sur le statut des expatriés. Une telle réforme permettrait à la norme suprême de refléter l'idéal démocratique et l'éthique des droits de l'homme. La réforme ne sera possible que si elle respecte deux conditions cumulatives :

- D'une part, elle nécessite la participation du peuple au processus d'adoption de la nouvelle constitution. En effet, Pierre PACTET193(*) affirme que le procédé le plus démocratique d'élaboration de la constitution est certainement celui qui soumet au peuple ou pouvoir constituant originaire, pour ratification, le projet élaboré par l'Assemblée Constituante. Ainsi, le peuple intervient alors, une première fois, tout au début du processus d'établissement de la constitution pour désigner ses représentants, en l'occurrence les membres de ladite Assemblée, puis une seconde fois, tout à la fin pour entériner ou rejeter le projet constitutionnel.

- D'autre part, le contenu d'une constitution démocratiquement adoptée donne une définition claire, précise et détaillée des droits et devoirs individuels. Aussi, le texte fondamental, au-delà de la simple reconnaissance préambulaire des libertés de la personne humaine, doit consacrer tout un chapitre, voire, un titre dans le corpus, à la présentation explicite du statut juridique des individus en général et des étrangers en particulier194(*).

En second lieu, une autre solution semble efficace sur le terrain juridique. En effet, malgré les failles du système normatif camerounais, nul ne peut nier, comme l'indique Josette NGUEBOU195(*), que « les droits existent déjà, il faut seulement les appliquer ». Le problème majeur qui se pose se situe donc au niveau des mécanismes d'application de ces droits. De ce fait, étant donné que le meilleur garant des libertés fondamentales de la personne humaine est le juge national, l'Etat est tenu de renforcer ses compétences, d'assurer son indépendance vis-à-vis du pouvoir politique et de le préserver de toute corruption. Par ces moyens, le juge camerounais jouerait véritablement son rôle de protecteur des droits de l'homme dans l'ensemble et, plus spécifiquement, des droits des étrangers.

Sur le plan institutionnel, une solution s'avère primordiale : il est souhaitable que l'Etat crée un Office Camerounais de Protection des Réfugiés et des Apatrides (OCPRA). En effet, la démonstration faite dans les analyses précédentes prouve que les réfugiés et les apatrides constituent la catégorie la plus fragile d'expatriés que le droit international protège par des conventions spécifiques. Une telle structure au plan national aura pour mission essentielle la gestion des problèmes rencontrés par ces derniers (à l'exclusion des étrangers réguliers et des immigrés clandestins qui ne peuvent que se contenter de bénéficier de la protection des droits de l'homme d'une façon générale). Certaines conditions sont donc nécessaires à cette fin.

En effet, un tel office public devrait être doté d'une personnalité juridique propre, de l'autonomie financière et administrative. De ce fait, l'organisme jouirait d'une large indépendance à l'égard des services administratifs avec possibilité, dans son fonctionnement, de s'ouvrir à la collaboration avec d'autres organismes spécialisés, notamment le HCR. En outre, il est préférable que son responsable ait qualité de haut fonctionnaire de l'Etat et soit assisté d'un Conseil constitué non seulement des délégués des départements ministériels, mais aussi et surtout, d'au moins un représentant des organisations officiellement habilitées à s'occuper des réfugiés et des apatrides, à l'instar du HCR. Ainsi, le délégué du HCR assisterait aux séances du Conseil et pourrait y présenter ses observations et ses propositions. Une telle présence constituerait alors la garantie essentielle d'une saine application du droit international.

Il est indispensable d'appréhender les missions qui devront être dévolues à l'OCPRA. Nous pouvons principalement en distinguer quatre. Tout d'abord, le responsable de l'Office est seul compétent pour reconnaître la qualité de réfugié à toute personne qui répond aux définitions des Conventions de Genève du 28 juillet 1951 et de l'OUA du 10 septembre 1969 se rapportant au statut des réfugiés. Cette compétence devra être absolue. Ensuite, l'Office exercera la protection juridique et administrative des réfugiés et apatrides dans le cadre des Conventions internationales y relatives. Puis, il leur délivrera les pièces nécessaires à l'accomplissement de divers actes de la vie civile. Enfin, un dialogue devrait être engagé entre le responsable de l'Office et le gouvernement dans le souci d'établir les procédures ou les critères d'octroi de la nationalité camerounaise aux apatrides. A travers ces quatre missions fondamentales, l'Office sera donc chargé d'appliquer scrupuleusement la réglementation internationale. Ainsi, autonome vis-à-vis du pouvoir politique et en collaboration constante avec le HCR, l'OCPRA assurera au mieux la protection des apatrides et des réfugiés sur l'ensemble du territoire national196(*).

En ce qui concerne les imperfections de la législation communautaire, il serait préférable que les normes régionales et sous-régionales clarifient les droits énoncés, notamment ceux liés à la protection des étrangers. Par ailleurs, afin que le Cameroun ne s'avise plus de violer délibérément les droits des immigrés, l'U.A et la CEMAC devraient mettre en place des mécanismes de contrôle plus contraignants à l'égard de tous les Etats membres.

Toutefois, la question qui demeure posée est celle de savoir si l'Etat saura répondre suffisamment à ces attentes. Autrement dit, le Cameroun est-il prêt à mettre en oeuvre toutes ces conditions favorables à la reconnaissance effective du droit des étrangers ?

A notre avis, c'est surtout une question de volonté, ainsi que d'une intériorisation préalable de la cause des droits de l'homme en général et du problème des étrangers en particulier, dans la politique nationale.

* 193 PACTET (Pierre), Institutions politiques et droit constitutionnel, 21e édition, Paris, Armand Colin, 2002, pp 69-71.

* 194 A ce sujet, voir à titre d'exemple, la loi N° 90-32 du 11 décembre 1990 portant constitution de la République du Bénin, notamment en son Titre II consacrant les droits et devoirs de la personne humaine, pp 7-12.

* 195 Propos de NGUEBOU (Josette), durant les « échanges et débats », In MAUGENEST (Denis) et POUGOUE (Paul-Gérard), Op Cit, pp 86-87.

* 196 A titre d'exemple, le rôle joué par l'Office Français de Protection des Réfugiés et des Apatrides (OFPRA). Pour plus de détails sur les activités de l' OFPRA, Voir SALOMON (Robert), Op Cit., pp 102-110.

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