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Le défi du désendettement soutenable en Afrique Subsaharienne: Au-delà de l'Initiative PPTE.

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par Claire Barraud
Université Pierre Mendès France, Grenoble II - M2 recherche Politiques économiques et sociales 2006
  

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2 ...Démontrant la nécessité d'un élargissement du nombre de bénéficiaires.

Plutôt que de parler d'incohérence, il vaudrait mieux aborder le thème d'adaptation de l'initiative aux réalités des pays surendettés. Car les pays qui sont intégrés méritent de l'être, il s'agit donc seulement de voir si d'autres économies ne le mériteraient pas également. En effet, en 2001, la population des PPTE ne représentait que 11% de la population totale des PED, de même que leur dette ne constitue que 10% du stock total de la dette des PED.

En outre, l'indicateur de soutenabilité de la dette (ISD) de Berr et Combarnous offre des résultats très différents de ceux donnés par les indicateurs traditionnels. Pour les 92 pays pour lesquels les données étaient disponibles en 2004, il ressort que les pays les plus durement affectés par la dette sont le Belize, la Hongrie, le Burundi, la Pologne, le Kazakhstan, l'Uruguay, le Brésil ou encore la Turquie. Or, seul le Burundi a été admis à bénéficier d'un allègement de sa dette au titre de l'IPPTE. Il est actuellement en période intermédiaire. A l'inverse, les pays pour lesquels le problème de l'endettement est le moins violent (bien que réel) sont le Cambodge, le Togo, le Botswana, l'Albanie, le Belarus, la Chine ou encore l'Ethiopie. Parmi eux, le Togo est en train de négocier son entrée dans le point de décision. «Les pays éligibles à l'initiative PPTE présentent pour leur part des valeurs d'ISD très nettement inférieures à la moyenne ». De fait, «le classement « officiel» des pays selon leurs niveaux d'endettement perd largement de sa pertinence »19. Néanmoins, avant de fournir les résultats d'autres études,

19 Berr E. et Combarnous F., 2006, op. cit., p. 15.

il serait nécessaire de relativiser les résultats de celle-ci. Car s'il est vrai que les pays les plus durement touchés par l'endettement selon l'ISD mériteraient d'être éligibles à l'initiative, l'indicateur ne prend toutefois pas en compte les possibilités qu'ont les différentes économies d'honorer leurs obligations. Or, il est clair qu'entre le Burkina Faso et la Hongrie par exemple, la différence est manifeste en termes d'accès à différentes sources de financement (IDE, exportations, accès aux marchés internationaux de capitaux, localisation géographique, dont l'appartenance à la zone économique intégrée qu'est l'UE, suscitant des effets d'entraînement...). Nous pensons donc que le classement «officiel» est «pertinent », dans le sens où la priorité doit effectivement être donnée aux pays qui sont actuellement éligibles. Néanmoins, il est sûr que l'initiative doit être élargie à d'autres pays lourdement endettés.

De manière générale, le Rapport 2003 de la plate-forme Dette et Développement fournit un tableau des pays «pays méritant d'être intégrés à l'initiative PPTE selon Jubilee 2000 et le World Watch Institute (voir tableau 17 en annexe p.156)20. Parmi eux apparaissent des pays asiatiques, continent pauvre délaissé par l'IPPTE il est vrai, avec notamment l'Afghanistan, le Bangladesh, le Cambodge ou encore l'Indonésie, une grande victime de la crise financière de 1997.

Dans les cas particuliers tenant à l'Afrique subsaharienne (ASS), le cas du Nigéria est intéressant. Recensé parmi les pays les plus pauvres du monde (avec un IPH atteignant 35, soit plus faible que 10 PPTE qualifiés), le Nigéria regroupe le cinquième de la population de l'ASS et environ les trois quarts de sa population survivent avec moins d'un dollar par jour. Le Nigéria correspond en plus au cas typique de ce qui est communément appelé une «dette odieuse» (cf. infra) car des décennies de dictature ont laissé le pays débiteur de 29,4 milliards de dollars (en 1999). La majorité de la dette est détenue par le Club de Paris. Mais le pays a été exclu de l'initiative en 1999. La raison officielle du FMI et de la Banque étaient que seuls les pays financés exclusivement par l'AID pouvaient être considérés comme PPTE. Malheureusement, l'effet de seuil a joué en défaveur du Nigéria car au lieu de bénéficier d'un PIB par habitant de 875 $ pour être considéré comme pauvre au sens de l'IDA...le pays ne dispose « que » de 884 $21 . Pour le Fonds et la Banque, le pays, étant données ses importantes ressources pétrolières, peut recevoir des financements « mixtes » (IDA et BIRD).

20Ajaltouni N. et al., sous la direction de Merckaert J., 2004, Plate-forme Dette et Développement, rapport 2003, «La dette face àla démocratie », p13.

21 Id.

Néanmoins, ses capacités d'emprunt sont très limitées àla BIRD et le pays ne peut donc emprunter à des conditions favorables. De plus, «il est aujourd'hui largement reconnu que les ressources naturelles [comme le pétrole] n'apportent pas toujours les profits escomptés en matière de croissance et de développement »22. D'ailleurs, preuve en est avec un ratio moyen VAN de la dette/exportations de 163% (contre 150% exigés pour l'éligibilité à l'IPPTE) et une ratio moyen VAN de la dette/RNB de 82% (contre le seuil critique exigé de 80% par la BM). En outre, si l'ouverture du pays, en raison de ses exportation de pétrole, ou l'indisponibilité des données sur les recettes publiques du Gouvernement nigérian peuvent compromettre l'analyse, il est alors possible de se référer au ratio service de la dette/RNB qui supérieur à celui de la moitié de l'ensemble des PPTE admis. Mais même jugé lourdement endetté par la Banque mondiale, le pays a dû négocier sa dette au Club de Paris où il n'a obtenu que des rééchelonnements et des moratoires23 sur certains encours. «Le Nigéria devra donc rembourser 1,7 Mds $ en 2002, soit 700 millions $ de plus qu'en 2001, malgré un nouveau rééchelonnement de sa dette obtenu fin 2001 auprès du Club

de Paris »24.

Le cas du Kenya illustre quant à lui le cas d'une autre dette odieuse ainsi que celui d'une lourde dette intérieure, dont l'impact est négligé. De 1970 à 1995, la dette extérieure totale du Kenya a été multipliée par 15 (de moins de 500 millions à 7,4 milliards). Elle est retombée à 6 milliards en 2001, dont 5 milliards pour la part publique. Parallèlement, la dett e intérieure publique du pays est tout aussi inquiétante (2,5 milliards de dollars fin décembre 2001) et le service de la dette intérieure était, entre 1999 et 2000, plus de deux fois plus élevé que celui de la dette extérieure, dont l'encours était pourtant trois fois plus élevé. Ainsi, l'encours de la dette intérieure a grimpé pour atteindre près de 30% du PIB en 2002. Si les critères de l'IPPTE jugent la dette kenyane supportable, Were [2001] a montré que, même sans la dette intérieure, la dette extérieure du pays nuit à sa croissance et à son développement. Un allègement pourrait alors réduire l'extrême pauvreté, sachant que près des deux tiers des 30 millions de Kenyans vivent avec moins de deux dollars par jour (un quart avec moins de un dollar)25. Par exemple, Nafula [2002] montre qu'un allègement de la dette aiderait le pays

22 CNUCED, 2004, op. cit., p. 51.

23 Délais.

24 Mabilais R. et de La Forest-Divonne A., Plate-forme Dette et Développement, in Rapport 200 1-2002, «La dette des pays du Sud et le financement du développement », p.42.

25 CNUCED, 2004, op. cit., p. 50.

à assurer l'accès universel à l'enseignement primaire. Enfin, Birdsall et Williamson [2002, p. 131 et 132] considèrent que l'argument de la dette odieuse est largement valable dans le cas du Kenya car « une élite dirigeante corrompue a gaspillé ou amassé en fortune personnelle des milliards de dollars, en partie au su et avec le soutien des créanciers du

pays »26.

Ces cas font légion. De nombreux pays pauvres et lourdement endettés en Afrique sont exclus de l'initiative, à chaque fois pour une histoire de seuil. Dans ces conditions le problème du surendettement africain ne peut être réglé. Mais plus encore, les pays qui ont « la chance» d'y être admis ne sont même pas assurés d'un retour à la stabilité de leur taux d'endettement, et encore moins de leur économie toute entière.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus