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Le défi du désendettement soutenable en Afrique Subsaharienne: Au-delà de l'Initiative PPTE.

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par Claire Barraud
Université Pierre Mendès France, Grenoble II - M2 recherche Politiques économiques et sociales 2006
  

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II - ... A une solution partielle en matière de résultats.

Nombre de personnes (société civile internationale, Gouvernements et populations des PPTE, économistes de tout bord...) pensent que l'initiative PPTE et son IADM ne sont qu'une exhumation des politiques d'ajustement structurel. En tant que telle, elles imposent des conditionnalités toujours aussi strictes et difficilement applicables, et ne permettent pas, loin de là, d'affirmer que les taux d'endettement seront désormais soutenables, au moins à moyen terme.

A/ Entre exhumation et réelle immortalité des conditionnalités...

Le consensus de Washington, alors même qu'ayant vu ses limites démontrées à de multiples reprises, ne semble pas avoir disparu des programmes des IFI. Le processus est non seulement semé d'obstacles, mais il s'agit encore d'obstacles posés, directement ou indirectement, par les IFI. Par conséquent, l'effectivité de la participation de la population et de la société civiles est biaisée.

1 Un processus PPTE semé de conditions.

Le rapport de la plate-forme Dette et Développement se demande si « les DSRP, destinés à adapter les réponses au contexte spécifique de chaque pays, [ont abandonné le] «catéchisme économique» des PAS. Et «de toute évidence, leur foi dans le dogme néolibéral est trop an-

26Ajaltouni N. et al., sous la direction de Merckaert J., 2004, Plate-forme Dette et Développement, rapport 2003, «La dette face àla démocratie », p. 21

cré »27. Si aucun PPTE africain n'a bénéficié d'une marge de manoeuvre digne de ce nom, les IFI ont surtout gardé la main mise sur la définition des politiques macroéconomiques (commerce, investissement, fiscalité, politique monétaire, privatisations). «La recette ressemble étrangement aux plans d'ajustement structurel »28.

Tout d'abord, il convient de rappeler que le pays, avant toute admissibilité, doit mettre en oeuvre un programme d'ajustement structurel pendant une période dite « flottante ». Déjà.

Ensuite, la FRPC, puis le DSRP, dictent les objectifs macroéconomiques (voir tableau 18 en annexe p.1 57), structurels ainsi que ceux liés à la bonne gouvernance. Et ce sont bien souvent les IFI qui dictent les modalités de ces dispositifs, soit directement (lorsque le pays ne parvient pas à rédiger son DSRP), soit indirectement (parce que le pays sait ce que les IFI attendent de lui pour l'admettre au point de décision). C'est la raison pour laquelle tous les DSRP sont plus ou moins similaires. Par ailleurs, même si le pays n'a pas à mettre en oeuvre «son » programme dans un délai strictement imparti (phase intermédiaire), l'allègement au point d'achèvement ne survient tout de même que s'il y est parvenu. Ce qui constitue une condition suffisante pour appliquer toutes les réformes selon le syndrome de la « shopping list »29.

Au niveau macroéconomique, les conditions sont souvent considérées comme trop restrictives, si bien que beaucoup de gouvernements ne parviennent pas à les remplir assez rapidement et prennent du retard, alors même que, parfois, l'allègement de leur dette relève de l'urgence. Il leur est en outre demandé de réduire leur taux d'inflation, de maîtriser leur déficit budgétaire et leur dett e publique, ainsi que de constituer des réserves de devises pour davantage de crédibilité et pour favoriser l'investissement (étranger surtout). Les conséquences dans la mise en oeuvre sont alors les mêmes que lors des PAS. Les retours à la stabilité des prix, à celle du déficit budgétaire et de la dette impliquent un strict encadrement des dépenses publiques, une politique monétaire rigoureuse (avec notamment des taux d'intérêt élevés) ainsi qu'une politique fiscale favorisant les revenus issus du capital. Les gouvernements ont tous du mal à renflouer les caisses publiques, compte tenu notamment de la faible collecte effective des impôts et de la mise en oeuvre, en prime, d'un programme de lutte contre la pauvreté.

27Ajaltouni N. et al., sous la direction de Merckaert J., 2004, Plate-forme Dette et Développement, rapport 2003, «La dette face àla démocratie », p. 21

28 Id.

29 Sans considération de priorité ni de temps.

Les conditionnalités d'ordre structurel sont toutes aussi délicates à remplir. Elles concernent massivement les privatisations, parfois dans des secteurs clé. C'est le cas par exemple du Burundi, qui doit privatiser sa filière café, ou du Mali, dans le secteur du coton (voir tableau 19 en annexe p.15 8). Quant aux conditionnalités afférentes à la «bonne gouvernance », elles ont surtout trait à la gestion des finances publiques, mais aussi au suivi des dépenses sociales. Dans une moindre mesure, elles concernent également les réformes de la fonction publiques ou encore la lutte anti-corruption. A titre d'illustration, le Congo, le Tchad ou la République démocratique du Congo (RDC) sont soumis à sept types de conditions dans le domaine de la gestion des finances publiques, et le Congo doit au total respecter une vingtaine de conditionnalités dans le seul domaine des critères de gouvernance. Pourtant, «peu de recherches ont été menées pour savoir si les conditions de gouvernance ont un impact sur la lutte contre la pauvreté. On ne sait pas non plus quelles autres conditions de gouvernance pourraient venir en soutien pour assurer des conditions vraiment destinées à la lutte contre la pauvreté »30. De fait, si leur nombre a sensiblement diminué, les conditionnalités n'ont en rien disparu.

Mais ce n'est pas tout. Les conditionnalités concernent également l'IADM, et tout l'avenir, à moyen terme au moins, des PPTE les plus vulnérables. Au regard de l'IADM, «quatre pays (Belgique, Pays-Bas, Norvège et Suisse) avaient émis le souhait en juillet 2005 que les PPTE ne bénéficient d'allègements que «par étapes » liées à des « conditionnalités appropriées »31. Ce n'est pas la proposition qui a été retenue, mais elle a tout de même influencé le FMI puisque, alors même que le G8 avait promis une annulation immédiate et donc inconditionnelle, le FMI a retardé l'allègement au titre de l'IADM de certains pays, sans justification. En 2005, la Mauritanie a ainsi dû « attendre un peu », sans explication officielle, pendant que l'Ethiopie, qui bravait systématiquement les droits de l'Homme, voyait sa dette multilatérale s'envoler. Autant dire que dans ce cas, les signaux du FMI envoyés à la communauté financière internationale sont pour le moins ambigus. « Ce sont même six pays qui auraient été recalés par le FMI, fin 2005, sous des prétextes fallacieux, (...) pour les pays qu'ils n'avaient plus sous

30 Fourmy S., 2005, « L'initiative PPTE et ses conditionnalités : petite carotte et gros bâton », Plate-forme Dette et Développement, chapitre 4 du rapport 2005/2006, «La loi des créanciers contre les droits des citoyens », p. 60 à 64.

31 Merckaert J. 2006, «Dix ans après le lancement de l'initiative PPTE. Evaluation critique du traitement de la dette par le G8 », d'après analyses développées dans les chapitres 1 et 2 du Rapport 2005-2006 de la plate-forme Dette & Développement, «La Loi des créanciers contre les droits des citoyens », co-écrits respectivement avec Fourmy S. etAjaltouniN., p 15 et 16.

son contrôle [et qui] n'auraient plus été sous programme du FMI au 1er janvier 2006 »32. Cette ingérence injustifiée, dix ans après le lancement de l'IPPTE, constitue donc le vice « inexorcisable » du Fonds.

Un pêché qui s'étend bien au-delà des initiatives puisque, brièvement, les deux grandes IFI disposent d'indicateurs pour noter les pays, même lorsqu'ils ne sont débiteurs de rien à leur égard. Le FMI a alors développé en 2005 un Instrument de soutien à la politique économique (ISPE) qui aide [les] pays [« à faible revenu qui ne désirent pas bénéficier, ou n'ont pas besoin, d'un concours financier du FMI »] à élaborer des programmes économiques efficaces et, une fois ceux-ci approuvés par le Conseil d'administration, il informe les donateurs, les banques multilatérales de développement et les marchés que le FMI a approuvé le plan d'action des membres33. Dans tous les cas, tout pays pauvre qui désire un financement extérieure public parce qu'il n'a pas accès aux marchés internationaux a affaire à des donateurs qui «posent comme condition à leur aide que le pays ait reçu l'approbation du FMI »34. Quant à la Banque, elle avait déjà lancé son indicateur de « bonne gouvernance », l'Évaluation de la politique et des institutions nationales (CPIA), de plus en plus influent parmi les bailleurs. «Aussi les pays souhaitant bénéficier de nouveaux financements internationaux, fût-ce exclusivement par dons, doivent-ils se conformer aux critères de notation de la Banque mondiale. Or, ceux-ci évaluent dans quelle mesure les pays ont mis en oeuvre les réformes préconisées par ladite Banque... »35.

Les IFI disposent donc, en tout lieu et en tout temps, encore aujourd'hui, d'un droit de veto sur toutes les décisions de politiques économiques des pays pauvres et très endettés. Une telle similitude avec le processus en vigueur sous les PAS est troublante. Or, si les PAS ne sont pas parvenus à solutionner (bien au contraire) le fardeau de l'endettement excessif en Afrique, les Initiatives n'y parviendront pas plus dans ces conditions. En outre, une telle ingérence ne peut que remettre en cause l'effectivité du droit des populations et de la société civile à intervenir dans le processus PPTE.

32 Id, p. 16.

33 http://www.imf.org/external/np/exr/facts/fre/psif.htm

34 Stiglitz J. E., 2002, in «La grande désillusion », éd. Fayard, p. 85.

35 Merckaert J. 2006, op. cit., p. 17.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo