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L'accord de Cotonou et la lutte contre la pauvreté

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par Yaya MORA BROUTANI
Institut d'études politiques de Toulouse - Master géopolitique et relations internationales 2006
  

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La réaffirmation des composantes « traditionnelles » du volet politique

Le Partenariat impose à la fois de bâtir un cadre institutionnel démocratique et de permettre aux ressortissants de bénéficier de droits et libertés. Dès le Préambule de la Convention de Cotonou, les partenaires affirment ces objectifs, « reconnaissant qu'un environnement politique garantissant la paix, la sécurité et stabilité, le respect des droits de l'homme, des principes démocratiques et de l'État de Droit [...] fait partie du développement à long terme ; reconnaissant que la responsabilité première de la mise en place relève des pays concernés ». L'article 9 relatif aux « éléments essentiels et élément fondamental » aborde ces aspects et les considère comme étroitement liés, indissociables. Cependant, il convient, dans un premier temps, d'envisager la condition d'un État de Droit et de la démocratie, en tant que rappel d'une exigence déjà ancienne, pour, dans un second temps, étudier la place des droits de l'homme dans la coopération au développement.

La Démocratie : le rappel d'exigences déjà anciennes

Il convient, d'une part, de replacer ces deux exigences dans le contexte général et historique des relations ACP - CE avant, d'autre part, de voir les apports de la Convention de Cotonou.

1- Considérations de l'Etat de droit et de la démocratie dans le contexte des relations ACP-UE

L'État de Droit et la Démocratie sont deux concepts étroitement liés. D'une manière générale, le premier peut être défini comme l' « État dont l'organisation est réglée par le droit et la justice »144(*). Cette structure permet d'offrir un certain nombre de garanties aux citoyens, notamment grâce à une séparation des pouvoirs effective, la mise en place d'un contrôle de constitutionnalité et de l'indépendance de la justice. La démocratie est un principe qui consiste à faire participer le peuple au gouvernement et à l'administration de l'État soit directement soit, plus couramment, indirectement, par l'intermédiaire de représentants élus.

La « neutralité politique » qui caractérisait les premières conventions de Lomé a commencé à s'effacer dès Lomé III, pour définitivement disparaître de Lomé IV, la révision de 1995 et la Convention de Cotonou, chacun de ces textes apportant une pierre à l'édifice du volet politique. La démocratie et l'État de Droit se sont manifestés explicitement dans l'article 5 de la Convention de Lomé IV révisée145(*). Il semble que les événements intervenus dans le monde, à l'issue des années 80, notamment la fin de la guerre froide et la chute du mur de Berlin, aient été à l'origine d'une prise de conscience quasi-générale du rôle des éléments politiques dans le processus de développement des États sous-développés.

Bien que Lomé IV révisée soit considérée par certains146(*) comme un texte complet du point de vue politique, il n'en reste pas moins que la pratique n'a pas mis en évidence la démocratisation massive des États ACP. Cependant, il convient de relever que ce processus, entamé il y a peu de temps, est une démarche longue et douloureuse.

La Mauritanie en est d'ailleurs un exemple parfait. Soumise à un régime présidentiel de nature plutôt autoritaire, cet État a amorcé, dans les années 90, un « processus de démocratisation `contrôlée' »147(*).

L'engagement des partenaires ACP-UE vise donc à imposer la démocratie et l'État de Droit comme un schéma politique optimal. Ainsi, la coopération lance un défi très audacieux : relever les États ACP des crises politiques graves qu'ils traversent. Le poids de cette responsabilité pèse donc actuellement sur la Convention de Cotonou.

L'approche de l'État de Droit et de la démocratie par la Convention de Cotonou

La Convention de Cotonou a renforcé, dans le texte, le volet politique en définissant précisément les concepts de principes démocratiques et d'État de droit.

Les principes démocratiques sont définis comme « des principes universellement reconnus sur lesquels se fonde l'organisation de l'État pour assurer la légitimité de son autorité, la légalité de ses actions qui se reflète dans son système constitutionnel, législatif et réglementaire, et l'existence de mécanismes de participation »148(*). Ainsi, il s'agit de mettre en place un système dans lequel le peuple exerce, directement ou par l'intermédiaire de représentants élus, sa souveraineté selon des moyens et principes propres à chacun des États149(*). Plus que des principes, le Partenariat vise à réaliser un véritable « processus de démocratisation ».

La position de la Communauté en la matière a été synthétisée dans un règlement du Conseil du 29 avril 1999 relatif à la fixation des « exigences pour la mise oeuvre des actions de coopération au développement qui contribuent à l'objectif général du développement et de la consolidation de la démocratie et de l'État de Droit ainsi qu'à celui du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales »150(*). La Communauté s'attache donc, non seulement à la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, à encourager la pluralité politique et la bonne marche des élections, mais également prône une participation accrue des citoyens. Cependant, au-delà de ces préoccupations, il s'agit d'un processus global regroupant des notions plus spécifiques telles que l'État de Droit et la bonne gestion des affaires publiques.

L'objectif ultime n'est pas seulement de parvenir à une démocratisation des États ACP mais surtout de réussir le pari d'élaborer une véritable culture démocratique propre. La Convention de Cotonou aborde les « principes démocratiques », et non la démocratie, afin d'englober le large processus dans lequel ils s'inscrivent. Dès lors, il s'agit d'une démarche graduelle que les partenaires entendent soutenir du début jusqu'à la fin.

Les principes démocratiques se situent donc au coeur de l'approche « matérielle », à savoir des moyens qu'elle met à la disposition de l'État pour mener des actions prises par le biais du peuple, pour le peuple. Cependant, cette vision est utopique car, même dans les pays considérés comme démocratiques, les citoyens ne sont pas toujours, en pratique, au coeur de la prise de décision.

Quant à l'État de Droit, il « inspire la structure de l'État et les compétences des divers pouvoirs, impliquant en particulier des moyens effectifs et accessibles de recours légal, un système judiciaire indépendant garantissant l'égalité devant la loi et un exécutif qui est pleinement soumis au respect de la loi »151(*). Dès lors, les partenaires doivent organiser l'État en tenant compte de fonctions considérées comme élémentaires : le cadre juridique, structurant l'État en plusieurs branches distinctes, est donc un élément important pour les États ACP.

Le concept d'État de droit constitue une limitation des prérogatives de l'État. En effet, ce contre-pouvoir permet d'éviter les éventuelles dérives des acteurs étatiques. Ce phénomène ne peut se produire que grâce au développement du droit, lequel doit primer sur les actions étatiques.

En d'autres termes, démocratie et État de droit imposent la réunion de nombreux éléments, les plus symboliques étant la présence de plusieurs partis politiques et d'une opposition au régime en place, le droit de vote pour l'ensemble de la population accompagné d'une « éducation civique », une justice dégagée de toute astreinte étatique, une presse libre et indépendante, la déconcentration du pouvoir entre plusieurs organes (présence d'une assemblée parlementaire aux côtés du chef de l'État par exemple), la présence de contre-pouvoirs indépendants.

L'architecture que doit revêtir l'État ainsi que les moyens dont il doit se doter ont une vocation apparemment universelle. Si d'autres schémas peuvent être envisageables, il n'en reste pas moins que les institutions internationales, au même titre que la Communauté européenne, reconnaissent que l'État de droit et la démocratie sont les deux piliers d'un modèle considéré comme optimal.

* 144 Dictionnaire de droit international public, sous la direction de Jean Salomon, précité.

* 145 « Dans une telle perspective, la politique de développement et la coopération sont étroitement liées au respect et à la jouissance des droits et libertés fondamentales de l'homme, ainsi qu'à la reconnaissance et à l'application des principes démocratiques, à la consolidation de l'Etat de droit et à la bonne gestion des affaires publiques »

* 146 Selon Dieter Frisch, par exemple : « Pour ma part, j'estime que le texte le plus récent pour Lomé (Lomé IV bis) est, du point de vue politique, complet et à jour » - La dimension politique de Lomé, Le courrier n°166, novembre décembre 1997, p.82

* 147 De Francis Levèbvre, le Courrier mars avril 2002, p. 51

* 148 Article 9 2), 2ème paragraphe de la Convention de Cotonou

* 149 « La démocratie n'appartient à personne. Elle peut être et elle doit être assimilée par toutes les cultures. Elle est susceptible de s'incarner dans des formes multiples afin de mieux s'inscrire dans la réalité des peuples. La démocratie n'est pas un modèle à copier sur certains Etats, mais un objectif à atteindre par tous les peuples ! Elle est l'expression politique de notre patrimoine commun ». - Extrait du discours du Secrétaire Général Boutros Boutros Galhi en ouverture de la Conférence mondiale sur les droit de l'homme, « Les Nations Unies et les droit de l'homme 1945-1995 », livre bleu, volume VII, New-York, 1995

* 150 Règlement CE n°975/1999, JOCE L 120 du 8 mai 1999, p. 1à 7

* 151 Article 9 de la Convention de Cotonou

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand