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Notion et régulation de l'abus de puissance économique

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par Azeddine LAMNINI
Université Sidi Mohammed Ben Abdellah Fès - DESA 2008
  

Disponible en mode multipage

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Université Sidi Mohammed Ben Abdellah

Fès

Faculté des sciences économiques, juridiques et sociales

UFR : Droit de la concurrence et de la consommation

Notion et régulation de l'abus de puissance économique.

MEMOIRE

POUR L'OBTENTION DU DIPLOME DES ETUDES SUPERIEURES APPROFFONDIES

SOUS LA DIRECTION DU

Professeur : Abdelhamid AKHRIF

PRESENTE ET SOUTENU PUBLIQUEMENT

Le : 25/12/2008

PAR : LAMNINI Azeddine

MEMBRES DU JURY

- Professeur Abdelhamid AKHRIF

- Professeur Noureddine TOUJGANI

- Professeur Mohamed CHELH

Je remercie

Monsieur Abdelhamid AKHRIF, Professeur à l'université Sidi Mohammed Ben Abdellah Fès, d'avoir accepté de diriger ce mémoire, ainsi que pour ses conseils et sa confiance ;

Monsieur Noureddine TOUJGANI, Professeur à l'université Sidi Mohammed Ben Abdellah Fès, pour le temps qu'il m'a accordé, pour sa patience, sa présence, son soutien, ainsi que pour ses nombreux conseils techniques, méthodologiques et bibliographiques ;

Monsieur Mohammed CHELH, professeur à l'université Sidi Mohammed Ben Abdellah Fès, d'avoir accepté de faire partie des membres du jury de ce mêmoire ;

Je remercie également l'ensemble des membres du centre de droit des obligations et des contrats pour les suggestions qu'ils m'ont apportées.

A mes parents et à ma petite famille

« Si donc je me suis chargé d'une tâche si lourde pour mes épaules, ce n'était pas faute de connaître notre faiblesse, mais parce que je savais que ce genre de combat - le combat intellectuel, veux-je dire - a ceci de particulier que la défaite même est profitable.

De là résultent à bon droit, même pour les plus faibles, la possibilité et le devoir non seulement de ne pas refuser de se battre, mais bien de le souhaiter. Car celui qui succombe reçoit du vainqueur un bienfait, loin de subir un dommage, puisque grâce à lui il s'en retourne plus riche, c'est-à-dire plus savant, et mieux préparé aux futurs combats.

J. Pic de la Mirandole

De la dignité de l'homme.

« Le droit positif doit rester chose vivante. Or, vivre, c'est se mouvoir et se transformer. Pour le droit, c'est plus encore : c'est lutter, en vue d'une parfaite et constante adaptation aux exigences de la vie sociale.

Cette vie, cette lutte, supposent et impliquent un organisme, incessamment productif, qui reçoive tous les éléments du dehors, et les élabore, en lui-même, pour les projeter ensuite dans son champ d'activité propre. De cette façon, seulement, le droit peut rester maître du mouvement, qu'il doit sans cesse diriger. A l'heure actuelle, le besoin se fait sentir d'introduire, en notre organisation positive, plus de fraternité profonde, [...] de solidarité sociale, c'est-à-dire ; tout simplement, [...] de mieux égaliser les conditions de lutte entre les activités rivales. [...] On peut différer d'avis, sur l'importance, qu'il convient d'attribuer à ces aspirations, et, surtout, sur les moyens d'y satisfaire. Mais leur existence n'est pas contestable et il serait téméraire de passer outre, en semblant les ignorer. Or, comme la plupart des idées qu'elles renferment, ne se peuvent réaliser efficacement, qu'en passant dans la vie juridique. »

GÉNY (F.)

Méthode d'interprétation

et sources du droit positif

LISTE DES ABREVIATIONS

A. Colin.

Armand Colin

A.R.T.

Agence de la régulation des télécommunications

act.

Actualité

al.

Alinéa

B.O.

Bulletin officiel

BOCC

Bulletin officiel du conseil de la concurrence

BOCCRF

Bulletin officiel de la concurrence, la consommation et la répression des fraudes

Bull. civ.

Bulletin officiel civil

Bull. crim.

Bulletin officiel criminel

C. consom

Code de la consommation

C.O.B.

Commission de l'opération de bourse

C.P.T

Code Poste et télécommunications

C.S.A

Conseil du supérieur de l'audiovisuel

CA

Cour d'appel

Cah. dr. entr.

Cahier du droit de l'entreprise

Cass. civ.

Cour de cassation, chambre civile

Cass. Com

Cour de cassation, chambre commerciale

Cass. crim.

Cour de cassation, chambre criminelle

Cass. soc.

Cour de cassation, chambre sociale

CE

Commission Européenne

Cf.

Confer (comparer avec = voir)

chap.

Chapitre

Chron.

Chronique

CJCE

Cour de la justice de la communauté européenne

Coll.

Collection

comm.

Commentaire

Cons. conc.

Conseil de la concurrence

Contrats conc. consom.

Revue contrats concurrence consommation

CREDA

Centre de recherches sur le droit des affaires

CS

Cour suprême

CTTJ

Centre de traduction et de terminologie juridique

D

Dossier

D. affaires

Recueil Dalloz affaires

D.O.C.

Dahir des obligations et des contrats

déc.

Décision

Defr.

Defrénois

dir.

Direction, sous la direction

doc.

Doctrine

doctr.

Doctrine

Dr. et patr.

Revue droit et patrimoine

éd.

Edition

EDF

Electricité de France

et al.

Et d'autres

Ex.

Exemple

fasc.

Fascicule

Gaz. Pal.

La gazette des palais

GDF

Gaz de France

Ibid.

Ibidem (au même endroit)

Id.

Idem (le même)

In

Dans

infra.

Ci dessous (plus bas)

J.Cl. Civil

Jurisclasseur civil

J.Cl. Conc. Consom

Jurisclasseur concurrence consommation

J.Cl. Eur.

Jurisclasseur Europe

J.Cl. Resp. civ. et assur

Jurisclasseur responsabilité civile et assurance

JCP éd E

Jurisclasseur périodique (semaine juridique) édition entreprise

JCP éd G

Jurisclasseur périodique (semaine juridique) édition générale

JCP éd. N

Jurisclasseur périodique (semaine juridique) édition notariale

jur.

Juridique

Jurispr.

Jurisprudence

L.

Loi

Lamy Dr. et Pat.

Lamy droit et patrimoine

LGDJ

Librairie Générale du Droit et de la Jurisprudence

loc. cit.

loco citato (dans la même oeuvre sur la même page)

LPA

Les petites affiches

M.

Monsieur

Mél

Mélange

Numéro

not.

Notamment

obs.

Observation

op. cit.

opere citato Dans l'ouvrage cité

p.

Page

P.D.G.

Président Directeur Général

Part.

Partie

PUAM

Presse universitaire d'Aix-Marseille

R.F.S.P.

Revue française des sciences politiques

R.T.D.civ.

Revue trimestrielle de droit civil

R.T.D.com.

Revue trimestrielle de droit commerciale

rapp.

Rapport

Rec. CE

Recueil de la Commission Européenne

Rec. D.

Recueil Dalloz

REMALD

Revue marocaine d'administration locale et de développement

REMDED

Revue marocaine de droit de l'entreprise et du développement

Rép. civ.

Dalloz répertoire du droit civil

Rép. com.

Dalloz répertoire du droit commercial

Reprint

Réediter

Rev. Lamy dr. aff.

Revue Lamy droit des affaires

RJ com.

Revue de la jurisprudence commerciale

RJCS

Revue de la jurisprudence de la Cour suprême

RJDA

Revue de la jurisprudence de droit des affaires

RMDE

Revue marocaine du droit économique

RSMP

Revue des sciences morales et politiques

RSMP

Revue des sciences morales et politiques

RTD eur.

Revue trimestrielle du droit

s.

Suivant

somm.

Sommaire

Spec.

Spécialement

Sté

Société

Supra

Ci-dessus

t.

Tome

T. confl

Tribunal des conflits

th.

Thèse

Trad.

Traduction, traduit par

v.

Voir

vol.

Volume

SOMMAIRE

Première partie - IDENTIFICATION DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE

Chapitre I - L'EXISTENCE DU POUVOIR ECONOMIQUE SUSCEPTIBLE D'ABUS

Section I - La nature du pouvoir à l'origine de l'abus

Section II - La mesure du pouvoir économique susceptible d'abus

Chapitre II - L'EXISTENCE DE L'ABUS DANS L'EXERCICE DU POUVOIR ECONOMIQUE

Section I - Les manifestations de l'exercice abusif du pouvoir économique

Section II - Les conséquences juridiques de l'exercice abusif du pouvoir économique

Deuxième partie - REGULATION DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE

Chapitre I - LE DIRE JURIDIQUE REGULATEUR DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE

Section I - La revivification de certains instruments juridiques pour la protection de la partie faible

Section II - L'adaptation de la fonction judiciaire pour la protection du marché

Chapitre II - LE FAIRE JURIDIQUE REGULATEUR DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE

Section I - La lutte contre les abus de puissance économique par le renforcement du cadre contraignant

Section II - La lutte contre les abus de puissance économique par la restauration des conditions d'un débat équilibré

INTRODUCTION

1. La réalité de la nature humaine. Le combat pour la vie et pour le mieux être est une réalité première, archaïque des mondes végétal, animal et humain1(*). S'agissant du monde humain, le progrès de la civilisation a consisté à transcender, à sublimer cette réalité de sorte qu'elle est combattue par beaucoup de doctrines2(*). Dans une société avancée, la lutte individuelle n'a plus pour enjeu la survie de l'individu, mais il reste que certains enjeux de la compétition ne peuvent être partagés. L'inquiétude de l'étudiant et de l'amoureux en atteste. A la solitude du coureur de fond, répond celle du navigateur solitaire. Il n'y aura qu'un seul vainqueur3(*). Et il n'est pas neutre que ceux-là mêmes qui aspirent à une égalité de traitement se repaissent du spectacle d'une compétition parfois poussée au-delà des limites de l'humain4(*).

Cela dresse de l'homme un sombre tableau ce qui rejoint une des thèses que soutient Freud dans « Malaise dans la civilisation » : « L'homme n'est point cet être débonnaire, au coeur assoiffé d'amour, dont on dit qu'il se défend quand on l'attaque, mais un être, au contraire, qui doit compter au nombre de ces données instinctives une bonne somme d'agressivité »5(*).

2. Réalité omniprésente dans les sociétés contemporaines. Même vécue par procuration, cette réalité de la compétition reste présente dans la société humaine, car elle en est une composante essentielle dans tous les rapports humains, sociaux, familiaux, politiques et économiques. Cette réalité inhérente à la nature humaine se manifeste, le plus, aujourd'hui dans le domaine économique.

En effet, cette compétition est le fondement de l'économie libérale. Elle est considérée par la théorie économique comme le moteur du progrès économique en raison de l'optimisation qu'elle permet de l'allocation des ressources6(*). Cette idée de compétition7(*) est au coeur du modèle libéral. Elle vise à atteindre un but économique. Elle expose le marché comme le meilleur régulateur de l'économie8(*). Les fonctions de l'offre et de la demande, sont les seules qui déterminent les qualités et les prix des produits, aucune planification n'est donc nécessaire9(*).

3. L'abandon du libéralisme économique sous sa forme classique. Le postulat libérale classique a fait l'objet de critiques ardues par une doctrine économique10(*) au cours de la première moitié du siècle dernier, notamment, lors de la crise économique de 1929 et sa propagation en Europe, marquée par le triomphe des théories keynésiennes, ainsi que les crises conséquentes à la deuxième guerre mondiale11(*). Cette situation a provoqué un renforcement du rôle économique et social de l'Etat12(*) concrétisé par sa présence massive dans les marchés ainsi que la suppression de certaines libertés individuelles.

4. Le retour au libéralisme économique sous une nouvelle forme : le néolibéralisme. Ce déclin des théories économique libérales ne va pas perdurer. En effet, suite à l'échec des remèdes keynésiens, l'Etat providence va être réfuté par les économistes de l'école de Chicago, notamment Milton Friedman ainsi que par l'école autrichienne13(*). Selon cette doctrine, l'économie dirigée est mourante parce qu'elle entendait se substituer aux marchés, aux opérateurs et à leurs choix. Parce que tendant à diriger, elle était par essence en conflit avec la liberté individuelle. Dans cette direction l'échec était programmé, selon des auteurs dont la voix fait autorité en la matière14(*). Ainsi, la fin des années soixante-dix a vu le retour du libéralisme sur la scène par le biais d'une nouvelle attention au marché et à l'Etat de droit15(*). Cette nouvelle conception économique partait du postulat que le libre fonctionnement des mécanismes naturels des marchés parvenait à lui seul à assurer, tôt ou tard, la meilleure allocation des ressources.

A cet effet, toutes les législations maintiennent ou instaurent un modèle économique néolibéral basé sur une économie de marché mais soumise à une régulation juridique et administrative16(*). Cela signifie la mise en cause du constructivisme étroit sans réduire le rôle de l'Etat à la simple constatation d'un ordre préétabli, option à mi-chemin entre une économie dirigiste et une économie libérale17(*). Dans ce contexte et étant au coeur de l'économie libérale comme un moyen avéré de parvenir à un but économique, les vertus de la concurrence ont fini par être reconnues par toutes les législations contemporaines18(*).

5. L'emprise du modèle néolibéral sur les choix politiques et économiques marocaines. Notre pays n'a pas échappé à cette emprise du libéralisme économique dans sa conception nouvelle, le néolibéralisme. Ainsi, après avoir été proclamé depuis le début du siècle dernier lors du protectorat français, le modèle libéral est, aujourd'hui, consacré expressément par l'article 15 de la constitution de 1996 qui dispose que le droit de propriété et la liberté d'entreprendre sont garantis19(*).

Cette philosophie économique libérale va se répercuter directement sur l'ensemble de notre droit positif. Ainsi, plusieurs réformes majeures ont été entreprises, récemment, pour préparer le terrain à l'évolution de la société marocaine et son champ politique vers un pluralisme crédible et réel, et l'économie vers un système pluriel, compétitif et concurrentiel20(*).

6. Les méfaits du fonctionnement naturel des mécanismes concurrentiels. Le recours à un système économique pluriel, compétitif et concurrentiel suppose la confiance dans l'efficacité naturelle du marché libre. Mais, antérieurement sous d'autres cieux, cette confiance s'est détériorée. L'expérience a montré que la structure et l'équilibre des marchés ne sont pas immuables21(*). Tout indique que la loi du marché ne parvient pas au but qui lui est assigné par la théorie économique : la meilleure allocation des ressources et avec elle l'amélioration du bien être économique.

Ainsi, la réalité confirme que le rapport économique est par nature un rapport de forces. L'ordre économique, le marché, n'est ni juste ni injuste22(*). Marqué par l'affrontement et l'agressivité23(*), la compétition économique conduit inéluctablement à la disparition des opérateurs les moins performants24(*). Il en résulte une tendance naturelle à la concentration de l'offre qui, à son tour, est de nature à faire disparaître toute concurrence, puisque seul survivra l'opérateur le plus performant qui se trouvera affranchi de toute concurrence25(*). De plus qu'il n'est pas rare que l'existence de la concurrence sur un marché n'aboutisse pas au succès de l'entreprise la plus performante mais seulement à la victoire de la plus forte. C'est alors le mécanisme de sanction de la compétition qui se trouve mis en cause et, par là, l'intérêt même de la compétition parce que le meilleur n'a pas obtenu le résultat auquel son effort lui donnait vocation.

7. Ces méfaits résultent de l'exercice abusif de la liberté de la concurrence comme de la liberté contractuelle. Par ailleurs, le marché est le lieu, abstrait de rencontre de l'offre et de la demande26(*). Il est aussi, le contrat, l'accord, celui, dont la force obligatoire est exprimée par l'article 230 du Dahir des Obligations et des Contrats27(*). La liberté des marchés ne se conçoit pas sans la liberté des contrats28(*). La liberté des contrats, pour prospérer, a elle-même besoin du mécanisme de la concurrence29(*). Cette identité terminologique, reflète la corrélation qui existe en droit entre la liberté de la concurrence et la liberté contractuelle. Cette corrélation implique que l'abus dans la lutte concurrentielle se manifeste le plus souvent dans l'exercice de la liberté de la concurrence comme dans l'exercice de celle de la liberté contractuelle. Dans le premier cas l'entreprise économiquement puissante utilise sa puissance comme une arme pour éliminer ses concurrents. Dans le deuxième, elle l'utilise comme rente à travers la substitution de sa volonté à celles de ses contractants, concurrents30(*) ou partenaires. Ces derniers peuvent être des professionnels ou des consommateurs finaux.

Ainsi, une entreprise économiquement puissante peut tenter de se soustraire aux contraintes du marché et par conséquent, imposer sa loi ; un professionnel peut profiter de sa puissance économique pour imposer une clause abusive dans un contrat. Dans cette perspective, la puissance économique peut devenir l'instrument de pratiques abusives qui doivent être alors sanctionnées. C'est cette dernière qui fonde le pouvoir économique. Accorder l'onction juridique à une telle réalité, revient à admettre que dans une relation volontaire, une personne puisse en frapper une autre qui a déjà un genou au sol, ce qui n'est pas tolérable31(*).

8. Cet exercice abusif à des conséquences néfastes sur les principes directeurs du système juridique. En effet, si l'exercice abusif de la liberté de la concurrence se manifeste, le plus, lorsque l'entreprise dispose d'un pouvoir de marché facilité par la détention d'une puissance économique. La détention de cette puissance économique ne présente, en tant que tel, rien d'illégitime. Il est, ce à quoi, aspire toute entreprise. Mais l'exercice abusif du pouvoir économique aboutit naturellement à l'anéantissement de la concurrence suite à la concentration de la puissance économique. Il permet ainsi à l'entreprise de renforcer son pouvoir sur le marché et de substituer sa loi à celle du marché et sa volonté à celles de ses concurrents et ses partenaires, consommateurs et professionnels.

Ainsi, le postulat qui avance que la liberté des individus conduit à établir les rapports individuellement les plus justes et socialement les plus utiles - c'est-à-dire que c'est le libre jeu des volontés individuelles qui doit réaliser la justice - est devenus en parfaite contradiction avec les instruments juridiques qui le mettent en oeuvre32(*). A cet effet, la puissance économique consacre une supériorité de fait capable de mettre en cause les principes directeurs qui fondaient et fondent encore tout système juridique à tendance libérale, à savoir : le principe du bon fonctionnement de la concurrence et celui de l'égalité contractuelle33(*).

9. La liberté de la concurrence c'est la liberté plus le droit. Comme indiqué plus haut, des expériences étrangères enseignent que livrer l'économie aux seules règles du marché ou tout le moins réduire le rôle de l'Etat, provoquent un dysfonctionnement grave des mécanismes concurrentiels. En effet, pour que le meilleur dans la compétition ne soit pas battu par le plus fort34(*), le pouvoir économique ne doit plus rester en marge du droit et doit au contraire faire l'objet de toute l'attention du législateur contemporain35(*). Si la liberté des opérateurs est essentielle car, c'est d'elle que, procède l'initiative, l'innovation, le progrès et le succès final de l'entreprise qui récompense l'entrepreneur, et profite aussi à la collectivité, la liberté de la concurrence n'est point considérée comme aussi absolue que d'autres libertés consacrées par le droit36(*). Elle n'est reconnue aux opérateurs que pour autant qu'elle contribue au bon fonctionnement du marché37(*). Certes, le droit doit poser les limites à l'usage par les entreprises de leur pouvoir économique. Il doit fournir au marché une sorte de seconde nature, qui l'empêche de se dévorer lui-même38(*).

Certes, si la liberté des marchés demeure prônée, dans les analyses contemporaines de la concurrence, elle apparaît néanmoins, comme un bienfait fragile, que le législateur doit à la fois favoriser et encadrer39(*). Tels sont, par exemple, les objectifs de la loi 06-99 sur la liberté des prix et la concurrence40(*). Ainsi, à côté des règles juridiques ayant pour but le maintien de la concurrence dans de justes limites, de veiller à ce qu'elle s'exerce de manière loyale, raisonnable et tempérée41(*), la loi 06-99, influencée par des conceptions néolibérales du droit, a inauguré une deuxième branche du droit de la concurrence. Les règles composant cette seconde branche ont pour fonction de protéger la concurrence et d'en favoriser le développement42(*). Ces règles condamnent non pas l'excès mais les limitations de concurrence qui résultent de certains comportements d'entreprises, notamment celles facilitées par la détention d'un pouvoir de marché issu d'une puissance économique. Ainsi, la concurrence a été libérée est conquise par le droit afin de la conduire vers ce que serait son but ultime, le bien être des individus43(*).

10. De même la liberté contractuelle c'est d'abords l'égalité des armes. Dans la même logique, les mutations profondes qu'ont connues les sociétés contemporaines, notamment la notre, ont provoqué un déséquilibre flagrant des rapports de force entre consommateurs et professionnels44(*). Ces derniers exploitent leurs supériorités économique, technique et informationnelle pour abuser dans leurs rapports avec les consommateurs. C'est vrai que chaque individu étant le meilleur juge de ses intérêts, mais, la liberté contractuelle ne droit non plus être l'instrument juridique à travers lequel le fort exploite le faible. Il doit être maintenu une certaine égalité des armes pour que l'égalité contractuelle puisse présumer la justice contractuelle.

La réponse apportée par la théorie des vices de consentement apparaît peu adaptée45(*). Aussi bien, sous d'autres cieux, a tant entrepris de doubler la théorie des vices de consentement au rendement social trop médiocre, de mesures préventives qui ont pour but de favoriser l'information et la réflexion des contractants. Plutôt que de sanctionner à posteriori les vices de consentement, on met en place un ensemble de dispositions qui tend à restaurer des conditions d'un débat équilibré. D'inspiration néolibérale, cette approche ne rompt pas avec les postulats de l'autonomie de la volonté. En effet, plutôt que de réglementer impérativement les contenus du contrat, elle traite le consommateur comme un individu intelligent et libre, à défendre lui-même ses propres intérêts, si on lui donne les moyens de s'informer et de réfléchir.

11. L'économie du marché c'est le libéralisme plus le droit. L'efficience économique, poursuivie par le droit, exige, d'un côté, la soumission de tous les concurrents à la loi du marché, de l'autre, l'égalité des instruments juridiques mis à la disposition de tous les opérateurs économiques. Ainsi, Dans cette logique de l'économie de marché, entreprises et consommateurs participent au bon fonctionnement du marché dont ils sont les opérateurs, certes inégaux mais également indispensables. L'économie de marché prend en compte cette interdépendance. La concurrence ne peut exister sans l'atomicité du marché, sans la transparence des transactions, sans la loyauté des pratiques commerciales et concurrentielles.

De la même, l'existence du consommateur est une condition, sans laquelle l'entreprise n'existe pas. Il est l'enjeu de la concurrence, le bénéficiaire de ses bienfaits et la victime de ses méfaits. La prise en considération de ses intérêts est une condition sine qua non du bon fonctionnement du marché. Cependant, l'exercice abusif du pouvoir économique est une réalité certaine qui compromet directement le bon fonctionnement du marché.

Dans cette approche globalisée du marché, nous essayerons de mettre en lumière ce phénomène d'abus de puissance économique, sa réalité et son éventuelle prise en charge par le droit. Ainsi, notre démarche consiste, d'abord, à identifier l'abus de puissance économique, sa nature, sa mesure, ses manifestations et ses conséquences, ensuite nous essayerons d'apprécier dans quelle mesure le droit positif marocain a pu prendre en considération ce phénomène d'abus, et ce à la lumière de l'expérience française en la matière.

Première partie 

IDENTIFICATION DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE

12. La réalité des rapports de forces dans le marché. Le rapport économique est par nature un rapport de forces46(*). De l'affrontement naît un équilibre qui, sans avoir été voulu par l'Homme, est néanmoins le plus efficace à satisfaire ses besoins. Tel est, nous l'avons vu, le postulat économique libéral. Ainsi, les rapports de forces sont au coeur de l'activité économique. Ils se concrétisent par une agressivité dans la compétition économique.

Au coeur de cette lutte concurrentielle, l'entreprise cherche souvent à améliorer ses capacités compétitives, notamment par la concentration de puissance économique et le développement de nouvelles techniques de conquêtes des marchés. Cette réalité a été accentuée, d'une part, par l'apparition de la société de consommation de masse accompagnée par le développement du crédit comme instrument de consommation47(*), et d'autre part, par la concentration de grandes puissances économiques privées, notamment celles de la grande distribution48(*).

13. La compétition a pour objet la conquête de la clientèle. La lutte concurrentielle porte réellement sur les débouchés. Le marché sacrait ses champions en leurs permettant d'écouler ses productions, ce qui est, dans une économie d'abondance, une condition de succès de l'entreprise. Cette réalité économique se traduit par la conquête de la clientèle qui peut être des consommateurs professionnels - finaux ou intermédiaires - ou des consommateurs non professionnels. Ainsi, la recherche des débouchés par la conquête et la captation des consommateurs professionnels ou non professionnels est une condition sine qua non de la survie de l'entreprise quelque soit son pouvoir de marché49(*).

Cela pousse les entreprises, à renforcer et à augmenter leurs pouvoirs du marché à l'égard des autres concurrents cela se concrétise par une tendance à la concentration de la puissance économique, et le développement de nouvelles techniques de commercialisation, à l'égard de leurs partenaires en développant des rapports de coopération économique, ainsi qu'à l'égard des consommateurs non professionnels par le déploiement de nouvelles techniques d'incitation trop alléchantes50(*).

14. La puissance économique confère un pouvoir de fait. La puissance économique confère à son détenteur un pouvoir à l'égard de ses partenaires et de ses concurrents. C'est un pouvoir de fait, à l'instar de la force physique des Hommes. Il trouve sa source dans la puissance économique de son titulaire et ainsi, il se distingue des autres pouvoirs reconnus par l'ordre juridique, notamment au niveau de la nature, du fondement et de l'objet. A cet effet, il n'est pas reconnu par l'ordre juridique car, son titulaire ne dispose pas d'une prérogative juridique couvert par un droit subjectif, ou garanti par l'exercice d'une liberté économique. En effet, ce pouvoir économique est susceptible d'être mesuré. Plusieurs critères permettent de réaliser cette mesure. Il permet de déterminer le pouvoir susceptible d'abus. .

15. Le pouvoir économique peut être source d'abus. Dans ses rapports économiques, concurrentiels ou contractuels, l'entreprise peut être tentée d'abuser de la liberté de la concurrence que la loi lui reconnaît. En effet, le pouvoir économique s'exerce souvent par l'entreprise économiquement puissante comme un moyen de contrainte, destiné à maximiser ses rentes de manière illégitime ou, comme une arme pour fausser le bon fonctionnement de la concurrence et ainsi affaiblir ou éliminer ses concurrents.

Cet exercice abusif se manifeste à plusieurs égards. Il peut conduire un partenaire à contracter sans réflexion, comme il peut se manifester par un déséquilibre contractuel excessif. En outre, l'entreprise disposant d'un pouvoir économique peut profiter de sa supériorité de fait pour se soustraire aux règles du marché ou encore imposer sa loi aux autres acteurs de ce dernier.

16. L'exercice abusif du pouvoir économique a des conséquences sur les principes directeurs du système juridique. Les contrecoups de cet exercice abusif du pouvoir économique sur les règles de jeu dans le marché, le bon fonctionnement de la concurrence et la liberté contractuelle des opérateurs ne sont pas négligeables. En effet, si l'exercice abusif ou irrégulier ou encore anarchique de la liberté de concurrence engendre fréquemment des préjudices considérables pour les autres concurrents, pour le fonctionnement du marché ainsi que pour les consommateurs, cette réalité perturbe certains principes juridiques sous-tendant notre droit, dans la mesure où, l'agressivité concurrentielle altère le fonctionnement naturel des mécanismes du marché, et comporte des implications considérables et perceptibles à chacun d'entre nous dans l'exercice de sa liberté de choix.

17. L'existence du pouvoir susceptible d'abus est une condition sine qua non de son exercice abusif. Partant de ce qui vient d'être présenté, l'identification de l'abus de puissance économique doit passer par deux étapes essentielles. D'abord, la puissance économique confère un pouvoir qui est à l'origine de l'abus. Ainsi, l'abus trouve son appui dans un pouvoir. Il est conditionné par l'existence de ce dernier. Cependant, ce pouvoir ne présente en tant que tel rien d'illégitime. C'est son exercice abusif qui le manifeste et qui a des conséquences juridiques considérables. Ainsi, l'existence du pouvoir économique à l'origine de l'abus (Chapitre I) est une étape indispensable à celle de son exercice abusif (Chapitre II).

Chapitre I

L'EXISTENCE DU POUVOIR ECONOMIQUE SUSCEPTIBLE D'ABUS

18. La réalité du phénomène du pouvoir. Dans les histoires qui tissent notre existence, nous sommes constamment confrontés au pouvoir que nous exerçons et que nous devons exercer pour vivre, confrontés au pouvoir que les autres exercent, aux limites, aux abus et aux risques d'abus de notre pouvoir et de celui des autres. C'est ainsi que le pouvoir constitue un objet majeur des sciences humaines et sociales51(*). Ce pouvoir peut prendre plusieurs formes et avoir plusieurs natures. Dans notre hypothèse, l'abus dans l'exercice du pouvoir en question se manifeste dans les rapports concurrentiels et contractuels au sein du marché. C'est un pouvoir présent sur un marché délimité ou à l'égard d`un partenaire économique. Ainsi, il convient de mettre en lumière la nature de ce pouvoir (Section I), avant de se pencher sur les critères permettant sa mesure, qu'il soit fondé sur une domination absolu du marché ou sur un déséquilibre de puissances économiques basé sur la qualité des partenaires ou sur la dépendance de l'un d'entre eux (Section II).

Section I - La nature du pouvoir à l'origine de l'abus

19. Généralités. Le pouvoir est un concept auquel on a volontiers recours dans l'ordre constitutionnel, dans l'étude des rapports de l'administration publique avec les particuliers. À l'opposé, le pouvoir ne joue présentement qu'un rôle marginal dans l'examen des liens entre personnes privées. Le pouvoir ne semble en effet jouir d'aucune autonomie. Le droit subjectif y règne presque sans partage52(*). Ainsi, les sujets de droit ne disposent que des prérogatives juridiques reconnues par le droit objectif et ne dispose du pouvoir que celui couvert par un lien juridique, soit à l'égard des choses comme le droit de propriété, soit à l'égard des personnes comme le droit de créances. Ainsi, le pouvoir reconnu par le droit trouve sa source dans une disposition légale ou conventionnelle. A l'inverse le pouvoir économique à l'origine de l'abus est un pouvoir qui trouve sa source dans la supériorité de fait dont bénéficie son titulaire. C'est un pouvoir dont la nature, le fondement et l'objet, sont économiques. De ce fait, il se distingue du pouvoir politique ainsi que du pouvoir juridique privé, dans la mesure où il est fondé sur la puissance économique de son titulaire. Il n'est pas reconnu par l'ordre juridique en tant que prérogative juridique, du fait qu'il ne constitue pas l'exercice d'un droit subjectif, ainsi qu'il n'est pas garanti par l'exercice d'une liberté économique. En effet, c'est l'analyse de la nature du pouvoir en question (I) qui va nous permettre de démontrer sa non reconnaissance par l'ordre juridique (II).

§1 - UN POUVOIR ECONOMIQUE

20. Présentation. La notion de « pouvoir économique » est assez équivoque pour en rappeler une élucidation immédiate. Néanmoins, qualifié un pouvoir d' «économique » suppose l'appréhension de ce qualificatif. A cet effet, il est primordial de déterminer quelles sont les conduites ou les événements qui méritent le qualificatif économique. Ainsi, le qualificatif économique désigne tout ce qui se rapporte à l'ensemble des activités de production et de consommation des biens matériels d'une collectivité humaine. On considère vulgairement comme économique d'abord, l'activité professionnelle des Hommes, ensuite la répartition des ressources entre les groupes et les individus. L'adjectif économique peut désigner, en effet, le fondement et l'objet du pouvoir.

A- Un fondement économique du pouvoir

21. Précisions. Un pouvoir peut porter sur des événements et des conduites économiques et trouve son fondement dans un autre pouvoir, notamment politique ou juridique. Cette hypothèse dépasse l'objet de notre étude. Ainsi, il importe de préciser la nature économique du pouvoir en question. Le pouvoir objet d'étude est un pouvoir ayant pour fondement la détention par son titulaire d'une puissance économique. Il se distingue du pouvoir politique et du pouvoir juridique. A cet effet, il convient d'entamer une brève distinction entres les fondements de ces différents pouvoirs avant de mettre en lumière la nature de la puissance économique à l'origine du pouvoir susceptible d'abus.

22. Distinction des fondements du pouvoir économique et du pouvoir politique. S'il est évident que le pouvoir politique peut avoir, dans beaucoup de cas, pour objet la conduite des événements économiques, son fondement est tout à fait distinct de celui du pouvoir économique53(*). Au début, la violence du conquérant était le fondement du pouvoir politique. Aujourd'hui, c'est l'assentiment du peuple qui fonde et légitime ce pouvoir54(*). Cela signifie que le pouvoir trouve son fondement dans le respect des circuits légaux qui mènent à la prise de décision et ceux qui mènent à l'application de la décision ce qui rejoint la combinaison légitimation/représentation. C'est-à-dire que le pouvoir politique est légitime tant qu'il a pour fondement le respect des circuits prédéterminés par la collectivité. Or, c'est la puissance économique n'est pas sanctionnée en elle-même, le pouvoir économique n'est jamais justifié par les circuits de la concentration de cette puissance. De plus, c'est le pouvoir politique est défini par d'autres55(*) comme le pouvoir de gouverner, de contrôler et de domination sociale, comme une capacité d'agir et d'atteindre des objectifs56(*), le pouvoir économique n'a pas pour objet de gouverner, contrôler ou dominer une collectivité. Ainsi, même influencée par le conflit d'intérêts dans une collectivité, la règle juridique qui reflète le rapport de forces sociales, ne peut jamais reconnaître aux détenteurs du pouvoir économique, des prérogatives se rapportant au pouvoir juridique public. Cependant, si le pouvoir économique est distinct du pouvoir politique, il importe de le distinguer du pouvoir juridique privé.

23. Pouvoir économique et pouvoir juridique privé. Le droit positif, tel qu'il est présenté dans la doctrine et dans la jurisprudence, fait rarement état du pouvoir juridique. Lorsqu'apparaît le terme «pouvoir» dans sa forme substantive, il n'a pas de portée significative : il n'est qu'une autre façon de reconnaître la capacité ou la compétence, ou de définir le droit individuel ou subjectif57(*). Comme tous les intérêts légitimes, le pouvoir a été subsumé dans la catégorie du droit subjectif. Ainsi, le pouvoir juridique dans le droit privé peut se définir comme l'ensemble des prérogatives reconnues aux sujets de droit, par le droit objectif, qu'il s'agisse des prérogatives sur leurs patrimoines ou sur le patrimoine d'autrui58(*). Certes, le pouvoir économique, confère à son titulaire une prérogative sur le patrimoine d'autrui mais cette dernière reste une situation de fait qui doit être appréhendée par le droit, dans la mesure où ce pouvoir n'est reconnu par aucun droit subjectif et ne peut être considéré comme l'étendu d'une liberté économique, de même, qu'il n'est protégé par le droit objectif que dans le cadre général de la protection des biens. 59(*).

24. La puissance économique, fondement du pouvoir économique. De ce qui précède on peut déduire que le pouvoir économique ne trouve son fondement ni dans une légitimité politique ni dans une prérogative de droit. Ainsi, le pouvoir économique est le pouvoir détenu par une entreprise économiquement puissante60(*). C'est la puissance économique qui fonde même ce pouvoir de fait. Elle lui confère sa contrainte et son étendue. Elle peut être absolue à l'égard de tous les opérateurs sur un marché, ou relatif à l'égard d'un partenaire déterminé.

25. Le pouvoir économique fondé sur la position dans un marché. C'est un pouvoir absolu qui influence sur tous les acteurs économiques. Elle peut prendre plusieurs formes. Il peut s'agir d'un monopole de droit61(*) ou de fait, de l'importance des parts de marché détenu sur un marché, de la disproportion entre celles-ci et celles de l'entreprise concurrente, de la valeur économique qu'il développe par rapport à l'activité considérée, d'une avance technologique, de l'appartenance à un groupe puissant, du statut de l'entreprise, des avantages financiers et matériels dont l'entreprise dispose, de l'accès préférentiel à certaines matières premières ou sources de financement. Il peut s'agir aussi d'une disproportion des moyens financiers entre l'entreprise puissante et ses concurrents, d'une supériorité naturelle dans la gestion, de l'étendue de la gamme, d'une innovation technique, de la notoriété de la marque auprès des consommateurs62(*), de l'implantation ancienne et de la renommée de l'entreprise, éventuellement son statut, et ses modes d'action commerciale63(*).

26. Le pouvoir économique fondé sur la qualité ou la dépendance d'un partenaire économique. Parfois c'est la qualité des partenaires qui présume la puissance économique. C'est le cas du binôme consommateurs/professionnels. En effet, l'accroissement de la taille des entreprises, la complexité des produits et des services, le développement du crédit, de la publicité et du marketing a accentué le déséquilibre de rapports de force entre les consommateurs et les professionnels au détriment des consommateurs64(*). Les symptômes de cette réalité sont l'inaptitude à résister à son partenaire, à se défendre, à se décider librement et en pleine connaissance de cause. Ensuite, le pouvoir économique peut être déduit de la dépendance d'un partenaire économique résultante du déséquilibre de rapports de forces. La dépendance économique est l'arme dont dispose le titulaire d'un pouvoir économique de fait. Ainsi, qu'il soit absolu ou relatif le pouvoir en question trouve son fondement dans la puissance économique de son détenteur. Cela dit, reste à déterminer l'objet de ce pouvoir.

B - Un objet économique du pouvoir

27. Généralités. Si l'on définit le pouvoir comme la capacité de déterminer la conduite des Hommes d'influer sur le cours des événements, il convient de déterminer qu'il est l'objet du pouvoir économique. Quelle est la nature des événements sur lesquels il exerce son influence ? de quelle conduite des Hommes ce pouvoir est capable de déterminer ?

28. L'objet du pouvoir économique et l'objet du pouvoir politique. Si le pouvoir politique est la capacité d'une personne ou d'un groupe d'imposer certains des choix existants en détruisant les autres par un processus de restriction, le pouvoir économique a pour objet la conduite des Hommes, le cours des événements qui touche à l'ordre économique. Par conséquent, il est important de comprendre que le pouvoir politique ne créé jamais rien, il ne fait que sélectionner des choix préexistants par la suppression des alternatives. Le  pouvoir économique, au contraire, est la capacité d'une personne ou d'un groupe de créer des choix supplémentaires qui viennent s'ajouter à ceux qui préexistent65(*).

29. L'objet du pouvoir économique et l'objet du pouvoir juridique. Comme on l'a déjà mentionné, le pouvoir juridique dans le droit privé peut se définir comme l'ensemble des prérogatives reconnues aux sujets de droit, par le droit objectif, qu'il s'agisse des prérogatives sur leurs patrimoines ou sur le patrimoine d'autrui66(*). C'est un intérêt juridiquement protégé67(*). Ce sont les pouvoirs qui sont reconnues aux particuliers68(*). C'et le pouvoir de disposer, d'administrer ou de percevoir les fruits. L'objet de ces pouvoirs est d'opérer un changement juridique dans le patrimoine du détenteur du pouvoir et dans celui d'autrui, s'il respecte les règles de droit objectif. Ainsi, il influence sur le patrimoine des parties en cause. Par contre, l'exercice du pouvoir économique n'aura aucune implication sur la situation juridique que, si son exercice est garanti par une prérogative juridique. Dans ce cas c'est cette dernière qui est la source des changements juridiques opérés. Alors l'exercice du pouvoir juridique affecte la situation juridique des Hommes alors que celui du pouvoir économique est un pouvoir de fait ayant une implication économique qui affecte le volume et la nature de la production, la distribution et de la répartition des ressources et des revenus.

30. Un pouvoir dont la nature, le fondement et l'objet sont économiques. Ainsi, on peut déduire que le pouvoir économique est le pouvoir dont disposent certaines entreprises en raison de leurs situations économiques de leurs places dans le processus de production ou de distribution, c`est à dire, lorsqu'il trouve son fondement dans une puissance économique et lorsqu'il a pour objet le changement d'une situation économique de fait. Certes, c'est cette nature même du pouvoir en question qui peut justifier sa non reconnaissance par l'ordre juridique.

§2 - UN POUVOIR NON RECONNU PAR L'ORDRE JURIDIQUE

31. Généralités. Comme on l'a déjà présenté, le pouvoir économique est un pouvoir qui trouve son fondement dans la puissance économique détenue par une entreprise. C'est un pouvoir de fait. Son titulaire est même d'imposer sa volonté à d'autres acteurs économiques69(*). Cependant, il importe de déterminer si le pouvoir détenu par l'entreprise économiquement puissante est distinct des prérogatives juridiques qui en permettent l'exercice. A cet effet, la démarche consiste à présenter, d'une manière brève, les pouvoirs conférés par l'ordre juridique afin d'en exclure les pouvoirs conférés par la puissance économique. Ainsi, la distinction des droits subjectifs, pouvoir juridique et liberté fondamentales s'avère indispensable pour l'exclusion du pouvoir économique. A cet effet, dans un premier temps, nous entamons l'analyse des pouvoirs conférés par les droits subjectifs, ce qui va nous permettre de démontrer la non reconnaissance du pouvoir économique par l'ordre juridique (A). Ensuite, nous essayerons de présenter l'étendue des libertés économiques afin de les distinguer du pouvoir économique qui en résulte (B).

A - Le pouvoir économique n'est pas un pouvoir juridique privé

32. Le pouvoir juridique privé70(*). Ce type de pouvoir comprend toutes prérogatives reconnues par l'ordre juridique aux sujets de droit71(*). Il peut trouver sa source, soit dans des droits subjectifs reconnus par le droit positif et protégés par le droit objectif, soit dans un accord conventionnel. Dans cette mesure, il importe d'analyser la source et l'étendu des droits subjectifs et du pouvoir juridique privé afin d'écarter de leurs domaines respectifs le pouvoir économique susceptible d'abus.

33. Le pouvoir économique n'est pas une prérogative de droit subjectif. Les droits subjectifs sont les prérogatives - on dit aussi les intérêts - que le droit objectif consacre et sauvegarde au profit des sujets de droit72(*). Ils se manifestent, sinon exclusivement du moins principalement dans la perspective des relations des particuliers - individus ou groupement - soit dans leurs rapports entre eux, soit dans leurs rapports avec les biens73(*). Ils sont de ce fait dotés d'une structure et d'un contenu caractérisé74(*). Les droits subjectifs apparaissent, ainsi, comme des prérogatives reconnues aux individus par les règles de droit objectif.75(*). Selon une définition étroite, n'est un droit subjectif que la prérogative conférée par le droit objectif à une personne dans l'intérêt de cette dernière76(*). C'est un intérêt juridiquement protégé. Ce sont les pouvoirs qui sont reconnues aux particuliers. Ainsi, l'objet d'une prérogative conférée par un droit subjectif est particulier à chacun de ses titulaires77(*). L'exclusivité est le caractère essentiel de tout droit subjectif. Il s'agit d'une sphère d'autonomie, d'un privilège donné au seul titulaire du droit78(*). Par conséquent, le pouvoir économique n'est pas un pouvoir garanti par le droit objectif. Son exercice ne consiste pas à l'exercice d'un droit préexistant. Son titulaire ne dispose pas d'une prérogative juridique, mais d'une puissance économique de fait qui ne présente pas en elle-même un caractère illicite. Le pouvoir économique est ainsi un pouvoir de fait qui n'est pas protégé par le système juridique. Par ailleurs, l'exercice des droits subjectifs ne doit pas s'opérer au détriment d'autrui ou au mépris de droits légitimes de tiers79(*), il est sanctionné par la théorie de l'abus de droit. Ainsi, si le droit couvre la presque totalité des formes d'abus, par la théorie de l'abus de droit, il importe de vérifier si cette théorie peut prendre en charge les éventuels abus de puissance économique.

34. L'abus de pouvoir économique n'est pas sanctionné par la théorie de l'abus de droit. L'exercice du pouvoir issu des droits subjectifs n'est pas absolu. Ce pouvoir juridique est contrôlé par la théorie de l'abus de droit. Cette théorie80(*) a fait l'objet de controverses célèbres. Elle trouve aujourd'hui de nombreuses applications en droit positif, et l'on a pu s'interroger sur son éventuelle utilisation par le législateur moderne81(*), et s'elle peut prendre en charge les formes d'abus de puissance économique. Il apparaît à cet égard que les hypothèses d'abus de puissance économique ne recouvrent pas un domaine identique à celui relatif à la théorie de l'abus de droit82(*).

35. En effet, si l'abus est soit l'usage excessif, déraisonnable, injustifié, répréhensible ou illicite d'un droit, d'une faculté ou d'une prérogative, dans une définition aujourd'hui communément admise, l'abus de droit se présente comme « l'usage excessif d'une prérogative juridique, c'est-à-dire d'un pouvoir garanti par l'Etat parce qu'il est conforme au droit objectif83(*). C'est le pouvoir juridique conféré par l'Etat qui est exercé abusivement. Deux éléments caractérisent ainsi la prérogative exercée abusivement : c'est une prérogative juridique, et à ce titre même intrinsèquement licite84(*). Ainsi, étant donné un acte licite en lui-même, il y a abus de droit s'il est permis de considérer cet acte comme illicite et contraire au droit, uniquement à raison de son but intentionnel85(*). Tel n'est pas le cas du pouvoir exercé par l'auteur de l'abus de puissance économique, qui ne consiste pas à l'exercice d'un droit préexistant, comme nous l'avons vu86(*). Son comportement est intrinsèquement illicite. Il n'abuse pas d'une prérogative juridique, mais adopte un comportement dès l'origine illicite. Le pouvoir de fait est ainsi un élément de qualification de l'abus de puissance économique. Or, un tel élément n'est pas exigé pour qualifier l'abus d'un droit87(*). De plus que dans le cadre de la théorie de l'abus de droit, un partenaire moins puissant que l'autre peut être condamné. Ainsi, l'hypothèse de l'abus de puissance économique se distingue t'elle sans conteste de la théorie de l'abus de droit.

36. Ainsi, les différents privilèges, résultant de la puissance économique, correspondent à des privilèges de fait.88(*).La notion de puissance économique peut être définie comme une supériorité de fait89(*) et doit être distinguée du pouvoir résultant d'un droit subjectif. Dans le premier cas, le pouvoir n'est qu'une situation de fait, alors que dans le second, il s'agit d'une prérogative juridique, d'un pouvoir accordé par le droit. Cependant, comme on l'a déjà indiqué, le pouvoir reconnu aux sujets de droit peut avoir pour objet le patrimoine d'autrui. A cet effet, il importe de vérifier si, ce type de prérogatives ne garantit pas l'exercice du pouvoir économique comme une prérogative sur l'intérêt d'autrui.

37. Le pouvoir économique n'est pas une prérogative juridique sur l'intérêt d'autrui. En droit privé, la notion de pouvoir a aussi été étudiée. Elle est fréquemment utilisée dans le droit des incapacités lorsqu'il s'agit de déterminer les conditions dans lesquelles peuvent agir ceux qui représentent ou assistent les incapables. Le contrat de mandat90(*) est non moins révélateur. En signalera encore en matière de société commerciale, l'existence de maintes dispositions relatives aux pouvoirs de dirigeants sociaux91(*).

38. Comme le droit subjectif, le pouvoir sur les intérêts d'autrui est une prérogative mais à la différence du droit subjectif, il permet à celui qui le détient d'exprimer un intérêt au moins partiellement distinct du sien au moyen d'acte juridique ayant notamment pour effet d'engager autrui. La finalité des prérogatives est différente, ce qui explique les différences pouvant exister entre le contrôle de l'exercice des droits subjectifs et celui des pouvoirs92(*). En effet, le pouvoir juridique privé ne couvre pas le pouvoir économique. Le détenteur du pouvoir économique l'exerce dans l'objectif de sauvegarder et développer ses intérêts économiques pas dans l'intérêt d'autrui à l'instar du pouvoir juridique privé. Le pouvoir économique n'a pas pour fondement une disposition légale autorisant l'agissement sur le patrimoine d'autrui ni un accord conventionnel, c'est un pouvoir de fait, c'est la position détenue par son détenteur au regard du marché ou de son contractant qui permet son exercice.

39. Il n n'est pas encadré par la théorie de l'abus de pouvoir. Si l'abus peut résulter du détournement de la fonction d'un droit conféré à un individu dans un but égoïste93(*), ce qui est sanctionné par la théorie de l'abus de droit, dans d'autres cas l'abus résulte du détournement, d'une fonction conférée à un individu, non plus dans son intérêt propre, mais dans l'intérêt d'autrui94(*). On parle alors aussi d'abus de droit mais la terminologie d'abus de pouvoir semble mieux adaptée95(*). C'est le cas notamment de l'abus d'autorité parentale ou de l'abus de majorité dans les groupements privés. Ce pouvoir est contrôlé par la théorie de l'abus de pouvoir96(*).

40. Différence au niveau des fondements. La théorie de l'abus de pouvoir ne trouve pas application aux abus de pouvoir économique dans la mesure où, dans les situations de l'abus de pouvoir, le pouvoir détenu trouve son fondement, soit dans des dispositions légales, notamment, le cas de l'autorité parentale, soit dans des dispositions conventionnelles à l'instar des statuts des groupements97(*). Ainsi, le pouvoir, dont l'exercice est contrôlé par la théorie de l'abus de pouvoir trouve son fondement dans le droit objectif, à l'instar des droits subjectifs qui sont eux-mêmes reconnus par l'ordre juridique et sanctionné par la théorie de l'abus de droit. Par contre, le pouvoir économique, comme nous l'avons démontré, trouve son fondement dans la puissance économique de son titulaire et ainsi ne peut pas faire l'objet d'un contrôle de l'abus de pouvoir.

41. De ce qui précède on peut déduire que le pouvoir économique de l'entreprise économiquement puissante n'est pas un pouvoir juridique. Ce ne sont pas les prérogatives juridiques dont dispose l'auteur de l'abus qui le place dans une situation de puissance. Il existe une liberté d'exercer sa puissance économique et non un droit subjectif98(*). Ainsi, le privilège dont dispose le détenteur du pouvoir à l'origine de l'abus n'est pas protégé par le droit objectif. Or c'est bien de ce privilège dont il abuse. Le pouvoir économique est ainsi le produit d'une liberté. A cet effet, il convient d'analyser cette liberté afin de distinguer le pouvoir économique des libertés qui en permettent l'exercice.

B - Le pouvoir économique déborde l'objet des libertés économique

42. Présentation des libertés fondamentales. « Il n'y a point de mot qui ait reçu plus de différentes significations, et qui ait frappé les esprits de tant de manière, que celui de liberté »99(*). Néanmoins cette expression empruntée du philosophe Montesquieu, la liberté peut être définie comme la possibilité de se comporter selon sa propre et autonome volonté. Selon F. V. Hayek c'est la « situation dans laquelle chacun peut utiliser ce qu'il connaît en vue de ce qu'il veut faire ». Elle ne peut être sauvegardée qu'en suivant des principes et on la détruit en se servant d'expédients100(*). . L'objet du pouvoir conféré par une liberté est cette liberté elle-même101(*). Une liberté est en principe non définie ni causée, susceptible non pas d'abus, mais d'excès. Elle est également en principe inconditionnée. Ainsi se marier ou non, contracter ou non, acquérir ou aliéner, faire concurrence à d'autres commerçants102(*).

43. Libertés et droits subjectifs. Les libertés sont souvent affirmées ou consacrées dans des préambules, des déclarations ou des dispositions générales103(*). Elles sont d'ailleurs, garanties par le droit objectif. Selon le professeur F. Terré, elles trouvent souvent leur prolongement dans des droits subjectifs. Certes, la liberté est une prérogative juridique qui doit être distinguée du droit subjectif. Le pouvoir issu d'une liberté confère une égale liberté à chacun mais ne consacre pas une sphère d'exclusivité à un titulaire particulier comme le droit subjectif104(*). Cependant, nous avons constaté que le pouvoir économique n'est pas reconnu par le système juridique en tant que droit subjectif, il convient maintenant de distinguer ces différents pouvoirs des libertés qui en permettent l'exercice105(*). User d'une puissance économique est ce, user d'une prérogative juridique ? A cet effet, avant de distinguer le pouvoir économique des libertés qui en permettent l'exercice, il convient de déterminer le contenu respectif de ces libertés.

44. Contenu des libertés économiques. La liberté de commerce et de l'industrie à coté de la liberté de la concurrence et la liberté contractuelle106(*) constituent les fondements de l'économie de marché107(*). Ainsi, les libertés économiques comprennent essentiellement la liberté de commerce et de l'industrie108(*) appelée aussi liberté d'entreprendre 109(*) qui offre à chacun la faculté de développer librement ses activités économiques110(*). Pour rendre réelle cette liberté, il est nécessaire d'assurer à toutes les entreprises une égalité des chances dans la compétition économique111(*). C'est le principe de la liberté de concurrence112(*). Par ailleurs, l'activité économique se concrétisant juridiquement par des contrats. Les compétiteurs doivent pouvoir, en principe, conclure les contrats qu'ils veulent aux conditions de leur choix113(*), c'est le principe de la liberté contractuelle. Ce principe attribue à chacun une triple faculté : de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son contractant et de déterminer le contenu du contrat. La liberté contractuelle est nécessaire au libre fonctionnement du marché114(*). La liberté de concurrence ne peut exister que si est sauvegardée la liberté contractuelle.

45. Les libertés économiques ne sont pas des libertés absolues. L'aménagement légal de la liberté de commerce et de l'industrie s'attache à une réglementation appropriée à la fois de la liberté d'entreprendre, la liberté de l'initiative privée et à celle de concurrence, une concurrence libre mais loyale et sans excès. La liberté de créer des entreprises et la liberté d'exercer des activités économiques restent passibles de réglementation, même libérale115(*). Néanmoins, si cette liberté a beau être restreinte par de très nombreuses dispositions, elle reste la règle générale. Toute exploitation qui n'est pas expressément défendue est permise116(*). Néanmoins, si le droit consacre ces libertés économiques, il ne reste pas moins que c'est le droit lui-même qui en encadre l'exercice117(*). Ainsi, pour protéger l'intérêt général et certaines catégories de citoyens en situation de faiblesse (salariés, consommateurs...), le droit a dû encadrer ces libertés par des dispositions d'ordre public. Par conséquent, si c'est au sein de libertés consacrées par le système juridique que se constituent les pouvoirs économiques, l'exercice abusif de ce dernier ne peut pas être garanti par les dites libertés. En effet, si le préambule de la loi 06-99 consacre implicitement le principe de la liberté d'entreprendre, c'est cette loi même qui, en pose les limites par des dispositions dites d'ordre public économique de direction. D'un autre côté, si le principe de la liberté contractuelle est garanti par la loi, il ne reste pas moins que cette liberté est limitée par les dispositions d'ordre public. Ainsi elle doit s'exercer dans le respect de l'ordre public concurrentiel118(*).

46. De là, on peut déduire que, comme l'exercice fautif des droits est sanctionné par la théorie de l'abus de droit, l'exercice excessif des libertés économiques n'échappe pas moins à l'appréhension du droit. Ainsi, celui qui détient un pouvoir économique dispose de tous ses droits et libertés dans l'exercice de ses activités économiques dans la mesure où cet exercice ne soit pas fautif à l'égard d'un concurrent ce qui est sanctionné par la théorie de la concurrence déloyale, ou excessif, notamment par l'exploitation abusif d'une puissance économique sur me marché, ce qui est sanctionné par le droit modern de la concurrence119(*). Ainsi on peut déduire que l'exercice abusif du pouvoir économique facilité par une supériorité de fait déborde l'objet des libertés économiques dans la mesure où il porte atteinte aux valeurs économiques consacrées par le droit, notamment, la liberté des autres opérateurs. Si l'exercice d'une puissance économique est rendu possible par la liberté - prérogative juridique - concurrentielle et contractuelle, il ne s'identifie pas à cette liberté. Par ailleurs, plus qu'il n'est pas protégé par le droit, le pouvoir économique ne profite pas du principe de droit commun qui interdit de nuire à autrui. Il ne doit pas offrir à son titulaire une sphère d'exclusivité. Il doit subir la loi du marché et ainsi s'exposé à la lutte concurrentielle.

47. Le pouvoir économique doit être exposé à la lutte concurrentielle. Les libertés économiques fondamentales qui constituent les composants et les piliers de l'économie de marché sont en outre complétées par un principe d'exonération de responsabilité. Ce principe tiré de l'exception au principe de droit commun exprimé par l'expression latine neminem laedere implique que s'il est en principe interdit de nuire à autrui, la concurrence qui est une compétition, une lutte, suppose la reconnaissance d'un droit de nuire120(*).Il se traduit par la licéité du dommage concurrentiel et qui signifie que tout concurrent peut attirer la clientèle d'autrui. La clientèle est à celui qui sait la prendre.

48. Par conséquent, ce principe permettant de capter la clientèle des autres compétiteurs sans que cela puisse engager la responsabilité du concurrent qui en est à l'origine121(*), implique que le pouvoir économique doit être exposé à la lutte concurrentielle des autres concurrents, et de ce fait il n'est pas protégé par le droit objectif. Cette constations ne fait que confirmer la non reconnaissance du pouvoir économique par le système juridique. Si le pouvoir, issu de la puissance économique, s'exerce dans le cadre des libertés déterminées par le système juridique, la liberté contractuelle et la liberté concurrentielle, il ne s'identifie, cependant pas, à ces libertés. Une des composantes de la puissance économique est d'offrir à son titulaire une sphère d'exclusivité qui ne peut être déduite du seul exercice d'une liberté. Cela implique que, le pouvoir économique de l'entreprise économiquement puissante déborde l'objet des libertés qui en permettent l'exercice122(*).

49. Ainsi, le pouvoir économique en question est un pouvoir dont la nature, le fondement et l'objet sont économiques. C'est un pouvoir non reconnu par l'ordre juridique dans la mesure où il n'est pas garanti par un droit subjectif, il déborde l'objet des libertés qui en permettent l'exercice, ce qui justifie sa soumission à la lutte concurrentielle des autres concurrents conformément au principe de la licéité du dommage concurrentiel. Cependant, si le pouvoir à l'origine de l'abus de puissance économique est un pouvoir économique non reconnu par l'ordre juridique, il importe de procéder à la présentation des critères de sa mesure afin de déterminer le pouvoir économique susceptible d'abus.

Section II : La mesure du pouvoir économique susceptible d'abus

50. Deux catégories de pouvoir. Le pouvoir économique est fondé sur la puissance économique lui permettant l'exercice. En effet, la mesure de cette dernière est indispensable pour déterminer le pouvoir susceptible d'abus. Cette mesure n'est pas facile, dans la mesure où les phénomènes de dépendance et de domination, manifestations de la relation de puissance, sont des situations dynamiques de fait123(*). Néanmoins, la pratique montre que le pouvoir économique peut être absolu ou relatif. Dans le premier cas, il est fondé sur une puissance dont l'étendue dépasse les seuls rapports contractuels ou concurrentiels, conférant, ainsi, à l'entreprise une domination du marché. Dans le second, l'entreprise détient un pouvoir qui, sans être absolu, lui donne la capacité d'agir sur la volonté d'un autre partenaire économique, étant le déséquilibre de rapports de puissances économiques, à l'instar des relations professionnels consommateurs ou des relations de dépendance économique dans lesquelles peut se trouver un partenaire. En effet, dans les deux situations, l'état de domination relative ou absolue ressort d'une relation. Le pouvoir économique se manifeste de deux manières : Un pouvoir - de fait - d'imposer sa volonté à une personne et une inaptitude - de fait - de celle-ci à résister à une telle volonté124(*). Il ne s'agit pas d'établir abstraitement une position de force qui serait inhérente à son titulaire, mais d'envisager concrètement un rapport de forces. Dans cette logique, nous analyserons les critères de mesure du pouvoir de marché, c'est à dire, le pouvoir économique absolu (A), avant de se pencher sur ceux issus de rapports entre partenaires économique, à savoir, le pouvoir économique relatif (B).

§1 - LE POUVOIR ECONOMIQUE ABSOLU SUSCEPTIBLE D'ABUS

51. Le pouvoir économique absolu se mesure à partir de la délimitation du marché sur lequel il s'exerce. Des vues économiques sont nécessaires pour apporter des précisions sur la détermination du marché auquel il convient de se référer pour mesurer le pouvoir économique d'une entreprise, c'est à dire du « marché de référence ». A cet effet, il est de prime abord, essentiel de préciser la notion du marché avant de déterminer les critères nécessaires pour sa délimitation.

52. La notion de marché. Le concept de marché, d'origine économique, a d'abord été subi par le droit auquel il était étranger. Il constitue la pierre angulaire du droit du marché. Et bien évidemment, pour l'assimiler, les juristes en ont tenté une définition abstraite, dogmatique, susceptible de conférer une certaine prévisibilité aux règles reposant sur ce socle, alors que les économistes plus pragmatiques se contentent généralement d'insister sur les caractères distinctifs des marchés considérés125(*). La définition proposée par les juristes, qui est directement issue des analyses économiques les plus traditionnelles, est extrêmement rudimentaire de sorte que sa mise en oeuvre comporte une marge d'appréciation, et donc d'imprévisibilité, presque aussi large que si la définition n'existait pas126(*). En l'absence de définition de marché en droit positif marocain, et de toutes les définitions adoptées par les autorités françaises et communautaire de la concurrence, on peut retenir que le marché peut se définir comme le lieu théorique où se rencontrent l'offre et la demande de produits ou de services qui sont considérés par les acheteurs ou les utilisateurs comme substituables entre eux mais non substituables aux autres biens ou services offerts127(*). De cette définition, on peut constater que la mesure du pouvoir économique exige la détermination exacte du marché sur lequel il s'exerce. Cette localisation est essentielle pour déterminer l'ampleur du marché sur lequel le pouvoir de l'entreprise est exercé. Ainsi, il convient de préciser les méthodes de délimitation du marché pertinent.

53. La délimitation du marché en cause ou marché pertinent. La détermination du marché pertinent donne lieu à de nombreux calculs et peut se faire selon des méthodes variables, produisant chacune des résultats différents. Les économistes prennent donc une part de plus en plus importante dans le contentieux de la concurrence128(*). Le comportement de la clientèle est un critère décisif dans la détermination du marché pertinent. Le consommateur est ici l'instrument de mesure des marchés, et n'a que très peu avoir à voir avec celui que le droit de la consommation considère129(*).

54. La délimitation du marché pertinent en droit communautaire. En droit communautaire, les méthodes proposées pour la délimitation du marché distinguent le marché de produits du marché géographique130(*). Elles les définissent en ces termes : Un marché de produits en cause comprend tous les produits et/ou services que le consommateur considère comme interchangeables ou substituables en raison de leurs caractéristiques, de leur prix ou de l'usage auquel ils sont destinés131(*). Le marché géographique en cause comprend le territoire sur lequel les entreprises concernées sont engagées dans l'offre des biens et des services en cause, sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes et qui peut être distingué de zones géographiques voisines parce que, en particulier, les conditions de concurrence y diffèrent de manière appréciable132(*).

55. En droit français. Le législateur français ne donne aucune définition au marché pertinent. Ainsi, c'est au juge qui revient cette tache difficile. En effet, la définition donnée par la Cour de Paris, plus lapidaire, pourrait apparaître comme plus abstraite, donc plus satisfaisante pour l'esprit juridique, au moins français. Mais, elle n'est en définitif, pas plus précise, et c'est sans doute heureux pour son adéquation à la réalité économique protéiforme qu'elle entend appréhender. Selon la Cour de Paris, le marché de référence est « le lieu théorique où se confrontent l'offre et la demande de produits ou de services qui sont considérés par les acheteurs ou les utilisateurs comme substituables entre eux mais non substituables aux autres biens ou services offerts »133(*).

56. Ainsi, le marché pertinent peut se définir comme le lieu sur lequel s'échange des biens ou des services substituables entre eux. En effet, si la comparaison entre les différents produits qui dessinent le contour du marché, soit que les produits soient substituables, ce qui élargit le marché, soit qu'ils ne le soient pas, ce qui le rétrécit. Moins l'on considère que les produits sont substituables, et plus les marchés sont étroits, plus on les qualifie de substituables et plus les marchés sont larges134(*). Après ces précisions sur le concept du marché et les critères de sa délimitation, nécessaires à la mesure du pouvoir économique susceptible d'abus, il convient de mettre en lumière les critères de cette mesure. Cependant, le pouvoir économique susceptible d'abus peut être détenu par une seule entreprise, ce qui est le cas de la domination individuelle du marché (A), comme il peut être détenu par deux ou plusieurs entreprises, dans ce cas, il s'agit d'une domination collective du marché (B).

A - La mesure du pouvoir de domination individuelle du marché

57. L'entreprise titulaire du pouvoir économique. Le pouvoir économique individuel est celui détenu par une seule entreprise. Ainsi, il convient de déterminer la notion d'entreprise au sens juridique, avant de présenter les critères de mesure de sa puissance économique.

58. La notion d'entreprise. De façon générale, il est admis que toute entité exerçant, sur le marché, "une activité commerciale, économique ou spéculative" est une "entreprise" au sens du droit de la concurrence135(*). Si la règle ne pose pas de difficulté à l'endroit des personnes privées, il n'en va pas de même des personnes publiques. À leur égard, la question s'est posée de savoir si elles pouvaient recevoir la qualification d'entreprise, et si, en cas de réponse positive, elles peuvent être considérées comme détentrices de pouvoir économique privé, et ainsi soumises aux règles de concurrence.

59. Les entreprises publiques soumises aux règles du droit de la concurrence. La réponse à cette double question figure à l'article premier de la loi 06-99. Selon le texte, lui-même, « La présente loi s'applique [...] aux personnes publiques dans la mesure où elles interviennent dans les activités citées au paragraphe 2 ci-dessus comme opérateurs économiques et non dans l'exercice de prérogatives de puissance publique ou de missions de service public ». Il en résulte que les personnes publiques exerçant une activité de production, de distribution et de services sont soumises au respect des règles incluses dans la loi 06-99. En l'absence de pratiques judiciaires nationales, en droit français, le principe en a été affirmé par le Conseil d'État qui, le 29 juillet 1994. ce dernier a précisé qu'il résulte des termes de l'article 53 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 que les règles qui y sont définies ne s'appliquent aux personnes publiques qu'autant que celles-ci se livrent à des activités de production, de distribution et de services136(*). Ainsi, la notion d'entreprise ne prend pas en compte la nature publique ou privé de la personne morale. Elle se rattache à un critère matériel, à savoir, la nature de l'activité exercée. Elle ne se limite que par les prérogatives de puissance publique et dans le cadre des missions d'intérêt général.

60. Les critères d'appréciation du pouvoir économique. Le plus souvent, la part de marché de l'entreprise en cause renseignera sur la situation de celle-ci, notamment dans les hypothèses extrêmes : dans le cas où cette entreprise contrôle, pour des raisons de fait ou de droit, la totalité ou la quasi-totalité d'un marché déterminé. Cette seule circonstance suffit à établir sa domination du marché. À l'inverse, la détention d'une part de marché limitée exclut la qualification d'entreprise dominante. Entre ces deux extrêmes, la part de marché ne représente qu'un critère relatif qu'il est nécessaire de compléter par d'autres indices combinés les uns aux autres. Ils permettront aux autorités de contrôle de déterminer l'existence ou l'absence d'une domination absolue de marché.

61. Importance du critère de la part de marché - La constatation de la domination individuelle du marché peut résulter de l'importance de la part de marché contrôlée par l'entreprise, voire de la disproportion qui existe entre cette part de marché et celles des entreprises concurrentes137(*). Le cas extrême est celui des situations de monopole. Lorsqu'une entreprise bénéficie d'un monopole légal sur le marché pertinent138(*), la mesure de son pouvoir de domination ne présente généralement pas de difficulté. Qu'il y ait monopole ou quasi-monopole, il s'agit, dans les deux cas, d'hypothèses caractérisées de pouvoir absolu139(*). Il n'est pas nécessaire que ledit monopole soit constaté ou maintenu pour que l'entreprise en cause soit considérée, comme dominante sur un certain marché. Le fait qu'elle détienne - ou conserve - une part de marché importante y suffit, en tant qu'indice puissant de celle-ci140(*).

62. Les autres critères. À l'endroit des entreprises qui ne se trouvent pas en situation de monopole, seul l'examen des conditions de fonctionnement effectif du ou des marchés pertinents permet de déterminer l'existence d'une domination du marché. Selon le Conseil français de la concurrence, si la part de marché peut constituer un indice de l'existence d'une position dominante (...), cette donnée, est dans bien des cas, insuffisante pour conclure à l'existence ou non d'une position dominante141(*). Ainsi, d'autres éléments sont pris en compte. Il peut se produire qu'un seul critère suffise à établir la position dominante d'une entreprise. Mais c'est généralement la combinaison de plusieurs critères, auxquels peut se joindre l'importance du marché contrôlé, qui permet d'en caractériser l'existence. Dans ces hypothèses, le Conseil de la concurrence se livre à une analyse dite "multicritères"142(*).

63. Les critères les plus fréquemment utilisés. Ils sont de nature structurelle, les autorités de contrôle considérant que la disproportion entre la part de marché de l'entreprise soupçonnée de domination et celle de ses différents concurrents constitue un indice sérieux de l'existence d'une position dominante143(*) A contrario, une entreprise ne détient pas de position dominante lorsque sa part de marché est "trop proche" de celle de ses principaux concurrents144(*). Par-delà l'examen des parts respectives des autres intervenants sur le marché à côté de nombreux autres éléments de nature quantitative sont également inclus dans l'analyse. C'est ainsi que la disproportion des moyens financiers entre l'entreprise dominante et ses concurrents est un facteur d'appréciation notable de la position dominante145(*) Il en va de même de l'importance des investissements nécessaires à l'exercice de l'activité, de l'existence d'une concurrence potentielle, de la nature des comportements litigieux, ou d'une avance technologique telle qu'elle permet à l'entreprise concernée d'augmenter ses prix sans craindre une érosion de sa clientèle.

64. Autres critères structurels. Il est tenu compte, encore, du fait que l'entreprise appartient ou non à un groupe puissant, du statut de cette entreprise, du fait qu'elle bénéficie, ou non, d'un accès préférentiel à certaines matières premières ou sources de financement ainsi que de l'existence, et, le cas échéant, de la nature des barrières à l'entrée sur le marché, suggérant une faible probabilité que sa suprématie soit remise en cause146(*). Il peut s'agir, notamment, d'une supériorité naturelle dans la gestion, de l'étendue de la gamme, de l'innovation technique, de l'action commerciale, de la notoriété de la marque auprès des consommateurs, au point que les distributeurs ne peuvent pas se passer de cette marque, ou encore des conditions dans lesquelles l'entreprise met en oeuvre les moyens dont elle dispose vis-à-vis de ses concurrents ou de ses clients. Ainsi présentés, ces critères de mesure du pouvoir de domination individuel sont, notamment, appliqués pour la mesure du pouvoir de domination collective. Ici, la difficulté se rapporte à l'établissement de la preuve d'un lien entre entreprises ou d'une coordination de stratégies, susceptibles de cumuler leur pouvoir économique et leur permettant, ainsi, une domination collective du marché.

B- La mesure du pouvoir de domination collective du marché

65. Liens entre entreprises et volonté de coordination de comportement, conditions de cumul du pouvoir économique. Plusieurs entreprises simultanément présentes sur un même marché peuvent être considérées comme détenant conjointement une puissance économique collective s'il existe entre elles une interdépendance qui les conduit à adopter une stratégie explicitement ou implicitement coordonnée147(*). De là apparaissent les deux éléments constitutifs de la domination collective du marché, à savoir des liens - en tant que condition structurelle -, auxquels doit s'adjoindre une condition de comportement, telle que la volonté commune de pratiquer à une politique commerciale ou d'approvisionnement coordonnée148(*). Dans ce cas, la mesure du pouvoir économique consiste au cumul de ceux des entreprises en cause.

66. L'interdépendance structurelle de comportements, conditions suffisante pour la commission française de la concurrence. Des entreprises puissent détenir collectivement une puissance économique absolue, du seul fait de l'interdépendance structurelle de leurs comportements et quand bien même n'y aurait-il entre elles aucun lien d'affiliation ou de concertation149(*). Selon la Commission française de la concurrence, en effet, lorsque des entreprises sont très peu nombreuses sur un marché et que chacune est en pratique assurée que les autres se comporteront comme elle le fait elle-même - qu'il y ait ou non entente expresse entre elles -, il se peut qu'aucune de ces entreprises ne soit isolément en position de dominer le marché, au contraire de l'ensemble des entreprises, qui, lui, peut jouir d'une telle position. C'est alors que les activités de cette position dominante collective peuvent être considérées comme facilitées par une puissance économique collective détenu par les dites entreprises150(*).

67. Liens financiers ou structurels, condition obligatoire pour la Cour d'appel de Paris et le conseil de la concurrence. Contrairement à la conception extensive de la commission de la concurrence, la Cour d'appel de Paris et à l'instar du Conseil français de la concurrence151(*), retient une conception beaucoup plus stricte de la domination collective. Ainsi a-t-elle nié l'existence d'un pouvoir économique collective, dans la mesure où il n'existait entre les firmes mises en cause aucun lien qui permette de les assimiler à un groupe152(*), et qu'il n'était pas avéré que leur stratégie commerciale ait été en pratique coordonnée153(*). Ainsi, selon la même Cour, faute d'entretenir entre elles des liens financiers ou commerciaux, les entreprises ne peuvent donc pas être considérées comme un groupe d'entreprises détenant une position dominante collective154(*). Il semble ainsi que la seule interdépendance oligopolistique manifestée par les comportements parallèles des entreprises, dont a pu se satisfaire la Commission de la concurrence, ne soit plus désormais suffisante pour établir une position dominante collective. La Cour d'appel adopte ce faisant la solution du droit communautaire, notamment, la Cour de justice des Communautés européennes qui exige, pour admettre la position dominante collective, que les entreprises soient suffisamment liées entre elles en vue de l'adoption d'une même ligne d'action sur le marché.

68. Ainsi, en l'état actuel de la jurisprudence française, on ne peut donc établir l'existence d'un pouvoir collectif de domination qu'à l'égard d'entreprises qui remplissent deux conditions cumulatives : une condition de structure concrétisée par un lien financier, structurel ou autre, et une condition de comportement. A cet effet, la mesure du pouvoir collectif de domination passe inéluctablement par l'établissement des ces deux conditions. Dans ce cas, le pouvoir est mesuré par le cumul des puissances économiques des entreprises en cause, ce qui permet son appréciation dans les mêmes conditions que le pouvoir individuel de domination. Reste à déterminer les critères de mesure du pouvoir économique relatif.

§2 - LE POUVOIR ECONOMIQUE RELATIF SUSCEPTIBLE D'ABUS

69. Les fondements du pouvoir économique relatif : la qualité des partenaires ou la dépendance d'un partenaire. Comme on l'a déjà indiqué, la mesure de la puissance économique est indispensable à la détermination du pouvoir susceptible d'abus. Ce pouvoir, sans être absolu, comme ce qui a été exposé, peut donner à l'entreprise la capacité d'agir sur la volonté d'un partenaire économique, étant le déséquilibre de rapports de forces économiques. A l'instar des relations professionnels consommateurs ou des relations de dépendance économique dans lesquelles peut se trouver un partenaire. Dans le premier cas, le pouvoir est déduit de la qualité des partenaires en rapport, dans le deuxième, il s'agit d'envisager concrètement un rapport de forces entre deux partenaires économiques professionnels.

A - Le pouvoir déduit de la qualité des partenaires économiques

70. Pouvoir déduit de la relation professionnel/consommateur. Pour nous procurer des biens ou des services, nous tous consommateurs, entrons en relation avec des personnes physiques ou morales, qui font profession de vendre des biens ou de fournir des services. Or la relation entre professionnel et consommateur est naturellement déséquilibrée. La compétence du professionnel, les informations dont il dispose, et souvent sa dimension financière, lui permettent de dicter sa loi au consommateur155(*). Selon une opinion qui fait autorité en la matière, cela ne signifie pas que les professionnels sont, par hypothèse, gens malhonnêtes, cherchant à abuser de la situation. Mais, il n'en ai pas moins vrai, selon la même opinion, que les professionnels sont, par la nature des choses, en position de supériorité, et que les consommateurs risquent d'en être les victimes156(*).Ainsi, le pouvoir économique peut être déduit de la seule qualité des partenaires en rapport économique. C'est le cas du rapport professionnel / consommateur157(*). Ici la qualité des partenaires justifie le déséquilibre de puissance économique158(*). La présence des deux parties en rapport, avec les deux qualités de professionnel et consommateur sera une condition sine qua non de l'existence d'un pouvoir économique présumé chez le professionnel. Ainsi, c'est la qualité de consommateur qui présumé sa faiblesse et la qualité de professionnels qui présume sa supériorité de fait. Cela rend la définition des deux notions indispensable pour caractériser un déséquilibre de puissance économique.

71. La qualité de professionnel condition de déséquilibre de puissance économique. Professio, -onis signifie « déclaration publique, action de se déclarer comme », d'où l'idée que le professionnel est celui qui est spécialiste de son métier ou, à tout le moins, qui déclare l'être159(*). De point de vue économique, le professionnel doit être rapproché du producteur et, donc, de l'entreprise. Il est cette personne physique ou morale qui rassemble, exploite et gère des moyens humains et matériels, plus ou moins importants, dans le but de proposer à titre onéreux sur un marché des biens ou des services. La notion de professionnel est, donc, moins catégorielle que fonctionnelle. Par exemple, un commerçant qui contracte pour la satisfaction de ses besoins personnels ou familiaux ne sera pas traité en professionnel, mais en consommateur. Alors que l'on ne peut être à la fois employeur et salarié, tous les professionnels sont également des consommateurs au regard des actes passés en dehors de l'exercice de leur profession.

72. La notion du « professionnel » en droit. En droit la notion de professionnel est plus récente que celle de commerçant, qu'elle tend, de nos jours, à supplanter en raison de son domaine plus vaste160(*). Mais, alors que le commerçant est légalement défini comme la personne qui exerce des actes de commerce en en faisant sa profession habituelle, la loi, au Maroc comme en France, est en revanche, muette quant au professionnel161(*). Néanmoins, le terme est fréquemment utilisé en droit. Ainsi, en droit commun, la jurisprudence marocaine, à l'instar de celle française, distinguent, pour admettre ou refuser la validité des clauses supprimant la garantie des vices cachés dans le contrat de vente, les professionnels de même spécialité et ceux de spécialités différentes162(*). En droit français de la consommation, certaines décisions de jurisprudence admettent le principe de l'application des dispositions relatives à l'élimination des clauses abusives à certains professionnels, assimilés pour le coup à des consommateurs. En outre, une partie importante de la doctrine et de la jurisprudence qualifie de consommateurs les associations et autres groupements à but non lucratif, alors même que leur position et leur fonction dans le circuit économique correspondent à la définition du professionnel.

73. Incertitudes quand à la notion du professionnel. Toutes ces réflexions éprouve des incertitudes quand à la définition de la notion du « professionnel ». Ces incertitudes proviennent, en réalité, de la difficulté à définir le consommateur et, plus précisément, des tentatives d'étendre la qualification de consommateurs à certains professionnels en situation de faiblesse. De ce fait, on estime opportun de retenir la définition donnée par le professeur Cornu, qui définit le mot professionnel par opposition au profane. Ainsi, selon le professeur Cornu, « c'est l'homme de l'art ; personne dont l'appartenance à une profession fait attendre une qualification correspondante ; plus précisément, par opposition au consommateur, toute personne physique ou morale, qui dans les contrats de vente ou de prestation se services, agit dans le cadre de ses activités professionnelles privées ou publiques »163(*). Cela dit, reste à déterminer la notion du consommateur, deuxième condition nécessaire à la mesure du pouvoir économique relatif aux qualités des partenaires économiques.

74. La notion de consommateur. La définition du consommateur est beaucoup plus délicate à poser que celle du professionnel. Le consommateur final de la théorie économique, celui qui « pour finir, consomme, absorbe, utilise » 164(*), est l'enjeu de la compétition économique. Il ne participe pas à cette compétition, ne concourt pas. En ce sens, tous sujet de droit, consommant, utilisant des biens ou services, peut être qualifié de consommateur165(*). Le domaine de la protection est alors extrêmement large166(*). Mais, le seul fait de consommer ne suffit pas à attribuer au sujet de droit la qualité de consommateur. Autrement dit, la faiblesse de consommateur ne peut être toujours présumée de sa seule activité. De ce fait, d'autres critères apparaissent pour le définir. Il entre dans cette notion une idée de « destination personnelle » et de « non compétence professionnelle ». Le domaine de protection en est d'autant restreint167(*). Ainsi, il convient de chercher la définition retenue par le droit marocain ainsi que celle retenue par le droit français avant d'exposer l'avis de la doctrine.

75. La notion de consommateur en droit marocaine. En droit marocain, le terme « consommateur » est utilisé dans certains textes juridiques, ainsi que par la jurisprudence. En effet, la loi 06-99 recourt à ce terme dans le chapitre premier, du Titre XI. Ce chapitre est intitulé « De la protection et de l'information des consommateurs ». Ce texte de loi ne donne aucune définition à cette notion, de même que son décret d'application qui reste encore muet en ce sens168(*). Le juge marocain, de sa part, n'a pas encore eu l'occasion de se pencher sur la question. Certes, ce dernier recourt souvent au terme « consommateur moyen », notamment dans le cadre des litiges de la concurrence déloyale, de la propriété industrielle, ou de la responsabilité du professionnel fabriquant169(*), mais sans en délimiter les contours170(*). Cette réalité peut être due à l'absence d'une législation spécialisée dans la protection du consommateur Cela nous pousse à recourir au droit français dans la mesure où ce droit contient même un Code de consommation.

76. La notion du consommateur dans le Code français de la consommation. Assez paradoxalement a priori, le Code français de la consommation ne définit pas le consommateur. Sans doute cette omission est-elle liée à la difficulté de cerner ce personnage. Si tout le monde n'est pas salarié ou commerçant, toute personne est consommateur. La catégorie juridique est donc incertaine. L'impression de flou est renforcée par le fait que le Code français de la consommation paraît parfois distinguer le consommateur et le non-professionnel. La logique de ce code renseigne que le point faible du contractant est différent selon le domaine de la réglementation. Il conclut un contrat sous la pression d'un démarcheur, il mesure mal le coût de son endettement, il adhère à une convention qui confère à son contractant un avantage excessif. A chaque domaine son consommateur et sa règlementation171(*).

77. La jurisprudence française. De sa part le juge français, cherchant les critères de la notion de consommateur, s'emploi en fait à déterminer l'inaptitude de ce dernier à résister à la puissance économique du professionnel dans la mesure où cette incapacité est inhérente à la qualité du consommateur172(*). Pour le juge français, de façon générale, est considéré comme consommateur celui qui contracte pour des besoins sans rapport direct avec sa profession173(*). Mais ce critère reste aussi imprécis. Son imprécision est le fait que la Cour de cassation renvoie l'appréciation de l'existence de ce rapport direct aux juges du fond174(*), ce qui engendre une véritable incertitude quant à cette notion175(*). Certains arrêts l'ont d'ailleurs écarté au profit d'une définition plus restrictive.

78. La doctrine française. La recherche dans la doctrine française, nous a permis de retenir deux définitions comparables du consommateur, données par deux professeurs, dont la voix fait autorité en la matière. Ainsi, selon le professeur j. Ghestin : « Le consommateur est « la personne qui, pour ses besoins personnels, non professionnels, devient partie à un contrat de fourniture de biens ou de service »176(*). L'autre définition est voisine de la première. Elle est donnée par les professeurs J. C ; Auloy et F. Stenmetz. Selon ces auteurs « le consommateur est une personne physique ou morale qui se procure ou qui utilise un bien ou un service pour un usage non professionnel »177(*).

79. De ce qui précède on peut déduire que la notion de consommateur en droit reste incertaine, malgré une partie de la doctrine qui en prône une délimitation stricte178(*), la jurisprudence et une grande partie de la doctrine179(*), paraît plutôt en faveur d'une définition extensive, par le recours au critère du rapport direct180(*). Ainsi, si le droit de la consommation a pour objectif la protection du consommateur, la traduction juridique de ce but n'est pas aisée. Empruntée au domaine des sciences économiques, la notion de consommateur a été amenée, depuis quelques décennies, à jouer en droit civil français un rôle de protection, sans qu'une véritable réflexion n'ait été préalablement menée. Le résultat est qu'une définition rigoureuse du consommateur est, aujourd'hui encore, absente du droit français de la consommation181(*). Le consommateur est multiple car, cette qualité recouvre un sens différent selon les normes juridiques qui l'utilisent. Cette absence de définition uniforme de la notion du consommateur n'est pas tellement regrettable. En effet, certains mettaient en garde les juristes contre un excès de définition, facteur de rigidité et donc d'injustice182(*). La notion de consommateur en fournit un exemple topique. A notre sens, on estime que cette absence de définition ne peut que profiter au consommateur dans la mesure où elle permet au juge plus de souplesse dans l'application des textes consuméristes. Cependant, ce qui importe dans notre propos, c'est l'établissement des deux qualités de consommateur et de professionnel, condition nécessaire à la mesure du pouvoir économique relatif, résultant du rapport déséquilibré entre ces deux partenaires. En effet, le pouvoir économique relatif peut aussi résulter de la relation de dépendance dans laquelle peut se trouver un partenaire économique à l'égard d'une entreprise économiquement puissante.

B - Le pouvoir déduit de la dépendance d'un partenaire économique

80. La notion de dépendance économique. Le pouvoir économique peut être mesuré à travers le déséquilibre qui peut surgir entre deux partenaires économiques à cause de la dépendance de l'un envers l'autre. En effet, la dépendance économique vise la situation dans laquelle se trouve une entreprise dans sa relation avec une autre, cliente ou fournisseur, caractérisée par une position de puissance telle à son égard quelle ne peut s'y soustraire183(*). Dans ce cas de figure, la continuité d'exploitation au sens économique du terme de la première qui se trouve être en situation de dépendance n'est plus assurée, dès lors que les relations commerciales qu'elle entretient avec la seconde viendraient à cesser. Selon cette définition donnée par le conseil français de la concurrence184(*), le concept désigne une relation commerciale dans laquelle l'un des partenaires n'a pas de solution alternative s'il souhaite refuser de contracter dans les conditions que lui impose son client ou son fournisseur185(*). L'on peut reconnaître, dans cette énumération, trois des quatre types principaux de dépendance sur lesquels se greffent différents abus, distingués par la doctrine allemande186(*) et analysés par M. Pédamon187(*), comme la « dépendance pour cause d'assortiment188(*), la dépendance pour cause de puissance d'achat189(*) et la dépendance pour cause de relations d'affaires »190(*). Mais il convient d'y ajouter un quatrième type, soit la « dépendance pour cause de pénurie »191(*).

81. Les critères d'appréciation de l'état de dépendance économique. L'entreprise dominante exerce une contrainte sur le partenaire dépendant. Cette contrainte est rarement absolue193(*). Pour mener à bien son expertise, le juge a recours à un faisceau d'indice, dont la réunion lui permet de présumer l'état de dépendance. Sa démonstration le conduit à appréhender la puissance économique à la fois positivement, c'est-à-dire, en envisageant directement la contrainte exercée sur le partenaire dépendant, et négativement en vérifiant l'inaptitude du partenaire dépendant à se soustraire à cette contrainte. Ces deux modes de démonstration lui permettent d'établir un phénomène unique : la relation de puissance entre les parties. Ainsi, pour le Conseil français de la concurrence, la situation d'un état de dépendance économique « s'apprécie en tenant compte de l'importance de la part du fournisseur dans le chiffre d'affaires du revendeur, de la notoriété de la marque du fournisseur, de l'importance de la part de marché du fournisseur, de l'impossibilité pour le distributeur d'obtenir d'autres fournisseurs de produits équivalents », ajoutant que « ces critères doivent être simultanément présents pour entraîner cette qualification »194(*). Ces critères ont été adoptés par la Cour de Paris195(*) et approuvés par la Cour de cassation196(*). Cette dépendance doit s'apprécier dans le cadre de relations bilatérales entre deux entreprises, et doivent être évaluées au cas par cas, et non globalement pour l'ensemble de la profession197(*).

82. Ainsi présentée, la dépendance économique marque un rapport de force et ainsi l'existence d'un pouvoir économique mesuré à travers le déséquilibre de puissances économiques. En la matière, ce déséquilibre de force résulte, non de la domination objective d'un marché, comme c'est le cas du pouvoir économique absolu, mais du fait que la puissance relative d'une entreprise engendre la vulnérabilité de ses partenaires commerciaux. Ces partenaires comme nous l'avons vu, peuvent être des consommateurs ou des professionnels. Toutes ces situations établissent l'existence d'un pouvoir économique susceptible d'abus. Ce pouvoir ne présente en tant que tel, rien d'illégitime parce qu'il est le résultat logique de la lutte concurrentielle. Néanmoins, il peut devenir un moyen d'abus. Son exercice abusif peut prendre plusieurs manifestations à l'égard du marché sur lequel il s'exerce ou dans les rapports de l'entreprise avec ses partenaires économiques. En outre, cet exercice abusif a souvent des conséquences considérables sur les principes juridiques directeurs de notre droit.

Chapitre II 

L'EXISTENCE DE L'ABUS DANS L'EXERCICE DU POUVOIR ECONOMIQUE

83. L'exercice abusif du pouvoir économique condition de l'abus de puissance économique. Comme on l'a déjà indiqué, le pouvoir économique est à quoi tend toute entreprise sur le marché, Sa détention n'est pas illégitime en elle-même, si son exercice abusif qui lui confère son caractère fautif. En effet, l'exercice abusif ou irrégulier ou encore anarchique de la liberté de concurrence engendre fréquemment des préjudices considérables pour les autres concurrents, pour le fonctionnement du marché ainsi que pour les consommateurs. Cela se manifeste à travers plusieurs pratiques mises en oeuvre par les entreprises économiquement puissantes. Il peut conduire un partenaire à contracter sans réflexion ou sans volonté, comme il peut se manifester par un déséquilibre contractuel excessif. En outre, l'entreprise disposant d'un pouvoir économique peut profiter de sa supériorité de fait pour se soustraire aux règles du marché ou encore imposer sa loi au marché.

84. L'abus dans l'exercice du pouvoir économique et principes directeurs du droit. L'exercice abusif du pouvoir économique engendre des conséquences considérables sur les principes directeurs du système juridique, notamment, le principe du bon fonctionnement de la concurrence et celui de l'autonomie de la volonté. Ainsi, l'identification de l'abus de puissance économique est conditionnée par l'exercice abusif du pouvoir économique déjà identifié. A cet effet, il convient de mettre en lumière quelques manifestations de l'exercice abusif du pouvoir économique (Section I), avant de vérifier ses conséquences sur certains principes directeurs de notre système juridique (Section II).

Section I - Les manifestations de l'exercice abusif du pouvoir économique

85. Les comportements les plus variés qui ont pu être retenus à l'appui de l'abus. L'entreprise en cause peut être coupable d'abus de domination par son action sur le prix des produits ou des services, par les clauses qu'elle impose à ses cocontractants ou par diverses pratiques commerciales irrégulières, telles que des pressions exercées sur d'autres entreprises, des tromperies, des abus de sa puissance contractuelle, des refus de vente, des manoeuvres dilatoires en vue de différer une livraison, l'interdiction faite à un distributeur de rétrocéder des marchandises à un autre distributeur du même réseau198(*), etc. Ces pratiques peuvent avoir pour but soit l'obtention d'avantages injustifiés, soit l'élimination des concurrents effectifs ou potentiels. Dans le premier cas, l'abus se manifeste dans les rapports entre partenaires économiques (I), dans le deuxième, il se manifeste dans des rapports concurrentiels (II)199(*).

§1 - DANS LES RAPPORTS ENTRE PARTENAIRES ECONOMIQUES

86. Une domination/rente. Dans ses rapports avec ses partenaires économiques, l'entreprise disposant d'un pouvoir économique tente fréquemment à utiliser sa supériorité de fait pour maximiser ses bénéfices, notamment par le développement de plusieurs techniques susceptibles d'inciter ses partenaires à passer des contrats (A) comme il peut exploiter sa domination pour imposer des clauses contractuelles excessivement déséquilibrées en sa faveur.

A - Des atteintes à la liberté de décision du partenaire économique

87. Généralités. La libre concurrence suppose que chaque entreprise ait le droit de présenter ses produits et d'en vanter les mérites, en d'autres termes, d'en faire la publicité200(*). En outre, toute entreprise procède au développement des techniques commerciales plus efficientes pour mieux liquider ses produits. Cependant, l'entreprise disposant d'un pouvoir économique tente naturellement à user de ce dernier pour maximiser ses rentes. Cela passe inéluctablement par la conquête des marchés et ainsi, le développement de technique de commercialisation et de marketing capables de gagner la conviction des consommateurs. A cet effet, l'entreprise use de sa puissance économique à deux égards : d'abords, par le développement de nouvelles formes de publicité qui peuvent être agressives et ensuite, par le recours à de nouvelles techniques commerciales de distribution.

88. La fonction de la publicité. Dans une civilisation dite de consommation, l'offre précède généralement la demande, de sorte que c'est l'offreur qui a le plus intérêt à agir sur la transparence du marché pour aller à la rencontre du consommateur201(*). Le plus souvent, la publicité réalisée sur les marchés émane des offreurs. Ces derniers se trouvent en lutte permanente pour augmenter leurs parts du marché. Souvent ceux les plus puissants entre eux recourent à leur pouvoir économique pour développer de nouveaux moyens pour faire connaître (mieux connaître) son offre, dans le but de maximiser ses chances d'obtenir satisfaction, ou une satisfaction meilleure, par le marché202(*).

89. La publicité : de l'information à la persuasion. La publicité a pour fonction première l'information du public sur l'existence d'un produit, son prix, ses caractéristiques. Mais dans sa lutte permanente, l'entreprise économiquement puissante a pu développer de nouvelles formes de publicité. Ainsi, il est tout aussi réaliste d'imaginer que, dans certaines circonstances, elle puisse en résulter des excès203(*). Certes, la publicité est devenue une information particulière qui confine à la désinformation. Qu'elle soit dénotative ou connotative, elle est devenue une arme destinée à inciter le public à contracter L'incitation suppose un geste positif visant à faire conclure un achat. Inciter204(*), se situe entre l'information et le mensonge. Divers moyens sont, dès lors, utilisés par les publicitaires pour aboutir à la persuasion. En effet, ces moyens peuvent rendre la publicité offensive, impolie, drôle ou triste ; elle peut faire appel à l'humour, la peur, l'émotion, ou encore à l'ambiguïté205(*).

90. La publicité exagérée ou l'organisation de l'ignorance du partenaire économique. Ainsi, née de l'information, mais nourrie de l'exagération, parfois établie dans la manipulation et de la persuasion206(*), la publicité, dans son âge mûr, se ressentira vraisemblablement des excès de sa jeunesse207(*). Plus que rendre l'offre publique et faire connaître l'existence et la consistance de l'offre, les entreprises tentent le plus souvent de peser sur la décision des demandeurs pour entraîner leur consentement. Elle privilégie nécessairement les bons aspects du produit ou du service qu'elle tend à faire consommer au point d'altérer la qualité du consentement du destinataire du message publicitaire208(*). De sorte que l'information livrée au marché est orientée dans une direction qui doit conduire le demandeur à traiter avec celui des offreurs qui a été à l'origine de la publicité209(*). Ainsi, la réclame qui cherche à informer est devenue la publicité qui tente de séduire, elle a changé de nature. Son action sur la transparence du marché est devenue pernicieuse. Et les demandeurs sont devenus des victimes des effets d'une lumière polarisée pour euphoriser leur perception de l'offre210(*).

91. Ainsi, dans la conquête de la clientèle, l'entreprise peut abuser de sa puissance économique notamment informationnelle pour tenter d'organiser l'ignorance de son cocontractant dans le but de le pousser à émettre un consentement qu'il n'aurait pas émis sans ses manipulations. En effet, au lieu de mentir délibérément ce qui le rend directement responsable de l'ignorance de son cocontractant211(*), elle recourt à cette technique plus sournoise, en utilisant les procédés de l'information de masse notamment, par l'organisation de l'ignorance de son partenaire afin de l'induire en erreur, en cachant ou en travestissant les faits212(*). C'st ainsi que, le professeur Pédamon relève en effet que la publicité fait courir aux consommateurs des dangers importants : le danger d'abord d'encourager la consommation, voire la « surconsommation » de produits nocifs pour la santé ou la sécurité des personnes. Le danger ensuite d'abuser de la confiance et de la crédulité de ceux auxquels elle s'adresse en multipliant les promesses qui ne peuvent être tenues, en accumulant les superlatifs, en fournissant des indications inexactes sur la composition des produits ou des services proposés, en exploitant les sentiments de peur, d'ignorance ou d'ambition213(*). Cependant, à côté de la publicité agressive qui agit sur la décision du consommateur, base de son consentement, les entreprises peuvent recourir à d'autres pratiques commerciales ayant pour but la liberté contractuelle du partenaire économique dans sa dimension de contracter ou non.

92. Les pratiques commerciales agressives. A côté des pratiques agressives susceptibles d'influencer la décision du consommateur214(*) et ainsi, supprimer son libre arbitre au stade de la publicité, les professionnels recourent souvent à d'autres pratiques commerciales, notamment lors de la formation du contrat. En effet, le pouvoir économique des professionnels peut se manifester notamment à travers l'utilisation de certains procédés destinés à rendre les achats très attrayants ou, qui portent atteinte au droit du consommateur de recourir au marché pour satisfaire ses besoins. Ainsi, certains procédés sont destinés, soit à inciter le consommateur à passer contrat par l'octroi de réductions de prix ou d'avantages en nature, soit à lui refuser la vente d'un produit ou la prestation d'un service ou on lui imposant un objet du contrat autre que celui dont il a besoin. L'intérêt du consommateur n'est ici, il faut l'observer, pas le seul en cause, ces pratiques portent également atteinte aux autres concurrents et spécialement les petits commerçants, incapables d'utiliser de telles techniques, face aux procédés agressifs de la grande distribution. Ces pratiques commerciales agressives peuvent être regroupées en deux catégories215(*). Tantôt le professionnel fait espérer à ses clients des prix réduits ou des avantages en nature216(*), tantôt il porte atteinte au droit du consommateur de recourir au marché pour satisfaire ses besoins on lui refusant une vente ou on lui imposant l'achat d'un produit autre que celui réellement demandé.

93. Les pratiques de prix réduits et avantages en nature. L'un des principaux critères de décision pour un consommateur est le prix de bien ou de service, dont il doit d'ailleurs être informé. Certes, les prix sont en principe libres et ce conformément à l'article 2 de la loi 06-99217(*) ; seuls quelques produits font l'objet de prix réglementés, pour des raisons qui n'ont d'ailleurs bien souvent rien à voir avec la protection du consommateur. Dès lors, le professionnel peut être tenté d'utiliser abusivement le prix pour attirer les consommateurs. Cette pratique, acceptable tant que les prix annoncés sont exacts, peut néanmoins pousser les consommateurs à des achats inconsidérés.

94. Exemples de pratiques de prix réduit. C'est ainsi le cas de la pratique des prix d'appel. Dans ce cas, le professionnel attire les consommateurs par une publicité annonçant une réduction sur un produit, généralement d'une marque réputée et une fois ces clients sur place, il les incite à acheter d'autres produits ne faisant pas l'objet d'une réduction. Cette méthode est très dangereuse pour le consommateur. En outre, l'entreprise peut procéder à une vente à perte, c'est-à-dire la vente à un prix moins élevé que le prix d'achat effectif du produit218(*). A côté des prix d'appel, les professionnels recourent à d'autres pratiques pas moins dangereuses pour les consommateurs. Ce sont les cas des ventes en liquidation, en solde ou au déballage et des ventes directes. Les premiers, qui sont des ventes, normalement, pratiquées sur un temps très court, et présentées comme pratiquées à des prix attractifs, suscite un engouement considérable chez les consommateurs, qui ont l'espoir de réaliser des économies. En même temps, il est dangereux en ce qu'il peut éveiller chez ces derniers une "fièvre acheteuse" et la tentation chez le professionnel de tromper son client. S'agissant de la seconde pratique, les ventes directes. Ce sont des ventes pratiquées sans intermédiaire entre le vendeur et l'acheteur. Ce dernier peut donc espérer un prix inférieur à celui qui serait pratiqué si des intermédiaires étaient intervenus. Mais là encore le risque existe que ces espoirs soient déçus.

95. Octroi d'avantages en nature. Le consommateur peut être attiré par la perspective de bénéficier non seulement de prix réduits mais encore de prestations supplémentaires, que le professionnel va lui présenter comme gratuites. Cependant, là encore l'avantage peut se révéler illusoire - la valeur de l'avantage étant incorporée dans le prix du tout - et le conduire à contracter sans réel besoin. C'est ainsi le cas de beaucoup de pratiques, couramment utilisées, notamment dans les grandes surfaces, à l'instar des jeux et loteries publicitaires. C'est un moyen pour le professionnel de promouvoir ses produits et ils sont attrayants pour le consommateur, surtout lorsque les lots décrits sont de grande valeur et peuvent dès lors le conduire à contracter sans réel besoin.

96. L'atteinte au droit du consommateur de recourir au marché pour satisfaire ses besoins : le refus de vente et la vente liée ou subordonnée. Parfois le professionnel en position de force refuse de donner suite à une demande qui vient rencontrer son offre ou la subordonne à une autre opération. Ces pratiques portent, ainsi, atteinte à la liberté du consommateur de recourir au marché pour obtenir la satisfaction d'une demande correspondant à une offre préalable. Il s'agit de ce que le droit du marché désigne par l'expression un peu abrégée de « refus de vente »219(*) et de la vente liée ou subordonnée. Ces comportements se manifestent aussi bien pour la vente que pour la prestation de services. Ils peuvent être opposés au consommateur comme au professionnel. Par ces comportements, l'entreprise entend fait échec à la logique du marché qui doit le conduire à réaliser une opération par lui offerte avec les mêmes conditions, dès qu'elle a été acceptée220(*).

97. Les particularités du contrat de crédit. Toutes ses pratiques trouvent plus d'ampleur dans le secteur du crédit, notamment le crédit à la consommation. En effet, si le consommateur est un individu qui achète en vue de satisfaire ses besoins et ses désirs, celui de crédit est un individu qui veut satisfaire ses besoins et ses désirs mais sans en avoir les moyens immédiats. Le consommateur de crédit va donc vouloir multiplier par deux les risques de pression puisqu'il sera deux fois consommateur : consommateur en général et consommateur de crédit. Ces forces ne sont pas systématiquement les mêmes221(*). Certes, la faiblesse et la vulnérabilité du consommateur du crédit ont poussé les établissements du crédit à recourir à des pratiques publicitaires offensive, impolie, drôle ou triste ; elle peut faire appel à l'humour, la peur, l'émotion, ou encore à l'ambiguïté222(*). Plus que ça, aujourd'hui, les déséquilibres contractuels les plus manifestes sont ceux issus des contrats du crédit à la consommation.

98. Pratiques commerciales agressives et transparence du marché. Les pratiques commerciales agressives peuvent dans beaucoup de cas être un symptôme ou un moyen révélateur d'autres pratiques plus dangereuses223(*). Ils peuvent constituer le symptôme d'une pratique anticoncurrentielle224(*) comme il peut apparaître comme le moyen de certaines pratiques restrictives225(*). Par ailleurs, le fait de lier la vente ou la prestation de deux produits ou services porte t-il atteinte à la transparence du marché lorsqu'un prix unique est annoncé, car alors il n'est pas possible de déterminer le prix de chacun des deux éléments prix séparément pour comparer l'offre considérer avec les offres concurrentes. Mais l'essentiel du comportement interdit réside évidemment dans impossibilité dans laquelle cette pratique place le consommateur de se procurer séparément chacun des produits ou services. A travers ces éclaircissements, nous avons pu mettre en lumière quelques pratiques abusives ayant un impact direct ou indirect sur le consentement du partenaire économique. En outre, l'entreprise économiquement puissante est en mesure de déterminer le contenu du contrat en sa faveur, et ce toujours dans le cadre de l'exploitation abusif de son pouvoir économique.

B - Des avantages contractuels excessifs

99. L'exploitation abusive de l'état de dépendance d'un professionnel ou de l'état de faiblesse inhérente au consommateur. Comme on l'a déjà vu, dans une relation inégalitaire, le contractant économiquement puissant dispose d'un pouvoir économique à l'égard de ses partenaires. Il en est ainsi de l'exploitation abusive de la faiblesse inhérente à la qualité du consommateur ou de l'état de dépendance économique dans laquelle se trouve un professionnel226(*). En effet, même éclairé, le consentement n'est pas une condition suffisante à la conclusion d'un contrat équilibré entre professionnel et consommateur. Ce dernier peut mal défendre ses intérêts. Par ailleurs, Le label « professionnel » n'est pas un antidote à l'inégalité et à la justice contractuelle227(*). Et de ce fait, il est des professionnels - sous traitants, franchisés...- qui, pas plus que les consommateurs, n'apprécient exactement la portée des clauses qui leur sont imposées par leurs cocontractants. De plus, le professionnel placé dans une situation de dépendance sait que le contrat qu'il conclut lui est préjudiciable, mais il y consent faute pour lui d'alternative et dans la crainte d'un mal menaçant directement ses intérêts légitimes. Qu'il soit informé ou non, qu'un tiers soit chargé de l'assister, voir de le représenter, ne change rien à sa situation.

100. Déséquilibre contractuel : manifestation de l'abus du pouvoir économique. Ainsi, la supériorité de certains entreprises à l'égard de ses partenaires économique, notamment, le professionnel à l'égard du consommateur ou à l'égard d'un autre professionnel dépendant, peut conduire à la création de relations contractuelles déséquilibrées228(*). Dans l'exercice de son pouvoir économique, l'entreprise peut porter atteinte à l'économie d'un contrat et impose en sa faveur non seulement les stipulations par lesquelles elle définit les prestations des parties, mais aussi les clauses au moyen desquelles elles organisent leurs rapports en fixant leurs droits et leurs obligations accessoires. Elle peut ainsi, lorsque sa situation lui permet de peser sur la rédaction du contrat, en profiter pour y insérer des clauses abusives qui lui sont systématiquement favorables229(*), une clause manifestement déséquilibrée, une clause qui lui permet de s'enrichir aux dépens de son partenaire. Si elle use de cette faculté, c'est qu'elle décide en toute conscience d'abuser de sa puissance économique et ainsi de tirer profit de la faiblesse de son cocontractant230(*) pour le soumettre à la rigueur d'une clause dont il tire seul, un avantage excessif.

101. Le critère de la clause abusive. Pour emporter la qualification de clause abusive, le déséquilibre constaté ne doit pas être anodin, mais revêtir des caractéristiques précises. Il faut, d'une part, qu'il soit significatif. Il est raisonnable d'exiger, comme le fait l'article L. 132-1 du Code français de la consommation, que le déséquilibre créé entre les droits et obligations des contractants soit significatif, pour que la clause qui en est à l'origine puisse être qualifiée d'abusive. Une simple disproportion au détriment du consommateur ne suffit pas à caractériser un abus, car il s'agit moins d'assigner au juge la mission de rechercher l'équilibre dans le contrat - ce qui relève de l'utopie - que de lui donner les moyens juridiques de sanctionner les abus manifestes, intolérables. D'une manière générale, une clause abusive peut se définir comme « la clause contractuelle qui comporte un avantage excessif tiré par un seul contractant »231(*). Par conséquent, parler de « clause abusive », c'est faire un raccourci de langage. Ce n'est pas la clause qui est abusive. La clause est déséquilibrée. Ce qui est abusif, c'est l'exploitation de la position de force à son origine232(*).

102. Quelques pratiques abusives à l'égard du partenaire professionnel. A côté des pratiques déjà citées et qu'ayant pour objet la liberté du consentement du partenaire économique tels que le refus de vente, les ventes liées ou les pratiques discriminatoires, d'autres pratiques foisonnent de comportements abusifs, traduisent l'exploitation abusive par un contractant de la situation de dépendance de son cocontractant. Elles sont notamment manifestes dans le domaine de la distribution233(*). Sans dresser une liste exhaustive de ces pratiques on citera pour mémoire, la pratique de la « corbeille de la mariée »234(*), la technique de la cagnotte235(*), les demandes de participations financières sans contrepartie réelle, le mécanisme de la marge arrière236(*), les facturations des linéaires disproportionnées237(*), les concessions à accorder pour éviter le déréférencement238(*). Ceci est vrai aussi pour les clauses d'exclusivité239(*), pour les clauses pénales par lesquelles la partie forte fixe forfaitairement le montant des dommages et intérêts dus par le débiteur qui exécute son obligation240(*). À côté de la clause pénale, l'usure dans le contrat de prêt d'argent est hypothèse très fréquente qui illustre l'appréhension d'une clause déséquilibrée. Dans toutes ces hypothèses, le contractant, en situation de force, profite de la dépendance de son cocontractant pour obtenir des avantages excessifs, injustifiés.

103. Quelques pratiques abusives à l'égard du consommateur. Le déséquilibre de rapports de forces entre consommateurs et professionnel accentué, notamment, par l'accroissement du nombre des contrats d'adhésion241(*), joint à une présence accrue des abus engendrant des déséquilibres contractuels flagrants. Ainsi, la puissance économique du professionnel lui pousse naturellement à profiter de sa position pour inscrire dans les contrats des clauses qui introduisent à son profit un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations de parties242(*). Cependant, s'il est difficile d'apprécier le caractère déséquilibré d'une clause dans les contrats entre professionnels dans la mesure où les contrats entre professionnels apparaissent, le plus souvent, comme des contrats sur mesure dont les clauses ont été négociées243(*), les clauses abusives sont décelables dans les contrats de consommation en raison de leur standardisation. En effet, il est fréquent que le déséquilibre contractuel procède des stipulations du contrat, ou plus précisément de l'ordonnancement juridique des relations instituées entre les parties. De tels déséquilibres sont peu accessibles aux consommateurs. D'abord parce que souvent, il n'est pas à même de les percevoir par lui-même, et ensuite parce que la concurrence ne les met que rarement en évidence. En outre, il est fréquent que le consommateur ne soit pas en mesure d'y échapper même si les a décelés parce qu'il se trouve dans l'obligation de contacter244(*).

104. Exemples de clauses abusives. Il peut s'agir d'une clause qui a pour objet l'exclusion ou la limitation de la responsabilité légale du professionnel en cas de mort d'un consommateur ou de dommages corporels causés à celui-ci, résultant d'un acte ou d'une omission de ce professionnel ; d'exclure ou de limiter de façon inappropriée les droits légaux du consommateur vis-à-vis du professionnel ou d'une autre partie en cas de non-exécution totale ou partielle ou d'exécution défectueuse par le professionnel d'une quelconque des obligations contractuelles, de prévoir un engagement ferme du consommateur, alors que l'exécution des prestations du professionnel est assujettie à une condition dont la réalisation dépend de sa seule volonté; d'imposer au consommateur qui n'exécute pas ses obligations une indemnité d'un montant disproportionnellement élevé; d'autoriser le professionnel à résilier le contrat de façon discrétionnaire si la même faculté n'est pas reconnue au consommateur, ainsi que de permettre au professionnel de retenir les sommes versées au titre de prestations non encore réalisées par lui, lorsque c'est le professionnel lui-même qui résilie le contrat ; d'autoriser le professionnel à mettre fin sans un préavis raisonnable à un contrat à durée indéterminée, sauf en cas de motif grave; de proroger automatiquement un contrat à durée déterminée en l'absence d'expression contraire du consommateur ; de constater de manière irréfragable l'adhésion du consommateur à des clauses dont il n'a pas eu, effectivement, l'occasion de prendre connaissance avant la conclusion du contrat ; d'autoriser le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans raison valable et spécifiée dans le contrat ; d'autoriser les professionnels à modifier unilatéralement sans raison valable des caractéristiques du produit à livrer ou du service à fournir ; de prévoir que le prix des biens est déterminé au moment de la livraison, ou d'accorder au vendeur de biens ou au fournisseur de services le droit d'augmenter leurs prix sans que, dans les deux cas, le consommateur n'ait de droit correspondant lui permettant de rompre le contrat au cas où le prix final est trop élevé par rapport au prix convenu lors de la conclusion du contrat ; d'accorder au professionnel le droit de déterminer si la chose livrée ou le service fourni est conforme aux stipulations du contrat ou de lui conférer le droit exclusif d'interpréter une quelconque clause du contrat ; de restreindre l'obligation du professionnel de respecter les engagements pris par ses mandataires ou de soumettre ses engagements au respect d'une formalité particulière ; d'obliger le consommateur à exécuter ses obligations lors même que le professionnel n'exécuterait pas les siennes; de prévoir la possibilité de cession du contrat de la part du professionnel, lorsqu'elle est susceptible d'engendrer une diminution des garanties pour le consommateur sans l'accord de celui-ci. Il peut s'agir aussi des clause ayant pour objet de supprimer ou d'entraver l'exercice d'actions en justice ou des voies de recours par le consommateur, notamment en obligeant le consommateur à saisir exclusivement une juridiction d'arbitrage non couverte par des dispositions légales, en limitant indûment les moyens de preuves à la disposition du consommateur ou en imposant à celui-ci une charge de preuve qui, en vertu du droit applicable, devrait revenir normalement à une autre partie au contrat.

105. Ainsi, l'abus de puissance économique demeure présent de manière sous-jacente, en ce qu'il est la cause efficiente du déséquilibre contractuel. Ce n'est que parce que le professionnel abuse de sa puissance économique présumée qu'il impose à son partenaire économique un contrat déséquilibré. Le déséquilibre, comme l'avantage excessif manifeste l'abus. Par ailleurs, le détenteur de pouvoir économique abuse de ce dernier, non seulement à l'égard des ses partenaires économique pour multiplier ses rentes, mais il l'utilise également comme une arme contre ses concurrents. Ainsi, il convient de présenter les manifestations de l'exercice abusif du pouvoir économique dans les rapports concurrentiels.

§2 - DANS LES RAPPORTS CONCURRENTIELS

106. Le critère de l'abus dans les rapports concurrentiels. Souvent l'entreprise disposant d'un pouvoir économique tente d'éliminer un concurrent et de renforcer ainsi sa position en recourant à des moyens autres que ceux qui relèvent de la concurrence par les mérites. Ici la fin justifie les moyens pour l'entreprise dominante. L'abus se définit alors par deux éléments : une volonté d'élimination et l'utilisation d'un moyen anormal au service de cet objectif245(*). La volonté d'élimination est parfois l'élément révélateur de l'abus. Parfois, au contraire, l'anormalité du comportement, qu'aucune justification objective n'explique, établit la volonté d'élimination.

107. L'affaiblissement de la concurrence horizontale. Il existe en réalité de nombreuses illustrations de stratégies d'élimination mises en oeuvre par une entreprise économiquement puissante. La difficulté de l'appréciation tient au fait que l'entreprise dominante ne peut être sanctionnée pour la seule raison qu'elle cherche à étendre sa puissance. On peut considérer cette forme d'exploitation abusive comme relevant de l'abus de structure. Il ne s'agit plus de s'appuyer sur l'indépendance que provoque le pouvoir économique, mais de profiter de la puissance qu'elle entraîne, pour développer une stratégie destinée à réduire la concurrence sur le marché. En parcourant la jurisprudence française, on se rend compte que les abus les plus fréquents répondent à l'objectif d'élimination ou d'affaiblissement de la concurrence horizontale résiduelle. Les stratégies sont très variées, et c'est pour cela que la classification des ces abus est délicate. On peut toutefois distinguer les abus à effet horizontal qui reposent sur des relations verticales (A), de ceux qui sont purement horizontaux (B).

A- Les abus à effet horizontal venant de l'organisation des relations verticales

108. Exploitation des rapports entre partenaires pour éliminer des concurrents. Dans l'exercice de sa liberté de concurrence, l'entreprise disposant d'une position dominante, notamment à l'égard de ses partenaires économiques, fournisseurs ou clients, peut profiter de ses rapports pour adopter une stratégie d'élimination des autres concurrents. Il en est ainsi, des clauses par lesquelles elle essaie de fidéliser de façon excessive sa clientèle et des pratiques des prix éliminatoires « prédatoires ».

109. Les clauses destinées à fidéliser de façon excessive la clientèle de l'entreprise détentrice du pouvoir économique. Rien n'est plus simple que de fidéliser sa clientèle lorsqu'on a les moyens économiques nécessaires. Alors les concurrents voient la demande se raréfier, et sont progressivement marginalisés. De très nombreuses conditions contenues dans des contrats verticaux de vente s'expliquent par cet objectif illicite. Ces conditions ne désavantagent pas directement les partenaires commerciaux de l'entreprise puissante, et les avantagent parfois246(*). Mais cet avantage est trompeur. Il n'est accordé que pour éliminer la concurrence et, en définitive, pour limiter les choix des consommateurs ou utilisateurs finaux.

110. Exemples de la jurisprudence française. La jurisprudence française offre maints exemples de condamnation de clauses d'exclusivité d'une durée trop longue, de clauses organisant des rabais de fidélité247(*), ou des ristournes d'objectifs. Il en est ainsi, de la fixation des conditions générales de vente incluant des remises liées au fait que l'entreprise satisfera à la totalité des besoins de ses clients pour une période donnée, d'une rigueur accrue dans les conditions de paiement exigées d'un acheteur si elle n'est pas expliquée par le souci d'éviter les impayés248(*). Toutes ces clauses dissuadent les clients de s'adresser à d'autres que l'entreprise dominante, marginalisent les concurrents de cette dernière et finalement fragilisent les offres alternatives adressées aux consommateurs et aux utilisateurs finaux249(*). A noter que ces clauses ne manifestent pas toujours un abus. Elles ne le sont que si elles ont un objet ou un effet anticoncurrentiel250(*). Elles peuvent donc être licites si, en fait, elles ne dissuadent pas les clients à s'approvisionner ailleurs. Tout est encore affaire de proportionnalité et d'examen de la situation du marché.

111. La pratique des prix éliminatoires « prédatoires ». L'entreprise détentrice d'un pouvoir de marché profitant de sa puissance, offre à sa clientèle des prix si bas que les concurrents ne peuvent s'aligner, et se retrouvent donc marginalisés. Ainsi, en vendant son produit à un prix, par exemple, inférieur à ses coûts moyens variables, elle cherche à éliminer un nouvel entrant qui pratique, sur le marché, des prix compétitifs Mieux encore, il y a là présomption de sa volonté d'éviction de son ou de ses concurrents. Une telle stratégie, en effet, conduit délibérément l'entreprise concernée à accuser des pertes qu'elle pourrait éviter, et elle ne peut être compatible avec son propre intérêt que si elle espère compenser ces pertes par les profits qu'elle pourra réaliser, une fois le concurrent disparu et sa position dominante initiale restaurée.

112. En effet, l'avantage apparent consenti aux clientèles est trompeur. D'abord il peut être de courte durée, car, une fois atteint le but d'élimination des concurrents, rien n'empêchera l'entreprise dominante de relever ses prix de façon indépendante, pour utiliser sa puissance économique à des fins de rente à l'égard de ses partenaires économiques251(*). Ensuite le profit immédiat ressenti par les acheteurs cache le désavantage qu'ils ressentiront lorsqu'ils n'auront plus de réelle alternative à l'offre de l'entreprise dominante252(*).

113. Les pratiques des prix très bas mais non prédatoires. Dans certaines situations exceptionnelles, des pratiques de prix trop bas mais non prédatoires, au sens de ce qui précède, peuvent aussi être condamnés. Mais il faut absolument alors que les prix soient d'abords artificiels, c'est-à-dire qu'ils ne résultent pas de la gestion de l'entreprise qui le pratique. Ainsi, par exemple, une entreprise détenant un monopole légal peut développer une activité sur un marché concurrentiel et subventionner cette activité d'une manière abusive et anormale253(*). En effet, une filiale d'un monopole peut profiter de l'aide que lui apporte la société mère titulaire de monopole, par des contrats trop favorables254(*). Une autre pratique semblable manifeste aussi l'abus de pouvoir économique surtout de la grande distribution dans le commerce de détail. Il s'agit des prix pratiqués à l'égard des consommateurs. Ils sont des prix abusivement bas destinés à ces derniers255(*).

114. Autres pratiques à l'égard des partenaires ayant pour but l'élimination de concurrents. L'entreprise disposant d'un pouvoir économique peut recourir à des propositions tarifaires destinées à protéger une technologie au détriment d'une autre présentée par un concurrent, de même que des mises à disposition gratuites d'appareils. L'abus peut aussi résulter d'un refus d'information sur les prix256(*), voire de l'insuffisance d'information sur les prix, empêchant la clientèle d'opérer un choix éclairé et limitant par là même la compétitivité des entreprises concurrentes257(*). L'entreprise peut, enfin, et en troisième lieu, recourir à des pratiques relavant de la concurrence déloyale pour dissuader les clients de s'adresser à la concurrence. Le dénigrement est ainsi une forme d'abus258(*). Des accords commerciaux conclus par un producteur économiquement puissant, avec plusieurs enseignes de la grande distribution conduisant à un approvisionnement quasi exclusif et un « achat de linéaires » participe d'une stratégie d'éviction des concurrents259(*). Toutes ces pratiques sont orientées vers des partenaires économiques, mais dans le but d'affaiblir ou d'éliminer les concurrents. Cependant, l'entreprise détentrice du pouvoir économique peut utiliser ses armes directement contre ses concurrents, c'est-à-dire d'une manière horizontale. Ce qui engendre des abus à effet horizontal organisés dans des relations horizontales.

B - Les abus à effet horizontal organisés dans les relations horizontales

115. Les formes d'abus dans les relations horizontales. L'entrepris disposant d'un pouvoir économique peut aussi être en situation d'abus si elle cherche simplement et frontalement, à éliminer ses concurrents actuels ou potentiels, afin de continuer à contrôler son marché. Ces abus se manifestent, notamment dans l'octroi des facilités essentielles ou dans l'exploitation d'une avance technologique.

116. Abus dans l'octroi des facilités essentielles. Dans sa lutte concurrentielle, l'entreprise peut opposer des refus de vente à ses concurrents qui ont besoin de ses produits pour être présents sur le marché260(*). Ces refus peuvent être directs ou indirects. Un refus peut être indirect, par exemple, si l'entreprise dominante ne répond même pas aux demandes des clients qui sont aussi ses concurrents, afin de les empêcher de formuler des propositions de contracter. Elle peut aussi fournir des produits ou services, nécessaires à ses concurrents, à des conditions, tels qu'ils sont dans l'incapacité de faire une marge suffisante pour demeurer sur le marché. Cela implique que l'entreprise dominante puisse vendre à des conditions rentables pour elles, sans permettre aux autres de réaliser une marge. On qualifie souvent ces abus sous forme de refus de vendre un bien ou de prêter un service indispensable à la présence sur le marché, par référence à la théorie d'origine américaine dite « des installations essentielles » ou « des facilités essentielles »261(*). Cette théorie a été élaborée pour répondre aux problèmes précis soulevés par la détention par une entreprise d'une position dominante sur un marché amont - celui des accès à des infrastructures - afin de restreindre la concurrence sur le marché aval262(*).

117. Abus d'une avance technologique. L'entreprise disposant d'un pouvoir économique absolu ne saurait non plus, sauf abus, stériliser le progrès technique sur le marché. C'est ainsi que l'acquisition de droits de propriété industrielle concurrents de celui exploité par l'entreprise dominante a pu être considéré comme abusif263(*). Certes il s'agit là de l'acquisition d'un monopole légal résultant d'une législation de propriété industrielle ce qui relève en principe de l'existence, ou de la substance du droit264(*). Mais il peut arriver que l'acquisition du monopole légal réponde à un objet spécifique autre que celui que le droit de la concurrence reconnaît aux droits de propriété intellectuelle.

118. Autres pratiques à l'égard des concurrents. L'entreprise dominante peut aussi décourager la concurrence trop agressive, en contraignant les entreprises du secteur à souscrire des ententes de partage de marché défavorables à ces derniers. Ces ententes peuvent créer un pouvoir économique qui sera ensuite utilisée pour éliminer des concurrents. Elle peut aussi abuser de sa puissance économique par l'octroi à ses clients des remises sur l'achat simultané de deux produits, cela à l'effet d'empêcher ces clients de se tourner vers une entreprise concurrente pour l'un des produits concernés ce qui peut provoquer l'affaiblissement ou l'élimination de cette dernière265(*). Il peut s'agir des clauses de non-concurrence d'une durée excessive266(*) ou des clauses de contrats de vente imposant des marges bénéficiaires égales à la totalité des remises267(*).

119. Toutes ces pratiques démontrent que l'entreprise disposant d'un pouvoir économique abuse dans l'exercice de ce dernier. Ce pouvoir s'exerce, à l'égard de ses partenaires économiques comme à l'égard de ses concurrents. Dans le premier cas, elle abus de sa puissance économique pour maximiser ses rentes. Dans le deuxième, elle l'utilise comme une arme pour affaiblir ou éliminer ses concurrents. En effet, s'il est clair que l'exercice abusif du pouvoir économique ne passe pas sans avoir des effets sur la situation juridiques des personnes en cause, il est clair aussi qu'il peut mettre en cause certains principes directeurs sur lesquels est construit notre système juridique. Ainsi, il convient d'apprécier les conséquences juridiques de l'exercice abusif du pouvoir économique.

Section II - Les conséquences juridiques de l'exercice abusif du pouvoir économique

120. Les principes directeurs sont indispensables à la cohérence du système juridique. Chaque science de droit ne vaudra que pour autant que valent ses principes268(*). Ainsi, le système juridique est considéré comme l'ensemble des règles sous le rapport de ce qui en fait la cohérence269(*). Cette cohérence n'est assurée que par des principes directeurs aptes à le diriger et à l'orienter. En effet, le principe du bon fonctionnement de la concurrence ainsi que celui de l'égalité contractuelle issu de la théorie de l'autonomie de la volonté animent l'ensemble de règles juridiques qui gouvernent les rapports entre opérateurs économique.

121. Les principes directeurs sont protégés par des règles d'ordre public. Pour consacrer ces principes directeurs, la loi recourt souvent aux règles dites d'ordre public par lesquelles elle instaure certaines valeurs consacrées par la collectivité. A chaque catégorie de valeurs correspond un ordre public, présenté comme l'ensemble des règles nécessaires à son respect, valeurs familiales, ordre public familiale ; valeurs politiques, ordre public politique ; valeurs économiques, ordre public économique et ainsi de suite270(*). Dans cette logique, le bon fonctionnement de la concurrence et l'égalité contractuelle sont deux valeurs consacrées par le droit. Cependant, les conséquences de l'exercice abusif du pouvoir économique mettent en cause certains fondements du droit de la concurrence et celui des contrats. En effet, l'entreprise économiquement puissante peut fausser le libre jeu de la concurrence sur le marché, comme il peut agir sur la volonté de ses partenaires économiques. C'est dans cette perspective que nous allons examiner les conséquences de l'exercice abusif du pouvoir économique sur le bon fonctionnement de la concurrence (I) ainsi que sur l'autonomie de la volonté du contractant (II).

§1 - L'ATTEINTE AU BON FONCTIONNEMENT DE LA CONCURRENCE

122. Le bon fonctionnement de la concurrence principe du droit de la concurrence. Le principe du bon fonctionnement de la concurrence anime l'ensemble des règles composant le droit de la concurrence271(*). De même, la caractérisation de l'atteinte au bon fonctionnement du marché impose, d'abord, que soit déterminé en quoi consiste l'état de concurrence protégée ou l'état de concurrence non faussée. En d'autres termes, l'appréciation des atteintes au bon fonctionnement de la concurrence passe d'abords par la présentation de cette notion. Ainsi, c'est la mise en lumière de cette notion de « bon fonctionnement de la concurrence » (A) qui va nos permettre de dégager les atteintes dont elle pourra faire l'objet (B).

A - Le principe du bon fonctionnement de la concurrence

123. Notion d'origine économique, instrumentalisée par le droit. Le bon fonctionnement de la concurrence est une notion d'origine économique. Son appréhension est une tache difficile pour le juriste. La difficulté est accrue du fait de son caractère extra juridique.272(*). Cette caractéristique lui confère sa spécificité. Il est un instrument d'intervention au service d'objectifs économiques et sociaux273(*). L'analyse économique constitue, selon le professeur F. Jenny, « l'un des fondements principaux du droit de la concurrence »274(*). Il faut donc puiser dans la science économique les éléments nécessaires à la compréhension de la notion du bon fonctionnement concurrentiel dont le droit de la concurrence serait l'instrument. Mais les limites de cette approche conduisent à rechercher des critères juridiques de définition de cet objet. Cela dit, il convient de présenter la notion « du bon fonctionnement de la concurrence » en tant que principe économique avant de s'interroger sur sa consécration en tant que principe juridique.

124. Le bon fonctionnement de la concurrence, principe économique. Qu'est ce que le bon fonctionnement concurrentiel ? La question est difficile car elle est loin d'être aujourd'hui unanimement résolue par les économistes. Une simple consultation des dictionnaires économique suffit à révéler cet état de fait275(*). « Autant la notion et le terme de concurrence sont fondamentaux dans une économie de marché, autant il est difficile d'en donner une définition qui soit à la fois fidèle et réaliste »276(*). S'éloignant du modèle normatif et abstrait élaboré par les théoriciens néoclassiques, les analystes modernes se penchent aujourd'hui sur des observations plus proche de la réalité du marché et de la variété de ses formes277(*). « D'une conception théorique et générale, les économistes sont passées à des appréciation concrètes et multiples des situations de concurrence »278(*). Ainsi, il en résulte une multiplication des schémas théoriques et autant de définitions différentes des critères permettant de caractériser l'existence d'une atteinte portée à la concurrence279(*). Néanmoins, cette multiplicité de modèles théoriques pousse naturellement les autorités qui veillent au bon fonctionnement du marché à opérer un choix entre ces différents modèles théorique pour maintenir une concurrence non faussée280(*). Ainsi, il convient de vérifier en quoi consiste cet état de concurrence non faussée.

125. L'état de concurrence « non faussée »281(*) ? La Cour de justice de communauté européenne considère que celle-ci « implique l'existence sur le marché d'une « concurrence effective » « Workable compétition », c'est-à-dire de la dose de concurrence nécessaire pour que soit respectés les exigences fondamentales et atteint les objectifs du Traité »282(*). La notion de concurrence effective fait, ainsi référence au modèle développé par Clark283(*) ; mais plus d'une adhésion des juges à ce modèle théorique, elle marque leurs volontés de signifier un éloignement du modèle néoclassique de concurrence pur et parfaite. La concurrence n'a pas à être pure. Elle doit seulement être efficace. En quoi consiste une telle concurrence selon les juges ? La concurrence est efficace lorsqu'elle permet « d'atteindre des objectifs » - elle n'est qu'un moyen, elle est soumise à des règles. La Cour de justice de communauté européenne, ajoute que « la nature et l'intensité de la concurrence » peuvent « varier en fonction des produits ou services en cause et de la structure économiques des marchés sectoriels concernés »284(*). La concurrence efficace ne correspond donc pas à une forme particulière de marché. Elle ne porte pas non plus exclusivement sur les prix. On le voit, la définition économique du principe du bon fonctionnement de la concurrence est très large. La concurrence efficace est multiforme et est s'accommode de différentes catégories de marchés, duopole, oligopole285(*), et de différentes formes de distributions.

126. Le bon fonctionnement de la concurrence dans les réseaux de distribution sélective. Il est de prime abord logique d'observer que cette forme de réseau restreint la concurrence sur le marché. Or, la légitimité de ces réseaux est habituellement confirmée par les juges. On peut dès lors, s'interroger sur la nature des éléments susceptible de caractériser une situation concurrentielle. Les juges ont décidé que cette forme de distribution était un élément de concurrence effective « à condition » que le choix des revendeurs soit opéré selon certains critères. La sélection des membres du réseau doit s'opérer « en fonction de critères objective de caractère qualitatif ». Ces conditions doivent être fixées « d'une manière uniforme à l'égard de tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non discriminatoire », les restrictions de concurrence en résultant doivent être « indispensable à la réalisation de ces objectifs »286(*). Ce sont donc des conditions de l'organisation qui se présentent comme les éléments de définition de la situation de concurrence effective.

127. Application de la règle de la raison. Cette application de la méthode de la règle de la raison287(*), adoptée par la suite pour d'autres formes de marché, apparaît non pas seulement comme un moyen d'appréciation des effets d'une pratique sur la concurrence, mais comme une méthode de définition de la notion de concurrence effective. Cette méthode permet de définir si une pratique correspond à une concurrence effective. Ainsi, les juges établissent, non pas seulement qu'une restriction de concurrence est justifiée, mais que la concurrence existe et suffisamment efficace. Pour se faire, ils distinguent le problème de l'effet restrictif de concurrence - le système de distribution diminue la concurrence par les prix - de celui de la compatibilité de la pratique à la préservation d'une concurrence efficace sur tout le marché288(*). Par cette démarché, les magistrats en viennent à une définition de l'état de concurrence efficace. Les critères employés par les juges, sont souvent, les notions de proportionnalité, d'objectivité ou de non discrimination289(*). Ces critères semblent bien des critères juridiques, si même les éléments d'appréciation sont d'ordre économique dans ce terrain. Le raisonnable même est une notion juridique290(*).

128. Ainsi, la concurrence apparaît comme un moyen au service d'objectifs. Elle est soumise à des règles - elle doit répondre à certaines exigences -. Mais plus encore, il semble que des règles permettent de la définir. De cette façon, l'analyse glisse d'un terrain économique à un terrain juridique. Le concept de concurrence, intégré dans des normes juridique, a acquis un sens pour le droit. C'est un « concept standard » qui peut être envisagé dans une perspective juridique.

129. Le bon fonctionnement de la concurrence, principe juridique. Si le fonctionnement concurrentiel est une notion économique, il semble bien que le bon fonctionnement de la concurrence soit une notion juridique. La concurrence est un mode de régulation du marché. L'objet du droit de la concurrence est de permettre cette libre régulation du marché. Le sens de la norme peut être trouvé hors d'elle-même ; elle est l'instrument d'une politique économique. Mais le résultat à atteint est l'autonomie, la liberté. Dès lors, ce sont des règles de jeu qui permettent de définir cet objectif. Cette perspective oriente l'analyse vers la règle elle-même. Les règles de jeu définissent le sens de ce droit, et non pas tant les résultats escomptés. Ainsi par exemple, une entente est elle prohibée parce qu'elle a un effet restrictif de concurrence. L'atteinte à la concurrence est mesurée selon des critères économiques, de structure, de comportement et de résultat. Mais cette seule mesure ne suffit pas. La compatibilité d'un comportement à l'exigence d'une concurrence efficace doit être envisagée à la lumière des critères juridiques. L'entente est également prohibée parce qu'elle consiste en une entente. La règle de jeu interdit aux acteurs économiques de s'entendre. Cette règle caractérise encore l'état de concurrence efficace. Enfin, la mesure même de l'effet restrictif de concurrence tolérée peut obéir à des critères juridiques. La forme de distribution est compatible avec l'exigence d'une concurrence efficace dès lors que l'organisation obéit à certaines règles et que les moyens employés sont proportionnés à son objectif.

130. Les règles du droit de la concurrence critères de définition de l'état de concurrence efficace. La concurrence est une situation économique de fait, un état du marché. Mais elle est incarnée dans un ensemble de règles. Elle apparaît alors comme un phénomène de dimension à la fois économique, politique et juridique291(*). Les règles du droit de la concurrence, si elles ont pour finalité de favoriser le bon fonctionnement de la concurrence, contribuent tout autant à définir cette finalité. En effet, Le modèle de concurrence efficace, ouvert aux adaptations, est une référence souple et évolutive. C'est un modèle concret. Il correspond simplement à l'idée que certaine compétition doit être maintenue entre les acteurs économiques. Cette adaptabilité du modèle permet d'évaluer les différents comportements des acteurs économiques avec souplesse. Une structure idéale de marché n'est pas définie à priori. Dès lors, le droit trouve dans cette matière une place grandissante292(*). Les normes juridiques se transforment en critères de définition d'une situation économique. Ainsi, en établissant des règles auxquelles les acteurs économiques doivent se conformer, le système juridique contribue à définir l'état de concurrence efficace.

131. Cependant, la définition de la faute de concurrence déloyale, ou de critère de validité de la clause de non concurrence, constitue aussi des éléments de définition de la compétition sur le marché. Le principe de loyauté n'est, de même, pas étranglé aux prohibitions de droit des pratiques anticoncurrentielles. Comme le remarque le professeur F. C. Jeantet, « le marché où se confronte offres et demandes est plus comparable à un stade qu'à une arène. Le meilleur, en qualité et prix, doit triompher, non pas nécessairement le plus fort. Les coups bas sont interdits ».

132. Ainsi, le droit de la concurrence, en établissant des règles de jeu sur le marché, définit l'état de concurrence qui vise à préserver. Comme le synthétise le professeur C. Chaumpaud, « le libéralisme économique, c'est la compétition plus le droit ». cette perspective explique l'absence d'opposition entre le droit moderne et le droit classique de la concurrence. le droit de la concurrence se définit par l'ensemble des règles qui le composent. Il comprend, pour reprendre la définition du professeur J. Azéma, « toutes les règles juridique ayant pour objet direct la concurrence »293(*). ainsi, le bon fonctionnement de la concurrence, objectif économique, trouve une traduction juridique dans le teneur des règles juridiques, le principe qu'elles mettent en oeuvre. Ainsi présenté le bon fonctionnement de la concurrence est un principe consacré par le droit en tant que principe directeur de l'activité économique. Cependant, ce principe peut subir des attentes par les opérateurs détenteurs du pouvoir économique, dans la mesure où ils peuvent imposer leurs lois au marché. A cet effet, il importe de mettre en lumière cette réalité omniprésente dans les rapports concurrentiels.

B- La substitution de la loi de l'auteur de l'abus à celle du marché

133. La loi du marché c'est la compétition plus le droit. Hayek, nous l'avons vu, considère que l'ordre économique ou juridique n'est pas construit par l'Homme et que sa finalité lui échappe. Il en résulte, selon l'auteur, que la seule contingence de cet ordre spontané est suffisante pour garantir la liberté des individus et leurs satisfactions. Se séparant de Hayek sur ce dernier point, Rawls observe qu'un principe d'équité supérieur doit prévaloir. Pour autant, le droit, selon cet auteur, ne doit pas être asservi à l'obtention d'un résultat prédéterminé. Un juste résultat ne peut être obtenu que par le respect d'une juste procédure : « une procédure correcte ou équitable » détermine si « un résultat est également correct ou équitable ». Dans cette optique, la règle juridique fonde, en elle-même, la définition de l'ordre qu'elle crée. Ainsi, la concurrence, comme nous l'avons constaté, est un instrument pour une finalité. Cette constatation rejoint l'une des thèses les plus importantes soutenues par Josserand est précisément la finalité sociale conférée, non seulement au droit de propriété, mais plus largement aux droits subjectifs. Dans la première partie de ses Essais de téléologie juridique, intitulée « De l'esprit des droits et de leur relativité », il défend l'idée que le titulaire d'un droit, sauf les quelques prérogatives sans finalité - que Josserand appelle les « droits non causés », « droits amoraux » ou encore « droits absolus » -, ne peut en user contrairement à la fonction sociale qui est assignée à celui-ci.294(*). Transposant cette même logique à la liberté de la concurrence. Cette dernière n'est reconnue aux opérateurs économiques que pour atteindre une finalité, à savoir, l'amélioration du bien être des individus et de la collectivité. Ainsi, la liberté de la concurrence et à l'instar des droits subjectifs n'est reconnue que dans la mesure où, elle contribue à la réalisation de cet objectif. C'est dans cette perspective que la concurrence a été libérée et conquise par le droit dans le but de maintenir un modèle de concurrence effective. Or, l'entreprise économiquement puissante peut faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché et ainsi imposer sa loi aux autres opérateurs économiques.

134. La loi du plus fort au lieu de la contrainte des mécanismes naturels du marché. La puissance économique permet à son titulaire de bénéficier d'une sphère d'autonomie qui ne peut être déduite du seul exercice d'une liberté. L'entreprise détentrice d'un pouvoir économique dispose de la puissance d'adopter « des comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis des concurrents, de ses clients et finalement, des consommateurs295(*). Sa force l'autorise à se soustraire à la contrainte du marché. L'état de dépendance d'un partenaire économique d'une entreprise engendre l'indépendance de cette dernière. De ce fait, l'entreprise dominante est à même d'imposer ou de refuser un accord, d'en déterminer unilatéralement la teneur296(*).Il est en revanche possible de s'interroger sur la compatibilité de l'autonomie créée par les pouvoirs économiques de l'entreprise dominante avec la théorie économique du marché. Il est vrai que la constitution de pouvoirs économiques sur le marché est inhérente à son fonctionnement. Le principe de libre concurrence légitime le processus de constitution de ces pouvoirs. Mais l'exercice même de la concurrence est conditionné par la soumission des agents économiques aux règles du marché. Dans le cadre de la théorie économique du marché, il est, de ce fait, assez difficile d'évoquer l'idée de volontés autonomes dans la mesure où la loi économique du marché dicte aux agents rationnels leurs comportements297(*). Or, l'indépendante de l'entreprise économiquement puissante révèle qu'il ne subit plus la contrainte du marché. Comme le relève le professeur M. -A. F. Roche, lorsqu'un agent « retrouve une puissance, une autonomie de la volonté par rapport à l'ajustement mécanique des prix par l'offre et la demande, l'abus de position dominante peut être constitué »298(*). Cette autonomie est le trait caractéristique de la puissance économique exercée. Cependant, que l'entreprise se soumette aux contraintes de la concurrence ou bien qu'elle cherche à s'en défaire, son comportement est également autonome. La différence entre les deux situations tient, non pas dans l'autonomie qu'il manifeste, mais dans l'influence générée par la force de cette autonomie299(*). L'entreprise, qui dispose du pouvoir de se soustraire à la concurrence, dispose du pouvoir corrélatif d'agir sur cette concurrence. Ainsi, non seulement l'entreprise en position dominante ne subit plus la contrainte du marché, mais surtout, elle exerce une contrainte sur celui-ci. Elle se substitue à cette contrainte. La puissance de l'entreprise dominante lui permet d'exercer une influence déterminante sur les mécanismes naturels du marché.

135. Ainsi, la puissance économique apparaît tout à la fois comme un pouvoir de se soustraire à une concurrence effective ou comme un pouvoir de faire obstacle à une concurrence effective. Ces deux définitions correspondent en fait à l'observation d'un phénomène identique ou plus exactement à une description des faces actives et passive de ce phénomène300(*). Le pouvoir de l'entrepris dominante se présente sous deux aspects : dans sa face active, il confère à l'entreprise dominante une influence sur les autres entreprises présentes sur le marché ; dans sa face passive, elle soustrait l'entreprise dominante à l'influence des autres participants au marché301(*). Ainsi, le détenteur du pouvoir économique dispose de la possibilité de substituer sa loi à celle des mécanismes naturels de la concurrence. Cependant, les conséquences de l'exercice abusif du pouvoir économique ne se limitent point à ces éventualités, ce dernier pour avoir des effets considérables sur l'autonomie de la volonté du cocontractant.

§ 2 - L'ATTEINTE A L'AUTONOMIE DE LA VOLONTE DU COCONTRACTANT

136. Le système juridique repose, comme nous l'avons signalé, sur deux libertés fondamentales : la liberté de la concurrence et son corollaire la liberté contractuelle. Cependant, pour réaliser les résultats les plus justes et les plus équitables, la liberté contractuelles suppose l'égalité des parties au contra conformément à la théorie d'autonomie de la volonté (A)302(*). Or, la réalité confirme que cette égalité est une égalité virtuelle. Dans cette mesure, la personne détentrice du pouvoir économique abuse souvent de sa position de force en mettent, ainsi, en cause, l'un des principes les plus fondamentaux sur lesquels est construit notre système juridiques (B).

A- Le principe de l'égalité contractuelle, principe directeur du droit des contrats

137. Le principe de l'autonomie de la volonté et l'égalité contractuelle. Le principe de l'autonomie303(*) de la volonté est classiquement considéré comme un principe philosophique. Il signifie que chaque individu est un être libre capable de se lier lui-même, mais seulement par un acte souverain de volonté. En effet, la volonté considérée comme le fondement philosophique du contrat a été instrumentalisée par le droit.304(*). Certes, le droit des contrats vise à conférer à la volonté un pouvoir. Autrement dit, le principe philosophique a reçu une définition juridique305(*). Ainsi, l'autonomie de la volonté a deux significations très distinctes, mais qui relève de la même philosophie. Dans la littérature philosophique, elle est « le pouvoir de la volonté libre de se donner sa propre loi morale » ; dans la littérature juridique, « il désigne le pouvoir qu'à la volonté de créer sa propre loi de droit306(*). Ainsi, « dire que la volonté est autonome c'est admettre que, la volonté des contractant crée à elle seule le contrat et les effets qui en découlent »307(*).

138. L'égalité contractuelle présume la justice contractuelle. Cette conception est appuyée sur le postulat qui dit que la liberté des individus conduit à établir les rapports individuellement les plus justes et socialement les plus utiles. Cela signifie que le libre jeu des volontés individuelles ne peut que réaliser la justice. Chaque individu étant le meilleur juge de ses intérêts. On peut présumer que ceux-ci sont parfaitement respectés par les engagements qu'il a volontairement souscrits. Si une obligation imposée peut être injuste, une obligation acceptée ne peut pas l'être. L'opposition d'intérêts sous-jacente au contrat est, au demeurant, la meilleure garantie de ce que les obligations qui en sont issues respectent un certain équilibre puisqu'elles répondent aux besoins de chacun. Au cas contraire, la partie désavantagée n'aurait pas consenti. Pour reprendre la formule toujours citée de Fouillée : « Qui dit contractuel dit juste »308(*). Cependant, pour être fondée, cette conception doit être basée sur l'égalité des parties au contrat. La justice contractuelle ne peut être atteinte que si les parties sont égales et leurs volontés sont autonomes.309(*). Le principe de l'autonomie de la volonté, dont la liberté contractuelle est le postulat de l'égale puissance des volontés de chaque individu. Si les Hommes sont libres de créer leurs propres lois à travers la puissance de leurs propres volontés, c'est leur égalité de puissance de volonté qui fonde la justice des lois qui en découlent. C'est à travers cette logique que le droit classique des contrats ne sanctionne le contrat que par des mesures curatives destinées à protéger le consentement expression juridique du contrat. Cela dit, il convient d'apprécier les conséquences de l'exercice du pouvoir économique sur la volonté individuelle des partenaires économiques.

B - La substitution de la volonté de l'auteur de l'abus à celle du contractant

139. La liberté contractuelle nécessaire au libre fonctionnement du marché. Fondement du système juridique, l'autonomie de la volonté n'exclut pas une soumission des agents économiques aux contraintes de la concurrence310(*). La liberté contractuelle est nécessaire au libre fonctionnement des marchés. Le contrat en ce sens est le pilier du marché311(*). Ainsi, selon le professeur Oppetit, « Le principe de libre concurrence s'articule autour de deux libertés majeures : d'une part la liberté du commerce et de l'industrie [...] et d'autre part, la liberté contractuelle, en vertu de laquelle, les compétiteurs doivent pouvoir conclure les contrats qu'ils souhaitent aux conditions de leurs choix »312(*). Cette liberté est reconnue conformément au principe de l'égalité contractuelle. Or, comme on l'a déjà présenté, le titulaire du pouvoir économique dispose de la possibilité - en fait - d'imposer sa volonté à d'autres agents économiques313(*) -. En effet, la dépendance économique est l'arme dont dispose le titulaire d'un pouvoir économique de fait pour altérer le consentement de son partenaire dans son aptitude à se décider314(*). Le professionnel peut imposer à un contractant une clause, s'agissant d'une convention qui ne présente pas de rapport direct avec l'activité professionnel de ce dernier315(*). Le contenu du contrat a été fixé totalement ou partiellement de façon abstraite ou générale avant la période contractuelle316(*).

140. L'indépendance du comportement du titulaire du pouvoir économique. Ces différents pouvoirs révèlent l'indépendance du comportement de leurs titulaires. La puissance économique apparaît comme la manifestation du pouvoir d'une volonté autonome qui n'est pas l'expression de liberté contractuelle317(*). Le stipulant du contrat d'adhésion manifeste son autonomie de décision en concluant un accord dont il a déterminé la teneur, le pouvoir de sa volonté libre et indépendant. Il déploierait ainsi une autonomie inhérente à la notion même du contrat318(*). Comme nous l'avons vu, la volonté individuelle est en effet « le principe du contrat »319(*) dont la liberté contractuelle est l'expression juridique. La manifestation de la volonté du contractant ne serait que l'expression de cette liberté. Dès lors, la puissance économique s'identifie au principe même d'autonomie de volonté, perdrait tout trait caractéristique320(*). La contrainte du marché est remplacée par celle de l'entreprise dominante321(*). Cette dernière ne subit donc plus la contrainte du marché et impose sa propre loi au partenaire dépendant. Cette relation dissymétrique entre les deux parties, est la conséquence de l'exercice d'un pouvoir de l'une sur l'autre. Ce pouvoir de fait, pouvoir d'action, permet à son titulaire d'imposer sa volonté à d'autres acteurs afin d'obtenir la conclusion d'un contrat déséquilibré à son profit. Pour cela, il profite de son pouvoir économique informationnel322(*), technique ou de l'exploitation d'un état de dépendance dans laquelle se trouve son partenaire.

141. Mise en cause du principe de l'égalité contractuelle. Cette réalité atteste de l'inégalité contractuelle des cocontractants. Le contrat, parce qu'il est un accord de volontés qui fait naître une ou plusieurs obligations, implique, d'une manière naturelle, un rapport de force d'où découle une situation d'inégalité323(*). Cette inégalité contractuelle a pour origine le pouvoir économique d'un contractant qui va lui permettre de conclure un contrat tout entier à son avantage en raison de la faiblesse de son cocontractant, notamment sa qualité de consommateur ou la situation de dépendance dans laquelle il se trouve.

142. Egalité en droit et inégalité en fait. L'égalité qui préside aux relations interindividuelles est une égalité en droit, c'est-à-dire une égalité formelle. Celle-ci est cruciale. Elle est une condition de la liberté. Mais elle est cependant imparfaite. Il existe en effet une inégalité de fait, une inégalité matérielle, que le droit civil en général et le droit des contrats en particulier, refusent d'appréhender324(*). Ainsi, ce sont les fondements mêmes du principe de la force obligatoire du contrat qui sont ici en cause. En effet, si dans la théorie classique, la force obligatoire du contrat s'appuie sur la convergence des volontés présumées libres et égales, le consommateur ou l'entreprise dépendante se contente le plus souvent de subir la volonté du professionnel qui y exprime toute sa puissance ; le consommateur est rarement en situation de négocier, de discuter le contenu : celui-ci est souvent pré-rédigé par le professionnel maître de jeu325(*). Ainsi, au postulat qui voulait que le libre jeu des volontés individuelles conduit à la justice, on a opposé que les Homme sont fondamentalement inégaux. Partant, bien loin de conduire à des rapports équilibrés, la liberté contractuelle serait, ainsi, l'instrument qui permet au fort d'imposer sa loi au faible. A la formule de Fouillée « Qui dit contractuel dit juste » répond celle de Lacordaire «  Entre le fort et le faible, c'est la liberté qui asservit, la loi qui affranchi »326(*). Sans être fausse, cette critique n'en est pas moins excessive. On a vu, en effet, que les rédacteurs du code civil français, source principal du D.O.C. marocain, n'ont jamais fait entièrement leurs, les postulats de libéralisme économique. Bien loin de s'en remettre aux seules vertus de la liberté contractuelle pour assurer la défense des valeurs essentielles, ils ont donné au contrat une ossature qui permet aux agents de l'ordre juridique de vérifier que celui-ci respecte les intérêts des parties comme ceux des tiers et de la collectivité327(*). La règle classique de droit civil selon laquelle, le consentement des parties doit être éclairée et libre pour pouvoir créer des obligations328(*) en atteste.329(*). En revanche, ils n'ont, sans doute, pas prévu la mutation profonde qui a marqué le phénomène contractuel à partir de la seconde moitié du XIX siècle330(*). Certes, le concept même des intérêts des tiers et de la collectivité est un concept relatif aux doctrines économique et sociales de la société. Ainsi, les intérêts privés peuvent être instrument pour atteindre l'intérêt général. Dans ce sens, le professeur C. Thibierg Guelfucci énonce que la volonté est seulement « un moyen, un instrument au service d'un droit contractuel animé de valeurs supérieurs »331(*) à l'instar des valeurs morales ou économiques. Dans le même sens, le professeur Villey, regrettent le consensus ainsi prêté au principe d'égalité, observe que « l'on a tiré le principe d'égalité des contractants, le système du libéralisme qui traite les pauvres à l'égal des riches en fait les écrase »332(*).

143. Cela dit, le droit aujourd'hui est dépassé par le fait. La réalité socio-économique en atteste. Ainsi, de nouveaux valeurs, notamment économique, sont entrées en jeu avec l'avènement d'une nouvelle conception de libéralisme, plus modérée et incarnée par le néolibéralisme333(*) économique et ses nouvelles conceptions du droit. Ainsi, la théorie général devant se renouveler pour intégrer certaines des évolutions issues du droit spécial des contrats, la théorie générale est, en outre, prise en tenaille entre le droit de la concurrence et les tendances consuméristes qui ont tous deux pour finalité médiate d'assurer le bon fonctionnement du marché334(*). Certes, la théorie de l'autonomie de la volonté, qui a dominé l'enseignement du droit des contrats depuis le début du siècle, n'est plus affirmée aujourd'hui que par la doctrine civiliste la plus traditionnelle. Elle fait l'objet de vives critiques, dont les plus fondamentales ont été présentées par les positivistes335(*). Enfin, si l'accord des volontés ne produit des effets de droit que parce que le droit objectif lui reconnaît un tel pouvoir et dans les limites définies par celui-ci et si la lutte concurrentielle n'est légitime que dans la mesure où le droit la garantie. A cet effet, il importe de se pencher sur l'étude du droit afin de mettre en lumière les instruments juridiques en mesure d'appréhender ces phénomènes d'abus omniprésents dans l'exercice du pouvoir économique et ce dans le droit positif marocain et à la lumière de l'expérience française en la matière.

Deuxième partie 

REGULATION DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE

144. Inadaptation du droit au fait. De la préhistoire à nos jours, l'usage de la violence n'a pas vraiment faibli. Le rôle du droit est de lutter contre cette violence - au sens large du terme - pour établir et assurer la garantie sociale336(*). Mais, malheureusement, de la théorie à la pratique, la distance se révèle, comme bien souvent, considérable. Si l'inspiration générale de toute législation apparaît parfaitement légitime, sa traduction concrète se révèle singulièrement déficiente, soit par manque de texte soit par une multiplication de ces derniers d'une manière opportuniste. Cette perturbation menace la cohérence du système juridique de sorte qu'une incompatibilité apparaît entre ses principes fondateurs et les dispositions de leur mise en oeuvre. A cet effet, les faiseurs de textes ne se préoccupent point de la qualité des textes et le juge n'en fait point une application sage et raisonnée337(*).

145. Inadaptation accentuée par le phénomène du pouvoir économique. Cette situation a été accentuée, notamment, par la réalité du pouvoir économique que nous avons mis en lumière. L'exercice abusif de ce dernier a révélé l'insuffisance des mécanismes traditionnels, même en présence d'une jurisprudence vivante et audacieuse, ce qui est le cas de la jurisprudence française. Cependant, la puissance économique ne doit pas rester en marge du droit comme les zones de non droit. Elle est omniprésente dans toutes les activités de la vie courante. Sa régulation est un impératif social et économique. A cet effet, beaucoup sont les législations qui ont entamé une mise à niveau de leur arsenal juridique dans le but, de la préservation d'une concurrence effective, ainsi que de la protection du contractant économiquement faible338(*).

146. Nécessité d'un interventionnisme libéral. La préservation de la concurrence effective suppose un minimum de contrainte par un interventionnisme libéral339(*). Ce dernier se distingue du dirigisme en ce que le but recherché est un libre fonctionnement du marché : il ne s'agit que de « soumettre les relations contractuelles à une règle du jeu plus rigoureuse » alors que dans une économie dirigiste, « les jeux sont faits »340(*). Ainsi, la préservation du bon fonctionnement de la concurrence repose sur des règles d'ordre public économique. Tel est le contenu de la loi 06-99341(*) en matière de la protection de la concurrence. Néanmoins, il apparaît qu'à l'intérieur du droit de la concurrence, certaines dispositions qui sont plus typiques que d'autres : la concurrence est tantôt protégée en elle-même, tantôt à travers la protection d'une catégorie d'agents économiques, ce qui confère à ces règles un léger « parfum » d'ordre public de protection342(*). Nous estimons que cette distinction est aujourd'hui dépassée et ce, dans la mesure où le bon fonctionnement de la concurrence est un concept général qui prend en charge toutes les atteintes au marché y compris aux concurrents qu'aux consommateurs343(*). En effet, même si le droit de la concurrence et le droit de la consommation restent deux branches distinctes344(*), l'amélioration du service rendu au consommateur est toujours la cause finale de l'ensemble, À cet effet, on regrette l'absence d'une législation protectrice du consommateur dans notre arsenal juridique. Cependant, et dans cette approche globale, l'adoption d'une économie du marché ne passe pas d'abords, sans une mise à niveau institutionnelle et fonctionnelle.

147. Une mise à niveau institutionnelle. Toujours dans le cadre de la lutte contre les abus de puissance économique on assisté ce dernier temps à la mise en place d'un ensemble d'organes chargés de l'harmonisation du fonctionnement du nouveau régime juridique et économique à la lumière des normes acceptées et respectées par les pouvoirs publics et les opérateurs économiques345(*). Ces organes sont dans la majorité des cas, des autorités du marché, représentant une nouvelle forme d'administration indépendante du gouvernement et placée de ce fait en dehors des services d'administration centrale. Indépendance imposée par la nécessité de rompre avec les structures administratives traditionnelles qui n'ont pas su faire la preuve de leur indépendance à l'égard des opérateurs économiques. Ces autorités présentent la garantie de l'impartialité de l'action de l'Etat surtout lorsque dans des marchés nouvellement ouverts à la concurrence, les entreprises entrant sur le marché sont en concurrence avec l'ancien monopole sous la forme d'une entreprise publique en position dominante. Imposé par le principe selon lequel, l'Etat ne peut pas être à la fois juge et partie ce qui conduit à créer un mur entre l'Etat opérateur et l'Etat régulateur.

148. Une adaptation fonctionnelle du rôle de l'Etat. Sur le plan fonctionnel c'est cette expression `Etat régulateur' qui traduit la nouvelle fonction de l'Etat. Etat régulateur, signifie une fonction de régulation346(*). Procédé par lequel l'Etat essai de parvenir à rendre plus acceptable le maintien de ses interventions. Cette fonction de régulation est certainement le facteur clef du succès des autorités du marché. Il repose sans doute sur leur ambivalence et leur capacité de transgresser les frontières des deux limites du pouvoir exécutif. La limite supérieure face au pouvoir législatif, vu la lenteur et la complexité du procédé classique de proposition et d'adoption des lois. Et la limite inférieure par un empiètement du régulateur sur le terrain du juge pour sanctionner ou régler les différents entre opérateur économique. C'est le principe classique de la séparation des pouvoirs qui est mis en cause. Principe du droit public théorisé par Montesquieu dans son ouvrage l'esprit des lois. En effet, l'environnement politique, économique et social de l'époque dans laquelle fut posé le principe, a connu des mutations profondes. Aujourd'hui, la vie sociale est caractérisée par la complexité, et la technicité, le développement de la technologie de l'information, et de l'économie du savoir, la supranationalité... cet environnement exige une célérité dans la mise à jour des normes d'organisation de la vie économique et sociale ainsi que dans le règlement des litiges.

149. « Dire juridique », « faire juridique » et l'abus de puissance économique. Toutes ces adaptations de l'exécutif laissent planer sur le retard accusé dans la fonction judiciaire. Peut-on dire que le pouvoir exécutif a pu adapter son action aux mutations profondes de la société moderne, alors que, le pouvoir judiciaire est resté emprisonné dans des principes archaïques, loin d'être les piliers d'une justice dont, le coup d'épée est plus rapide que celui de l'épée du temps. Cependant, toutes ces adaptations ont pour objectif l'encadrement du marché pour conduire l'économie vers ce qui serait son but ultime, le bien être des individus347(*). Certes, la lutte contre les abus de puissance économique fait intervenir deux organes, disposant chacun d'un pouvoir propre: le juge ayant un rôle central qui doit adapter son « dire juridique » avec les réalités socio-économiques ; et le législateur qui doit mettre à jour son « faire juridique » dans le but d'accompagner les mutations profondes qu'ont connues les sociétés contemporaines. Ainsi, dans le but d'une appréciation globale de la régulation de l'abus de puissance économique, nous entamons un examen de la réaction du dire juridique face aux abus de puissance économique (Chapitre I), avant de mettre en lumière les instrument et les techniques mises en oeuvre par notre droit positif dans à cet instar, ainsi que celle en perspective et ce, à la lumière de l'expérience française en la matière (Chapitre II).

Chapitre I 

LE DIRE JURIDIQUE REGULATEUR DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE

150. Le dire juridique à une place centrale dans la lutte contre les abus de puissance juridique. C'est le lieu privilégié de rencontre de deux grandes catégories de juristes dont l'action commune et multiséculaire consiste à dire le droit. Figure en tête de la première catégorie le juge348(*). La seconde catégorie est composée de ceux, traditionnellement dénommés les docteurs de la loi349(*). Ceux de la première catégorie ont ceci en commun que leur dire se manifeste ordinairement à l'occasion de litiges au règlement desquels ils interviennent. Adapté à l'action sur le réel, leur dire est pragmatique et se différencie du dire doctrinal des docteurs de la loi.350(*). S'il intervient généralement en vue de régler un litige, ce dire n'a pas pour autant la même nature. Tantôt, il entraîne la décision dans un procès ; c'est le dire décisoire351(*) ; tantôt, il incite les adversaires à se réconcilier ; c'est le dire incitatif352(*). Ainsi, c'est ce dernier qu'on estime le plus apte et le plus efficace à appréhender le pouvoir économique dans la mesure où, le juge, d'une part, a pour obligation d'appliquer la loi ; d'autre part, il doit rendre un jugement pour répondre à la prétention articulée par les parties. Si la loi est défectueuse, alors le juge a l'obligation de la compléter en créant une règle de droit. Le syllogisme est imparable353(*). Ainsi, pour se refuser à exercer son office, le juge ne peut tirer prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi.

151. Cela dit, le juge, à travers ses prérogatives et ses obligations, doit accompagner les mutations de la collectivité, notamment pour la protection de la partie faible étant le déséquilibre flagrant des rapports de force dans certains rapports contractuels, ainsi, que par l'adaptation de sa fonction aux réalités économiques. Dans le premier cas, en l'absence de texte spécial, le dire juridique recourt à la revivification de certains instruments juridiques classiques (Section I). Dans le deuxième cas, et en présence de la loi sur la concurrence, c'est par la juridictionnalisation des autorités de marché et l'amélioration des techniques jurisprudentielles du juge que le dire juridique essai de s'adapter aux réalités économiques pou lutter contre les abus de puissance économique (Section II).

Section I - La revivification de certains instruments juridiques pour la protection de la partie faible

152. Un dire juridique français pragmatique et audacieux. La revivification des instruments juridiques classiques est l'un des méthodes utilisées par une jurisprudence française, dite pré-consumériste. Cette dernière a éprouvé un grand pragmatisme dans l'application des textes juridiques en vigueur. Ainsi en l'absence de textes spécialisés dans la protection de la partie faible dans la relation contractuelle, elle a puisé dans le droit commun des instruments par lesquels elle a essayé de lutter contre les abus de puissance économique. A cet effet, elle s'est confiée deux missions principales. La première consiste à la préservation du consentement de la partie faible au cours de la formation du contrat ; La deuxième, à la restauration d'un équilibre contractuel rompu par le déséquilibre de force des parties contractantes.

§1 - LA PRESERVATION DU CONSENTEMENT DE LA PARTIE FAIBLE

153. Importance et ambiguïté du consentement355(*). Contracter, ce n'est pas seulement consentir, c'est consentir en pleine connaissance de cause et librement356(*). La protection du consentement à contracter est traditionnellement assurée en droit français comme en droit marocain par le jeu des vices du consentement. En effet, le principe de l'autonomie de la volonté conduit à voir dans le consentement l'élément premier de toute convention - voire à l'identifier à la convention elle-même357(*). Ainsi, pour fonder un contrat valable, le consentement - ici entendu au sens de volonté individuelle - doit non seulement exister, mais encore être libre et éclairé358(*).

154. Les instruments classiques de protection du consentement. Cette double exigence résulte a contrario des dispositions de l'article 39 du D.O.C. - article 1109 du Code civil français - : le consentement n'est pas éclairé s'il a été donné par erreur ou surpris par dol ; il n'est pas libre s'il a été extorqué par violence. Ce texte, cependant, se borne à énumérer les trois vices du consentement que réglementent les articles subséquents et il ne paraît pas possible d'éluder les conditions posées par ceux-ci en s'appuyant sur le seul article 39, en lui-même dépourvu de valeur normative359(*). Il n'en reste pas moins que les trois vices du consentement mentionnés par l'article 39 et réglementés par les articles 40 à 53 définit, en négatif, les qualités que doit présenter un consentement intègre. Par ailleurs, l'article 231 pose un principe, celui de bonne foi. Cette notion transversale gouverne toutes les phases de la relation contractuelle. Pourtant, le juge marocain n'a pas exploité et remanié, à l'instar de son homologue français, ces deux instruments pour la protection du consentement du contractant faible, fondement même de la théorie de l'autonomie de la volonté. Ainsi, à travers la pratique jurisprudentielle française nous allons essayer de voir, dans quelle mesure, cette dernière a pu innover dans l'application des textes de droit commun pour suivre les mutations socioéconomiques qu'ont connues les sociétés modernes et ainsi, contribue à la préservation d'un consentement libre et éclairé.

A - La sanction du vice de violence pour la préservation de la liberté du consentement

155. Présentation du vice de violence. Sous le nom de violence, le D.O.C. retient un vice du consentement qu'il faudrait, en réalité, nommer crainte (Metus)360(*). Cependant, tandis que l'erreur, spontanée ou provoquée, atteignait la volonté dans son aspect intellectuel de compréhension, le consentement n'étant pas donné en pleine connaissance de cause, le vice de violence concerne sa seule liberté. La victime a conscience de céder à la contrainte, de donner un consentement qu'elle ne donnerait pas si elle disposait de son entier libre arbitre, mais elle désire éviter un mal qu'elle considère comme plus considérable que le préjudice, objectif ou subjectif, qui, pour elle, résultera de l'acte. Malgré cette différence essentielle, on retrouve dans le vice de violence des traits fondamentaux appartenant également au dol. Pour être cause de nullité, la violence doit avoir été déterminante du consentement, mais il importe également qu'elle ait été illégitime, illicite. Comme le dol, la violence a un double aspect, à la fois vice du consentement et délit civil. Il ne s'agira ici que de la seule violence, élément de contrainte (vis compulsiva). S'il y avait emploi direct de la force, ainsi, pour diriger la main de celui qui signe (vis absoluta), on devrait dire que le consentement n'est pas vicié, mais totalement absent, inexistant. En effet, contrairement au dol, la violence est une cause de nullité même lorsqu'elle émane d'un tiers, sans que l'on ait à prouver la complicité361(*). On admet, traditionnellement, que la violence doit avoir une origine humaine, la menace d'exercer le mal étant proférée en vue d'obtenir le consentement, de l'extorquer.

156. La crainte peut avoir son fondement dans un mal visant la fortune du contractant. Doctrine et jurisprudence s'accordent à reconnaître que le mot « violence », lorsqu'il désigne un vice du consentement, ne fait que renvoyer au délit civil qui est à son origine et en constitue la cause362(*). Cependant, l'article 1112 du code civil français définit-il l'altération par la crainte inspirée à la victime « d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent »363(*). Cette disposition a été reprise par le D.O.C. Ainsi, à côté du mal visant la personne, le D.O.C. retient celui relatif à la fortune de la victime.

157. Quelques pratiques jurisprudentielles françaises. La jurisprudence française contient maints exemples en la matière. Ainsi, la menace peut être directe, ainsi celles : d'une campagne de presse, nuisible à une société commerciale364(*) ; de la perte d'un marché365(*); de la ruine d'une société commerciale366(*). La menace sera parfois de ne pas exécuter une prestation à laquelle on est tenu, afin d'obtenir un avantage indu. C'est ainsi le cas d'un employeur qui contraint son employé, dans le besoin, à un règlement transactionnel injuste367(*). Ce pourrait être la menace de priver une personne de sa profession, de son logement, de ses ressources368(*). La menace de rupture de relation commerciale entre deux sociétés peut, en revanche, être légitime, notamment s'il s'agit d'obtenir la régularisation de ces relations par contrat369(*). Aujourd'hui, le mal visant la « fortune » de la victime résidera, en réalité, souvent, dans l'utilisation de la « contrainte économique », ce qui pose le problème très général de l'origine de la violence. Le principe pose évidemment la question de la contrainte émanant des événements et notamment, aujourd'hui, de la contrainte économique.

158. La solution de la jurisprudence française. Reprenant une solution traditionnelle du droit maritime, la Cour de cassation française a posé en principe, au XIXe siècle, qu'une convention de sauvetage maritime pouvait être annulée lorsqu'elle avait été conclue dans les dangers du naufrage. Ce principe sera traduit ultérieurement dans les lois adoptées en matière de sauvetage maritime, d'événements de mer370(*). D'une manière générale, ces textes subordonnent la nullité, ou la réduction, au déséquilibre objectif de l'acte : il est nécessaire que l'autre partie ait abusé de la situation de détresse dans laquelle se trouvait la victime.

159. Nécessité d'une contrainte illégitime. Lorsque la question s'est posée, en dehors de ces cas spéciaux, la réponse apportée par la jurisprudence a été identique. La contrainte résultant des événements n'est susceptible d'entraîner la nullité du contrat, ou la réduction, que dans la mesure où cette situation aura été exploitée financièrement par le cocontractant. Le même principe se dégage aujourd'hui de la solution apportée par la Cour de cassation française dans le cas de la contrainte économique exploitée. Cela étant, la Cour française de cassation a récemment précisé que « la contrainte économique se rattachait à la violence et non à la lésion »371(*). La seule contrainte économique est, en elle-même, insuffisante à justifier la nullité, la réduction ou l'allocation de dommages-intérêts. Ainsi, dans les rapports entre un concédant et un concessionnaire, lors du renouvellement d'un contrat à durée déterminée, que ledit concessionnaire prétendait lui avoir été imposé par abus de puissance économique contraignante, un arrêt a été cassé pour n'avoir pas précisé en quoi les agissements du concédant étaient illégitimes372(*). En d'autres termes, la contrainte économique qui résulte, notamment, d'une situation de dépendance, ne peut être assimilée au vice de violence tant que, du moins, on ne peut qualifier cette contrainte d'illégitime. Cette illégitimité résultera, précisément, de l'abus de situation, lequel se traduira par des conditions déséquilibrées, anormalement onéreuses, ou, au contraire, par trop lésionnaires.

160. Nécessité d'une exploitation abusive d'une dépendance économique. Dans une décision récente, la Cour de cassation vient de préciser la position : « ... seule l'exploitation abusive d'une situation de dépendance économique, faite pour tirer profit de la crainte d'un mal menaçant directement les intérêts légitimes de la personne, peut vicier de violence un consentement »373(*). Cette décision confirme ainsi la condition d'exploitation abusive de la situation, précédemment évoquée. Son apport essentiel est de restreindre la possibilité d'invoquer la contrainte économique aux hypothèses où le mal invoqué est susceptible d'atteindre directement le demandeur en nullité374(*). Ce n'était pas le cas en l'espèce puisque la demanderesse, salariée, se plaignait d'avoir été amenée à céder ses droits d'auteur à son employeur (un éditeur), pour un prix exagérément bas, dans la crainte de la mise en oeuvre d'un plan de licenciement - lequel ne la visait pas personnellement. Il y a là une exigence de causalité fondamentale375(*).

161. Ainsi, la question du rapprochement éventuel des notions de vices du consentement, spécifiquement celle de violence, et d'abus de puissance économique suscite de vives interrogations. Il s'agit de déterminer si l'exercice abusif d'un pouvoir économique constitue une atteinte à la liberté contractuelle et plus particulièrement à la liberté du consentement376(*). Certes, comme on l'a présenté, le juge français a pu dans une certaine mesure, remanié la théorie du vice de violence pour appréhender certains abus de puissance économique. Or, la condition de « la contrainte illégitime », inhérente à la théorie du vice de violence, et exigée par les juges du droit, présente un sérieux obstacle à l'efficacité de la violence économique comme instrument de lutte contre les abus de puissance économique. Cela dit, nous entamons l'appréciation du rôle du dire juridique français pour l'éclairement du consentement du contractant économiquement faible.

B - La découverte d'une obligation d'information et l'éclairement du consentement.

162. Généralité. Avec les mutations qu'ont connues les sociétés contemporaines, le risque est grand, pour la partie faible, de donner un consentement qui ne soit pas parfaitement éclairé. Les mirages de la publicité, les facilités du crédit, les boniments des vendeurs poussent à des achats inconsidérés. De plus, certains contrats comportent des clauses nombreuses et complexes, dont le contractant moyen est incapable d'apprécier la portée. En effet, pour le consommateur, ne pas être trompé est une exigence minimale. Elle ne saurait suffire. L'amélioration du consentement suppose aussi que le consommateur soit informé. A l'obligation négative des professionnels de ne pas tromper, s'ajoute une obligation positive d'informer377(*).

163. L'obligation d'information : un impératif moral. Sur le plan théorique, l'obligation d'information trouve son fondement dans les considérations morales qui, depuis toujours et de manière grandissante, imprègnent le droit français des contrats. De l'avis général des auteurs, l'information est due au nom de la justice contractuelle et de la "moralisation du contrat"378(*) ; elle a pour but de remédier à l'inégalité des parties, spécialement dans les relations entre profanes et professionnels et dans les contrats d'adhésion379(*). Surtout, un auteur380(*) a fort bien montré que les exigences morales ont en ce domaine évolué dans le sens d'un renforcement des devoirs contractuels et spécialement du devoir d'information : à l'obligation négative de ne pas tromper autrui s'ajoute aujourd'hui une obligation positive d'aider autrui ; aux exigences traditionnelles de loyauté, d'honnêteté et de bonne foi (auxquelles se réfèrent la plupart des auteurs s'ajoutent les devoirs de collaboration381(*), de coopération382(*), voire d'entraide et d'assistance entre contractants383(*). L'ensemble de l'évolution s'inscrit dans une tendance plus générale à la recherche - peut être quelque peu utopique - d'un équilibre contractuel nouveau empreint d'une solidarité inconnue des solutions classiques384(*).

164. L'obligation d'information : impératif économique. Ces impératifs moraux trouvent cependant leurs limites dans des considérations d'ordre économique. L'analyse économique impose en effet de rémunérer le coût de l'information385(*), ce qui implique que celui qui a dépensé de l'argent et des efforts pour obtenir une information, ne soit pas obligé de la communiquer gratuitement386(*). Par ailleurs, la transparence est aujourd'hui devenue l'un des maîtres mots de la vie politique, sociale et juridique. Mot quasi-magique et un peu flou, sous la bannière duquel on range, de manière plus ou moins convaincante, des règles diverses relevant de domaines variés : transparence de la vie publique, transparence des marchés financiers, transparence tarifaire, etc.387(*).

165. Obligation traduit en droit positif français. Appliqué au droit des contrats, ce souci général de transparence se traduit par des exigences également diverses388(*), au premier rang desquelles figurent la reconnaissance et la mise en oeuvre d'une obligation d'information qui fait aujourd'hui partie des données du droit positif français. En vertu de cette obligation, chacune des parties est, sous certaines conditions, tenue de porter à la connaissance de son partenaire les éléments nécessaires à la saine conclusion et à la correcte exécution de la convention. Discrètement impliqué par certains mécanismes classiques tels que la garantie des vices cachés ou la sanction de la réticence dolosive, le devoir d'information n'est apparu en tant que tel que de manière progressive et récente : dans des textes spéciaux d'abord, dans les solutions jurisprudentielles ensuite, dans les travaux de la doctrine enfin.389(*).

166. Le rôle de l'obligation d'information. L'obligation d'information joue un triple rôle. Le premier est pratique. L'obligation d'information apparaît comme un procédé permettant de rétablir entre les parties une égalité de fait trop souvent rompue par la supériorité technique ou économique de l'une des parties. En obligeant celui qui sait à informer celui qui ignore, les juges français ont tenté de reconstituer l'équilibre que postulait (inexactement) le principe de l'autonomie de la volonté390(*). Le deuxième est théorique. l'idée d'obligation d'information fournit le fil conducteur expliquant d'une manière cohérente divers mécanismes du droit des contrats : la théorie des vices du consentement, la garantie des vices cachés, certains aspects de la responsabilité civile contractuelle ou précontractuelle391(*). Le troisième est technique. En tant que mécanisme autonome, l'obligation d'information occupe une place qui lui est propre, au sein ou en marge des mécanismes existants. C'est ainsi en particulier que l'obligation d'information permet de compléter et de préciser la théorie des vices du consentement392(*). Elle la complète, par exemple, en fournissant une assise juridique à une simple condamnation à dommages-intérêts ; elle la précise, notamment, en contribuant à la définition du bon dol ou de la réticence dolosive393(*).

167. Le domaine de l'obligation jurisprudentielle d'information. Le domaine de l'obligation d'information découverte par le juge français est extrêmement vaste. Bien qu'aucun arrêt n'en ait jamais posé le principe en termes généraux394(*), les tribunaux français tendent en effet à affirmer l'existence d'une telle obligation dans la plupart des contrats, et en tout cas dans tous les contrats les plus courants. Sans prétendre ici non plus être complet, on peut énumérer, parmi les principaux débiteurs de cette obligation : le vendeur d'immeuble395(*) ou de meuble396(*) mais aussi, dans certaines circonstances, l'acheteur397(*) ; les "locateurs d'ouvrage"398(*) et entrepreneurs de construction399(*) ; les professionnels de la santé : médecins400(*), spécialement en matière de chirurgie esthétique401(*) dont l'obligation est aujourd'hui consacrée par la loi ; le banquier, notamment en tant que gestionnaire de portefeuille402(*) ou en tant qu'intermédiaire intervenant sur le marché à terme403(*), mais aussi en tant que prêteur404(*) ; divers intermédiaires : mandataire405(*), agent immobilier406(*), agence de voyages407(*), agence de recouvrement de créances408(*) ; divers entrepreneurs spécialisés : réparateur409(*), teinturier410(*), chauffagiste411(*), installateur de système d'alarme412(*), entrepreneur de jardins413(*), charpentier couvreur414(*) etc. ; les professionnels du droit : avoués415(*), avocats416(*), notaires417(*) ou huissiers418(*) ; les professionnels de l'assurance : assureur419(*), courtier420(*), agent général421(*). La liste, très longue et forte disparate, n'est au surplus nullement limitative422(*). La simple exigence d'un objet déterminé suffit en effet, dans tout contrat, à imposer à chacune des parties de s'expliquer clairement sur le contenu de sa prestation423(*).

168. Le fondement des obligations d'information. Le fondement de l'obligation d'information est difficile à définir, d'autant plus que les juges français ne précisent pas toujours explicitement quels sont les mécanismes ou les principes sur lesquels s'appuient leurs décisions424(*). Il semble cependant possible de déceler à cet égard une triple évolution. La première, souvent constatée en doctrine425(*), va dans le sens de l'autonomie de l'obligation. Le premier réflexe, en jurisprudence comme en doctrine, a en effet été de rattacher la dette d'information à une obligation préexistante, elle-même principale ou accessoire. Spécialement, dans la vente, l'obligation d'information était présentée comme l'un des aspects soit de l'obligation de garantie des vices cachés, soit de l'obligation de délivrance426(*), soit encore de l'obligation de sécurité. Aujourd'hui, en revanche, l'obligation d'information affirme son indépendance sur deux points. D'une part, elle obéit à un régime particulier, distinct notamment de celui de la garantie des vices cachés427(*). D'autre part, la Cour de cassation estime qu'elle suffit à fournir un fondement juridique à une demande en justice, indépendamment de toute action en nullité ou en garantie428(*).

169. La seconde évolution, liée à la précédente, va dans le sens d'une généralisation du fondement retenu : de plus en plus, les tribunaux français acceptent aujourd'hui de s'appuyer, non sur des dispositions législatives ou réglementaires spéciales, mais sur les textes et principes les plus généraux du droit des contrats429(*), notamment le principe de la bonne foi430(*). Pour généraux qu'ils soient, ces textes et principes sont cependant variables : le fondement de l'obligation d'information diffère selon l'objet de la demande et par voie de conséquence, selon la fonction de l'information dont il s'agit431(*). Si l'information a une incidence sur le consentement, les juges se fondent le plus souvent soit sur les principes relatifs au dol et sur l'article 1116 du Code civil432(*), soit sur les règles applicables à la responsabilité précontractuelle, c'est-à-dire, en principe, sur l'article 1382 du Code civil433(*). Si, en revanche, l'obligation d'information a une incidence sur l'exécution, alors les magistrats s'appuient soit sur les principes de la responsabilité contractuelle et sur l'article 1147 du Code civil434(*), soit sur la bonne foi qu'impose l'article 1134, alinéa 3, du Code civil435(*), soit encore sur les conséquences attachées à l'équité et aux usages par l'article 1135 du même code436(*). Remarquons que le choix de ces deux derniers textes paraît traduire la volonté des juges de puiser directement dans les exigences de la bonne foi et de l'équité ou des usages, sans passer par le relais traditionnel mais critiquable d'une prétendue interprétation de la volonté des parties437(*).

170. Quant à la troisième évolution, elle va, en contradiction avec le schéma précédent, dans le sens d'une uniformisation du fondement de l'obligation. Certains arrêts tendent en effet à voir dans les articles 1134 et 1135 du Code civil, textes relatifs à la seule exécution du contrat, la source générale de toute obligation d'information, à quelque moment, qu'elle se situe et quelle que soit sa fonction. C'est ainsi en particulier que la Cour française de cassation vise parfois l'article 1135 pour justifier l'existence d'une obligation pourtant précontractuelle de renseignement438(*). De même et surtout, dans un arrêt remarqué, la première chambre civile a éprouvé le besoin, pour légitimer l'obligation précontractuelle due par un banquier, de viser non seulement l'article 1116 du Code civil mais aussi l'article 1134, alinéa 3, du même code439(*), alors que cette disposition ne traite, expressément en tout cas, que des obligations qui naissent du contrat et non de celles qui doivent présider à sa formation.

171. Ainsi présentée, l'obligation d'information découverte par la jurisprudence française a pu contribuer au redressement à l'inégalité, aujourd'hui caractéristique des rapports contractuels. En effet, il semble donc bien que, dans l'esprit des magistrats français, toute obligation d'information trouve son origine dans les exigences morales de bonne foi et d'équité donc, sur le plan technique, dans les textes qui consacrent ces notions en matière contractuelle, peu important que ces textes ne répondent pas exactement au problème posé440(*). Toutefois, le rôle du juge français ne s'est pas limité à la seule protection du consentement de la partie faible. Ainsi, comme on va le déduire, ce dernier a pu exploiter d'autres mécanismes traditionnels du droit commun pour lutter contre les déséquilibres manifestes des obligations des parties au contrat.

§2 - LA RESTAURATION DE L'EQUILIBRE CONTRACTUEL

172. Les instruments du droit commun opérants pour la lutte contre le déséquilibre contractuel. Fondé sur le postulat de la liberté contractuelle441(*), le droit commun offre peu de moyens adaptés pour lutter contre un déséquilibre contractuel. Ainsi, la lésion n'est-elle admise que dans certains cas particuliers tenant au type de contrat ou à la qualité du contractant442(*). A cet effet, cette théorie ne peut pas servir d'instrument pour la lutte contre les abus de puissance économique et ainsi, la victime de l'abus ne peut bénéficier des dispositions du droit commun sur ce point. Toutefois, un certain nombre de remèdes peuvent être utilisés pour sanctionner un déséquilibre dans le contrat443(*), notamment la théorie de la cause et la sanction de la clause pénale. Ces deux instruments ont connus un grand succès dans la jurisprudence française de sorte que, même l'existence de règles particulières aux contrats de consommation ne les évince pas totalement444(*). Les fondements sont assez disparates et les sanctions diverses, allant de l'anéantissement total du contrat, à une application limitée de la clause litigieuse. A cet effet, il importe d'examiner successivement, le possible recours à la théorie de la cause pour lutter contre les déséquilibres contractuels manifestes, notamment à travers la présentation de la jurisprudence française en la matière, avant de se pencher sur le rôle que puisse avoir le juge dans la lutte contre les clauses pénale, à travers l'application de l'article 264 du Dahir des obligation et des contrats.

A - La théorie de la cause pour l'élimination des clauses abusives

173. Fonction de la théorie de la cause. - La théorie de la cause peut fonder une remise en cause du contrat ou de certaines de ses clauses.

174. La nullité du contrat dont l'économie général est atteinte. Comme en témoigne, en France, le fameux arrêt "Chronopost"445(*), la place nouvelle accordée à cet élément en droit commun français, notamment pour sanctionner les "clauses abusives" entre professionnels en est l'indice446(*). En l'espèce la clause limitative de responsabilité a été considérée comme nulle du fait qu'elle atteignait qu'elle touchait l'essence même du contrat, permettant au cocontractant fautif de limiter sa responsabilité en cas de contravention à l'un de ses engagements essentiels. Le déséquilibre dans la valeur des prestations peut aussi être sanctionné sur le terrain de la vileté du prix. Les fondements de l'action en annulation de ce point de vue sont incertains. La Cour de cassation française avait paru rattacher cette question à la théorie de la cause447(*). Plus récemment, elle s'est fondée sur l'article 1591448(*) du Code civil449(*) Dans ce cas, l'économie même du contrat étant atteinte, c'est la nullité de ce dernier dans son ensemble qui sera prononcée.

175. La nullité de certaines clauses abusives entre professionnels. Pendant la majeure partie du XXe siècle, la jurisprudence française refuse d'admettre que la fonction de la restauration de l'équilibre contractuel incombait au droit des obligations450(*). Il suffit, à cet effet, de rappeler comment la Cour de cassation s'était estimée impuissante face aux clauses pénales stipulées dans les contrats de crédit-bail qu'elle considérait comme intangibles, en vertu de l'article 1134, alinéa 1er451(*), du code civil en dépit de disproportions et d'abus manifestes, alors que la théorie de la cause était suggérée452(*) et parfois utilisée par les juges du fond comme moyen de lutter contre ce type de clause453(*). Un autre exemple remarquable est celui de la jurisprudence relative à la restitution des cuves en nature par les pompistes de marque. Le coût des travaux étant largement supérieur à la valeur de la cuve enfouie dans le sol, les pompistes ont soutenu que cette clause qui leur interdisait une restitution en valeur était nulle. Sur le fondement du droit des contrats, la Cour de cassation l'a déclaré valable pour ensuite la considérer comme nulle au regard du droit de la concurrence454(*).

176. Mais, au cours de la dernière décennie du XXe siècle, la jurisprudence de la Cour de cassation française a connu une évolution déterminante en acceptant d'utiliser la théorie de la cause dans le but d'éliminer des clauses entraînant un déséquilibre manifestement disproportionné entre les droits et obligations des parties contractantes455(*). Dans cette perspective, la théorie de la cause, revisitée à l'aune de la justice contractuelle456(*), joue un rôle essentiel de correcteur des déséquilibres injustes. Il n'est pas excessif de dire qu'elle forme aujourd'hui le socle juridique sur lequel s'est édifiée la construction prétorienne d'élimination des clauses abusives en dehors du droit de la consommation et de toute loi spéciale. Alors qu'il a fallu attendre la loi du 9 juillet 1975 pour que les clauses pénales excessives puissent être judiciairement révisées, la jurisprudence n'est plus aujourd'hui réticente à utiliser le vieil article 1131 du code civil pour le mettre au service de la lutte contre les clauses abusives dans les relations entre professionnels.

177. Quelques applications de la théorie de la cause dans la jurisprudence française. La théorie de la cause connaît désormais, en France, de nombreuses applications jurisprudentielles dans le domaine de la lutte contre les clauses abusives. Toutefois, les critères mis en oeuvre pour apprécier le déséquilibre ou la disproportion sont divers et fluctuants.

178. En matière des clauses de contrats d'assurance. Après avoir pendant longtemps, admis, en matière d'assurance, la validité des clauses dites « de réclamation de la victime » et « de survenance du dommage » 457(*), la Cour de cassation, par une utilisation audacieuse de la théorie de la cause, les a réputées non écrites. Ainsi, par sept arrêts rendus le 19 décembre 1990, la première chambre civile de la Cour de cassation, sous le visa de l'article 1131 du code civil458(*), a considéré que le versement des primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat d'assurance et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période459(*). C'est ce défaut de contrepartie qui justifie l'utilisation de la théorie de la cause afin de réputer non écrite la clause litigieuse460(*). Par la suite, la jurisprudence a généralisé cette solution à toutes les clauses du contrat d'assurance qui ont pour effet de réduire la durée de garantie d'assurance par rapport à la durée de la responsabilité.461(*). L'idée générale sous-jacente dans cette jurisprudence est que le versement des primes par l'assuré doit avoir pour contrepartie la garantie d'assurance couvrant la responsabilité civile de ce dernier.

179. Dans le domaine bancaire. Il était d'usage, dans le domaine bancaire, que les écritures de débit et de crédit des comptes ne soient pas passées à la date réelle à laquelle elles ont été effectuées, mais à une date dite « de valeur ». Cette date de valeur est postérieure de quelques jours à la date réelle pour les opérations de crédit et antérieure de quelques jours à celle-ci pour les opérations de débit. Lorsque le compte fonctionne à découvert, le mécanisme de la date de valeur permet au banquier d'accroître les intérêts calculés le crédit ainsi consenti462(*). Les clauses contractuelles qui fondaient juridiquement entre les parties la légitimité de ce mécanisme n'étaient guère contestables à une époque où les délais techniques de recouvrement étaient importants. Mais, avec les progrès de la télématique et de l'informatique, les clauses dites « de date de valeur » ont rapidement constitué, dans certains cas, une source détournée de profit pour les banques. La chambre commerciale de la Cour de cassation n'est pas venue donner un coup d'arrêt total à cette pratique, mais a contribué à la moraliser par un arrêt du 6 avril 1993463(*). Sur le fondement de l'article 1131 du code civil, a été considérée sans cause la perception d'intérêts par le jeu des dates de valeur à l'occasion des virements ou de la remise et des retraits d'espèces sur un compte bancaire, ces opérations n'impliquant pas que, même pour le calcul des intérêts, les dates de crédit ou de débit soient différées ou avancées. Par conséquent, la clause autorisant le calcul des intérêts en fonction, non pas de la date réelle des opérations, mais des dates de valeur, est réputée non écrite car elle contribue à enrichir l'établissement bancaire sans contrepartie pour son client.

180. Les clauses allégeant ou supprimant la responsabilité. De longue date a été admise la validité des clauses allégeant ou supprimant la responsabilité contractuelle, sous réserve des dispositions légales contraires et des dommages causés aux personnes pour lesquels la question est discutée. Toutefois, ce genre de clause ne devant pas permettre au débiteur de l'obligation de se soustraire impunément à son engagement, la jurisprudence s'est attachée à restreindre ses effets. Si elle n'y voit plus aujourd'hui un simple renversement de la charge de la preuve de la faute, elle en écarte l'application dans les cas où l'inexécution provient d'un dol ou d'une faute lourde464(*). Au cours du XXe siècle, la Cour de cassation française a même considéré que les clauses limitatives de responsabilité étaient sans application lorsque l'inexécution des obligations du débiteur est totale465(*) ou lorsque l'obligation inexécutée présente un caractère essentiel466(*), fondamental467(*) ou a été érigée en condition substantielle par une clause expresse468(*). Le célèbre arrêt Chronopost a modifié le fondement de cette solution en utilisant la théorie de la cause469(*).

181. Les clauses restringentes la concurrence. La validité des clauses de non-concurrence a toujours été admise, non sans restriction ni limite. En droit commercial, l'engagement de non-concurrence doit être limité ou bien dans le temps ou bien dans l'espace470(*) et, ce, afin de ne pas porter une atteinte irrémédiable à la liberté du commerce et de l'industrie. En outre, l'interdiction de concurrencer une entreprise doit être circonscrite à l'exercice de certaines activités commerciales. En droit du travail, la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation a eu tendance à durcir les conditions de validité de la clause de non-concurrence en exigeant qu'elle soit indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise. Mais le droit commercial et, plus largement, le droit commun des contrats ne sont pas restés indifférents à cette tendance consistant à compléter, ou même à remplacer, les critères formels et objectifs de validité - limitation dans le temps, dans l'espace et en terme d'activités - par des critères plus pragmatiques. Ainsi, certainement influencée par le droit de la concurrence, la jurisprudence française a contrôlé la légitimité des clauses de non-concurrence à l'aune du critère de proportionnalité471(*). Le premier arrêt de la Cour de cassation à avoir utilisé le critère de proportionnalité pour contrôler la validité d'une clause de non-concurrence est, sauf erreur, celui du 4 janvier 1994, qui reproche aux juges du fond de ne pas avoir recherché si, même limitée dans le temps et l'espace, la clause litigieuse « n'était pas disproportionnée au regard de l'objet du contrat »472(*). C'est un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 11 mai 1999473(*), qui établit un lien entre le critère de proportionnalité et la théorie de la cause474(*). La théorie de la cause est donc enrichie par l'incorporation dans son mécanisme d'application du critère de proportionnalité qui vient, à n'en pas douter, du droit de la concurrence475(*).

182. Clause de divisibilité des conventions. Une opération économique complexe peut, selon la volonté des parties, être divisée en plusieurs conventions, chacune ayant vocation à régir un aspect particulier qu'il est souhaitable d'individualiser du point de vue juridique. Toutefois, cette division purement juridique d'une opération économiquement homogène peut dissimuler une tentative de porter atteinte aux intérêts de l'un des contractants. Cette question a été tranchée par les juges français476(*). Mais que se passe-t-il si les conventions qui divisent une seule et même opération économique contiennent chacune une clause aux termes de laquelle les parties conviennent de conférer une totale indépendance aux deux conventions, de sorte que le sort de l'une n'aura aucune influence sur celui de l'autre ? Quid de la validité d'une telle clause de divisibilité ? Ici, deux conceptions s'opposent : l'indivisibilité subjective, c'est-à-dire celle voulue par les parties, et l'indivisibilité objective, c'est-à-dire celle inhérente à l'unité de l'opération477(*).

183. Position de la jurisprudence française. La jurisprudence semble pencher en faveur de la thèse de l'indivisibilité objective, même s'il n'est pas question d'anéantir le rôle de la volonté des parties. Ainsi, un pharmacien s'était engagé envers une société de publicité à diffuser dans son officine des publicités vidéographiques sur un matériel fourni par celle-ci et financé par crédit-bail, les deux contrats ayant une durée identique. Ne percevant plus les redevances publicitaires, le pharmacien cessa de payer les loyers au crédit-bailleur. Sur assignation de celui-ci, le pharmacien sollicita et obtint de la cour d'appel la résiliation du contrat de crédit-bail. Le pourvoi en cassation formé par le crédit-bailleur invoquait le bénéfice d'une clause en vertu de laquelle le pharmacien avait expressément accepté d'assumer le risque de la défaillance du prestataire de services et de payer les loyers, même au cas où le contrat d'exploitation conclu avec la société de publicité serait résilié. Or, toujours selon le pourvoi, en refusant de faire application de cette clause claire et précise, la cour d'appel aurait violé l'article 1134 du code civil et le principe de l'autonomie de la volonté. Le pourvoi est rejeté : « Dès lors que le texte de la clause invoquée était en contradiction avec l'économie générale du contrat, la cour d'appel [...] a légalement justifié sa décision »478(*). Eu égard à l'existence de deux conventions distinctes, mais indivisibles, c'est plus de l'économie générale de l'opération globale ou du groupe de contrats qu'il s'agit. Mais peu importe en réalité, car la Cour de cassation a considéré que « la seule cause du contrat de crédit-bail était constituée par le contrat de prestation d'images, ce dont il - l'arrêt d'appel - déduit que les deux contrats étaient interdépendants et, par suite, que l'exploitation devenant impossible du fait de la défaillance de la société de publicité, la résiliation du contrat de crédit-bail devait être prononcée ». La théorie de la cause permet donc de fusionner les deux contrats ou, plus exactement, d'atteindre la finalité du negocium au-delà des deux instruments artificiellement créés.

184. Fondement de la sanction. Ainsi, la clause de divisibilité est abusive lorsqu'elle a pour finalité ou pour effet de briser, au préjudice de la partie la plus faible, l'unité économique ou technique de l'opération envisagée, laquelle trouve une traduction juridique dans la notion de cause. Ici le déséquilibre de puissance apparaît clairement à l'examen de la situation du pharmacien qui, si la clause était valable, aurait dû payer des loyers sans contrepartie. On comprend que la clause de divisibilité n'avait d'autre fin que de protéger la partie économiquement puissante, le crédit-bailleur, en rendant sa créance indépendante de l'utilité du matériel loué. Ce qui serait admissible pour un prêteur de deniers479(*) ne peut l'être pour un crédit-bailleur ; le contrat de crédit-bail étant complexe et empruntant au bail l'obligation de faire jouir paisiblement le preneur, obligation qualifiée d'essentielle par la jurisprudence récente480(*). Or, à partir du moment où le crédit-bailleur connaît la destination du matériel et que celui-ci ne peut être utilisé par le preneur à un autre usage, il ne peut méconnaître l'économie générale de l'opération. Le pouvoir de la volonté des contractants n'est pas anéanti, mais il ne saurait valablement contredire l'économie générale du contrat, pris non comme instrumentum mais comme negocium, et créer un déséquilibre significatif au préjudice de l'une des parties.

185. Résumé des critères utilisés par le juge français. L'analyse des applications de la théorie de la cause dans le but de réputer non écrites les clauses abusives révèle au moins trois modèles distincts malgré leur imbrication. Selon un premier modèle, le déséquilibre économique est intrinsèque à la clause abusive : l'un des contractants obtient un avantage par le seul jeu de cette clause, l'équilibre général du contrat n'étant pas lui-même complètement bouleversé - par exemple, la clause limitant la durée de garantie dans les contrats d'assurance, clause relative aux dates de valeur pour certaines opérations -. Dans un deuxième modèle, la clause abusive engendre un déséquilibre économique affectant le contrat dans son ensemble. C'est le cas de la clause exonératoire de responsabilité qui aboutit, en fait, à décharger à peu de frais le débiteur de ses obligations. Certes, en théorie, ses obligations juridiques perdurent, mais du point de vue économique, en raison de l'inexécution et de l'absence de réparation, le patrimoine du créancier s'appauvrit en raison des préjudices découlant de l'inexécution sans compensation par l'attribution de dommages et intérêts. Le raisonnement est similaire pour la clause de divisibilité, laquelle a pour objet de maintenir les effets d'une convention, même lorsque le sort réservé à la convention qui lui est économiquement connexe (nullité, résolution, etc.) la prive de toute utilité. Pour ce qui est de la clause de non-concurrence, elle relève d'un troisième modèle qui conduit à contrôler la proportionnalité entre l'atteinte à la liberté du travail et l'intérêt de l'entreprise. Ici, la clause abusive n'entraîne aucun bouleversement de l'économie du contrat de travail qui, par définition, est rompu lorsqu'elle est exécutée. Le déséquilibre n'est donc pas de nature pécuniaire, mais porte sur la conciliation d'intérêts subjectifs en conflit. Toutefois, en exigeant une contrepartie financière à l'engagement de non-concurrence, la chambre sociale utilise le premier modèle.

186. En jurisprudence, française, la théorie de la cause est aujourd'hui devenue le fondement privilégié de la lutte contre les clauses abusives lorsqu'aucune disposition légale ne les traite spécialement481(*). À cet égard, la cause, véritable instrument de justice commutative, est plus explicite et précise en ce qu'elle permet de pointer la spécificité de l'abus en ce domaine : le déséquilibre injuste. Cependant, la vivacité de la jurisprudence française ne s'est pas arrêtée à la théorie de la cause. En effet, nous allons essayer d'apprécier les possibilités présentées pour la lutte contre les abus de puissance économique, par un autre instrument du droit commun, à savoir la sanction de la clause pénale.

B- La révision de la clause pénale pour la réparation équitable du dommage contractuel

187. Généralités. Les clauses pénales sont les clauses par lesquelles les contractants évaluent forfaitairement et par avance les dommages-intérêts dus par le débiteur en cas d'inexécution totale, partielle ou tardive du contrat482(*). Elles ont pour principale fonction de faire - en principe - échec au pouvoir d'appréciation des dommages-intérêts normalement réservé au juge : elles cherchent à prévenir les difficultés de l'évaluation judiciaire des dommages-intérêts en fixant par avance un forfait de réparation. Dans ces conditions, l'institution tend à empiéter sur la fonction juridictionnelle de l'État483(*). Les clauses pénales peuvent également constituer, lorsqu'elles sont fixées à un chiffre élevé, supérieur au montant du dommage prévisible, un moyen de pression sur le débiteur ainsi incité à exécuter. Le forfait peut aussi s'avérer inférieur au préjudice causé par l'inexécution du contrat et la clause joue alors comme une exonération partielle de responsabilité484(*).

188. La validité de principe des clauses pénales. Dans les actes à titre onéreux, aussi bien dans les contrats entre professionnels que dans les contrats entre professionnels et consommateurs ou encore dans les contrats entre simples particuliers, dans les contrats internes ou dans les contrats internationaux, les clauses pénales jouissent d'une validité de principe conformément à l'article 264 du dahir des obligations et des contrats485(*). La liberté contractuelle justifie la solution. Elles figurent parmi les clauses les plus usuelles des contrats et elles sont particulièrement fréquentes dans les contrats d'entreprise, notamment pour le cas de retard dans l'achèvement des travaux dans les conventions passées entre les directeurs de théâtre et les artistes dans l'hypothèse où ces derniers n'honoreraient pas leurs engagements, enfin, et plus généralement dans les contrats de prêt, de louage de meubles et de crédit-bail.

189. Limites au principe de validité des clauses pénales. Forts de leur puissance économique, certains contractants ne vont pas hésiter à stipuler une clause pénale élevée en cas de manquement de la part de l'autre partie, ou une indemnité dérisoire lorsque l'inexécution est de leur fait. Le législateur français a donc modifié l'article 1152 du Code civil qui prévoit désormais la révision judiciaire des clauses pénales lorsqu'elles sont "manifestement excessives ou dérisoires". Ce choix a été suivi par le législateur marocain en 1995486(*). Ainsi, les clauses pénales ne sont plus aujourd'hui des conventions comme les autres. Elles n'ont plus la même force obligatoire puisque le juge, s'il apparaît que la clause est manifestement excessive ou dérisoire, peut être appelé à remodeler l'accord initial des parties et ce, conformément à l'alinéa 3 du même article.

190. L'audace de la jurisprudence marocaine dans la sanction des clauses pénales excessives ou dérisoires. Contrairement aux autres instruments du droit commun qui ne sont pas revisités par le juge marocain, ce dernier a cependant, eu l'audace d'innover dans la lutte contre les abus manifestes de puissances économique, notamment par la révision de la clause pénale dans deux occasions. Ainsi, dans la première occasion, cinq ans avant l'adoption de la réforme de l'article 264 du Dahir des obligations et des contrats, la Cour Suprême a approuvé une décision par laquelle les juges de fond ont remodelé une clause pénale abusive, en l'absence même du texte légal spécial en la matière, notamment l'article précité. Cette décision a été fondée sur la théorie de la cause, malgré l'utilisation, par la Cour, de l'expression « enrichissement sans cause ». Quinze ans plus tard, et dans le cadre de l'application de l'article 264, alinéa 3, déjà en vigueur, la Cour Suprême a approuvé une autre décision d'une Cour d'appel, par laquelle, elle a procédé d'office à la modération d'une clause pénale, sans la demande de la défenderesse487(*). Cette décision a été basée sur une interprétation extensive de l'alinéa 3 de l'article 264 précité qui dispose que : « Le tribunal peut réduire le montant des dommages-intérêts convenu s'il est excessif ou augmenter sa valeur s'il est minoré comme il peut réduire le montant des dommages-intérêts convenu, compte tenu du profit que le créancier en aurait retiré du fait de l'exécution partielle de l'obligation ». la question n'était pas posée pour le juge français étant la rédaction du deuxième alinéa de l'article 1152 du code civil français aux termes duquel : « Néanmoins, le juge peut même d'office modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite ». De la rédaction des deux textes on peut aisément relever la différence. Le texte français donne au juge expressément la possibilité de réviser d'office une clause pénale abusive ou excessive, alors que le texte marocain est plus vague dans la mesure où il utilise l'expression suivante : « le tribunal peut réduire... ». C'est une question très importante car le débiteur de la clause peut ne pas l'invoquer par ignorance de ses droits.

191. Ainsi, le juge marocain a éprouvé une certaine tendance pré-consumériste à l'égard des clauses pénales. Or, comme on l'a déjà vu, ce dernier n'a pas essayé d'innover dans l'interprétation et l'application des autres textes généraux du droit commun à l'instar de son homologue français. Néanmoins, il est clair que les causes de cette passivité regrettable sont dues d'une part au manque de réalisme et d'audace dans la lutte contre les abus de puissance économique manifestement présents dans les sociétés contemporaines ; et d'autre part à la faiblesse du rôle de la défense et de la doctrine qui n'ont pas pu embarrasser les juges par leurs dires juridiques qui, bien que non décisoire, peut contribuer à éclairer ces derniers ou du moins, à les pousser à rendre compte des observations éventuelles sur leurs interprétations et applications de la loi. Par ailleurs, la fonction judiciaire n'a pas pu résister au réalisme économique dans la protection du marché. En effet, parce que le raisonnement glisse d`un terrain juridique à un terrain économique, les magistrats se sont trouvés face à des phénomènes économiques qu'ils doivent appréhender sur la base des textes légaux. Ainsi, ils ont essayé de développer leurs techniques d'interprétation et d'application de la loi pour s'adapter à la fonction de la protection du marché contre les abus de puissance économique.

Section II - L'adaptation de la fonction judiciaire pour la protection du marché

192. Exigence des compétences en droit et en économie. La protection juridique du marché exige la prise en charge des phénomènes économiques caractérisés par la célérité et la technicité. Cela exige des compétences avouées en économie et en droit, c'est-à-dire que le juge et le régulateur doivent être des juristes économistes. Toutefois, juriste économiste ou économiste juriste, suppose la formation solide du juge en économie et la formation solide de l'économiste en droit. Or, lorsque le monde du droit rencontre le monde de l'économie, il s'agit d'une incompréhension mutuelle totale. Mais les deux mondes doivent communiquer, ils doivent se comprendre et les deux organes, le juge et le régulateur doivent aussi se communiquer et se comprendre afin de pouvoir lutter efficacement contre les abus de puissance économique nuisibles au bon fonctionnement concurrentiel488(*).

193. Nécessité de deux organes : juge et autorité de marché. Traditionnellement, la mission d'application du droit relève de la compétence des juridictions. Ces institutions sont chargées de dire le droit et de trancher les litiges. Malheureusement, elles ne bénéficient plus de l'adhésion inconditionnelle des opérateurs économiques en raison de l'extrême technicité des problèmes économiques posés489(*), qui exigent souvent des décisions d'ordre général, différentes par nature des décisions rendues par les tribunaux490(*). Cette situation légitime le rôle des autorités modernes de la concurrence. Pour ces arguments, le nouveau droit de la concurrence juxtapose des organes judiciaires et extrajudiciaires. Ainsi, l'action publique du régulateur se voit confiée un pouvoir quasi-juridictionnel, sources de critiques pour des uns et d'encouragements pour des autres. Dans cette situation, l'action du régulateur comme nouvelle manière de concevoir l'action publique et les relations entre personnes publiques et privées est facilement justifiées par la contrainte d'instaurer et de maintenir les grands équilibres du marché qui ne peuvent par leur seule force les créer ou les maintenir. Cette finalité exige une célérité, une spécialisation et un grand professionnalisme juridique, économique et technique. Ces exigences manquent au juge dans l'état actuel. Néanmoins, ce dernier, sur d'autres cieux, essaie activement à côté du régulateur de contribuer à la lutte contre les abus de puissance économique nuisibles au bon fonctionnement de la concurrence. Mais, pour que cette lutte soit efficace, les deux organes doivent coopérer. Ainsi, on assiste à un renforcement du pouvoir judiciaire du juge et du régulateur (I) qui pour avoir plus d'efficacité aura besoin de concours mutuel entre les deux (II).

§1 - LE RENFORCEMENT DU POUVOIR JUDICIAIRE

194. Rénovation du rôle classique du juge et reconnaissance du pouvoir juridictionnel au régulateur. De prime abord, la fonction du juge et du régulateur dans la lutte contre les abus de puissance économique, au regard de leurs sphères classiques de compétence, nous amène logiquement à arborer la question de leurs fonctions naturelles. Ce sont des fonctions qui demeurent dans le pouvoir naturel dont dispose chacun de ces intervenants. Fonction judiciaire pour le juge et fonction de réglementation et du contrôle pour le régulateur491(*). En effet, le régulateur ne se voit jamais par exemple accorder le droit de condamner à la réparation du dommage subi par les acteurs du marché. Le juge aussi ne doit jamais se prononcer d'une manière générale et impersonnelle. Ce qui implique que le régulateur n'est point un juge et que le juge ne saurait être un régulateur. Néanmoins, beaucoup d'impératifs ont instigué les deux structures à entamer un travail d'adaptation aux réalités économiques et techniques. Ainsi, des tendances actuelles laissent avancer que les organes chargés de l'application du droit de la concurrence, et ainsi, la lutte contre les abus de puissance économique, doivent correspondre à des instances judiciaires et des institutions administratives, sans perdre de vue l'intérêt de conserver une place relative aux opérateurs492(*). En effet, le juge a conservé son rôle naturel dans l'application du droit de la concurrence, incarné par son pouvoir judiciaire. Par la suite, et afin de pouvoir lutter efficacement contre les abus de puissance économique portant on constate qu'il a entrepris une sorte de rénovation dans les techniques d'interprétation et d'analyse des dispositions du droit de la concurrence (B). De même, et pour les mêmes raisons, de sont côté, le régulateur, se voit confié un pouvoir quasi-juridictionnel, dépassant son pouvoir de réglementation et de contrôle (A).

A- La reconnaissance de la fonction juridictionnelle aux autorités du marché

195. De la réglementation à la régulation. De prime abord, il faut signaler que bien avant la création des autorités indépendantes du marché et la publication de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence, une certaine protection contre les abus de puissance économique était assurée par l'administration classique, notamment par l'action sur les prix et la qualité des produits493(*). La nouvelle législation sur la liberté des prix et de la concurrence ne bouleverse point cet édifice. Elle se limite à le corriger et à le réorienter conformément aux principes de la libéralisation de l'économie et d'adaptation des procédés de régulation494(*). Toutefois, la loi innove de manière saisissante par la création d'un Conseil de la concurrence dont la composition, les attributions et le fonctionnement tiennent compte de la participation des agents économiques du secteur privé de la confirmation de l'emprise administrative et malgré tout du respect de principes plutôt traditionnels aux procédures juridictionnelles495(*).

196. La nature des autorités du marché. . La protection du marché contre les abus de puissance économique afin de maintenir les équilibres est assurée par une structure extérieure sous forme d'organes distincts, « les autorités de régulation ». Ces autorités de régulation comme organes distincts du marché, sont des éléments de l'exécutif. Elles sont en quelque sorte le bras armé de ce dernier496(*). Elles n'en sont même pas un démembrement, comme on le disait naguère des établissements publics administratifs, car ces derniers ont la personnalité morale alors que les autorités de régulation, dans la plupart des cas, ne l'ont pas. Elles font partie du pouvoir exécutif de l'État, même si, par l'intervention du législateur, le pouvoir exécutif traditionnel, celui qui est constitué sous l'autorité hiérarchique du Premier ministre, s'est trouvé amputé de certaines compétences au profit d'autorités méritant davantage d'ailleurs le qualificatif « d'autonomes » que celui « d'indépendantes »497(*).

197. Le rôle naturel des autorités du marché dans la protection du marché. En effet, le régulateur assure une fonction propre, issue de son pouvoir règlementaire499(*) à travers laquelle il contribue activement à la lutte contre les abus de puissance économique. Cette fonction naturelle s'opère à la fois en amont et en aval. Les fonctions amont ont pour but d'introduire la concurrence et encadrer la mutation de l'économie dirigiste à l'économie du marché par la création, notamment, des conditions nécessaires à l'instauration de la concurrence. Ainsi, le régulateur participe à l'élaboration des règles au travers des pouvoirs réglementaires qui lui sont dévolus, y apporte des précisions par des recommandations, lignes directrices ou autres documents n'ayant pas valeur normative. Dans ce cadre, il introduit la concurrence par l'octroi de licences aux nouveaux entrants, établir les cahiers de charges pour clarifier les droits et obligations des opérateurs.

198. En aval. En aval, le rôle naturel du régulateur dans l'appréhension des phénomènes de puissance économique consiste dans la surveillance de tous les opérateurs y compris ceux du secteur public. Il se charge de contrôler les conditions d'accès au marché et d'exercice des activités économiques dans le but de protéger l'ensemble des professionnels et des consommateurs. Ainsi, il contrôle le marché pour éviter tout abus de la part des opérateurs, alloue les ressources rares qu'il gère, analyse les marchés pertinents et identifie les opérateurs puissants, rationalise l'utilisation des infrastructures, faciliter le développement de la couverture du territoire et de promouvoir les investissements. Toutes ces missions constituent la fonction propre du régulateur, issue de son pouvoir règlementaire. Elles ne relèvent aucune contestation à côté de la fonction judiciaire du juge. Or, ce sont ces mêmes missions qui attestent de la souplesse des autorités du marché et leur réalisme dans l'appréhension des phénomènes économiques qui, à côté de la rigidité de la fonction judiciaire classique, motivent l'attribution d'une fonction juridictionnelle au régulateur.

199. Extension du rôle du régulateur à la fonction juridictionnelle. Aujourd'hui, le juge se voit souvent reprocher son éloignement des réalités concrètes et des contraintes indomptables par le droit tout court. Ces décisions ressemblent à des interventions chirurgicales dont les séquelles marquent pour toujours l'activité économique d'autant plus qu'elle favorise par inadvertance ou application scrupuleuse des règles de procédure, les risques de vengeance, d'abus et d'immoralité, dont fait preuve parfois des plaideurs insensibles aux idéaux de justice, de civisme, de respect de l'ordre public et de l'esprit des lois500(*). Par conséquent, le nouveau droit de la concurrence se particularise indiscutablement par l'importance qu'il accorde aux institutions administratives et à leur mission de régulation dans la lutte contre les abus de puissance économique. Cette dernière ne se limite plus aux fonctions classiques de contrôle, de surveillance, d'orientation et de conseil. Elle s'apparente de plus en plus à des missions de conciliation, de réparation, de correction et de sanctions très semblables à celles traditionnellement reconnues et réservées à la justice501(*).

200. Fonction juridictionnelle des autorités du marché et respect des principes traditionnels de la procédure. Cette nouvelle mission du régulateur administratif est basée sur une procédure préalable. Son effectivité dans la lutte contre les abus de puissance économique passe inéluctablement par le respect des principes légaux le gouvernent, du déclenchement des enquêtes jusqu'à l'exécution des sanctions. Les conditions du procès équitable devront par conséquent être respectées tout comme la présomption d'innocence et les garanties de la défense. Il faudra donc bien séparer les fonctions de jugement de celles de recherches et d'instruction des infractions502(*). Cependant, la composition503(*), les attributions et le fonctionnement du conseil de la concurrence institué par la loi 06-99, tiennent compte de la participation des agents économiques du secteur privé de la confirmation de l'emprise administrative et malgré tout du respect de principes plutôt traditionnels aux procédures juridictionnelles504(*). Il ne dispose pas d'un pouvoir décisionnel505(*). Ce dernier relève des prérogatives du premier ministre ce qui laisse planer sur l'indépendance et l'impartialité objective de nos institutions administratives du marché. Néanmoins, la loi 06-99 impose des règles procédurales strictes pour le respect des principes d'un procès équitables506(*). D'un autre côté, elle consacre au niveau des enquêtes administratives simples et judiciaires, les principes de loyauté, du secret professionnel et du respect de la vie privée507(*). A côté de la garantie du respect des principes d'un procès équitable, les autorités du marché présentent des avantages, dans la lutte contre les abus des opérateurs économiquement puissants, les favorisent par rapport au juge. Il s'agit des délais courts par rapport à la procédure de droit commun et de la liberté dans le règlement des litiges.

201. Les délais courts. Dans la plupart des affaires de répression des abus de puissance économique, il ne s'agit pas seulement pour le demandeur d'obtenir réparation d'un dommage causé par cet abus, mais aussi de gagner dans un délai très court. Les économistes ne cessent de rappeler aux juristes qu'une part de marché perdue est très difficile à reconquérir. Cependant, dans sa fonction juridictionnelle, le régulateur devait respecter les délais nécessaires à l'obtention d'une décision dans le règlement des litiges, c'est un facteur qui est essentiel. Il s'agit, en effet, d'un élément déterminant. Le législateur national, et à l'instar de ses homologues européens, ne s'y est pas trompé, ce qui explique que dans la plupart des textes, relatifs aux règlements des différends nés de la régulation économique, imposent le règlement des litiges dans des délais très courts. Cependant, parfois, ce n'est pas le cas. Ainsi, le Conseil de la concurrence peut dans un délai de deux mois déclarer, par décision motivée, sa saisine irrecevable s'il estime que les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de sa compétence ou ne sont pas appuyés d'éléments suffisamment probants. Ce délai est relativement long par rapport au délai imposé aux juridictions de droit commun, ce qui est absolument incompatible avec les exigences de célérité et de rapidité susmentionnées508(*). Ajouter à cela, l'absence de toute exigence légale quand au délai imparti pour la décision finale.

202. Une grande liberté dans le règlement des litiges. Au-delà du facteur temps qui joue souvent en faveur des autorités du marché, un autre élément est souvent avancé pour justifier le recours à celles-ci, à savoir la plus grande liberté dont elles jouissent dans le règlement des litiges. Il est vrai que la loi donne très fréquemment un large pouvoir d'appréciation au régulateur pour trancher les litiges qui leur sont soumis. Ainsi, par exemple, en France, les articles L. 34-8 et L. 36-8 du C.P.T. qui organisent le règlement des litiges en matière d'interconnexion permettent à l'Agence de la Régulation des Télécommunication. d'imposer toute prestation d'interconnexion qu'elle juge « raisonnable » au regard des besoins du demandeur et des capacités de l'opérateur sollicité à l'offrir. Elle peut réduire un tarif d'interconnexion dès lors qu'elle estime qu'il « crée une charge excessive » ce qui a pour effet de sanctionner notamment un abus dans l'exploitation des installations essentielles. De même, la même agence peut imposer la modification des dispositions d'une convention d'interconnexion, même si aucune des deux parties au litige ne le lui demande. A l'inverse, un juge qui tranche un litige en matière d'interconnexion doit respecter les règles qui s'imposent en matière de convention de droit privé et en particulier de par l'article 230 du Dahir des Obligations et des Contrats, et ne dispose donc pas de la même liberté que le régulateur. Si on ajoute à cela que par nature un régulateur estime avoir vocation à créer lui-même les règles du jeu, il est manifeste que lorsque la solution à un litige requiert une décision innovante, le choix du régulateur sectoriel peut être privilégié. Toutes ces prérogatives du régulateur contribuent à la lutte contre les abus de puissance économique d'une manière plus efficace et plus rapide que le juge.

203. De ce qui précède on peut déduire que les régulateurs qui se voient octroyer le pouvoir de sanctionner les acteurs portant atteinte au bon fonctionnement de la concurrence et de régler des litiges y afférents. Ils agissent en droit et mènent leur action avec les garanties procédurales qui s'imposent. Dès lors, ils deviennent des quasi-juridictions509(*) plus aptes d'appréhender les phénomènes d'abus dans l'exercice de la liberté de la concurrence. Néanmoins, l'octroi des pouvoirs de nature juridictionnelle à des régulateurs, ne réduit pas pour autant le domaine de compétence des juges et, de ce fait, l'action quasi-juridictionnelle des régulateurs s'exerce toujours de manière complémentaire à la possible intervention du juge. A son tour, ce dernier, pour s'adapter aux réalités économiques, entame un travail de perfectionnement de son action et ainsi, il commence à recourir à une sorte de régulation moderne des mécanismes concurrentiels.

B- L'accroissement de la fonction régulatrice du juge

204. Les tribunaux naturellement compétents pour sanctionner les abus de puissance économique. L'application du droit de la concurrence relève des juridictions civiles, des juridictions pénales et des juridictions administratives. Le partage des compétences entre les trois juridictions est établi en fonction des objectifs poursuivis par les parties saisissantes510(*). Ainsi, il relève de la compétence des juridictions administratives, le contrôle de la régularité des décisions prises par les autorités administratives, dont celles du premier ministre. Les tribunaux civils ou de commerce sont compétents pour déclarer l'annulation du contrat de nature anticoncurrentielle et d'obtenir les dommages et intérêts511(*), tandis que les juridictions pénales sanctionnent les pratiques déclarées infractions par la loi512(*).

205. Compétence propre du juge dans la lutte contre l'abus de puissance économique. Il est incontestable que la plénitude des pouvoirs juridictionnels relève du juge. Les juges de droit commun sont de plus en plus fréquemment saisis de litiges qu'ils doivent trancher sur le fondement du droit de la concurrence ou de lois économiques spécifiques513(*). Seul le juge de droit commun, le juge administratif ou le juge civil, selon l'auteur ou la nature du dommage, ont le pouvoir d'évaluer les indemnités qui doivent être accordées aux opérateurs victimes d'abus de puissance économique et de condamner l'auteur de telles pratiques à réparer le préjudice subi par les victimes. Dès lors, le juge est conduit à devenir lui-même un acteur de « premier niveau » de la régulation économique. Cette compétence judiciaire touche à la majorité du domaine du droit de la concurrence. En effet, le juge se trouve compétent en matière de pratiques anticoncurrentielles comme en matière de concurrence déloyale. Il a un pouvoir de sanction civile et pénale, de réparation de dommage, d'ordonner les mesures conservatoires en vertu de l'urgence et de trancher les litiges. Il peut en vertu de l'article 9514(*) de la loi 06-99, et conformément à l'article 306 et suivant du Dahir des Obligations et des Contrats515(*), déclarer la nullité des actes de concurrence illégaux. Ainsi, tout engagement ou comportement se rapportant à une pratique anticoncurrentielle, notamment un abus de position dominante, est nul de plein droit. Cette nullité est justifiée par la violation des dispositions légales impératives des articles 6516(*) et 7517(*) de la loi 06-99. Enfin et sans dresser un tableau exhaustif, le juge est compétent en vertu de l'urgence d'ordonner, sans préjudicier à ce que va être rendu au fond, toute mesure conservatoire, temporaire, pour faire cesser un trouble manifestement illicite ou faire prévenir un dommage imminent, notamment en matière de pratiques anticoncurrentielles et de pratiques restrictives. De ce qui vient d'être présenté, on peut déduire que le juge dispose de prérogatives étendues dans à la lutte contre les abus de puissance économique dans le cadre de l'exercice de son pouvoir judiciaire traditionnel. Cependant, la complexité et le réalisme des phénomènes économique ont incité le juge, sous d'autres cieux, à améliorer ses techniques judiciaires, notamment par l'accroissement de sa fonction régulatrice.

206. Accroissement de la fonction régulatrice du juge. Quand on parle de régulation et de juge, on parle à la fois de ce que fait depuis toujours le juge dont c'est la mission, une mission de régulation sociale518(*), et de cette technique nouvelle apparue plus récemment, venue un peu d'ailleurs et transposée dans les droits romano germaniques de manière assez hybride, qui fait qu'on exerce de la régulation par secteur, par suite de la démonopolisation et de la déréglementation. Il y'a là évidemment une fonction un peu différente, qui place le juge sur un terrain qui n'est pas au départ celui du droit. Ce terrain se caractérise par l'aspect technique des affaires de régulation économique, ce qui justifie de la saisine des régulateurs au détriment du juge de droit commun. Toutefois, il n'y a, en fait, que peu d'affaires qui présentent réellement une technicité telle que seul un régulateur sectoriel peut, à l'aide de ses propres services techniques, trancher. De surcroît, la faculté pour le juge de solliciter l'avis du régulateur ou de saisir un expert technique facilite la compréhension par le juge des questions techniques soulevées par les affaires de régulation économique. Au demeurant, il s'agit en général de comprendre un secteur économique, un vocabulaire, des règles économiques spécifiques, ce qui n'est pas au-dessus des capacités des magistrats de droit commun. L'organisation des tribunaux en chambres spécialisées et le renforcement des moyens donnés au juge peuvent aisément aider à surmonter ce type de difficultés. Cela est confirmé par la présente du juge au sein des autorités de régulation. Ainsi, On note d'ailleurs que les régulateurs sectoriels et généraux sont souvent dirigés par des magistrats, ce qui atteste, s'il en est besoin, que l'aptitude à réguler requiert souvent moins des compétences techniques que des compétences économiques et juridiques. Cependant, si le juge assure une pleine fonction de régulation au niveau des régulateurs administratifs, il n'en va pas de même au niveau des juridictions classiques où il se confronte à des entraves d'ordre légales. Ainsi, il ne peut se saisir lui-même, ne peut statuer que sur la question dont il est saisi, ne se prononce qu'en droit, ne peut prendre des dispositions d'ordre général, n'a pas de pouvoir de substitution et ne peut instaurer de relations de dialogue avec les opérateurs d'un secteur économique. Néanmoins, des juges commencent à surmonter ces obstacles légaux à travers de nouvelles pratiques judiciaires.

207. De nouvelles pratiques judiciaires. Cette vision classique du juge ne correspond pourtant plus véritablement aux pratiques judiciaires actuelles et l'on observe que nombre de magistrats dans des pays avancés dans le domaine de la régulation, prennent conscience de leur capacité à devenir des acteurs de la régulation économique et considèrent qu'il est de leur devoir d'avoir un rôle effectif dans l'exécution d'une politique économique. Plus particulièrement en interprétant la loi économique, il lui donne un sens et que ce sens influe sur sa finalité, c'est-à-dire qu'il peut nuancer, infléchir, pervertir, voire contrarier la politique économique voulue par la loi. Le juge a donc une responsabilité dans l'orientation même de la politique économique519(*). Ainsi, S'agissant de la manière d'évaluer les indemnités accordées à la victime d'un abus de puissance économique, le juge doit s'efforcer d'en fixer le montant, non seulement à la mesure du dommage directement subi par celle-ci mais aussi, en fonction de l'ensemble des préjudices induits, des risques pris par l'entreprise dénonciatrice, de sa contribution personnelle à la mise en oeuvre d'une politique de concurrence et du coût effectif du procès. Ainsi, par son caractère exhaustif, la réparation civile participe d'une démarche dissuasive pour lutter contre les abus de puissances économique. Cette conception large de la réparation est, elle aussi, une composante essentielle de la coopération du juge à une politique économique.

208. Conséquences : un juge régulateur. Dans cette nouvelle fonction du juge, des magistrats commencent à se comporter comme des véritables régulateurs et leurs décisions relèvent un caractère général. Ils vont jusqu'à emprunter les méthodes des régulateurs en convoquant des grands témoins afin de recueillir la position de l'ensemble des acteurs et experts du secteur avant de décider. Cette méthode s'inspire directement des consultations publiques habituellement organisées par les régulateurs. Cette nouvelle dimension donnée à l'activité juridictionnelle, amène les juges à sortir de leurs rôles traditionnels et de leurs modes habituels de raisonnement520(*), Puisque cette fonction de régulation suppose, non seulement d'avoir, en permanence à l'esprit, l'intérêt général, mais également très souvent de faire oeuvre de création et d'innovation. Il s'agit là d'une mutation profonde du monde judiciaire, dont certains magistrats français ou anglais ont parfaitement saisi la dimension. Dans cette extension du rôle du juge à un rôle quasi analogue du régulateur, ne faut-il pas que les juridictions cessent aussi de n'être composées que de juriste, de la même façon que le régulateur, comme c'est en voie d'être en Angleterre et dans certains cas en France ?521(*)

209. Du renforcement du pouvoir du juge et du régulateur à leur coopération dans la protection du marché. L'accroissement de la fonction régulatrice du juge, à côté de la reconnaissance du pouvoir juridictionnel au régulateur, implique une influence mutuelle entre ces deux organes chargés de la veille sur le bon fonctionnement de la concurrence, notamment par la lutte contre les abus des opérateurs économiquement puissants. Cette influence réciproque entre régulateurs et juges, conduit à des emprunts réciproques dans les modalités d'action et au développement d'une certaine concurrence. Cependant, cette concurrence n'est plus d'actualité. L'heure est désormais à la coopération et au dialogue entre juges de droit commun et régulateurs pour rendre leurs actions plus cohérentes et plus efficaces.

§2 - LE CONCOURS DU JUGE ET DES AUTORITES DU MARCHE

210. Le juge à côté du régulateur dans la lutte contre les abus de puissance économique. Comme on l'a déjà indiqué, la lutte contre les abus de puissance économique fait intervenir au moins deux disciplines, le droit et l'économie. Les barrières entre ces deux mondes commencent à devenir artificielles. Ces deux mondes doivent communiquer, ils doivent se comprendre et les deux organes, le juge et le régulateur doivent aussi se communiquer et se comprendre. Cependant, il est vrai qu'une suprématie caractérise le rôle du juge par rapport au régulateur dans la mesure où, le premier contrôle le deuxième. Mais, pour lutter efficacement contre les abus de puissance économique, un rapport, mettant les deux organes l'un à côté de l'autre doit exister. Ce rapport illustre un partenariat imposé par la complémentarité de leurs missions. Ainsi, pour parvenir à un accomplissement efficient de cette dernière, ils doivent entretenir un rapport de coopération, de coordination et de complémentarité522(*). Cependant, dans la lutte contre les abus de puissance économique, la complémentarité joue dans les deux sens, le juge peut être complémentaire du régulateur (A), de même, le régulateur peut complémenter la fonction du juge dans la lutte contre le dysfonctionnement des marchés concurrentiels (B).

A- L'intervention du juge en complémentarité du régulateur

211. Les raisons de l'intervention du juge en complémentarité du régulateur. Il n'est pas contestable que lorsque les régulateurs règlent des litiges ou sanctionnent ceux qui abusent de leurs pouvoirs économiques et ainsi, violent les règles encadrant l'activité dans certains secteurs économiques, ils empiètent sur la sphère de compétence du juge même. En effet, il est de moins en moins discuté de l'opportunité de leurs interventions dans ce domaine. On ne peut, toutefois, reléguer le juge à un rôle complémentaire à celui du régulateur et de manière générale, c'est plutôt de coopération qu'il convient de parler. Cela étant, lorsqu'un litige est tranché par un régulateur, on va voir comment le juge peut être appelé à intervenir de manière complémentaire pour prendre les mesures qu'un régulateur n'a pas le pouvoir d'ordonner. La saisine du juge étant par ailleurs parfois à l'initiative du régulateur lui-même, ce qui favorise ainsi cette action complémentaire du juge et du régulateur. Elle touche, comme on va le voir, aussi bien le juge administratif que le juge judiciaire et aussi bien le juge civil que le juge pénal ; et encore, tant le juge du fond que le juge du référé. Cette complémentarité est donc totale.

212. Le recours au juge du droit commun pour la réparation d'un dommage. Ainsi, l'intervention du juge en complément de celle du régulateur tient d'abord à des limites affectant les pouvoirs des régulateurs. Les régulateurs ne se voient jamais par exemple accorder le droit de condamner à la réparation du dommage subi par les acteurs du marché. Seul le juge de droit commun, le juge administratif ou le juge civil, selon l'auteur ou la nature du dommage, ont le pouvoir d'évaluer les indemnités qui doivent être accordées aux opérateurs victimes d'abus de puissance économique et de condamner l'auteur de telles violations à réparer le préjudice subi par les victimes.

213. Le recours au juge pénal pour conforter les décisions du régulateur. L'efficacité de l'action du régulateur dans la lutte contre les abus de puissance économique exige l'effectivité de la sanction. Cependant, l'intervention du régulateur se situe à une phase, en principe antérieure à celle de la justice et en constitue, en certain sens, un préalable, mais souvent obligatoire. Les décisions, prises par ce dernier, obligent les opérateurs et les exposent parfois à des sanctions. Leur violation déclenche la réaction pénale notamment par l'intervention de la juridiction répressive523(*). Ainsi, la coopération du juge à l'exercice des pouvoirs quasi-juridictionnels des régulateurs est également souvent nécessaire afin d'assurer une bonne exécution des décisions du régulateur. En effet, les décisions de ce dernier sont, la plupart du temps, des décisions administratives qui, n'ayant donc pas de caractère de décisions juridictionnelles, ne bénéficient pas de l'ensemble des dispositions coercitives permettant l'exécution des décisions de justice, même si, ce sont des décisions, par nature, exécutoires comme toute décision administrative. En outre, les régulateurs sectoriels, eux, ne bénéficient qu'exceptionnellement du pouvoir de prononcer des injonctions ou de prononcer des astreintes524(*). Dès lors, le recours au juge pénal peut s'avérer utile en cas de non-respect d'une décision quasi-juridictionnelle d'un régulateur afin que les mesures coercitives nécessaires à l'exécution de la décision puissent être prises. Dans certains cas, ce recours au juge pénal pour conforter les décisions prises par les régulateurs est expressément visé par les textes adoptés en matière de régulation économique525(*). Ainsi, ce recours au juge en complément du régulateur, à l'initiative de ce dernier, se retrouve dans les textes, et à d'autres fins que de prononcer des mesures coercitives nécessaires au respect des décisions du régulateur. En effet, les lois qui organisent la régulation économique sectorielle contiennent la plupart du temps des dispositions spécifiques permettant aux régulateurs sectoriels de saisir le juge ou d'autres régulateurs, comme le Conseil de la concurrence526(*). Ainsi, on trouve très souvent une disposition légale prévoyant que le régulateur sectoriel peut dénoncer au parquet les faits qualifiables d'infractions pénales.

214. La communication de documents. Pour optimiser le temps et le double emploi, la loi prévoit des procédures de communication des documents entre le juge et le régulateur. Ainsi, au Maroc, le conseil de la concurrence qui est dépourvu de tout aspect judiciaire, peut demander aux juridictions la communication des procès verbaux, des rapports d'enquête ou de tout document ayant un lien direct avec les faits dont il est saisi. Aussi, il peut, lorsque les faits lui paraissent de nature à justifier l'application de l'article 67 de la loi 06-99527(*), recommander au Premier ministre de saisir le procureur du Roi près le tribunal de première instance compétent aux fins de poursuites.

215. Les visites et perquisitions. Par ailleurs, pour procéder aux visites en tous lieux ainsi qu'à la saisie de documents, les enquêteurs, appartenant au régulateur, doivent solliciter une autorisation motivée au procureur du Roi dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter. La visite et la saisie s'effectuent sous l'autorité et le contrôle du procureur du Roi qui les a autorisées. Il désigne un ou plusieurs officiers de police judiciaire, et au besoin une femme fonctionnaire de la police judiciaire lors des visites des locaux à usage d'habitation, chargés d'assister à ces opérations. Après avoir présenté quelques aspects de l'intervention du juge en complémentarité du régulateur, nous allons essayer de voir dans quelle mesure le régulateur peut complémenter l'action du juge.

B- L'intervention du régulateur en complémentarité du juge

216. Les raisons de l'intervention du régulateur en complémentarité du juge. Le régulateur peut intervenir pour la complémentarité de l'action du juge pour des raisons qui tiennent à la complexité technique d'une affaire pendante devant ce dernier, soit du manque des données économiques nécessaires à l'appréciation d'une pratique anticoncurrentielle. Aussi, afin apprécier l'existence d'un abus de puissance économique, notamment à l'égard du marché, qui permet de qualifier la faute au regard du droit de la responsabilité, le juge peut soit s'appuyer sur la constatation faite par le régulateur de cette violation, soit opérer ce constat lui-même.

217. Le régulateur expert au service du juge. Dans son action de régulation, le juge peut tout d'abord s'appuyer sur les multiples lignes directrices, avis, discours et autres documents élaborés par les régulateurs que les avocats ne manquent pas de produire comme tout élément de doctrine éclairant le juge. Par ailleurs, pour établir la faute, les juridictions civiles peuvent décider en application de l'article 38 de la loi 06-99 de demander l'avis du conseil de la concurrence sur l'application des articles 6, 7 et 8-1, de la même loi aux litiges dont elles ont été saisies528(*). Ainsi, et conformément à l'article 15, alinéa 4, le Conseil de la concurrence est consulté par les juridictions compétentes sur les pratiques anticoncurrentielles relevées dans les affaires dont elles sont saisies. L'article 38 confirme cette possibilité en y ajoutant que le Conseil ne peut donner son avis qu'après une procédure contradictoire. Toutefois, s'il dispose d'informations déjà recueillies au cours d'une procédure antérieure, il peut émettre son avis sans avoir à mettre en oeuvre la procédure prévue à la même section. Cependant, le souci de tendre vers une régulation aussi raisonnable que possible incite à créer des conditions qui réservent l'intervention du régulateur aux situations dans lesquelles des éléments extrajudiciaires militent pour l'intervention d'autres organes plus opérationnels et plus qualifiés. Les éléments visés ne doivent pas venir perturber la bonne administration de la justice, la bonne application de la loi529(*). De surcroît, la faculté pour le juge de solliciter l'avis du régulateur ou de saisir un expert technique facilite la compréhension par le juge des questions techniques soulevées par les affaires de régulation économique530(*). De même, les procédures d'avis entre les régulateurs sectoriels et le Conseil de la concurrence, considéré comme une véritable juridiction en France, sont monnaie courante. Ainsi, lorsque le Conseil français de la concurrence est saisi d'affaires concernant le secteur de l'audiovisuel ou le secteur des télécommunications, ou encore le secteur de l'électricité, il doit saisir pour avis les régulateurs sectoriels de ces secteurs. De manière générale, le juge peut, même sans texte spécifique, solliciter la coopération du régulateur en lui demandant d'intervenir en qualité d'amicus curiae531(*), conformément aux dispositions du code de la procédure civile et comme le prévoit expressément le nouveau Code de procédure civile français532(*).

218. Insuffisances de des procédures de coopération entre juge et régulateur. Pour permettre au juge d'exercer pleinement ces nouvelles fonctions de lutte contre les abus de puissance économique à l'égard du marché, les procédures de coopération avec les régulateurs sont néanmoins insuffisantes. Il y a certainement lieu d'ouvrir une réflexion sur l'organisation judiciaire et les moyens qui doivent être mis en oeuvre pour favoriser le plein exercice de ces nouvelles fonctions. Relèvent de ce débat, la mise en place de chambres spécialisées, la formation des juges en matière économique ou le recrutement de juges ayant une formation d'économistes, et l'allocation des moyens permettant le traitement des dossiers de régulation économique qui supposent en particulier un temps important à pouvoir consacrer à l'examen de chaque dossier. Il serait également utile de s'interroger sur l'octroi de pouvoirs aux juges pour régler de tels litiges à l'instar de ceux accordés aux régulateurs.

219. Insuffisance du rôle joué par le dire juridique dans la lutte contre les abus de puissance économique. A travers la présentation du rôle joué par le juge dans l'appréhension des phénomène d'abus dans l'exercice du pouvoir économique, nous pouvons déduire que le juge marocain n'a pas pu revisiter et revivifier les instruments classiques du droit commun contrairement à son homologue français qui a eu l'audace de rénover dans l'application et l'interprétation des textes classiques avec autant de réalisme. Pareillement, l'adaptation de la fonction judiciaire aux réalités économiques n'a pas encore aboutie aux objectifs voulus, à savoir la lutte efficace contre les abus de puissance économique. En effet, on estime que l'intervention législatif est devenue un impératif à la fois moral et économique à l'instar du droit français et à fortiori le notre. Ainsi, nous procédons à une analyse des instruments modernes instaurés par les législations comparées et prévues par notre législateur. Cette analyse va nous permettre d'apprécier dans quelle mesure « le faire juridique » pourra remédier aux carences, déjà démontrées, de notre dire juridique.

Chapitre II

LE FAIRE JURIDIQUE REGULATEUR DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE

220. L'importance du « faire juridique ». Ainsi que l'a superbement dit Portalis, le chef de file des rédacteurs du code civil Français de 1804, « le droit ne naît pas des règles, mais les règles naissent du droit »533(*). « Le droit est normalement obligatoire ; mais par lui-même il n'emporte aucune contrainte ; il dirige, les lois commandent ; il sert de boussole, et les lois de compas »534(*). Ainsi, à travers ces expressions de Portalis, on peut déduire que c'est le droit qui produit les règles, qui fait les règles. Ainsi, le faire juridique doit permettre au droit d'acquérir une certaine vitalité, nécessaire aux mutations sociales. Toutefois, au sein de la vieille famille des faiseurs de règles, le législateur occupe une place prééminente, sans être pour autant le plus ancien en tous lieux535(*). Ainsi, et étant la carence du juge marocain, c'est le législateur qui doit intervenir pour l'adaptation de l'arsenal juridique aux réalités socioéconomiques.

221. Modes d'intervention du « faire juridique ». Il est certain que les mutations des sociétés contemporaines ont révélé l'inadaptation du droit à réguler équitablement la vie sociale. De même, comme on l'a déjà mis en lumière, le juge marocain n'a pas éprouvé une audace et un esprit réaliste dans la lutte contre les abus de puissance économique. A cet effet, l'intervention législative s'est imposée comme solution inéluctable. L'analyse des textes modernes démontre que cette intervention peut prendre deux formes. Ainsi, la loi intervient soit par la multiplication des dispositions impératives et ainsi, le renforcement du cadre contraignant (Section I) ; soit par une nouvelle répartition des armes c'est qui peut contribuer à la restauration des conditions d'un débat équilibré (Section II).

Section I - La lutte contre les abus de puissance économique par le renforcement du cadre contraignant

222. L'un des instruments les plus privilégiés par tout législateur, pour la consécration de certaines valeurs sociales ou économiques, est le recours aux dispositions dont la violation est sanctionnée civilement ou pénalement. Dans la même mesure, la lutte contre les abus de puissance économique peut être poursuivie à travers le renforcement du cadre contraignant et ainsi, elle fait appel à des sanctions pénales ou civiles. En effet, et dans le but de préserver le bon fonctionnement de la concurrence, la loi impose certaines contraintes à l'exercice de la liberté de concurrence ainsi que de la liberté contractuelle. De même, la protection de certaines catégories de personnes reconnues par leur vulnérabilité, peut être poursuivie à travers, des restrictions à l'exercice de la liberté contractuelle.

223. Ordre public économique. Le renforcement du cadre contraignant s'opère à travers la multiplication des dispositions d'ordre public. Celles concernant la poursuite d'objectifs économiques relèvent de l'ordre public économique et ce pour des raisons de direction ou de protection. La distinction entre les objectifs de direction et de protection est très difficile à opérer. La situation est plus simple dans le rapport entre concurrence et contrat que dans d'autres hypothèses, celles relevant de l'ordre public de protection du consommateur ou du salarié536(*). En effet, pour bien d'autres règles, on hésite entre l'ordre public de direction et l'ordre public de protection. On dessine chaque règle, chaque disposition suivant l'intérêt protégé, intérêt général du système pour l'ordre public de direction, intérêts légitimes d'un groupe de personnes qui n'a pas la force de les défendre seul pour l'ordre public de direction. Suivant que l'on affecte à telle ou telle règle, bientôt à tel ou tel alinéa, un tel but, il faut ajuster l'impact de ce que l'on pourrait désigner comme la « règle de contexte », plus ou moins profond suivant l'intensité de l'ordre public.

224. L'exemple de la loi 06-99. Les objectifs poursuivis par la loi 06-99 sont confortés par des règles impératives d'ordre public, dont la violation est pénalement sanctionnée537(*). Ainsi, ladite loi met en place un dispositif contraignant comme moyen public de pilotage des comportements des agents économique. Ce qui est une forme nouvelle de dirigisme économique. A travers cette fonction économique du droit, on est passé de l'impératif moral de sanction des actes graves à un impératif d'efficacité des lois prescrivant des comportements538(*). Dans cette conception utilitariste, notamment du droit pénal, du droit pénal539(*), on assiste à une objectivisation du dispositif pénal économique. Cependant, comme on l'a déjà indiqué, la lutte contre les abus de puissance économique peut s'opérer à travers le renforcement du cadre contraignant de l'exercice de certaines libertés. A cet effet, et par une analyse du droit positif marocain, notamment la loi 06-99, ainsi que certains instruments juridiques adoptés par le législateur français, nous essayerons de mettre en lumière certaines contraintes imposées par la loi dans l'exercice de la liberté concurrentielle (I), ainsi que dans celle contractuelle (II).

§1 - LE RENFORCEMENT DU CADRE CONTRAIGNANT DANS L'EXERCICE DE LA LIBERTE CONCURRENTIELLE

225. Le marché permet la confrontation et la rencontre de l'offre et de la demande, en principe au bénéfice de tous les participants. Les offreurs et les demandeurs étant également intéressés par le recours au marché comme meilleur moyen de réaliser les opérations envisagées. La loi 06-99 contraint parfois un opérateur qui n'a pas formulé d'offre à contracter. Symétriquement, il impose à des demandeurs de recourir au marché alors qu'ils s'en passeraient volontiers. C'est le cas dans certains marchés règlementés qui connaissent l'obligation de passer par l'intermédiaire des marchés. L'obligation est alors imposée aux offreurs comme aux demandeurs. C'est aussi le cas dans toutes les hypothèses où le droit impose au demandeur le recours à des procédures d'appel d'offres : il est contraint non seulement de faire connaître sa demande au marché mais surtout de contracter avec celui qui répond le mieux à la demande précise qu'il est tenu de formuler540(*). Cependant, l'analyse des dispositions contraignantes de la loi 06-99 révèle deux démarches adoptées par cette dernière et présentant une certaine lutte contre les abus de puissance économique. L'une consiste à la prescription de certains comportements nécessaires au bon fonctionnement de la concurrence (A) ; l'autre consiste à interdire certains comportements nuisibles au bon fonctionnement concurrentiel (B).

A- La prescription de certains comportements indispensables au bon fonctionnement concurrentiel

226. L'objectif des comportements imposés par la loi. Les prescriptions imposées par la loi 06-99 ont un but parfaitement économique, dans la mesure où elles contribuent à la transparence et par conséquent à la stimulation de la concurrence sur le marché ou à la préservation d'une concurrence effective traduction juridique du principe économique du bon fonctionnement de la concurrence541(*). Elles contribuent à la lutte contre les abus de puissance économique dans la mesure où elles peuvent dévoiler un comportement anticoncurrentiel pratiqué par une entreprise disposant d'une domination absolue du marché. A cet effet, la loi 06-99 tente d'imposer des obligations nécessaires à l'instauration d'un degré suffisant de transparence sur le marché, d'abord, par des règles de publicité de prix et de facturation qui peuvent aussi contribuer à l'éclairement du consentement du consommateur et la lutte contre les pratiques discriminatoire des entreprises économiquement puissante, ensuite par l'exigence de l'effectivité de l'offre qui contribuent, notamment, à la satisfaction des demandes des consommateurs en cas d'existence d'une offre préalable.

227. La transparence de l'offre et l'éclairement du consentement du consommateur. Le fonctionnement correct de la concurrence est très largement conditionné par la connaissance qu'ont les opérateurs des tenants et aboutissements de diverses offres ou demandes présentes sur le marché. La doctrine économique insiste depuis longtemps sur l'importance de ce qu'il est convenu d'appeler la « transparence du marché »542(*). Cette transparence n'est pas naturelle. Souvent les entreprises économiquement puissantes n'ont pas intérêts à son amélioration dans la mesure où elle peut dévoiler leurs pratiques anticoncurrentielles ; ils s'efforcent même parfois à la stimuler pour en confisquer les effets. A cet effet, la loi 06-99 intervient, en renforcement du cadre contraignant de l'exercice de la liberté contractuelle, par la prescription de certains comportements afin d'améliorer la transparence sur le marché. Ainsi, ladite loi instaure à la charge des professionnels, une obligation d'information sur les prix et les conditions particulières de la vente ou de la réalisation de la prestation543(*). Par ailleurs, il ne servirait à rien d'imposer des règles relatives à la transparence précontractuelle dans le but d'interdire les discriminations contraires au droit du marché, au stade de l'offre, s'il n'existait aucun moyen de s'assurer que les opérations finalement réalisées ont bien correspondues à celles qui ont été offertes. A cet effet, et pour donner plus d'effectivité aux règles d'information, une autre obligation est posée par la loi, toujours dans le souci d'instauration des règles de transparence et de lutte contre les discriminations544(*). Il s'agit de l'obligation de délivrance de facture545(*). L'article 48 de la loi subordonne cette obligation à la demande du consommateur. On peut se demander sur la subordination de cette obligation à la demande du consommateur, alors, qu'elle est obligatoire entre professionnels. Cela est simplement expliqué par d'autres considérations du droit de la facture546(*). Mais, cette constatation est modérée par le deuxième et troisième alinéa du même article.

228. Des considérations purement économiques mais contribuent indirectement à la protection du consommateur. Le domaine de l'obligation est circonscrit par le recours à la notion de consommateur. La lecture de ces dispositions laisse facilement croire qu'elles ont pour finalité, la protection du consommateur. Il serait étonné de réduire la protection du consommateur à ces obligations de publicité de prix et des conditions particulière de vente ou de prestation de service. Néanmoins, malgré que ces dispositions aient pour objet direct l'instauration de la transparence nécessaire au bon fonctionnement de la concurrence, elles contribuent certainement à l'éclairement du consentement du consommateur. Ainsi, à côté des considérations purement économiques, les règles de facturation présente une certaine protection du consommateur, dans la mesure où, elles présentent en sa faveur un moyen pour établir la preuve que l'opération qui a été réalisée correspond bien à celles qui lui avaient été proposée. Certes, on peut déduire que les règles de la publicité des prix et des conditions générales de vente et de prestations de vente à côté de celles de la facturation peuvent contribuer à la lutte contre les abus de puissance économiques nuisibles au bon fonctionnement de la concurrence, ainsi, qu'aux intérêts des partenaires économiquement faible.

229. L'effectivité de l'offre et la satisfaction de la demande du consommateur. Dans une économie de concurrence, les prix des produits et services sont déterminés par les mécanismes du marché, notamment la confrontation de l'offre et de la demande. Cependant, la manifestation de l'offre provoque toujours les réactions des autres concurrents et des consommateurs sur le marché. Pour rendre, plus effective, la fonction économique de l'offre, le droit de la concurrence lui rattache certaines conséquences juridiques. Ainsi, étant parmi les conditions primordiales du fonctionnement normal de la concurrence, la loi sanctionne le refus d'un offreur de donner suite à une demande qui vient rencontrer son offre. Il s'agit de ce que le droit du marché désigne par l'expression un peu abrégée de « refus de vente ». Cette sanction concerne aussi bien la vente que la prestation de service. Elle est traitée différemment selon qu'il est opposé au consommateur final ou au stade intermédiaire. Ainsi, l'article 49 et 54 de la loi interdit aux opérateurs les comportements discriminatoires préjudiciables aux consommateurs547(*). Parmi ces comportements figure en premier lieu, le refus de vente. Aux termes de l'article 49, il est interdit de refuser à un consommateur la vente d'un produit ou la prestation d'un service, sauf motif légitime. Dans le même sens, l'article 45 dispose qu'il est interdit à tout producteur, importateur, grossiste ou prestataire de service [...] de refuser de satisfaire aux demandes des acheteurs de produits ou aux demandes de prestations de services, pour une activité professionnelle, lorsque ces demandes ne présentent aucun caractère anormal et qu'elles sont faites de bonne foi548(*).

230. La sanction du refus de vente Contribue à la protection du consommateur. L'obligation légale de donner suite à une demande relative à une offre déjà formulée par un professionnel présente une certaine protection du droit du consommateur de recourir au marché pour obtenir la satisfaction d'une demande correspondante à une offre déjà formulée. Car, refuser de vendre un produit ou une prestation à un consommateur, c'est lui restreindre sa liberté de contracter, surtout lorsqu'il s'agit de produits de marque, de luxe ou de haute technicité dont le marché est naturellement restreint.

231. L'objectif premier est la protection de la logique du marché. Il est certain que ces dispositions présentent une protection directe au consommateur bien que l'objectif de cette protection ne soit pas la préservation des intérêts particuliers d'un partenaire économique, mais l'amélioration de l'efficacité et l'effectivité de son rôle économique pour la préservation du bon fonctionnement de la concurrence. Ainsi, cette protection contre les abus de puissance économique est une protection du marché mais aussi du consommateur. Mais pour ce dernier, elle est reliée à son rôle dans le jeu des mécanismes du marché non pas à la situation de faiblesse qui `est la sienne puisqu'elle sanctionne le comportement de l'offreur disposant d'un pouvoir économique lui permettant de faire échec à la logique du marché qui doit le conduire à réaliser une opération par lui offerte dès qu'elle a été acceptée549(*).

232. Après avoir exposé les dispositions ayant pour but le renforcement du cadre contraignant dans l'exercice de la liberté concurrentielle par la prescription de certains comportements nécessaires au bon fonctionnement de la concurrence et présentant ainsi une certaine lutte contre les abus de puissance économique, nous allons essayer de dégager les dispositions ayant pour but l'interdiction de certains comportements nuisibles au bon fonctionnement de la concurrence et révélant ainsi un exercice abusif du pouvoir économique.

B- L'interdiction de certains comportements nuisibles au bon fonctionnement concurrentiel

233. Prohibition pour la protection du marché et profitant du consommateur. Dans la lutte concurrentielle, les entreprises peuvent procéder à certaines pratiques portant atteinte au bon fonctionnement du marché, notamment certaines techniques de vente550(*) ou certains comportements désorganisant le marché. « Le faire juridique » n'a pas ignoré cette réalité. Ainsi, le législateur, et toujours dans le cadre du renforcement du cadre contraignant de l'exercice de la liberté concurrentielle, a incriminé certains comportements. Ces derniers constituent, dans certains cas, un abus de puissance économique à l'égard d'un partenaire économique, c'est le cas des pratiques agressives de vente. D'autres portent atteinte au marché, et constituent ainsi des pratiques anticoncurrentielles comme les abus de position dominante. Cependant, toutes ces pratiques prohibées contribuent aussi à la lutte contre les abus de puissance économique à l'égard du consommateur. A cet effet, nous allons approcher la question à travers l'énumération de ces pratiques et la confrontation de leurs fonctions, à savoir la protection du marché et du consommateur.

234. La prohibition de la désorganisation du marché et le pouvoir d'achat du consommateur. La transparence sur le marché, exige non seulement l'existence de l'information mais encore l'existence d'une information exacte. Ainsi, la loi toujours dans la poursuite de son but d'instauration des conditions favorables à une économie du marché, prohibe certaines pratiques désorganisant le fonctionnement normal du marché. A savoir la publicité mensongère ou calomnieuse et le stockage clandestin. Le délit de publicité mensongère ou calomnieuse comprend deux éléments constitutifs : le fait d'opérer ou de tenter d'opérer la hausse ou la baisse artificielle des prix des biens ou services ou effets publics ou privés; en employant certains moyens décrits par la loi, à savoir en diffusant dans le public des informations mensongères ou calomnieuses, en jetant sur le marché des offres destinées à troubler les cours ou des suroffres faites aux prix demandés par les vendeurs ou en utilisant tout autre moyen frauduleux551(*). Ces actes illicites ont des conséquences directes sur les consommateurs à côté des atteintes qu'ils portent au fonctionnement normal de la concurrence. Cela étant même justifié par l'accentuation de la sanction lorsque la hausse ou la baisse artificielle des prix concerne des denrées alimentaires, des grains, farines, substances farineuses, boissons, produits pharmaceutiques, combustibles ou engrais commerciaux552(*).

235. La désorganisation du marché peut être provoquée par un autre acte illicite. Il s a' agit du stockage clandestin. cet acte illicite porte atteinte aux intérêts du consommateur par ses effets sur le marché. Il peut s'agir, notamment, des hausses des prix et des pénuries de marchandises. L'article 55 de la loi définit les éléments constitutifs de l'infraction ainsi que les types de stockage clandestin considérés comme illicites553(*). La lecture de cet article révèle les objectifs poursuivis par l'incrimination de ce comportement, de la transparence au contrôle du secteur informel. Néanmoins, comme indiqué ci-dessus, ces dispositions contribuent à la lutte contre les abus de puissance économique et profitent directement aux consommateurs. Ainsi, cette constatation nous amène légitimement à considérer le dispositif pénal sanctionnant le stockage clandestin comme une sorte de protection pénale du consommateur. A côté de la prohibition de certains comportements portant atteinte au bon fonctionnement du marché et profitant aux consommateurs, la loi interdit certains types de vente portant atteinte au bon fonctionnement de la concurrence et en même temps préjudiciables aux consommateurs.

236. La prohibition de certains types de vente et la liberté du consentement du consommateur. Pour attirer le chaland, certains distributeurs offrent des produits ou services en les assortissant d'avantages de prime aux abords alléchants, mais qui ne répondent pas au désir ou à l'intérêt des clients. Il en est des offres de ventes avec primes ou des ventes jumelées ou liées. Ces formes de vente ne permettent pas aux consommateurs d'effectuer leurs choix de produits ou de services en fonction des seuls critères essentiels de qualité et de prix ; la clientèle ne peut faire la distinction entre le prix réel du produit et la valeur de la prime qui est intégrée dans le prix pratiqué ; la transparence du marché fait défaut. Ainsi, après la prohibition du refus de vente, l'article 49 interdit aux professionnels de subordonner la vente d'un produit à l'achat d'une quantité imposée ou à l'achat concomitant d'un autre produit ou d'un autre service aussi de subordonner la prestation d'un service à celle d'un autre service ou à l'achat d'un produit. Pour les mêmes considérations de transparence, l'article 50 de la loi impose l'abstention de toutes faveurs trompeuses554(*), constituant en réalité une gratification apparente555(*).

237. Exception à la prohibition de la vente liée. Cette interdiction est accompagnée de certaines exceptions556(*). Elles sont justifiées par leur faible impact sur le fonctionnement normal du marché, notamment à travers l'influence limitée sur la décision du consommateur ainsi que celles des concurrents. Ces exceptions dénotent encore de l'objet de direction de la loi. Néanmoins, si on considère que le détournement de la loyauté et la violation des droits des consommateurs peuvent prendre la forme sournoise d'attisement de leurs avidités557(*), on peut facilement constater que ces dispositions de la loi profitent directement aux consommateurs. Ainsi, le dispositif sanctionnant ces comportements préjudiciables au consentement du consommateur contribue indirectement à la lutte contre les abus de puissance économique et ce, dans la mesure où leurs sanction n'exige pas l'établissement de la preuve de l'existence d'un pouvoir économique à leur origine. Cependant, la loi prohibe d'autres comportements nuisibles au marché et leur sanction est subordonnée à la détention d'un pouvoir économique, par leurs auteurs. Ce sont les cas de l'abus de domination.

238. La lutte directe contre les abus de puissance économique. Les situations de domination ou de dépendance sont devenues de plus en plus fréquentes558(*), et aussi de plus en plus dénoncées dans la mesure où, souvent l'entreprise disposant d'un pouvoir économique tente d'éliminer un concurrent et de renforcer ainsi sa position en recourant à des moyens autres que ceux qui relèvent de la concurrence par les mérites. Le droit a suivi le mouvement économique559(*). A cet effet, la loi 06-99 contribue à la lutte contre ces phénomènes d'abus de puissance économique par la prohibition de certains comportements nuisibles au bon fonctionnement de la concurrence. Ainsi, l'article 7 de la loi 06-99 prohibe les deux formes d'abus de domination, à savoir l'abus de position dominante et l'abus de dépendance économique560(*). La lecture de cet article confirme que l'abus est un comportement contraire à la concurrence561(*). C'est la domination réalité économique qui est le socle de l'incrimination. Peu importe l'intention dès lors qu'elle fausse la concurrence. Ce n'est pas une faute civile. C'est une infraction objective et non intentionnelle. Elle n'implique aucune culpabilité morale, ou encore intention de nuire.

239. Infraction objective et interprétation téléologique. Cette infraction s'inscrit dans la finalité poursuivie par le droit de la concurrence, qui est de protéger le marché, et par ricochet les consommateurs ou utilisateurs finals. L'abus, ici, est le fait d'agir contre le marché562(*), notamment l'atteinte au bon fonctionnement de la concurrence. Cependant, pour définir l'abus on ne saurait mieux faire que de reproduire la formule célèbre contenue dans l'important arrêt Hoffmann La Roche du 13 février 1979. on peut y lire en effet qu'« il s'agit d'une notion objective qui vise les comportements d'une entreprise en position dominante qui sont de nature à influencer la structure du marché, où, à la suite précisément de la position de l'entreprise en question, le degré de concurrence est déjà affaibli, et qui ont pour effet de faire obstacle, par le recours à des moyens différents de ceux qui gouvernent une compétition normale des produits ou des services sur la base des prestations des opérateurs économiques, au maintien de degré de concurrence existant encore sur le marché ou au développement de cette concurrence ». A partir de cette définition, on peut déduire que l'abus se caractérise par un effet anticoncurrentiel, c'est-à-dire un résultat, le comportement importe peu. Ce qui implique une interprétation téléologique du texte. Ainsi, l'entreprise détentrice d'un pouvoir économique absolue se voit ses responsabilités, à l'égard du marché, s'alourdies, dans la mesure où, plus qu'elle doit d'abstenir à commettre des fautes prédéfinies par la loi, elle doit apprécier auparavant les effets anticoncurrentiels de ses comportements. cela présente une certaine efficacité dans la lutte contre les abus de puissance économique car il manifeste un grand réalisme dans l'appréhension des phénomènes économiques.

240. Ainsi présentée, le renforcement du cadre contraignant par l'encadrement de la liberté de la concurrence contribue à la lutte contre les abus de puissance économique à l'égard du marché et du consommateur mais pas dans la même mesure. Si la protection du marché constitue un objectif direct de la loi 06-99, la protection du consommateur ne le constitue pas563(*). On ne pense pas que les auteurs du projet donnant lieu à la loi 06-99 ont été animés d'une intention consumériste. L'objectif principal et direct de cette loi instrument de politique économique est de mette en place les instruments nécessaires à la direction de l'économie afin d'assurer un fonctionnement correct du processus concurrentiel. Ainsi, les dispositions mises en place par la loi protègent le marché contre les abus de puissance économique et profitent parfois aux consommateurs. Cependant, le renforcement du cadre contraignant dans le cadre de la lutte contre les abus de puissance économique ne se limite pas à l'encadrement de la liberté de la concurrence. En effet, la liberté contractuelle n'a pas échappé aux dispositions de l'ordre public concurrentiel.

§2 - LE RENFORCEMENT DU CADRE CONTRAIGNANT DANS L'EXERCICE DE LA LIBERTE CONTRACTUELLE

241. Une autre contrainte au principe de l'autonomie de la volonté. Le renforcement du cadre contraignant dans l'exercice de la liberté contractuelle signifie que l'autonomie de la volonté sera encore plus limitée par de nouvelles contraintes. Ces dernières peuvent concernées la protection de la concurrence comme celle d'un partenaire économique. Ainsi, plus que jamais les rédacteurs de contrats devront être attentifs aux exigences du droit, et veiller à ne pas les méconnaître, sous peine de s'exposer à l'annulation de leurs stipulations. Il s'agit d'un principe très simple, rappelé par plusieurs articles du D.O.C., notamment l'alinéa 2 de l'article 62 'article564(*). En effet, la liberté contractuelle, en tant qu'elle exprime la puissance de la volonté, s'arrête là où l'ordre public commence565(*). La prohibition des ententes, des abus de position dominante, la prédétermination du contenu du contrat, relève de l'ordre public, comme de très multiples autres règles, et les contractants qui les méconnaissent voient leur contrat anéanti. Rien de nouveau, rien de choquant. La liberté contractuelle n'a jamais été absolue, elle peut se heurter à des règles générales sans que l'économie cesse d'être libérale566(*). La perspective est nette parce qu'elle ménage la figure d'un contrat comme sphère de règles particulières dessinées par la volonté des contractants, simplement limitée, par exemple, par la prohibition extérieure et subie des comportements anticoncurrentiels, issue de la sphère supérieure de l'ordre public économique. Le principe est acquis et il convient de vérifier dans quelle mesure ce renforcement du cade contraignant de l'exercice de la liberté contractuelle contribue à la lutte contre les abus de puissance économique, d'abords par la prohibition de certains comportements nuisibles au bon fonctionnement concurrentiel (A), et ensuite par l'immixtion dans le contenu du contrat (B).

A- La liberté contractuelle limitée par la prohibition de comportements nuisibles au bon fonctionnement de la concurrence

242. Le contrat peut être instrument d'abus de puissance économique. Le contrat peut servir d'instrument pour des pratiques abusives Ces pratiques peuvent, d'abords, être individuelles et se manifestent, notamment au niveau de la fixation du prix pratiqué à l'égard du marché. Ensuite, elles peuvent être facilitées par une concentration, de fait, de la puissance économique, par laquelle les contractants facilitent leur action à l'égard du marché comme à l'égard de ses concurrents. le faire juridique n'a pas ignoré cette réalité. Ainsi, la loi 06-99 a modifié le contenu des contraintes que le droit de la concurrence fait peser sur la liberté contractuelle. L'idée de liberté qui inspire les auteurs de la loi les a conduits à réprimer les abus que les agents économiques seraient tentés d'en faire. L'effet essentiel des dispositions de cette loi est d'aménager ou de réaménager le contenu de la notion d'ordre public et par là même l'illicéité de l'objet du contrat. Cependant, si la loi réprime ces abus manifestés dans des rapports contractuels, il n'en est pas moins, qu'ils présentent des difficultés d'application qu'il importe de les signaler.

243. L'encadrement de la liberté contractuelle dans la détermination libre du prix dans le contrat. L'essentiel de la liberté réside dans la liberté des prix. Néanmoins, l'abus de puissance économique peut se manifester à travers l'action sur le prix ce qui peut avoir des conséquences graves sur le bon fonctionnement de la concurrence. Cela peut se traduire notamment, dans les contrats de distribution, contenant une clause par laquelle l'une des parties agit abusivement sur la détermination du prix de revente pratiqué par son cocontractant. La loi 06-99 n'a pas ignoré cette réalité portant atteinte au principe de la liberté des prix et de la formation de ces derniers par le libre jeu de l'offre et de la demande. En effet, elle sanctionne le fait d'imposer directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale567(*). Par ailleurs, la liberté contractuelle comprend aussi la liberté de déterminer librement le prix de vente dans le contrat. Or, une entreprise disposant d'une puissance économique, notamment une capacité financière très importante peut abuser de cette puissance par une stratégie d'élimination basée sur une revente à perte. C'est le cas par exemple des prix d'appel que permet la revente à perte préjudicie aussi bien aux consommateurs qu'aux concurrents du distributeur qui la met en oeuvre568(*). A cet effet, et dans le même ordre d'idée, la loi 06-99 a, dans son article 7569(*), renforcé le cadre contraignant de l'exercice de la liberté contractuelle dans la détermination du prix par la prohibition de la revente à perte570(*).

244. L'encadrement de la liberté contractuelle par la sanction des clauses renforçant le pouvoir du marché. Parfois les contractants usent de leurs libertés contractuelles pour prévoir des clauses par lesquelles ils concentrent leurs puissances économiques. Leur but et de disposer d'un pouvoir de marché par lequel ils seront capables d'agir facilement sur le bon fonctionnement concurrentiel. Cette situation n'échappe plus au législateur. A cet effet, la loi 06-99 a prévu un certain nombre d'atteintes à la liberté contractuelle par le biais de l'illicéité de l'objet et de la cause modifiée en fonction du réalisme économique. Ainsi, l'article 9 de la loi 06-99 rappelle que tout engagement, convention ou clause contractuelle se rapportant à une pratique anticoncurrentielle est nul571(*). Ces pratiques anticoncurrentielles concernent les ententes quelle que soit leur forme lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher de restreindre ou de fausser le jeu normal de la concurrence sur un marché. Ainsi, les pratiques contractuelles de droit commun relèvent en principe du contrôle des ententes. Ce contrôle est opéré soit par le conseil de la concurrence soit par les tribunaux. Le caractère anticoncurrentiel d'une clause ou d'une convention peut être relevé par le juge comme par le régulateur. Cependant, un problème peut apparaître. On peut certes être tenté d'évoquer la difficulté née du fait que les décisions des autorités de la concurrence n'ont pas en la matière autorité de chose jugée et qu'on peut imaginer un tribunal estimant que ne justifie pas une nullité une clause préalablement jugée anticoncurrentielle par le Conseil de la concurrence572(*). D'autres difficultés peuvent être apparues. Ainsi, la chambre commerciale de la Cour suprême a rappelé dans un arrêt du 02 juin 2004 que l'illicéité d'un engagement anticoncurrentiel ne peut être sanctionnée d'une autre façon que la nullité de la clause573(*). Ledit arrêt n'a précisé ni la nature de cette nullité ni sa portée. De ce fait, deux difficultés s'imposent : la première est de déterminer exactement la nature et la portée de la nullité ; la deuxième est de comprendre ces notions d'objet ou d'effet anticoncurrentiel, condition de nullité de la clause ou du contrat.

245. La nature de la nullité. Radicalement le droit de la concurrence est guidé par l'ordre public de direction574(*). Lorsque le droit français de la concurrence pourchasse en tant que tel l'état de dépendance économique, c'est plutôt une perspective d'ordre public de protection. Faut-il en tirer des conséquences et songer notamment à des nullités relatives ? Nous ne pensons pas car même la protection d'un partenaire dépendant contribue à la protection de la concurrence sur le marché. Le problème ne se pose pas en droit marocain de la concurrence, car notre droit ne sanctionne que les pratiques ayant pour objet ou pour effet une atteinte à la concurrence575(*). En effet, ici, puisque le droit de la concurrence ne protège pas les concurrents mais la concurrence, c'est-à-dire le marché, si l'on utilise la grille d'analyse de l'ordre public, le droit de la concurrence serait nécessairement d'ordre public de direction576(*). Cela confirme que l'ordre public concurrentiel protégé par la loi 06-99 est un ordre public économique de direction. Ainsi, si nous prenons l'hypothèse d'un ordre public concurrentiel de direction, la nullité absolue s'impose577(*).

246. La portée de la nullité. La seconde difficulté tient à l'ampleur de la nullité, qui va du contrat à la clause578(*). Le plus souvent, seule la clause est annulée, par une nullité ciblée579(*), une sorte de nullité absolue au laser580(*). Il peut s'agir plutôt de sanctionner le bénéficiaire de la clause à exécuter un contrat dont l'avantage économique a pour lui disparu. Il peut s'agir encore de tenir compte de la complexité contractuelle et du nouveau souci du contrat d'organiser le dépassement de ses propres difficultés581(*). Le droit de la concurrence peut aller plus loin, en opérant une sorte de « laser sur laser ». Il s'agit alors franchement de réécrire la clause pour la redessiner selon les contours qu'elle aurait dû avoir pour satisfaire la prohibition des comportements anticoncurrentiels582(*). Par exemple, plutôt que d'effacer une clause anticoncurrentielle pour une durée excessive, le juge pourrait en réduire simplement l'efficacité dans le temps, pour lui donner la juste durée, supportable parce que proportionnée à la concurrence. Cela pourrait se justifier par l'idée que les parties sont toujours supposées vouloir se conformer au droit. Ainsi, l'autorité de la concurrence reformule une clause licite, telle que la rationalité juridique des parties aurait nécessairement voulu l'exprimer583(*). Mais l'argument souffre de sa propre puissance car il faudrait alors appliquer le raisonnement à tous les vices du contrat et le système n'est pas prêt à un pouvoir général du juge de réécrire les contrats sur une, si faible, présomption584(*). Un argument plus fort consiste à poser que les parties doivent pouvoir déployer leur liberté dans le plus grand espace possible. Dès lors, il faut mais il suffit de raboter l'excès de cette liberté pour qu'un équilibre optimal soit trouvé entre liberté contractuelle et marché concurrentiel.

247. L'illicéité de l'objet et de la cause modifiée en fonction du réalisme économique. Pour donner plus d'efficacité à la lutte contre les abus de puissance économique facilités par des clauses contractuelles, l'objet et la cause du contrat prennent une nouvelle conception adaptée au réalisme économique. Ainsi, comme le fait remarquer M. Mousseron585(*) « le mot objet correspond au concept d'« objectif » et par conséquent à la notion juridique de cause ». Il s'agit bien entendu de la cause du contrat, du motif déterminant. Cependant le propos demande à être nuancé car le droit de la concurrence semble s'être inspiré de la notion civiliste de cause tout en lui donnant une portée plus objective et matérialiste. En effet, en droit commun des obligations, la cause est considérée comme une prise en compte des motifs subjectifs et par là même une percée de la morale dans le droit586(*). Dans la conception de la loi 06-99, c'est l'effet objectif d'atteinte à la concurrence qui est visé et non l'état d'esprit des contractants. Aussi, il n'est pas raisonnable de transposer aux pratiques anticoncurrentielles les règles dégagées à propos de la cause subjective et notamment l'exigence de l'entrée dans le champ contractuel du motif déterminant. Cette exigence en droit commun a pour but de permettre le maintien du contrat au profit du contractant ignorant des mobiles de son partenaire ; un tel souci de sécurité contractuelle est exclu de l'esprit du droit de la concurrence.

248. Malgré ces difficultés qu'on vient d'exposer, le droit de la concurrence avec son nouvel esprit et son pragmatisme, et avec une certaine adaptation aux réalités économique, est en mesure de lutter contre les abus de puissance économique. L'expérience française en atteste. Certes, l'ignorance de la loi 06-99 par les tribunaux, par la défense et même par les autorités en charge de son application constitue le vrai obstacle à la préservation d'une concurrence effective et saine dans nos marchés nationaux. Ainsi, la lutte contre les abus de puissance économique par la prohibition de certains comportements anticoncurrentiels dans l'exercice de la liberté contractuelle n'est pas un instrument efficace dans notre droit positif. Cela dit, qu'on est-il du renforcement du cadre contraignant dans l'exercice de la liberté contractuelle par l'immixtion dans le contenu du contrat.

B- La liberté contractuelle limitée par l'immixtion dans le contenu du contrat

249. Généralités. L'immixtion dans le contenu du contrat et l'un des instruments privilégiés par le législateur, à l'instar des contrats du travail, du bail, d'assurance... En effet, dans la lutte contre les abus de puissance économique dans les contrats de consommation, l'intervention du législateur français prend deux formes essentielles. D'abords, d'une manière préventive en imposant certaines stipulations dans le contrat, c'est-à-dire en limitant la liberté contractuelle du professionnel ; ensuite, d'une manière curative, en interdisant certaines clauses qualifiées d'abusives.

250. Prédétermination du contenu du contrat, arme préventive. Afin de lutter contre les abus de puissance économique des professionnels à l'égard des consommateurs, le législateur peut parfois chercher à fixer par avance le contenu des contrats passés entre professionnels et consommateurs. Le contrat est alors prédéterminé dans son ensemble, la liberté des parties se bornant à décider de le passer ou non. Le contrat reste donc un contrat d'adhésion, pré-rédigé. Mais au lieu que ce soit l'une des parties au contrat, c'est-à-dire le professionnel, qui en détermine le contenu, ce sont les pouvoirs publics voire les organismes professionnels et de protection du consommateur, par des accords collectifs587(*). Ainsi, Il arrive au législateur d'intervenir pour imposer le contenu du contrat, afin de protéger la partie la plus faible. Cette législation étant d'ordre public, chacune des parties voit donc ses obligations fixées par la loi elle-même, les clauses contraires étant frappées de nullité. Et s'agissant des clauses imposées par le législateur, la législation sur les clauses abusives est a priori sans objet. Cette fixation impérative du contenu du contrat concerne plusieurs types de conventions, la plupart d'une certaine gravité ou présentant des risques pour le consommateur588(*). Le législateur va dans ces cas parfois jusqu'à imposer des modèles types de contrats589(*).

251. Protection contre les clauses abusives, arme curative. La législation sur les clauses abusives constitue une arme essentielle dans la lutte contre les abus de puissance économique. Compte tenu de l'état actuel de notre droit positif, le droit commun offre, il est vrai, le seul recours590(*). Cependant, même en la présence d'une législation spécialisée en la matière, l'utilité du droit commun n'est toutefois pas totalement à exclure. Du reste les influences réciproques sont nombreuses591(*). Ainsi, en France, la question des clauses abusives est certainement l'une de celle qui a connu le plus grand nombre de transformations depuis son adoption en 1978, dans un domaine qui n'en est pourtant pas avare. La première loi en la matière est la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 qui prévoyait des dispositions de protection contre les clauses abusives tout en confiant le rôle de déterminer ces clauses au pouvoir réglementaire. Celui-ci ne s'étant guère préoccupé de la question puisqu'en treize ans, un seul décret avait été adopté592(*), c'est finalement le juge qui remédia à cette carence. Soutenue par une partie de la doctrine et après quelques arrêts précurseurs593(*), la Cour de cassation reconnut en effet le pouvoir aux tribunaux de déclarer une clause abusive, prenant appui sur l'article 35 de la loi594(*).

252. Champ d'application large. L'article L. 132-1 du Code français de la consommation donne à la lutte contre les clauses abusives un champ très large, tant en ce qui concerne les personnes que le support de ses clauses abusives. Ainsi, il vise les contrats passés entre un professionnel et un non-professionnel ou un consommateur595(*). C'est cette notion de non-professionnel qui a donné lieu à toutes les "circonvolutions jurisprudentielles"596(*). Ainsi la jurisprudence française a adopté successivement une définition étroite597(*) puis extensive des hypothèses où la législation relative aux clauses abusives pouvait être invoquée598(*), avant d'en venir au critère du rapport direct599(*). Ce critère du rapport direct conduit en général à écarter l'application de la législation sur les clauses abusives, lorsque le contrat a été conclu pour satisfaire à des besoins professionnels600(*).

253. Champ d'application quant à la forme et au support du contrat. L'alinéa 2 de l'article 15601(*) quand à lui prévoit que les dispositions relatives aux clauses abusives sont applicables "quels que soient la forme et le support du contrat". Là encore, le domaine d'application est entendu de façon extensive, ce qui à cet égard apparaît entièrement justifié pour une protection efficace du consommateur. En effet, il ne serait pas logique d'exclure un contrôle et une sanction éventuelle au seul motif que la clause figure ailleurs que sur l'instrumentum602(*). De plus, dans la plupart des cas, le consommateur est encore moins attentif à ce type de document qu'il s'agisse de tickets ou de bons de commande ou devis, par exemple, qu'à l'écrit qu'il signe lui-même. Surtout, l'article 15 ne limite pas le champ d'application de cette législation aux clauses qui n'ont pas fait l'objet d'une négociation, standardisées. Ainsi, cette législation profite également à celles qui ont été négociées librement entre les parties.

254. Définition des clauses abusives. L'article 15 du projet de loi susvisé, et à l'instar de l'article L. 132-1 du Code français de la consommation, définit les clauses abusives, comme celles "qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligationss des parties au contrat". En effet, contrairement à la définition française antérieure à la loi de 1995, il n'est plus exigé que la clause soit le résultat d'un abus de puissance économique de la part du professionnel. L'existence d'un déséquilibre significatif est un élément a priori objectif : même si c'est concrètement toujours le cas, le fait que le consommateur soit dans une situation inégalitaire, l'empêchant de négocier le contrat, n'est plus pris en considération dans cette définition. Cette disparition du critère de l'abus de puissance économique ainsi que le remplacement du critère de l'avantage excessif par celui du déséquilibre significatif sont généralement considérés comme insignifiants par la doctrine603(*). En effet, antérieurement à 1995, l'abus était présumé dès lors que le professionnel avait usé d'un contrat d'adhésion pour recueillir le consentement du consommateur604(*). Or c'est essentiellement dans ce type de contrats que figurent des clauses abusives. Ce lien entre le caractère d'adhésion du contrat et les clauses abusives n'est au demeurant plus fait par la jurisprudence française : le fait que la clause figure dans un contrat d'adhésion ne suffit pas à la faire qualifier de clause abusive605(*).

255. Appréciation du caractère abusif des clauses. - Le texte ajoute des conditions quant à l'appréciation du caractère abusif des clauses d'un contrat. En premier lieu, celui-ci s'apprécie au moment de la conclusion du contrat, par référence à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, par rapport à l'ensemble des clauses du contrat, voire celles contenues dans un autre contrat, lorsque la conclusion ou l'exécution de ces deux contrats dépendent l'un de l'autre606(*). À cet égard, deux situations doivent être distinguées. Lorsque le caractère abusif d'une clause est invoqué à propos d'un contrat déjà conclu, l'appréciation se fera in concreto, en fonction de la situation du consommateur et des conditions de conclusion du contrat. Cela paraît signifier au demeurant que, selon les cas, une même clause pourra être considérée comme abusive ou non. Lorsqu'en revanche le caractère abusif de la clause est invoqué dans le cadre de l'action en suppression, l'appréciation ne pourra se faire qu'in abstracto, par rapport à un consommateur normalement diligent, et en fonction des circonstances habituelles de passation du contrat607(*).

256. L'écartement de la lésion du champ d'application de la législation sur les clauses abusives. En second lieu, et conformément à l'article 17 du projet, l'appréciation du caractère abusif d'une clause ne peut porter sur la définition de l'objet principal de contrat, ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert, "pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible"608(*). Autrement dit, on considère traditionnellement que la législation sur les clauses abusives ne peut avoir pour objet de sanctionner la lésion dans le contrat609(*). Toutefois, en France, et depuis l'ordonnance du 23 août 2001, c'est qui a été repris par l'article 17 du texte marocain, la question mérite d'être posée. C'est dans ce cadre en effet qu'a été ajoutée la référence au caractère clair et compréhensible de la clause. En effet, c'est faire ici rejaillir la forme sur le fond. Cela permet en même temps par le biais de ce contrôle de sanctionner des prestations dont le prix apparaîtrait disproportionné. On introduirait par là une lésion fondée sur un "déséquilibre significatif" entre la valeur du bien ou du service fourni et le prix payé par le consommateur610(*). La lutte contre les clauses abusives prendrait une dimension nouvelle611(*).

257. Elimination des clauses abusives. L'élimination des clauses abusives est susceptible d'emprunter deux voies : l'une a posteriori consistant dans la possibilité pour un consommateur d'invoquer le caractère abusif d'une clause, à l'occasion d'un litige l'opposant à son cocontractant professionnel ; l'autre préventive, passe par l'action collective des associations de consommateurs612(*). Ainsi, L'article 19 du projet susvisé prévoit que "les clauses abusives contenues dans les contrats entre producteurs et consommateurs sont considérées nulles et réputées non écrites". Le deuxième alinéa ajoute que cette nullité est toutefois limitée à la clause, lorsque le contrat peut subsister sans elle. Cette sanction apparaît parfaitement adaptée : elle va dans le sens de l'intérêt du consommateur qui entend la plupart du temps maintenir le contrat ; elle sanctionne le professionnel qui sera obligé de l'exécuter. En même temps elle est insuffisante pour lutter de façon efficace contre les pratiques des professionnels. En effet, d'une part, elle suppose que le litige entre professionnel et consommateur soit porté devant un juge, ce qui n'est pas toujours le cas. D'autre part, la décision du juge n'a, sur ce point, que l'effet relatif de la chose jugée. De sorte que le professionnel pourra toujours la maintenir, en comptant sur l'ignorance des autres consommateurs613(*). Pour plus d'efficacité, cette première voie devait donc être complétée par l'action collective des associations de protection des consommateurs614(*).

Section II - La lutte contre les abus de puissance économique par la restauration des conditions d'un débat équilibré

258. Un débat déséquilibré. Comme on l'a déjà démontré, l'infériorité juridique du consommateur aggrave sa faiblesse. Elle a pour origine un déséquilibre profond entre l'entreprise qui attache de l'importance à l'aspect juridique de la relation de consommation et qui est à même de bénéficier de conseils, et le consommateur qui ne se soucie généralement pas de ce qu'il ressent comme des « formalités ». Et même un consommateur sensible aux choses du droit ne disposera pas toujours de connaissances lui permettant de mesurer le sens et la portée du contrat qui lui est proposé, dont, de toute façon, on ne lui permettra pas de discuter les termes. Et pour couronner le tout, le consommateur sera aussi dans une position d'infériorité s'il entend par la suite faire valoir ses droits : le coût de l'action en justice sera le plus souvent sans proportion avec le montant de sa réclamation615(*).

259. Deux approches : individuelle ou collective. La nécessité de protection du consommateur n'est discutée par personne, et surtout pas par les entreprises qui cherchent à le satisfaire véritablement et durablement pour s'assurer de sa fidélité. Comme il est certain, comme on l'a déjà démontré616(*), que les mécanismes du droit commun ne suffisent pas à assurer cette protection, il existe un accord sur la nécessité de l'instituer ; mais on s'interroge sur les moyens qu'il convient d'employer pour cela. Puisqu'il s'agit de rétablir un équilibre dans une relation marquée par l'inégalité, deux moyens sont envisageables : confier à la loi le soin d'élaborer des règles protectrices, ou attendre le regroupement des consommateurs, l'établissement d'un nouveau rapport de force qui soit équilibré et conduise donc à une négociation réelle de puissance à puissance617(*). On estime que la deuxième voix est naturellement la plus efficace, car par la nature des choses, c'est le pouvoir qui arrête le pouvoir. Mais l'expérience montre que le marocain n'a pas la fibre collective ce qui rend l'interventionnisme légale inéluctable pour la lutte contre les abus de puissance économique à l'instar de l'expérience française en la matière. Cependant, la loi adopte l'approche individuelle, notamment par des instruments ayant pour but la préservation du consentement de la partie faible dans les rapports contractuels individuels (I). Néanmoins, l'approche collective n'est point ignorée par le législateur. Ainsi, le développement social est accompagné d'une prise de conscience chez la société civile que la loi, d'une manière regrettable, persiste dans son encadrement. Cette prise de conscience manifeste les prémices d'un regroupement des consommateurs dans des associations capables de négocier d'une façon collective (II).

§1 - LA PRESERVATION DU CONSENTEMENT DE LA PARTIE FAIBLE DANS LES RAPPORTS INDIVIDUELS

260. Inadaptation des vices du consentement. Contracter, ce n'est pas seulement consentir, c'est consentir en pleine connaissance de cause et librement618(*). La protection de ce consentement à contracter est traditionnellement assurée en droit par le jeu des vices du consentement619(*). Cependant, ces remèdes qui pouvaient apparaître suffisants dans le cadre d'une "société rurale, mesurée et lente"620(*), se révèlent inadaptés aux conditions actuelles dans lesquelles sont passés les contrats621(*). Ainsi, plutôt que de débusquer à posteriori les vices de consentement, il serait préférable de développer en amant une véritable politique d'information des contractants Le législateur français a donc cherché à protéger le consentement du consommateur par des mesures a priori, visant à éviter que le consentement du consommateur ne soit surpris par le professionnel. Ces mesures sont destinées à garantir les deux conditions mises à la pleine efficacité du consentement : il doit être libre et éclairé.

A- L'information pour l'éclairement du consentement

261. Généralités. Comme on l'a déjà indiqué, le droit commun des contrats repose sur le postulat que les parties étant à égalité, ont négocié leur convention et que par conséquent, chacune a une parfaite connaissance à la fois de ses obligations et de celles de son cocontractant622(*). Or, à cet égard encore, ce postulat s'avère parfois erroné, lorsque la relation se noue entre un professionnel et un consommateur623(*). Dans la plupart des cas, le contrat aura été pré-rédigé par le professionnel, le consommateur se contentant de le signer, sans avoir la possibilité ni les capacités de véritablement le négocier. Ainsi, et afin de s'assurer que ce dernier a, à tout le moins, pris connaissance de son contenu, l'obligation d'information, admise en droit commun par la jurisprudence française624(*), a été consacré par la loi625(*). Ainsi, le législateur français a consacré quelques dispositions à l'obligation d'information due par le professionnel au consommateur626(*). Dans les mêmes lettres, au Maroc, le projet de loi sur les mesures de protection des consommateurs prévoit la même obligation.

262. L'obligation générale d'information. L'article 3 du projet de loi susvisé, à l'instar de l'article L. 111-1 du code français de la consommation prévoit une obligation générale d'information627(*). Cette obligation d'information mises à la charge du professionnel envers le consommateur est à la fois de nature précontractuelle et contractuelle, selon qu'elles doivent être fournies avant ou au moment de la conclusion du contrat628(*). Ainsi, l'obligation de l'article 3 est a priori de nature précontractuelle, tandis que les suivantes, destinées à informer le consommateur sur l'exécution du contrat présenteraient plutôt un caractère contractuel. Toutefois, l'article L. 111-1 est souvent appliqué par les tribunaux français dans des cas où le contrat est déjà formé629(*). Le débiteur de l'obligation est, à la lettre du texte, le professionnel vendeur de biens ou prestataire de services. Le contenu et les modalités d'exécution de l'obligation d'information sont en revanche définis de façon très vague. L'obligation porte en effet sur les "caractéristiques essentielles du bien ou du service". C'est donc au juge qu'il appartient de dire si la lacune invoquée porte ou non sur ces aspects630(*). De même, les modalités d'exécution de l'obligation ne sont pas détaillées. Elle peut être exécutée par voie d'affichage, d'étiquetage, de marquage du produit, voire sur l'exemplaire des conditions générales du contrat Mais également par une description du produit, éventuellement assortie de photographies, dans le cas de la vente à distance631(*). Par ailleurs, l'une des carences de l'article 3 du projet de loi marocain susvisé réside dans le fait qu'il ne prévoit pas de sanctions spécifiques au non-respect de cette obligation. Sur le plan civil, en cas de méconnaissance de cette obligation et faute de sanctions prévues, on est renvoyé au droit commun. Si le manquement à l'obligation d'information a été à l'origine d'un vice du consentement, le contrat pourra alors être annulé sur ce fondement632(*). Cela peut également être une inopposabilité des clauses du contrat, spécialement lorsque le consommateur a, du fait du caractère défectueux de l'information, méconnu ses propres obligations634(*).

263. Les obligations spéciales d'information. L'obligation d'information peut porter également sur le service après-vente635(*), sur les prix, les limitations éventuelles de la responsabilité contractuelle et les conditions particulières de la vente 636(*). L'inspiration de ce texte est différente de celle de l'obligation d'information prévue par l'article 3 du projet précité, 111-1 du code français de la consommation. Alors que l'article 111-1 est issu d'une loi destinée à la protection du consommateur, l'article 111-3 - article 10 du projet de loi - est lui, issu des considérations de protection du marché637(*). En outre, l'article 12 du projet de loi - L. 114-1 du Code français de la consommation - prévoit que lorsque la livraison du bien ou la fourniture du service n'est pas immédiate, le professionnel doit informer le consommateur de la date limite à laquelle doit intervenir cette livraison ou cette prestation. Cette obligation existe dès lors que le prix convenu excède des seuils fixés par voie réglementaire638(*). En revanche, il n'indique aucune sanction si le professionnel omet de délivrer cette information. La jurisprudence française a admis la possibilité pour le consommateur de dénoncer le contrat, lorsqu'il avait attendu pendant un délai raisonnable. Ces obligations d'information sont complétées par des règles tenant à la forme que doit revêtir cette information.

264. Obligations tenant à la forme du contrat. L'information du consommateur passe non seulement par l'exigence pour le professionnel de fournir certains renseignements au consommateur mais également par des prescriptions qui touchent à la présentation, autrement dit à la forme du contrat.639(*). Ainsi, dans nombre de cas, le législateur est venu prévoir l'obligation d'un écrit parfois même avant la conclusion du contrat, dont il prévoit en outre les mentions, voire "la présentation"640(*).

265. Exigence d'un écrit. L'écrit peut être exigé soit pour l'offre soit pour le contrat lui-même. Ainsi, plusieurs contrats doivent faire l'objet d'une offre écrite641(*). D'autres exigent un contrat écrit. Ainsi, il est encore plus fréquemment exigé que le contrat lui-même soit passé par écrit lorsqu'il lie un professionnel et un consommateur642(*). Cependant, l'instrumentum ne sert plus seulement à constater l'engagement et à fixer les obligations respectives des parties ; il sert également à donner au consommateur un certain nombre de renseignements, y compris à caractère légal. Les législations modernes recourent ainsi de plus en plus à ce qu'il est convenu d'appeler un formalisme informatif, qui doit obéir à certaines règles de présentation643(*). Il s'agit en effet dans la plupart des cas d'engagements présentant une certaine gravité, susceptibles de mettre des obligations lourdes ou de longue durée, à la charge du consommateur644(*). Cependant, la technique la plus fréquemment utilisée par le législateur consiste à exiger que certaines mentions figurent dans l'écrit, souvent les mêmes : identité des parties, objet du contrat et obligations des parties. Ainsi, dans le cas de l'offre préalable de crédit mobilier ou immobilier, on retrouve globalement les mêmes exigences : identité des parties, nature objet et modalités du contrat...645(*). S'y ajoutent des mentions particulières pour le crédit immobilier correspondant à la durée et au montant du prêt646(*).

266. L'obligation de conseil. Par ailleurs, pour le juge français, même si le respect de ces exigences est de nature à satisfaire à l'obligation spéciale d'information mise à la charge du professionnel, il ne le dispense pas de son obligation de conseil647(*). De plus, les professionnels ont l'obligation d'adapter les modèles qu'ils utilisent à l'évolution législative, même si l'administration n'a pas procédé aux modifications qui lui incombent. La jurisprudence met donc à la charge des professionnels l'obligation de pallier les carences du pouvoir réglementaire, obligation d'autant plus lourde que la sanction est sévère, puisque est prononcée une déchéance du droit aux intérêts648(*).

267. Mentions manuscrites. Le législateur français ne semble, toutefois, pas parfaitement persuadé que le consommateur lira le contrat, fût-il rédigé de façon lisible. Et pour s'en assurer, il lui arrive d'exiger que ce consommateur recopie certaines mentions649(*). Dans le cadre du droit de la consommation, ces exigences sont plus fréquentes et la sanction peut aller jusqu'à la nullité de l'acte. L'exemple le plus typique est donné par le cautionnement dit "Neiertz"650(*). Ce cautionnement concerne les cas où une personne physique se porte caution d'un consommateur souscrivant un prêt à la consommation ou un prêt immobilier. Elle doit alors recopier une mention - prévue par le texte lui-même, à l'exclusion de toute autre -, "décrivant" en quoi consiste un engagement de caution. Si le cautionnement donné est solidaire, la personne physique doit également recopier une définition, donnée par la loi651(*). Faute pour la caution d'avoir recopié la mention prévue par l'article L. 313-7 du même code, la nullité du cautionnement est encourue, sans que les juges aient un pouvoir d'appréciation sur ses éventuelles compétences652(*).

268. Mentions manuscrites et crédit affecté. On retrouve les mêmes exigences à propos d'autres contrats de crédit. Ainsi, s'agissant de ceux qui portent sur un crédit affecté, le consommateur peut exiger la livraison ou la fourniture anticipées du bien ou du service. Dans ce cas, il accepte que son délai de rétractation soit raccourci. L'article R. 311-8 du Code de la consommation vient donc prévoir que le consommateur doit "apposer sur le contrat une demande rédigée de sa main" dans les termes précisés par ce texte, complété par la mention suivant laquelle il reconnaît avoir été informé du fait que cette livraison ou prestation réduira le délai. Toutefois ce dernier ne peut en tout état de cause être inférieur à trois jours. Il s'agit de protéger le consommateur contre les pressions du professionnel, lui faisant miroiter les avantages qu'il y aura pour lui à voir le contrat exécuté dans les plus brefs délais. La sanction du non-respect de cette exigence, y compris s'agissant des termes de la mention, n'est pas très claire. Après avoir paru considérer qu'elle consistait dans l'absence de réduction du délai de rétractation653(*), la Cour de cassation a pu juger qu'il y avait une cause de nullité de la vente654(*).

269. Sanctions des règles de forme. Les sanctions du non-respect des règles de forme édictées par le droit de la consommation sont de deux ordres. La plupart du temps, il s'agira de sanctions civiles. Ces sanctions civiles sont parfois complétées par des sanctions pénales, lorsque le législateur a estimé que les premières ne seraient pas suffisamment dissuasives. Concernant les sanctions civiles, la question est de savoir si l'écrit est exigé ici ad probationem ou ad validitatem et quelle est la sanction du non-respect des exigences de forme s'agissant de son contenu. L'exigence d'un écrit est dans certains cas posée ad validitatem. Ainsi en est-il s'agissant du contrat de crédit immobilier ou mobilier. Cela vaut aussi lorsque l'une des mentions prévues fait défaut655(*). Parfois le non-respect des exigences de forme est sanctionné par l'inefficacité de la clause. Il en va ainsi d'ailleurs généralement de toutes les clauses qui n'auraient pas été portées à sa connaissance. Cela relève d'une exigence de bonne foi en droit commun ; s'agissant des relations de consommation, une clause ayant pour effet ou pour objet de constater l'adhésion du consommateur à des stipulations dont il n'a pas eu effectivement l'occasion de prendre connaissance avant la conclusion du contrat pourrait être regardée comme abusive.

270. Sanctions pénales. S'agissant des sanctions pénales, il est une caractéristique du droit de la consommation de faire un recours fréquent à la sanction pénale pour imposer aux professionnels certains comportements, dans la mesure où les seules sanctions civiles pourraient ne pas apparaître suffisamment dissuasives. Ces dernières, sous réserve de la question des clauses abusives, supposent en effet une action en justice de la part d'un consommateur. Or celui-ci sera la plupart du temps dissuadé de l'engager, en raison du coût et de la durée de la procédure. Les poursuites pénales en revanche peuvent être le fait des services de l'Administration voire d'associations de consommateurs, les coûts étant moins élevés. En outre, il demeure qu'une condamnation pénale présente un caractère infamant que n'a certes pas une condamnation civile. On voit donc fleurir les dispositions relatives aux contrats de consommation qui sont assorties d'une sanction pénale.

271. Autres sanctions plus adaptées. Des sanctions particulières sont parfois prévues dans certains contrats. Il en va ainsi de la déchéance du droit aux intérêts. Il s'agit là d'une sanction grave, véritable peine privée, qui frappe notamment le prêteur qui n'a pas respecté les obligations prévues en matière de crédit mobilier ou immobilier656(*). La déchéance ainsi prononcée peut être totale ou partielle.

272. Ainsi, présentés l'arsenal juridique prévu pour l'information du consommateur dans le but général de l'instauration des conditions d'un débat équilibré, peut contribuer efficacement à la lutte contre les abus de puissance économique. Cette efficacité est renforcée, comme nous l'avons vu, par des sanctions civiles et pénales plus adaptées aux phénomènes de la consommation. Cela dit, et toujours dans le cadre de la restauration des conditions d'un débat équilibré, d'autres instruments sont prévus par le droit de la consommation, pour protéger la liberté du consommateur contre les pressions des professionnels. Ainsi, il convient de les présenter afin d'apprécier leurs efficacité dans la lutte contre les abus de puissance économique.

B- Les délais de réflexion pour la liberté du consentement

273. Les délais de réflexion complémentaire à l'obligation d'information. Pour donner plus d'efficacité à la lutte contre les abus de puissance économique lors de la formation du contrat, l'obligation d'information est naturellement à mettre en relation avec l'octroi de délais de réflexion ou de rétractation. On espère que, dans le délai mis à sa disposition, le consommateur aura le loisir de lire l'exemplaire du projet ou du contrat qui lui a été remis, de manière à donner un consentement éclairé. Ainsi, l'un des moyens les plus utilisés par les législations consuméristes pour protéger la liberté du consentement du consommateur est l'octroi d'un délai au cours duquel le consommateur aura tout loisir de réfléchir aux avantages et inconvénients que le contrat présente pour lui. On estime que ce dernier, qui a pu être tenté par l'argumentaire développé par le professionnel, retrouvera sa liberté de réflexion. Les cas où une telle faculté est offerte au consommateur sont extrêmement nombreux mais les durées varient et le régime juridique est assez incertain. Cependant, ce délai peut varier en fonction du type de contrat visé. Il peut être de sept jours657(*), dix jours658(*), de quinze jours659(*) ou de trente jours660(*). Il commence à courir à partir de la date de la remise du formulaire détachable661(*). S'agissant plus précisément des contrats à distance, le délai court à compter de la livraison de la commande ou de l'acceptation de l'offre, en ce qui concerne les services. Ce délai est toutefois exclu dans certains cas, dont les justifications sont essentiellement pratiques662(*). Dans tous les cas, il s'agit de préserver le professionnel du retour d'un bien ou d'un service dont la revente serait impossible663(*). Ces durées différentes s'expliquent en général par la gravité variable des engagements pris, les pressions que peut exercer sur le consommateur, la présence du professionnel ou de son représentant ou la déception que le consommateur éprouve à la réception de la marchandise664(*).

274. Différents types de délais. Il existe en fait différents "types de délais". Certains sont des délais de réflexion, d'autres des délais de rétractation, offrant au consommateur un droit de repentir. Il faut quand même préciser que la distinction n'est pas toujours faite avec une parfaite rigueur. De plus, les deux techniques sont parfois cumulées. Ainsi en est-il en matière de crédit à la consommation665(*). S'agissant des délais de réflexion. Dans ce cas, le consommateur, destinataire de l'offre, ne peut accepter celle-ci avant l'écoulement du délai fixé. C'est le cas, par exemple, en matière de crédit immobilier. Si le consommateur réitère son acceptation avant expiration du délai, cette réitération sera inefficace. Il faudra pour que le contrat soit formé, qu'elle intervienne postérieurement au délai fixé. On espère ainsi permettre au consommateur de réfléchir à la portée de son engagement. S'agissant des délais de rétractation. Ils sont les plus abondants. L'existence d'un tel délai va permettre au consommateur de revenir sur son engagement, de se repentir666(*). C'est un droit de rétractation qui est prévu, notamment en matière de crédit à la consommation ou immobilier, de démarchage à domicile et enfin pour les contrats à distance667(*).

275. Le régime juridique du droit de rétractation. La question de la nature et par conséquent du régime juridique du droit de rétractation est, on le sait, controversée668(*). Cette controverse est d'autant plus vive que le législateur français ne paraît pas toujours avoir tranché en faveur de l'une ou l'autre qualification. Le crédit à la consommation en est un exemple maintes fois cité. Ainsi est-il affirmé à l'article 80 du projet de loi670(*) - articles L. 311-15 du Code de la consommation - que "le contrat devient parfait dès l'acceptation de l'offre préalable" alors qu'ensuite, l'article 82 du même projet671(*), article L. 311-17 du code français de la consommation précise "tant que l'opération n'est pas définitivement conclue...", ce qui paraît indiquer que le contrat n'est pas parfait dès la signature et l'éventuel agrément de l'emprunteur. Néanmoins, ce qui importe pour la protection du consommateur contre les abus du professionnel est certainement le caractère discrétionnaire de ce droit. Ainsi, Il s'agit d'un droit discrétionnaire pour le consommateur. Il est, même, impossible pour son cocontractant d'exiger de lui une quelconque justification, ni une quelconque contrepartie sauf, le cas échéant, les frais de retour de la marchandise672(*). Cette interdiction est parfois fulminée à peine de sanctions pénales. Tel est le cas en matière de démarchage à domicile.

276. Des sanctions compatibles avec l'intérêt du consommateur. Ces règles sont en général sanctionnées par la nullité du contrat qui ne s'y conformerait pas. Cette règle étant d'ordre public, il n'est pas possible pour les parties, et spécialement pour le consommateur, d'y renoncer. Il en va toutefois différemment lorsque le consommateur demande la livraison anticipée des biens. Mais il faut alors qu'il indique qu'il a bien conscience des conséquences de sa demande. Il en va de même pour les contrats à distance de prestation de services, dont l'exécution a commencé avant l'expiration du délai de sept jours, "avec l'accord du consommateur". par ailleurs, et pour assurer la liberté du consommateur, le professionnel a l'interdiction de dresser la "liste noire" des clients ayant exercé ce droit673(*). Dans le cas du crédit à la consommation, cette interdiction est d'ailleurs assortie de sanctions pénales.

277. Conséquences du droit de rétractation. - Lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation, le contrat est anéanti. Dans le cas où ce dernier aurait commencé à être exécuté - hypothèse de la vente à distance -, le consommateur doit restituer le bien livré. L'article 14 du projet susvisé, - l'article L. 121-16 du Code français de la consommation prévoit que le retour s'exerce dans un délai de sept jours -. Cette possibilité existe sans aucun frais, en dehors des frais de retour. À l'inverse, le professionnel qui aurait perçu une somme d'argent de la part du consommateur doit la restituer. Cependant, on pourrait craindre qu'il ne s'exécute pas avec toute la diligence souhaitable. Plusieurs textes viennent donc prévoir un délai dans lequel le professionnel doit s'acquitter de son obligation de remboursement, parfois à peine de sanctions pénales.

278. Ainsi présentés, les instruments prévus par « le faire juridique », pour préserver la liberté du consentement de la partie économiquement faible, et à l'instar de ceux ayant pour but l'éclairement du consentement de ce dernier, constituent un arsenal juridique capable de lutter contre les abus de puissance économique et contribuent ainsi à la restauration des conditions d'un débat équilibré entre professionnels et consommateurs. Cependant, comme on l'a déjà signalé, deux approches sont possibles pour cette restauration : l'approche individuelle adoptée par la majorité des législations modernes et l'approche collective issue des mouvements consuméristes de la société civile. Cette dernière se base sur l'idée que le regroupement est le seul moyen capable de faire face aux abus engendrés par la concentration de la puissance économique. En effet, se regroupement s'est concrétisé à travers des associations de protection du consommateur dont le droit de la consommation maintient toujours un encadrement étouffant.

§2 - LE REGROUPEMENT FACE A LA CONCENTRATION DE LA PUISSANCE ECONOMIQUE DANS LES RAPPORTS COLLECTIFS

279. Le groupement pour l'appréhension de la puissance économique en tant que phénomène de masse. Le droit commun a une approche individuelle des problèmes juridiques. Cette approche est aussi nécessaire pour régler les problèmes de lutte contre les abus de puissance économique : validité d'un contrat ou d'une clause contractuelle, réparation du préjudice...674(*) Le consommateur étant appréhender dans sa relation individuelle avec le professionnel, la démarche du droit de la consommation étant de rétablir un certain équilibre dans les relations contractuelles, de favoriser une juste indemnisation des préjudices subis par les consommateurs ou les utilisateurs. Mais le dispositif réparateur doit être complété par des règles spécifiques permettant d'appréhender l'abus de puissance économique en tant que phénomène de masse. Ainsi, le regroupement des consommateurs leur donne davantage de force et évite l'impression d'isolement dont souffre la plupart d'entre eux675(*). La loi n'a pas ignoré ce mouvement naturel. Ainsi, le projet de loi, et à l'instar du code français de la consommation contribue à la restauration des conditions d'un débat équilibré entre consommateurs et professionnels. Dans cette mesure, le droit de la consommation permet aux groupements de consommateurs de jouer un rôle considérable dans la lutte contre les abus de puissance économique dont souffrent ces derniers (A). Toutefois, le cadre juridique marocain, et d'une manière regrettable présente, beaucoup plus, de contraintes que son homologue français. Ces dernières n'encouragent point l'approche collective de la lutte contre les abus de puissance économique (B).

A- Le rôle des groupements de consommateurs dans la lutte contre les abus de puissance économique

280. Le groupement des consommateurs en associations de la société civile. Pour défendre leurs intérêts et constituer un groupe capable de peser sur les conflits d'intérêts dans les sociétés modernes, les consommateurs choisissent de se regrouper en association de la société civile. Ainsi, les acteurs principaux de la défense des intérêts des consommateurs sont nul doute les associations de consommateurs. Ces dernières existent dans leur forme actuelle, depuis le début des années 1960 aux Etats-Unis d'Amérique et en Europe ; mais elles sont en réalité l'aboutissement de mouvements successifs dont les premières manifestations sont anciennes676(*). C'est au début du XX siècle que l'on a pu dater la naissance d'un mouvement et d'actions modernes. Cependant, il faut attendre la seconde moitié du XX siècle pour que se créent de véritables associations de consommateurs. Au Maroc, le mouvement des associations de protection des consommateurs selon sa forme moderne a paru dès le début des années quatre vingt dix677(*). Ces dernières mènent leurs actions dans le cadre du Dahir sur les libertés publiques678(*) et ne disposent, ainsi, jusqu'aujourd'hui, d'aucun moyen juridique dérogatoire au droit commun, et capable de contrebalancer la puissance économique des professionnels. A cet effet, nous essayons de présenter le rôle des associations françaises dans la lutte contre les abus puissance économique tout en indiquant, en la matière, les dispositions marocaines en vigueur ainsi que celles prévues par le projet de loi relatif aux mesures pour la protection du consommateur.

281. La représentation au sein des institutions. Les législateurs modernes sont conscients du rôle important du consommateur dans les mécanismes concurrentiels. Cette prise de conscience se manifeste par la représentation de ses intérêts au sein des autorités du marché. Ainsi, la loi 06-99 permet la représentation de des consommateurs au sein du conseil de la concurrence679(*). Dans le même sens, ladite loi donne aux associations de consommateurs la possibilité pour saisir le Conseil, d'une question de concurrence680(*) ainsi que la possibilité d'exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux fais portant préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs des consommateurs681(*).

282. L'action sur la transparence par la diffusion des prix pratiqués sur le marché. Certaines associations surtout locales diffusent des séries de prix qui permettent au consommateur de se faire une idée de l'ensemble des prix pratiqués sur un marché et donc de pouvoir bénéficier de la compétition sans avoir à collecter lui-même les informations nécessaires, ce qui serait trop long. Quel que soit leur intérêt pour le consommateur, le coût de ces opérations les rend exceptionnelles. Le plus souvent, ce sont des tests comparatifs, et non pas des séries de prix que diffusent les associations. Ils entendent par là exercer une action sur la transparence, en réponse par exemple à la publicité. L'information donnée n'est pas brute, elle est élaborée682(*).

283. Négociations d'accords collectifs. La méthode est ici clairement empruntée au droit du travail. Et les raisons en sont identiques. L'idée est que la négociation, qui est impossible à un consommateur isolé, est en revanche possible pour les associations de consommateurs. Celles-ci peuvent négocier avec les professionnels des conditions contractuelles plus équilibrées. Cela peut prendre deux formes : l'élaboration de contrats types, qui peuvent ensuite être utilisés dans les relations entre professionnels et consommateurs ; l'élaboration d'une norme AFNOR683(*). Toutefois, faute d'être rendus obligatoires par la loi (comme c'est le cas en droit du travail), ces accords restent souvent lettre morte. Les professionnels n'utilisent pas ces modèles684(*).

284. Les actions en justice. L'action individuelle du consommateur est insuffisante pour lutter de façon efficace contre les pratiques des professionnels. En effet, d'une part, elle suppose que le litige entre professionnel et consommateur soit porté devant un juge, ce qui n'est pas toujours le cas. D'autre part, la décision du juge n'a, sur ce point, que l'effet relatif de la chose jugée. De sorte que le professionnel pourra toujours la maintenir, en comptant sur l'ignorance des autres consommateurs685(*). Ainsi, permettre à un consommateur isolé d'obtenir que la clause abusive invoquée contre lui par un professionnel soit réputée non écrite est déjà bien, mais le rendement de telles actions individuelles, qui conduisent à des décisions n'ayant autorité de la chose jugée qu'entre les parties au procès, est socialement médiocre. D'où l'intérêt de conférer aux associations de défense des consommateurs le droit d'agir en suppression des clauses abusives et à doter les décisions judiciaires ordonnant cette suppression d'un effet collectif bénéficiant à tous les consommateurs686(*). L'objet de cette action, qui peut prendre la forme d'une demande initiale ou d'une intervention volontaire687(*), est de solliciter du juge civil la suppression, le cas échéant, sous astreinte, d'une clause illicite ou abusive dans tout contrat ou modèle de convention proposé ou destiné au consommateur. Les personnes contre lesquelles l'action peut être dirigée sont les professionnels qui proposent des contrats d'adhésion à leurs clients consommateurs et, plus largement, tous les professionnels qui prennent la responsabilité de diffuser des modèles de convention destinés à régir les relations contractuelles entre des professionnels et des consommateurs, à condition toutefois qu'ils soient toujours utilisés effectivement au jour où le juge statue688(*).

285. Le projet de loi marocain prévoit pour les associations de consommateurs agrées une action pour suppression des clauses abusives dans les contrats proposés par les professionnels aux consommateurs689(*). En France c'est la loi n  88-14 du 5 janvier 1988 qui a introduit en droit français une action en suppression des clauses abusives conférant à la sanction un effet collectif, et non plus limité aux parties litigantes690(*). L'idée générale, qui a présidé à l'introduction de cette action en droit positif, est d'appréhender le phénomène de protection des consommateurs contre les clauses abusives dans sa dimension de masse, collective.

286. La suppression des clauses abusives dans les contrats déjà conclus en dehors du litige porté devant le juge. La question de savoir si la décision ordonnant la suppression d'une clause abusive insérée dans un contrat type affecte aussi les contrats déjà conclus entre le professionnel condamné et des consommateurs est une question délicate. Certains auteurs français proposent de distinguer deux cas : ou bien la clause abusive est interdite par décret et, alors, il n'y a pas d'obstacle à ce que le juge en ordonne la suppression dans les contrats en cours, ou bien elle est déclarée abusive par le juge sur le seul fondement de l'article L. 132-1 du code de la consommation correspondant à l'article 19 du projet de loi marocain, et la prohibition des arrêts de règlement interdit qu'une décision de justice ait un effet général sur des situations individuelles non concernées par le litige tranché dont l'autorité de la chose jugée ne s'impose qu'aux parties au procès691(*). Le nouveau texte de l'article L. 421-6 du code français de la consommation692(*) n'apporte guère de lumière sur ce point. Si, d'une part, il vise non seulement les contrats types mais aussi les contrats - et plus uniquement les modèles de convention -, il ne s'intéresse expressément qu'aux contrats proposés ou destinés aux consommateurs, et non aux contrats conclus ou en cours693(*).

287. Il serait pourtant opportun que les effets de la décision ordonnant la suppression d'une clause abusive insérée dans un contrat type atteignent également les contrats déjà conclus par le professionnel condamné. Le caractère abstrait de l'analyse du déséquilibre significatif, à l'occasion d'une action collective, commande de traiter toutes les situations identiques dans lesquelles la clause interdite a été utilisée. Qui plus est, admettre que les clauses incluses dans les contrats déjà conclus soient concernées par la décision judiciaire qui en ordonne la suppression n'équivaut pas à un arrêt de règlement, c'est-à-dire à une décision qui a force de loi. En réalité, ce qui choque, c'est l'atteinte portée à une convention légalement formée sans qu'une décision de justice n'intervienne entre les parties. Mais le fait que la conclusion du contrat soit déjà intervenue ne modifie en rien le raisonnement. Il n'est pas question de permettre au cocontractant consommateur de se prévaloir directement d'un jugement auquel il n'a pas pris part, mais seulement de conférer à la décision intervenue à la suite d'une action collective un rayonnement incluant les contrats déjà conclus afin de forcer, grâce à l'astreinte, le professionnel à retirer de tous les contrats qu'il propose ou qu'il a conclus la clause abusive dont la suppression a été ordonnée. D'ailleurs, sur le fondement de l'article L. 421-6 du code français de la consommation, de même que l'article 158 du projet de loi marocain, le juge n'a pas le pouvoir de réputer non écrites les clauses abusives, mais seulement celui d'en ordonner la suppression694(*). Cependant, il conviendrait d'octroyer au professionnel condamné à la suite d'une action collective la faculté de prouver que, dans tel contrat déjà formé, la clause litigieuse n'entraîne, pour des raisons particulières à cette convention, aucun déséquilibre significatif au détriment du consommateur695(*).

288. La diffusion de la décision et l'indemnisation. Outre la suppression des clauses abusives, le juge civil peut ordonner la diffusion, par tous moyens appropriés et aux frais de la partie condamnée ou qui a succombé, de la décision rendue696(*). Ainsi, lorsque cette diffusion au public est sollicitée par le demandeur, le juge ne peut la refuser que par une décision spécialement motivée697(*). Par ailleurs, le juge peut, sur demande de la victime, accorder des dommages et intérêts au demandeur, destinés à réparer tout préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs. Cette réparation, non prévue par le texte de loi, marque l'action collective en suppression des clauses abusives d'une couleur indemnitaire. La nature de cette action est donc ambivalente : à la fois préventive et indemnitaire.

289. La perspective de la Class Action. La class action est une action de masse entreprise par un grand nombre de personnes qui ont toutes individuellement subi le même préjudice698(*). Elle intéresse une catégorie, un groupe de personnes désignées en anglais par le terme " class ", les personnes en question devant toutes répondre aux mêmes caractéristiques699(*). Les " class actions " sont donc des procès entamés par des groupes de personnes qui souhaitent obtenir réparation d'un préjudice causé par le même comportement ou le remboursement d'une certaine somme. Ce type d'action existe depuis plusieurs années en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis ou encore au Québec700(*).

290. La « class action » permet aux gens de faire valoir leurs droits par un coût modique grâce à leur nombre. Elle permet la réparation des préjudices subis ou le remboursement de sommes injustement perçues par un tiers. La différence essentielle consiste en ce que les associations de consommateurs défendent l'intérêt général des consommateurs tandis que la class action défend les intérêts particuliers de chacun des consommateurs, voire de tous les individus même s'ils ne sont pas des consommateurs701(*). Ainsi, l'introduction de cette action, malgré toutes les perturbations qui pourraient en résultent, contribuera considérablement à la restauration des conditions d'un débat équilibré au niveau de l'exercice des droits judiciaires. Or, loin d'atteindre cet objectif, notre droit positif n'a même pas adopté un cadre juridique favorable à l'encouragement du regroupement des consommateurs en associations disposant de moyens nécessaires à la lutte contre les abus de puissance économique des professionnels.

B- Les contraintes légales et administratives à l'exercice de l'action des associations de consommateurs

291. Des contraintes à la liberté de regroupement des consommateurs en association. Si l'article 9 de la Constitution de 1996 reconnaît la liberté d'association, il précise néanmoins qu'elle peut être limitée par la loi. Ainsi, la liberté d'exercice de l'activité associative au Maroc n'est pas une liberté absolue. Cette liberté est régie par des dahirs de 1957-1958702(*) dont les amendements de 1973703(*) ont réduit sensiblement la garantie de leur exercice A partir des amendements introduits en 1973, à travers lesquels, la loi exigeait le dépôt d'une déclaration préalable auprès des autorités locales et du procureur du roi pour la constitution de toute association. Ainsi, l'association ne pourrait acquérir sa légalité qu'à partir du moment où elle obtenait un récépissé suite au dépôt de sa déclaration. Or, la pratique a montré que les autorités refusaient pour certaines associations la remise du récépissé en transformant ainsi la déclaration en autorisation préalable, ce qui n'était pas l'objectif de la déclaration704(*). En 2002705(*), une nouvelle loi a supprimé certaines restrictions706(*). Au cours de la même, le parlement a adopté des amendements relatifs à la procédure de constitution des associations en vue de remédier à cette pratique administrative. Ainsi, le nouveau texte exige de l'administration la délivrance immédiate d'un récépissé provisoire dans l'attente d'un récépissé définitif qui doit être remis aux intéressés au plus tard soixante jours après la déclaration, sinon l'association acquiert sa légalité et se voit habilitée à exercer ses activités telles qu'elles sont prévues par ses statuts. En principe, la déclaration auprès des autorités ne constitue pas une restriction si elle est considérée comme une procédure de son enregistrement. C'est la pratique d'ailleurs qui est en vigueur en France. Les autorités sont tenues en effet de remettre le récépissé aux déclarants et n'ont d'attributions que celles qui consistent à constater l'existence légale de l'association par la remise obligatoire du récépissé707(*).

292. Persistance des pratiques administratives. Cependant, depuis la promulgation de la nouvelle version du texte, la pratique administrative n'a point changé. Les autorités continuent, comme par le passé, à refuser la délivrance du récépissé provisoire aux intéressés. A noter que le récépissé provisoire est nécessaire pour comptabiliser le délai de soixante jours prévu par la loi pour permettre à l'association d'acquérir sa légalité de plein droit708(*). Ainsi, les pratiques administratives continuent à constituer des contraintes à la liberté de regroupement des consommateurs en association709(*) ce qui ajoute un autre obstacle à l'approche collective de la lutte contre les abus de puissance économique710(*). Cependant, ces contraintes ne sont pas les seules à confronter pour le regroupement des consommateurs. Ainsi, même reconnue et déclarée, une association de protection des consommateurs ne se trouve reconnue les droits attachés aux dispositions protectrices des consommateurs que si elle est reconnue d'utilité publique.

293. Conditions d'exercice des droits attachés aux dispositions protectrices du consommateur. En France, l'exercice des droits attachés au code de la consommation est subordonné à l'agrément administratif conformément à l'article L-411-1. Ainsi, les associations de consommateurs, même en France, n'ont pas échappé à ce phénomène de récupération administrative de l'exercice d'une liberté fondamentale711(*). Actuellement en droit positif marocain aucune disposition ne prévoit ce type d'agrément. Néanmoins, et contrairement à la législation française, l'article 151, du projet de loi susmentionné, subordonne le droit des associations de consommateurs d'exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs, à la jouissance de la qualité d' « utilité publique »712(*). De surplus, les dites associations doivent être adhérer à une confédération nationale de la protection des consommateurs dont le statut doit être approuvé par l'administration. A cet effet, on estime que les pratiques administratives, susmentionnées, relatives à la constitution des associations en général, ne favorisent point le regroupement des consommateurs pour la restauration des conditions d'un débat équilibré, et à fortiori, le cadre légal prévu dans le projet de loi. Cette politique législative et administrative ne fait qu'accentuer l'esprit individuel du citoyen marocain et par conséquent, elle ne permettra jamais à l'approche collective d'éprouver son efficacité dans la lutte contre les abus de puissance économique. Quand à l'approche individuelle, les instruments prévus par le projet de loi marocain ne présentent aucune différence avec ceux contenus dans le code français de la consommation. A cet effet, on présuppose qu'ils ne peuvent que contribuer à la préservation du consentement du consommateur et ainsi, lui permettre de jouer son rôle naturel dans les mécanismes du marché. Cependant, la lutte contre les abus de puissance économique par la restauration des conditions d'un débat équilibré ne peut se réaliser que par les deux approches, individuelle et collective. Si la première est envisageable à travers les dispositions du projet de loi, malheureusement, la deuxième, qui est la plus efficace, est loin d'être adoptée par le législateur marocain pour les raisons qu'on a déjà évoquées713(*).

294. Par ailleurs, concernant l'autre technique utilisée par le « dire juridique » pour lutter contre les abus de puissance économique, le renforcement du cadre contraignant dans l'exercice de la liberté de la concurrence et celle contractuelle, elle présente une nuance dans son appréciation. Certes, si le législateur marocain tient déjà compte de l'importance de la protection du marché par l'encadrement de ces deux libertés en corrélation, les dispositions y relatives leur manquent d'efficacité et ce dans la mesure où, ces dispositions n'ont pas encore gagné le « dire juridique » marocain qui, n'a pas la culture de l'ordre public concurrentiel et ainsi, elles sont très rarement mises en oeuvre par le juge et par les autorités du marché.

CONCLUSION GENERALE

295. Réalité du phénomène d'abus de puissance économique. A travers ces développements, nous estimons que l'abus de puissance économique est une réalité socioéconomique, qui marque considérablement les rapports concurrentiels et contractuels dans les sociétés contemporaines. Son auteur use de sa puissance économique qui lui confère un pouvoir économique de fait. Ce dernier est non reconnu par l'ordre juridique, dans la mesure où, son exercice ne constitue par un exercice d'un droit subjectif ou d'une liberté économique. Cependant, comme on l'a déjà démontré, l'exercice abusif du pouvoir économique met en cause les principes directeurs de notre système juridique, à savoir, l'égalité contractuelle dans le droit des contrats et le bon fonctionnement de la concurrence dans le droit du marché.

296. Carence de notre droit positif dans la protection du marché. La réaction du droit face à cette réalité socioéconomique présente une grande différence quand à la protection de ces deux principes. Ainsi, si le « dire juridique » en droit français a pu, dans une grande mesure, contribuer activement à la lutte contre les abus de puissance économique à l'égard d'un partenaire économique qu'à l'égard du marché, celui marocain a éprouvé une grande passivité et un manque de professionnalisme dans l'interprétation et l'application des textes juridiques les plus généraux. Toutefois, si les autorités marocaines ont pris conscience - après les pressions, notamment, des institutions financières internationales - de l'importance d'une intervention législative pour la mise en place d'un cadre juridique favorable au développement d'une concurrence loyale et effective, ce qui était le cas de la loi 06-99 sur la liberté des prix et la concurrence, cette dernière n'a pas pu gagner la culture des autorités du marché, du juge et des opérateurs.

297. Vide législatif dans la protection du consommateur. Quand à la protection du consommateur, le juge marocain reste toujours enfermé dans une interprétation stérile du droit commun. Cette réalité judiciaire accentue la situation économique et juridique vulnérable du consommateur marocain. Par ailleurs, l'omniprésence de l'administration, par l'exercice d'un contrôle à la fois politique et économique sur l'action des associations de consommateurs, reflète à vrai dire, la réalité des obstacles qui affronte le mouvement consumériste dans notre pays. Ce qui est le cas, notamment, de la réticence quand au projet de loi sur la protection du consommateur. En effet, on ne connaît pas clairement les motifs réels de ce maintien administratif. Cela laisse planer sur la réalité des parties aux rapports de forces et le rôle exact du politique dans cette relation entre consommateurs et professionnels.

298. Suggestions. Néanmoins ces difficultés qu'on vient d'exposer, le droit de la concurrence et le droit de la consommation avec leur nouvel esprit et leur pragmatisme, et avec une certaine adaptation aux réalités économique, est en mesure de lutter contre les abus de puissance économique. L'expérience française en atteste. Certes, le retard accusé dans l'adoption d'une loi sur la protection du consommateur et l'ignorance de la loi 06-99 par les tribunaux, par la défense et même par les autorités en charge de son application constitue le vrai obstacle à la lutte contre les abus de puissance économique. A cet effet, nous estimons qu'il est temps de remédier aux carences de notre droit positif dans l'appréhension des réalités socioéconomiques des sociétés contemporaines car « Le droit positif doit rester chose vivante. Or, vivre, c'est se mouvoir et se transformer. Pour le droit, c'est plus encore : c'est lutter, en vue d'une parfaite et constante adaptation aux exigences de la vie sociale 714(*)».

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Dion (N) note sous Cass. 1re civ. 23 févr. 1994, Rec. D. 1995. 214.

Dorsner-Dolivet (A) note sous Cass. 1re civ., 14 janv. 1992 : JCP éd. G 1993, II, 21996.

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Hannoun (Ch) note sous Com. 18 févr. et 26 mai 1992, Rec. D. 1992. 47.

Hauser (J) note sous Cass. 1re civ., 25 oct. 1989 : JCP éd. G 1990, II, 21458.

Huet (J) note sous Cass. com. 14 janv. 1984, R.T.D.civ. 1984. p. 728.

Jourdain (P) note sous Cass. 1re civ., 18 janv. 1989, Rec. D. 1998, somm. p. 198.

Jourdain (P) note sous Cass. 1re civ., 19 janv. 1983 : JCP éd. G 1984, II, 20175.

Jourdain (P) note sous Cass. 3e civ., 8 oct. 1997, R.T.D.civ. 1998, p. 383.

Kullmann (J) note sous Cass. 1re civ., 16 janv. 2001, RGDA 2001, p. 293.

Lambert-Faivre (Y) note sous Cass. 1re civ. 16 déc. 1997, Rec. D. 1998. 287.

Legeais (D) note sous Cass. 1re civ., 27 juin 1995, JCP éd. E 1996, II, 772.

Legeais. D. note sous Cass. 1re civ., 8 juin 1994, JCP éd. E 1995, II, 652. R.T.D.civ. 1996, p. 385, obs. J. Mestre

Leveneur (L) note sous Cass. 1re civ. 11 mai 1999, Contrats, conc., consom. 1999, comm. 137.

Malaurie-Vignal (M) note sous Cass. com., 3 mai 2000, LPA, 16 nov. 2000, n° 229, p. 7.

Malaurie-Vignal (M) note sous Cons. conc., déc. n° 98-D-76, 9 déc. 1998, Contrats, conc., consom. 1999, comm. n° 111.

Martin (R) note sous Cass. 1re civ., 29 avril 1997, JCP éd. G 1997, II, 22948.

Mazeaud (D) note sous Cass. 1re civ., 17 juill. 2001, préc., Rec. D. 2002, p. 74.

Mazeaud (D) note sous Cass. 1re civ., 17 juill. 2001, Rec. D. 2002, p. 74.

Mazeaud (D) note sous Cass. 1re civ. 11 mai 1999, Defrénois 1999. n° 992.

Mazeaud (J) note sous Cass. 3e civ. 4 mai 1976, Rec. D., 1977, jurispr. p. 34.

Meilhac-Redon (G) et Marmoz F. note sous Cass. 1re civ. 15 févr. 2000, LPA, 29 déc. 2000, n° 260, p. 12.

Mémeteau (G) note sous Cass. crim., 15 mai 1984 : Bull. crim. n° 178 ; Rec. D. 1986, jurispr. p. 106.

Mestre (J) et Fages (B) note sous CA Paris, 26 oct. 2001, R.T.D.civ. 2002. 503.

Mestre (J) et Fages (B) note sous Cass. 1re civ., 28 mars 2000, R.T.D.civ. 2000, p. 565.

Mestre (J) et Fages (B) note sous Cass. 1re civ., 29 avril 1997, R.T.D.civ. 2000, p. 828.

Mestre (J) et Fages (B) note sous Cass. 1re civ., 7 mars 1989, R.T.D.civ. 2001, p. 875.

Mestre (J) et Fagès (B) note sous Cass. 3e civ., 24 mai 2000, R.T.D.civ. 2000, p. 824.

Mestre (J) et Fages (B) note sous CE, 11 juill. 2001, RTD civ. 2001, p. 878, n° 6.

Mestre (J) note sous Cass. 1re civ., 10 mai 1989, R.T.D.civ. 1989, p. 738.

Mestre (J) note sous Cass. 1re civ., 15 avr. 1986, R.T.D.civ. 1987, p. 86.

Mestre (J) note sous Cass. 1re civ., 27 mai 1997, R.T.D.civ. 1997, p.930.

Mestre (J) note sous Cass. 1re civ., 28 avr. 1987, R.T.D.civ. 1987, p. 537.

Mestre (J) note sous Cass. 1re civ., 3 juill. 1985, R.T.D.civ. 1996, p.338.

Mestre (J) note sous Cass. 1re civ., 6 janv. 1994, R.T.D.civ. 1994, p. 601.

Mestre (J) note sous Cass. 3e civ., 27 mars 1991, R.T.D.civ. 1992, p. 81.

Mestre (J) note sous Cass. 3e civ., 27 nov. 1990, R.T.D.civ. 1991, p. 315.

Mestre (J) note sous Cass. com. 4 janv. 1994, R.T.D.civ. 1994. 349.

Mestre (J). note sous Cass. 1re civ., 8 juin 1994, R.T.D.civ. 1996, p. 385.

Mouly (J) note sous Cass. 1re civ. 18 janv. 1984, JCP éd. G, 1985. II. 20372.

Paisant (G) note Cass. 1re civ., 6 janv. 1994, JCP éd. G 1994, II, 22237.

Paisant (G) note sous Cass. 1re civ., 14 mai 1991, JCP éd. G 1991, II, 21763.

Paisant (G) note sous Cass. 1re civ., 18 juill. 2001, Rec. D. 2002, p. 930.

Paisant (G) note sous Cass. 1re civ., 28 avr. 1987, JCP éd. G 1987, II, 20893

Paisant (G) note sous Cass. 1re civ., 4 juill. 1995, Rec. D. 1996, somm. p. 11.

Paisant (G) note sous Cass. 1re civ. 5 oct. 1999, Rec. D. 2000. 110.

Paisant (G)  note sous Cass. 1re civ. 13 mars 1996, JCP 1994. II. 22237.

Penneau (J) note sous Cass. 1re civ., 7 juin 1989, Rec. D. 1991, somm. p. 184.

Piédelièvre (S) note sous Cass. 1re civ., 27 juin 1995, Rec. D. 1995, jurispr. p. 621.

Pierre (Ph) note sous CA Paris, 12 janv. 2000, JCP éd. G, 2000. II. 10433,

Pillebout (J.-F) note sous Cass. 1re civ., 25 nov. 1997, JCP éd. N 1998, 701.

Piquet (S) note sous Cass. com. 4 avr. 1995, Rec. D. 1996. 141.

Plancqueel (A) note sous Cass. 1re civ., 4 oct. 1977 : JCP G 1978, 1, 262.

Raffray (J.-G) note sous Cass. com. 19 mai 1987, JCP, éd. N, 1988. II. 277.

Raymond (G) note sous Cass. 1re civ., 19 mai 1992, Contrats, conc., consom. 1992, comm. n° 189.

Raymond (G) note sous CA Orléans, 15 nov. 1995 : Contrats, conc., consom. 1996, comm. n° 118.

Raymond (G) note sous CA Paris, 4 oct. 1996, Contrats, conc., consom. 1997, comm. n° 34.

Raymond (G) note sous CE, 27 avr. 1998, Contrats, conc., consom. 1999, comm. n° 15.

Raymond (G)  note sous Cass. 1re civ. 6 janv. 1994, JCP 1994. II. 22237.

Rondey (C) note sous CA Reims, 18 oct. 2001, Rec. D. 2002, p. 1276.

Rusquec (E) note sous Cass. 1re civ., 18 janv. 1989, JCP éd. G 1997, II, 22970.

Sainte-Rose (J) note sous Cass. 1re civ. 5 oct. 1999, RJDA 11/1999, p. 943, concl.

Sauphanor-Brouillaud (N) note sous CE, 11 juill. 2001, JCP éd. G 2001, I, 370.

Sélinsky (V) note sous Cons. conc., déc. n° 98-D-76, 9 déc. 1998, Lamy, avis et décisions du Conseil de la concurrence, n° 775.

Sériaux (A) note sous Cass. com., 22 oct. 1996, Rec. D. 1997, jurispr. p. 121.

Serra (Y) note sous Cass. 1re civ. 11 mai 1999, Rec. D. 2000, somm. p. 312.

Serra (Y) note sous Cass. com. 4 janv. 1994, Rec. D. 1995. 205.

Serra (Y) note sous Cass. soc. 14 mai 1992, Rec. D. 1992. p. 350.

Seube (J.-B) note sous Cass. 1re civ. 15 févr. 2000, JCP, éd. E, 2000. n° 320.

Simler (Ph) et Delebecque (Ph) note sous CA Lyon, 21 juin 1995, JCP éd. G 1997, I, 3991, n° 6.

Vogel (L) note sous CA Paris, 6 juill. 1994, Contrats, conc., consom. 1994, comm. n° 197.

Vogel (L) note sous Cons. conc., avis n° 97-A-04, 21/01/1997, Contrats, conc., consom. 1997, comm. n° 8.

Vogel (L) note sous Cons. conc., déc. n° 96-D-67, 29 oct. 1996, Contrats, conc., consom. 1997, comm. n° 67.

INDEX ALPHABETIQUE

(Les chiffres renvoient aux numéros de pages)

A

Abus

et liberté contractuelle 9

et liberté de la concurrence 9

Abus de dépendance économique

Per see 174

Abus de droit

Controverses doctrinales 28

Définition 28

et abus de pouvoir économique 28

et détournement de pouvoir 30

Théorie de l' ... 28

Abus de position dominante

Intention 168

Abus de pouvoir

et abus de droit 28

Abus de pouvoir économique

et abus de pouvoir 31

Abus de puissance économique Voir Pratiques commerciales agressives

à tarvers des rapports verticaux 75

à travers des rapports horizentaux 78

Abus de structure 74

Approvisionnement exclisif 78

Atteinte à la liberté contractuelle 95

Atteinte à la liberté du consentement 68

Avance technologique 80

Clause pénale 132

Clauses abusives 69, 180

Clauses de fédilisation 75

Clauses de non concurrence 80

Clauses d'exclusivité 75

Conditions générales de vente 76

Contrat 171

Entente de partage du marché 80

et abus de droit 29

et autonomie de volonté 59

et avance technologique 78

et bon fonctionnement de la concurrence 59, 90

et concurrence effective 91

et dépendance économique 68

et déséquilibre contractuel 69, 73

et dire juridique 105

et droits de propriété industrielle 80

et égalité contractuelle 96

et obligations du juge 105

et pouvoir de fait 29

et principes directeurs 82

Inadaptation du droit 100

Liberté du consentement 95

Monopole 77

par une concurrence déloyale 78

Patiques de prix réduits 65

Pratiques de prix éliminatoires 76

Pratiques de prix prédatoires 76

Pratiques de prix trés bas 77

Prix imposé 171

Progrès technique 80

Refus de vente 66, 79

Refus d'information sur les prix 78

Règle de la raison 76

Remises d'achats simultanés 80

Revente à perte 172

Rôle du juge 155

Stratégie d'élimination 75, 76

Théorie des facilités essentielles 79

Ventes liées ou subordonnées 66

Association

Qualité de consommateur 51

Association des consommateurs

Action collective 182

Associations des consommateurs 199

Accords collectifs 201

Actions en judtice 202

Déclaration administrative 208

et contraintes à la liberté de regroupemnt 208

Liberté d'association 207

Liberté publique 200

L'utilité publique 209

Autonomie de la volonté 13

Critiques 99

et liberté du consentement 107

et obligation d'information 115

Ordre public économique 170

Principe 92

Principe juridique 93

Principe philosophique 92

Autorité du marché

Associtions des consommateurs 200

Autorités du marché

Conditions d'un procès équitable 140

Délai de la procédure 141

Fonction juridictionnelle 139

Fonction naturelle 138

Infrastructures essentielles 139, 142

Liberté dans le règlement des litiges 142

Limites de la fonction juridictionnelle des... 150

Nature 137

Nullité des clauses anticoncurrentielles 173

Pouvoir de réviser une convention des parties 142

Pouvoir exécutif 137

Pouvoir réglementaire 138

Rôle 138

Service universel 139

B

Bonne foi

et obligation d'information 118

et volonté des parties 119

Obligation d'information 119

Sanction des règles de forme 192

C

Cause

Aménagement conventionnel de la responsabilité 125

Clause de datte de valeur 125

Clause de divisibilité des conventions 127

Clause de non concurrence 126

Clause de survenance du dommage 124

Clause pénale 133

contrats bancaires 125

contrats d'assurance 124

Crédit-bail 122, 128

et déséquilibre contractuel 120

et economie générale du contrat 121

Cautionnement

Formalisme renforcé 190

Class action 205

Action des associations de consommateurs 206

Suppression des clauses abusives 206

Clause de non concurrence

Abus de puissance économique Voir Abus de puissance économique

Cause 126

Critère de proportionnalité 127

et concurrence effective 88

Liberté de commerce et d'industrie 126

Liberté du travail 126

Clause pénale 131

déséquilibre contractuel 120

Jurisprudence marocaine 132

Théorie de la cause 133

Clauses abusives

Actions des associations de consommateurs 202

Appréciation du caractère abusif 181

Appréciation in abstracto 181

Appréciation in concreto 181

Avantage excessif 180

Champ d'application 179

Class action 206

Contrat d'adhésion 180

Critères 69

Définition 70, 180

Déséquilibre significatif 72, 180

Diffusion de la décision de suppression des... 205

Elimination 182

et clauses pénales 71

et contrats de distribution 70

et lésion 181

et l'usure dans le contrat de prêt 71

Exemples 70, 72

Forme et support du contrat 179

Indemnisation 205

Liberté contractuelle 177

Lutte contre... 178

Pouvoir règlementaire 178

Clauses anticoncurrentielles 172

Nature de la nullité 174

Portée de la nullité 174

Révision judiciaire 175

Clientèle

Conquête de la... 16

Concurrence

Analyse économique de la règle de droit 83

Bon fonctionnement, principe économique 83

Bon fonctionnement, principe juridique 87

Conception moderne 84

Conception néoclassique 84

conception néolibérale 6

dans les régimes communistes 6

déloyale 36

effective 84

efficace 85

et libéralisme 88

et règle de droit 87

et régulation du marché 87

et réseaux de distribution 85

Etat de... non faussée 84

horizentale 74

Instrument de politique économique 89

Modèle de J. M. Clark 84

Moyen économique 86

non régulée 7

Principe du bon fonctionnement de la... 83

pur et parfaite 85

Workable compétition 84

Concurrence déloyale

et concurrence effective 88

Conseil de la concurrence 140

Conditions d'un procès équitable 141

Délai de la procédure 141

Consentement

Bonne foi 108

Eclairé 185

Liberté du... 193

Obligation du conseil 190

Protection par le droit commun 107

Vices de... 13

Consommateur 23

acteur économique 13

Critère de lien direct 52

Critère de rapport direct 53, 55

Critères de distination 52

dans la doctrine française 54

Dans la jurisprudence française 53

Dans le code français de la consommation 52

Déséquilibre de puissance économique 183

En droit de la concurrence 52

en jurisprudence marocaine 52

en sciences économiques 51

et concurrence déloyale 52

et délimitation du marché 40

et non professionnel 53

et pouvoir économique relatif 48

et règles de transparence tarifaire 161

Groupement 198

moyen 52

Notion 51

Notion en droit marocain 52

Refus de vente 163

Contrat

Cause anticoncurrentielle 172, 176

Cause en droit de la concurrence 176

et réalisme économique 176

et volonté individuelle 98

Force obligatoire du... 8, 97

Objet anticoncurrentiel 172, 176

Obligations de forme de la présentation 188

Contrat d'adhésion

Clauses abusives 71, 180

Liberté contractuelle 177

Liberté du consentement 95

Contrat de crédit

et vulnérabilité du consommateur 67

Corégulation

Coposition du conseil de la concurrence 137

Rôle des opérateurs 136

Crédit

Formalisme informatif 189

Instrument de consommation 15

D

Délai de réflexion 193

Contrats à distance 194

Crédit à la consommation 195

Nullité du contrat 197

Sanctions 197

Types 195

Variété des délais 194

Délai de rétractation 195

Régime juridique 196

Dépendance économique

Critères d'appréciation 57

Doctrine allemande 57

et pouvoir économique 23

et solutions alternatives 56

Notion 56

pour cause d'assortiment 57

pour cause de pénurie 57

pour cause de puissance d'achat 57

pour cause de relations d'affaires 57

Domination

collective 46

individuelle 41

la ... rente 60

La domination...arme 75

Dommage concurrentiel

Licéité 37

Droit

"Faire juridique" 156

Conceptions néolibérales du... 99

et règles du droit 156

Fonction économique du... 158

Droit de la concurrence

Bon fonctionnement concurrentiel 82

Branche du ... 12

Clause de non concurrence 127

Compétence des tribunaux 143

définition 88

et droit de la consommation 102

Interprétation téléologique 169

Sécurité contractuelle 176

Droit de la consommation

Sanctions pénales 192

droit de réctractation

Caractère discritionnaire 196

Droit de rétractation

Conséquences 197

Droit du marché

et marché 39

Droits subjectifs 26

Définition 27

et pouvoir juridique 27

Objet 27

E

Economie

d'abondance 16

de marché 5, 83

dirigée 5

dirigiste 101

du marché 13

Ecole autrichienne 5

Ecole de Chicago 4

et droit 134

keynésienne 4

keynésiennes 4

libérale 3, 101

néolibérale 4, 6, 13

Economie de marché

Mise à niveau institutionnelle 102

Economie du marché

Autorités du marché 138

Mise à niveau fonctionnelle 103

Economie générale du contrat 121

Théorie de la cause 129

Egalité contractuelle

et justice commutative 13

Entente

Liberté contractuelle 173

Entreprise

Notion juridique 42

Entreprises

publiques et droit de la concurrence 42

Etat

de droit 5

providence 4

régulateur 102

F

Formalisme

ad probationem 192

ad validitatem 192

Crédit affecté 191

Déchéance du droit aux intérêts 193

informatif 189

informatif et nullité du contrat 192

Mentions manuscrites 190

Offre préalable 189

Présentation du contrat 188

Formalisme informatif

Sanctions 192

J

Juge

Compétence propre 144

Complémentaire du régulateur 149, 150

Coposition des autorités du marché 146

et clauses abusives 178

et régulation 146

et sciences économiques 146

Fonction de régulation 147

Limites du rôle classqiue 139

Politique économique 147

Pouvoir judiciaire classique 135

Régulateur 135

Justice commutative

Théorie de la cause 131

Justice contractuelle

et égalité contractuelle 93

Théorie de la cause 123

L

La liberté contractuelle

Contenu 33

La liberté de commerce et de l'industrie

Contenu 33

et liberté d'entreprendre 35

Lbertés

individuelles 5

Lésion

Déséquilibre contractuel 120

et clauses abusives 181

Libéralisme économique

et droit civil 97

Liberté 32

...des opérateurs 10

Contractuelle 8

de la concurrence 8

Définition 32

d'entreprendre 6

et droits subjectifs 33

Liberté contractuelle

Economie libérale 170

et clause pénale 132

et égalité des armes 12

Immixtion dans le contenu du contrat 177

Liberté dans la fixation des prix 171

Liberté de la concurrence 94

Ordre public économique 157

Pouvoir collectif du marché 172

Liberté d'entreprendre

Contenu 34

Liberté de commerce et de l'industrie 35

Liberté de commerce et d'industrie

Clause de non concurrence 126

Liberté de la concurrence

Contenu 34

et bon fonctionnement du marché 11

et liberté contractuelle 34

et pouvoir du marché 90

Ordre public économique 157

Libertés

économiques 33

individuelles 4

Libertés économique

et ordre public 35

Libertés économiques

Contenu 33

M

Marché

amont 79

atomicité du... 13

aval 79

Conception de Hayek 89

Conception de Rawls 89

conception néolibérale 5

de produits 40

de référence 39

Définition 39

Délimitation 39

Délimitation du marché pertinent 40

Délimitation en droit communautaire 40

Délimitation en droit français 41

Désorganisation du... 164

et contrat 8, 94

et droit 11

et règle de droit 89

géographique 40

Loi du... 90

Notion 39

Ordre spontané 10, 15, 89

régulateur de l'économie 3, 7

Monopole

de droit 23

de fait 23

N

Non professionnel

Clauses abusives 179

Critère du rapport direct 179

Nullité

des clauses anticoncurrentielles 173

Liberté contractuelle 177

O

Obligaion d'information 113

Obligation d'inforation

et réticence dolosive 114

Obligation d'information

Devoir de coopération 113

Devoir de loyauté 113

Domaine 115

en droit positif français 114

et bone foi 113

et garantie des vices cachés 114

et justice contractuelle 113

et vices cachés 115

et vices du consentement 115

Fondement 117

impératif 113

impératif économique 113

impératif moral 113

Obligation accessoire 117

Obligation autonome 117

Rôle 114

Obligation du conseil

Consentement éclairé 190

Obligation générale d'information 186

Nature 186

Sanction 187

Obligations sépciale d'information

et protection du marché 188

Obligations spéciales d'information 187

Sanction 188

Ordre public

concurrentiel 35

Contenu 81

économique 101

Liberté contractuelle 177

Principes directeurs 81

Ordre public économique 157

Autonomie de la volonté 170

Contrats de distribution 171

de direction 157

de protection 157

Distinction protection/direction 174

et droit pénal 158

Liberté contractuelle 171

P

Pouvoir 19

de fait 16

Définition 24

Droit subjectif 22

du marché 23

économique 9, 10, 20

économique et pouvoir jutidique privé 22

économique, fondement 23

et droit objectif 22

et règle de droit 21

Fondement 20

juridique 19

juridique privé 21

juridique privé "définition" 22

Légitimité politique 21

politique 24

public 19

Pouvoir économique

Analyse multicritère 44

collectif 46

Critères d'appréciation 43

Critères structurelles de mesure du... 44

et avance technologique 45

et dépendance économique 23, 58

et droit subjectif 32

et droits subjectifs 27

et interdépendance structurelle de comportements 46

et liens financiers et structurels 47

et mandat 30

et notoriété de la marque 45

et parts du marché 43

et pouvoir juridique 25

et pouvoir politique 21, 24

et prérogative juridique sur l'intérêt d'autrui 29

et qualité des partenaires 48

et qualité du partenaire 23

Fondement 22

La mesure du... 38

Monopole 43

Nature 37

Objet 24

relatif 48

Pouvoir juridique

et droit objectif 25

Fondement 21

Objet 24

Sources 26

sur les intérêts d'autrui 30

Pratiques agressives de vente

Droit de la concurrence 164

Pratiques commerciales agressives

et liberté de décision du consommateur 64

et pratiques anticoncurrentielles 67

Octroi d'avantages en nature 66

Ventes au déballage 65

Ventes directes 65

ventes en liquidation 65

Ventes en soldes 65

Professionnel 49

Définition 51

En droit commun 50

et consommateur 48

et vices cachés 50

Incertitudes quand à la notion du... 51

Notion juridique 50

Publicité

Atteinte à la liberté de décision 61

et organisation de l'ignorance 63

et qualité du consentement 62

Excès de... 62

Fonction 61

incitative 62

Puissance économique

et bon fonctionnement de la concurrence 9

et principes juridiques 10

informationnel 63

Notion 29

R

Refus de vente

et conséquences de l'offre 162

Liberté contractuelle du consommateur 163

Règle de la raison

et concurrence effective 86

et non discrimination 86

et objectivité 86

et prportionnalité 86

Réseaux de distribution 85

Régulateur

Complémentaire du juge 149

et juge du droit commun 150

et juge pénal 150

et parquet 152

Pouvoir réglementaire classique 135

Régulation

et autorités de marché 103

et pouvoir exécutif 103

et pouvoir législatif 103

et principe de la séparation des pouvoirs 103

S

Stockage clandestin

Pouvoir d'achat du consommateur 165

Système juridique

Principes directeurs 81

T

Théorie de la cause

Application 123

Critère de proportionnalité 127

Théorie de la cause et justice contractuelle 123

Transparence

Associations des consommateurs 201

Concurrence effective 159

de l'offre 160

Désorganisation du marché 164

du marché 13

Eclairement du consentement 161

et pratiques commerciales agressives 67

et publicité exagérée 63

Obligation de délivrance des factures 161

Obligation de publicité des prix et des conditions particulières de vente 160

Obligation d'information 114, 160

Publicité 61

Publicité mensongère ou calomnieuses 164

Refus d'information sur les prix 78

Stockage clandestin 164

Vente avec prime 166

Vente liée 166

V

Vente avec prime

Consentement du consommateur 166

Vente liée

Consentement du consommateur 166

Vices de consentement

Inadaptation des... 184

Vices du consentement 107

Violence

Contrainte économique 110

et abus de puissance économique 112

et dépendance économique 111

et dol 108

et erreur 108

et exploitation abusive d'une dépendance économique 111

et nullité du contrat 108

Nécessité d'une contrainte illégitime 110

Pratiques jurisprudentielles françaises 109

Vice de... 108

TABLE DES MATIERES

SOMMAIRE 1

INTRODUCTION 2

PREMIÈRE PARTIE : IDENTIFICATION DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE 15

Chapitre I : L'EXISTENCE DU POUVOIR ECONOMIQUE SUSCEPTIBLE D'ABUS 19

Section I - La nature du pouvoir à l'origine de l'abus 19

§1 - UN POUVOIR ECONOMIQUE 20

A- Un fondement économique du pouvoir 20

B - Un objet économique du pouvoir 24

§2 - UN POUVOIR NON RECONNU PAR L'ORDRE JURIDIQUE 25

A - Le pouvoir économique n'est pas un pouvoir juridique privé 26

B - Le pouvoir économique déborde l'objet des libertés économique 32

Section II : La mesure du pouvoir économique susceptible d'abus 38

§1 - LE POUVOIR ECONOMIQUE ABSOLU SUSCEPTIBLE D'ABUS 39

A - La mesure du pouvoir de domination individuelle du marché 41

B- La mesure du pouvoir de domination collective du marché 46

§2 - LE POUVOIR ECONOMIQUE RELATIF SUSCEPTIBLE D'ABUS 48

A - Le pouvoir déduit de la qualité des partenaires économiques 48

B - Le pouvoir déduit de la dépendance d'un partenaire économique 56

Chapitre II : L'EXISTENCE DE L'ABUS DANS L'EXERCICE DU POUVOIR ECONOMIQUE 59

Section I - Les manifestations de l'exercice abusif du pouvoir économique 59

§1 - DANS LES RAPPORTS ENTRE PARTENAIRES ECONOMIQUES 60

A - Des atteintes à la liberté de décision du partenaire économique 60

B - Des avantages contractuels excessifs 68

§2 - DANS LES RAPPORTS CONCURRENTIELS 74

A- Les abus à effet horizontal venant de l'organisation des relations verticales 75

B - Les abus à effet horizontal organisés dans les relations horizontales 78

Section II - Les conséquences juridiques de l'exercice abusif du pouvoir économique 81

§1 - L'ATTEINTE AU BON FONCTIONNEMENT DE LA CONCURRENCE 82

A - Le principe du bon fonctionnement de la concurrence 83

B- La substitution de la loi de l'auteur de l'abus à celle du marché 89

§ 2 - L'ATTEINTE A L'AUTONOMIE DE LA VOLONTE DU COCONTRACTANT 92

A- Le principe de l'égalité contractuelle, principe directeur du droit des contrats 92

B - La substitution de la volonté de l'auteur de l'abus à celle du contractant 94

DEUXIÈME PARTIE : REGULATION DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE 100

Chapitre I : LE DIRE JURIDIQUE REGULATEUR DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE 105

Section I - La revivification de certains instruments juridiques pour la protection de la partie faible 106

§1 - LA PRESERVATION DU CONSENTEMENT DE LA PARTIE FAIBLE 107

A - La sanction du vice de violence pour la préservation de la liberté du consentement 108

B - La découverte d'une obligation d'information et l'éclairement du consentement. 112

§2 - LA RESTAURATION DE L'EQUILIBRE CONTRACTUEL 120

A - La théorie de la cause pour l'élimination des clauses abusives 121

B- La révision de la clause pénale pour la réparation équitable du dommage contractuel 131

Section II - L'adaptation de la fonction judiciaire pour la protection du marché 134

§1 - LE RENFORCEMENT DU POUVOIR JUDICIAIRE 135

A- La reconnaissance de la fonction juridictionnelle aux autorités du marché 137

B- L'accroissement de la fonction régulatrice du juge 143

§2 - LE CONCOURS DU JUGE ET DES AUTORITES DU MARCHE 149

A- L'intervention du juge en complémentarité du régulateur 149

B- L'intervention du régulateur en complémentarité du juge 153

Chapitre II : LE FAIRE JURIDIQUE REGULATEUR DE L'ABUS DE PUISSANCE ECONOMIQUE 156

Section I - La lutte contre les abus de puissance économique par le renforcement du cadre contraignant 157

§1 - LE RENFORCEMENT DU CADRE CONTRAIGNANT DANS L'EXERCICE DE LA LIBERTE CONCURRENTIELLE 158

A- La prescription de certains comportements indispensables au bon fonctionnement concurrentiel 159

B- L'interdiction de certains comportements nuisibles au bon fonctionnement concurrentiel 164

§2 - LE RENFORCEMENT DU CADRE CONTRAIGNANT DANS L'EXERCICE DE LA LIBERTE CONTRACTUELLE 170

A- La liberté contractuelle limitée par la prohibition de comportements nuisibles au bon fonctionnement de la concurrence 171

B- La liberté contractuelle limitée par l'immixtion dans le contenu du contrat 177

Section II - La lutte contre les abus de puissance économique par la restauration des conditions d'un débat équilibré 183

§1 - LA PRESERVATION DU CONSENTEMENT DE LA PARTIE FAIBLE DANS LES RAPPORTS INDIVIDUELS 184

A- L'information pour l'éclairement du consentement 185

B- Les délais de réflexion pour la liberté du consentement 193

§2 - LE REGROUPEMENT FACE A LA CONCENTRATION DE LA PUISSANCE ECONOMIQUE DANS LES RAPPORTS COLLECTIFS 198

A- Le rôle des groupements de consommateurs dans la lutte contre les abus de puissance économique 199

B- Les contraintes légales et administratives à l'exercice de l'action des associations de consommateurs 207

CONCLUSION GENERALE 211

BIBLIOGRAPHIE 213

INDEX ALPHABETIQUE 232

* 1 « Le combat des lichens et des algues pour assurer leur survie n'est connu que de quelques naturalistes. En revanche, chacun sait que la lutte a été et est toujours la règle dans le monde animal. Walt Disney n'est pas encore parvenu à faire oublier que beaucoup d'espèces ne survivent qu'en s'attaquant aux plus faible qui leur servent de proie, et que même parmi les herbivores, la concurrence peut faire rage pour défendre un territoire ou une position de dominance. Dans le monde animal, seuls survivent ou prospèrent le plus forts. L'oeuvre de sélection ainsi opérée et même considérée par la théorie darwinienne comme une condition de la survie de l'espèce. ». C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, PUF, coll. « Thémis », 2002, p. 10..

* 2 La plupart des doctrines et toutes les religions mettent l'accent sur les valeurs qui sont à l'opposé de la concurrence : l'amour du prochain, les valeurs d'entraide et de solidarité. Elles condamnent l'orgueil, l'envie et la concupiscence qui sont à l'origine de la concurrence entre les Hommes Pour plus de détail v. : C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Ibid. p. 13.

Dans le même sens, Ripert dans ses ouvrages théoriques sur les rapports entre le droit et la morale écrivait : « Dans les sciences économiques nul ne pouvait conserver la froide impartialité du savant. Les rapports entre les Hommes ne sont pas des rapports nécessairement dérivant de la nature des choses. Ils sont crées par les Hommes. Ils peuvent être modifiés par eux, l'humanité rêve sans cesse de les modifier ». G. Ripert, Aspects juridiques du capitalisme moderne, 2° éd., LGDJ, 1951, P.4-5, cité par M. A. Frison-Roche et S. Bonfils, « Articulation entre les systèmes juridique et le système économique », in Les grandes questions du droit économiques, PUF, 2005, P.9 spéc. P. 12.

* 3 Si les hommes se battent pour détruire, faire mal, tuer, pour accaparer des ressources naturelles, des richesses ou des honneurs, c'est non seulement pour vivre ou en tirer avantage mais aussi pour priver les autres de ce qui leur est pris. Ce qui rejoint la thèse développée par Hobbes : si dans la vie sociale, "L'homme est un loup pour l'homme.", c'est parce que chaque homme est en conflit avec tous les autres d'une part par nécessité, afin d'assurer sa conservation, mais d'autre part aussi du fait de passions naturelles qui l'incitent à les violenter et à jouir de certains avantages à leurs dépends. En somme donc, si l'homme est violent, c'est par nature qu'il l'est.

* 4 Un grand poète peut se permettre d'exprimer, du moins sur le ton de la plaisanterie, des vérités psychologiques rigoureusement réprouvées. C'est ainsi que H. Heine nous l'avoue : « je suis l'être le plus pacifique qui soit. Mes désirs sont : une modeste cabane avec un toit de chaume, mais dotée d'un bon lit, d'une bonne table, de lait et de beurre bien frais avec des fleurs aux fenêtres ; devant la porte quelques beaux arbres ; et si le bon Dieu veut me rendre tout à fait heureux, qu'il m'accorde de voir à peu près six ou sept de mes ennemis pendus à ces arbres. D'un coeur attendri, je leur pardonnerai avant leur mort, toutes les offenses qu'ils m'ont faites durant leur vie - certes on doit pardonner à ses ennemis, mais pas avant qu'ils soient pendus »

* 5 S. Freud, Malaise dans la civilisation, coll. « Les classiques des sciences sociales », 2002, trad. de l'allemand par J. Odier, P. 37.

* 6 C'est sur ce postulat que le droit reconnaît une exception au principe du droit commun exprimé par l'expression latine neminem laedere. « S'il est en principe interdit de nuire à autrui, la concurrence qui est une compétition, une lutte, suppose la reconnaissance d'un droit de nuire. L'opérateur qui met sur le marché un produit nouveau ou qui le propose à un prix plus inférieur, nuit indéniablement à ces concurrents. A tel point que son attitude peut avoir pour conséquence la mort économique des entreprises concurrentes. Pourtant cette agression économique ne sera pas fautive si elle respecte les règles qui gouvernent les comportements des entreprises sur le marché. L'ordre public concurrentiel suppose la reconnaissance du droit de nuire car il est inhérent à l'exercice du droit de faire concurrence » C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op. cit., p. 21.

* 7 Il n'est pas douteux que le droit de la concurrence est le droit de la compétition, au sens que les économistes donnent à ce terme. En témoigne la traduction anglaise du droit de la concurrence : competition law.

* 8 Le raisonnement économique qui sous-tend la confiance faite au jeu de la concurrence est connu : D'abord, la compétition entre les opérateurs doit les conduire à utiliser les facteurs de production de la façon la plus efficace et la moins onéreuse pour la collectivité. Ensuite, la concurrence tend à abaisser les prix jusqu'au coût minimal de production. Elle tend à ajuster l'offre de produits et de services à la demande. Elle pousse à l'innovation. J. B. Blaise, Droit des affaires, Commerçant, concurrence, distribution, LGDJ, 1998, n° 701, p. 373.

* 9 Tel est le postulat du fondateur de l'économie libéral Adam Smith, qui présente ce système spontané dans les termes suivants : « Chaque individu s'efforce d'utiliser son capital de telle manière que la valeur de son rendement soit la plus grande possible. Généralement, il n'a pas du tout, l'intention de promouvoir l'intérêt public, pas plus qu'il n'a l'idée de la mesure dans laquelle il est en train d'y contribuer. Ses seuls objectifs sont sa propre sécurité et son gain personnel. Et, dans cette affaire, il est conduit par une main invisible à poursuivre une fin, ce dont il n'avait absolument pas l'intention. Il arrive fréquemment, qu'en recherchant son intérêt propre, il favorise beaucoup plus celui de la société que lorsqu'il a réellement l'intention de la promouvoir. » v. : A. Smith, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, coll. « Les classiques des sciences sociales », traduit par G. Garnier, 1881, Format PDF. Disponible sur : < http://classiques.uqac.ca>

* 10 A l'inverse de certains économistes libéraux comme l'autrichien F. V. Hayek.

* 11 « La ligne de conduite libérale adoptée officiellement par le Maroc dès les conférences de Madrid en 1880 et d'Algésiras en 1906 a connu des bouleversements profonds à l'occasion de la crise économique de 1929 et plus encore avec la guerre mondiale de 1939-1945. Un véritable dirigisme économique a été instauré à travers la réglementation de la quasi-totalité des prix et le contrôle sévères des opérations de change. Au lendemain de l'indépendance et malgré les conformations multiples de l'option libérale du pays. Cette situation est maintenue. En effet, les besoins énormes de construction économique et de préparation prudente du pays ont justifié la poursuite de l'interventionnisme étatique. Il faudra attendre le milieu des années 1980 pour voir engager des réformes qui vont aboutir à l'adoption de la loi sur la liberté des prix et la concurrence d'une part et la conclusion des traités avec l'Union Européenne ainsi que la participation à l'acte de Conférence Mondiale sur le commerce à Marrakech d'autre part ».  M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, FEDALA, 2006, p. 50.

* 12 Ce changement du rôle de l'Etat a été critiqué par F. V. Hayek, qui soutenait que, la socialisation de l'économie et l'intervention massive de l' État sur le marché débouchent sur la suppression des libertés individuelles. Le pouvoir coercitif de l'État transforme toute question économique ou sociale en question politique. Il considère qu'il n'existe pas de différence de nature mais seulement de degré entre le communisme et son imitateur le nazisme, entre socialisme et totalitarisme.

* 13 « Ces libéraux voient précisément dans l'Etat-providence, le mariage contre nature du libéralisme politique et de l'antilibéralisme économique, moral et social, bien quez développé dans le cadre d'une démocratie libérale, il en est pour eux, une perversion ». V. Valentin, Les conceptions néolibérales du droit, Th. Economica, 2002, p. 6. « Cette critique de l'interventionnisme est-elle l'expression d'un néo-libéralisme ? L'expression n'est pas neutre ; on ne peut l'employer qu'aux prix de certaines réserves. Aujourd'hui rarement revendiqué par les libéraux eux-mêmes, elle a la plupart du temps une connotation critique : synonyme d' « ultra », elle est utilisée par ses détracteurs pour marquer une rupture entre le libéralisme des débuts, fondateur de la démocratie et de l'Etat de droit, et le libéralisme contemporain, donné comme perdu dans un délire pro-capitaliste. Dans ce cadre polémique, son emploi est réducteur : il cache d'une part le lien profond entre les dimensions politique et économique du libéralisme, d'autre part la continuité entre le libéralisme classiques et ses représentants contemporains. Ibid, p. 10

* 14 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op. cit., p. 5. A noter que les mêmes auteurs modèrent cette opinion. Ainsi, selon eux : « on ne peut donc accepter de consacrer ce que certains appellent la « dictature du marché » car, dans cette direction aussi, l'échec serait programmé. [...] faut-il alors choisir entre la peste et le choléra ? » Loc. cit..

* 15 « C'était reconnaître, plus de deux siècle plus tard, combien Adam Smith était raison lorsqu'il remarquait que ce n'est pas de la vertu du boucher ou de boulanger que nous attentons la satisfaction de nos besoins, mais de l'avantage qu'il trouve à les satisfaire. Et la concurrence qui se livreront deux bouchers permettra, en principe, une meilleure allocation de ressources, c'est à, dire en l'espèce, une baisse des prix et ou une augmentation de la qualité ou du service ». Pour plus de précisions sur le retour au libéralisme et la diffusion des idées néolibérales, v. : V. Valentin, Les conceptions néolibérales du droit, op. cit., p. 233 et s.

Ce mouvement n'a gagné le Maroc qu'à partir de la fin des années quatre-vingts, notamment par la politique de privatisation et de libéralisation des secteurs considérés auparavant comme stratégiques. La déclaration gouvernementale devant le Parlement présentée le 21 novembre 2002, par le Premier ministre M. Driss Jetou, illustre parfaitement ce nouveau rôle de l'Etat. REMALD n°47-2002 p 141. Pour plus de détails v. aussi : M. Rousset, « Politique administrative et développement au Maroc 1956-2004 », Communication présentée au séminaire organisé par l'Union International des Avocats. L'Association des Barreaux du Maroc et le Bureau de Marrakech à Marrakech les 7 et 8 mai 2004, format PDF, disponible sur : < http://doc.abhatoo.net.ma >

* 16 . Ainsi, comme le présenter un auteur dans sa thèse : « Le rayonnement de la démocratie et du capitalisme semble conférer au libéralisme un caractère hégémonique. [...]. Si les antilibéraux radicaux qui contestent tous les visages du libéralisme - politique, économique et moral - ont disparu, le libéralisme intégral, qui plaide pour une régulation intégralement assurée par le marché, demeure marginal » V. Valentin, Les conceptions néolibérales du droit, op. cit., p. 5, spéc. P. 233 et s.

* 17 Les règles qui permettaient le fonctionnement du marché étaient la consécration d'un droit naturel qui aurait été d'ailleurs par le temps et dans la création duquel l'Etat airait eu peu ou pas de part, sinon dans sa codification et dans sa sanction. F. V. Hayek, a systématisé cette doctrine en opposant les règles du marché où de l'ordre spontané, faites de normes abstraites sans objectifs concret spécifique, en ce sens qu'elles se bornaient à fixer un cadre pour la prise en considération des objectifs individuels et des règles concrètes poursuivant des objectifs d'intérêt général et transformant l'ordre social en organisation, et en considérant que les règles de droit abstraites, générant un ordre de droit spontané, étaient elles même le résultat d'un ordre spontané que l'Etat ne faisait tout au plus que constater, alors que les règles concrètes qui régissent une organisation, sont les résultats d'un constructivisme Etatique.

* 18 Même les économistes socialistes avant leur renonciation à l'illusion communistes, avaient cherché à installer une dose variable de concurrence dans des schémas qui pourtant étaient en contradiction radicale avec la logique libérale. Pour plus de détail v. : J. Schumpeter, Capitalisme, socialisme et démocratie, coll. « Les classiques des sciences sociales », 2000. Format PDF. Disponible sur : < http://classiques.uqac.ca>

* 19 M. I. A. Machichi. Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit.,, p. 36.

En France, le principe de la liberté d'entreprendre n'a pas reçu une consécration constitutionnelle, mais le Conseil Constitutionnel, dans sa décision n° 81-132 DC du 16 janvier 1982, relative aux nationalisations, a cependant désigné la liberté d'entreprendre comme une règle de valeur constitutionnelle. v.. J.-Y, Chérot, op. cit., p. 29 et s.

* 20« On peut affirmer que l'Etat providence a disparu laissant la place à l'Etat régulateur ou l'Etat arbitre » A. Bekkali, « Libéralisation et mutation du service public au Maroc », Mélange M. J. ESSAID, T.3, NAJAH ELJADIDA, 2007, P 148.

* 21 « L'ouverture internationale ainsi que la mondialisation ont accentué l'instabilité des marchés nationaux. Le niveau général de concurrence a eu tendance à s'élever. Ce vaste mouvement de cloisonnement des marchés a bouleversé la donne économique, en même temps qu'il a induit de nouveaux comportements de la part des entreprises qui ont vu s'ouvrir à elles de nouvelles perspectives. Les politiques de concurrence ont pris peu à peu le relais de politiques nationales dirigistes. Progressivement les marchés ont été considérés en tant que tels et la protection de la concurrence est devenue essentielle. Des règles de protection du marché, inspirées de celles existant depuis longtemps dans l'autre côté de l'atlantique, ont été édictées dans la majorité des Etats de l'Union Européenne ainsi que dans plusieurs pays en voie de développement. Ces règles ont été ajoutées à la simple protection des droits subjectifs des concurrents que permettait la traditionnelle action en concurrence déloyale. Dans le même temps, la manière de considérer les stratégies des entreprises a évolué. La volonté de nuire, ou à tout le moins la faute, fondement de l'action en concurrence déloyale, ne pouvait demeurer le critère d'intervention du droit. Protéger la concurrence sur un marché implique de rechercher les effets de comportements des concurrents quelle que soit la volonté de l'opérateur ». C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op. cit., p. 693.

* 22 M.-S. Payet, Droit de la concurrence et de la consommation, Th. Dalloz 2001, n°63, p. 117.

* 23 Dans de nombreuses études récentes, centrées sur les grandes entreprises, il est considéré que les entreprises les plus performantes sont celles qui se comportent de façon agressive avec ses concurrents. Voir par exemple : F. le Roy, « Agressivité concurrentielle, taille de l'entreprise et performance », Xème conférence de l'association internationale de management stratégique, 2001, P.10.

* 24 « La compétition engendre des prix si ajustés à la demande que les bénéfices pour les offreurs des biens et services finissent par disparaître, les conduisant à la faillite. En outre la compétition récompense l'entreprise la plus performante, la plus innovante, et dont les produits offerts sont le plus en adéquation avec la demande. A l'inverse, les entreprises non adaptées disparaissent ». M. A. Frison-Roche, S. Bonfils, Les grandes questions du droit économique, op. cit., P.358

* 25 A noter qu'à ce mouvement naturel de marché s'ajoutent les concentrations voulues par les opérateurs pour leurs avantages économiques, le droit dit « antitrust » s'efforce s'appréhender ces phénomènes.

* 26 « Si le marché permet la confrontation de l'offre et de la demande, cette confrontation n'a de sens que pour aboutir à la réalisation d'une « transaction » entre l'offreur et le demandeur (le juriste préférera parler d'une « opération » puisque la transaction est un contrat nommé par le code civil qui ne présente aucun rapport avec une vente ou une prestation de services). Le but du marché est de permettre les échanges (là encore au sens économique et non pas au sens économique et non pas au sens du code civil ». C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op. cit., p. 678.

* 27 L'article 230 dudit Dahir dispose : « Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi ».

* 28 « Ainsi, les plus rudimentaires des échanges économiques ne se réalisent pas sans contrat. Le fait économique se repose sur une construction juridique qui, pour rester le plus souvent, sous-jacente au rapport de marché, lui donne la sécurité que tous les opérateurs attendent de l'organisation juridique des rapports économiques. Il n'en va pas de même pour les transactions plus sophistiquées qui caractérisent les économies dites avancées. Car, alors le facteur juridique devient l'un les déterminants de l'opération sans le droit beaucoup d'opérations seraient économiquement impossible, faute de détermination suffisante de leurs termes essentiels. Alors le facteur juridique devient un élément constitutif de l'opération, on craint que le consommateur ne soit pas capable de le saisir ou d'en apprécier les conséquences ». C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, loc. cit..

* 29 « C'est de cette corrélation que résulte le droit de la concurrence » M. A. Frison-Roche et M. S. Payet, Droit de la concurrence, Dalloz, 2006, n° 21. p. 23.

Pour une réflexion sur la place du contrat dans les marchés concurrentiels et les marchés régulés, v. M. A. Frison-Roche, « Contrat, concurrence, régulation », R.T.D.civ, 2004, p. 451 ; F. Dreifuss-Netter, « Le droit de la concurrence et droit des obligations » R.T.D.civ. 1990. 369-393 ; Droit du marché et droit commun des obligations, R.T.D.com. 1998.1-10 et spéc. B. Fages et J. Mestre, « L'emprise du droit de la concurrence sur le contrat », p. 71-81 ; R. Poesy, « Le conseil de la concurrence, juge du contrat », L.P.A, 20 oct. 2002. p. 4 et s. ; J. Rochefeld, « Nouvelles régulations économiques et droit commun des contrats », R.T.D.civ. 2001, p. 671 et s. ; N. Brunetti, Droit de la concurrence et droit des contrats, DEA, Monpelier, 1995, p. 40

* 30 Notamment des clauses de partage du marché ou des clauses de con concurrence.

* 31 A. Karimi, Les clauses abusives et la théorie de l'abus de droit, Th. LGDJ, t.306, n°38, p. 15, cité par L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, th. Toulouse, 2005, n° 528, p. 446.

* 32 De fait, le passage d'une société rurale, mesurée et lente, à une société ayant pour moteur la sollicitation pressante des consommateurs a profondément transformé le contexte dans lequel évolue le droit des contrats. Face à une pratique contractuelle de masse marqué par l'essor d'une publicité tapageuse et omniprésente, l'apparition de méthodes de vente dites agressives, le développement d'un crédit qui dilue la perception du caractère onéreux de l'opération, la réalité socioéconomique démontre qu'à la formule de Fouillée « Qui dit contractuel dit juste » doit répondre celle de Lacordaire « Entre le fort et le faible, c'est la liberté qui asservit, la loi qui affranchi ».

* 33 Le principe de la liberté contractuelle, fondé sur l'égalité des parties au contrat, était compatible avec le contexte dans lequel il a été adopté. Ce contexte est résumé par des auteurs comme suit : « A l'époque du code civil, la production comme le commerce conservait un caractère artisanal et familial, de telle sorte que, les relations contractuelles étaient généralement personnalisées. Certes, ces relations pouvaient revêtir un caractère inégalitaire. Mais cette inégalité n'était pas institutionnalisée, structurelle. Les contrats étaient le plus souvent conclus à la suite d`une négociation qui permettait aux parties d'en fixer les éléments essentiels. Or, à ce double point de vue, la société a connu une évolution maintes fois retracée ». F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, Dalloz, 2006, n° 34, p. 38.

* 34 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op. cit., p. 128.

* 35 M.-S. Payet, Droit de la concurrence et de la consommation, op. cit., n° 63, p. 117.

* 36 Car « la liberté de commerce n'est une faculté accordée aux négociants de faire ce qu'ils veulent ; ce serait plutôt sa servitude. Ce qui gène le commerçant, ne gène pas pour cela le commerce ». Cet avertissement de Montesquieu (De l'esprit des lois, livre XX, chap. 12) recèle toute l'ambigüité qui caractérise encore aujourd'hui la liberté des opérateurs sur le marché.

* 37 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op. cit., p. 481.

Cf. infra n° 37 et s.

* 38 M. A. F. Roche, S. Bonfils, Les grandes questions du droit économiques, op. cit., 2005, P.358.

* 39 « La règle de droit est inséparable du processus concurrentiel. Les marchés ne se passent pas de règles ». M. A. Frison-Roche et M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 7, p. 9.

* 40Dahir n° 1-00-225 du 2 rabii I 1421 (B.O. du 6 juillet 2000)

La loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence vient combler un vide juridique et institutionnel et ainsi remédier aux insuffisances de celle du 12 Octobre 1971 portant sur le contrôle des prix et les conditions de détention et de vente des produits et marchandises. Ladite loi, à côté de plusieurs textes législatifs et règlementaires éparpillés, dont il serait fastidieux de présenter la liste exhaustive dénotent de l'option adoptée par le Maroc. Libéralisation progressive, privatisation, déréglementation, implication du privé dans la gestion des affaires publiques ; « Cette loi a pour but la redéfinition du rôle de l'Etat dans l'économie et l'instauration d'un environnement économique compétitif. Ainsi, Depuis la publication de cette loi, l'action dirigiste de l'Etat ne peut plus avoir lieu que dans des conditions et des situations exceptionnelles ». Pour plus de détail v. : M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op.cit., p. 207 et s ;

* 41 « Sous cet angle, le droit de la concurrence considère la concurrence comme une donnée acquise et il se préoccupe surtout d'en limiter les excès [...] et il sanctionne la concurrence excessive, celle qui utilise des moyens contraires à une certaine éthique commerciale. ». J. B. Blaise, Droit des affaires, commerçants, concurrence, distribution, op. cit., n° 620 p. 323 ; Il s'agit de la théorie de la concurrence déloyale, oeuvre du juge à travers l'application des règles de la responsabilité civile, spécialement l'article 84 du D.O.C. ; En France, les premières règles du droit de la concurrence sont l'oeuvre de la jurisprudence. Dès la fin du XIX siècle. En se fondant sur les articles 1382 et 1383 du code civil, les juges ont élaboré la théorie de la concurrence déloyale. L'enjeu n'est pas de défendre la libre concurrence. L'on considère que la concurrence et naturelle, vive et qu'en quelque sorte elle se défend toute seule. Il s'agit plutôt de sanctionner les actes considérés comme abusifs dans l'activité concurrentielle. Pour plus de détail v. Y. Serra, « Concurrence déloyale », Rép. com. Dalloz 2005.

* 42 Le préambule de la loi 06-99 dispose « La présente loi a pour objet de définir les dispositions régissant la liberté des prix et d'organiser la libre concurrence. Elle définit les règles de protection de la concurrence afin de stimuler l'efficience économique et d'améliorer le bien-être des consommateurs. Elle vise également à assurer la transparence et la loyauté dans les relations commerciales ».

* 43 Dans cette approche, la règle juridique est posée pour répondre à un besoin, elle a un but. Dans le droit de la concurrence ce but est externe à la règle et même à la discipline. Dans cette mesure, le droit de la concurrence peut être conçu comme un instrument pour assurer le bon fonctionnement du marché afin d'atteindre une finalité plus profonde qui est le bien être des individus. Cette nouvelle forme d'instrumentalisation de la règle du droit a inauguré une nouvelle forme de classification du droit. Ainsi, selon le professeur J. Calais-Auloy : « La classification traditionnelle, fondée sur la nature des règles (droit civil, droit pénal, procédure, etc.) doit être combinée avec une classification transversale plus récente, dictée par la fonction des règles juridiques ; [...] le droit de la consommation et le droit de la concurrence appartiennent à cette seconde classification. J. Calis-Auloy, « L'influence du droit de la consommation sur le droit civil des contrats », RTD.civ 1994, p. 239.

* 44 Le début de la société de consommation de masse remonte en effet, dans les pays européens, aux années d'après guerre. C'est à cette époque que la société de consommation est devenue ce qu'elle est à l'heure actuelle : « une société d'abondance ». « Parallèlement l'on a assisté, notamment, au développement de crédit comme instrument de consommation. Les contrecoups de cette évolution relativement rapide sur la liberté du consommateur ne vont pas être négligeables. L'état d'abondance relative comporte des implications considérables et perceptibles à chacun d'entre nous pour l'exercice de la liberté de choix de consommateurs ». N. Chardin, Le contrat de consommation de crédit et l'autonomie de la volonté, Th. LGDJ, 1988. n° 18, p. 23.

* 45 Diffuse, les séductions et les pressions procèdent de cet environnement ne sauraient le plus souvent s'analyser en un dol ou une violence, ne pourraient-elle qu'il faudrait encore agir en justice et démontrer l'existence du vice, des marches lentes et onéreuses, si l'on considère l'enjeu souvent assez limité du contrat.

* 46 M. S. Payet, Droit de la concurrence et de la consommation, op. cit., n° 63, p. 117

* 47 « Le début de la société de consommation de masse remonte en effet, dans les pays européens, aux années d'après guerre. C'est à cette époque que la société de consommation est devenue ce qu'elle est à l'heure actuelle : « une société d'abondance ». Parallèlement l'on a assisté, notamment, au développement de crédit comme instrument de consommation ». N. Chardin, Le contrat de consommation de crédit et l'autonomie de la volonté, op. cit., n° 18, p. 23.

* 48 Au-delà de ces enjeux politiques, les nouvelles règles ont été dictées par l'évolution récente des circuits de distribution. En effet, de profondes mutations économiques ont affecté ces dernières années aussi bien la grande distribution de masse que la petite distribution intégrée et spécialisée. En France, ces mutations économiques, notamment dans le secteur agro-alimentaire, ont contribué à placer les grandes surfaces en situation dominante face aux producteurs. Cette inversion des rapports de force, qui a donné lieu à de nouvelles pratiques telles que le déréférencement injustifié, a révélé l'inadaptation de la législation existante, notamment celle concernant le contrôle des concentrations, l'abus de position dominante, la transparence tarifaire et les discriminations.

* 49 « Sauf cas exceptionnel, vous le savez, il y a toujours des produits concurrents d'au moins une autre marque. Il y a toujours, ou presque toujours, des marques de notoriété équivalente. Il y a toujours, ou presque toujours, des produits d'une qualité équivalente. On le sait très bien. Que va donc faire notre acheteur ? Il va retenir un produit et éliminer un autre. [...] Mais, que va faire le vendeur éliminé qui ne vend pas ? S'il perd un client, ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave ? Si ce client représente 1 % de son chiffre d'affaires, en effet, ce n'est pas grave. Mais, si ce client représente 5 % ? Je crois pouvoir dire que perdre délibérément 5 % du chiffre d'affaires est très grave. Je ne connais pas beaucoup de chefs d'entreprises. Je ne parle plus du malheureux agent commercial qui va se faire mettre à la porte parce qu'il n'aura pas réalisé ses objectifs, mais je parle du chef d'entreprise qui accepte une telle perte de chiffre d'affaires. S'il est P.D.G., il va se faire révoquer par son conseil d'administration. S'il est propriétaire de son entreprise, il va se demander si, avec cette perte de 5 %, il va pouvoir continuer à étaler ses frais fixes. A 5 %, cela va peut-être passer. Mais à 10 %, cela ne passera plus. Va-t-il alléger ses charges en réduisant la publicité pour sa marque ? Va-t-il « dégraisser », c'est-à-dire licencier ? Et si cela dure, ne va-t-il pas devoir se « délocaliser », ou, tout simplement, déposer son bilan ? ». X. de Mello, « Loyauté ou liberté de la concurrence », LPA, 1994, n° 83, P. 17 et s.

* 50 « La société de consommation de masse telle qu'elle s'est développée à partir de la fin du XIXe siècle a amené au développement de méthodes de diffusion des produits dont le professionnel pourrait être tenté de profiter pour écouler ses produits plus facilement et en plus grand nombre ». H. Claret, « Contrats et obligations - protection du consommateur », art. 1109, fasc. 10, J.Cl. Civil, n°8.

* 51 J.-Guy Nadeau, Enchevêtrés dans des histoires de pouvoir, Théologiques, vol. 8, n° 2, 2000, p. 4.

* 52 M. Cantin Cumyn, Le pouvoir juridique, huitième Conférence, Wainwright prononcée, 24 oct. 2006, p. 230.

* 53 J. William, Essai sur le fondement du pouvoir politique, Paris, Ophrys, 1968. Part. 1.3, p. 48

* 54 J. Locke, Plan du texte de Jhon Lock, En ligne le 17/10/2008, disponible sur : http://www.e3a.fr/docs/2001/com_francais2_corr_2001.pdf

* 55 Voir not. : R. Dormois, R.F.S.P., vol. 56, n° 4, août 2006, p. 619-651.

* 56 « Les principales sources du pouvoir politique sont : l'autorité, les ressources humaines, les compétences et les connaissances, les moyens matériels, les sanctions et les facteurs tangibles », G. Sharp, The Politics of Nonviolent, cité par Srdja Popovic, Andrej Milivojevic, Slobodan Djinovic in Action in la lutte non violente, approche stratégique de la tactique quotidienne, Centre for Applied NonViolent Action and Strategies, 2006.

* 57 M. Cantin Cumyn, « le pouvoir juridique, huitième Conférence Wainwright prononcée », 24 oct. 2006, p. 217.

* 58 Notamment la théorie de la représentation : le cas de la tutelle légale, datif ou testamentaire ainsi que le cas du mandat. Pour plus de détails, v. infra, n° 37 et s.

* 59 Pour plus de détail sur la non reconnaissance du pouvoir économique par le système juridique v. infra n° 28 et s.

* 60 A noter dans ce sens un autre pouvoir économique encore puissant, c'est le pouvoir économique des ménages, par exemple pour les ménages, leur pouvoir économique c'est la consommation qui peut au final décidé de la vie ou la mort d'une entreprise, si les ménages refusent de consommer, l'entreprise court à la perte, au lieu de réaliser du bénéfice, elle s'endette. Dans ce sens, on estime que c'est le seul pouvoir capable d'équilibrer les rapports de forces entre professionnels et consommateurs. Car par la nature des choses, c'est le pouvoir qui arrête le pouvoir.

* 61 Il peut s'agir aussi d'une entreprise publique chargée d'une mission de service public. Pour plus de détail sur la question v. : D. Brault, « Service public et position dominante : peut-il avoir abus ? », LPA, 2004, n° 239, p. 36 et s.

* 62 Pour plus de détail sur la question v. : M. A. Lafortune, « Droit de la concurrence et exercice abusif des droits de propriété industrielle », LPA 2004, n° 132, p. 3 et s

* 63 Pour plus de détail v. Infra. n° 51 et s.

* 64 J. Calais-Auloy et F. Steinmetz, Droit de la consommation, Précis Dalloz, 9e éd., 2006, n° 2 et s. ; « Il peut exister des situations particulières dans lesquelles le rapport de force est inversé : de petits artisans, par exemple, peuvent se trouver en face de clients exigeants ». loc. cit.

* 65 Si les choix qui s'offrent à vous pour survivre sont, par exemple, la culture d'un petit potager dans votre jardin ou la prostitution (alternative que connaissent des millions de gens dans les pays du tiers-monde), le «pouvoir» économique vous proposera un troisième choix, par exemple la confection de tapis destinés à l'exportation

* 66 V. infra. n° 37 et s.

* 67 La jurisprudence française a été influencée par cette définition : v. Civ. 2°, 28 janv. 1954, Gaz. Pal. 1954.1.205. cité par : H. L. et J. Mazeaud, F. Chabas, Leçons de droit civil, Introduction à l'étude du droit, 11ème ed., par F. Chabas, DELTA, 2000, n° 155, p. 253.

* 68 M. J. Essaid, Introduction à l'étude du droit, 3ème éd., coll. Les connaissances, Babel, 2000, p. 36 ; Ainsi, le droit de propriété qui confère à son titulaire un certain nombre de prérogatives est un droit subjectif. Il en va de même du droit de créance. Ce droit subjectif permet à son titulaire - le créancier - de traduire le débiteur devant le tribunal compétant pour obtenir le remboursement de la dette.

* 69 M S Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 65, p. 120.

* 70 « Le terme pouvoir est depuis longtemps, habituel en philosophie politique et en droit public : le principe dit de la séparation des pouvoirs a fait couler beaucoup d'encre ; en droit administratif, la jurisprudence administrative a permis l'élaboration de la théorie de détournement de pouvoir et, dans une réflexion transdisciplinaire, la doctrine a été amenée à comparer l'abus de droit « subjectif » et le détournement de pouvoir ». F. Terré, Introduction générale au droit, Dalloz, 2006, n° 205, p. 163 ; Dans nos développements nous entendons par pouvoir juridique, le pouvoir juridique privé, c'est-à-dire le pouvoir qui trouve son fondement dans un contrat à l'instar du mandat.

* 71 Il s'agit d'un pouvoir juridique privé par opposition au pouvoir juridique public

* 72 Fr. Terré, Introduction générale au droit, op. cit., n° 201, p. 161.

* 73 « L'ensemble des droits d'une personne forme son patrimoine. Ainsi se trouvent liées les notions de personne, de patrimoine et de droits subjectifs. Le droit subjectif suppose une personne qui en est titulaire, et il n'existe que contenu dans un patrimoine ». G. Courtieu, « Droit à réparation - Abus de droit, notion », art. 1382-1386, fasc. 131-1, J.Cl. Civil, n°1

* 74 Droit de créance, de propriété, d'usufruit, de servitude...

* 75 M. J. Essaid, Introduction à l'étude du droit, op. cit., p. 415.

* 76 Lorsque la règle de droit confère à une personne un droit subjectif, lui permet de l'acquérir, de le transmettre, d'en disposer, on dit que cette personne a la capacité de jouissance.

* 77 M. J. Essaid, Ibid, p. 36.

Ainsi, le droit de propriété qui confère à son titulaire un certain nombre de prérogatives est un droit subjectif. Il en va de même du droit de créance. Ce droit subjectif permet à son titulaire - le créancier - de traduire le débiteur devant le tribunal compétant pour obtenir le remboursement de la dette.

* 78 Comme le relevait Ripert, le droit subjectif est une source d'inégalité, car celui qui le possède à une situation supérieure à celle des autres G. Ripert, Le déclin du droit, Etudes sur la législation contemporaine, LGDJ, 1949, n° 61, p. 190, in M. S. Payet, op. cit. n° 83, p. 143.

* 79 J. Picote, Juridictionnaire, Recueil des difficultés et des ressources du français juridique, CTTJ, Mai 2008, p. 43.

* 80 Le principe de l'abus de droit est reconnu tant par tous les systèmes juridiques de droit civil que par la common law («abuse of rights»), bien que la notion elle-même ne tire pas son origine de principes élaborés par la common law. Sous ces régimes de droit, le titulaire d'un droit ou le propriétaire d'un bien ne peut exercer son droit ni user de son bien que de façon légale, raisonnable, et non abusive. J. Picote, op. cit., p. 50.

* 81 En France, la question de l'abus de droit a passionné la doctrine du début de siècle, et donnée naissance à la très célèbre controverses Josserand et Planiol. V. not. : L. Josserand, De l'abus de droit, A. Rousseau, 1905 ; De l'esprit des droits et de leur relativité, Essai de téléologie juridique, Dalloz, 2ème éd., 1939 ; Planiol et Ripert, Traité élémentaire du droit civil, t. 2, LGDJ, 1932 ; R. Saileilles, De l'abus de droit, A. Rousseau, 1905. A noter que les arguments développés par ces auteurs conservent un intérêt très actuel, comme en témoignent les récentes études consacrées à ce thème.

* 82 M. S. Payet, Droit de la concurrence et de la consommation, op. cit. n° 81, p. 142.

* 83 Aussi peut-on dire qu'il y a abus de droit chaque fois que l'exercice d'un droit subjectif reconnu, que l'accomplissement d'une prérogative inhérente à ce droit, que l'acte découlant de ce droit, que l'usage que le titulaire en fait ou que la conduite manifestée dans l'exercice de ce droit présente un caractère malveillant, excessif ou abusif.

* 84 M. S. Payet, loc. cit.

* 85 R. Saileilles, De l'abus de droit, op. cit., p. 13, cité par M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 82, p. 142

* 86 V. supra, n° 33 et s.

* 87 « La qualification de l'abus de droit ne suppose pas l'appréciation de la situation concrète des parties au procès. Dans les droits de la concurrence et de la consommation, cette situation concrète des parties est, en revanche, déterminante. Elle est un élément de qualification de l'abus ». A. Pirovano, M. M. Salah, « L'abus de dépendance économique : une notion subversive ? », L.P.A, 24 sept. 1990, n° 105, p. 5.

* 88 « La puissance économique constitue également dans la relation professionnel / consommateur, l'exercice d'un pouvoir de fait et non d'un droit subjectif ». J. Ghestion, « L'abus dans les contrats », Gaz. Pal., 1981, 2, doctr., p. 383.

* 89 Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, publié sous la direction de G. Cornu, PUF, 7ème éd., 1998.

* 90 C'est « l'acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom.

* 91 On constate, en effet, que d'importantes contraintes lient tout administrateur alors que ces contraintes sont absentes dans l'exercice d'un droit par son titulaire. Ce dernier peut omettre de se prévaloir de son droit ou poser des gestes qui en diminuent la valeur sans que son inaction ou sa mauvaise gestion n'entraînent en soi une sanction. Ce n'est qu'exceptionnellement que le titulaire d'un droit se voit obligé de justifier l'usage qu'il en fait. Pour plus de détails sur la question, voir not. : L. Cadiet et Ph. Le Tourneau, « Abus de droit », Rép. Civ. Dalloz, mai 2002, n° 173 et s.

* 92 F. Terré, Introduction générale au droit, op. cit. n° 205, p. 163

* 93 Dans ce cas, comme on l'a déjà vu, on se trouve en présence d'un abus de droit au sens strict dont l'exemple typique peut être fourni par la jurisprudence sur l'abus de droit de propriété

* 94 « Sans doute, la qualification des prérogatives juridiques conférées à une personne dans l'intérêt d'autrui est sujette à discussion : véritable droit subjectif pour les uns, simple pouvoir pour les autres. En toute hypothèse, ces prérogatives sont susceptibles d'abus. Leur terrain d'élection est celui des groupements de personnes, que ces groupements n'aient pas la personnalité juridique, comme la famille, ou qu'ils l'aient, comme les sociétés. Mais si la première ne donne lieu qu'à un nombre infime de procès, les secondes ont connu à l'époque contemporaine une augmentation du contentieux relatif à l'abus de droit ». L. Cadiet et P. Le Tourneau, loc. cit.

* 95 Plus récemment, un auteur a proposé de restreindre la catégorie des droits subjectifs aux seules prérogatives accordées à une personne pour la réalisation de ses intérêts propres, et de la distinguer de la catégorie des pouvoirs qui seraient les prérogatives accordées à une personne dans l'intérêt d'autrui. La théorie de l'abus de droit ne s'appliquerait qu'à la sanction des droits subjectifs ainsi limités, tandis que les pouvoirs relèveraient de la théorie du détournement de pouvoir. E. Gaillard, Le pouvoir en droit privé, préf. G. Cornu, 1985, Economica,, n° 57 et s. Cité par : L. Cadiet et P. Le Tourneau, « Abus de droit », op. cit., n° 11.

* 96 Il faut constater et admettre, avec E. Gaillard que, « à elle seule, la qualification de pouvoir suffit à fonder le contrôle judiciaire de l'usage de la prérogative ainsi qualifiée ». E. Gaillard, loc. cit..

* 97 Le cas, notamment, de la révocation abusive des « mandats » des dirigeants sociaux, aux abus de majorité ou de minorité, l'abus de fraude ou de détournement de pouvoir.

* 98 M. S. Payet, Droit de la concurrence et de la consommation, op. cit., n° 83, p. 143

* 99 Montesquieu, De l'Esprit des lois, XI, II. Cité par M. Kdhir, « Le principe de la liberté du commerce et de l'industrie : mythe ou réalité », Rec. D., 1994, p. 30 et s.

* 100 F. A. V. Hayek, Droit, législation et liberté, Règles et ordre, PUF, 1980, par C. De Salle, Présentation de grands textes libéraux, Centre Jean Gol, Disponible dans http://www.centrejeangol.be/pensee-liberale/documents/DroitLegislationetLibertevolIFriedrichvonHayek_000.pdf, visité le : 18/10/2008.

Les « expédients », ce sont des mesures prises dans le but de rétablir des prétendues injustices.

* 101 A l'instar de la liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication, liberté de réunion pacifique, liberté d'association ainsi que des libertés économiques comme le liberté d'entreprendre.

* 102 Lexique des termes juridiques, Dalloz, 13ème édition, p. 337.

* 103 Ainsi, le préambule de loi 06-99, relative à la liberté des prix et de la concurrence, consacre implicitement le principe de la liberté d'entreprendre. Le texte dispose, en effet, que les prix sont librement déterminés par le jeu de la concurrence. Or, la concurrence n'aurait guère de signification s'elle ne s'accompagne de la liberté d'entreprendre.

* 104 Le Doyen J. Carbonnier considère ainsi que « faute d'un objet assez précis, ce n'est qu'une virtualité de droit ». J. Carbonnier, Droit civil, Introduction, PUF, coll., Thémis, 29ème éd., 1999, n° 162, p. 313.

* 105 Il ne s'agit pas ici de trancher l'épineuse question du domaine de l'abus de droit, et notamment de l'application de la théorie à l'abus des libertés. L'objet de ce développement est de montrer que la prérogative dont il est abusé dans l'exercice du pouvoir économique est une puissance de fait, distincte de la liberté qui en permet l'exercice.

* 106 « La liberté contractuelle s'exprime à travers une triple faculté : contracter ou ne pas contracter, choisir librement son contractant, déterminer librement le contenu du contrat ». F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit civil, les obligations, op. cit., n°23, p. 29

* 107 « Le progrès économique dans une économie libérale passe en premier lieu par la liberté d'entreprendre qui garantit à tous les acteurs économiques une certaine égalité lors de l'accès au marché [...] ainsi, à coté de la liberté des prix, la liberté d'accès, c'est-à-dire d'entreprendre constituent les bases d'une concurrence libre, saine et loyale ». A. Sqaualli, « La liberté d'entreprendre à l'épreuve du droit du jeu de la concurrence, REMDED, n° 49, Numéro spécial du colloque : les prix et la concurrence entre la liberté de l'entreprise et la protection du consommateur, 2004, p. 136

* 108 Ce principe présente une grande ambiguïté. Pour plus de détail sur la question v. not. : Y. Guyon, Droit des affaires, t1, Droit commercial général et sociétés, 11 éd., Economica, 2001, n° 797, p. 856. M. Kdhir, « Le principe de la liberté du commerce et de l'industrie : mythe ou réalité », Rec. D., 1994, p. 30 et s.

« Il faut renoncer à la fiction d'un principe clos sur sa propre abstraction. Expression de base du système juridique et économique français, le principe de la liberté du commerce et de l'industrie n'est pas statique, mais dynamique ; il est soumis précisément selon les circonstances à une profonde transformation qui va de concert avec les changements de l'ordre social concret dans lesquels il déploie ses effets. Il s'agit d'un principe à « géométrie variable » ». M. Kdhir, loc. cit.

* 109 « La liberté du commerce semble avoir une valeur constitutionnelle en France ,mais qui est cependant mois affirmée que celles d'autres libertés plus fondamentales. Il s'agirait du principe constitutionnel de second rang ». Y. Guyon, Droit des affaires, T1, Droit commercial général et sociétés, op. cit., n° 797, p. 855.

* 110 « Une constatation s'impose dès l'abord : la liberté du commerce et de l'industrie est destinée aux entreprises et aux particuliers. Les personnes publiques - autrement dit l'Administration - n'en bénéficient pas. Ici, la liberté des personnes privées ne semble pas s'arrêter là où commence la liberté des personnes publiques. En revanche, la liberté des personnes privées semble être un obstacle à la liberté des personnes publiques. Bref, la liberté du commerce et de l'industrie, individuelle ou collective, est bien une liberté publique, c'est-à-dire des droits et prérogatives accordés aux personnes privées ». M. Guibal, « Commerce et industrie », Rép. com. Dalloz, 2003, n° 53.

* 111 Ainsi, l'Etat doit garantir cette égalité et ne doit pas, au travers de ses interventions, fausser le jeu de la concurrence en favorisant une entreprise au détriment d'une autre.

Selon le professeur Serra : « la concurrence n'est effectivement concevable que si les agents économiques peuvent, pour l'essentiel, développer librement leurs activités ». Y. Serra, Le droit français de la concurrence, Dalloz, 1993, p. 1.

* 112 « En effet, le principe de la liberté de la concurrence suppose que soit reconnue la liberté de commerce et d'industrie, notamment l'une de ses expressions : la liberté d'entreprendre ». Ibid., p. 12.

* 113 Ibid., p. 16.

* 114 Le contrat en ce sens est « le pilier du marché ». M. A. Frison-Roche, « Le contrat et la responsabilité : consentements, pouvoirs et régulation économique », R.T.D.civ., 1998, n° 9, p. 46.

* 115 M. D. A. Machichi, Concurrence, droits et obligations des entreprises au Maroc, Economiste, 2003, p. 32.

« Cette liberté individuelle ne peut cependant être totale et le droit lui apporte des limites. Cependant, celle-ci, aussi nombreuses soient-elles ne sont jamais que ses exceptions ». J. B. Blaise, Droit des affaires, Commerçants, concurrence, distribution, op. cit., p. 327, n° 626.

* 116 G. Ripert, R. Roblot, Traité du droit commercial, t1, 18ème éd., par L. Vogel, LGDJ, 2001, p. 63, n° 78.

* 117 C'est le cas des dispositions impératives que les sujets de droit ne doivent pas ignorer.

* 118 Pour une réflexion sur la soumission du contrat à l'ordre public concurrentiel, v. M. A ; F ; Roche, « Contrat, concurrence, régulation », R.T.D.civ, 2004, p. 451 ; F. Dreifuss-Netter, « Droit de la concurrence et droit des obligations », R.T.D.civ. 1990. 369-393 ; Droit du marché et droit commun des obligations, R.T.D.com. 1998.1-10 et spéc. B. Fages et J. Mestre, L'emprise du droit de la concurrence sur le contrat, p. 71-81 ; R. Poesy, « Le conseil de la concurrence, juge du contrat », L.P.A, 20 oct. 2002. p. 4 et s. ; J. Rochefeld, « Nouvelles régulations économiques et droit commun des contrats », R.T.D.civ. 2001, p. 671 et s. ; N. Brunetti, Droit de la concurrence et droit des contrats, DEA, Monpelier, 1995, p. 40

* 119 « Avec la protection des marchés en change de registre. Il ne s'agit plus seulement de régler un conflit d'intérêts entre deux entreprises, comme dans le droit de la concurrence déloyale. Il s'agit de veiller au respect d'un certain ordre économique, celui de l'économie de marché, c'est-à-dire de la régulation de la production et de l'offre par le libre jeu de la concurrence entre les opérateurs ». J. B. Blaise, Droit des affaires, Commerçants, concurrence, distribution, op. cit., p. 373, n° 700.

* 120 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op. cit., p. 21.

L'opérateur qui met sur le marché un produit nouveau ou qui le propose à un prix très inférieur, nuit indéniablement à ses concurrents. A tel point que son attitude peut avoir pour conséquence la mort économique des entreprises concurrentes. Pourtant cette agression économique ne sera pas fautive s'il respecte les règles qui gouvernent le comportement des opérateurs sur le marché. L'ordre public concurrentiel suppose la reconnaissance du droit de nuire car il est inhérent à l'exercice du droit de faire concurrence.

* 121 Y. Serra, Le droit français de la concurrence, op. cit., p. 11.

* 122 Ce ne sont pas les prérogatives juridiques dont dispose l'auteur de l'abus qui le place dans une situation de puissance, mais plus généralement sa liberté dans la lutte concurrentielle, ainsi que celle, corrélative, de conclure un contrat de refuser de le souscrire ou de le subordonner aux conditions qui lui conviennent, c'est-à-dire, sa liberté contractuelle.

* 123 Pourtant, ces phénomènes ne sont pas inconnus d'autres domaines de droit. L'état de dépendance, par exemple, été un des éléments proposés pour dégager un critère de qualification du contrat de travail. Ainsi que les états de dépendance trouvant leur source dans une relation contractuelle.

Pour plus de détail sur la question v. G. J. Virassamy, Les contrats de dépendance, essai sur les activités professionnelles exercées dans une dépendance économique, th. Paris, L.G.D.J., 1986.

* 124 M. S. Payet, Droit de la concurrence et de la consommation, op. cit , n° 93, p. 155

* 125 « Mais il ne faudrait pas croire que ces tentatives on tété couronnées de succès, que les juristes seraient parvenus à mettre en équation une réalité dont l'ordre interne jusque là échappé aux économistes ». C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op. cit., p. 167.

* 126 Ibid., p. 168.

* 127 Ibid., p. 169

* 128 M. A. Frison-Roche et S. Bonfils, « Articulation entre les systèmes juridique et le système économique », in Les grandes questions du droit économiques, PUF, 2005, p. 380.

* 129 A. Ronsano, « Le rôle de la clientèle en droit de la concurrence », in Clientèle et concurrence, Approche juridique du marché, Etude du CREDA, sous la dir. de Y. Chaput, Litec, 2000, p. 37-82, (extrait) paru dans, Les grands questions du droit économique, par M. A. Frison-Roche et S. Bonfils. op. cit., p. 384.

* 130 Le premier critère du marché pertinent est le marché géographique, vieux souvenir du temps où les marchés étaient avant tout localisés. M. A. Frison-Roche et S. Bonfils, Les grandes questions du droit économiques, op. cit., p. 379.

* 131 M. A. Frison-Roche et S. Bonfils, Les grandes questions du droit économiques, loc.cit..

* 132 Ibid.

* 133 Paris, 17 juin 1992, BOCCRF, n° 13/92, cité par C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op. cit., p. 170.

* 134 « La substituabilité est d'abord de nature technique, lorsque deux produits sont semblables dans leur structure ». M. A. Frison-Roche et S. Bonfils, Les grandes questions du droit économiques, op. cit., p. 379.

* 135 G. Blanc, « Les frontières de l'entreprise en droit commercial », Rec. D., 1999, Chroniques p. 415.

* 136 CE, 29 juill. 1994, n° 130503, SA Coopérative d'achat mutualiste des Instituteurs de France : Rec. CE, p. 365 ; Juris-Data n° 1994-049842

La même règle se déduit de l'arrêt du Tribunal des conflits du 19 janvier 1998, selon lequel (...) ce litige, qui ne met pas en cause l'exercice des prérogatives de puissance publique du service postal, ressortit à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, sous réserve d'éventuelles questions préjudicielles sur l'appréciation de la légalité d'actes administratifs relatifs à l'organisation et aux conditions d'exploitation de ce service. T. confl., 19 janv. 1998 : Juris-Data n° 1998-710045 ; Rec. D. 1998, jurispr. p. 329.

* 137 CA Paris, 17 oct. 1990 : BOCC 1990, p. 395

* 138 Des monopoles légaux sont parfois créés par la puissance publique. Toutefois, l'origine de leur création ne saurait justifier leur soustraction à la prohibition des abus de domination issue de l'article L. 420-2 du Code de commerce. En application de ce principe, la Cour de cassation a condamné une compagnie aérienne ayant abusé du monopole dont elle bénéficiait dans le transport du fret aérien, Cass. com., 19 févr. 1991 : Bull. civ. IV, n° 82. Elle a également censuré l'arrêt de la Cour d'appel qui lui était soumis, pour n'avoir pas recherché si les prix anormalement bas pratiqués par une chaîne de télévision du service public ne constituaient pas une faute à l'égard de ses concurrents, Cass. com., 28 janv.1992 : Bull. civ. IV, n° 50. Quant à la Cour d'appel de Paris, elle a pu affirmer, dans le même sens, qu'EDF abusait de sa position dominante lorsqu'elle utilisait son monopole légal dans le transport et la distribution de l'électricité pour protéger son pouvoir de domination dans la production de cette énergie, CA Paris, 1re ch., 27 janv. 1998 : JCP E 1998, p. 392 ; Juris-Data n° 1998-020146 ; D. affaires. 1998, p. 326.

Les agissements d'EDF ont donné lieu à diverses décisions, toutes dans le même sens. Lors de l'examen de la position détenue par EDF et GDF sur les marchés de l'électricité et du gaz, ces deux sociétés ont contesté l'assimilation faite entre monopole légal et position dominante.

* 139 A fortiori en va-t-il ainsi lorsque cette situation, loin d'être ponctuelle (cas où l'entreprise est la première à intervenir sur un marché émergent), résulte à l'inverse de la difficulté, pour les autres opérateurs économiques, de pénétrer le marché (eu égard à l'existence de barrières de nature réglementaire, technologique ou autre)

* 140 Le Conseil français de la concurrence a eu notamment l'occasion d'apprécier la situation d'une entreprise qui, après avoir détenu un monopole grâce à un brevet, se trouvait confrontée à l'apparition d'une concurrence, une fois le brevet tombé dans le domaine public. Dans ces nouvelles circonstances, il a considéré qu'elle conservait une position dominante, dès lors qu'après avoir abaissé ses prix, sa part de marché était restée très supérieure à celle de ses concurrents - elle s'élevait encore à 70, 3 % trois ans après l'expiration du brevet -, qu'elle retenait une partie substantielle du profit antérieur et qu'elle faisait montre d'une large capacité à fixer ses prix, indépendamment de toute pression concurrentielle, puisque ses prix devaient connaître une baisse très nette, après l'époque des faits considérés et la cessation des pratiques litigieuses. Cons. conc., déc. n° 01-D-23, 10 mai 2001, pratiques de la Sté Abbott sur le marché des produits anesthésiques : BOCC 2001, p. 499.

* 141 Rapp. Cons. con., 1995, p. 57.

* 142 Ibid., p. 58.

* 143 Cons. conc., déc. n° 96-D-67, 29 oct. 1996, Sté Coca Cola Beverages : Rapp. 1996, p. 654 ; Contrats, conc., consom. 1997, comm. n° 67, L. Vogel.

* 144 Rapp. Cons. con., 1989, p. 34.

* 145 Cons. conc., déc. n° 96-D-10, 20 fév. 1996, pratiques mises en oeuvre par France Télécom et par l'Office d'annonces : BOCC 1996, p. 147 ; Contrats, conc., consom. 1996, comm. n° 107.

* 146 Rapp. Cons. con. , 1990, p. 36 et Rapp. 2000, p. 99.

* 147 Cons. conc., déc. n° 98-D-76, 9 déc. 1998, Secteur du disque : BOCC 1999, p. 166 ; Contrats, conc., consom. 1999, comm. n° 111, M. Malaurie-Vignal ; V. Lamy, avis et décisions du Conseil de la concurrence, n° 775, obs. V. Sélinsky

* 148 De son côté, l'article 7 de la loi 06-99 vise l'exploitation abusive d'une position dominante par "une entreprise ou un groupe d'entreprises". D'où cette conclusion que l'abus prohibé ne peut être que celui d'une position dominante détenue individuellement par une entreprise ou plusieurs entreprises, constituant éventuellement un groupe soumis à une direction unique quant au comportement sur le marché.

* 149 Ainsi a-t-elle considéré que les trois grands circuits de distribution de films cinématographiques occupaient collectivement une position dominante, au motif que les distributeurs ne pouvaient assurer une carrière commerciale honorable à un film sans s'adresser à deux de ces circuits au moins. Comm. conc., déc., 28 juin 1979, Films cinématographiques : Rapp. 1979, p. 178.

* 150 Rapp. Comm. conc., 1979, p. 37 et Rapp. 1980, p. 227.

* 151 Cons. conc., déc. n° 98-D-76, 9 déc. 1998.

* 152 Les liens unissant les entreprises en cause peuvent être structurels : il peut s'agir de la prise de participation dans le capital, de la représentation au conseil d'administration, de procédures de communication entre les sociétés en cause, de l'appartenance à un groupe. Les liens peuvent encore être contractuels et résulter d'un accord entre entreprises indépendantes : par exemple, ceux noués entre deux entreprises indépendantes qui, par le jeu d'accords de licences, disposent d'une avance technologique leur fournissant la possibilité de comportements indépendants face à la concurrence. Enfin, les liens peuvent être d'ordre commercial : ils peuvent par exemple prendre la forme d'un engagement d'approvisionnement exclusif d'une entreprise envers l'autre, ou du financement d'opérations publicitaires.

* 153 CA Paris, 27 sept. 1990 : BOCC 1990, p. 383 ; Contrats, conc., consom. 1991, comm. n° 12.

* 154 CA Paris, 6 juill. 1994 : BOCC 1994, p. 299 ; Contrats, conc., consom. 1994, comm. n° 197, note L. Vogel.

* 155 J. Calais-Auloy et F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 1, p. 1

* 156 «  Le développement de l'économie de marché, au XIX siècle et au XX siècle, put faire croire que le consommateur était devenu le roi du système : la libre concurrence des entreprise devait en principe multiplier les biens offerts, accroitre leur qualité et réduire leur prix. Simultanément, le principe de l'autonomie de la volonté devient la base du système juridique. Tous les consommateurs sont réputés également lucides et raisonnables. Tous doivent veiller, en contractant, à leurs propres intérêts. Du moment qu'une personne a contracté, elle est tenue. « Qui dit contractuel dit juste ». Il ne paraissait donc pas nécessaire de protéger les contractants autrement que par quelques règles sanctionnant les tromperies caractérisées ». Ibid.

* 157 L'idée qui sous tend cette distinction est simple : les professionnels sont traditionnellement en position de supériorité par rapport aux consommateurs en raison de meilleures connaissances techniques et de capacités financières plus importantes. Ce déséquilibre s'étant accentué avec l'accroissement de la taille des entreprises, la complexité des produits et des services, le développement du crédit et de la publicité. F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit civil, les obligations, op. cit., n° 74, p. 84.

* 158 S'il est possible de critiquer le caractère absolu de cette affirmation - l'infériorité du consommateur face au professionnel n'est pas toujours avérée -, il n'en est pas moins indiscutable qu'elle reflète la grande majorité des situations. Ce face-à-face entre professionnel et consommateur qui participe de l'essence du droit de la consommation n'aboutit, cependant, pas à la constitution d'un droit de classes comme le pensent certains auteurs (par ex., V. H., L., J. MAZEAUD et F. CHABAS, Leçons de droit civil, t. 2, 1er vol., Obligations, 9e éd., 1998 ,op. cit., n° 32-2

* 159 G. Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, Delta, 1996.

* 160 Le professionnel est le genre, le commerçant l'espèce. En d'autres termes, si tous les commerçants sont des professionnels, tous les professionnels ne sont pas commerçants.

* 161 Cette définition est plus précise que celle tautologique donnée par la directive européenne du 5 avril 1993 dans son article 2, c : « Toute personne physique ou morale qui [...] agit dans le cadre de son activité professionnelle, qu'elle soit publique ou privée ».

* 162 Cass. 3e civ. 30 oct. 1978, JCP 1979. II. 19178, note J. Ghestin ; Cass. com. 3 déc. 1985, Bull. civ. IV, n° 287.

* 163 G. Cornu, Vocabulaire juridique, op. cit., p.637.

* 164 G. Cornu, « Rapport sur la protection du consommateur et l'exécution du contrat en droit français », in Travaux de l'association h. Capitant, journées canadiennes, t. XXiV, Dalloz, 1973, n° 5, p. 135, sité par M. S. payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 30, p. 44.

* 165 L'entrepreneur peut être tout autant consommateur que le particulier, dès lors que son acte ne s'inscrit pas dans le processus économique de fabrication, de distribution et de commercialisation.

* 166 Les consommateurs ne constituent pas, à proprement parler, une classe sociale, mais une catégorie juridique fluide dans laquelle entre toute personne, quelle que soit sa profession, contractant en vue de la satisfaction directe de ses besoins personnels ou familiaux. Sans instaurer de rigidité dans les structures sociales, le binôme professionnel/consommateur défini de façon fonctionnelle constitue la colonne vertébrale de la législation relative à la lutte contre les clauses abusives et en fixe le domaine (contra : G. RAYMOND [Les contrats de consommation, in J. Calais-Auloy et H. Causse (sous la dir. de),

* 167 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 30, p. 45.

* 168 Il s'agit Décret N° 2-00-854 du 17 Septembre 2001 pris pour l'application de la loi N 06/99 sur la liberté des prix et de la concurrence, notamment son article 10 ; De même l'Arrêté du ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des affaires économiques et générales n° 649-07 du 16 rabii II 1428 (4 mai 2007) fixant les modalités de publicité et d'information du consommateur en matière de services de télécommunications, notamment ses articles 1, 5 et 6

* 169 Voir not., CS, n° 2536, du 28/09/2005, RJCS, n° 64/65, 2006.

* 170 Not. : CS, n° 9/64, 08/01/2003, RJCS, n° 61, 2003.

* 171 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 38, p. 71. Pour l'auteur la faiblesse peut être commune à tous, indépendante du sujet, objective : c'est le droit de la publicité de fraude et de falsification. Propre à chacun, la faiblesse devient indifférente, et la seule qualité de sujet de droit justifie la protection. Parfois au contraire un danger particulier guette l'individu, en raison d'un contrat qu'il a conclu. Fragile parce que démarché à son domicile, ou en raison de l'impossibilité dans laquelle il se trouve, en fait, de parcourir avec une suffisante attention un contrat qui lui est proposé, ou encore par sa promptitude à s'endetter sans réflexion, encouragé par l'essor d'une économie d'endettement, le consommateur aspire à une protection. Mais dans toutes ces hypothèses, sa qualité de consommateur ne permet pas au système juridique d'identifier la faiblesse dont il souffre. Il tend au contraire à empêcher les causes de cette fragilité, le juge se voyant confier la mission improbable de qualifier un état de faiblesse par une qualité économique qui, en elle-même, ne s'identifie pas. En d'autres termes, la qualité de consommateur ne fonde pas la politique juridique de sa protection. Pour l'auteur, la définition subjective du consommateur est semble t'elle impossible. La définition objective apparaît tout aussi incertaine

* 172 Ibid., n° 96, p. 159 ; Pour le même auteur La recherche d'une définition de la notion du consommateur conduit à considérer que cette qualité est en elle-même un indice de faiblesse ; Pour le professeur G. Paisant, rattachée la notion du consommateur à sa faiblesse n'est pas si facile à réaliser car, si l'on veut bien reconnaître que le droit de la consommation est un droit de protection du présumé faible - le consommateur - contre le présumé fort - le professionnel -, on peut être tenté, par souci d'équité, d'en généraliser l'application dans les relations de faibles à forts, que la supériorité exprimée soit d'ordre technique, intellectuelle ou psychologique, juridique ou économique. G. Paisant, « A la recherche du consommateur. Pour en finir avec l'actuelle confusion née de l'application du critère de rapport direct », JCP éd G, 2003, n° 13, p. 121.

* 173 Il en résulte qu'un professionnel qui passe un contrat annexe à l'exercice de sa profession, dans un domaine dans lequel il n'a pas de compétences particulières, se trouvera protégé par certaines dispositions du Code de la consommation, en particulier la législation sur les clauses abusives.

* 174 V. notamment, Cass. 1re civ. 22 avr. 2002, op. cit..

* 175 Les juridictions administratives françaises contribuent également au flou de cette notion. Après avoir jugé, à la suite de la Cour de cassation : Cass. crim., 15 mai 1984 : Bull. crim. n° 178 ; D. 1986, jurispr. p. 106, note G. Mémeteau, que le patient pouvait être un consommateur : CE, 27 avr. 1998, Cornette de Saint-Cyr : Contrats, conc., consom. 1999, comm. n° 15, note G. Raymond ; La Haute juridiction administrative française a admis l'application de la législation des clauses abusives aux rapports entre une société et le concessionnaire d'un service public de distribution d'eau : CE, 11 juill. 2001, Sté des eaux du Nord : JCP G 2001, I, 370, note N. Sauphanor-Brouillaud ; R.T.D.civ. 2001, p. 878, n° 6, note J. Mestre et B. Fages.

* 176 J. Ghestin, Traité de droit civil, la formation du contrat, 3ème éd., L.G.D.J., 1993, n° 77, p. 54.

* 177 J. C. Auloy et F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 2, p. 2.

* 178 « Selon la conception stricte, le consommateur est la personne « qui se procure ou qui utilise un bien ou un service pour un usage non professionnel », Ibid., n°  7.

* 179 Les partisans de l'extension de la notion de consommateur avancent, au soutien de leur thèse, un argument de texte et proposent des critères divergents. Les arguments en faveur de la conception extensive du consommateur se sont fondés sur le texte de l'article 35 de la loi du 10 janvier 1978. Le critère de compétence est certainement le plus extensif, car il conduit à soutenir que, en dehors de sa spécialité, le professionnel est aussi vulnérable qu'un consommateur. C'est à M. CARMET que revient le mérite d'avoir émis l'idée d'une distinction en fonction de la nature du lien unissant l'acte conclu à la profession exercée. Voir : O. CARMET, « Réflexions sur les clauses abusives au sens de la loi no 78-23 du 10 janv. 1978 », R.T.D.com. 1982, p. 1. v. aussi : J.-L. Aubert, obs. sous Cass. 1re civ. 3 mai 1988, Rec. D. 1988, somm. 407.

* 180 Les conceptions extensives de la notion de consommateur partent de l'idée juste, selon laquelle il existe des professionnels qui se trouvent dans des situations de faiblesse économique équivalentes à celles du consommateur.

* 181 Sur les définitions du consommateur, V. J.-P. Pizzio, « L'introduction de la notion de consommateur en droit français », Rec. D. 1982, Chron. p. 91 ; J. Mestre, « Des notions de consommateurs », R.T.D.civ. 1989, p. 62 ; G. Paisant, « Essai sur la notion de consommateur en droit positif », JCP 1993, I, n° 3655 ; D. Mazeaud, « Le juge face aux clauses abusives, in Le juge et l'exécution du contrat », colloque IDA-Aix-en-Provence, 28 mai 1993, PUAM ; J. Calais-Auloy et F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 2 s.

* 182 C'est ce que signifie ce précepte de Javelonus, « Omnis definitio in jure civili periculosa ». J. P. Chazal, « De la cohérence de la notion de consommateur : de l'unicité de la définition à la multiplicité des régimes », Rec. D., 1999, p. 248.

* 183 Le Vocabulaire juridique publié sous la direction du Professeur Cornu définit la dépendance comme l'absence d'autonomie de comportement d'une personne par rapport à une autre. G. Cornu, « Vocabulaire juridique », op. cit., p. 257 ; Cette notion est connue du droit positif. Après avoir manqué un rendez-vous avec le droit du travail, elle a été consacrée en droit de la concurrence ; « Traditionnellement, à la dépendance juridique du salarié, on oppose l'indépendance juridique de l'entrepreneur, du commerçant, de l'agriculteur. Toutefois, cette opposition est relative car à côté de la dépendance juridique à laquelle ils échappent, il peut arriver que ces « indépendants » soient placés en situation de dépendance économique vis à vis d'un partenaire contractuel. C'est le cas, notamment, dans le secteur de la distribution qui procède à l'intégration d'un contractant dans un réseau », L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, th. Toulouse, 2005, p. 346, n° 393.

* 184 Cons. conc., avis n° 97-A-04, 21/01/1997, BOCCRF 17 févr., p. 37.

* 185 Lors des débats parlementaires auxquels donna lieu la loi no 85-1408 du 30 décembre 1985, qui introduisit cette notion dans le droit français de la concurrence, avant que l'ordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986 ne prenne le relais, la dépendance économique fut largement évoquée. Pour le ministre français de l'Economie et des Finances, Rapp. Colon, JO doc. Sénat 1985-1986, n° 56, p. 24, ; Il y a solution équivalente quand l'entreprise en situation de dépendance économique à l'égard d'un partenaire, fournisseur ou client, qui a mis en oeuvre les pratiques contestées, est tout de même en mesure de poursuivre normalement son activité. De la même façon, il y solution équivalente lorsqu'il est établi que les pratiques dénoncées n'ont pas entraîné une baisse significative des ventes, V. Rapp. 1993, à propos de la déc. n° 93-D-21, 8 juin 1993 ; À l'inverse, l'absence de solution équivalente ou alternative peut être établie en prenant en compte, notamment, la faiblesse des ressources financières de l'entreprise, la faiblesse de ses marges sur le marché et la durée, de même que l'importance de la pratique de partenariat, Contrats, conc., consom. 1997, comm. n° 8, note L. Vogel.

* 186 Cette doctrine est fondée sur le paragraphe 26, alinéa 2, de la loi allemande du 27 juillet 1957 (modifiée en 1973 et en 1980)

* 187 Decocq A. et Pédamon M., « L'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence », J.Cl. Conc. consom., n° spéc. 1987, n° 30

* 188 Le cas du commerçant spécialisé (mercerie, parfumerie, articles de sport, notamment) qui ne peut exercer normalement son activité sans proposer à la vente les produits d'une marque disposant d'une notoriété particulière

* 189 Le cas du producteur qui réalise auprès d'une centrale d'achat une part importante de son chiffre d'affaires, à laquelle il ne peut renoncer sans mettre en péril son activité, et qu'il ne peut reconstituer rapidement auprès d'autres clients 

* 190 Le cas du sous-traitant qui ne peut facilement reconvertir son activité pour recourir à un autre donneur d'ouvrage 

* 191 Cette dépendance apparaît en cas de « crise dans la production et la fourniture d'une matière première pour les clients non intégrés, des firmes qui ont accès directement aux sources de cette matière première »192. Ces firmes sont alors amenées, à l'occasion de cette répartition des marchandises en pénurie, à privilégier des entreprises appartenant aux mêmes groupes qu'elles au détriment d'autres entreprises, comportements qui ont été reprochés en Allemagne, pendant les crises pétrolières, à quelques grandes compagnies.

* 193 Comme le relève un auteur, « l'expertise économique menée lors d'une délimitation du marché de référence conduit rarement à mettre en évidence une absence absolue de solutions équivalentes. Elle aboutit, au mieux, à constater que les possibilités objectives de fourniture de produits substituables (pour l'acheteur) ou de débouchés nouvelles pour (l'offreur) s'avèrent relativement limitées », M. Glais, « L'état de dépendance économique au sens de l'article 8 § 2 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 : analyse économique », Gaz. Pall., 1989, 1, doctr., p. 290.

* 194 Cons. conc., déc. no 96-D-44, 18/06/1996, BOCCRF 14 nov., p. 564, comm. Arhel P., JCP éd. E 1998, p. 76.

* 195 CA Paris, 1re ch., 12/07/1990, BOCCRF 20 juill., et CA Paris, 13/06/1991, BOCCRF 5 juill. ; adde, CA Versailles, 27/01/2000, D.  Aff. 2000, act. jur., p. 157, JCP éd. E 2000, p. 872.

* 196 Cass. com., 12 oct.1993, Rec.D. 1994, som., p. 169, obs. Gavalda Ch. et Lucas de Leyssac Cl. ; Cf. pour l'analyse économique de ces critères, Glais M., « L'état de dépendance économique au sens de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre », loc. cit.

* 197 Cons. conc., déc. no 03-D-42, 18/08/2003, Suzulli, Contrats, conc., consom. 2003, no 182.

* 198 Cons. conc., déc. n° 99-D-45, 30/06/1999.

* 199 Comme le notait le Conseil français de la concurrence dans son rapport pour 2001, (...). La majorité des abus de position dominante constatés et sanctionnés, par le Conseil, visaient à restreindre l'accès des concurrents au marché ou à exclure des concurrents. Les cas d'abus d'exploitation, où une entreprise utilise sa position dominante pour pratiquer des prix excessifs ou refuser d'alimenter ses clients, sont plus rares. Rapp. 2001, 3e partie, jurispr., chap. IV, p. 2.

* 200 L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, op. cit., n° 409, p. 353.

* 201 « De pont de vue économique, c'est la transparence du marché qui est en question. En effet, selon cette approche développée par le professeur Lucas, « la transparence d'un marché facilité, optimise l'offre et la demande. Vue par un juriste, cette rencontre est celle d'une seule offre et d'une seule demande et se réalise, an principe, dans l'intérêt de chacune des deux parties prenantes : offreur et demandeur. Chacune des parties peut être amenée à recourir aux moyens de faire connaître (mieux connaître) son offre ou sa demande, dans le but de maximiser ses chances d'obtenir satisfaction, ou une satisfaction meilleure, par le marché. Quand il estime que la transparence existant sur un marché donnée ne permet pas une diffusion suffisante de l'information, l'opérateur cherchera à agir sur cette transparence. En principe, offreur et demandeurs peuvent chacun de leur côté avoir intérêt à agir sur la transparence du marché. Les procédures d'appels d'offres sont l'exemple d'une action sur la transparence émanant du demandeur. Mais chacun sait bien qu'une telle démarche est beaucoup plus souvent le fait de l'offreur que celui du demandeur ». Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit. p. 294 et s

* 202 Voir not. : A. Dekkak, La publicité commerciale et la protection du consommateur, Mémoire DESA, Fès, 2007.

* 203 C. Carreau, « Publicité fausse ou de nature à induire en erreur - Publicité comparative », Rép. com. Dalloz, 2004, n° 1.

* 204 H. Causse, « La lutte contre l'incitation à la surconsommation », L.P.A, 10 avril 2003, n° 72, p. 43.Pour l'auteur, inciter, « c'est accomplir un acte ou un fait destiné à provoquer un achat du consommateur sous-entendant que, sans ledit acte, il n'aurait point consommé »..

* 205 C. El mouden, « La publicité entre promotion et protection du marché », RMDE, n°1, octobre 2007, p. 59.

* 206 « La persuasion se présente comme un argument dont le but est de faire vendre. A cet effet, la publicité essai d'influencer les individus inconsciemment afin de modifier leurs habitudes et comportements. Elle a pour but d'éveiller des désirs et mettre en action les mécanismes de comportement qui vont mener à satisfaire des désirs. Dès que ces désirs sont éveillés, le but publicitaire est atteint ». Ibid.

* 207 Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit, p. 296 et s

* 208 Avec Monsieur Lyon-Caen, il est donc possible d'affirmer que « la publicité n'est pas information, ne peut-être information. Elle a pour objet de faire vendre le produit qu'elle représente en le rendant attrayant. Elle ne peut donc en donner qu'une représentation partielle ou partiale ». A. Lyon-Caen, « Rapport de synthèse », in La publicité propagande, op. cit., n°6, p. 12.

* 209 Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit ,p.295.

* 210 Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit. p.296.

* 211 Ici, l'ignorance est organisée sciemment et peut être commise peu importe la puissance économique de son auteur.

C'est le cas lorsque celui-ci ment délibérément. Mentir consiste à avancer une information que l'on dit vraie alors que l'on sait qu'elle est fausse, et ce dans le but de pousser un individu à émettre un consentement qu'il n'aurait pas émis s'il avait connu la vérité.

* 212 L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, op. cit, n° 408, p. 353.

* 213 M. Pédamon, « Rapport français » in La publicité propagande, op. cit., n°7, p. 107

* 214 L'influence injustifiée, c'est l'utilisation d'une position de force pour faire pression sur le consommateur, sans avoir recours à la force physique, de telle manière que son aptitude à prendre une décision en connaissance de cause soit limitée de manière significative.

* 215 En droit communautaire, « une pratique commerciale est réputée agressive si, dans son contexte, compte tenu de toutes ses caractéristiques et circonstances particulières, elle altère ou est susceptible d'altérer de manière significative, en raison d'un harcèlement, d'une contrainte ou d'une influence injustifiée, la liberté de choix ou de conduite du consommateur moyen à l'égard d'un produit, et par conséquent l'entraîne ou est susceptible de l'entraîner à prendre une décision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement » D. Touchent, « La protection des consommateurs contre les pratiques commerciales déloyales », L.P.A, 20aout 2006, n° 153, p. 11.

* 216 J. Calais-Auloy et F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 125, p. 123

* 217 L'article 2 de la loi 06-99 dispose « Les prix des biens, des produits et des services sont déterminés par le jeu de la libre concurrence... »

* 218 La vente à perte est licite dans certaines circonstances particulières telles que la vente pour cause de liquidation liée à une cessation ou un changement d'activité, l'alignement sur un concurrent, vente de produit saisonniers ou périssables, obsolètes, ou lorsque le réapprovisionnement se fait à un prix moins élevé.

* 219 Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit, p. 211.

* 220 « La pratique des prix d'appel serait certainement beaucoup plus répandue s'il était possible de refuser de vendre le produit ayant servi à attirer le consommateur, tel un miroir aux alouettes de la consommation ». Ibid., p. 212.

* 221 N. Chardin, Le contrat de consommation de crédit et l'autonomie de la volonté, op. cit., n° 38, p. 34.

* 222 C. El Mouden, « La publicité entre promotion et protection du marché », op. cit., p. 59

* 223 Pour plus de détails sur ces pratiques v. Infra. n° 233 et s.

* 224 Le lien entre les ententes, les abus de domination d'une part et le refus de vente de l'autre, est particulièrement étroit. Dans ce type d'hypothèse, le refus de vente s'analyse bien en un symptôme de la pratique anticoncurrentielle puisqu'il en est souvent la manifestation la plus évidente ; mais il ne participe en rein de la pratique elle-même qui est définie est constituée autrement.

* 225 Le refus de vente peut s'articuler avec trois pratiques restrictives interdites per see. Il s'agit des pratiques discriminatoires, de prix imposé et de la rupture brutale des relations commerciales établies ; V. aussi : G. Virassamy, « Les nouveaux régimes des pratiques restrictives entre professionnels », Rec. D., 1988, p. 133 et s.

* 226 « L'état de dépendance économique d'une entreprise, c'est l'absence de liberté du partenaire dépendant dans le choix des stipulations contractuelles, et par suite, l'obligation dans laquelle il se trouve « d'accepter » celles qui lui sont dictées par le partenaire dominant ». M. Behar-Touchais et G. Virassamy, Les contrats de la distribution, Traité des contrats, sous la direction de J. Ghestin, LGDJ 1999, n°129, p. 77.

* 227 D. Mazeaud, « L'attraction du droit de la consommation », R.T.D.com., 1998, p. 104.

* 228 Pour les professeurs Lucas de Leyssac et G. Parleani : « en principe le jeu du marché est de nature é rétablir ce déséquilibre. Ainsi, par exemple, l'opérateur proposant des prix excessifs pour une prestation donnée sera vite concurrencé par un opérateur se contentant d'une marge moindre. Mais cette vue théorique du marché ne correspond pas toujours à la réalité des marchés. D'abords, il se peut qu'existent des obstacles à l'apparition des concurrents sur un marché donné. Ensuite, en présence de plusieurs offres, il est fréquent que des déséquilibres contractuels portent sur des éléments qui ne sont pas mis en avant dans la concurrence. Ils sont ignorés du consommateur le plus avisé qui ne peut donc exercer son choix. Et puis enfin, il n'est pas rare que la concurrence ne conduise pas à une spirale vertueuse : il se peut que tous les concurrents proposent e même type de relations déséquilibrées ». Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit, p. 738

* 229 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 319, p. 27.

* 230 A. Karimi, Les clauses abusives et la théorie de l'abus de droit, Th. LGDJ, t.306, n°38, p. 15, cité par L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, op. cit., n° 528, p. 446.

* 231 A. Karimi, Les clauses abusives et la théorie de l'abus de droit, op. cit. n°38, p. 15. Cité par L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, op. cit., n° 490, p. 415 ; Pour le professeur Chazal, la clause abusive peut être définie comme toute clause qui, bien qu'acceptée par les parties contractantes, révèle un déséquilibre significatif entre les droits et obligations réciproques, causé par un abus de puissance économique. J.-Pascal Chazal, «Clauses abusives», Rép. Com. Dalloz, septembre 2002, n° 7..

* 232 L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, op. cit., n° 528, p. 447.

* 233 Voir : B. Fages, « L'abus dans les contrats de distribution », in L'abus de droit dans les contrats, JCP 1999, éd. E., Suppl. à la Sem. Jur. N°3, du 21 janvier 1999, p. 11 ; D. Randoux, « Fournisseurs et distributeurs : Dépendance ou partenariat », L.P.A, 06 mars 1996, n° 29, P. 47.

* 234 La corbeille de la mariée est une pratique par laquelle une grande enseigne de la distribution prend prétexte d'une augmentation de sa puissance d'achat pour exiger de ses fournisseurs, sans contrepartie réelle, des avantages tarifaires supplémentaires. Voir : P. Arhel, « La pratique de la corbeille de la mariée rattrapée par le juge pénal », LPA 2002, n°79, p. 4.

* 235 Cette technique consiste pour la centrale à demander au fournisseur de facturer son produit à un prix supérieur au prix d'achat effectif. Voir CA Amiens, 25 mai 1999, LPA 2000, n°28, p. 16, obs. P. Arhel.

* 236 Ce mécanisme qui correspond officiellement aux rémunérations des services de coopération commerciale versées par les fournisseurs aux distributeurs revient à admettre « qu'un fournisseur doive verser à son client - qui achète ses produits et se rémunère normalement sur la marge dégagée par leur revente au client final - des montants, souvent colossaux, de services destinés à accompagner cette revente ». Voir : Ch. Pecnard et E. Voisset, « La coopération commerciale est-elle licite ? », LPA 2001, n°242, p. 13, qui s'interrogent sur la licéité d'un tel mécanisme.

* 237 E. Pancrazi, « Moralisation des pratiques commerciales », Lamy Dr. et Pat., 2001, n°99, p. 65.

* 238 Sur la question du référencement et du déréférencement, voir : S. Retterer, « Le contrat de référencement : du droit des obligations au droit de la concurrence », JCP éd. E., 1999, n°2, p. 1 ; G. PARLEANI, « Référencement et développement », L.P.A, 06 mars 1996 n° 29, P. 11.

* 239 « La clause d'exclusivité est celle par laquelle un contractant s'engage vis-à-vis de son cocontractant, à n'entretenir de relation contractuelle qu'avec lui. Celle-ci est fréquente dans les contrats de distribution telle que la franchise ou la concession. Elles peuvent avoir des conséquences sur la liberté de la concurrence. Ces clauses placent le débiteur de la clause d'exclusivité dans une situation de dépendance économique. La jurisprudence française, qui a admis que le contractant puisse déterminer unilatéralement le prix des produits concernés par cette exclusivité, soumet un tel pouvoir au respect d'un devoir de coopération. En décidant d'un prix qui ne permet pas à son partenaire contractuel de « pratiquer des prix concurrentiels », la partie qui le fixe commet un abus qui est sanctionné par la résiliation du contrat ou par indemnisation ». Pour plus de détail v. not. J. Ghestin, « L'indétermination du prix entre passé et avenir », L.P.A, 06 mars 1996 n° 29, P. 19.

* 240 Dans cette hypothèse, un individu s'enrichissait aux dépens de son cocontractant puisque l'appauvrissement lié au dommage était, soit surcompensé, soit sous-compensé. De nombreux auteurs avaient pourtant stigmatisé l'utilisation de la clause pénale « comme procédé de contraintes des plus forts contre les plus faibles », le Professeur Malaurie parlant même de « terrorisme contractuel » à propos de ces clauses.

* 241 « Inventé par Saleilles en 1901, le concept du contrat d'adhésion a été l'objet d'une effervescence doctrinale jusqu'à ce que l'attention se focalise davantage sur le contrat de consommation. Il importe de rappeler que, à l'origine, cette création doctrinale était destinée à montrer que ce genre de relations, dans lesquelles « il y a prédominance exclusive d'une seule volonté qui dicte sa loi à une collectivité indéterminée », n'est pas de nature contractuelle mais unilatérale ». J.-Pascal Chazal, «Clauses abusives», Rép. Com. Dalloz, septembre 2002, n° 25.

* 242 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 74, p. 84.

* 243 Comme le souligne le professeur Jacques Mestre, « ils sont formés d'un enchevêtrement de droits et d'obligation tel qu'il est dangereux d'isoler une clause de son contexte général, de procéder au dépeçage du contrat. Souvent une clause à priori abusive trouvera son explication et sa justification dans une clause en sens opposé [...] Dès lors, ce n'est pas la présence d'une telle clause qui risque de priver le contrat de sa cohérence interne, mais bien la sanction d'une telle clause qui risque d'avoir ce résultat regrettable ». J. Mestre, Rapport de synthèse, in les clauses abusives entre professionnels, p. 161 et 162. Cité par P. Cramier, « Essai sur la protection du contractant faible (en marge du droit de la concurrence) », LPA, 12 juin 2000 n° 116, P. 4

* 244 Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit., p. 91 et s.

* 245 « Par exemple, une entreprise, disposant d'un pouvoir économique absolu, ne saurait exercer une action en justice, manifestement dépourvu de fondement, simple élément d'un plan visant à éliminer un concurrent ». M. S. Payet, M. F. Roche, Droit de la concurrence, op. cit., n° 260, p. 228.

* 246 Les prix prédateurs sont à priori très avantageux pour les acheteurs.

* 247 Cons. conc., déc. n° 01-D-23, 10 mai 2001, Abbott, op. cit. n° 61. Ce principe a été énoncé dans le cadre de l'examen, par le Conseil, de remises de fidélité proposées et mises en oeuvre par la société Abbott, au moment où tombait dans le domaine public le brevet d'exclusivité qu'elle détenait sur le principe actif d'un gaz anesthésique, l'Isoflurane. La société Abbott, dont la position dominante sur le marché était démontrée, faisait valoir que la bonne résistance de son produit par rapport au produit générique, lors de son arrivée sur le marché, était due, moins au système de remises qui lui était reproché qu'aux erreurs techniques et commerciales commises par son concurrent. En l'espèce, le Conseil a reconnu le caractère sensible de l'effet sur le marché dans la mesure où, lors de l'entrée de son concurrent sur le marché de l'Isoflurane, la société en cause avait proposé à des centrales d'achat d'hôpitaux privés et de cliniques fédérant des acheteurs représentant un tiers de la consommation annuelle française d'Isoflurane, des contrats accordant des remises aux membres de ces centrales, de nature à les dissuader de se fournir auprès de son concurrent.

* 248 Cons. conc., déc. n° 01-D-42 : Rapp. 2001, 3e partie, jurispr., chap. IV, § 1.2.2., p. 4

* 249 V. par exemple Paris, 13 janvier, 1998, UGAP, JCP, éd. E, 1999, p. 375.

* 250 V. infra, n° 241 et s.

* 251 V. supra n° 115 et s.

* 252 « La Cour de justice, dans célèbre arrêt Akzo Chemie du 3 juillet 1991 a posé en principe qu'une entreprise adopte un comportement illicite d'élimination lorsqu'elle vend à sa clientèle à des prix inférieurs à la moyenne des couts totaux qui compressent les couts fixes et les couts variables, et il faut apporter la preuve que ces prix sont fixés dans le cadre d'un plan ayant pour but d'éliminer un concurrent. On apprécie là en fait la durée de résistance financière possible des concurrents par rapport à leur efficience économique. C'est une appréciation prospective qui montre bien à nouveau la perspective temporelle, dans laquelle, doit s'apprécier une domination ». Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit., p. 903 et s.

* 253 Pur le conseil français de la concurrence ces subventions peuvent être normales à la double condition qu'elles reçoivent une contrepartie financière reflétant la réalité des coûts, et que l'appui ainsi fourni présente un caractère normal. Cons. conc., déc. n° 00-D-57, 6 déc. 2000.

* 254 On rappelle que le principe général est que les conditions de transaction entre sociétés mères et filiales doivent être établies à des conditions non discriminatoires. Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché op. cit., p. 904.

* 255 Pour plus de détail sur la question v. : S. Reifegerste, « Sans constituer une pratique de prix prédateurs, une pratique de prix bas peut constituer un abus de position dominante », L.P.A, 05 mars 2004 n° 47, P. 9.

* 256 Cass. com., 3 mai 2000, Suez Lyonnaise des eaux : Bull. civ. IV, n° 92 ; LPA 16 nov. 2000, n° 229, p. 7, obs. M. Malaurie-Vignal.

* 257 CA Paris, 25 févr. 1994 : BOCC 1994, p. 104.

* 258 Le Conseil français de la concurrence a estimé que deux sociétés d'édition, détenant une position dominante collective, exploitent abusivement cette position lorsqu'elles publient contre leurs concurrents des critiques visant à entraver leurs activités, ou lorsqu'elles refusent de procéder à des insertions dans ce but. En revanche, a-t-il précisé, de telles pratiques peuvent s'avérer normales si elles sont le fait d'entreprises ne détenant aucune position dominante. Cons. conc., déc. no 97-D-21, 25 mars 1997, Prospection de métaux, confirmée par CA Paris, 1re ch., 23 janv. 1998, BOCCRF 17 févr., p. 52, Gaz. Pal. 13 et 14 févr. 1998, p. 19.

* 259 Cons. conc., déc. no 04-D-13, 8 avr. 2004.

* 260 Par exemple le cas du service ADSL du France Télécom. V. : Cons. Conc., 2000-MC-01, France Télécom-ADSL, BOCCRF, 21 avr. 2000.

* 261 « La théorie des « facilités » ou des « installations » essentielles vient des Etats-Unis d'Amérique. Elle fut à l'origine appliquée à l'encontre d'une entreprise, en situation de monopole pour l'exploitation d'une installation qui était essentielle pour exercer une activité sur le marché aval : le cas type fut celui de l'exploitant d'une gare qui en refuse l'accès à une compagnie de chemin de fer. Cette théorie fut reprise en droit communautaire, en matière d'abus de domination, à propos notamment des exploitants de ports qui empêchaient l'accès à leurs installations à certaines compagnies de navigation ». Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit. p. 629 et s. ; v. not., Riper et Roblot, par G. Ripert et R. Roblot, Traité du droit commercial, op cit, n° 810 et s ; Pour plus de détail v. L. Richer, « Le droit à la paresse ? « Essential facilities », version française », Rec. D., Chron., 1999, p. 523.

* 262 « Le problème posé par cette théorie se rattache à celle de la distinction entre le marché dominé et, celui sur lequel les abus seront ressentis. Lorsque l'entreprise dominante fournit à ses concurrents, sur le marché qu'elle domine, des produits ou des services essentiels à la présence des derniers sur le même marché, elle est plutôt partenaire obligatoire. En tout cas, point n'est besoin de recourir à la théorie des facilités essentielles pour considérer comme abusives des pratiques de refus directs ou déguisés dont l'objet ou l'effet est d'éliminer des concurrents directs ». Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché, op. cit., p. 905.

* 263 Sur la question v. not. : G. Bonet, « Le principe communautaire des facilités essentielles comme limite du droit de l'auteur : confirmation de la jurisprudence Magill », Rec. Dalloz, 1999, Jurisp., p.303 ; M. A. Lafortune, « Droit de la concurrence et exercice abusif de droits de propriété intellectuelle », L.P.A, 02 juillet 2004 n° 132, P. 3 ; J. Tirole, « Quelles finalités pour les propriétés intellectuelles ? », L.P.A, 19 mai 2005 n° 99, P. 67 ; L. Idot, « Droits exclusifs et abus de position dominante (À propos de quelques développements récents) », L.P.A, 25 novembre 2005 n° 235, P. 5.

* 264 A. Chavanne et J.-J. Burst, Droit de la propriété industrielle, cinquième édition, Dalloz 1998.

* 265 Cons. conc., déc. n° 96-D-12, 5 mars 1996, Lilly France, spécialités pharmaceutiques destinées aux hôpitaux : BOCC 1996, p. 320.

* 266 Cons. conc., déc. n° 97-D-76, 21 oct. 1997, J.Cl. Conc. consom.., fasc. 206, n° 125.

* 267 Cons. conc., déc. n° 99-D-45, 30 juin 1999, J.Cl. Conc. consom. , fasc. 206, n° 125.

* 268 M. Villey, Philosophie du droit, t. 1, Définition et fins du droit, Précis Dalloz, 4ème éd., 1986, p. 14.

* 269 Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, publié sous la direction de G. Cornu op. cit., p. 798

* 270 « Cet ordre public n'est pas et ne doit pas être figé. Il doit s'adapter avec les mutations sociales et économiques de la collectivité, notamment par le travail du juge, ce qu'est communément admis d'appeler l'ordre public virtuel, ou par le législateur, ordre public textuel ». F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., p. 514.

C'est dans cette logique que s'inscrit la loi 06-99. Elle a pour but, la consécration de certaines valeurs économiques, estimées nécessaires à la réalisation du progrès économique et à l'amélioration du bien être des individus. Ainsi, c'est l'intérêt général de la collectivité qui est poursuivi par la consécration de certaines valeurs économiques. Elles forment ce qu'on appelle, l'ordre public économique de direction. Il a pour but de concrétiser l'instrumentalisation du droit pour l'instauration de deux approches économiques complémentaires, bien que contradictoires. L'une basée sur la mise en place de nouvelles valeurs indispensables à une économie plus libérale et l'autre appuyée sur le maintien d'un rôle régulateur de l'Etat.

* 271 Ainsi, par exemple, la définition de la norme de loyauté permettant d'identifier la faute de concurrence déloyale suppose parfois - le cas de la désorganisation du marché a permis de l'illustrer - d'observer les conditions du fonctionnement du marché.

* 272 Le professeur J. Azéma relève ainsi, que « l'objet de ce droit est constitué par un phénomène économique que le juriste a quelques peines à saisir avec toute les précision scientifique requise ». J. Azéma, Le droit français de la concurrence, op. cit., n° 3, p. 16. L'auteur ajoute : « Ceux qui ont eu le mérite de s'y risquer sont parvenus à la conclusion décevante mais inéluctable qu'il n'y a pas une, mais des concurrences. Ibid

* 273 M. Malaurie, Vignal, Droit interne et communautaire de la concurrence, A. Colin, coll, U-Droit, 2005, n° 10, p. 15.

* 274 F. Jenny, « Les relations entre le droit et l'économie dans l'ordonnance du 1er décembre 1986, , Gaz. Pal., 1997, n° 43, p. 30.

* 275 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 59, p. 107.

* 276 Y. Bernard, J. -C. Colli, Dictionnaire économique et financier, éd. du seuil, 6ème éd. 1996, p. 414.

* 277 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n ° 59, p. 107

* 278 « Il n'y a pas concurrence, mais des situations concrètes, propre à chaque marché particulier, et dans lesquelles les entreprises disposent d'une marge plus ou moins étendue de liberté ». Y. Serra, Le droit français de la concurrence, op. cit., p.1..

* 279 « Processus jugé efficace, la concurrence ne se laisse pas enfermée dans une définition précise. Il existe des formes différentes de concurrence et autant d'opinions les décrivant ». M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 7, p. 10.

* 280 En effet, par exemple, « La concurrence non faussée » à laquelle fait référence l'article 3.f du traité de Rome, ne se rattache directement à aucun modèle économique précis ». La loi 06-99 ainsi que l'ordonnance française du 1er décembre 1986 quant à elles, ne fait pas référence à un tel principe.

* 281 Sur cette question v. not. Ph. Laurent, « La concurrence dans l'Union Européenne », contrats conc. conso. 1995, n° 2.

* 282 J. Boulouis et R. -M. Chevalier, Les grands arrêts de la Cour de justice des communautés européennes, t. 2, Dalloz, 3ème éd. 1991, n° 21, p. 179.

* 283 J. -M. Clark, « Toward a concept of workable competition », Americain economic review, 1940, 214, cité par Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 59, p. 109 ; C'est le même modèle adopté par les autorités communautaires, françaises de la concurrence et on pense que c'est le modèle qui sera adopté par les autorités marocaine de la concurrence.

* 284 J. Boulouis et R. -M. Chevalier, Les grands arrêts de la Cour de justice des communautés européennes, loc. cit.

* 285 C'est la raison pour laquelle les juges n'ont pas condamné à priori la forme de concurrence résultant de l'utilisation d'un système de distribution sélective. Ils ont décidé que « des systèmes de distribution selective constituaient, parmi d'autres, un élément de concurrence ».

* 286 CJCE, 23 octobre 1977, aff 26-76, Rec., P.1875.

* 287 « La règle de la raison désigne alors « une méthode d'analyse destinée à établir pour chaque convention située dans son contexte réel un bilan de ses effets anti et proconcurrentiels ». R. Kovar, « Le droit communautaire de la concurrence et la règle de la raison », R.T.D.civ. 1987, p. 237.

* 288 Ibid.

* 289 L. Vogel, « L'influence du droit communautaire sur le droit français de la concurrence », JCP, 1992, I, 3550.

La règle de la raison a été appliquée tant par les autorités communautaires que par les autorités françaises. Un arrêt de 1986 se situe tout à fait dans la continuité de la solution dégagée en 1977. Confrontée à une appréciation de la validité d'un contrat de franchise au regard de l'article 85 §1 du Traité de Rome, la Cour déclare que les clauses  « qui organisent le contrôle indispensable à la préservation de l'identité et de la réputation du réseau », ne constitue pas « des restrictions de la concurrence au sens de l'article 85 §1 ». CJCE, 28 janvier 1986, Rec., p. 353, RTD Eur., 1986, p. 298, note M. -C. Boutard-Labard.

* 290 G. Khairallah, « Le raisonnable en droit privé français, développements récents », R.T.D.civ. 1994, p. 439 et spéc. p. 275 et s.

* 291 Le professeur L. Vogel distingue ainsi, trois dimension dans le phénomène de concentration : « un pôle juridique : les droits de la concurrence sont constitués de règles ; un pôle économique : ces règles ont pour finalité de régir un ordre économique ; un pôle politique : cet ordre n'est pas seulement donné, mais également construit ». L. Vogel, Droit de la concurrence et concentration économique, th. Paris, Economica, Coll `Droit des affaires et de l'entreprise', 1988, n° 5, p. 17, in M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 60, p. 112.

* 292 « Ainsi, l'étude des conditions d'application des règles dans le droit économique tend aujourd'hui à se confondre avec celle des considérations d'opportunité qui les justifient [...] Le discours juridique traditionnel reposant sur une logique conceptuelle s'est totalement effacé devant un raisonnement facturiste et une appréciation de pur opportunité ». B. Oppetit, Philosophie du droit, Précis Dalloz, 1999, n° 85, p. 104

* 293 J. Azéma, Le droit français de la concurrence, op. cit., n°1, p.1.

* 294 « « Toute prérogative, tout pouvoir juridique sont sociaux dans leur origine, dans leur essence et jusque dans la mission qu'ils sont destinés à remplir (...) » ; « en réalité, et dans une société organisée, les prétendus droits subjectifs sont des droits-fonction ; ils doivent demeurer dans le plan de la fonction à laquelle ils correspondent, sinon leur titulaire commet un détournement, un abus de droit ; l'acte abusif est l'acte contraire au but de l'institution, à son esprit et à sa finalité ». J. P. Chazal, « « Relire Josserand », oui mais... sans le trahir ! », Rec. D., 2003, p. 1777, n° 2.

* 295 CJCE, 14 fév. 1978, Utited Brands, Rec D.., p. 207.

* 296 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 88, p. 149 ; « D'une manière comparable, la conduite du partenaire dépendant est dictée par l'entreprise dominante, qui se substitut, pour une opération particulière, à la contrainte du marché. Le rapport de puissance est ici individualisé ». C. Robin, « L'exploitation abusive d'un état de dépendance économique », L.P.A, 28 juillet 1989, n° 90, p. 20.

* 297 M. -A., Frison Roche, « Remarques sur la distinction de la volonté et du consentement en droit des contrats », RTD civ, 1995, n° 9, p. 576.

* 298 Ibid.

* 299 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 88, p. 150.

* 300 Ibid. n° 90, p. 151.

* 301 Ibid., n° 90, p. 152

* 302 Pour plus de détails sur la consécration du principe de l'autonomie de la volonté en droit marocain, v. not. :

ãÍãÏ ÔíáÍ , ÓáØÇä ÇáÅÑÇÏÉ í ÖæÁ ÞÇäæä ÇáÅáÊÒÇãÇÊ æ ÇáÚÞæÏ ÇáãÛÑÈí : ÓÓå æ ãÙÇåÑå í äÙÑíÉ ÇáÚÞÏ , ÑÓÇáÉ ÏÈáæã ÇáÏÑÇÓÇÊ ÇáãÚãÞÉ, ÇáÑÈÇØ, 1982

* 303 « Autonomie est un dérivé d' »autonome », lequel vient du grec autonomos - du préfixe auto et du substantif nomos, ce dernier correpsond en latin à lex, en français « loi » - le droit de se régir par ses propres lois ». F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op cit, n° 21, p. 30.

* 304 « En effet, le principe de l'autonomie de la volonté tire sa force de sa consécration par le droit. Le droit des contrats constitue la volonté comme source d'obligations ; elle n'est source d'obligations que dans la mesure définie par le système juridique. Le concept s'est intégré au droit et s'y est adapté. Le droit lui a donné une valeur, une fonction. Ainsi, contracter, ce n'est pas seulement vouloir, c'est aussi employer un instrument forgé par le droit ». F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op cit, n° 27, p. 37.

* 305 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 185, p. 263

* 306 « D'emblée celui qui s'attaque au problème de l'autonomie de la volonté se heurte à l'absence de définition précise de celle-ci. S'il n'est jamais facile de voir ce qui est, il est beaucoup plus aisé de voir ce qui n'est pas. On dressant un bilan, au lieu de prendre l'actif de l'autonomie de la volonté, il est plus pertinent de rechercher ce qu'il faut mettre au passif, à savoir l'hétéronomie de la volonté. Prendre en compte l'hétéronomie, c'est prendre le contre-pied de l'autonomie : l'hétéronomie naît quand une loi n'émane pas de la personne à qui elle s'impose mais provient de l'extérieur. L'hétéronomie « consiste pour la volonté à ne pas être sa propre législatrice mais à recevoir une influence étrangère à elle-même ». Il importe de rechercher si la personne est esclave de forces extérieures, s'il se laisse imposer sans réagir, des lois extérieures. Ainsi, cette détermination du passif du principe de l'autonomie de la volonté nous permet d'avancer que l'autonomie de la volonté est le « droit pour l'individu de déterminer librement les règles auxquelles il se soumet » N. Chardin, Le contrat de consommation de crédit et l'autonomie de la volonté, op. cit., n° 36, p. 33.

* 307 « On a donné à cette volonté présumée autonome un pouvoir créateur. Et ce pouvoir créateur d'obligations s'étend même comme un pouvoir exclusif. Toute obligation contractuelle n'aura et ne pourra avoir pour source que la volonté des parties. Il n y'a malheureusement pas grande chose à ajouter à ce principe conçu et interprété par les juristes. Ce premier bilan implique que l'on joue le jeu et donc que l'on se refuse à extrapoler. Il faudrait donc en rester là ». Ibid., n° 20, p. 25.

* 308 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 22, p. 31.

* 309 « Si l'égalité fonde le système juridique marocain. En quoi consiste cette égalité ? Le « juste dans le contrat consiste en une certaine égalité ; toutefois, il ne saurait être de la proportion géométrique, mais de la proportion arithmétique. L'égalité en matière d'échange n'est pas fonction de la force respective des parties au contrat. Elle consiste à attribuer à chacun « son dû » ; c'est l'égale distance du profit et de la perte. En effet, notre système juridique a consacré la liberté pour chacun de déterminer la proportion qu'il entend recevoir par l'échange ». Aristote, Ethique de Nicomaque, trad. par J. Voilquin, Flammarion, 1963, n° 3, p. 130. Cité par M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 183, p. 259.

* 310 M. -A., Frison. Roche, « Remarques sur la distinction de la volonté et du consentement en droit des contrats », op. cit.

* 311 M. -A., Frison Roche, « Le contrat et la responsabilité : consentement, pouvoirs et régulation économique », RTD civ, 1998, n° 9, p. 46.

* 312 B. Oppetit, « Le liberté contractuelle à l'épreuve du droit de la concurrence », RSMP, 1995, n° 3, p. 242.

* 313 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 92, p. 154

* 314 Le contractant qui en est victime comprend que le contrat qu'il conclut lui est désavantageux, mais il n'est pas en mesure d'y renoncer

* 315 «De façon générale, la puissance économique à l'origine du contrat d'adhésion ou de l'état de dépendance, permet à son titulaire de choisir seul le contenu du contrat ». M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 88, p. 149

* 316 G. Berlioz, Le contrat d'adhésion, Thèse Paris, LGDJ, 1973, n° 41, p. 27, Cité par M. S. Payet, loc. cit.

* 317 V. Supra, n° 42 et s.

* 318 « Si le contrat est un accord, il ne faut néanmoins pas oublier qu'il est aussi une conciliation entre des intérêts antagonistes. Comme le relève le Doyen j. Carbonnier, le contrat est une forme de « coopération antagoniste » où chacun des contractants cherche à atteindre des fins propres [...]De même, si l'adhérent au contrat se détermine selon son propre choix, ce choix est soumis à une contrainte correspondant à la puissance du stipulant. Le pouvoir du stipulant tient de cette aptitude à agir - en fait - sur la volonté d'autrui. Le consentement à l'acte est alors le fruit d'une abdication. J. Carbonnier, Droit civil, Les obligations, PUF, coll. « Thémis », 21ème éd., 1998, n° 114, p. 214

* 319 J. Carbonnier, Droit civil, Les obligations, op. cit., n° 16, p. 50

* 320 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit., n° 88, p. 149

* 321 L'absence de solution équivalente atteste de cette substitution. L'entreprise dépendante ne trouve pas de solutions alternatives sur le marché et doit se plier à la volonté du partenaire dominant.

* 322 Le pouvoir économique informationnel peut résulter de l'ignorance du partenaire. Elle peut être intellectuelle ou technique. Dans les rapports économiques elle est souvent organisée. En effet, il peut arriver que l'ignorance dont souffre un contractant soit organisée par son cocontractant. Ici, l'ignorance est organisée sciemment. Mais à côté de cette situation extrême, il existe une hypothèse plus sournoise, c'est celle qui consiste, en utilisant les procédés de l'information de masse notamment, à organiser volontairement l'ignorance de son partenaire en cherchant à l'induire en erreur, en cachant ou en travestissant les faits. C'est le problème de la publicité qui se pose alors. Mais la publicité est une information particulière qui confine à la désinformation. Qu'elle soit dénotative ou connotative, la publicité est une arme destinée à inciter le public à contracter, qui se situe entre l'information et le mensonge. Elle va en effet, nécessairement privilégier les bons aspects du produit ou du service qu'elle tend à faire consommer au point d'altérer la qualité du consentement du destinataire du message publicitaire.

* 323 L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, op. cit., n° 2, p. 4

* 324 « Étant égaux en droits, les individus ne peuvent qu'être égaux devant la relation contractuelle. Le droit qui la régit se doit d'être général, impersonnel et commun à tous, sauf à violer le principe de l'égalité formelle chèrement acquis. Selon le bon mot du Doyen Carbonnier, il ne peut y voir que des « indiscernables » ». J. Carbonnier, Flexible droit, LGDJ, 7e éd., p. 310.

* 325 Y. Picot, H. Davo, Le droit de la consommation, Dalloz, Armand Colin, 2005, n° 179, p. 98.

* 326 Encore « Au postulat que voulait que le libre jeu des volontés individuelles conduisent aux rapports socialement les plus utiles, on a objecté que les Hommes s'orientent naturellement vers les activités les plus rentables, lesquelles ne sont pas nécessairement les plus utiles ». F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 33, p. 38.

* 327 ». F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, loc.cit.. ; « Cette définition laisse à l'accord des volontés son rôle spécifique dans la création d'effets de droit. Mais l'autonomie ainsi reconnue aux parties, qui sont autorisées à régler elles-mêmes, par leur accord, leurs relations, n'est pas indépendance, ni souveraineté. Elle ne s'exerce que dans les limites plus ou moins étroites des compétences qui leur sont reconnues par le droit objectif ». J. Ghestin, « La notion de contrat », Rec. D. 1990, Chron. p. 147.

* 328 M. S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, op. cit, n° 179, p. 253.

* 329 « Le contrat devient parfait dans ce noeud fait de deux consentements objectifs. La volonté est solitaire puisqu'elle est liée à la personne, personne dont la pensée classique affirme qu'elle est unique et irréductible. Mais la souveraineté de la volonté est associée à une extrême faiblesse puisque, intime avec la personne, elle est incapable de s'extérioriser sans dénaturation. Pour qu'une volonté se lie avec une autre, elle doit produire un objet, qu'on désigne comme le consentement. Le contrat se forme par l'échange des consentements. Mais si ce sont les consentements qui forment le contrat, les volontés ne s'étant exprimées que pour produire antérieurement des consentements, le caractère objectif de ceux-ci se propage au contrat. Le doyen Jean Carbonnier avait souligné cette objectivation du contrat ». M. A. Frison-Roche, « Le contrat et la responsabilité : consentements, pouvoirs et régulation économique », op. cit., n° 9, p. 46.

* 330 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, loc. cit..

* 331 C. Thibierg Guelfucci, « Libres propos sur la transformation du droit des contrats », R.T.D.civ. 1997, p. 357.

* 332 M. Villey, Phlosophie du droit, op cit, n° 44, p. 74.

* 333 Pour plus de détail voir : V. Valentin, Les conceptions néolibérales du droit, Th. Economica, 2002.

* 334 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op.cit. n° 47, p. 54

* 335 J. Ghestin, « La notion de contrat », op. cit.

* 336 « « Pourquoi alors cette métamorphose de l'homme, préhistorique en homme social, en citoyen, en sujet « de droit » ? Quel intérêt assez puissant pour y déterminer le genre humain tout entier ? Pas d'autre que celui d'établir et de s'assurer la garantie sociale, c'est-à-dire la protection de tous contre les violences... ». Cette garantie sociale, l'histoire de l'humanité révèle qu'elle est assurée par l'ordre social en règles ». J.-Louis Sourioux, Droit, Rép. Civ. Dalloz, juillet 2004, n° 1.

* 337 « Prenant comme à plaisir le contre-pied des recommandations de Portalis qui opposait « la science du législateur (qui) consiste à trouver les principes les plus favorables au bien commun » et celle du « magistrat qui est de mette ces principes en action, de les ramifier, de les étendre par une application sage et raisonnée », nos faiseurs de textes se sont depuis plus de vingt ans employés à multiplier sans aucune vision d'ensemble des dispositions pointillistes et tatillonnes ». F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 256, p. 259

* 338 « Le droit commun n'ignore pas les abus qui peuvent être commis par un contractant à l'égard de l'autre, mais il leur apporte seulement des remèdes individuels et curatifs : c'est une fois le mal réalisé et constaté que le contractant a la possibilité théorique d'agir en nullité ou en responsabilité. Cette voie est généralement inutilisable par les consommateurs, car le coût et la lenteur de l'action en justice sont hors de proportion avec l'intérêt individuel en jeu ». J.Calais-Auloy, « 'influence du droit de la consommation sur le droit civil des contrats », R.T.D. civ. 1994, p. 239.

* 339 C'est un interventionnisme de type libéral ou néolibéral, un objectif de politique économique et non de protection sociale : « le critère est celui du bien-être global de la collectivité des consommateurs, du bien public économique ». F. Jenny, « L'ordonnance n° 86-123 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence : raisonnement économique et équilibre des pouvoirs », Cah. dr. entr. 1987-1, p. 2.

* 340 J. Ghestin, Traité de droit civil, Le contrat, LGDJ, 1980, n° 119.

* 341 « Ainsi, le droit de la concurrence se définit en premier lieu par sa finalité économique et en second lieu par sa fonction qui est de promouvoir un ordre public de direction ». F. Jenny, loc. cit.

* 342 Pour certains auteurs : « L'ambiguïté des prohibitions telles que refus de vente ou discriminations rend difficile mais nécessaire de distinguer le droit de la concurrence proprement dit (ces dispositions y appartiennent sans conteste) des mécanismes de droit commun que les tribunaux utilisent depuis toujours pour sanctionner des atteintes individuelles à la concurrence ; il s'agit par exemple de la théorie de la concurrence déloyale. Cette théorie ne ressortit pas, malgré les apparences, du « droit de la concurrence » car elle concerne des comportements purement individuels ; le souci de direction de l'économie par la protection de la concurrence lui est étranger ». J.-M. Mousseron et V. Selinsky, Le droit français nouveau de la concurrence, Litec, 1987, n° 57 et s. 

* 343 Cf. Lucas de Leyssac et G. Parleani , Droit du marché,op. cit

* 344 F. Dreifuss-Netter, « Droit de la concurrence et droit commun des obligations », R.T.D.civ. 1990, p. 369.

* 345 M. D. A. Machichi, Concurrence, droits et obligations des entreprises au Maroc, op. cit., p. 212.

* 346 « ...un terme américain régulation, que l'on traduirait spontanément en français par "réglementation". La régulation, selon les dictionnaires français, est l'action consistant à régler, à assurer le bon fonctionnement de systèmes, notamment de systèmes biologiques. La notion de régulation est apparue, s'est affirmée en tous cas, aux États-Unis à l'occasion du New Deal (la Nouvelle Donne) des années 1933 et suivantes. À la suite de la crise de 1929 et des dérèglements majeurs qu'a connus alors l'économie américaine, le président Roosevelt a éprouvé le besoin de mettre en place un ensemble d'organismes pour surveiller les marchés, notamment le marché financier ; pour surveiller le bon fonctionnement de la concurrence et éviter ainsi les abus de position dominante, etc. ». E. Cohen, « De la réglementation étatique et administrative à la régulation », Paysans, mi-juin, repris dans Problèmes économiques n° 2680, P : 1.

* 347 Le préambule de la loi 06-99 déclare clairement les objectifs poursuivis par la loi « La présente loi a pour objet de définir les dispositions régissant la liberté des prix et d'organiser la libre concurrence. Elle définit les règles de protection de la concurrence afin de stimuler l'efficience économique et d'améliorer le bien-être des consommateurs. Elle vise également à assurer la transparence et la loyauté dans les relations commerciales. ». Ces objectifs doivent guider les autorités judiciaires et administratives dans l'interprétation et l'application du droit de la concurrence.

* 348 « Ce qui ne doit pas étonner quand on sait que l'étymologie du mot judex (jus/decere) signifie « dire le droit ». J.-Louis SOURIOUX, Droit, op. cit., n° 33

* 349 « Qui ont scientia legum (la science des lois) et constituent doctrina (la doctrine), terme dérivé de docere , art d'enseigner, d'où le primat de la parole ». loc. cit.

* 350 loc. cit..

* 351 « C'est d'abord celui du juge étatique lorsqu'il prononce le jugement. Il fait alors oeuvre juridictionnelle (juris-dictio), diction du droit, et sa décision tranche le litige ; elle a autorité de la chose jugée. L'art de la diction du droit, ainsi entendue, participe de la vertu de prudence (prudentia) appliquée au droit (juris). D'où le nom de jurisprudence ». P. MORVAN, En droit, la jurisprudence est une source de droit, RRJ, 2001-1, PUAM, p. 77 et s

* 352 J.-Louis Sourioux, Droit, op. cit., n° 34

* 353 « En effet, si le juge, dans une conception servile de son rôle par rapport à la loi, se refusait à exercer ce pouvoir créateur, il violerait sa seconde obligation - rendre un jugement - « sous prétexte » d'honorer la loi ». 354 J.-Louis SOURIOUX, Droit, op. cit., n° 39.

* 355 Le mot consentement est susceptible de deux acceptions. Il peut en premier lieu désigner l'accord résultant du concours des volontés des contractants : le consentement, au singulier, est l'addition de deux ou plusieurs volontés. Mais le consentement peut aussi s'entendre, en second lieu, de la volonté individuelle de chacune des parties au contrat. Pour plus de détail v. F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 91 ; M.-A. Frison-Roche, « Remarques sur la distinction de la volonté et du consentement en droit des contrats » : op. cit. ; P. Chauvel, Consentement, Rép. civ. juin 1995.

* 356 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 196

* 357 « D'une part, la liberté de contracter impose le consentement en tant que condition nécessaire à la formation de tout contrat, même si celle-ci répond à une obligation légale ou à une nécessité économique ou sociale. v. C. C. Larroumet, Droit civil, t. 3, Les obligations, Le contrat : Economica, 4e éd., 1998, n° 231 et 232 ; d'autre part, le consensualisme fait en principe du consentement la condition suffisante de cette formation - V. notamment, en jurisprudence : Cass. 3e civ., 27 nov. 1990 : RJDA 1991, I, n° 14 ; R.T.D.civ. 1991, p. 315, obs. J. Mestre.

* 358 J. Carbonnier, Droit civil, t. 4, Les obligations : PUF, 22e éd., 2000, n° 97 ; J. Ghestin, Traité de droit civil, Les obligations. Le contrat : formation : LGDJ, 3e éd. 1993, n° 476.

* 359 V. cependant Cass. 3e civ., 24 mai 2000 : Bull. civ. 2000, III, n° 114 ; R.T.D.civ. 2000, p. 824, obs. J. Mestre et B. Fagès.

* 360 L'article 46 du D.O.C. dispose que « La violence est la contrainte exercée sans l'autorité de la loi, et moyennant laquelle on amène une personne à accomplir un acte qu'elle n'a pas consenti ».

* 361 P. Chauvel, Violence, Rép. civ., septembre 2003, n° 27.

* 362 V. H., L., J. Mazeaud et F. Chabas, Leçons de droit civil, op. cit., n° 205.

* 363 « La formulation est maladroite : le mal sera nécessairement futur, et c'est la crainte qui doit être « présente », contemporaine de l'acte ». Ibid. ; L'article 1113, article 50 du D.O.C. ajoute qu'il y aura également lieu à nullité lorsque la violence aura été exercée non seulement sur la partie contractante, mais encore « sur son époux ou sur son épouse, sur ses descendants ou ses ascendants »

* 364 Cass. com. 27 juill. 1912, S. 1913. 1. 338.

* 365 CA Paris, 26 oct. 2001, RJDA 2002, n° 222, R.T.D.civ. 2002. 503, obs. J. Mestre et B. Fages.

* 366 Cass. com. 18 févr. 1997, op. cit.

* 367 Cass. 1re civ. 16 oct. 1962, Bull. civ. I, n° 423 ; Cass. soc. 5 juill. 1965, Bull. civ. IV, n° 545

* 368 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 244.

* 369 Cass. com. 21 févr. 1995, Bull. civ. IV, n° 50.

* 370 En France: L. 24 avr. 1916 ; L. n° 67-545, 7 juill. 1967.

De la même façon, en France, une ordonnance est intervenue à la Libération afin de permettre que puissent être annulés certains actes de disposition conclus par des Juifs pendant la guerre, sous la menace des autorités d'occupation, il s'agit de l'Ordonnance. n° 45-770, 21 avr. 1945, art. II.

* 371 Cass. 1re civ. 30 mai 2000, Bull. civ. I, n° 169, note J.-P. Chazal, Dr. et patrimoine 2000, chron. no 2652.

* 372 La formulation est maladroite : le mal sera nécessairement futur, et c'est la crainte qui doit être « présente », contemporaine de l'acte

* 373 Cass. 1re civ. 3 avr. 2002, Rec. D. 2002. 1860, note J.-P. Gridel, D. 2002. 1862, note J.-P. Chazal, D. 2002, somm. 2844, obs. D. Mazeaud, R.T.D.civ. 2002. 502, obs. J. Mestre, Defr. 2002, art. 37607, no 65, obs. E. Savaux ; G. Loiseau, « L'éloge du vice ou les vertus de la violence économique », Dr. et patr. 2002, p. 26, cassant CA Paris, 12 janv. 2000, JCP 2000. II. 10433, note Ph. Pierre, D. 2001. 2067, note Fadeuilhe.

* 374 P. Chauvel, Violence, Rép. Civ. Dalloz, septembre 2003, n° 27.

* 375 V. P. Cauvel, « Violence, contrainte économique et lésion », Mél. A.-M. Sohm, LGDJ cité par P. Chauvel, Violence, Rép. Civ., septembre 2003, n° 27 ; C. Nourissat, « La violence économique, vice du consentement. Beaucoup de bruit pour rien ? », Rec. D. 2000, chron. 369 ; B. Montels, « La violence économique, illustration du conflit entre droit commun des contrats et droit de la concurrence », R.T.D.com. 2002. 417 ; A. Huygens, La violence économique, DEA, Lille II, 2001.

* 376 N. Brunetti, Droit de la concurrence et droit des contrats, op. cit., p. 40.

* 377 J. Calais Auloy, « L'influence du droit de la consommation sur le droit civil des contrats », op. cit.

* 378 M. de Juglart, « L'obligation de renseignements, dans les contrats », R.T.D.civ. 1945, p. 1, n° 3, cité par B. Petit, Contrats et obligations - Obligation d'information, J.Cl. Civil, 20 Février 2003, Fasc 50, n° 7.

* 379 J. Ghestin, Traité de droit civil, La formation du contrat, op. cit., n° 599.

* 380 M. Fabre-Magnan, De l'obligation d'information dans les contrats. Essai d'une théorie : LGDJ 1992.., n° 50 s

* 381 Cf. J. Mestre, « Un bel exemple d'obligation de renseignement dans l'exécution du contrat », R.T.D.civ. 1996, p. 393.

* 382 Cf. Y. Picod, « L'obligation de coopération dans l'exécution du contrat », JCP éd G, 1988, n° 3318.

* 383 Cf. M. Fabre-Magnan, op. cit., n° 53

* 384 Cf. J. Mestre, L'évolution du contrat en droit privé français, in l'évolution contemporaine du droit des contrats, PUF 1986, p. 41, cité par B. Petit, Contrats et obligations - Obligation d'information, J.Cl. Civil, 20 Février 2003, Fasc 50, n° 8.

* 385 J. Ghestin, Traité de droit civil, La formation du contrat, op. cit., n° 641

* 386 Pour un exposé approfondi de l'analyse économique, V. M. Fabre-Magnan, De l'obligation d'information dans les contrats. Essai d'une théorie, op. cit., n° 57 s. et J. Ghestin, Traité de droit civil, La formation du contrat, op. cit., n° 642

* 387 Cf. J. Mestre, « Transparence et droit des contrats », RJ com., n° spéc., nov. 1993 ; Aujourd'hui ce concept de transparente regagne d'actualité, notamment après la crise financière des établissements de crédit aux Etats-Unis et partout dans le monde.

* 388 Ibid. p. 77 et s.

* 389 V. spécialement la remarquable thèse de M. Fabre-Magnan, De l'obligation d'information dans les contrats. Essai d'une théorie, op. cit.

* 390 Cf. J. Ghestin, Traité de droit civil, La formation du contrat, op. cit., n° 631.

* 391 Ibid,. n° 628.

* 392 Ibid., n° 633.

* 393 Cf. J. Ghestin, loc. cit.

* 394 Cf. M. Fabre-Magnan, De l'obligation d'information dans les contrats. Essai d'une théorie, op. cit., n° 401

* 395 Cass. 3e civ., 30 juin 1992 : Bull. civ. III, n° 238.

* 396 Cass. 1re civ., 3 juill. 1985 : Bull. civ. I, n° 211. - 5 déc. 1995 : R.T.D.civ. 1996, 338, obs. J. Mestre.

* 397 Cass. 1re civ., 27 mai 1997 : R.T.D.civ. 1997, 930, obs. J. Mestre.

* 398 Cass. 3e civ., 8 oct. 1997 : J.Cl. Resp. civ. et assur. 1997, comm. n° 364 ; R.T.D.civ. 1998, p. 383, obs. P. Jourdain.

* 399 Cass. 3e civ. 4 mai 1976 : D. 1977, jurispr. p. 34, note J. Mazeaud.

* 400 Cass. 1re civ., 16 juill. 1991 : JCP éd. G, 1992, II, 21947, note A. Dorsner-Dolivet.

* 401 Cass. 1re civ., 14 janv. 1992 : JCP G 1993, II, 21996, note Dorsner-Dolivet.

* 402 Cass. com., 23 oct. 1990 : Bull. civ. IV, n° 243.

* 403 Cass. com., 28 oct. 1974 : JCP éd. G 1976, II, 18251, note M. Boitard.

* 404 Cass. 1re civ., 8 juin 1994 : JCP éd. E 1995, II, 652, note D. Legeais. - 27 juin 1995 : JCP E 1996, II, 772, note D. Legeais ; R.T.D.civ. 1996, p. 385, obs. J. Mestre..

* 405 Cass. 1re civ., 12 nov. 1975 : Bull. civ. I, n° 320.

* 406 Cass. 1re civ., 30 oct. 1985 : Bull. civ. I, n° 277.

* 407 Cass. 3e civ., 3 nov. 1983 : Juris-Data n° 1983-002356.

* 408 Cass. com., 10 févr. 1970 : Bull. civ. IV, n° 53.

* 409 V. cependant Cass. 1re civ., 19 janv. 1983 : JCP G 1984, II, 20175, note P. Jourdain.

* 410 Cass. 1re civ., 7 mars 1978 : Bull. civ. I, n° 94.

* 411 Cass. 1re civ., 28 févr. 1989 : Bull. civ. I, n° 102.

* 412 Cass. com., 27 févr. 1990 : Juris-Data n° 1990-000475.

* 413 Cass. 1re civ., 10 janv. 1990 : Juris-Data n° 1990-000038.

* 414 Cass. 3e civ., 8 oct. 1997 : Bull. civ. III, n° 189 ; R.T.D.civ. 1998, p. 384, obs. P. Jourdain.

* 415 Cass. 1re civ., 18 janv. 1989 : Bull. civ. I, n° 17. - 24 juin 1997 : JCP G 1997, II, 22970, note E. du Rusquec ; D. 1998, somm. p. 198, obs. P. Jourdain.

* 416 V. notamment Cass. 1re civ., 29 avril 1997 : JCP G 1997, II, 22948, note R. Martin.. - 18 juill. 2000 : Bull. civ. I, n° 214 ; R.T.D.civ. 2000, p. 828, obs. J. Mestre et B. Fages.

* 417 V. notamment Cass. 1re civ., 25 nov. 1997 : Bull. civ. I, n° 329. - 3 févr. 1998 : JCP éd. N. 1998, 701, note J.-F. Pillebout.

* 418 Cass. 1re civ., 15 déc. 1998 : Bull. civ. I, n° 364.

* 419 Cass. 1re civ., 7 mars 1989 : Bull. civ. I, n° 107. - 9 mai 2001 : Bull. civ. I, n° 118 ; R.T.D.civ. 2001, p. 875, obs. J. Mestre et B. Fages.

* 420 Cass. 1re civ., 24 mai 1989 : Juris-Data n° 1989-002144.

* 421 Cass. 1re civ., 28 oct. 1986 : Juris-Data n° 1986-002093.

* 422 V. notamment les multiples références citées par B. Starck, Droit civil, Les obligations, t. 2, Contrat : Litec, 6e éd. 1998, par H. Roland et L. Boyer, n° 337 et s.  ; G. Viney, P. Jourdain, Traité de droit civil, Les conditions de la responsabilité : LGDJ, 2e éd. 1998, n° 502 et s., spéc. n° 508.

* 423 Cf. M. Fabre-Magnan, De l'obligation d'information dans les contrats. Essai d'une théorie, op. cit., n° 403

* 424 V. par exemple, Cass. 1re civ., 4 oct. 1977 : JCP G 1978, 1, 262, note A. Plancqueel

* 425 V. notamment M. Fabre-Magnan, De l'obligation d'information dans les contrats. Essai d'une théorie, op. cit., n° 409 ; J. Ghestin, Traité de droit civil, La formation du contrat, op. cit , n° 598

* 426 Cass. 1re civ., 27 févr. 1985 : Bull. civ. I, n° 82.; Cf. J. Ghestin, , Traité de droit civil, La formation du contrat, op. cit., n° 598.

* 427 Cass. 3e civ., 24 mai 1972 : Bull. civ. III, n° 324.

* 428 Cass. com., 17 mars 1981 : JCP CI 1981, 9783.

* 429 Cf. M. Fabre-Magnan, De l'obligation d'information dans les contrats. Essai d'une théorie, op. cit., n° 342

* 430 Le contenu de la bonne foi en matière contractuelle. D'abord, bien évidemment, sous une forme négative, en bannissant son contraire : la mauvaise foi. On se rapproche ainsi positivement de la bonne foi, laquelle impose certains devoirs aux contractants : le devoir de loyauté tout d'abords dans l'exécution des contrats mais aussi dans sa négociation et sa conclusion. Dans sa formation : non seulement chacune des parties ne doit pas tromper l'autre mais elle doit adopter une attitude cohérente permettant à son partenaire de déterminer sa propre conduite. Dans son exécution : chaque contractant doit exécuter fidèlement ses engagements. De manière générale chaque fois qu'un contractant fait naitre un rapport de confiance doit en assumer les conséquences. Le devoir de coopération, de collaboration ensuite. Encore convient-il de distinguer. Et de fait, si certains contractants se prêtent à l'épanouissement d'un tel devoir, d'autres y sont plus ou moins perméables. Outre le contrat de société qui, avec son affectio societatis, apparaît comme le domaine naturel d'application d'un tel devoir, on peut également songer à le découvrir dans certains contrats de longue durée sous-tendus par une sorte d'animus cooperandi. Pour la plupart des autres contrats, le devoir de collaboration se réduit à avertir l'autre, en cour de contrat, des événements qu'il a intérêt à connaître et à faciliter l'exécution de celui-ci ». F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 43, p.47.

* 431 Cf. M. Fabre-Magnan, De l'obligation d'information dans les contrats. Essai d'une théorie, op. cit, n° 276 s.

* 432 V. notamment Cass. 3e civ., 27 mars 1991 : Bull. civ. III, n° 108 ; R.T.D.civ. 1992, p. 81, obs. J. Mestre.

* 433 V. notamment Cass. com., 11 janv. 1984 : Bull. civ. IV, n° 16.

* 434 V. notamment Cass. 1re civ., 25 oct. 1989 : JCP G 1990, II, 21458, note J. Hauser.

* 435 V. notamment Cass. 1re civ., 21 juin 1987 : Bull. civ. I, n° 241 ; Contrairement à plusieurs législations étrangères, le code civil en contient pas, en matière contractuelle, une disposition générale relative à la bonne foi. Le texte à la plus vaste ampleur est l'article 1134, alinéa 3, selon lequel les conventions « doivent être exécutées de bonne foi ». Mais il n'existe aucun article comparable quant à la formation du contrat. Cependant, la jurisprudence a suppléé à cette lacune, en décidant que la bonne foi doit aussi gouverner la période précontractuelle. Comme la cause, la bonne foi accompagne le contrat, telle son ombre, durant toute son existence, de sa naissance à son achèvement, par une complète exécution réciproque ou par sa résolution.

* 436 V. notamment Cass. 1re civ., 28 févr. 1989 : Bull. civ. I, n° 102.

* 437 Cf. P. Malaurie, L. Aynès, Droit civil, Obligations, t.2, Contrats et quasi-contrats, Cujas, 11e éd. 2001, n° 379, B. Petit, Contrats et obligations - Obligation d'information, 20 Février 2003, Fasc 50, J.Cl Civ., n° 17. Ces auteurs préfèrent cependant rattacher l'obligation à la loi plutôt qu'à l'équité et aux usages

* 438 Cass. 1re civ., 6 oct. 1982 : Bull. civ. I, n° 279.

* 439 Cass. 1re civ., 10 mai 1989 : Bull. civ. I, n° 187 ; R.T.D.civ. 1989, p. 738, obs. J. Mestre.

* 440 Cf. Se référant à "l'obligation de bonne foi qui s'impose en matière contractuelle" : Cass. 1re civ., 28 mars 2000 : Bull. civ. I, n° 101 ; R.T.D.civ. 2000, p. 565, obs. J. Mestre et B. Fages.

* 441 V. Supra n° 136 et s.

* 442 Ainsi, l'article 55 du Dahir des obligations et des contrats dispose que : « La lésion ne donne pas lieu à la rescision, à moins qu'elle ne soit causée par le dol de l'autre partie, ou de celui qui la représente ou qui a traité pour elle, et sauf l'exception ci-après ». L'exception est précisée par l'article 56. Ainsi, aux termes de ce dernier : « La lésion donne ouverture à la rescision, lorsque la partie lésée est un mineur ou un incapable, alors même qu'il aurait contracté avec l'assistance de son tuteur ou conseil judiciaire dans les formes déterminées par la loi, et bien qu'il n'y ait pas dol de l'autre partie. Est réputée lésion toute différence au-delà du tiers entre le prix porté au contrat et la valeur effective de la chose ».

* 443 V. sur ce point, D. Mazeaud, La protection par le droit commun, in Les clauses abusives entre professionnels, Economica, 1998, p. 33

* 444 Et ce, bien qu'elles soient plus spécialement destinées à être utilisées dans les rapports entre professionnels, là où les dispositions protectrices particulières sont a priori inopérantes.

* 445 En l'espèce, une société a confié à Chronopost des plis contenant une soumission à une adjudication. Ces plis n'étant pas arrivés à destination le lendemain avant midi, comme Chronopost s'y était engagé, la société cliente n'a pu participer à l'adjudication, subissant ainsi un préjudice correspondant à la perte d'une chance d'obtenir le marché. Si l'inexécution de l'obligation de livraison en temps et en heure n'était pas contestable, en revanche, la cour d'appel a fait application de la clause limitative de responsabilité selon laquelle les dommages et intérêts dus par Chronopost ne pouvait excéder le prix du transport, considérant que celle-ci n'avait pas commis de faute lourde. La cassation de l'arrêt, sous le visa de l'article 1131 du code civil, est remarquable : « En statuant ainsi, alors que spécialiste du transport rapide garantissant la fiabilité et la célérité de son service, la société Chronopost s'était engagée à livrer les plis de la société Banchereau dans un délai déterminé et qu'en raison du manquement à cette obligation essentielle, la clause limitative de responsabilité du contrat, qui contredisait la portée de l'engagement pris, devait être réputée non écrite ». Cass. com., 22 oct. 1996, JCP éd. G 1997, II, 22881, note D. Cohen ; D. 1997, jurispr. p. 121, note A. Sériaux.

* 446 V. dans ce sens : J.-M. Gueguen, « Le renouveau de la cause en tant qu'instrument de justice contractuelle », Rec. D. 1999, chron. p. 352 ; Ch. Larroumet, « Obligation essentielle et clause limitative de responsabilité », Rec. D. 1997, chron. p. 145.

* 447 Cass. 1re civ., 4 juill. 1995, Bull. civ. I, n° 303 ; Rec. D. 1996, somm. p. 11, obs. G. Paisant.

* 448 Aux termes de cet article : « Le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties ». L'article correspondant dans le Dahir des obligations et des contrats, est l'article 487 qui dispose : « Le prix de la vente doit être déterminé. On ne peut en rapporter la détermination à un tiers ni acheter au prix payé par un tiers, à moins que le prix ne fût connu des contractants. On peut cependant s'en référer au prix fixé dans une mercuriale, ou tarif déterminé, ou à la moyenne des prix du marché, lorsqu'il s'agit de marchandises dont le prix ne subit pas de variation. Lorsque ce prix est variable, les contractants sont présumés s'en être référés à la moyenne des prix pratiqués ».

* 449 Cass. 1re civ., 18 juill. 2001, Rec. D. 2002, p. 930, obs. G. Paisant.

* 450 L'insertion, dans le corps de règles régissant la concurrence entre les entreprises, de dispositions destinées à lutter contre les déséquilibres au sein des conventions et contre les clauses qui les matérialisent juridiquement s'explique probablement par ce refus jurisprudentiel.

* 451 L'alinéa premier de l'article 1134 du code civil français dispose que : Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ». Dans les mêmes termes l'article 230 du Dahir des obligations et des Contrats énonce : « Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi.

* 452 B. Boccara, « La liquidation de la clause pénale et la querelle séculaire de l'art. 1231 c. civ. », JCP 1970. I. 2294.

* 453 Et ce, avant la consecration légale en 1975 des dispositions permettant la sanction des clauses pénales.

* 454 Cass. com. 29 janv. 1985, Bull. civ. IV, no 43.

* 455 V. D. Mazeaud, « Loyauté, solidarité, fraternité : la nouvelle devise contractuelle ? », Mélanges Terré, 1999, Dalloz/PUF/Juris-Classeur, p. 603 et s. ; C. Jamin, « Plaidoyer pour le solidarisme contractuel », Mélanges Ghestin, 2001, LGDJ, p. 441 et s. ; pour une critique de ces idées : F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n°  41 et s.

* 456 V. J.-P. Chazal, « Théorie de la cause et justice contractuelle », JCP éd. G, 1998. I. 152 ; J.-M. Guéguen, « Le renouveau de la cause en tant que qu'instrument de justice contractuelle », Rec. D. 1999, chron. 352.

* 457 En pratique, les contrats d'assurance contiennent des clauses qui régissent cette durée de garantie. Deux clauses ont été fréquemment utilisées par les assureurs afin de borner dans le temps leur obligation de garantie. La première est la clause de réclamation en vertu de laquelle ne sont garantis que les dommages qui ont été déclarés par l'assuré à son assureur durant la période au cours de laquelle le contrat d'assurance était en vigueur. Par conséquent, en application de cette clause, le dommage survenu pendant le cours du contrat d'assurance, mais déclaré par l'assuré postérieurement à son terme extinctif, ne serait pas couvert. La clause de survenance du dommage, quant à elle, se fonde sur l'apparition du dommage, et non sur l'existence du fait générateur, pour déterminer si la garantie doit, ou non, jouer.

* 458 Aux termes de cet article: « L'obligation sans cause ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet ». Dans le même sens, l'alinéa 2 de l'article 62 du Dahir des obligations et des contrats stipule : « L'obligation sans cause ou fondée sur une cause illicite est non avenue ».

* 459 Cass. 1re civ. 19 déc. 1990, Bull. civ. I, no 303, JCP 1991. II. 21656, note J. Bigot ; Sur cette jurisprudence, v. Y. Lambert-Faivre, « La durée de la garantie dans les assurances de responsabilité. Fondement et portée de la nullité des clauses « réclamation de la victime », Rec. D. 1992, chron. 13 ; G. Viney, « La clause dite « de réclamation de la victime » en assurance de responsabilité », JCP 1994. I. 3778.

* 460 La clause de survenance du dommage a, quant à elle, été réputée non écrite pour les mêmes motifs dans un arrêt ultérieur. Cass. 1re civ. 30 mars 1994, RGAT 1994. 666, note J. Bigot.

* 461 Ainsi, la Cour de cassation a pu énoncer que « le versement des primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat d'assurance et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période ; que toute clause qui tend à réduire la garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l'assuré est génératrice d'une obligation sans cause, comme telle illicite et réputée non écrite ». Cass. 1re civ. 16 déc. 1997, D. 1998. 287, note Y. Lambert-Faivre, JCP 1998. II. 10018, rapp. P. Sargos.

* 462 Sur ce mécanisme, V. J. Ddevèze, A. Couret et G. Hirigoyen, Lamy Droit du financement 2002, n° 2742.

* 463 V. Cass. com. 29 mars 1994, Rec. D. 1994. 611, note C. Gavalda ; 10 janv. 1995, Rec. D. 1995. 229, note C. Gavalda.

* 464 Dans notre droit positif, l'article 232 du Dahir des Obligations et des contrats dispose : « On ne peut stipuler d'avance qu'on ne sera pas tenu de sa faute lourde ou de son dol ».

* 465 Cass. com. 14 janv. 1984, Bull. civ. IV, no 20, R.T.D.civ. 1984. 728, obs. J. Huet.

* 466 Cass. 1re civ. 18 janv. 1984, JCP éd. G, 1985. II. 20372, note J. Mouly.

* 467 Cass. 1re civ. 15 nov. 1988, D. 1989. 349, note P. Delebecque.

* 468 Cass. 1re civ. 2 déc. 1997, Bull. civ. I, no 349.

* 469 V. Supra, n° 173 et s.

* 470 Cass. com. 15 juill. 1987, Rec. D. 1988. 360, note C. Atias et C. Mouly ; Cass. com. 19 mai 1987, JCP, éd. N, 1988. II. 277, note J.-G. Raffray.

* 471 Sur ce critère, V. Actes du colloque du 20 mars 1998, organisé par la faculté de droit de Paris V, « Existe-t-il un principe de proportionnalité en droit privé ? », LPA, 30 sept. 1998, n° 117 ; Y. Auguet, « Au nom de la cause... Vive la généralisation du critère de proportionnalité ! », Dr. et patrimoine, mars 2001, p. 33 et s.

* 472 Cass. com. 4 janv. 1994, Rec. D. 1995. 205, note Y. Serra, R.T.D.civ. 1994. 349, obs. J. Mestre.

* 473 Cass. 1re civ. 11 mai 1999, Defrénois 1999. 992, obs. D. Mazeaud, Rec. D. 2000, somm. 312, obs. Y. Serra, Contrats, conc., consom. 1999, comm. 137, note L. Leveneur.

* 474 En l'espèce, une clause de non-concurrence, limitée dans le temps et dans l'espace, a été stipulée dans un contrat d'association conclu entre plusieurs médecins. La cour d'appel avait considéré cette clause valable dans la mesure où elle « ne faisait pas obstacle à la liberté de choix du malade et n'interdisait pas au médecin d'exercer sa profession ailleurs que dans la zone interdite et dans le délai contractuellement prévu ». L'arrêt est cassé, sous le visa de l'article 1131 du code civil, aux motifs « qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si cette clause était proportionnée aux intérêts légitimes à protéger, compte tenu de la durée du contrat et du lieu d'exercice de la profession », la cour n'avait pas donné de base légale à sa décision. Par conséquent, manque de cause la clause de non-concurrence qui introduit une disproportion entre les intérêts légitimes à protéger - notamment ceux de l'entreprise créancière de l'obligation de non-concurrence - et la liberté économique du débiteur de l'obligation de non-concurrence.

* 475 Cass. com. 4 mai 1993, JCP éd. G, 1993. II. 22111, note M.-C. Boutard-Labarde ; et du droit du travail, Cass. soc. 14 mai 1992, JCP 1992. II. 21889, note J. Amiel-Donat, Rec. D. 1992. 350, note Y. Serra.

* 476 C'est ainsi le cas d'un litige porté devant les juges français. En l'espèce, un commerçant qui est sollicité pour installer dans son magasin un système de diffusion de messages publicitaires au moyen d'écrans pris en location. Deux conventions sont conclues avec deux sociétés distinctes, l'une pour la location du matériel, l'autre pour la diffusion des images. La diffusion des messages ayant cessé à cause de la liquidation judiciaire du cocontractant, les écrans loués ne présentent plus aucune espèce d'intérêt pour le commerçant. Pourtant, le bailleur demande toujours le paiement des loyers arguant de l'indépendance des deux conventions. Dans ce genre d'affaire, la jurisprudence ne manque pas d'analyser les faits en détail et de recourir au concept d'indivisibilité pour dire que la cessation des prestations du fournisseur de messages entraînait la résiliation du contrat de location de matériels car « les matériels et logiciels ne pouvaient avoir, sans modifications substantielles, d'autres usages que la communication par le réseau [du cocontractant] [...], que cette spécificité était connue de la société bailleresse et que celle-ci avait participé à l'élaboration de l'ensemble complexe ayant pour objet la mise en place et le financement du système de communication » Cass. com. 4 avr. 1995, Rec. D. 1996. 141, note S. Piquet ; Pour d'autres exemples de conventions indivisibles, V. J. Ghestin, C. Jamin et M. Billiau, Les effets du contrat, 3e éd., 2001, LGDJ, n° 496 et s.

* 477 Dans la première conception, l'indivisibilité entre des conventions formellement distinctes ne peut découler que de la volonté explicite ou implicite, mais non équivoque, des parties, lesquelles auraient aussi le pouvoir de diviser une opération qui, au départ, était unique. Dans la seconde, c'est l'unité et la cohérence de l'opération qui conditionne l'indivisibilité des conventions, lesquelles ne sont que le résultat d'un dépeçage juridique artificiel.

* 478 Cass. 1re civ. 15 févr. 2000, LPA, 29 déc. 2000, n° 260, p. 12, note G. Meilhac-Redon et F. Marmoz, Rec. D. 2000, somm. 364, obs. P. Delebecque, JCP, éd. E, 2000. 320, obs. J.-B. Seube, étant précisé que la Cour de cassation a relevé au soutien de sa décision que le crédit-bailleur connaissait la destination du matériel pris à bail et qu'il s'agissait d'un matériel très spécifique.

* 479 V. cependant. Cass. 1re civ. 1er oct. 1996, Bull. civ. I, no 235.

* 480 Cass. 1re civ. 23 févr. 1994, Rec. D. 1995. 214, note N. Dion.

* 481 V. P. Cramier, « Essai sur la protection du contractant professionnel », LPA, 12 juin 2000, n° 116, p. 4 et s., 13 juin 2000, n° 117, p. 4 et s., 14 juin 2000, n° 118, p. 7 et s

* 482 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 621.

* 483 V. J. Béguin, Rapport sur l'adage "nul ne peut se faire justice soi-même" en droit français, Travaux Association H. Capitant, t. XVIII, p. 41 s.

* 484 P. Delebecque, Régime de la réparation - Modalités de la réparation - Règles particulières à la responsabilité contractuelle - Clause pénale, J.Cl. civ., 25 Janvier 2005, Fasc. 22.

* 485 L'article 264 alinéa 2 dispose : « Les parties contractantes peuvent convenir des dommages-intérêts dus au titre du préjudice que subirait le créancier en raison de l'inexécution totale ou partielle de l'obligation initiale ou en raison du retard apporté à son exécution ». Pour plus de détails sur la clause pénale en droit marocain, v. :

ÄÇÏ ãÚáÇá ,ÇáÔÑØ ÇáÌÒÇÆí í ÇáÞÇäæä ÇáãÛÑÈí ,ØÑæÍÉ áäíá ÇáÏßÊæÑÇå ÓäÉ ,1993.

* 486 Il s'agit du Dahir n° 1-95-157 du 11 août 1995 -13 rabii I 1416, B.O 6 septembre 1995

* 487 C. Sup. com. 17 mai 2006,n° 489, RJCS, n° 65 : æÈÎÕæÕ ãÇ ËíÑ ãä ÎÑÞ ÇáÞÑÉ ÇáËÇáËÉ ãä ÇáÕá 264 ãä Þ á Ú Åäå ÈÇáÑÌæÚ ÅáíåÇ íÊÌáì ÈäåÇ ÊÚØí ááãÍßãÉ ÅãßÇäíÉ ÊÚÏíá ÇáÔÑØ ÇáÌÒÇÆí í ÅØÇÑ ÓáØÊåÇ ÇáÊÞÏíÑíÉ æáíÓ ÈåÇ ãÇ íæÌÈ áÇ íÊã Ðáß ÅáÇ ÈØáÈ ãä ØÑ ÇáãÊÖÑÑ ããÇ íÌÚá ÇáÞÑÇÑ ÛíÑ ÎÇÑÞ áí ãÞÊÖì æãÚááÇ ÈãÇ íå ÇáßÇíÉ æãÑÊßÒÇ Úáì ÓÇÓ æÇáæÓíáÉ Úáì ÛíÑ ÓÇÓ . 

* 488 Pour plus de détails sur cette question, v. not. : N. Toujgani, « Le couplage du droit et l'économie dans la mise en oeuvre des règles de la concurrence », RMDE, n°1, octobre 2007, p. 7.

* 489 Pour l'application du droit de la concurrence, une appréciation purement économique, ou sociale et politique, du caractère anticoncurrentiel s'impose au préalable, de la part du juge et du régulateur. Cette appréciation dépasse de loin les compétences économiques et les capacités fonctionnelles des tribunaux.

* 490 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p. 213.

* 491 Les instances de régulation prennent ainsi une importance sans précédent. Elles assument la surveillance de tous les opérateurs y compris ceux du secteur public. Elles se chargent de contrôler les conditions d'accès au marché et d'exercice des activités économiques dans le but de protéger l'ensemble des professionnels et des consommateurs. M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p . 212.

* 492 Ibid, p. 213 ; Dans ce sens l'article 5 de la loi 06-99 stipule « A la demande des organisations professionnelles représentant un secteur d'activité ou sur l'initiative de l'administration, les prix des produits et services dont le prix peut être réglementé conformément aux articles 3 et 4 peuvent faire l'objet d'une homologation par l'administration après concertation avec lesdites organisations.

Le prix du bien, produit ou service concerné peut alors être fixé librement dans les limites prévues par l'accord intervenu entre l'administration et les organisations intéressées.

Si l'administration constate une violation de l'accord conclu, elle fixe le prix du bien, produit ou service concerné dans les conditions fixées par voie réglementaire.

* 493 La police administrative en matière économique appartient au premier ministre et aux autorités déléguées à l'effet de réglementer les prix des produits et services et d'en contrôler leur respect à tous les niveaux de l'activité économique en vertu de la loi de 12 Octobre 1971. Le contrôle de la qualité et des prix revenait aux Mouhtassibs et Oumanas traditionnels dont le Dahir de 21 juin 1982 renouvelle la création et modernise l'organisation. Les pachas et Caids avaient aussi compétence pour réglementer les prix de certaines denrées en application des dispositions de l'article 44 du dahir de 30 septembre 1976, relatif aux collectivités locales.

* 494 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., P. 216.

* 495 Ibid,

* 496 E. Cohen, « De la réglementation étatique et administrative à la régulation », op. cit., p. 2.

* 497 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., P. 211 ; Par ailleurs, après la consécration par la loi 06-99 du principe de la liberté des prix, les articles 3,4 et 5 de la même loi consacrent des prérogatives très importantes au premier ministre. En effet, l'article 3 donne à l'administration le droit de fixer le prix, par voix règlementaire, dans les secteurs ou les zones géographiques où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de monopole de droit ou de fait, soit de difficultés durables d'approvisionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires498. Dans le même sens, l'article 4 déclare que les dispositions des articles 2 et 3 de la dite loi ne font pas obstacle à ce que des mesures temporaires contre des hausses ou des baisses excessives de prix, motivées par des circonstances exceptionnelles, une calamité publique ou une situation manifestement anormale du marché dans un secteur déterminé, peuvent être prises par l'administration, après consultation du Conseil de la concurrence. La durée d'application de ces mesures ne peut excéder six mois prorogeable une seule fois.

* 499 « ... La réglementation relève du privilège souverain de l'État ; la régulation, c'est, dans un champ donné, un considérable pouvoir d'investigation, d'interprétation et d'appréciation dévolu à des personnes indépendantes du pouvoir politique et du milieu sur lequel elles exercent leur contrôle ». E. Cohen, « De la réglementation étatique et administrative à la régulation », op. cit., P : 3

* 500 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p . 213.

* 501 ibid, p. 216.

* 502 « Dans l'Union Européen, les régulateurs doivent respecter le principe énoncé à l'article 6, § 1er, de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 et par l'Article 14, § 1er du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, signé à New York le 19 décembre 1966 ; L'article 6, § 1er, de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales énonce : «  Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ... ». Dans ce sens, le Conseil d'Etat grand-ducal en Belgique a rappelé, dans son avis rendu 16 mars 2004 sur le projet de loi relative à la concurrence, le principe de la conformité des lois nationales à l'article 6 susmentionné. Au regard de la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme de Strasbourg et des juridictions nationales notamment en France, la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales et notamment son article 6 s'applique aussi à la procédure de sanction des organes administratifs de régulation ; Le Conseil de la concurrence qui est en Belgique, la juridiction administrative compétente pour statuer sur les contentieux en matière de concurrence économique, répond indubitablement aux critères définis par la Cour européenne des Droits de l'Homme pour être qualifiée de juridiction indépendante. Les notions d'indépendance et d'impartialité objective sont étroitement liées et sont indispensables dans le chef de l'organe décisionnel de l'autorité de concurrence ». Patrick DE WOLF, « L'importance de l'indépendance s'une autorité de le concurrence », format PDF, disponible sur : http://www.eco.public.lu/salle_de_presse/conferences_presse/2004/03/29_Conference_relative_a_la_concurrence/de_Wolf.pdf , visité le 15/10/2008.

* 503 Il n'existe aucune disposition de la loi 06-99 imposant la présence de magistrat de carrière parmi les membres du conseil de la concurrence. Ainsi, l'article 18 de ladite loi stipule : « Le Conseil de la concurrence est composé outre le président de douze (12) membres dont :

- six (6) membres représentant l'administration

- trois (3) membres choisis en raison de leur compétence en matière juridique, économique, de concurrence ou de consommation ;

- trois (3) membres exerçant ou ayant exercé leurs activités dans les secteurs de production, de distribution ou de services.

* 504 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p . 216.

* 505 L'article 14 de la loi 06-99, dispose : « Il est créé un Conseil de la concurrence aux attributions consultatives aux fins d'avis, de conseils ou de recommandations. »

* 506 Dans le secteur de la télécommunication, le régulateur sectoriel, l'A.N.R.T., la loi n°55-01, en vigueur depuis le 4 novembre 2004 a renforcé ses compétences en matière du respect des règles de la concurrence dans le secteur des télécommunications. Cette nouvelle loi a chargé l'ANRT de veiller au respect de la concurrence loyale dans le secteur des télécommunications et de trancher les litiges y afférents, notamment ceux relatifs aux pratiques anticoncurrentielles ainsi que le contrôle des concentrations. Le décret d'application de la loi 55-01 a précisé les règles applicables à la procédure suivie devant l'ANRT en matière de la concurrence. Ledit Décret a confirmé la plupart des principes procéduraux susmentionnés et confirme, ainsi, le caractère juridictionnel de ces nouvelles missions de l'ANRT.

* 507 A noter dans ce sens qu'en France, l'enquête judiciaire est ordonnée par le premier président du tribunal de grande instance alors qu'au Maroc c'est le procureur du Roi auprès du tribunal de première instance qui est compétent à cet effet. Cette situation démontre le maintien du rôle de l'Administration dans l'application du droit de la concurrence au Maroc.

* 508 En France, le délai le plus court se trouve à l'article 21 de la directive du 26 février 2001 sur la tarification de l'infrastructure ferroviaire qui prévoit un délai de dix jours ouvrables pour le règlement des litiges relatifs à la répartition des capacités de l'infrastructure ferroviaire. Les régulateurs sectoriels tels que l'Agence de la Régulation des Télécommunication et la Commission de la régulation de l'Electricité qui rendent des décisions exécutoires dans des délais de trois à six mois.

* 509 Ces pouvoirs ainsi attribués à un régulateur sont toujours strictement limités par des textes législatifs, et à chaque fois qu'un texte ne lui reconnu pas expressément le pouvoir d'intervenir dans le champ de l'action juridictionnelle, seul le juge peut sanctionner le comportement dénoncé ou régler le litige en cause.

* 510 N. Toujgani, Guide pratique du droit de la concurrence, OUMAIMA, 2006, p. 105.

* 511 Les juridictions civiles sont seules compétentes pour statuer sur le montant des dommages et intérêts invoqué par les victimes de pratiques anticoncurrentielles. ibid..

* 512 Ainsi, dans la lutte contre les abus de puissance économique, le juge conserve toujours son pouvoir classique de sanction. En effet, le loi sur la liberté des prix et la concurrence prévoit un nombre très important de sanctions pénales : l'emprisonnement de personnes physiques, l'amende, la confiscation, la fermeture temporaires des établissements, l'interdiction temporaire d'exercer une profession ou une activité déterminée ou de toutes activités commerciales avec l'interdiction d'être employé à quelque titre que se soit dans l'établissement exploité même vendu ou donner en location gérance ou à bail et la publication des jugements. Ces peines peuvent être augmentées par d'autres sanctions prévues par le code pénal, notamment ces articles 40 et 87. Ces peines couvrent toute la matière, pourvu qu'il respecte le principe de la légalité des incriminations et des peines.

* 513 « D'autre part, le juge est compétent en vertu de son pouvoir judiciaire naturel de trancher les litiges se rapportant à un acte ou un fait en relation avec la concurrence. L'article 5 de la loi sur les tribunaux de commerce donne compétence au juge commercial de trancher les litiges qui naissent entre commerçant dans l'exercice de leurs commerces y compris évidemment ceux de la concurrence, c'est-à-dire les différents entre commerçants dans la conquête de la clientèle. Quand au juge civil, il conserve sa compétence pour trancher les litiges entre un commerçant et un non commerçant ou en matière agricole, pêche et professions libérales et dont le code de commerce ne les a pas incluent dans les actes de commerce par nature ». M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p . 215.

* 514 Aux termes de cet article : « Tout engagement ou convention se rapportant à une pratique prohibée en application des articles 6 et 7 ci-dessus est nul de plein droit.

Cette nullité peut être invoquée par les parties et par les tiers ; elle ne peut être opposée aux tiers par les parties ; elle est éventuellement constatée par les tribunaux compétents à qui l'avis du Conseil de la concurrence, s'il en est intervenu un, doit être communiqué ».

* 515 Ledit article dispose : « L'obligation nulle de plein droit ne peut produire aucun effet, sauf la répétition de ce qui a été payé indûment en exécution de cette obligation.

L'obligation est nulle de plein droit :

1° Lorsqu'elle manque d'une des conditions substantielles de sa formation ;

Lorsque la loi en édicte la nullité dans un cas déterminé ».

* 516 L'article 6 de la loi 06-99 stipule : Sont prohibées, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes ou coalitions expresses ou tacites, sous quelque forme et pour quelque cause que ce soit, notamment lorsqu'elles tendent à :

1 -limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises ;

2 - faire obstacle à la formation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ;

3 - limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique ;

4 - répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.

* 517 Est prohibée, lorsqu'elle a pour objet ou peut avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises :

1 - d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci ;

2 - d'une situation de dépendance économique dans laquelle se trouve un client ou un fournisseur ne disposant d'aucune autre alternative.

L'abus peut notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées. Il peut consister également à imposer directement ou indirectement un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale.

L'abus peut consister aussi en offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation, dès lors que ces offres ou pratiques ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'éliminer un marché, ou d'empêcher d'accéder à un marché, une entreprise ou l'un de ses produits.

* 518 J.-J. Israel, « La complémentarité face à la diversité des juges et des régulateurs », LPA, 23 janvier 2003, n° 17, P. 24.

* 519 J.-J. Israel, « La complémentarité face à la diversité des juges et des régulateurs », loc. cit.

* 520 « A cet effet, des formations en matière économique sont devenues indispensables car ces deux disciplines doivent pour ainsi dire se chevaucher. C'est difficile mais c'est loin d'être impossible. Les deux disciplines sont beaucoup moins inaccessibles l'une à l'autre qu'on ne le pense ». C. Bellamy, « le juge contrôleur du régulateur », 23 janvier 2003 n° 17, P. 38.

* 521 « En Angleterre, avec la création des tribunaux spécialisée en droit de la concurrence, les responsables ont organisé des cours relativement intensifs de formation adaptés à la préparation des membres desdits tribunaux à l'instar « l'Appeal Tribunal ». Ces cours couvrent les principes de base pertinents de l'économie. Par cette approche, les autorités tentent de consolider le mariage entre les principes du droit, d'une part, et les principes de l'économie, d'autre part. Au fond, il s'agit d'un effort pour convaincre les entreprises, les consommateurs et tous les autres intéressés de la crédibilité de ce système. Car, du point de vue des entreprises, la chose la plus importante est la crédibilité du système : It must be fair, it should be quick, it should not cost too much. Et il est presque impossible pour le juge de satisfaire simultanément toutes ces exigences ». C. Bellamy, « le juge contrôleur du régulateur », op. cit.

* 522 « Il existe un dialogue assez exceptionnel dans le domaine de la régulation entre les autorités de régulation et leurs juges et entre ces juges eux-mêmes. Dans notre propos, c'est le dialogue régulateur juge qui nous intéresse. Ce dialogue a une particularité, qui est d'avoir pour objet central la confrontation entre l'économie et le droit : la souplesse de l'économie, qui ne se laisse pas enfermer dans des règles de droit, rend difficile la conciliation entre les deux. Telle est bien la spécificité du droit économique, dont le droit de la régulation est devenu une branche à part entière ». J.-J. Israel, « La complémentarité face à la diversité des juges et des régulateurs », loc. cit.

* 523 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p .214 ; « L'agencement préventif de l'action administrative et de la fonction judiciaire signifie que le législateur s'efforce de retarder au maximum la solution juridictionnelle dont les séquelles psychologiques et matérielles sur l'activité économique risquent de perturber cette dernière de manière inopportune et d'hypothéquer pour l'avenir les relations pour tous les intervenants ». Ibid, p. 215.

* 524 Même en France, il a fallu une disposition législative expresse pour que le Conseil de la concurrence dispose du pouvoir de prononcer des injonctions (article 13 de l'ordonnance du 1er décembre 1986). Dans le même sens, au Maroc, la loi n° 51-00 à confié à l'Agence nationale de la Réglementation des Télécommunication, toutes les compétences du Conseil de la concurrence dans le secteur de la télécommunication.

* 525 Ainsi, dans son rapport sur les autorités administratives indépendantes, en France, le Conseil d'État souligne que « Le président du C.S.A. peut demander au Conseil d'État de statuer en référé par voie d'ordonnance pour prononcer des injonctions, des mesures conservatoires ou des astreintes nécessitées par l'urgence. De même, le président de la C.O.B. peut demander au président du Tribunal de grande instance de Paris de statuer en la forme de référé en cas de pratique de nature à porter atteinte aux droits des épargnants en vue de la mise en oeuvre d'une procédure de maintien des cours et du respect de la procédure des offres publiques d'achat ».

* 526 Le pouvoir de saisine des juges relève généralement du seul président de l'autorité de régulation lorsque l'organe de régulation est une autorité collégiale ; Dans le même sens et conformément aux dispositions de l'article 70 de la loi 06-99, le premier ministre exerçant son pouvoir de régulation peut saisir le procureur du Roi près du tribunal de première instance compétent, aux fins de poursuites sens, en cas de non respect des mesures conservatoires ordonnées par le premier ministre et en cas de non respect des engagements prises en matière de concentration économique.

* 527 L'article 67 de la loi 06-99 dispose « Sera punie d'un emprisonnement de deux (2) mois à un (1) an et d'une amende de 10.000 à 500.000 dirhams ou de l'une de ces deux peines seulement toute personne physique qui, frauduleusement ou en connaissance de cause, aura pris une part personnelle dans la conception, l'organisation, la mise en oeuvre ou le contrôle de pratiques visées aux articles 6 et 7 ci-dessus ».

* 528 N. Toujgani, Guide pratique du droit de la concurrence, op. cit., p. 105 et s..

* 529 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p. 213.

* 530 Ainsi, en France, cette faculté est donnée au juge de solliciter de lui-même l'avis du régulateur. Cette coopération est d'autant facilitée que les dispositions introduites dans les lois de régulation économique prévoient ce type de saisine pour avis. Ainsi, par exemple, l'article L. 462-3 du Code français de commerce prévoit que le juge de droit commun peut consulter le Conseil de la concurrence sur certaines pratiques anticoncurrentielles. Le Conseil d'État a par exemple lui-même sollicité le Conseil de la concurrence pour la première fois par une décision de section du 26 mars 1999.

* 531 « L'expression"amicus curiae", désigne la personnalité que la juridiction civile peut entendre sans formalités dans le but de rechercher des éléments propres à faciliter son information. Par exemple pour connaître les termes d'un usage local ou d'une règle professionnelle non écrite. L' " amicus curiae " n'est, ni un témoin, ni un expert et il n'est pas soumis aux règles sur la récusation ». Y. Laurin, « La consultation par la Cour de cassation de "personnes qualifiées" et la notion d'"amicus curiae" », JCP éd. G, n° 38, 19 septembre 2001, p. 1709.

* 532 Ainsi, par exemple, le Tribunal de commerce de Paris a pris l'habitude, dans les affaires de télécommunications, de saisir l'A.R.T. en qualité d'amicus curiae, à chaque fois que l'avis du régulateur sectoriel lui apparaît utile pour trancher un litige en matière de télécommunications.

* 533 P.-A. Fenet, « Discussion du Conseil d'État sur la rescision de la vente pour cause de lésion », Recueil complet des travaux préparatoires du code civil, 1829, t. 14, j. 38. Cité par J. -L. Sourioux, Droit, Rép. civ. juillet 2004, n° 3.

* 534 P.-A. Fenet, « Discours préliminaire sur le Projet de l'an VIII, P.-A. FENET, 1827, t. 1, p. 476. Cité par J. -L. Sourioux, Droit, Rép. civ. juillet 2004, n° 3.

* 535 « La loi, chez tous les peuples, est une déclaration solennelle du pouvoir législatif sur un objet de régime intérieur et d'intérêt commun. Elle ordonne, elle permet, elle défend, elle assure des récompenses et des peines. Elle ne statue point sur des faits individuels ; elle est présumée disposer, non sur des cas rares ou singuliers, mais sur ce qui se passe dans le cours ordinaire des choses. Elle se rapporte aux personnes ou aux biens, et aux biens pour l'utilité commune des personnes... Le premier effet de la loi est de terminer tous les raisonnements et de fixer toutes les incertitudes sur les points qu'elle règle », loc. cit.

* 536 M. -A Frison-Roche, « Contrat, concurrence, régulation », RTD civ, 2004, p. 451.

* 537 Il importe [...] de distinguer, non sans nuances, ce qui est sanction du droit objectif, c'est-à-dire de la règle du droit, et ce qui est sanction des droits subjectifs, c'est-à-dire des prérogatives individuelles. F. Terré, Introduction générale au droit, op. cit., p.. 549 ; Le droit pénal devient alors un moyen public de pilotage des comportements des agents économique. Ce qui est une forme nouvelle de dirigisme économique. M. A. Frison Roche et S. Bonfils, Les grandes questions du droit économique, op. cit., p. 39.

* 538 ibid, p. 38

* 539 ibid, p. 37

* 540 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani,Le droit du marché, op.cit., p. 212.

* 541 V. Supra, n° 123 et s.

* 542 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit., p. 123.

* 543 Dans ce cadre, l'article 47 dispose que tout vendeur de produit ou tout prestataire de services doit par voie de marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre procédé approprié, informer le consommateur sur les prix et les conditions particulières de la vente ou de la réalisation de la prestation. Le deuxième alinéa du même article précisé que, les modalités d'information du consommateur sont fixées par voie règlementaire.

A cet effet, dans son chapitre IV, intitulé, de l'information et de la protection du consommateur, le décret n° 2-00-854 4 octobre 2001 relatif à l'application de la loi expose les conditions de régularités de cette obligation. Ainsi, il dispose dans son article 8 que les prix doivent être exprimés en monnaie nationale, toutes taxes comprises. Ensuite, le décret apporte plus de précisions, dans les articles suivants, notamment, sur les modalités d'affichage, de visible ainsi que de lisibilité des prix.

* 544 Il peut paraître surprenant que des règles relatives à la facturation qui intervient après l'opération de vente ou de prestation de services exercent une influence sur la transparence qui s'apprécie avant l'opération au stade de l'offre. Mais, pour les professeurs L. de Leyssac et G. Parleani, l'opacité de la facturation entraînerait la disparition de l'effectivité de la règle de transparence. C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit., p. 284 ; « Ce raisonnement justifie l'exigence de règles de facturation entre les professionnels et les consommateurs comme entre professionnels. De plus, certaines dispositions relatives à la délivrance des factures entre professionnels sont applicables aux factures destinées aux consommateurs ». M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p. 273.

* 545 Ainsi, l'article 48 de la loi impose à tout vendeur de produits ou prestataire de services de délivrer une facture, un ticket de caisse ou tout autre document en tenant lieu à tout consommateur qui en fait la demande ; A noter que le même article, précise dans son deuxième alinéa que, dans certains secteurs dont la liste est fixée par voie réglementaire, la délivrance d'une facture pourra être rendue obligatoire ; L'article 71 de la loi punit la méconnaissance de cette prescription par une amende de 1200 à 5000 DHS. A noter que le même article punit le non respect de l'obligation de communication du barème des prix et des conditions de vente entre professionnels par une amende de 5000 à 100000 DHS.

* 546 « Le droit de la facture est devenu peu à peu un droit extrêmement complexe, inspiré par des préoccupations nombreuses et très diverses : fiscales, comptables, sociales, pénales, économiques, commerciales, etc. » C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit., p. 283.

* 547 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p. 273.

* 548 La violation de ces prescriptions à l'égard du consommateur est punie, conformément à l'article 71, d'une amende de 1200 à 500 alors que celles à l'égard du professionnel est punis conformément au même article d'une amende de 5.000 à100.000 dirhams.

* 549 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit., p. 345.

* 550 Pour plus de détails sur les manifestations de ces pratiques voir : supra. n° 85 et s.

* 551 Ce délit est puni selon l'article 68 d'un emprisonnement de deux (2) mois à deux (2) ans et d'une amende de 10.000 à 500.000 dirhams ou de l'une de ces deux peines seulement.

* 552 Dans ce cas la sanction est portée à un emprisonnement d'un (1) à trois (3) ans et le maximum de l'amende est de 800.000 dirhams ; A noter que selon le dernier alinéa du même article, l'emprisonnement peut être porté à cinq (5) ans et l'amende à 1.000.000 dirhams si la spéculation porte sur des denrées ou marchandises ne rentrant pas dans l'exercice habituel de la profession du contrevenant. A côté de ces sanctions principales, l'article 69 dispose que, le coupable peut être frappé, indépendamment de l'application de l'article 87 du code pénal, de l'interdiction d'un ou de plusieurs des droits mentionnés à l'article 40 du même code.

* 553 Ainsi, l'article 72 de la loi punit le stockage clandestin, d'une amende de 100.000 à 500.000 dirhams et d'un emprisonnement de 2 mois à 2 ans. Le même article ajoute que la confiscation des marchandises objets de l'infraction et celle des moyens de transport peut également être prononcée.

* 554 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p. 273.

* 555 Aux termes de cet article, Il est interdit de vendre ou d'offrir à la vente des produits ou des biens, d'assurer ou d'offrir une prestation de service aux consommateurs donnant droit à titre gratuit, immédiatement ou à terme, à une prime consistant en produits, biens ou services. Le recours par les professionnels à ces deux pratiques est sanctionné pénalement d'une amende de 1.200 à 5.000 Dirhams, à l'instar des autres pratiques restrictives à l'égard du consommateur.

* 556 Le même article autorise les primes identiques aux produits objet de la vente ou de la prestation. Il exclue aussi, les menus objets ou services de faible valeur et échantillons en conférant au indiquant que leur valeur est déterminée par voie réglementaire.

Il ajoute qu'ils ne sont pas considérés comme primes :

- le conditionnement habituel du produit, les biens, produits ou prestations de services qui sont indispensables à l'utilisation normale du produit, du bien ou du service faisant l'objet de la vente ;

- les prestations de service après-vente et les facilités de stationnement offertes par les commerçants à leurs clients ;

- les prestations de services attribuées gratuitement si ces prestations ne font pas ordinairement l'objet d'un contrat à titre onéreux et sont dépourvues de valeur marchande.

* 557 M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p. 273.

* 558 Cette situation est accentuée par les vagues successives de concentration qui ont donné naissance à des entreprises considérables souvent dominantes sur un ou plusieurs marchés. Certes, les dominations susceptibles de donner prise au droit de la concurrence se sont aussi multipliées. La récente vague d'ouverture à la concurrence a projeté dans le secteur concurrentiel des anciens monopoles dites « historiques » qui détenaient auparavant sur leur marché des monopoles de droit.

* 559 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit., p. 878 ; L'auteur ajoute « Il est sans doute éclairant de constater les choses dans le long terme, si ce n'est dans une perspective historique. Force est alors de constater que ce sont les modifications de la structure des marchés qui expliquent les évolutions des droits français et communautaire ».

* 560 Aux termes de cet article : Est prohibée, lorsqu'elle a pour objet ou peut avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises :
1 - d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci ;
2 - d'une situation de dépendance économique dans laquelle se trouve un client ou un fournisseur ne disposant d'aucune autre alternative.

L'abus peut notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées. Il peut consister également à imposer directement ou indirectement un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale.

L'abus peut consister aussi en offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation, dès lors que ces offres ou pratiques ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'éliminer un marché, ou d'empêcher d'accéder à un marché, une entreprise ou l'un de ses produits.

* 561 On oppose souvent, pourtant, les abus de comportement aux abus de structure. Les premiers sont directement observables sur le marché, tandis que les seconds n'affectent qu'indirectement le marché, en ne modifiant que sa structure concurrentielle. On vise souvent par abus de structure les opérations voisines de concentrations, qui diminuent le nombre d'opérations, ou le nombre de pôles de décisions. Pour plus de détail v. not. M. -A. Hermitte, J.Cl. Eur., Fasc. 1422.

* 562 Cela distingue l'abus de puissance économique que nous développons dans cette étude de la faute civile ou de l'abus de droit. Cependant, la conception de l'abus de domination fait écho dans une mesure certaine à la théorie de Jousserand, fondée sur la distinction entre droit objectif et droit subjectif, et sur la fonction sociale des droits. Le droit de la concurrence pose toujours, en arrière plan, l'idée que si l'entreprise dominante a le droit d'être concurrente sur le marché, ce droit est soumis à une finalité qui lui est inhérente, qui suppose justement de ne pas éliminer la concurrence par des procédés anormaux. Cf C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit., p. 893.

* 563 « La loi réduit l'information des consommateurs à la publicité des prix. Il est regrettable qu'il ne vise pas d'autres éléments dont la connaissance protège ou au moins avertit le consommateur notamment sur le composition du produit et les modes de son utilisation ». M. D. A. Machichi, Droit commercial fondamental au Maroc, op. cit., p, 272

* 564 L'article 62 du Dahir des Obligations et des Contrats dispose que : « L'obligation sans cause ou fondée sur une cause illicite est non avenue.

La cause est illicite quand elle est contraire aux bonnes moeurs, à l'ordre public ou à la loi ». Dans le même sens l'article 6 du Code Civil français avec plus d'explicité dispose : « On ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs ».

* 565 Dans ce sens, v. F. Dreifuss-Netter, « Droit de la concurrence et droit des obligations », op. cit.

* 566 On peut ainsi se reporter à la conception d'Hayek, telle que notamment retracée par B. Oppetit, « La liberté contractuelle à l'épreuve du droit de la concurrence », RSMP, Gauthiers-Villars, 1995, p. 241-254. Cité par Marie-Anne Frison-Roche, « Contrat, concurrence, régulation », op. cit..

* 567 L'alinéa 2 de l'article 7 de la loi 06-99 dispose : « L'abus peut notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées. Il peut consister également à imposer directement ou indirectement un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale » ; En matière de franchise où les tribunaux français tolèrent le prix « conseillé » au revendeur. Elément essentiel de l'image de marque du produit, le prix conseillé est censé être le meilleur en fonction du marché et le revendeur a tout intérêt à s'y conformer en bonne politique commerciale. Dans ces conditions, il faudrait être particulièrement maladroit pour tomber sous le coup de la sanction du droit de la concurrence.

* 568 V. Supra, n° 92 et s.

* 569 L'alinéa 3 de l'article 7 dispose que : L'abus peut consister aussi en offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation, dès lors que ces offres ou pratiques ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'éliminer un marché, ou d'empêcher d'accéder à un marché, une entreprise ou l'un de ses produits.

* 570 Elle aussi assortie d'une amende, relève d'une répression de l'abus déjà sanctionné au titre de la concurrence déloyale voir dans ce sens G. Cas et R. Bout, « Concurrence, distribution, consommation », Lamy droit économique, 1990, n° 1475 et s.

* 571 Aux termes de cet article : « Tout engagement ou convention se rapportant à une pratique prohibée en application des articles 6 et 7 ci-dessus est nul de plein droit.

Cette nullité peut être invoquée par les parties et par les tiers ; elle ne peut être opposée aux tiers par les parties ; elle est éventuellement constatée par les tribunaux compétents à qui l'avis du Conseil de la concurrence, s'il en est intervenu un, doit être communiqué ».

* 572 En France, le problème ne se pose guère, car il semble que jusqu'ici la contradiction ait été évitée par un ajustement spontané des institutions en cause. M. A. Frison Roche, « Contrat, concurrence, régulation », op. cit.

* 573 Il s'agit de l'Arrêt 573 du 02/06/2004 de la chambre commerciale de la Cour Suprême par lequel la Cour confirme l'objet anticoncurrentiel d'une clause générale imposée par l'ordre des architectes et ce sur la base des articles 2, 6 et 9 de la loi 06-99. Arrêt non publié.

* 574 F. Dreifuss-Netter l'avait posé comme acquis il y a dix huit ans 18 ans. « Le droit de la concurrence se définit en premier lieu par sa finalité économique et en second lieu par sa fonction qui est de promouvoir un ordre public de direction », p. 369 ». v. F. Dreifuss-Netter, « Droit de la concurrence et droit des obligations », op cit.

* 575 Au Maroc et jusqu'aujourd'hui, la sanction de l'état de dépendance économique est subordonnée à l'atteinte à la concurrence.

* 576 Très subtilement, Claude Lucas de Leyssac et Gilbert Parléani affirment que l'expression d'ordre public de direction n'est utilisable que par renvoi à des contraintes de dirigisme économique, la conception libérale du droit économique devenant désormais, parce qu'il laisse par principe jouer le marché et qu'il protège ce libre jeu, un ordre public de protection du marché. Lucas de Leyssac et G. Parléani, L'atteinte à la concurrence, cause de nullité du contrat, in Le contrat au début du XXIe siècle, Mélanges J. Ghestin, LGDJ, 2001, p. 602. cité par M. A. Frison-Roche, « Contrat, concurrence, régulation », op. cit. ; On peut tout de même en rester à l'idée classique selon laquelle la protection d'une catégorie de personne évoque l'ordre public de protection et la protection d'une organisation structurelle évoque l'ordre public de direction. Les auteurs soulignent d'ailleurs que cette protection ne portant pas sur les concurrents, le droit de la concurrence engendre donc une nature originale d'ordre public.

* 577 Com. 18 févr. et 26 mai 1992, Rec. D. 1992. 47, note Ch. Hannoun. Sur l'idée même, v. par ex. F. Dreifuss-Netter, Droit de la concurrence et droit des obligations, op. cit.

* 578 Sur cette dimension, v. Cl. Lucas de Leyssac et G. Parléani, « L'atteinte à la concurrence, cause de nullité du contrat », op. cit.. p. 613 et s. Les auteurs critiquent d'ailleurs la jurisprudence, qui ne dégage pas fermement les critères utilisés pour n'annuler que la clause ou annuler le contrat dans son ensemble.

* 579 B. Fages et J. Mestre, « L'emprise du droit de la concurrence sur le contrat », Droit du marché et droit commun des obligations, R.T.D.com. 1998.1-10, p. 71-81 ; Les exemples cités, dont l'affaire dite « des cuves » est le plus fameux. Com. 18 févr. 1992, Rec. D. 1993.57, note Ch. Hannoun.

* 580 Cette survivance des autres clauses contractuelles a rarement pour fondement le fait que la clause anticoncurrentielle à laquelle la nullité se limite n'aurait pas été décisive de la volonté des parties, car le plus souvent elle l'est.

* 581 Ainsi, lorsque la concentration entre Schneider et Legrand a été mise en péril, des clauses contenant des obligations à ce propos ont conservé toute leur puissance. Versailles, 29 nov. 2002, Schneider Electric, R.G. n° 02/07705.

* 582 Marie-Anne Frison-Roche, « Contrat, concurrence, régulation », op. cit.

* 583 ibid.

* 584 ibid.

* 585 J.-M. Mousseron, Techniques contractuelles, Francis Lefebvre, 1988, n° 5. Cité par F. Dreifuss-Netter, « Droit de la concurrence et droit des obligations », op. cit.. p. 372

* 586 J. Flour et J.-L. Aubert, Droit civil, Les obligations, 6e éd. par Aubert, 1986, vol. 1, Armand Colin, n° 262.

* 587 À certains égards, le droit de la consommation emprunte ici des techniques utilisées en droit du travail pour protéger cette autre partie faible qu'est le salarié.

* 588 C'est le cas, par exemple en France, de contrats portant sur des immeubles ou leur jouissance : ainsi le contrat de construction de maison individuelle ; le respect de ces prescriptions est assuré par des sanctions pénales. De même en est-il du louage d'habitation. C'est enfin le cas des opérations de crédit, immobilier ou à la consommation (C. consom., art. L. 311-1 et s.) ; v. dans ce sens l'article 69 du projet de loi 31-08 sur les mesures de protection du consommateur. v. not. Au Maroc, les cahiers de charges des opérateurs Télécom et audiovisuelles.

* 589 C'est le cas notamment des offres préalables du crédit. v. `article 73 du même projet de loi.

* 590 V. Supra, n° 152 et s.

* 591 V. sur ce point, J.-P. Pizzio, « La protection du consommateur par le droit commun des obligations », R.T.D.com. 1998, p. 53. v. aussi, J. Calais-Auloy, « L'influence du droit de la consommation sur le droit civil des contrats », op. cit.

* 592 Il s'agit du décret n° 78-464, 24 mars 1978, codifié aux articles R. 132-1 et R. 132-2 du Code de la consommation.

* 593 V. notamment, Cass. 1re civ., 28 avr. 1987, JCP G 1987, II, 20893, note G. Paisant ; R.T.D.civ. 1987, p. 537, note J. Mestre.

* 594 Cass. 1re civ., 14 mai 1991 ; JCP G 1991, II, 21763, note G. Paisant ; Rec. D. 1991, jurispr. p. 449, note J. Ghestin ; F. Terré, Y. Lequette, Grands arrêts de la jurisprudence civile : Dalloz, 11e éd. 2000, t. 2, n° 158.

* 595 L'article 15 du projet de loi n° 31-08 sur les mesures pour la protection des consommateurs stipule

íÚÊÈÑ ÔÑØÇ ÊÚÓíÇ í ÇáÚÞæÏ ÇáãÈÑãÉ Èíä ÇáãæÑÏíä æÇáãÓÊåáßíä ßá ÔÑØ íßæä ÇáÛÑÖ ãäå æ íÊÑÊÈ Úáíå Úáì ÍÓÇÈ ÇáãÓÊåáß ÚÏã ÊæÇÒä ãåã Èíä ÍÞæÞ ææÇÌÈÇÊ ØÑí ÇáÚÞÏ.

Ainsi, l'article utilise les termes « producteurs » et « consommateur » ce qui laisse planer sur l'éventuelle protection du non professionnel.

* 596 F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, op. cit., n° 306-1)

* 597 Cass. 1re civ., 15 avr. 1986, R.T.D.civ., 1987, p. 86, obs. J. Mestre ; Defrénois 1986, art. 33745, p. 787, obs. J.-L. Aubert,

* 598 Cass. 1re civ., 28 avr. 1987, op. cit.

* 599 Sur le critère du rapport direct voir : supra n° 70 et s.

* 600 v. CA Orléans, 4 mai 2000 : Juris-Data n° 2000-125344 ; Toutefois, ces règles ont pu être utilisées pour protéger certains usagers des services publics. En tout état de cause, la Cour de justice a clairement exclu l'application des règles en question aux personnes morales, CJCE, 22 nov. 2001, op. cit. ; La question de la compatibilité du maintien de la solution de la Cour de cassation avec celle de la CJCE mérite d'être posée. Il faut souligner que la directive de 1993 est une directive a minima (Dir. n° 93/13/CE, art. 8, qui réserve toutefois l'éventuelle incompatibilité de la législation nationale avec le Traité de Rome, et l'on peut à cet égard songer aux principes de liberté de circulation des marchandises et surtout des services, dont l'application est susceptible de remettre en cause une telle législation). Or, s'agissant de la directive sur le démarchage à domicile, la Cour de Luxembourg avait admis que le caractère a minima de ce texte permettait à un État d'appliquer cette législation à un commerçant, personne physique, CJCE, 14 mars 1991, Rec. CJCE, 1991, I, p. 1206.

* 601 Cet article est venu dans les mêmes termes que L'article L. 132-1, alinéa 4 du Code français de la consommation.

* 602 H. Claret, Contrats et obligations, Protection du consommateur, J-Cl civil, Fasc. 10, Septembre, 2002, n° 108 et s.

* 603 En ce sens : J. Calais-Auloy, F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 182

* 604 Cass. 1re civ., 6 janv. 1994, JCP G 1994, II, 22237, note G. Paisant ; R.T.D.civ. 1994, p. 601, obs. J. Mestre.

* 605 V. s'agissant d'un contrat d'assurance, Cass. 1re civ., 16 janv. 2001 : RGDA 2001, p. 293, note J. Kullmann

* 606 L'article 16 du projet de loi (article L. 132-1, al. 5 du code français de la consommation)

* 607 En ce sens, J. Calais-Auloy, F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 188).

* 608 Article L. 132-1, al. 7 du code français de la consommation

* 609 Cf. G. Paisant, « Les clauses abusives et la présentation des contrats dans la loi n° 95-96 du 1er février 1995 », Rec. D. 1995, chron. p. 99.

* 610 V. en ce sens, M. Bruschi, « L'amélioration de la protection contractuelle du consommateur », Rev. Lamy dr. aff. 2002, n° 2830, p. 6.

* 611 Il convient toutefois d'observer que la Cour de cassation tenait déjà compte de la rédaction ambiguë des clauses du contrat dans l'appréciation de leur caractère abusif. Voir à propos d'une clause limitative de responsabilité, Cass. 1re civ., 19 juin 2001, Bull. civ. I, n° 181.

* 612 V. Infra, n° 279 et s.

* 613 À noter que certains juges ordonnent parfois la publication du jugement ayant déclaré la clause abusive, ce qui est un moyen de faire connaître la décision mais aussi sans doute, un moyen de dissuasion par la contre-publicité qu'il constitue pour le professionnel. Pour une illustration, TGI Grenoble, 7 déc. 2000.

* 614 V. Infra, n° 284 et s.

* 615 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit., p. 80.

* 616 Supra n° 152 et s.

* 617 La problématique est voisine de celle que l'on connaît en droit du travail où l'on part aussi du constat que d'une inégalité entre l'employeur et le salarié, avec l'espoir que les syndicats pourront rétablir l'équilibre.

* 618 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations,op. cit., n° 196)

* 619 Selon l'analyse traditionnelle, il y'a lieu de présumer qu'un contrat conclu entre des individus libres et responsables est conforme à la justice. C'est ce postulat reste aujourd'hui encore très largement reçu, beaucoup s'accordent néanmoins à critiquer les moyens choisis par le législateur pour s'assurer que le consentement des parties réunit bien les qualités requises.

* 620 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations, op. cit., n° 248.

* 621 En effet, ce sont des mesures curatives qui interviennent par hypothèse a posteriori et supposent la saisine d'un juge. Or c'est le consommateur, qui estime que son consentement a été vicié, qui va devoir saisir la juridiction et prouver l'existence d'un vice du consentement, ce qui s'avère difficile. De plus, les conditions d'admission de ces vices sont très strictes, de sorte qu'il n'est pas certain qu'il obtiendra gain de cause en définitive. Cet aléa, joint à la durée et au coût de la procédure pour un contrat portant le plus souvent sur de faibles sommes, va la plupart du temps dissuader le consommateur d'agir.

* 622 Sur le principe de l'égalité contractuelle voir : Supra n° 137 et s.

* 623 A propos du déséquilibre de puissance économique dû à la qualité des partenaires économiques, notamment professionnel et consommateur voir. Supra n° 70 et s.

* 624 Sur la découverte de cette obligation par le juge français voir : Supra n° 162 et s.

* 625 « L'obligation générale d'information, telle qu'elle ressort de la jurisprudence civile, n'est pas d'un grand secours pour la masse des consommateurs. Le défaut d'information n'est sanctionné que par la nullité du contrat ou l'octroi de dommages et intérêts, sanctions qui supposent que le consommateur agisse individuellement en justice. Il faut un préjudice important, et dès lors exceptionnel, pour qu'un consommateur songe à le faire. L'obligation générale d'information n'est pas utilisable, en pratique, dans les affaires de consommation courante, qui sont de beaucoup les plus nombreuses. Qui intenterait une action pour n'avoir pas été informé sur la composition d'un aliment ou sur le mode d'emploi d'un appareil ?

* 626 A l'article L. 111-1 du Code de la consommation et dans les dispositions, au contenu assez hétéroclite, qui le suivent. Il faut y ajouter comme procédant du même souci d'informer le consommateur potentiel, l'obligation prévue par l'article L. 134-1 du Code de la consommation pour les professionnels de remettre à toute personne intéressée qui les demande un exemplaire "des conventions qu'ils proposent habituellement".

* 627 Article L. 111-1 du Code de la consommation. - Ce texte, issu de la loi n° 92-60 du 18 janvier 1992, prévoit que "Tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service". Il s'agit en fait d'une pure et simple consécration dans les relations de consommation de l'obligation générale d'information, admise par la jurisprudence civile.

* 628 Cette distinction nette en théorie, s'avère malgré tout souvent délicate à faire en pratique. Les deux types d'obligations tendent à se confondre. La relation contractuelle sera en effet la plupart du temps enfermée dans une alternative : soit le défaut d'information conduit le contractant à ne pas contracter ; soit, s'il contracte, l'absence d'information rejaillira sur l'exécution du contrat. Cf. F. Collart-Dutilleul, Ph. Delebecque, Contrats civils et commerciaux : Dalloz, Précis, 5e éd. 2001, n° 214 ; Dans le premier cas, le contrat n'existe pas ; dans le second, il y aura manquement à une obligation contractuelle. La jurisprudence n'est pas très claire mais le fait qu'elle se fonde aujourd'hui très largement sur l'article 1135 du Code civil paraît signifier qu'elle rattache cette obligation au contrat. V. par exemple, Cass. 1re civ., 7 juin 1989, Rec. D. 1991, somm. p. 184, obs. J. Penneau. Quant à la doctrine, elle s'accorde en général à reconnaître le caractère passablement artificiel et parfois inopportun de la distinction. Cf. F. Collart-Dutilleul, Ph. Delebecque, Contrats civils et commerciaux, op. cit., n° 214. - Ph. Le Tourneau, « De l'allégement de l'obligation de renseignements ou de conseil », Rec. D. 1987, chron. p. 101.

* 629 V. par exemple, CA Paris, 4 oct. 1996, Contrats, conc., consom. 1997, comm. n° 34, obs. G. Raymond.

* 630 L'obligation d'information peut aller plus loin et consister en une obligation pour le professionnel de signaler plus particulièrement à son client certains aspects. Elle peut également prendre la tournure d'une obligation de mise en garde, voire de conseil.. Le contrat est alors valable en la forme mais le professionnel condamné à des dommages-intérêts pour manquement à son devoir de conseil, sur le fondement de sa responsabilité contractuelle. Or la sanction de ces obligations se fait sur le terrain du droit commun et non sur celui de l'article L. 111-1 du Code de la consommation ou des textes spéciaux du même code. V. à propos d'un prêt, Cass. 1re civ., 27 juin 1995, JCP éd. E 1996, II, 772, note D. Legeais ; Rec. D. 1995, jurispr. p. 621, note S. Piédelièvre.

* 631 CA Orléans, 15 nov. 1995 : Contrats, conc., consom. 1996, comm. n° 118, obs. G. Raymond.

* 632 Plus précisément, la nullité peut être envisagée pour erreur, si la méconnaissance de l'information a déterminé le consentement du consommateur, voire pour dol, si le professionnel a intentionnellement dissimulé les informations pour entraîner le consommateur à contracter. Cette nullité du contrat pour dol pourrait être éventuellement assortie de dommages-intérêts, si le consommateur a subi un préjudice. Au cas où le consommateur aurait contracté malgré les lacunes de l'information, mais à des conditions différentes, il pourra obtenir non la nullité du contrat mais des dommages-intérêts633.

* 634 CA Paris, 24 sept. 1999, Juris-Data n° 1999-024420.

* 635 Ainsi, l'article 10 du projet de loi à l'instar de L. 111-2 du Code français de la consommation oblige plus particulièrement le vendeur professionnel de biens meubles à indiquer au consommateur la période durant laquelle les pièces indispensables à l'utilisation du bien seront disponibles sur le marché.

* 636 L'article 3 L'article L. 113-3 du Code français de la consommation, article 3 du projet de loi, prévoit plus précisément que le professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit informer le consommateur sur "les prix, les limitations éventuelles de la responsabilité contractuelle et les conditions particulières de la vente" ; Les modalités de mise en oeuvre de cette disposition sont fixées, toujours selon l'article L. 113-3, par arrêté. Ces derniers sont nombreux en ce qui concerne la publicité des prix et concernent la plupart des secteurs d'activité économique. Ces règles sont d'ailleurs susceptibles de s'appliquer aux médecins. CE, 27 avr. 1998, Cornette de Saint-Cyr, préc. ou à la SNCF, s'agissant d'un tarif ayant valeur réglementaire, v. CA Reims, 18 oct. 2001, Rec. D. 2002, p. 1276, obs. C. Rondey. En revanche, il n'existe pas de textes d'application s'agissant des limitations éventuelles de responsabilité, ce qui n'a rien d'étonnant, puisque de telles limitations sont considérées dans la vente comme des clauses abusives. Il est vrai que l'article L. 113-1 vise aussi les prestations de services ; toutefois de telles clauses peuvent être déclarées non écrites par les tribunaux. À tout le moins, l'existence de cette référence malencontreuse est gênante car elle laisse à penser que des clauses limitatives de responsabilité sont admissibles dans des relations de consommation. Cf. J. Calais-Auloy, F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 58. Cette distorsion entre les exigences tenant à l'information et celles qui concernent les clauses abusives est un exemple supplémentaire des incohérences qui émaillent le Code de la consommation, v. sur ce point, F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations ,op. cit., n° 241.

* 637 V. J. Calais-Auloy, F. Steinmetz, Droit de la consommation, op. cit., n° 57 ; F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit, civil, Les obligations,op. cit., n° 253.

* 638 Ce seuil est fixé par le même projet à 10 000 DHS

* 639 A cet égard, l'ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 a apporté des changements substantiels dans le droit de la consommation en France.

* 640 Si le principe admis en droit commun est celui du consensualisme, ce principe est très largement battu en brèche en droit de la consommation, au point que l'on peut se demander ce qu'il en reste. Le législateur a en effet multiplié (de façon désordonnée) les cas où un écrit est exigé, s'agissant tant de l'offre que du contrat lui-même.

* 641 Ce qui correspond à l'existence d'un délai de réflexion notamment le contrat de prêt à la consommation (C. consom., art. L. 311-8, qui précise d'ailleurs assez curieusement que l'offre doit être remise à l'emprunteur en double exemplaire et en un exemplaire aux éventuelles cautions), le contrat de crédit immobilier (C. consom., art. L. 312-7), le démarchage téléphonique (C. consom., art. L. 121-27). S'agissant de la vente à distance (C. consom., art. L. 121-18) cependant, il faut observer que le législateur emploie le terme d'informations et non de mentions, ce qui pourrait signifier que l'offre pourrait être faite oralement (par téléphone notamment) ; cela expliquerait l'exigence d'une confirmation écrite des éléments indiqués, posée par l'article L. 121-19 du Code de la consommation. On peut également citer le contrat portant sur un voyage ou un séjour, pour lequel le législateur a prévu que le "vendeur" doit informer par écrit préalablement à la conclusion du contrat, les intéressés du prix et des prestations proposées, des modalités de paiement, des formalités et des conditions d'annulation du voyage (L. n° 92-645, 13 juill. 1992, art. 15).

* 642 Il en va ainsi en cas de démarchage à domicile (C. consom., art. L. 121-23). S'agissant des contrats conclus à distance, l'article L. 121-19 prévoit que le consommateur doit recevoir "en temps utile et au plus tard au moment de la livraison" confirmation des informations déjà présentes dans l'offre. Une telle exigence est de nature à alourdir considérablement le formalisme du contrat.

* 643 H. Claret, Contrats et obligations, Protection du consommateur, J-Cl civil, Fasc. 10, Septembre, 2002, n° 80 ; Le recours au formalisme informatif est destiné à pallier l'absence, lors de la signature du contrat d'un professionnel du droit, spécialement un notaire, capable de conseiller la partie la plus faible.

* 644 Pour autant, le projet de loi à l'instar du législateur français n'a pas exigé que ce type de contrat fût passé en la forme authentique, lourde et coûteuse, se contentant de prévoir pour y suppléer des exigences de forme, la plupart du temps à peine de nullité. Ces exigences sont de nature différente, selon le type de contrat. Mais ces techniques peuvent être cumulées.

* 645 Cf. C. consom., art. L. 311-10 et L. 311-11, pour le crédit mobilier. - C. consom., art. L. 312-8, pour le crédit immobilier.

* 646 Echéancier des amortissements, évaluation du coût des assurances et sûretés réelles, notamment)

* 647 V.à propos d'un prêt, Cass. 1re civ., 27 juin 1995, Juris-Data n° 1995-001732.

* 648 Cass. 1re civ., 17 juill. 2001, préc., Rec. D. 2002, p. 74, note D. Mazeaud.

* 649 . Certes l'exigence de mentions manuscrites, en droit français, a toujours existé, depuis le "bon pour", jusqu'à l'arrêté en lettres et en chiffres prévu pour les engagements unilatéraux de sommes d'argent (C. civ., art. 1326). Mais à tout le moins, un engagement dépourvu de cette mention n'est pas privé de toute valeur juridique puisqu'il vaut comme commencement de preuve par écrit.

* 650 L'article 139 du projet de loi dispose :

íÌÈ Úáì ÇáÔÎÕ ÇáØÈíÚí ÇáÐí íáÊÒã í ÚÞÏ ÚÑí ÈÕÊå ÂíáÇ í ÇáÚãáíÇÊ ÇáÊí äØÇÞ ÇáÕáíä Çáæá æ ÇáËÇäí ãä åÐÇ ÇáÈÇÈ ä íÖãä í åÐÇ ÇáÚÞÏ ÞÈá ÊæÞíÚå ÊÍÊ ØÇÆáÉ ÈØáÇä ÇáÊÒÇãå ÇáÈíÇä ÇáÎØí ÇáÊÇáí Ïæä ÛíÑå :

" Åääí ÅÐ Êæáì ÂÇáÉ ÇáÓíÏ áÇä í ÍÏæÏ ãÈáÛ ................ ÇáÐí íÔãá ÏÇÁ ÇáãÈáÛ ÇáÕáí "æÇáæÇÆÏ æÚäÏ ÇáÇÞÊÖÇÁ ÇáÛÑÇãÇÊ æ ÇáæÇÆÏ Úä ÇáÊÎíÑ æáãÏÉ ............. áÊÒã Èä ÓÏÏ "ááãÞÑÖ ÇáãÈÇáÛ ÇáãÓÊÍÞÉ ãä ãÏÇÎíáí æãæÇáí ÅÐÇ áã íÞã ÇáÓíÏ áÇä ÈÐáß ÔÎÕíÇ".

* 651 L'article 140 du projet de loi

* 652 V. par exemple, CA Lyon, 21 juin 1995, JCP G 1997, I, 3991, n° 6, obs. Ph. Simler et Ph. Delebecque.

* 653 Cass. 1re civ., 31 mai 1988, Rec. D. 1988, somm. p. 405, obs. J.-L. Aubert.

* 654 Cass. 1re civ., 19 mai 1992, Contrats, conc., consom. 1992, comm. n° 189, obs. G. Raymond.

* 655 Cass. 1re civ., 20 juill. 1994, Bull. civ. I, n° 262.

* 656 V. pour un exemple d'application particulièrement rigoureuse, Cass. 1re civ., 17 juill. 2001, préc, Rec. D. 2002, p. 74, note D. Mazeaud.

* 657 C'est le cas en matière de la vente à distance. Ainsi, l'article 30 du projet de loi susvisé stipule dans les termes suivants :

ÇÓÊËäÇÁ ãä ÍßÇã ÇáÕáíä 259 æ 260 ãä ÇáÙåíÑ ÇáÔÑí ÇáÕÇÏÑ í 9 ÑãÖÇä 1331 12 ÛÓØÓ 1913 ÈãËÇÈÉ ÞÇäæä ÇáÇáÊÒÇãÇÊ æÇáÚÞæÏ ááãÓÊåáß Ìá ÓÈÚÉ íÇã ßÇãáÉ áããÇÑÓÉ ÍÞå í ÇáÊÑÇÌÚ Ïæä ÇáÍÇÌÉ Åáì ÊÈÑíÑ Ðáß æ ÏÚ ÛÑÇãÉ ÈÇÓÊËäÇÁ ãÕÇÑí ÇáÅÑÌÇÚ Åä ÇÞÊÖì ÇáÍÇá Ðáß. íÓÑí ÇáÌá ÇáãÔÇÑ Åáíå í ÇáÞÑÉ ÇáÓÇÈÞÉ ÇÈÊÏÇÁ ãä ÊÇÑíÎ ÊÓáã ÇáÓáÚÉ æ ÞÈæá ÇáÚÑÖ íãÇ íÊÚáÞ ÈÊÞÏíã ÇáÎÏãÇÊ.

En matière de démarchage à domicile :

ÇÓÊËäÇÁ ãä ÍßÇã ÇáÕá 604 ãä ÇáÙåíÑ ÇáÔÑí ÇáÕÇÏÑ í 9 ÑãÖÇä 1331 12 ÛÓØÓ 1913 ) ÈãËÇÈÉ ÞÇäæä ÇáÇáÊÒÇãÇÊ æÇáÚÞæÏ íÌæÒ ááãÓÊåáß ÇáÊÑÇÌÚ ÏÇÎá Ìá ÞÕÇå ÓÈÚÉ ) íÇã ÇÈÊÏÇÁ ãä ÊÇÑíÎ ÇáØáÈíÉ æ ÇáÇáÊÒÇã ÈÇáÔÑÇÁ Úä ØÑíÞ ÅÑÓÇá ÇáÇÓÊãÇÑÉ ÇáÞÇÈáÉ ááÇÞÊØÇÚ ãä ÇáÚÞÏ ÈæÇÓØÉ ÑÓÇáÉ ãÖãæäÉ ãÚ ÅÔÚÇÑ ÈÇáÊæÕá.

En matière de crédit à la consommation, l'article 80 du projet.

* 658 Dans le projet de loi ce délai est prévu à l'article 119 pour les crédits à taux variable. En droit français, le délai est de dix jours dans le contrat de jouissance d'immeuble à temps partagé ou time sharing (C. consom., art. L. 121-64).

* 659 Il est de quinze jours, lorsque le démarchage à domicile porte sur un plan d'épargne en valeurs mobilières.

* 660 Il est enfin de trente jours en ce qui concerne le crédit immobilier (C. consom., art. L. 312-10) et l'assurance sur la vie (C. ass., art. L. 132-5-1 et L. 132-5-2). Dans ce dernier cas, il faut souligner que le point de départ du délai est non la signature du contrat mais le premier versement opéré par le souscripteur.

* 661 C'est le délai prévu, par exemple, en matière de démarchage à domicile (L'article 44 du projet de loi, L. 121-25 du code français de la consommation, la vente à distance de biens ou de prestations de services, article 30 du projet de loi, art. L. 121-20 du code français de la consommation..

* 662 Ainsi dans le cas du contrat de fourniture de services lorsque l'exécution a commencé avec l'accord du consommateur avant l'expiration du délai de sept jours ; ici l'anéantissement du contrat n'est plus possible. En même temps cette possibilité de commencer à exécuter le contrat avant son expiration permet au professionnel de remettre en cause ce délai. Cf. F. Le Doujet-Thomas, « L'ordonnance du 23 août 2001 portant transposition de la directive du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance : une erreur de perspective ? », Contrats, conc., consom. 2002, chron. 10, p. 8. De même le délai n'existe pas en cas de fourniture de biens ou de services dont le prix fluctue en fonction du marché, de fourniture de biens fabriqués selon les spécifications du consommateur, nettement personnalisés ou insusceptibles par leur nature d'être réexpédiés, susceptibles de se détériorer ou de se périmer.

* 663 Ainsi, le délai n'existe pas non plus s'agissant de la fourniture de journaux, périodiques ou magazines, de services de paris ou loteries autorisés (C. consom., art. L. 121-20-2) ; là encore, le professionnel ne serait pas en mesure de les revendre. Enfin, la possibilité pour le consommateur de retourner le bien est également exclue s'agissant des enregistrements audio ou vidéo ou de logiciels informatiques lorsqu'ils ont été descellés par lui. La restriction s'explique essentiellement par la préservation des droits de propriété intellectuelle, en raison des possibilités de "piratage".

* 664 Pour des auteurs Toutefois, cette justification n'est pas toujours entièrement convaincante. Ainsi, la distorsion entre le délai accordé pour l'achat d'un immeuble neuf et le crédit immobilier n'apparaît pas d'une cohérence totale. De plus, l'achat d'un immeuble n'est en général pas un acte impulsif. De même, dans le cas d'une prestation de services dont l'exécution du contrat n'a pas commencé, il est difficile de justifier l'existence d'un délai de rétractation par la déception du consommateur. V. en ce sens, J. Rochfeld, « Le contrat ? ... Si je veux ! », R.T.D.civ. 2001, p. 969.

* 665 Le contrat ne peut être en effet conclu qu'à la suite d'une offre préalable qui doit être maintenue par le prêteur pendant quinze jours au minimum. À partir du moment où il y a eu acceptation de l'offre par l'emprunteur, un délai de rétractation de sept jours est prévu.

* 666 Cf. P. Brun, « Le droit de revenir sur son engagement », Dr. et patrimoine 5/1998, n° 60, p. 78.

* 667 A ce dernier égard, l'admission d'une telle faculté de rétractation dans le cas de contrat portant sur des prestations de services et alors même que l'exécution du contrat n'a pas commencé, contribue peut-être à en changer la signification puisque ce droit n'apparaît plus justifié ni par les pressions du professionnel, ni par la déception du consommateur. V. l'analyse de J. Rochfeld, « Le contrat ? ... Si je veux ! », op. cit.

* 668 Plusieurs théories s'opposent. Pour une partie de la doctrine française, inspirée de la théorie allemande de la Punktation, ce droit de rétractation touche à la formation du contrat : il correspondrait à une formation successive du contrat, ce dernier ne devenant parfait qu'à l'expiration du délai de rétractation669. D'autres auteurs considèrent en revanche que le contrat est définitivement formé dès l'échange des consentements et que l'existence du délai suspend seulement l'exécution des obligations, spécialement celles du consommateur. Cette interprétation paraît au demeurant avoir été consacrée par la jurisprudence. D'autres auteurs encore y voient l'exercice d'une faculté légale de dédit, admise traditionnellement uniquement en matière de vente ; (V. pour une synthèse, V. Christianos, « Délai de réflexion : théorie juridique et efficacité de la protection des consommateurs », Rec. D. 1997, chron. p. 28.

* 670 L'article 80 dispose :

ÅÐÇ áã íäÕ ÇáãÞÑÖ í ÇáÚÑÖ ÇáãÓÈÞ Úáì äå íÍÊÙ áäÓå ÈÅãßÇäíÉ ÞÈæá ØáÈ ÇáÞÑÖ ÇáãÞÏã ãä ÇáãÞÊÑÖ ÕÈÍ ÇáÚÞÏ ÊÇãÇ æÑ ÞÈæá åÐÇ ÇáÎíÑ ááÚÑÖ ÇáãÓÈÞ.

* 671 L'article 82 stipule :

áÇ íãßä ãÇ áã ÊÊã ÚãáíÉ ÇáÞÑÖ ÈÕæÑÉ äåÇÆíÉ ä íÄÏì í ãÈáÛ Èí Ôßá ãä ÇáÔßÇá...

* 672 C'est le cas en matière de vente à distance

* 673 Voir par exemple en matière du crédit à la consommation, article 80 du projet de loi (article L. 311-15 du code français de la consommation)

* 674 V. Supra n° 152 et s.

* 675 Y. Picot, H. Davo, Droit de la consommation, Dalloz, 2005, n° 25 ; « L'union fait la force. Pour cette raison, les salariés se sont unis dans des syndicats dont le rôle est de contrebalancer la puissance des employeurs. De même les consommateurs afin d'exercer une action collective dont le poids pourrait correspondre à celui de l'action des entreprises sur le marché. Dans les deux cas, le droit a favorisé le mouvement, car il a été estimé, à juste titre qu'un tel rééquilibrage du rapport de forces ne pouvait qu'améliorer les relations du travail ou de consommation. L'action des consommateurs considérée comme une collectivité, est donc d'abords celle qu'exercent les associations de consommateurs, qui relaient en l'amplifiant, an l'a transcendant même, l'action que pourrait exercer chaque consommateur ». C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit.p. 431.

* 676 « Avant le XIX siècle, le mouvement consumériste ne fait évidemment l'objet d'aucune structure, d'aucune organisation. Cependant, dès la fin du XVII siècle la colère commence à s'exprimer contre le coût des denrées alimentaires. Pour ne citer qu'un exemple, on retiendra la révolte des ménagères contre le prix prohibitif du pain en octobre 1789 ». Bihl et Willette, une histoire du mouvement consommateur, 1984, Aubier-Montagne ; « Le milieu du XIX siècle voit l'apparition du mouvement coopératif. Les coopératives de consommation sont des groupements constitués entre consommateurs ; les coopératives vendent à leurs membres les produits qu'elles achètent sans chercher à réaliser un profit », Cf. Lauras et Perraud-chamantier, Les sociétés coopératives de consommation, 1947, LGDJ, cité par Y. Picot, droit de la consommation, op cit, n° 41, p. 26.

* 677 Pour plus de détail sur la question, v. : A. Bendraoui, « Les associations des consommateurs au Maroc : un nouveau segment de la société civile », REMADED, n° 49-2004, numéro spéc. du colloque : Les prix et la concurrence entre la liberté de l'entreprise et la protection du consommateur, p. 325 ; voir aussi, sur l'ensemble de la question, du même auteur, LA protection du consommateur au Maroc, Publication de la REMALD, collection « Manuels et travaux universitaires », n° 36, 2002, p. 189 et s.

* 678 Dahir n° 1-58-376 du 3 joumada 1 1378 (15 novembre 1958) relatif au droit d'association, B.O. du 27-11-1958, p. 1909. La loi de 1958. modifié en 1973 puis en 2002.

* 679 L'article 18 de la loi 06-99 dispose que le Conseil de la concurrence est composé outre le président de douze (12) membres dont : six (6) membres représentant l'administration ; trois (3) membres choisis en raison de leur compétence en matière juridique, économique, de concurrence ou de consommation ; trois (3) membres exerçant ou ayant exercé leurs activités dans les secteurs de production, de distribution ou de services.

* 680 L'article 15 de la même loi dispose que Le Conseil de la concurrence est consulté par : 1 - les commissions permanentes du Parlement, pour les propositions de lois relatives à la concurrence ; 2 - le gouvernement, pour toute question concernant la concurrence ; 3 -dans la limite des intérêts dont ils ont la charge, les conseils de régions, les communautés urbaines, les chambres de commerce, d'industrie et de services, les chambres d'agriculture, les chambres d'artisanat, les chambres de pêches maritimes, les organisations syndicales et professionnelles ou les associations de consommateurs reconnues d'utilité publique, sur toute question de principe concernant la concurrence ; 4 - les juridictions compétentes sur les pratiques anticoncurrentielles définies aux articles 6 et 7 ci-dessus et relevées dans les affaires dont elles sont saisies.

* 681 Aux termes de l'article 99 de la loi 06-99 : « Les associations de consommateurs reconnues d'utilité publique peuvent se constituer partie civile ou obtenir réparation sur la base d'une action civile indépendante du préjudice subi par les consommateurs » ; A noter dans ce sens que la jurisprudence française on a déduit à juste titre que les associations de protection de consommateurs pouvaient sur le foncement de ce texte intervenir dans des affaires concernant des infractions aux règles de la concurrence. Cette attitude du juge français conduit à constater que le droit de la consommation concerne une fonction économique, pas une catégorie de personnes. Pour plus de détail v. J. Clais-Auloy et Steinmetz, Droit de la consommation, op cit, n° 7, p. 7, in fine.

* 682 C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit., p. 251.

* 683 L'ANFOR, association française de normalisation. Le Groupe AFNOR est un des premiers fournisseurs de prestations en matière de normes internationales et de projets de secteur comprenant les prestations suivantes : certification formation, normalisation et information.

En France des contrats types ont été élaborés de cette façon par exemple en ce qui concerne la vente de véhicules automobiles d'occasion, accord signé le 20 septembre 1976 (et modifié par la suite) entre l'Institut national de la consommation (INC) et la Chambre syndicale nationale du commerce et de la réparation automobile (CSNCRA), aujourd'hui Conseil national des professions de l'automobile (CNPA).

* 684 Sur ces accords collectifs, V. J.-Cl. Concurrence V° Consommation, Fasc. 840.

* 685 À noter que certains juges français ordonnent parfois la publication du jugement ayant déclaré la clause abusive, ce qui est un moyen de faire connaître la décision mais aussi sans doute, un moyen de dissuasion par la contre-publicité qu'il constitue pour le professionnel (pour une illustration, TGI Grenoble, 7 déc. 2000, op. cit.

* 686 Il faut toutefois préciser que, en raison du principe de l'effet relatif de la chose jugée, l'effet collectif de cette sanction ne frappe que le professionnel condamné, mais ne saurait s'étendre à tous les professionnels exerçant une activité identique et utilisant des conditions générales contractuelles incluant des clauses similaires à celles dont la suppression a été ordonnée.

* 687 La Cour de cassation française a de surcroît admis qu'en dépit du silence des textes, les associations de consommateurs peuvent agir par voie d'intervention, en se joignant à l'action d'un consommateur particulier. Cass. 1re civ. 6 janv. 1994, JCP 1994. II. 22237, note. G. Raymond, Rec. D. 1994, somm. 209, P. Delebecque.

* 688 Cass. 1re civ. 13 mars 1996, rejet du pourvoi formé contre CA Grenoble, 6 oct. 1993, JCP 1994. II. 22237, note G. Paisant.

* 689 Et ce conformément à l'article 158 dudit projet qui dispose :

"íãßä áÌãÚíÇÊ ÇáãÓÊåáßíä æÇáÌÇãÚÉ ÇáãÔÇÑ ÅáíåÇ í ÇáãÇÏÉ 151 ÚáÇå ãØÇáÈÉ ÇáãÍßãÉ ÇáãÏäíÉ Èä ÊãÑ ÚäÏ ÇáÇÞÊÖÇÁ ÊÍÊ ØÇÆáÉ ÇáÛÑÇãÉ ÇáÊåÏíÏíÉ ÈÍÐ ÔÑØ ÛíÑ ãÔÑæÚ æ ÊÚÓí í Âá ÚÞÏ æ äãæÐÌ ÚÞÏ ãÞÊÑÍ æ ãæÌå Åáì ÇáãÓÊåáß"

Le texte français utilisait l'expression « type de contrat » alors que son homologue marocain parlait de « modèles de convention » à l'instar de l'ancienne mouture du texte français, expression qu'il faut considérer comme synonyme à celle aujourd'hui en vigueur, même si celle de « contrat type » aurait mieux convenu.

.

* 690 Sur cette action, J. Clais-Auloy, « Les actions en justice des associations de consommateurs », Rec. D. 1988, chron. 193 ; G. Paisant, « Les nouveaux aspects de la lutte contre les clauses abusives », Rec. D. 1988, chron. 253 ; G. Viney, « Un pas vers l'assainissement des pratiques contractuelles », JCP 1988. I. 3355 ; G. Chabot, « L'action des associations agréées de consommateurs en suppression des clauses abusives », LPA, 10 oct. 2000, no 202, p. 16 et s. ; Cette action est aujourd'hui régie par l'article L. 421-6 du code de la consommation, récemment modifié par l'ordonnance du 23 août 2001 transposant la directive communautaire du Parlement et du Conseil no 98/27 du 19 mai 1998, relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs. Le nouveau texte élargit le domaine de l'article L. 421-6 à tous les agissements illicites au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l'article 1er de la directive du 19 mai 1998.

* 691 J.-P. Pizzio, Code de la consommation, 2e éd., 1996, p. 411

* 692 A noter que l'article 158 du projet de loi marocain est venu dans les mêmes termes que la nouvelle rédaction de l'article L. 421-6 du code français de la consommation

* 693 J.-Pascal Chazal, « Clauses abusives », Rép. Com. Dalloz, septembre 2002, n° 103.

* 694 Le texte marocain utilise le terme ÍÐ au lieu de ÈÇØáÉ æßäåÇ áã Êßä

* 695 J.-Pascal Chazal, «Clauses abusives», Rép. Com. Dalloz, septembre 2002, n° 103.

* 696 Et ce conformément à l'article L. 421-9 du code français de la consommation, article 161 du projet de loi susmentionné qui dispose :

" íãßä ááãÍßãÉ ÇáÊí Êã ÑÚ ÇáÏÚæì ÅáíåÇ ä ÊãÑ Úä ØÑíÞ ßá ÇáæÓÇÆá ÇáãáÇÆãÉ áÅÚáÇã ÇáÚãæã ÈäÔÑ ÇáÍßã ÇáÕÇÏÑ. æÚäÏãÇ ÊãÑ ÈäÔÑ ÇáÍßã ÊØÈíÞÇ áåÐå ÇáÞÑÉ íÌÈ ä íÊã Ðáß ØÈÞÇ ááÔÑæØ æÊÍÊ ØÇÆáÉ ÇáÚÞæÈÇÊ ÇáãäÕæÕ ÚáíåÇ í ÇáÞÇäæä ÇáÌäÇÆí".

* 697 Cass. 1re civ. 5 oct. 1999, Rec. D. 2000. 110, note G. Paisant, RJDA 11/1999, p. 943, concl. J. Sainte-Rose.

* 698 Pour plus de détail sur la question v. : M.-A. Frison-Roche, « Le pouvoir processuel des associations et la perspective de la « class action » », LPA, 24 avril 1996, p. 28 ; S. Cabrillac, « Pour l'introduction de La class action en droit français », LPA, 18 août 2006 n° 165, P. 4 ; O. Dufour, « Le débat sur les class actions ne fait que commencer ! », LPA, 22 décembre 2005 n° 254, P. 4 ; D. Mainguy, « L'introduction en droit français des class action », LPA, 22 décembre 2005 n° 254, P. 6 ; A. Otin, et J. Simon, « Faut-il ou non une class action à la française ? », LPA, 10 juin 2005 n° 115, P. 7 ; J. Calais-Auloy, « La class action et ses alternatives en droit français », LPA, 10 juin 2005 n° 115, P. 29 ; v. not., Y. Picod, « Le charme discret de la class action », Rec. D., 2005, Chroniques p. 657 ; D. Fasquelle, « La réparation des dommages causés par les pratiques anticoncurrentielles », R.T.D. com., 1998, p. 763.

* 699 Par exemple consommer tel produit être actionnaire de telle société, etc....

* 700 Sous une forme différente, elles ont déjà commencé en France avec les actions mettant en cause l'industrie du tabac, A. Bugada, « Nul n'est censé ignorer les méfaits du tabac », Rec. D., 2004, Chroniques p. 653 ; I. Desbarats, « Le droit à réparation des victimes directes du tabagisme », Rec. D., 1998, Chroniques p. 167.

* 701 Ce type d'action, tel qu'il est conçu et adopté dans la plupart des pays de Common Law ne présente pas de difficultés, et ce dans la mesure où leurs systèmes juridiques sont bâtis sur un droit jurisprudentiel. Dans les systèmes juridiques basés sue le droit codifié, l'introduction de cette action peut perturber considérablement les principes les plus fondamentaux des procédures judiciaires à l'instar de ce que nous avions mentionné.

* 702 Dahir n° 1-58-376 du 3 joumada 1 1378 (15 novembre 1958) relatif au droit d'association, B.O. du 27-11-1958, p. 1909. La loi de 1958. Cette loi s'inspirait de la loi française de 1901, prévoyait, dans sa version originelle, des modalités pour la constitution des associations et pour leur suspension et interdiction. La loi distinguait entre les associations de personnes et les associations ayant la personnalité juridique. Les associations de personnes pouvaient se constituer librement sans autorisation et sans déclaration préalable. Toutefois, les associations qui souhaitaient se doter de la personnalité juridique devaient faire une déclaration préalable pour ester en justice et acquérir certains avantages.

* 703 Dahir n° 1-73-283 du 6 rabia 1 1393 (10 avril 1973), B. O. du 11 avril 1973, p. 533.

* 704 A. Bendourou, « Les libertés publiques entre constitution et législation », disponible sur : http://www.pcb.ub.es/idp/docs/marroc/doc_bendourou_libertes.pdf, 20/11/2008

* 705 Dahir n° 1-02-206 du 12 joumada 1 1423 (23 juillet 2002) portant promulgation de la loi n° 75-00 adoptée par le parlement. B. O. n° 5048 du 17 octobre 2002, p. 1062.

* 706 Et ce, suite aux revendications de l'opposition et de différentes associations non gouvernementales.

* 707 Voir : J. Robert, J. Duffar, Droits de l'homme et libertés publiques, Montchrestien, Précis Domat, 1994.

* 708 A. Bendourou, « Les libertés publiques entre constitution et législation », op. cit.

* 709 Et ce sur la base de l'article 147 du projet de loi relatif aux mesures pour la protection des consommateurs aux termes duquel :

" íãßä áÌãÚíÇÊ ÇáãÓÊåáßíä ÇáãÄÓÓÉ æÇáÚÇãáÉ æÞÇ ááÊÔÑíÚ æÇáÊäÙíã ÇáÌÇÑí Èå ÇáÚãá ÇáãÊÚáÞ ÈÊÓíÓ ÇáÌãÚíÇÊ ä ÊÊæáì ÇáÅÚáÇã æÇáÏÇÚ æÇáäåæÖ ÈãÕÇáÍ ÇáãÓÊåáßíä æÊÚãá Úáì ÇÍÊÑÇã ÍßÇã åÐÇ ÇáÞÇäæä."

* 710 La pratique administrative n'est pas conforme au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Ainsi, si l'on se réfère à l'article 22 de ce dernier, on constate qu'il énonce : « Toute personne a le droit de s'associer librement avec d'autres y compris le droit de constituer des syndicats et d'y adhérer pour la protection de ses intérêts. L'exercice de ce droit ne peut faire l'objet que des seules restrictions imposées conformément à la loi et qui sont nécessaires dans une société démocratique, dans l'intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de l'ordre public ou pour protéger la santé ou la moralité publiques, ou les droits et les libertés d'autrui. Le présent article n'empêche pas de soumettre à des restrictions légales l'exercice de ce droit par les membres des forces armées et de police ».

* 711 « La faiblesse de leurs moyens matériels constitue une explication du phénomène. Mais il connaît aussi une justification : la volonté de donner aux associations de consommateurs des moyens d'action dérogatoires au droit commun justifie que l'on s'assure de leur indépendance et de leurs représentativités. Il serait fâcheux que de fausses associations de consommateurs vinssent troubler le jeu délicat des rapports pouvant s'instaurer sur le marché avec les entreprises. On sait qu'en droit du travail, des préoccupations analogues ont conduit à élaborer la notion d'organisations syndicales la plus représentative ». C. Lucas de Leyssac, G. Parleani, Le droit du marché, op.cit., p. 452.

* 712 Normalement, les associations reconnues d'utilité publique ont une capacité élargie, mais, en contrepartie, elles obéissent à des règles beaucoup plus contraignantes.

* 713 V. Supra n° 291 et s.

* 714 F. Gény, Méthode d'interprétation et sources du droit positif, t.1, LGDJ 1919 coll. Reprint, Paris, 1995, n° 185, p. 225-226.






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