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La représentation des actionnaires dans les sociétés commerciales OHADA

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par Patrice Hubert KAGOU KENNA
Université de DSCHANG-CAMEROUN - DEA 2007
  

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SECTION II : LA PROTECTION INEFFICACE DES PARTIES A LA REPRESENTATION

Très peu de dispositions ont été consacrées à la protection des parties au contrat de représentation.

Si on peut comprendre la démarche du législateur en matière pénale (§1), rien ne justifie son silence en matière civile (§2).

§1 : une protection pénale inachevée

En réalité, ces dispositions pénales visent principalement la protection de l'actionnaire. Toutefois, elles s'appliqueraient aussi au représentant de l'actionnaire qui devrait être apte à exercer toutes les actions visant à sauvegarder les intérêts de son mandant. Il en va ainsi de l'efficacité de la représentation, puisque si celui qui porte atteinte aux droits des actionnaires en empêchant notamment son mandataire de participer aux assemblées n'est pas sanctionné, ce serait comme décourager les actionnaires de recourir à la représentation.

La protection pénale s'articule autours de deux points principaux : la participation à l'assemblée générale (A) et le droit de vote (B).

A : LA REPRESSION DES ATTEINTES A LA PARTICIPATION A LA SOCIETE

L'actionnaire ne participe à la société que par son droit de participer aux assemblées, mais le droit de communication lui permet de se faire une idée sur la marche de la société, quitte à réagir en cas de mauvaise gestion. Mais l'Acte Uniforme ne sanctionne pas pénalement de manière efficace les atteintes au droit de communication de l'actionnaire.

L'AUSCGIE ne consacre qu'un seul article à la sanction de l'entrave à la participation d'un actionnaire aux assemblées. L'art. 892 dispose qu' « encourent une sanction pénale ceux qui sciemment auront empêché un actionnaire ou un associé de participer à une association ». L'entrave à la participation doit s'entendre d'une façon précise. Il peut s'agir de l'entrave à l'accès à une assemblée, tout comme il peut s'agir d'une façon extensive de l'entrave au bon déroulement de l'assemblée. La doctrine146(*) pense que l'art. 892 AUSCGIE serait une incrimination de principe qui permettrait aux législateurs nationaux d'énoncer des différents comportements blâmables et de prévoir des peines en conséquence. Ces comportements iraient de la convocation des assemblées à la participation (droit de participer, droit à l'information, droit de vote)147(*). En ce qui concerne le droit à l'information, il ne peut s'agir que de l'information éventuelle qui précède la tenue d'une assemblée d'actionnaires. L'information permanente qui ne vise pas principalement la participation à une assemblée ne saurait tomber sous le coup de l'article 892 AUSCGIE. Ainsi, si les dirigeants refusent de mettre les documents à la disposition du représentant de l'actionnaire, ce dernier peut tout au plus obtenir du président de la juridiction compétente qu'il ordonne sous astreinte la communication desdits documents148(*). Cette analyse laisse le soin aux législateurs nationaux de créer précisément des infractions qui auraient trait aux assemblées, mais on peut en douter. En effet, la loi sénégalaise n°98/22 du 26 mars 1998 portant sur les sanctions pénales applicables aux infractions contenues dans l'AUSCGIE149(*) et la loi camerounaise n°2003/008 du 10 juillet 2003 portant répression des infractions contenues dans certains actes uniformes OHADA se bornent à fixer la sanction applicable à l'art. 892 sans définir, ni détailler les infractions qui seraient visées.

Peut-on dans le silence de l'AUSCGIE étendre l'application de ces dispositions aux représentants ? Autrement dit, un dirigeant social peut-il encourir une responsabilité pénale du fait d'avoir empêché le représentant d'un actionnaire de participer à l'assemblée ? On peut en douter au regard du principe de légalité des délits et des peines. Mais à notre sens, la représentation réalise l'ubiquité de l'actionnaire, puisque l'acte qu'il pose est sensé être fait non pas en son nom, mais au nom du mandant actionnaire, de sorte que ce dernier répond des droits et obligations crées dans l'exercice de sa mission. Ainsi, entraver la participation du représentant de l'actionnaire équivaut à empêcher la prise en compte de l'action. Et pour cela il est normal que le texte puisse être invoqué par le représentant de l'actionnaire.

Toutefois, la responsabilité ne sera engagée que si l'élément intentionnel du délit est établi. La jurisprudence a retenu qu'est considéré comme ayant commis l'infraction d'entrave à la participation, le président du conseil d'administration qui, à la suite d'un décès, se croyant seul propriétaire des actions en litige, empêche le mandataire des héritiers de prendre part aux délibérations et aux votes de l'assemblée. Dans un tel cas, le prévenu ne peut se prévaloir de son erreur pour s'exonérer150(*).

Il convient toutefois, à notre sens, de reconsidérer le concept de participation aux assemblées pour éviter que la notion ne se dilate à l'extrême, alors que les règles pénales sont d'interprétation stricte. Ainsi, par une certaine interprétation on pourrait y inclure des atteintes à la convocation et à la tenue de l'assemblée151(*). Le droit de vote répond à une autre logique. Lorsque le vote est faussé ou émis sans qualité, on ne saurait qualifier d'entrave à la participation. Il faut donc déduire que le législateur n'a pas sanctionné de manière satisfaisante les atteintes au droit de vote.

B : LA SANCTION INSUFFISANTE DE L'ATTEINTE AU DROIT DE VOTE

Les dispositions pénales en matière de droit de vote visent d'une part les abus des dirigeants sociaux et d'autre part la garantie de la sincérité du vote.

L'art. 543 AUSCGIE pose le principe de la proportionnalité du droit de vote à la quotité du capital qu'il représente, mais ne dit mot sur ce qui est mis en oeuvre pour protéger cette proportionnalité. En effet, il ne suffit pas toujours de prévoir la conduite à suivre, mais il faut également assortir l'inobservation de sanctions rigoureuses. La peine pénale est souvent indiquée pour rétablir les droits violés ou pour empêcher qu'ils ne soient violés. L'attitude du législateur est donc critiquable. Il est fréquent que des dirigeants qui se sentent en minorité manipulent l'attribution du droit de vote en accroissant les voix de ceux qui leur sont favorables et en diminuant les voix des contestataires. Les actionnaires se doivent d'obtenir justice. Cependant, lorsque le droit de vote d'un actionnaire est méconnu, l'article 892 AUSCGIE peut s'appliquer.

L'abdication du législateur s'observe aussi pour ce qui est de la sanction de l'atteinte à la sincérité de vote (1) et même de l'abus des voix (2).

1 : Le silence sur la protection de la sincérité de vote

Sur la question, l'AUSCGIE est muet, pourtant le droit de vote étant le moyen par excellence de la participation de l'actionnaire à la chose sociale, il aurait été judicieux qu'une place particulière lui soit accordée. Avant l'avènement de l'AUSCGIE la loi du 23 janvier 1929 punissait des peines d'escroquerie dans les assemblées de porteurs de parts bénéficiaires ou de fondateurs « ceux qui, en se présentant comme porteurs de parts qui ne les appartiennent pas ont voté dans les assemblées générales, ceux qui se font garantir ou promettre des avantages particuliers pour voter dans l'assemblée dans un certain sens ou pour ne pas participer au vote. La même peine est applicable à celui qui garantit ou promet ces avantages particuliers ».

En laissant la possibilité de maintenir ou de créer d'autres incriminations dans la mesure où elles ne sont pas contraires aux dispositions de l'AU152(*), le législateur a peut-être entendu laisser la définition et la sanction de certaines infractions à l'initiative des Etats. Or sur certaines question, comme la sanction des atteintes au droit de vote, la législation nationale camerounaise est muette, ce qui laisse penser que les atteintes ne seront pas punies, faute de base légale.

Cette disposition à elle-même peut enlever tout intérêt à la représentation de l'actionnaire, puisqu'une personne peut se passer illégitimement comme mandataire d'un actionnaire sans craindre la sanction pénale. C'est dire que l'actionnaire est sacrifié et se trouve sans garanties contre l'imposteur.

D'autre part, si le représentant de l'actionnaire se fait promettre des avantages particuliers pour voter dans un sens déterminé ou pour ne pas participer au vote, son vote est faussé, « même s'il a l'apparence de la sincérité »153(*). Sur la question il n'existe pas non plus de base légale de sanction, ce qui est critiquable.

2 : la problématique de la répression de l'abus de voix

L'abus de voix trouve son fondement dans la pratique française des pouvoirs en blanc. Il s'agit d'empêcher que les procurations, généralement en blanc, adressées aux dirigeants sociaux par les actionnaires pour les représenter dans les assemblées ne servent à transformer en définitive une « démocratie en oligarchie, sinon en dictature »154(*). L'infraction sanctionne l'usage des voix à des fins contraires à l'intérêt social et de mauvaise foi.

Une analyse exégétique des textes peut laisser croire à une possibilité d'admission des pouvoirs en blanc puisque l'acte uniforme ne l'a pas formellement interdit, et il n'a pas non plus fait de l'indication du mandataire une condition de validité de la procuration. On pourrait donc penser que le dirigeant social à qui sont adressés les pouvoirs en blanc est également un mandataire à qui un actionnaire peut choisir d'adresser sa procuration. Tout laisse donc penser que les mandats en blanc sont autorisés. C'est peut être dans cet ordre d'idée que les professeurs ANOUKAHA, POUGOUE ET NGEUBOU regrettent que le législateur n'ait pas consacré l'infraction d'abus de voix155(*).

Il faut cependant noter une contradiction entre les écrits de ces auteurs156(*) et les manoeuvres pratiques157(*) pour faciliter la représentation des actionnaires dans les assemblées générales.

L'omission de la consécration de l'abus de voix se poursuit avec le silence gardé sur la responsabilité civile des parties à la représentation.

* 146 Selon RABANI (A.) Le droit pénal des affaires du Niger : une construction duale entre droit uniforme et législation nationale, OHADATA D-05-30, http://www.ohada.com , le fait qu'il n'y ait qu'un seul article sur la question n'implique pas un tarissement de sa volonté de réprimer les comportements répréhensibles. En effet, le texte d'incrimination est très ouvert.

* 147 POUGOUE (P.-G), ANOUKAHA (A.), NGUEBOU (J.): Op. Cit. n°295, P.135.

* 148 Voir TPI Yaoundé, Ordonnance de référé n°494/0 du 06 février 2001, NDJEUDJUI Thadée c/ Continental business machine où le juge a ordonné sous astreinte la société à communiquer les documents au sieur Ndjeudjui.

* 149 Journal Officiel de la République du Sénégal du 25 avril 1998.

* 150 Crim. 3 octobre 1975, cité par RABANI (A.), Op. Cit., P. 58.

* 151 LARGUIER (J.) : Droit pénal des affaires, 5eme édition Armand COLIN, Paris, 1980. P. 304-305.

* 152 OHADA : Traité et actes uniformes commentés et annotés, 2eme édition, JURISCOPE 2002: Note sous IIIeme partie dispositions pénales.

* 153 LARGUIER (J.) : op cit . P. 307.

* 154 LARGUIER (J.) : Op. Cit. P.295.

* 155 POUGOUE (P.-G.), ANOUKAHA (F.), NGUEBOU TOUKAM (J.), op. Cit, n°286, P.130.

* 156 Note sous art. 538 AU : « les mandats en blanc ne sont pas autorisés »

* 157 La pratique développe des moyens pour combiner les deux systèmes. Ainsi, un actionnaire peut adresser une formule de procuration sans indication du mandataire à un actionnaire qui devra mettre son nom à l'emplacement prévu pour le mandataire.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand