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Le traitement de la loi etrangere en matiere de statut personnel

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par Chimene Chrystelle AKEUBANG YEFFOU
Universite de Yaounde II SOA - Diplome d'Etudes Approfondies en Droit Prive 2005
  

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B. LE SORT DE LA RÈGLE DE CONFLIT

89. La conséquence de l'utilisation de la notion d'équivalence est l'abandon de la règle de conflit, ainsi que la loi qu'elle désigne. Dès lors que l'équivalence des lois en présence (ou l'équivalence des résultats) excuse l'inapplication par le juge de la loi internationalement compétente, il en résulte que le conflit de lois ne procède plus de la seule présence des éléments d'extranéité. Le conflit n'existe que dans la mesure où se trouve établie la différence de teneur entre la lex fori et la lex causae.215(*)

En effet, il ressort de l'arrêt du 11 janvier 2005216(*) que c'est seulement cette différence qui entraîne l'obligation pour le juge d'appliquer la règle de conflit et par conséquent, la loi désignée. Ainsi, l'effacement de la distinction entre droit disponibles et droits indisponibles dans cet arrêt permet-il de souligner que l'application mécanique de la règle de conflit lorsque le droit est indisponible ne s'impose pas toujours.

« Dans une telle conception du conflit de lois, faute d'avoir intérêt à l'application de l'une plutôt que de l'autre loi, le demandeur au pourvoi ne pourra plus faire grief au juge du fond de n'avoir pas recouru au système conflictuel au vu de la simple présence d'un élément d'extranéité ».217(*)

90. L'affirmation du caractère impératif de la règle de conflit a également eu pour effet d'accroître l'office des juges du fond dans la recherche du contenu du droit étranger compétent.

SECTION II : LE RÔLE ACTIF DU JUGE DANS LA RECHERCHE DE LA TENEUR DE LA LOI ÉTRANGÈRE

91. Si l'on admet que le juge a le devoir de relever d'office l'applicabilité de la loi étrangère, il faut aussi admettre qu'il ne peut rester inactif au stade de l'établissement concret de la teneur de la loi désignée. Une grande partie de la doctrine s'est mise d'accord sur la nécessité pour la Cour de cassation, de poser l'obligation -de portée générale- pour le juge de prendre l'initiative de procéder à l'établissement du contenu du droit étranger.

Pour M. MELIN, les motifs de cette solution se trouvent dans les fondements mêmes de l'adage jura novit curia.218(*) En effet, selon cet auteur, les fondements de l'office du juge à l'égard du droit national sont beaucoup plus profonds que l'accessibilité des normes nationales. Ils tiennent plutôt au fait que seule l'intervention du juge permet de favoriser l'égalité des justiciables au cours du procès et de garantir la pleine réalisation du droit.219(*)

Si l'on a admis la valeur de ces arguments dans les litiges purement internes, il n'y a aucune raison de ne pas le faire également dans les litiges internationaux, lorsque les règles à appliquer sont étrangères. Quand les faits du litige sont établis et qu'ils sont qualifiés, on voit mal ce qui pourrait militer, lorsque la norme est étrangère, en faveur d'une restriction des pouvoirs du juge.

L'inégalité des justiciables serait donc un des arguments invoqués contre le système faisant peser sur les parties la charge de la preuve du contenu du droit étranger compétent. En effet, dans un même litige, les parties peuvent être objectivement dans des positions inégales. Toutes les parties ne sont pas aptes à mener des recherches sur le droit étranger applicable et n'ont pas la possibilité de s'adresser aux conseils les plus qualifiés et les plus familiers des mécanismes du droit international privé et des systèmes juridiques étrangers. Toutes n'ont pas non plus les ressources financières permettant de conduire jusqu'à leur terme des recherches relatives à un système juridique étranger.

Ces éléments montrent bien qu'en maintenant l'obligation pour les parties de déterminer elles-mêmes la norme étrangère compétente, on en venait en pratique à dresser des obstacles s'opposant à l'accès au droit et à consacrer de facto l'infériorité de certains plaideurs.220(*)

Le système qui impose aux plaideurs de prouver la loi étrangère a encore été critiqué en ce qu'il « empêche la réalisation du droit ».221(*) En effet, le juge est relativement bien outillé222(*) pour obtenir des informations juridiques de qualité sur le contenu d'un droit étranger. On a pu constater qu'il a à sa disposition des moyens adéquats pour s'informer, que ce soit par la voie de l'expertise ou par le biais des mécanismes conventionnels qui s'offrent à lui. L'intervention du juge serait donc la garantie d'une meilleure qualité d'information, surtout qu'il n'est pas évident que le juge puisse se fier sans réserve aux informations fournies par les parties.223(*) Les parties ne sont certes pas toutes de mauvaise foi, mais on voit mal quel pourrait être l'intérêt de celles-ci à procurer au juge des renseignements qui ne leur seraient pas profitables.

On pourrait peut-être objecter à cet argument qu'en présence d'informations fournies par les parties, le juge dispose toujours d'un pouvoir d'appréciation dont on ne doit pas sous estimer l'importance ; mais on imagine mal comment le juge pourrait faire jouer à plein son pouvoir d'appréciation s'il ne dispose que des éléments provenant des parties.

92. Face à cette importante critique doctrinale, la Cour de cassation a finalement abandonné le système de la jurisprudence Lautour et Thinet, en consacrant l'obligation pour le juge de rechercher le contenu du droit étranger compétent. (Paragraphe I) Précisons qu'il s'agit là d'une nouvelle obligation, étroitement liée à la reconnaissance du caractère impératif de la règle de conflit, ce qui a logiquement entraîné l'évolution du concept de dénaturation de la loi étrangère. (Paragraphe II)

* 215 Loi étrangère.

* 216 Arrêt Berthold, Préc.

* 217 v. MAHINGA (J. G.),  L'équivalence et la règle de conflit, D. 2005.2853.

* 218 Cet adage signifie : la Cour connaît le droit.

* 219 Cf. MELIN (F.), Op. Cit., p. 204, n° 193.

* 220 v. MELIN (F.), Op. Cit., p. 206, n° 195.

* 221 v. MELIN (F.), Op. Cit. ; p. 206.

* 222 En tout cas mieux outillé que la plupart des justiciables dont la source d'information principale est constituée par les certificats de coutume

* 223 Comp. ROGERY (A.), « Du recours en cassation pour non application ou violation de la loi étrangère », Arthur Rousseau éditeur, Paris, 1910, Spéc., p. 114. Cité par MELIN (F.), Op. Cit., p. 211, n° 199.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille