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Le traitement de la loi etrangere en matiere de statut personnel

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par Chimene Chrystelle AKEUBANG YEFFOU
Universite de Yaounde II SOA - Diplome d'Etudes Approfondies en Droit Prive 2005
  

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SECTION II : LES CONSÉQUENCES DE LA DEFAILLANCE DE LA LOI ÉTRANGÈRE

115. Lorsque le juge saisi se trouve en présence d'un cas de défaillance du droit étranger, qu'il s'agisse de l'impossibilité d'en établir le contenu ou de la contrariété de ce contenu à l'ordre public du for, il est certain que la loi étrangère en question ne sera pas appliquée. Face à ce problème, la jurisprudence a d'abord estimé que le juge pourrait prononcer le rejet de la demande fondée sur la loi étrangère défaillante. Plus tard, cette solution a été jugée insatisfaisante de sorte qu'elle est actuellement remplacée par celle consistant à appliquer la loi du juge saisi. (Paragraphe I) On peut toutefois noter, dans certains systèmes juridiques, l'existence d'autres solutions à l'application du droit étranger défaillant. (Paragraphe II)

Paragraphe I : DU REJET DE LA PRÉTENTION SOUMISE AU DROIT ÉTRANGER À L'APPLICATION DE LA LEX FORI

Nous analyserons tour à tour la solution traditionnelle qui consistait à rejeter la demande fondée sur la loi étrangère défaillante (A) et la solution actuelle qui réside dans le recours à la loi du juge saisi. (B)

A. LA SOLUTION TRADITIONNELLE : LE REJET DE LA PRÉTENTION SOUMISE AU DROIT ÉTRANGER DÉFAILLANT

116. Il arrive parfois qu'aucun élément de preuve convaincant ne soit apporté concernant la loi étrangère : on parle de défaillance de celle-ci. Dans ce cas, les tribunaux français, à travers la décision de l'arrêt Lautour, aujourd'hui révolue, avaient admit  la possibilité d'un rejet de la demande pour défaut de connaissance du droit étranger compétent.294(*) A la suite de l'arrêt Société Thinet,295(*) on s'accorda à affirmer que, « si le défaut de preuve du droit étranger portait sur une  disposition spéciale  de ce dernier, il entraînait le rejet pur et simple du moyen. Si au contraire c'était le contenu  général  de la loi étrangère qui n'avait pu être établi, et ce pour des raisons de fait, toute recherche efficace de la loi étrangère s'étant révélée impossible, la conséquence était la substitution de la loi française à la loi étrangère ».296(*)

La solution dite du rejet de la demande a pu être retenue dans plusieurs pays. Aux Etats-Unis, deux décisions célèbres sont en particulier attachées à cette méthode. Dans l'affaire Cuba Railroad Company v. Walter E. Crosby,297(*) la Cour suprême était saisie d'un accident du travail subi à Cuba par un ressortissant américain employé par une société américaine. La victime réclamait la réparation de son préjudice. Le juge Holmes considéra qu'aucune indemnisation ne pouvait être accordée, au motif que la loi cubaine compétente en l'espèce, n'avait pas été établie. C'est à une conclusion identique que seraient arrivés les juges fédéraux de l'Etat de New York dans l'affaire Walton v. Arabian American Oil Co.298(*)

Le rejet de la demande soumise à la loi étrangère défaillante, consacré par la jurisprudence Lautour, est encore en vigueur au Cameroun.

117. En dehors de la jurisprudence, la doctrine semble également avoir adopté la thèse du rejet de la demande. En effet, de nombreux auteurs ont soutenu que « le défaut d'informations relatives à la loi étrangère devrait avoir pour conséquence le rejet de la prétention soumise à cette loi ».299(*)

Un premier courant doctrinal a estimé que le rejet de la demande a pour fondement l'idée que la loi étrangère est un fait. M. VASSEUR, a ainsi affirmé qu'il revient aux parties de prouver la loi étrangère, en raison « de l'assimilation de la loi étrangère à un fait ». Sur cette base, il déclare que « faute de faire la preuve qui lui incombe, le demandeur doit être débouté ». Selon lui, ce raisonnement « découle logiquement (...) du jeu des règles relatives à la preuve des faits, d'après lesquelles quiconque n'apporte pas la preuve du fait qu'il allègue doit être débouté de la prétention qu'il fonde sur lui ».300(*)

Cette première justification a malheureusement été critiquée en ce qu'elle est insoutenable. En effet, selon M. MELIN, cette solution implique que le droit étranger soit considéré comme un fait, comme un élément constitutif de la demande. Pourtant,  on a pu constater que «  la conception factuelle de la loi étrangère est infondée ».301(*) En plus, le fait de faire peser la recherche du droit étranger sur les plaideurs « est en contradiction complète avec les différents arguments déjà développés qui militent au contraire en faveur de l'élargissement de l'office du juge ».302(*)

Un second courant doctrinal a pu soutenir que la prétention soumise à la loi étrangère devrait être rejetée pour défaut de fondement juridique. Les auteurs adhérents à ce courant excluent que la loi étrangère puisse relever de la catégorie des faits. « Ils fondent leur position sur la considération suivante. Le manque d'informations concernant la loi étrangère met le juge dans l'impossibilité d'apprécier au regard de cette loi les prétentions formulées par les plaideurs. Pour cette raison, celui-ci devrait repousser la demande ou l'exception, qu'il y aurait lieu de tenir pour non fondée sur le plan juridique ».303(*)

Cette seconde approche n'a pas non plus échappé à la critique. En effet, il semble qu'elle se fonde sur une « conception trop respectueuse de la règle de conflit »,304(*) en mettant en avant l'idée selon laquelle seule la loi désignée par cette règle est appelée à donner une solution au litige. « Pourtant, on ne peut pas dire que cette loi a des titres exclusifs à intervenir et que le juge doit, s'il ne peut l'appliquer, renoncer à résoudre le litige par application d'un droit qui viendrait se substituer au droit théoriquement compétent ».305(*)

Eu égard aux multiples reproches adressés à la solution du rejet de la prétention soumise au droit étranger défaillant, une autre orientation a été proposée, celle de l'application de lex fori en sa vocation subsidiaire.

* 294Cass. civ 1er, 25 mai 1948, Lautour, Préc. v. dans le sens contraire, Paris, 19 déc. 1985, GP 1986.2.358. Cet arrêt désapprouve les premiers juges d'avoir débouté le demandeur au seul motif que celui-ci n'avait pas établi que la loi étrangère applicable permettait l'accueil de sa prétention.

* 295 Cass. civ 1er., 24 janv. 1984, Thinet, Préc.

* 296 Cf. LOUSSOUARN (Y.) (et Autres), Droit international privé, Préc., p. 322. v. en ce sens : TGI Avesnes-sur-Helpe, 25 sept. 1963, RCDIP 1965.130, note BELLET ; Paris, 19 sept. 1994, RCDIP 1996.90 ; Civ. 1er., 15 juin 1982, Moatty, RCDIP 1983, p. 300, note BISCHOFF (J. - M.); Civ. 1er., 2 févr. 1988, Defontaine, JDI 1988.741, note ALEXANDRE (D.).

* 297 Cuba Railroad Company v. Walter E. Crosby, 222 U.S. 473 (1912). Cité par MELIN (F.), La connaissance de la loi étrangère par les juges du fond, Préc., p. 270, n° 260.

* 298 Walton v. American Oil Co., 233 F. 2d 541 (2d Cir.), Cert. denied, 352 U. S. 872 51956. Cite par MELIN (F.), La connaissance de la loi étrangère par les juges du fond, Préc., p. 266, note 260.

* 299 Cf. MELIN (F.), Op. Cit., p. 271.

* 300 M. VASSEUR : note sous Civ., 25 mai 1948. v. aussi PIAGGIO (G.), « Locus regit actum. Conoscenza della legge straniera ed onere della prova », note sous Cass. italienne, 4 août 1945, Giurisprudenza Completa della Corte Suprema di Cassazione, Sezioni civili, 1945, décision n° 38, P. 170, Spéc. pp.174-175. Cités par MELIN (F.), Op. Cit., p. 271, n° 262.

* 301 MELIN (F.), Op. Cit., p. 272.

* 302 Ibid.

* 303 MICHELI (G. A.), « Jura novit curia », Rivista di diritto Processuale 1961, p. 575, Spéc., p. 588 ; DEL GROSSO (P.) : note sous Cass. Italienne, 29 Janv. 1964, Faro italiano 1964, I, 999, Spéc. N° 6. Cités par MELIN (F.), La connaissance de la loi étrangère par les juges du fond, Préc., p. 272, note 837.

* 304 v. MELIN (F.), Op. Cit., n° 265.

* 305 Ibid.

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