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La frontière terrestre entre le cameroun et le nigeria d'après la cour internationale de justice, (CIJ, arrêt du 10 octobre 2002)

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par Pierre Esaie MBPILLE
Université de Douala - Cameroun - DEA en Droit public, option Droit international 2003
  

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B - LE DEFAUT DE SANCTION DU NIGERIA

Il s'agit ici du problème relatif à la responsabilité internationale du Nigeria à l'égard du Cameroun dont il a violé l'intégrité territoriale. Il faut souligner que c'est à l'unanimité que la Cour a rejeté « ...le surplus des conclusions du Cameroun concernant la responsabilité

313 Lire l'art. 4 de ladite Convention, op. cit., p. 3

314 Le Cameroun adhère à cette Convention le 23 octobre 1991, et la ratifie le 22 novembre de la même année. Cf. Convention de Vienne, op. cit., p. 29.

315 Le Nigeria adhère le 31 juillet 1969 et la ratifie le 27 janvier 1980. Cf. Ibid, p. 30.

316 P. WEIL, « Vers une normativité relative en droit international? », R.G.D.I.P, janvier-mars, 1982, N°1, p. 6.

317 P. WEIL, op. cit., p. 7.

internationale de la République fédérale du Nigeria »318. Cette impunité dont bénéficie le Nigeria est, nous semble t-il, une des causes de la lenteur que l'on observe de nos jours dans l'application de l'arrêt. On peut même se demander si ce n'est pas de la part de la Cour une technique de déconstruction de la rigidité de sa décision à l'égard du « Géant d'Afrique » ?

Sans tomber dans le terrain très glissant de la responsabilité internationale sur lequel les Etats eux-mêmes n'arrivent pas à s'entendre, il faut tout simplement admettre avec le juge ad hoc pour le Cameroun, M.KEBA MBAYE que, lorsque la Cour déclare les effectivités nigérianes de «contra legem » cela sous entend que cet Etat a violé la souveraineté du Cameroun et le principe d'intégrité territoriale des Etats ; dès lors la Cour ne nie pas la responsabilité du Nigeria, même comme elle ne la confirme pas. Elle ne cherche pas tout simplement « dans quelle mesure la responsabilité du Nigeria est engagée à l'égard du Cameroun du fait de cette occupation »319.

L'organe judiciaire principal des Nations Unies a bien senti toutes les fautes qui pèsent sur le Nigeria. Mais lorsqu'il refuse de le sanctionner au motif que le Cameroun n'apporte pas assez de preuves pour justifier ses allégations, elle assouplissait ainsi la rigidité de son arrêt. D'où les interminables négociations que l'on observe dans les travaux de la commission mixte bilatérale chargée de la mise en oeuvre de cet arrêt.

Alors s'il est vrai comme l'a reconnu la C.I.J que les territoires de Lac Tchad et de Bakassi jadis querellés sont Camerounais, et que les effectivités nigérianes y effectuées jusqu'alors sont «contra legem », ne pas sanctionner le Nigeria est, à défaut d'un grand paradoxe de la part de la Cour, un facteur de renforcement de la psychologie du peuple et de l'Etat du Nigeria qui apparemment a tout perdu. Cet état des choses justifie l'absence de contrainte dans l'accomplissement des obligations découlant de cet arrêt. Mais sans chercher à présumer la mauvaise foi de l'Etat Nigérian Voisin, surtout qu'un juriste nigérian voit dans cette absence de sanction, un facteur qui devrait encourager l'Etat nigérian à s'exécuter : «Nigeria should at least, reluctantly accept the ICJ judgment, even if it does not embrace it willingly. (....). There are aspects of delimitation that actually favour Nigeria, particularly in the Lake Chad region. Cameroon did not get all it wanted. For example, it invoked state responsibility against Nigeria and asked for reparation... the court refused.»»'320. Il faut dire qu'en toute objectivité, de tels facteurs peuvent expliquer d'une

.318 Voit arrêt, p. 149, point. V. D du dispositif.

319 Opinion individuelle de M. le juge ad hoc KEBA MBAYE, p. 27, par. 143 et suivants.

320 NSONGURUA J. ODOMBANA, « The ghost of Berlin still haunts Africa ! The ICJ . . . », op. cit., p.44.

certaine manière la réticence du peuple nigérian de céder Bakassi. En dehors de ces lacunes internes à l'arrêt, d'autres paramètres existent qui ne lui sont pas directement liés.

II - LES FACTEURS INDIRECTS A L'ARRET : ESSAI D'UNE ETUDE DE LA COMMISSION MIXTE BILATERALE CAMEROUNNIGERIA

Il faut dire que la mise en oeuvre de la délimitation de la frontière terrestre entre les parties rencontre aujourd'hui des difficultés pratiques sur le terrain. Ces difficultés, à bien y voir de près, résident dans l'examen minutieux des missions confiées à la commission mixte bilatérale de mise en oeuvre de cet arrêt par les acteurs de la tripartite de Genève (le Secrétaire général des Nations Unies Kofi ANNAN, le Président de la République du Cameroun Paul BIYA, et le Président de la République fédérale du Nigeria OLUSEGUN OBASANJO) du 15 novembre 2002 d'une part (A), et dans l'insuffisance de ses moyens d'action (B).

A - UNE COMMISSION MIXTE AUX MISSIONS TROP ETENDUES

Rappelons tout d'abord que ce n'est pas la commission mixte bilatérale des Nations Unies pour la mise en oeuvre de l'arrêt de la C.I.J du 10 octobre 2002 qui est source de problème. Au contraire, elle est même l'artisan majeur de la restauration de la paix et de la confiance entre le Cameroun et le Nigeria. Pourtant si ses missions principales sont salutaires (1), elle a d'autres missions supplémentaires sources de lenteur (2).

1- Ses missions principales salutaires

Il faut les rechercher dans ces phrases du secrétaire général de l'Onu : « les deux présidents sont également convenus de me demander de mettre en place une commission mixte bilatérale qui sera présidée par son représentant spécial, Ahmed Ould Abdallah, et chargée de réfléchir aux moyens de donner suite à l'arrêt de la C.I.J et de faire avancer le processus. »321. Après avoir défini les sources volontaristes de la création de cette

321 Voir le texte du communiqué commun des délégations du Cameroun et du Nigeria à l'issue de la rencontre
entre le Secrétaire général des Nations Unies, le Président BIYA et le Président OBASANJO concernant l'arrêt
de la C.I.J en date du 10/10/2002 . Genève, 15 nov. 2002, par. 5. In Commission mixte des Nations Unies pour la

commission, S.E.M Kofi ANNAN détermine ses missions comme suit: « la commission mixte se penchera sur toutes les incidences de la décision, notamment la nécessité de protéger les droits des populations concernées des deux pays. La commission aura entre autre, pour tâche de procéder à la démarcation de la frontière terrestre entre les deux pays. »322.

La lecture de ces passages montre clairement que les missions principale de la commission mixte bilatérale sont la réflexion sur les moyens pratiques de mise oeuvre de l'arrêt, (dans son ensemble), la protection des Droits des populations des zones concernées, et surtout la démarcation de la frontière terrestre en question. Les tâches ainsi énumérées sont en elles mêmes capitales pour l'opérationnalisation de la délimitation de la frontière terrestre par la commission mixte (...).Mais cette commission s'est vue doter d'une autre série de charges supplémentaires.

2- Des missions supplémentaires pléthoriques.

D'après le paragraphe 7 de l'acte de Genève du 15 novembre 2002, la commission mixte devra formuler des « recommandations » sur des mesures de confiance supplémentaires telles que :

- la tenue des réunions sur une base régulière, entre les autorités locales, des fonctionnaires gouvernementaux et les chefs d'Etat ;

- la formulation de projets destinés à promouvoir des co-entreprises et la coopération transfrontalière ;

- La renonciation par les deux parties à tout propos ou déclaration incendiaires au sujet de Bakassi ;

- Le retrait des troupes des zones pertinentes le long de la frontière terrestre ;

- La démilitarisation ultérieure de la péninsule de Bakassi avec la possibilité de déployer du personnel international chargé d'observer le retrait ;

- La réactivation de la Commission du Bassin du Lac Tchad.

Sans chercher à sous-estimer la compétence des membres de cette notable commission323, il faut reconnaître qu'un mandat aussi volumineux ne peut être qu'une source de lenteur dans la mise en oeuvre de l'arrêt dont elle est chargée, et dans la démarcation de la

mise en oeuvre de l'arrêt de la C.I.J du 10 octobre 2002, 11e Session, Yaoundé, Hôtel Hilton, du 18 au 19 août 2004. p. 13.

322 Ibidem, par. 6.

323 On tient à noter ici qu'il s'agit d'une commission mixte dont les deux principaux promoteurs, les présidents Paul BIYA et OLUSEGUN OBASANJO se félicitent des résultats déjà réalisés. Voir à cet effet, « le communiqué conjoint publiée à l'issue de la visite officielle de S.E chief OLUSEGUN OBASANJO au Cameroun du 26 au 29 juin 2004 », in Commission mixte des Nations Unies, op. cit., p. 34, par. 3.

frontière terrestre particulièrement. A côté de ces missions trop étendues dont est chargée la commission mixte bilatérale, l'autre source de lenteur de ses travaux réside dans l'absence de moyens concrets.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery