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La consécration d'une véritable notion juridique de régulation au sein de l'UEMOA et de l'UE

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par Djibril WELLE
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Master Droit de l'Intégration et de l'OMC 2007
  

Disponible en mode multipage

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REPUBLIQUE DU SENEGAL

UNIVERSITE Cheikh Anta DIOP de Dakar

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUE ET POLITIQUE

··················

MASTER DROIT DE L'INTERGRATION ET DE L'OMC

THEME :

La Consécration d'une véritable notion juridique de Régulation au sein de

L'espace UEMOA et de l'UE

Sous la direction : Présenté par :

Pr. Alioune SALL Me Djibril WELLE

Agrégé des Universités Etudiant en DEA

Année académique 2007-2008

SIGLES ET ABREVIATIONS

A.N.R : Autorités Nationales de Régulation

A.R.T.P : Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes

A.R.C.E.P : Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes

A.R.T.E.L : Autorité Nationale de Régulation des Télécommunications

B.A.M.R.E.L : Bureau Africain et Mauricien de Recherches et d'Etudes Législatives

C.E.D.E.A.O : Communauté Economique des États de l'Afrique de l'Ouest

C.E.E : Communauté Economique Européenne

C.J.C.E : Cour de Justice de la Communauté Européenne

Commission : Commission de l'U.E.M.O.A

C.M : Conseil des Ministres

D.R.M : Digital Rights Management

F.T.C: Federal Trade Commission

I.C.C : Interstate Commerce Commission

S.C.T : Société des Cimenteries du Togo

S.V.A.T.S : Syndicat des Agences de Voyages et de Tourisme du Sénégal

U.E : Union Européenne

U.E.M.O.A : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine

O.C.A.M : Organisation Commune Africaine et Malgache

O.C.D.E : Organisation de Coopération et de Développement Economiques

O.H.A.D.A : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires

O.M.C : Organisation Mondiale du Commerce

WACEM : West African Ciment

SOMMAIRE :

Introduction................................................................................................(3)

Première Partie : Tentative d'une définition de la notion juridique de Régulation.............(10)

Chapitre Premier: Définitions du concept de régulation........................................ ..(10)

Section Première: Un concept ambigu au contenu précis. ..........................................(10)

Paragraphe Premier: L'acceptation de plusieurs acceptions. ..................................... (10)

Paragraphe Deuxième : L'intangibilité du contenu..................................................(13)

Section Deuxième : L'examen des différentes modalités institutionnelles de la Régulation ..(14)

Paragraphe Premier : La régulation par l'intervention de l'Autorité publique..................(14)

Paragraphe Deuxième : La régulation par absence d'intervention.................................(16)

Chapitre Deuxième : La mise en oeuvre de la Régulation dans l'espace UEMOA...............(17)

Section Première : L'encadrement de la concurrence des entreprises  par la régulation........(17)

Paragraphe Premier : L'interdiction de principe des ententes....................................(18)

Paragraphe Deuxième : L'exclusion des abus de position dominante...........................(19)

Section Deuxième : La prohibition des interventions étatiques....................................(20)

Paragraphe Premier : La limitation des aides publiques...........................................(21)

Paragraphe Deuxième : L'obligation de libéralisation et de transparence par rapport aux monopoles et entreprises publiques.....................................................................(22)

Deuxième Partie : L'impact de la consécration d'une véritable notion juridique de Régulation dans l'activité économique UEMOA...................................................................(24)

Chapitre Premier : Le souci d'une double protection..............................................(24)

Section Première : La mise en place d'un marché protégé.........................................(25)

Paragraphe Premier : La primauté du principe d'intégration sur la recherche de l'efficience économique................................................................................................(25)

Paragraphe Deuxième : Un cadre propice à l'épanouissement des entreprises opérant dans le marché communautaire...................................................................................(26)

Section Deuxième : L'inexistence d'une réglementation spécifique à la protection du consommateur dans l'espace UEMOA.................................................................(28)

Paragraphe Premier : Des règlements anticoncurrentiels..........................................(28)

Paragraphe Deuxième : Des directives multiples.................................................... (30)

Chapitre Deuxième : Un souci de consolidation d'une bonne concurrence communautaire...(31)

Section Première : Les avancées du juge européen..................................................(31)

Paragraphe Premier : La considérable réduction du principe de la personnalité des peines...(32)

Paragraphe Deuxième : L'institution d'un régime spécifique de sanctions pécuniaires dans la régulation communautaire................................................................................(33)

Section Deuxième : L'hésitation du juge de la communauté ouest africain.......................(34)

Paragraphe Premier : Une certaine méconnaissance de l'étendue de ses pouvoirs............(35)

Paragraphe Deuxième : Une déclaration d'incompétence dommageable pour le respect des règles de concurrence régissant l'Union..................................................................................(37)

Conclusion................................................................................................(39)

INTRODUCTION GENERALE:

D'un magistrat ignorant, c'est la robe qu'on salue !

Jean de la FONTAINE : « Fables, l'Ane portant des reliques ».

La recomposition de l'environnement juridique mondial sous les auspices des lois du marché, suscite des enjeux importants relativement à la croissance économique des nations. Elle impulse une nouvelle dynamique de construction des paysages normatifs, qui semble s'orienter aujourd'hui vers une gestion communautaire des intérêts nationaux1(*). En Europe, l'intégration régionale, élevée au rang de palier fondamental entre l'ordre juridique interne et communautaire, prend ancrage dans une rationalisation de système juridique à l'instar de l'U.E. En Afrique, avec la mondialisation et la libéralisation, la nécessité de l'intégration et de l'harmonisation des systèmes normatifs s'est imposée progressivement. Aussi, la mise en place de la C.E.D.E.A.O, de l'U.E.M.O.A et de l'O.H.A.D.A2(*), dans l'espace communautaire ouest africain, a pour objectifs majeurs, de renforcer la compétitivité des Economies des pays concernés, de coordonner entre autres leurs politiques sectorielles nationales par la mise en place d'action commune et éventuellement de politique dans les principaux domaines d'activités commerciales.

Avec l'ouverture progressive à la concurrence, les missions assignées aux organismes d'intégration régionale, ne peuvent s'accomplir valablement sans la mise en place de normes régulatrices de branches économiques particulières3(*), dont le point commun est d'être des secteurs qui n'ont pas en l'état, la capacité intrinsèque de produire leur propre équilibre. Ces secteurs doivent alors être régulés, parce qu'ils souffrent de faiblesses. C'est le rôle de la régulation économique, qui s'exerce sur les bases du droit de la concurrence.

En effet, la régulation est un concept qui est intrinsèquement lié à la notion de concurrence. A ce propos, le droit communautaire de la concurrence peut être définie comme l'ensemble des règles juridiques édictées par les organisations d'intégration régionale pour régir les rapports et la compétition économique entre les professionnels que sont par exemple les entreprises ou les commerçants qui se disputent une clientèle4(*).

Dans cette optique, on peut d'emblée noter que, réfléchir en Afrique de l'Ouest sur le droit communautaire de la régulation, revient pour l'essentiel à se pencher sur le droit de la concurrence de l'U.E.M.O.A. Car, c'est cette organisation d'intégration qui, non seulement apparaît comme la plus effective dans l'espace géographique visé, mais surtout comme celle qui a, jusque-là, édicté en ce domaine des règles significatives à même de constituer un véritable droit de la concurrence5(*). A cet effet, on peut souligner que c'est à partir des années 1990 que l'on notera l'émergence d'un véritable droit autonome de la concurrence au sein de l'espace U.E.M.O.A, non seulement dans les différents pays membres pris individuellement, mais plus particulièrement au niveau communautaire6(*).

Dans l'espace européen par contre le processus de création d'une régulation effective est amorcé depuis l'arrêt « Continental Can »7(*) de la Cour de Justice de la Communauté Européenne (C.J.C.E) du 21 Février 1973. Concernant cette Union8(*), on dira que c'est une organisation intergouvernementale et supranationale composée de vingt sept (27) États née le 0 7  Février  1992, lors de la signature du Traité sur l'Union européenne à Maastricht par les douze (12) Etats membres de la Communauté économique européenne (C.E.E).

Cependant, pour un propos plus limpide, on relèvera que c'est à partir de la fin des années 1960 que le paradigme des relations entre l'État et le marché, entre la sphère de l'intervention publique et celle de l'initiative privée, a été profondément remis en cause aux États-Unis. Depuis l'immédiate après guerre en effet, l'État, dans les pays occidentaux, avait été amené à intervenir à la fois massivement et directement dans le fonctionnement de l'économie. Il s'agissait de faire face aux nouvelles exigences sociales, engendrées par la seconde guerre mondiale et à une entreprise de reconstruction massive entreprise par les États. Cette intervention répondait également aux prescriptions de théories centrées sur les équilibres macro-économiques, nées dans les années 1930 et inspirées du Keynésianisme.

De ce fait, on peut retenir que face aux changements de rapports dans l'économie, le droit de la concurrence et plus particulièrement de la Régulation, aura une place de choix dans l'action de l'État. Elle retiendra notre attention, en raison notamment de la place capitale qu'elle occupe dans le schéma d'intégration mis en chantier par les institutions communautaires, et du grand intérêt qu'elle revêt en cette époque d'ouverture où la survie des acteurs économiques dépend en grande partie de leur capacité à résister à la concurrence9(*).

Sous cette récente évolution, on désignera par le terme de « Régulation », en donnant alors à ce terme éminemment polysémique son acception anglo-saxonne et micro-économique, par l'ensemble des techniques qui permettent d'instaurer et de maintenir un équilibre économique optimum qui serait requis par un marché qui n'est pas capable, en lui-même, de le produire. En outre, poser la consécration d'une véritable notion juridique de Régulation par le juge communautaire, revient à analyser sa reconnaissance, son sacrement par celui-ci. Du coup, c'est voir l'impact de son approbation dans l'équilibre économique visé par le droit de la concurrence.

L'équilibre économique optimal étant classiquement réalisé par la situation de concurrence pure et parfaite. Cet équilibre se trouve, selon la théorie classique dans l'état de concurrence10(*). Dans cette optique, la régulation a pour but d'instaurer et de préserver cette concurrence. Il s'agit alors de favoriser l'entrée sur le marché communautaire de nouveaux compétiteurs, de lutter contre les distorsions de la concurrence, notamment les abus de position dominante, voire de limiter les situations de monopole. A cet égard, la régulation constitue un nouveau mode d'intervention de la puissance publique dans les secteurs où l'Etat entreprend la construction du marché et doit garantir la fourniture du service11(*). Avec l'accélération des innovations et l'ouverture généralisée12(*) des marchés, cette mission de l'Etat se pose encore avec plus d'acuité. De fait, face à l'existence ou à la menace permanente des pratiques portant atteinte à la concurrence, il s'avère aujourd'hui plus que nécessaire d'élaborer et de mettre en oeuvre un corps de règles les réprimant, un ensemble de règles régulant ou disciplinant la concurrence, ou, en d'autres termes, un droit de la Régulation. Parce que, tout le monde est aujourd'hui convaincu que, pour soutenir la croissance, l'Economie d'un pays doit s'appuyer sur un système juridique solide et une régulation efficace. Mais, on notera aussi que l'exercice libre et confiant des activités économiques, indispensable au bon fonctionnement d'une économie, exige des dispositifs de régulation solides, qui renforcent le dynamisme du marché, en favorisant une concurrence saine et loyale dans un secteur déterminé. En effet, si le régulateur est tout entier guidé par la construction d'équilibres à la fois intrinsèques et artificiellement créés du secteur, le système doit protéger celui qui a le moins les moyens d'y jouer son jeu13(*). Car, une régulation équitable et indépendante, assure assurément aux différents opérateurs présents sur le marché, sécurité et confiance. Cette dernière, constitue une donnée sans laquelle l'activité économique ne peut valablement s'exercer. C'est pour cela que le G8 a élevé la Régulation au rang des ses valeurs et principes communs lors du sommet d'Evian.14(*)

Récent en Europe, et plus précisément dans l'espace U.E.M.O.A, ce concept multivoque, voire ambiguë, nécessite que les contours de sa et/ou ses définitions soient clairement posés. Bien qu'il n'y ait pas de définition figée de la Régulation, le dictionnaire «Le Larousse » en présente une, assez fiable que nous reprendrons à notre compte. Pour ce dictionnaire en effet, la Régulation est « l'ensemble des mécanismes permettant le maintien de la constance d'une fonction ». La régulation peut alors immédiatement prendre une connotation négative, en signifiant : contrôle, immobilisme, conservatisme15(*). Mais, sa signification va au-delà de ce premier aperçu. Très usitée dans les sciences exactes (sciences physiques, biologie, mécanique...), le concept de régulation, a aujourd'hui pénétré les sciences sociales. Pour la plupart des auteurs, la régulation n'a pas de portée juridique particulière, c'est une notion descriptive qui renvoie à l'utilisation des procédés de police en matière économique16(*). Pour Marie-Anne Frison-Roche, il s'agit d'une nouvelle branche du droit, exprimant un nouveau rapport entre le droit et l'économie « regroupant l'ensemble des règles affectées à la régulation de secteurs qui ne peuvent engendrer leurs équilibres par eux-mêmes », dans un cadre concurrentiel17(*).

Selon Richard Descoings18(*), au contraire, si l'on prend la notion de régulation au sens large, on dira qu'il s'agit de fournir des règles pour organiser des comportements, pour ordonner des espaces, pour faire coexister les intérêts légitimes de personnes concernées dans tel ou tel secteur, à telle ou telle échelle. Cette régulation au sens large renvoie à la question du gouvernement des nouveaux espaces, que la seule puissance des États isolés, ne suffit plus (plus totalement en tout cas) à saisir. La régulation est de ce fait, le procédé qui permet d'assurer l'équilibre dans le fonctionnement d'un système. Le procédé induit inévitablement l'implication d'une sorte d'arbitre qui ne peut être l'Etat ou ses démembrements. Ainsi, le droit communautaire de la régulation, tel que la présente étude se propose de le faire, implique avant toute chose que les règles du jeu s'imposant aux acteurs du marché ne soient pas figées et qu'une autorité administrative indépendante prend au cas par cas les décisions nécessaires. Dans cette acception, la régulation est même aujourd'hui érigée en réalité incontournable du débat politique, en concept phare de l'économie publique et en attribut indispensable de toute science administrative un peu moderne19(*).

De surcroît, dans le cadre d'un processus d'intégration régionale, ce Droit, en interdisant certaines pratiques comme les ententes et les abus de position dominante, empêche que des opérateurs économiques se constituent en barrières à la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes. De la sorte, le droit communautaire de la Régulation contribuera à l'unification du marché commun.

Dans la progression de cette logique, on soulignera que la mise en place des organismes régionaux serait un vain mot, si le juge ne garantissait pas l'application effective des normes instituées. Et comme pour l'ensemble des autres branches juridiques, les décisions des tribunaux occupent une place importante dans la formation du droit économique. Ce qui ne constitue pas d'ailleurs une « révolution culturelle»20(*), si l'on sait que cette posture de contrôle est même l'essence de l'existence du juge. Aussi, celui-ci est naturellement amené à produire des décisions de justice qui auront inévitablement un impact plus ou moins important dans l'ordonnancement juridique. Cependant, pour une certaine frange de la doctrine, la jurisprudence ne saurait avoir le dernier mot. Selon elle21(*), le législateur, soucieux de défendre certains intérêts, notamment socioprofessionnels, n'hésite pas à condamner sans scrupules certaines avancées du juge. Ce souci de contrôle de l'action du juge n'enlève en rien la teneur de son message22(*) ainsi que sa force dans l'encadrement et l'efficacité de la régulation économique. Ceci, est d'autant plus actuel que dans le contexte des grands regroupements régionaux, les tentations de transgresser les règles posées et les dispositifs de régulation mises en place ne manquent pas.23(*)

Ainsi donc, le juge est naturellement amené à sanctionner avec la pleine mesure qui sied, les écarts, abus et transgressions notés dans l'exercice « d'échanges » que l'on se veut justes et équitables. C'est à cet effet, qu'il convient d'analyser le sujet autour de la problématique suivante : quelle est l'impact de la consécration d'une véritable notion juridique de régulation dans l'activité économique, notamment au sein  de l'U.E et l'U.E.M.O.A? Autrement, on essayera d'analyser l'irradiation de cette consécration au sein de l'U.E et les effets de son absence dans l'U.E.M.O.A.

Au vu de ce constat, on retiendra que dans sa conception pleine et entière, le droit communautaire de la Régulation de l'U.E.M.O.A est encore au stade de balbutiement. A cet effet, il gagnerait à s'inspirer de l'Union européenne qui est une construction d'un nouveau type, sans précédent historique, dans la perfection de l'élaboration des règles et  la « maturité » des institutions. Celle-ci est une structure supranationale hybride empreinte à la fois de fédéralisme et d'inter gouvernementalisme.

Et pour mettre en place les conditions d'une bonne activité économique, épurée de toute de distorsion, les règles justes et des institutions performantes ne suffissent assurément pas. En ce sens, l'institution de juridictions indépendantes et autonomes, suppléées par des autorités administratives indépendantes, vigilantes, peut être un gage de confiance à la veille à l'application stricte des dispositions prises.

C'est dans ce sens, qu'il nous semble intéressant, de poser la régulation dans toutes ses acceptions d'abord (Premier partie), afin de relever en quoi sa consécration, influe-t-il sur le fonctionnement d'une concurrence juste et libre dans un espace donné (Deuxième partie).

Première Partie : Tentative d'une définition de la notion juridique de Régulation.

La construction du droit de la régulation se pose progressivement et en grande partie sur les bases des organisations économiques tournées vers les monopoles d'Etats. Au demeurant, il faut souligner qu'un consensus sur le concept de régulation ne s'est pas encore dégagé, en raison notamment de son caractère multivoque et polysémique. Aussi, plusieurs définitions de la régulation demeurent recevables24(*) (Chapitre Premier). Ce qui n'entame en rien l'efficacité de sa mise en oeuvre (Chapitre Deuxième).

Chapitre Premier: Définitions du droit de la Régulation.

Pour s'accorder sur la définition du concept de « Régulation », il faut comme l'a souligné le Pr. Anne-Marie FRISON-ROCHE : « simplement s'entendre sur les mots, dans une vision pragmatique du langage, c'est-à-dire affecter aux mots un sens pour non seulement ne pas s'égarer mais encore pour renvoyer à un ensemble de règles cohérentes (le régime juridique), ce qui rend la définition efficace ». Mais, aussi ambigu qu'elle soit (Section Premier), l'examen des différentes modalités institutionnelles de la Régulation (Section Deuxième), permettra d'appréhender son émanation, à savoir principalement l'économie de marché et par voie de conséquence la mondialisation.

Section Première: Un concept ambigu au contenu précis.

Pour définir le droit de la régulation, il faut tout d'abord examiner l'essentiel des acceptions recevables du concept (Paragraphe Premier). Cependant, celles-ci, dégagent toujours un certain nombre de caractéristiques sans lesquelles le contenu de la notion serait vide (Paragraphe Deuxième).

Paragraphe Premier: L'acceptation de plusieurs acceptions.

L'une des sources d'ambiguïtés du terme « Régulation » vient de son origine. Initialement apparue aux Etats-Unis, la régulation signifie à la fois un instrument (que l'on appellerait en français la réglementation) et une politique publique bien particulière. Dans cette vision, il signifie en droit public américain, le contrôle des opérateurs de certains marchés particuliers par l'Etat. Exercé par le juge ou par des organismes appelés régulateurs25(*), au nom de l'intérêt général à partir du début du XXe siècle sur le mode de l'Interstade Trade Commission26(*).

On relèvera très tôt qu'en la matière, les définitions proposées dégagent souvent des enjeux de vocabulaire, qui laissent apparaitre l'appartenance à un courant de pensées donné, mais aussi à un système particulier. En effet, à travers les définitions posées, le vécu et l'appartenance à un système juridico-économique, transparait inévitablement. En tout état de cause cependant, la multiplicité des définitions proposées27(*) ne doit occulter la nécessité de la prise en compte de la Régulation dans ses caractéristiques fondamentales. C'est-à-dire ce qui doit être déployé pour éviter au mieux l'implicite et le double sens et rendre autant que peut se faire, aisée ordonnée la mise en oeuvre des règles, pas plus28(*). Donc, par une désignation exacte et exhaustive du concept, mais pas moins.

A partir de cette approche générale, la régulation d'un secteur ou d'une activité est susceptible de plusieurs acceptions dont la plus étroite désignerait une action : « intermédiaire entre la détermination des politiques elles-mêmes et la gestion proprement dite » tandis qu'une acception large, inspirée de la théorie générale des systèmes, désignerait « l'action des mécanismes correcteurs qui maintiennent un système en existence » ; dans les deux sens, il s'agit de « faire fonctionner correctement un système complexe ».

Cela accomplit, on proposera une définition de la régulation qui tentera autant que faire se peut de cheminer dans des acceptions allant de la plus générale à la plus spécifique. La première, se confondra avec le droit lui-même. On ne fait plus aujourd'hui le contresens de confondre la régulation avec le terme anglais de « Régulation », lequel renvoie à la réglementation. En cela, il sied de noter que le vocable anglophone vise un champ d'application plus restreint, puisqu'il ne vise que la réglementation. Il est au contraire plus large que le vocable français puisqu'il concerne tous les types d'interventions des autorités publiques prenant la forme réglementaire. Pour distinguer ces faux amis, un raisonnement par l'absurde suffit29(*) : puisqu'il s'agit de langage, on observe que des organismes qualifiés expressément comme des « Autorités de régulation », par exemple l'Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes (A.R.T.P), ne disposent pas du pouvoir réglementaire. Ce qui suppose que l'on peut réguler sans réglementer, le sens des deux termes ne pouvant donc fusionner. La régulation en français renvoie donc non pas à la réglementation économique, « regulation », mais aux « regulatory systems », qui expriment l'ensemble des dispositifs et institutions en charge de mettre en place cette nouvelle forme de politique publique.

La deuxième, spécifiera la régulation comme limite imposée dans l'exercice des pouvoirs et comme rééquilibrage des rapports de force. De ce fait, la régulation ne renvoie, plus ni au sujet de droit, public ou privé, ni à une fin éthique poursuivie comme l'équilibre des pouvoirs. Encore moins à la compensation des rapports entre puissances inégales, mais à l'objet, à la chose sur laquelle porte la régulation : le secteur spécifique ouvert à la concurrence, mais non laissé à elle seule.

La troisième, aboutira à ce qui est proposé dans notre introduction : le droit de la régulation économique. Identifié par les secteurs sur lesquels il s'exerce, en ce que ceux-ci doivent être construits et maintenus dans un équilibre entre un principe de concurrence et d'autres principes. Il s'agit des secteurs économiques particuliers dont le point commun est leur incapacité à sécréter leur propre équilibre.

Le Professeur Abdoulaye SAKHO pour sa part retient que « la régulation est la tâche qui, consiste à assurer entre les droits et obligations, de chacun, le type d'équilibre voulu par la loi. Elle implique dans une certaine mesure ce qu'on appelle aujourd'hui une vision systématique de la société et de ses rapports avec l'Etat »30(*).

Mais, on notera très tôt qu'aussi multiple que puisse être les définitions proposées, il n'en demeure pas moins que le concept de Régulation garde intact un contenu intangible.

Paragraphe Deuxième : L'intangibilité du contenu

La théorie de la régulation se présente d'abord comme une théorie macro-économique.

Mais, un certain nombre de chercheurs se référant explicitement à cette théorie, se sont engagés dans différents types d'analyses. Ce qu'il faut retenir néanmoins, c'est que la régulation imposée par le droit prend aujourd'hui appui sur le principe de l'économie de marché. Aussi, nous faut-il clarifier ce dernier terme avant de nous ouvrir davantage sur ce qui fait l'intangibilité de la notion juridique de régulation. En effet, pour paraphraser le Pr. Frison-Roche, l'économie de marché et la mondialisation sont en fait l'arrière-plan de la définition du droit de la régulation. Dans ce registre, nous poserons d'abord qu'économie de marché ne signifie nullement absence de droit, même dans la conception la plus minimaliste de l'encadrement juridique de l'économie31(*).

Elle ne signifie pas non plus anarchie ou zone de non-droit, en comparaison à l'économie mafieuse. L'économie de marché est née du droit et demeure encadrée par ses instruments et ses exigences. A cet effet, elle doit faire l'objet d'un encadrement spécifique eu égard surtout aux particularités de certains secteurs économiques, incapables eux seuls de s'équilibrer.

Cet encadrement passe par l'intervention de l'État, par l'institutionnalisation d'organismes publics ad hoc, appelés Autorités de régulation, sans que pour autant l'économie cesse de fonctionner sur le principe libéral. En ce sens, l'exemple des États-Unis, est fort éloquent : économie depuis toujours libérale et la plus précocement objet d'interventions réglementaires et d'emprises d'autorités de régulation. Il n'y a donc pas de contradiction pour une économie libérale à être l'objet de régulations dès l'instant qu'on ne peut se contenter de l'offre et de la demande, dont le principe demeure acquis.

En cela, le droit de la concurrence, nous permettra de dégager, à tout le moins en ce qu'il sanctionne les comportements anticoncurrentiels ou prohibe les aides d'état, le rôle de prévention de futurs comportements anticoncurrentiels que joue la régulation. Donc à la différence du droit de la régulation, le droit de la concurrence n'adopte pas une perspective de régulation, puisqu'il ne s'agit que, au coup par coup, de ramener à l'ordre ordinaire de l'offre et de la demande des comportements déviants. En revanche, on trouve des mécanismes juridiques qui relèvent de procédés de régulation au sein même du droit de la concurrence, parce qu'il s'agit de construire et de maintenir des organisations économiques non spontanées et non pérennes par leur seule force. D'un point de vue sémantique, en revanche, il sied de faire une précision sur une différence, qui à notre avis permet de situer la régulation par rapport à la réglementation. Si le premier terme est une règle du jeu, le second désigne une intervention dans le jeu.

C'est dans ce sens aussi qu'il faut analyser les différentes modalités institutionnelles de régulation. En cela, ce droit constitue un mode de contrôle, une forme de garde-fou anticipé du libre fonctionnement du marché concurrentiel.

Section Deuxième : L'examen des différentes modalités institutionnelles de la Régulation 

Comme le fut jadis le droit administratif, le droit de la régulation est un droit en constante évolution, et qui doit s'adapter en permanence, au regard de la rationalité des acteurs économiques intéressés et qui doit favoriser le développement de leur capacité par rapport au système économique libéral. C'est également un droit dont la mise en oeuvre implique, l'implication plus ou moins poussée de l'Autorité publique (Paragraphe premier), en l'absence de mécanismes propres au marché. Mais, le plus souvent cette intervention ne s'avère pas nécessaire, car le marché dégage lui-même ses propres mécanismes de régulation (Paragraphe deuxième).

Paragraphe Premier: La régulation par l'intervention de l'Autorité publique.

La régulation par l'intervention de l'Autorité publique s'analyse comme une régulation du marché d'une part et une régulation avec le marché d'autre part dite aussi co-régulation. Concernant justement cette dernière, elle se pose comme le lieu d'échanges, de négociations entre les « parties prenantes » et les titulaires de la contrainte légitime où se comparent les bonnes pratiques, afin de les ériger en recommandations.

Elle nécessite l'intervention de plusieurs acteurs : 

-Le parlement ou le pouvoir exécutif qui définissent le cadre juridique de la régulation ; 

-Le régulateur, organe chargé d'assurer le libre jeu du marché et de réguler le secteur ;

-Les opérateurs économiques intéressés ;

-Les usagers, clients ou bénéficiaires et

-Les instances juridictionnelles nationales (juridiction administrative et juridiction de l'ordre judiciaire) et communautaires.

Notons cependant, que la régulation hiérarchique par un régulateur indépendant, a insufflé un véritable changement dans les relations puissance publique et opérateurs. En effet, une régulation, indépendante du pouvoir politique, voire administratif, initiée par le droit communautaire dans un contexte où le maintien d'opérateurs nationalisés pouvait faire craindre des conflits d'intérêts, est nécessaire au libéralisme. On relèvera au passage, l'influence des modèles occidentaux sur le mode de fonctionnent des régulateurs indépendants. Le premier est apparu aux Etats-Unis, avec l'Interstate Commerce Commission (I.C.C), crée à la fin du XIXe siècle et devenue la Federal Trade Commission (F.T.C). Le régulateur indépendant tel que conçu de nos jours revoie étroitement à la conception anglo-saxonne du service public, à travers la théorie du Public Utility, qui constitue diront certains32(*), une sorte de contreposée de la théorie du service public telle que posée actuellement.

Elle se matérialise par la formation d'organes collégiaux consultatifs. Ces organismes réunissent en général les responsables des ministères techniques, les syndicats professionnels concernés, les représentants des usagers et, dans certains cas les syndicats représentatifs des salariés du secteur, d'où dans ce dernier cas dira Bertrand du Marais la notion de paritarisme.

D'un point de vue juridique aussi, la jurisprudence consacre l'existence de ces organismes consultatifs, notamment selon trois principes :

-Les consultations préalables prévues par un texte doivent être menées régulièrement, sous peine de nullité de la décision administrative subséquente ;

-Sauf lorsque ce texte précise la nécessité d'un « avis conforme », l'administration peut s'en tenir à son projet initial ou prendre un texte modifié ;

-En l'absence de procédure obligatoire de consultation, l'administration doit procéder régulièrement à une consultation qu'elle a spontanément requise, sous peine également de nullité de la décision finale. 33(*)

Ce qui nous amène à examiner, l'autre modalité institutionnelle de la régulation.

Paragraphe Deuxième : La régulation par absence d'intervention.

Cette réflexion sera axée en premier lieu, sur les travaux de Ronald COASE. Selon sa théorie, dite « Théorème de Coase », deux conditions sont nécessaires pour établir un système marqué par une absence d'intervention de l'autorité publique dans la régulation : c'est que les droits de propriété, doivent être parfaitement définis et les coûts de transactions être nuls. Alors sous ces deux conditions, extrêmement fortes, se développe un régime de régulation spontanée, totalement décentralisé.

Ainsi, dans le domaine des technologies de l'information et de la communication, une matérialisation des projets de régulation dite spontanée, est de plus en plus visible. C'est le cas notamment des projets de Digital rights management (D.R.M). C'est un dispositif purement technique, qui viendrait, à la source, contrôler les usagers et faire respecter les droits d'auteurs34(*). De ce fait, les logiciels ou les technologies utilisées pourraient commander les usagers et interdire les comportements délictueux.

En outre, on notera une autre forme d'autorégulation, qui se manifestait déjà au Moyen-âge, correspondant aux anciennes Guildes35(*) et corporations marchandes. En effet, dans ces communautés du Moyen Age, la pression des pairs, la volonté de conserver une certaine image, etc., conduisent chaque agent à adopter un comportement qui revient à ce que des normes implicites ou explicites, deviennent auto-applicables. Dans ce registre, l'exemple de la réussite de la micro-finance en Afrique peut aussi s'expliquer par ce genre d'autorégulation, alors que l'échec du système bancaire classique aurait pu laisser croire ces sociétés réfractaires à tout crédit bancaire36(*). Il est à noter néanmoins, qu'à partir d'un certain niveau de développement, l'incitation à la coopération a tendance à s'effacer devant l'incitation aux gains.

Par ailleurs, cette autorégulation peut être propre au marché. C'est le cas notamment dans un système décentralisé, non hiérarchique et conférant à ses normes un caractère auto-exécutables. Elle se définit, en fait comme l'élaboration et le respect, par les acteurs eux-mêmes, de règles qu'ils ont formulées, sous la forme de codes de bonne conduite ou de bonne pratique et dont ils assurent eux-mêmes l'application. On citera en ce sens, le Take Over Panel du gouvernement de Tony Blair, qui engagea dès 1997, un vaste programme de « réforme de la réglementation » pour inciter au remplacement des modes classiques de régulation par l'autorégulation ou Voluntary Regulation (Voir les rapports « Principes of Good Régulation » -1998- et Alternatives to State Regulation -2000- cités par B. du Marais).

Au niveau international, on soulignera que l'O.C.D.E s'est lancée à la fin des années 1990 dans un vaste programme, d'inspiration libérale, d'évaluation de la formation et de la mise en oeuvre de la législation37(*).

Et selon les adeptes de l'autorégulation, celle-ci offrirait une plus grande efficacité que la régulation hiérarchique. Mais, en tout état de cause, la mise en oeuvre de la régulation dans l'espace communautaire nous permettra d'appréhender avec plus de clarté, son apport économique.

Chapitre Deuxième : La mise en oeuvre de la Régulation dans l'espace communautaire.

En prônant l'égalité de traitement des entreprises publiques et privées, le droit issu du Traité de Rome de 1957 instituant la Communauté économique européenne (devenue Communauté européenne), de même que le Traité de l'U.E.M.O.A de 1994, ont cherché à appréhender l'activité économique au nom des principes de libre échange et de libre concurrence au sein du marché unique38(*). De fait, l'encadrement de la concurrence des entreprises  par la régulation (Section Première), ainsi que la prohibition des interventions étatiques (Section Deuxième) ne pouvaient rester longtemps à l'écart de la logique unificatrice communautaire.

Section Première : L'encadrement de la concurrence des entreprises  par la régulation.

L'encadrement de la concurrence des entreprises  par la régulation, passe par une adaptation à la complexité des règles communautaires. Cette adaptation se fait sur le mode de flexibilité. En effet, réguler la concurrence dans l'espace communautaire, induit des règles plus souples, plus négociées et plus évolutives. Dans cette optique, l'interdiction de principe des ententes (Paragraphe premier) et l'exclusion des abus de position dominante (Paragraphe Deuxième), semblent être une réponse.

Paragraphe Premier : L'interdiction de principe des ententes.

Cette interdiction se matérialise, comme dans la plupart des matières juridiques, à travers une technique d'adoption d'une règle générale. Mais, cette technique est souvent assortie d'exceptions destinées à éviter que l'application stricte de cette règle n'engendre des effets contraires aux buts visés. Le législateur communautaire dans sa logique de régir les échanges intracommunautaires, édicte un principe d'interdiction des ententes entre entreprises. L'entente est classiquement définie comme un concours de volonté entre entreprises autonomes, tel un accord, une décision d'association, ou une pratique concertée, qui a pour objet ou pour effet de fausser ou d'entraver le jeu de la concurrence. Quant à l'entreprise, pierre angulaire du concept d'entente susvisé, elle se pose comme une organisation unitaire d'éléments personnels, matériels, exerçant une activité économique, à titre onéreux, de manière durable, indépendamment de son statut juridique, public ou privé, et de son mode de financement, et jouissant d'une autonomie de décision39(*).

Dans cette perspective, le Traité U.E.M.O.A en son article 88, alinéa a, dispose que les accords, les associations et les pratiques concertées entre entreprises sont interdites de plein droit, lorsque celles-ci ont eu pour effet de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur de l'Union. Mais, ce sont surtout l'article 3 du Règlement no 02/2002/CM/UEMOA et l'annexe 1 du Règlement no 03/2002/CM/UEMOA du 23 Mai 2002 qui dégagent plus de clarté par rapport à la notion exacte des ententes exclues dans le Traité UEMOA. Ces dispositions sont aussi, en réalité la matérialisation du principe d'interdiction des ententes, à l'image notamment du droit européen de la concurrence en son article 81.

Par ailleurs, même si ces ententes son prohibées pour des raisons évidentes, d'autres par contre sont autorisées par des textes communautaires. A l'instar notamment de l'article 89, paragraphe 3, du Traité de l'U.E.M.O.A qui aménage une option au profit du Conseil des Ministres une possibilité de limiter ces interdictions en tenant compte de situations particulières. Cependant, c'est le Règlement no 02/2002/CM/UEMOA qui définie de manière spécifique ces exceptions au principe d'interdiction des ententes.

Ainsi, la Commission peut autoriser au cas par cas et de façon individuelle ou par catégories les ententes qui peuvent contribuer à l'amélioration de la production ou de la distribution des produits ou à promouvoir le progrès économique ou technique. Par contre, une partie du profit tiré de ces exceptions est réservé aux utilisateurs, indique l'article 7 du Règlement no 02/2002/CM/UEMOA. Cette redistribution doit être équitable et permettre aux entreprises intéressées, de se soustraire aux restrictions qui ne sont pas indispensables à l'instauration d'une concurrence juste et équitable.

En plus de la prohibition des ententes donc, la Commission exerce un contrôle poussée sur les abus de position dominante lorsque celles-ci sont établies.

Paragraphe Deuxième : L'exclusion des abus de position dominante.

Comme dans le domaine des ententes, le Traité  U.E.M.O.A se limite à poser de façon succincte le principe d'interdiction des abus de position dominante40(*). Dans cette perspective, la position dominante est définie comme la situation où une entreprise a la capacité, sur le marché en cause, de se soustraire d'une concurrence effective, de s'affranchir des contraintes du marché, en y jouant un rôle directeur41(*).

Déterminer avec exactitude l'existence d'une position dominante n'est pas chose aisée. Mais, il existe des critères pour déterminer de manière visible l'existence d'une telle position. Le plus déterminant de tous, est celui de la part du marché détenu par une entreprise sur le marché en cause. Cette part de marché se calcule en tenant compte des ventes réalisées par l'entreprise concernée et celles réalisées par ses concurrents42(*).

D'autre part, lorsque la part du marché ne suffit pas à elle seule pour établir cette existence, les instances communautaires doivent recourir à des critères supplémentaires pour en juger. Il en est ainsi du degré d'intégration vertical de l'entreprise, de sa puissance financière, ou au groupe auquel elle appartient ou à l'existence de barrières à l'entrée. A titre comparatif et convergent, pour paraphraser le Dr. COULIBALY Abou Saib, au sein de l'Union européenne, l'établissement de cette position dominante se fait en référence aux critères sus dégagés. En ce sens, l'Affaire Tetra Pack II c/ Commission du 06 Octobre 1994  est fort éloquente.

Cependant, la seule existence d'une position dominante ne suffit pas à condamner une entreprise pour abus de position dominante. Pour ce faire, il faut en plus que celle-ci exploite abusivement la dite position. Dans ce registre, il faut d'emblée préciser que les textes de l'U.E.M.O.A indiquent avant toute chose que le fait pour une entreprise ou plusieurs entreprisses d'exploiter da façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie significative de celle-ci est incompatible avec le marché commun et est interdit (Cf. ; article 4 Paragraphe 4.1 du règlement no 02/2002/CM/UEMOA). Le même texte énumère les cas constitutifs d'abus de position dominante. Il s'agit, de l'imposition de façon directe ou indirecte des prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transactions non-équitables, de limiter à cet effet la production, les débouchés ou le développement technique au préjudice des consommateurs, appliquer aussi à l'égard des partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence. En outre, la subordination de la conclusion de contrats à l'acceptation, par des partenaires, de prestations supplémentaires, qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n'ont pas de lien avec l'objet de ces contrats (Cf. l'article 82 du Traité de Rome). Dans cette lancée, l'article 4 paragraphe 4.1 du Règlement no 02/2002/CM/UEMOA, assimile l'abus de position dominante, à toute opération de concentration qui crée ou renforce une position détenue par une ou plusieurs entreprises.

Mais globalement, les solutions dégagées par les textes de l'U.E.M.O.A, s'inspirent pour l'essentiel des dispositions communautaires européennes qui ne sont pas seulement limitées à l'encadrement de la concurrence des entreprises  par la régulation. En ce sens, et pour plus d'efficacité dans la mise en oeuvre du droit de la régulation communautaire, la prohibition des aides d'Etats, semble de premier ordre.

Section Deuxième : La prohibition des interventions étatiques.

Le régime communautaire en matière de régulation a engendré l'élaboration de règles qui s'appliquent directement aux entreprises, mais aussi aux Etats. Parmi lesquelles, l'interdiction des aides d'Etats dans la mesure où celles-ci affectent gravement les échanges. En ce sens, la définition large retenue par la jurisprudence, permet d'inclure dans la limitation des aides publiques (Paragraphe premier), l'obligation de libéralisation et de transparence par rapport aux monopoles et entreprises publiques (Paragraphe deuxième).

Paragraphe Premier : La limitation des aides publiques.

A vivre en groupe, on profite nécessairement de la vigilance commune. Au sein du marché commun, cet avantage ne peut être optimum que si les conditions d'une bonne concurrence, épurée de toute distorsion sont posées. Aussi, on notera très tôt qu'une concurrence juste et équitable est incompatible avec les aides octroyées par les Etats à certaines entreprises. Ces aides favorisent entre autres le déséquilibre du marché communautaire. Même si dans certaines situations bien particulières, des dérogations sont admises.

C'est l'article 88, alinéa c, du Traité U.E.M.O.A qui dégage de plein droit cette interdiction, sous réserve des exceptions limitées pouvant être prévues par le Conseil des ministres, définies à l'article 89. Une interdiction semblable existe également au niveau des règles de concurrence dans l'Union européenne. En effet, les articles 87 à 89 du Traité de la Communauté Européenne disposent de manière claire que la plupart des aides publiques sont incompatibles avec le marché commun. Poursuivant dans la même voie tracée par le Traité, le Règlement no 04/2002/CM/UEMOA réitère une telle interdiction tout en apportant une précision sur son contenu et sa portée.

Ainsi, la notion d'aide est entendue comme toute forme d'aide provenant aussi bien de la personne publique et de la forme que peut prendre cette aide. Au sens de l'article 1 alinéa b du Règlement no 04/2002/CM/UEMOA, est considérée comme aide, toute mesure qui entraine un coût direct ou indirect, ou une diminution des recettes pour l'Etat, ses démembrements ou pour tout organisme public ou privé que l'Etat institue ou désigne en vue de gérer l'aide, et confère ainsi un avantage sur certaines entreprises ou sur certaines productions.

En droit communautaire européen, aussi bien les subventions aux entreprises que les prêts, les exonérations fiscales, la gratuité des biens ou des services mis à leur disposition doivent logiquement être considérés comme des aides publiques43(*). Et s'inspirant manifestement du droit communautaire européen, le législateur U.E.M.O.A aménage des dérogations en son article 89, alinéa c du Traité, de même que le Règlement no 04-2002. A cet effet, l'article 2 Paragraphe 2.2 du Règlement 04/2002/CM/UEMOA prévoit que la Commission peut tenir compte des besoins des Etats membres en ce qui concerne leur développement économique et social, dans la mesure où les échanges entre les Etats membres et l'intérêt de la Communauté d'atteindre son objectif d'intégration, ne sont pas menacés. Dans cette lancée, l'article 3 paragraphe 3.1 du Règlement no 04//2002/CM/UEMOA énumère les six catégories d'aides considérées comme compatibles avec le marché commun, sans qu'un examen préalable de la Commission ne soit nécessaire.

Mais, la garantie d'une bonne concurrence, nécessite une libéralisation poussée et une certaine transparence par rapport aux monopoles et entreprises publiques.

Paragraphe Deuxième : L'obligation de libéralisation et de transparence par rapport aux monopoles et entreprises publiques.

Dans le but de juguler les politiques fortement centrées sur les interventions d'Etats initiées depuis les années 1990, et matérialisées par les monopoles et les entreprises publiques, les textes de l'U.E.M.O.A ont imposé aux Etats membres une certaine vision. En l'occurrence une obligation de libéralisation et l'exigence d'une plus grande transparence dans les relations financières avec les entreprises publiques et les organisations internationales. Cette option, s'inscrit dans la perspective de la pensée de Pascal LAMY44(*), pour qui une politique économique isolée dans le monde d'aujourd'hui est un quasi-suicide. Cependant, souligne t-il il ne faut pas confondre ouverture des échanges et dérégulation.

Aussi, aux termes de l'article 31 et 86 du Traité de la Communauté Européenne, les Etats membres doivent en premier lieu, soumettre, les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux et exclusifs, aux règles de concurrence et d'interdiction des ententes, des abus de position dominante et des aides publiques.

Mais, avant de cheminer plus loin, il serait intéressant d'examiner la définition d'entreprise publique posée par les textes communautaires de l'U.E et de l'U.E.M.O.A. En effet, la Directive no 01/2002/CM/UEMOA et la Directive no 80/723 du 25 Juin 1980 de la Commission sur la transparence des relations financières entre les Etats membres et les entreprises publiques, la pose comme toute entreprise sur laquelle les pouvoirs publics peuvent exercer directement ou indirectement une influence dominante du fait de la propriété, de la participation financière ou des règles qui la régissent.

De ce fait, la Commission doit veiller à l'application de l'obligation de libéralisation des monopoles et entreprises en adressant aux Etats membres, au Conseil des ministres de l'U.E.M.A.O, ainsi qu'aux autres institutions de l'Union, des avis et recommandations relatifs à tout projet de législation nationale ou communautaire susceptible d'affecter la concurrence à l'intérieur de l'Union en proposant les modifications opportunes (Cf. Article 6paragraphe 6.3 du Règlement no 2002/CM/UEMOA). Et pour appréhender de manière globale la prohibition des aides d'Etats, le droit à la concurrence exige des Etats une plus grande transparence dans leurs relations avec les entreprises ou organisations internationales oeuvrant dans leurs territoires.

En ce sens, la Directive no 01/2002/CM/UEMOA du 23 Mai 2002 impose aux Etats, une plus grande transparence. De ce fait, elle permettra à la Commission d'apprécier les effets des relations que peuvent entretenir les Etats avec les entreprises ou avec les organisations internationales et de prévenir tout désavantage qui peut entraîner une certaine opacité. Ainsi, aux termes de l'article 3 de la Directive no 01/2002/CM/UEMOA, ces prescriptions doivent être respectées dans les relations entre les pouvoirs publics et les entreprises, notamment dans ces cas limitativement énumérées : la compensation des pertes d'exploitation, les apports en capital en dotation, les apports en fonds perdus ou les prêts à des conditions privilégiées, l'octroi d'avantage financiers sous forme de la non-perception de bénéfices ou de non-recouvrement de créances, la renonciation à une rémunération normale des ressources publiques engagées la compensation de charges imposées par le pouvoirs publics.

De fait, la définition de la régulation économique posée dans toute ses acceptions et sa mise en oeuvre concrète, nous renvoient justement à la question fondamentale de l'impact de la consécration d'une véritable notion juridique de Régulation dans l'activité économique communautaire.

Deuxième Partie : L'impact de la consécration d'une véritable notion juridique de Régulation dans l'activité économique communautaire.

Aujourd'hui, nul ne peut ignorer l'importance que le juge et de façon plus large la justice, revêt dans les sociétés modernes. Certes, Montesquieu dans sa théorie de la séparation des pouvoirs lui avait donné une « fonction pratiquement nulle », en le confinant quasiment dans son rôle fondamental qui est celui de dire le droit, mais la justice, qu'elle soit, une autorité ou un pouvoir, est un des attributs essentiels de la souveraineté de tout Etat. Dans le cadre concurrentiel, et plus particulièrement au sein des grands rassemblements régionaux, sa fonction essentielle se trouve pratiquement décuplée, eu égard notamment à son rôle de protecteur du consommateur et du marché (Chapitre Premier). Cependant, on notera que le juge communautaire ouest africain gagnerait à s'inspirer des avancées de son homologue européen (Chapitre Deuxième).

Chapitre Premier : Le souci d'une double protection.

Dans le cadre des grands rassemblements régionaux, la fonction de juger revêt une importance de premier ordre. En effet, la consolidation d'une bonne politique de régulation au sein d'un espace communautaire passe par la mise en place d'un marché protégé dans un cadre concurrentiel, mais surtout d'une protection efficiente du consommateur. Aussi, si l'on peut constater la mise en place d'un marché protégé au sein de l'Union Européenne (Section Première), dans l'espace communautaire ouest africain, il n'existe pas de manière spécifique de réglementation propre à la protection du consommateur, même si une protection efficiente de celui-ci se pose (Section Deuxième).

Section Première : La mise en place d'un marché protégé au sein de l'Union Européenne.

Elle se matérialise principalement par la primauté du principe d'intégration sur la recherche de l'efficience économique (Paragraphe Premier) et l'institution d'un cadre propice à l'épanouissement des entreprises opérant dans le marché communautaire (Paragraphe Deuxième).

Paragraphe Premier : La primauté du principe d'intégration sur la recherche de l'efficience économique.

En édictant des règles en matière de concurrence, chaque État leur assigne des objectifs donnés. Ces objectifs peuvent être divers et variés, allant de la recherche de l'efficience économique à la protection du consommateur en passant par la lutte contre le pouvoir de monopole45(*). La politique de régulation de l'Union européenne semble obéir à cette réalité. Même si le Traité de Rome avait pour objet majeur d'instaurer un marché unique européen et sanctionnait à ce titre toute entrave à la libre concurrence et toute mesure d'effet équivalent, le Traité d'Amsterdam quant à lui, est préoccupé par un objectif d'intégration des marchés nationaux et exclut toute idée de préférence communautaire comme le confirment ses articles 81 et suivants. A partir de ce moment, on pourra dire que le droit communautaire européen de la concurrence s'explique différemment.

La Commission de l'Union n'hésite pas à condamner systématiquement toute pratique interdisant la libre circulation de biens et des personnes à l'intérieur de l'Union. De fait, la prohibition des réseaux interdisant toute exportation, traduit la primauté du principe d'intégration sur la recherche de l'efficience économique. Il en est de même en ce qui concerne le contrôle des marchés financiers. En effet, saisi des agissements délictuels de la société Dynabourse46(*), le Conseil des marchés financiers décide, en vertu de son rôle de régulateur du marché, de recevoir les accusations en matière pénale au sens de l'article 69 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales loi susvisée du 2 juillet 1996.

Aux vues de ce constat, notons que l'article 3, paragraphe premier, alinéa g dudit Traité, prévoit que l'action de la communauté, doit conduire à l'élaboration d'un «régime assurant que la concurrence n'est pas faussée dans le marché intérieur ». D'où la nécessité donc pour les autorités communautaires de faire respecter la libre concurrence par les Etats.

De ce fait, le rôle premier du droit communautaire de la régulation sera notamment l'encadrement des aides étatiques, l'aménagement des monopoles nationaux à caractère commercial, la limitation des droits particuliers reconnus aux entreprises chargées d'un service économique d'intérêt général. Ici, la législation Antitrust constitue un moyen parfait pour parvenir à l'objectif essentiel d'édification d'un marché intérieur. Mais, il est intéressant aussi de relever l'ambiguïté que traduit bien le vocabulaire européen qui intitule un chapitre du Traité «Politique de concurrence », alors que la commissaire à la concurrence de l'Union Européenne, Mme Neelie KROES préfère parler de «Culture de la concurrence ».

En ce qui concerne les entreprises, le contrôle des ententes et des abus de position dominante, ainsi que le contrôle des opérations de concentration économique, sont largement mises en exergue par le Traité de l'Union. A partir de ce moment seulement, apparaitra un cadre idéal d'épanouissement des entreprises opérant dans le marché communautaire.

Paragraphe Deuxième : Un cadre propice à l'épanouissement des entreprises opérant dans le marché communautaire.

Historiquement, la conception européenne de la politique d'intégration fait de la politique de la concurrence un moyen de parvenir à l'érection d'un marché intérieur sans frontières. En effet, dès le début du processus, la nature économique du Traité de la Communauté Européenne a facilité, une politique de la concurrence tournée vers l'érection d'un marché intérieur ouvert et concurrentiel. Cet objectif va insuffler une dynamique constante d'interdiction des pratiques de cloisonnement des marchés. Aux termes de l'article 69 II de la loi du 2 juillet 1996 sur les sociétés commerciales: « Les prestataires de services d'investissement, les membres d'un marché réglementé, les entreprises de marché et les chambres de compensation sont passibles des sanctions prononcées par le Conseil des marchés financiers à raison des manquements à leurs obligations professionnelles... »47(*). Dans cette lancée, le M. Jean Monnet48(*) souligne dans ses mémoires : « (...) c'était une innovation fondamentale en Europe, et l'importante législation Antitrust qui règne sur le marché commun trouve son origine dans ces quelques lignes pour lesquelles je ne regrette pas de m'être battu quatre mois durant ».

En définitive, on dira que le Traité de la Communauté Européenne porte en lui-même les germes d'un décloisonnement poussé des marchés. Aussi, il réunit les conditions optimales créant un lieu propice à l'échange, un cadre de premier ordre tourné vers l'épanouissement des entreprises. En effet, la C.J.C.E dans une interprétation combinée des articles 2, 3g et 81 de la Communauté Européenne, a ainsi posé l'objectif de création d'un marché intérieur poursuivi par la politique de la concurrence49(*) : « ...la concurrence non faussée visée aux articles 3.g et 85 [actuellement 81] du Traité C.E.E implique l'existence, sur le marché d'une concurrence efficace, c'est à dire de la dose de concurrence nécessaire pour que soient respectées les exigences fondamentales et atteints les objectifs du Traité et, en particulier, la formation d'un marché unique réalisant des conditions analogues à celle d'un marché intérieur ».

Plus récemment, le projet de directive sur les services dans le marché intérieur, ou directive « Bolkestein », présenté par la Commission européenne en janvier 2004, vise à réaliser un marché intérieur européen pour les services, en éliminant les barrières légales et administratives entre Etats membres et en facilitant la circulation des travailleurs. Elle concerne toutes les activités professionnelles qui constituent un service, à l'exception des services pour lesquels il existe déjà des initiatives spécifiques. De ce fait, l'introduction d'une simplification administrative et la suppression des autorisations jusqu'alors requises pour certaines activités, tend à instaurer « un principe du pays d'origine »50(*). Et plus encore, la Commission peut, lorsqu'elle a connaissance d'une situation de concentration, constituant une pratique assimilable à un abus de position dominante, demander aux entreprises, soit de ne pas donner suite au projet de concentration, ou de rétablir la situation de droit antérieure, soit de modifier ou de compléter l'opération ou de prendre toute mesure propre à assurer ou à rétablir une concurrence suffisante.

Ainsi, la régulation économique bâtie sur les fondements du droit de la concurrence, impactera nécessairement sur l'objectif majeur visé par le Traité de l'Union. La concurrence n'est plus alors érigée en un principe sacré et inviolable. Elle peut être restreinte si elle tend à remettre en cause l'intégration européenne, et être protégée chaque fois que les intérêts du marché intérieur le commandent51(*). Cependant, à l'intérieur de l'espace U.E.M.O.A, une protection clairement posée du consommateur fait encore défaut.

Section Deuxième : L'inexistence d'une réglementation spécifique à la protection du consommateur dans l'espace UEMOA.

C'est à la lumière des règles du droit de la concurrence qu'il conviendra de déceler, l'importance de l'apport apporté actuellement par le juge à la protection des consommateurs dans l'espace U.E.M.O.A. Ce souci de protection du consommateur, visé par la Commission, se structure sur une législation composée principalement de règlements (Paragraphe premier) et de directives (Paragraphe deuxième).

Paragraphe Premier : Des règlements propres à la législation anticoncurrentielle

Grâce à la nouvelle réglementation communautaire, les Etats parties ont mis sur pied des normes, ainsi que des structures chargées de promouvoir la protection des consommateurs, et le libre jeu de la concurrence. Dans ce registre, le Règlement n°02/2002/CM/UEMOA relatif aux pratiques anticoncurrentielles à l'intérieur de l'U.E.M.O.A énonce dès son préambule, que c'est le libre jeu de la concurrence qui constitue le cadre idéal d'épanouissement des entreprises opérant dans le marché communautaire. Par conséquent, il prohibe les ententes anticoncurrentielles, les abus de position dominante, les aides d'Etats, ainsi que les pratiques anticoncurrentielles imputables aux Etats. En ce sens, l'article 3 du Règlement dispose que : « Sont incompatibles avec le marché commun et interdits, tous accords entre entreprises, décisions d'associations d'entreprises et pratiques concertées entre entreprises ayant pour objet ou pour effet de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur de l'Union... ».

Malgré cette réglementation, on remarquera une certaine insuffisance ou absence d'une protection spécifique du consommateur à l'intérieur du marché communautaire. De ce fait, ne pouvant se prévaloir d'aucune règle spécifique, les associations de consommateurs peinent souvent à se faire entendre devant le juge. C'est toute l'étendue de l'éclaircissement de la décision FISCANO AB52(*) dans l'Union. Ainsi, le Pr. Abdoulaye SAKHO dira toute la pertinence qu'il y a dans la mise sur pied d'une organisation communautaire chargée de la défense des intérêts des consommateurs à l'image de la commission de la concurrence. Même si le Règlement n° 2/2002/CM/UEMOA essai d'aller dans le même sens, la nouveauté qu'il tente d'apporter n'en est une, en ce qui concerne le contrôle des décisions de la Commission Nationale de la Concurrence. En effet, concernant l'Etat du Sénégal, c'est le Conseil d'Etat qui connaissait des recours dirigés contre les décisions de la Commission Nationale de la Concurrence avant que cette compétence ne soit désormais reconnue, par le Traité de l'U.E.M.O.A et le Règlement n° 2/2002/CM/UEMOA entré en vigueur le 1er janvier 2003, à la Commission de l'U.E.M.O.A dont les décisions, en matière de concurrence, peuvent être censurées par la Cour de Justice de l'U.E.M.O.A53(*). Toutefois, la juridiction conserve sa compétence en matière de Télécommunications à l'égard des décisions de l'Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes (A.R.T) devenue Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes (loi n° 2006-02 du 4 janvier 2006 modifiant la loi N°2001- 15 du 27 décembre 2001 portant Code des Télécommunications).

Par ailleurs, notons qu'un véritable pouvoir règlementaire est donné à la Commission de l'U.E.M.O.A concernant les infractions constatées au sein de l'Union par le Règlement n°3/CM/2002/UEMOA qui dispose que celle-ci peut être saisie par les Etats membres ou toutes personnes physiques ou morales. Ce qui donne aux consommateurs pris individuellement et aux associations de défense des consommateurs la possibilité de se faire défendre auprès de la Commission et un intérêt à agir certain. Notons aussi que des directives de même ordre tendent à cette fin.

Paragraphe Deuxième : Des directives multiples

Dans l'espace U.E.M.O.A il n'existe aucune réglementation spécifique à la protection des consommateurs. Toutefois, cela n'équivaut pas à une absence de protection des consommateurs, dans la mesure où les textes qui semblent se spécifier au droit de la concurrence, prennent en compte la protection des consommateurs. Le droit de la concurrence et le droit de la consommation se confondent, en raison des rapports qui les lient permanemment à travers les notions de marché et des animateurs de celui-ci. Mais relativement à la gestion de l'espace ouest africain, le Conseil des Ministres sectoriel en charge des Télécommunications du 02 Décembre 2005, a approuvé dans le sillage de la Directive n° 02/2002/CM/UEMOA relative à la coopération entre la Commission et les structures nationales de concurrence des Etats membres pour l'application des articles 88, 89 et 90 du Traité de l'U.E.M.O.A les Directives suivantes54(*) :

-Directive no 01/2002/CM/UEMOA et la Directive no 80/723 du 25 Juin 1980 de la Commission sur la transparence des relations financières entre les Etats membres et les entreprises publiques,

-Directive [01]/2006/CM/UEMOA relative à l'harmonisation des politiques de contrôle et de régulation du secteur des Télécommunications ;

-Directive [02]/2006/CM/UEMOA relative à l'harmonisation du régime applicable aux opérateurs de réseaux et fournisseurs de services ;

-Directive [03]/2006/CM/UEMOA relative à l'interconnexion des réseaux et services de Télécommunications ;

-Directive [04]/2006/CM/UEMOA relative au service universel et aux obligations de performances du réseau ;

-Directive [05]/2006/CM/UEMOA relative à la tarification des services de Télécommunications ;

-Directive [06]/2006/CM/UEMOA organisant le cadre général d'une coopération entre les Autorités Nationales de Régulation (ANR) en matière de Télécommunications.

Ces directives sont adoptées le 23 mars 2006 à Abidjan.

Au titre des directives communautaires, on a celle relative à la transparence des relations financières entre l'Etat et les entreprises publiques ou les organisations internationales, et celle relative à la coopération entre la Commission et les structures nationales de la concurrence des Etats membres. En effet grâce à la nouvelle réglementation communautaire, les Etats parties ont mis sur pied des normes, ainsi que des structures chargées de promouvoir la protection des consommateurs, et le libre jeu de la concurrence.

Chapitre Deuxième : Un souci de consolidation d'une bonne concurrence communautaire.

La justice fait partie des institutions les plus importantes d'un pays, tant par son statut par rapport aux autres pouvoirs que par son rôle. L'action de la justice partout est de plus en plus attendue, les populations étant elles-mêmes de plus en plus conscientes de la nécessité pour le juge de dire le droit et de défendre leurs libertés lorsqu'elles sont menacées, notamment par les autorités politiques ou administratives. Ce faisant, le juge contribue de manière non-négligeable à la gestion de l'économie et partant à la consolidation de la concurrence. Aussi, au sein de l'Union Européenne, si l'on note la constance du juge dans ce domaine (Section Première), dans l'espace U.E.M.O.A, une certaine hésitation de celui-ci est remarquée (Section Deuxième).

Section Première : Les avancées du juge européen.

C'est surtout avec l'arrêt SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX55(*), que l'on notera de véritables avancées du juge européen en matière de régulation. En effet, pour la première fois on remarquera la théorisation d'une véritable notion juridique de régulation à travers notamment la mise à l'écart du principe de la personnalité des peines (Paragraphe premier) et l'institution d'un régime spécifique de sanctions pécuniaires dans la régulation des marchés financiers (Paragraphe Deuxième).

Paragraphe Premier : La considérable réduction du principe de la personnalité des peines.

C'est dans l'affaire « Sté Crédit agricole Indosuez Cheuvreux », que des pas de géants furent posés par le juge en matière de régulation. Dans cette affaire, le principe de la personnalité des peines a donné lieu à une mise en oeuvre très singulière. En effet, le Conseil d'État a réduit considérablement la portée de ce principe en validant les sanctions pécuniaires du Conseil des marchés financiers, « eu égard [en particulier] à la mission de régulation dont est investi » cet organisme, dont les motivations semblent exactement correspondre à celles qui, a priori, ont dû guider l'adaptation qu'on a constatée des principes de publicité des débats et d'exclusion de la saisine d'office »56(*).

En approuvant les sanctions pécuniaires abstraction faite du blâme, le Conseil d'État considère que c'est à bon droit que cette sanction a pu être prononcée contre la société ayant « absorbé intégralement » celle dont les agissements étaient en cause, sans que « le principe de personnalité des peines [n'y fasse] obstacle ».

Dès lors57(*), non seulement le Conseil d'Etat écarte l'application de l'un des principes fondamentaux du droit répressif, mais de plus, pour la première fois (à notre connaissance) la jurisprudence consacre ainsi l'existence d'une véritable notion juridique de régulation. Certes, l'expression « régulation » avait déjà été plusieurs fois employée auparavant par le juge comme par le législateur, mais sans jamais que des conséquences juridiques clairement identifiées n'y fussent attachées. En 1974 déjà, l'Avocat Général WARNIER, dans ses conclusions dans l'Affaire Commercial Solvens/Commission du 06/03/1974, avait posé des remarques qui furent fort intéressantes, mais sans suite : « (...) les autorités communautaires doivent considérer le comportement incriminé dans toute ses conséquences pour la structure de la concurrence dans le marché commun, sans distinguer entre les productions destinées à l'écoulement à l'intérieur du marché commun et celles destinées à être exportées ; que lorsque le détenteur d'une position dominante établi dans le marché commun tend vers l'exploitation abusive de celle-ci, à éliminer un concurrent également établit dans le marché commun, il est indifférent de savoir si ce comportement concerne les activités exportatrices de celui-ci, ou ses activités dans le marché commun, dès lors qu'il est constant que cette élimination aura des répercussions sur la structure de la concurrence dans le marché commun ».

Aux vues de ces constats donc, la nouveauté de l'arrêt Cheuvreux mérite amplement que l'on s'y attarde. Il instaure en effet, un nouveau cadre juridique concurrentiel propice aux acteurs économiques, évoluant dans l'environnement d'un marché commun marqué du sceau de la libéralisation, mais contrôlé. Ainsi, compte tenu d'une définition des marchés en constante évolution, le Conseil de la concurrence et les autorités judiciaires communautaires construisent les marchés et ne se contentent plus d'en assurer le contrôle : elles les régulent58(*). En posant de manière péremptoire et pour la première fois la régulation dans toutes ces dimensions, le juge se repositionne en véritable garant des relations contractuelles. En effet, s'il était vite dépassé par les règles du droit civil parce que particulièrement inadaptées à sa mission de protection de l'ordre public, il a su par cet arrêt se poser en véritable régulateur de la concurrence. Et ce, en allant dans le sens de l'institution d'un régime spécifique de sanctions pécuniaires dans la régulation communautaire.

Paragraphe Deuxième : L'institution d'un régime spécifique de sanctions pécuniaires dans la régulation communautaire.

Le droit de la concurrence est né paradoxalement de la concentration. Karl MARX avait, en effet, mis en lumière l'un des traits majeurs du capitalisme : la concentration croissante des moyens de production liée à la concurrence. La concurrence tue la concurrence dit-on. Ceci signifie que toute progression des parts de marchés se fait au détriment des concurrents, le plus souvent par voie de concentration. Ce constat va en droite ligne de l'arrêt Cheuvreux de 2000 du Conseil d'Etat. Suivant l'économie de cette affaire, le Conseil des marchés financiers a infligé à la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX, qui avait absorbé la société Dynabourse, un blâme et une sanction pécuniaire de quatre-vingts millions de francs. Néanmoins, le Conseil d'Etat ne le suivra qu'en ce qui concerne les sanctions pécuniaires.

Cette position jurisprudentielle a déjà fait l'objet d'esquisses par l'arrêt C.J.C.E du 05/10/1998 rendu dans l'affaire Société Alsacienne et Lorraine de Télécommunications et d'Electronique contre S.A Novassam. Interprétant la notion d'abus de position dominante et d'affectation du commerce entre les Etats membres, la Cour a estimé qu'il y a lieu d'en considérer la finalité « qui est de déterminer le domaine d'application du droit communautaire de la concurrence (...) et ne relève toute pratique susceptible d'influencer de manière directe ou indirecte, actuelle ou potentielle le courant d'échanges entre les Etats membres et d'entraver ainsi l'interprétation économique voulue par le Traité ».

Ainsi donc, la libre entreprise ne peut valablement se maintenir que s'il reste assez d'indépendance et d'autonomie d'un régulateur vigilant et d'une justice équitable et libre pour la défendre. En ce sens, l'ensemble des règles du droit de la concurrence est volontairement mobilisé par les autorités non seulement pour contrôler mais pour construire la concurrence. La décision de la Commission Européenne sur les aides d'Etat à la compagnie aérienne Rayanair, a ainsi été présentée « comme une décision majeure pour l'avenir du transport aérien qui conduira à un développement accru de compagnies à bas coûts dans l'Union européenne, au plus grand bénéfice des consommateurs59(*) ».

Et dans ce domaine, le juge de droit commun est assez limité, à la différence du Conseil de la concurrence, qui grâce à son pouvoir d'injonction, de suppression ou de modification des stipulations contractuelles, peut remodeler le contrat. Il ne peut que prononcer la nullité d'un contrat et cette nullité le prive en principe de toute rétroactivité. Mais, avec cette percée dans l'arrêt Cheuvreux, on est en passe de voir une véritable consolidation du droit de la régulation communautaire européen. Ce qui dans l'espace U.E.M.O.A tarde encore à se matérialiser.

Section Deuxième : L'hésitation du juge de la communauté ouest africain.

C'est au sein même des autorités judiciaires que la diffusion de la jurisprudence va être pérennisée. C'est en ce sens que sa diffusion devient institutionnalisée. De ce fait, une hésitation du juge, caractéristique d'une certaine « méconnaissance » de l'étendue de ses pouvoirs (Paragraphe Premier), aura un effet dommageable pour le respect des règles de concurrence régissant l'Union (Paragraphe Deuxième).

Paragraphe Premier : Une certaine méconnaissance de l'étendue de ses compétences.

Dans son recours pris de la violation des articles 76 et suivants du Traité de l'U.E.M.O.A, la Société des Ciments du Togo (S.C.T), a demandé à la Cour d'annuler la décision no 1467 DPCD/DC/1547 du 7 Juillet 2000 de la Commission de l'U.E.M.O.A par laquelle celle-ci s'est déclarée incompétente à mettre en oeuvre des engagements pris dans le cadre de la C.E.D.E.A.O. Pour une compréhension dudit recours, un examen des faits semble de bon aloi. En effet, dans le cadre de la libéralisation des échanges communautaires, le marché de l'U.E.M.O.A est ouvert aux produits industriels C.E.D.E.A.O, lorsqu'ils sont accompagnés d'un certificat d'origine : ils circulent donc librement et pénètrent ce marché. Aussi, en décembre 1988, la République togolaise a concédé à l'entreprise West African Ciment (WACEM), une zone franche pour produire du clinker et du ciment. Cela a permis à la WACEM de commercialiser et d'exporter son ciment en franchise des droits de douane dans les Etats membres de l'UEMOA, mais également membres de la C.E.D.E.A.O. De ce fait, les ciments WACEM et SCT se retrouvent donc sur le même espace géographique abritant deux marchés qui se chevauchent, mais qui sont distincts, chacun étant régi par sa propre législation.

Et cette mise en oeuvre de la vente des produits qui aurait provoqué une distorsion de la concurrence au regard de laquelle la Commission a déclaré son incompétence. Alors la SCT estime que cette décision est illégale et doit être annulée au regard dit-elle des articles 76 et suivants du Traité U.E.M.O.A.

Cependant, comme le souligne l'Avocat Général M. Malet DIAKITE : « En écartant sa compétence, alors qu'elle aurait dû plutôt se renseigner, et au besoin, procéder à des vérifications auprès des entreprises et des autorités togolaises et dans les marchés en cause pour savoir si les pratiques portées à sa connaissances pouvaient affecter les transactions intracommunautaires de ciment et fausser les règles communes de concurrence applicables aux entreprises, la Commission a manifestement méconnu l'étendu de ses pouvoirs et violé les textes visées aux moyens60(*) ». En cela, la Commission, a manifestement méconnue l'étendue de ses pouvoirs et violé les textes visés aux moyens.

Dans une analyse plus poussée, on dira que l'objet du recours étant une appréciation de la légalité, la compétence de la Cour s'impose en ce que le Traité lui donne droit d'appliquer et d'interpréter la légalité des actes communautaires au sens de l'article 1er du Protocole additionnel no 1, mais aussi d'apprécier la légalité des actes communautaires (article 9 du même Protocole et 27 alinéa 3 des statuts de la Cour).

En estimant aussi, que le recours est irrecevable aux motifs que la nature de l'acte ne permet pas de l'insérer dans l'ordonnancement juridique communautaire, elle a définitivement statué en déclinant sa compétence, elle confère ainsi un caractère décisoire et irrévocable à la lettre qui devient donc attaquable.

Une position jurisprudentielle similaire a pu être relevée dans l'affaire S.A Cimenteries C.B.R et autres contre Commission de la C.J.C.E du 15/03/1967: « (...) l'acte litigieux par lequel la Commission a arrêté de manière non équivoque une mesure comportant des effets juridiques affectant les intérêts des entreprises concernées et s'imposant obligatoirement à elles, constitue non un simple avis, mais une décision ». Et plus récemment la C.J.C.E dans l'affaire Fiscano contre Commission du 29/06/1994 posait: « (...) constitue une décision susceptible d'être attaquée par la voie du recours en annulation par le propriétaire du navire qu'elle concerne directement et individuellement une lettre adressée par la Commission aux autorités suédoises pour les informer d'une sanction qu'elle a prise dans le cadre de la compétence et du pouvoir d'appréciation que lui confère (...) à l'égard d'un navire suédois (...) ».

Aux vues de ces différentes positions, on est en droit de dire que « la méconnaissance » de l'étendue de ses pouvoirs, conduit le juge de la Cour de justice de l'U.E.M.O.A à un manquement dommageable pour le respect des règles de concurrence régissant l'Union.

Paragraphe Deuxième : Une déclaration d'incompétence dommageable pour le respect des règles de concurrence régissant l'Union.

La S.C.T avait dénoncé à la Commission par lettre en date du 15 Juin 2000, des pratiques de la WACEM qui entraveraient les échanges intracommunautaires de ciment et fausseraient les règles d'une saine concurrence entre les entreprises. Elle y concluait que la WACEM s'était livrée à une concurrence déloyale en violation des dispositions du Traité, notamment des articles 76 et Suivants et que la Commission devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin à ces comportements.

Il résulte des considérations qui précèdent qu'une plainte contre des pratiques qui seraient de nature à fausser l'homogénéité du marché U.E.M.O.A et à créer des distorsions de la concurrence, mérite d'être analysée par la Commission. Mais, pour toute mesure, la Commission décidait qu'elle n'était pas compétente à mettre en oeuvre des engagements pris dans le cadre de la C.E.D.E.A.O. Et comme l'indique M. DIAKITE61(*), une enquête aurait permis à celle-ci d'être suffisamment renseignée et de disposer des éléments de fait et de droit pour asseoir sa décision, à la requête d'en savoir les fondements et à la Cour d'exercer en connaissance de cause son contrôle de légalité.

Cette incompétence est-elle justifiée au regard des moyens de droit invoqués par la requérante ?

Une interprétation combinée des articles 26 (alinéas 1 et 6) et 90 du Traité établit que la mise en oeuvre des politiques communautaires de l'U.E.M.O.A, notamment celle de la concurrence ressort du domaine de compétence de la Commission. Dans l'exercice de ses prérogatives donc, cet organe doit recueillir toutes informations utiles auprès des Gouvernements, des autorités des Etats membres et des entreprises. Elle doit aussi, dans le cadre de ses attributions, assurer le plein effet des normes communautaires, en ignorant s'il y a lieu toute législation étrangère. En effet, en matière de concurrence, sa compétence s'étend à toute pratique anticoncurrentielle localisée dans l'espace communautaire constitué par le territoire des Etats membres et cette compétence est exclusive et ne saurait s'apprécier en considération des éléments de droit d'une autre communauté ou d'un statut d'une entreprise communautaire ou étrangère.

La localisation déduite de l'article 88 du Traité de l'U.E.M.O.A, permet de situer la compétence de la Commission et les effets des pratiques illicites des entreprises sur le territoire communautaire. Cette situation se trouve décuplée du fait de l'entrée en vigueur du Règlement n° 2/2002/C.M/U.E.M.O.A le 1er janvier 2003. Ce règlement confère en effet, à la Commission de l'U.E.M.O.A la compétence de trancher tous les litiges relatifs aux pratiques anticoncurrentielles prévues par l'article 88 du traité de l'U.E.M.O.A, sur l'ensemble du territoire de l'Union, sous le contrôle de la Cour de Justice.

Dans ce registre, l'affaire Syndicat des Agences de Voyages et de Tourisme du Sénégal (SAVTS)/ Compagnie Air France avait, par décision du février 2001 est fort intéressante. C'était, sans doute là l'occasion pour la Cour de prendre une décision qui serait applicable dans l'ensemble de l'U.E.M.O.A, mais elle a rendu l'arrêt n° 01/05 du 12 janvier 2005 dont le dispositif est libellé comme suit : la Cour, statuant sur la question préjudicielle soumise à elle par le Conseil d'Etat du Sénégal par arrêt n° 12/03 du 25 septembre 2003 dit pour droit que : « La Cour de justice de l'U.E.M.O.A déclare recevable le recours préjudiciel introduit par le Conseil d'Etat du Sénégal le 10 novembre 2003. La Cour de Justice de l'U.E.M.O.A n'est pas compétente pour désigner la juridiction nationale devant connaître du pourvoi formé par la Compagnie Air France. Le Conseil d'Etat devra statuer sur les dépens de la procédure de recours préjudiciel. En ce qui concerne la présente procédure, Air France et la Commission supporteront leurs propres dépens. ».

Cet arrêt montre toute la difficulté de l'application des normes communautaires en Afrique de l'Ouest alors que la Cour de Justice avait l'occasion de traiter cette affaire pour éviter que le problème se pose dans l'espace communautaire.

 
 
 

CONCLUSION :

Au terme de cette analyse d'une consécration d'une véritable notion juridique de régulation économique au sein de l'Union Européenne et de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africain, on peut retenir donc que la régulation existe. C'est une nouvelle fonction de la puissance publique, à côté de la police et du service public, notamment fonctions avec lesquelles elle entretient d'étroits rapports. Ses finalités se traduisent par la recherche d'une gouvernance institutionnelle, politique, économique et plus particulièrement, une gouvernance du marché efficace et enfin une recherche académique et des progrès des sciences sociales concrètes.

Ainsi, en ce qui concerne les règles de fond adoptées par l'U.E.M.O.A, il ressort que le juge communautaire a choisi de circonscrire son action à la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles des acteurs économiques de la sous-région. Ce qui est dommageable à notre sens, eu égard aux avancées non négligeables du juge européen dans ce domaine. Parce que, c'est au sein même des autorités judiciaires que la diffusion de la jurisprudence va être pérennisée et institutionnalisée. Dès lors, la jurisprudence devient autonome et elle ne sera plus localisée dans un espace donné, puisqu'elle est réalisée dans un cadre communautaire. Cette veille à la sauvegarde des droits et libertés constitutionnellement garantis est assumée de trois manières par le juge:

-Par l'encadrement de l'exercice du pouvoir réglementaire de l'autorité de régulation ;

-Par son pouvoir de réformation de la décision de l'organe de régulation ;

-Et par le contrôle de pleine juridiction qui semble être la contrepartie des pouvoirs exorbitants de l'autorité de régulation et des menaces qu'ils représentent pour les libertés publiques.

Dans ce sens, la mise en oeuvre du droit communautaire de la concurrence confiée à un organe de régulation, sous le contrôle du juge, vise à supprimer les barrières au libre jeu de la concurrence et à surveiller un marché concurrentiel avec des opérateurs publics et/ou privés. Elle « présuppose une application stricte du droit de la concurrence et des réglementations spécifiques aux secteurs concernés ».

Ce type de régulation est la régulation économique au sens stricte du terme et dès lors, par cette fonction de régulation, l'Etat devrait favoriser l'émergence de nouveaux opérateurs qui exercerons dans le marché concurrentiel crée par la libéralisation.

WEBOGRAPHIE

1. Sites juridiques officiels :

-Textes et jurisprudence français : http://www.legifrance.gouv.fr/

-Conseil constitutionnel : http://www.conseil-constitutionnel.fr/index.htm

-Conseil d'État : http://www.conseil-etat.fr

-Cour de Cassation : http://www.courdecassation.fr/_Accueil/plan.htm

-Portail officiel du droit Communautaire : http://europa.eu.int/eur-lex/fr/index.html

-CJCE : http://curia.eu.int/fr/index.htm

2. Régulateurs :

-ARTP : http://www.artp-senegal.org/

-ARCEP : http://www.art-telecom.fr/

-Conseil de la Concurrence : http://www.conseil-concurrence.fr/user/index.php

-Commission de régulation de l'énergie : http://www.cre.fr/

3. Organismes internationaux :

-OCDE : http:// www.oecd.org

-Service de la Gestion publique : http://www.oecd.org/puma/

-OMC : http : // www.wto.org

-Erudit : http://www.erudit.org;

-http://www.erudit.org/documentation/eruditPolitiqueUtilisation.pdf

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-Section du contentieux, 6ème et 4ème sous-sections réunies, sur le rapport de la 6ème sous-section N° 207697 -Séance du 10 novembre 2000, lecture du 22 novembre 2000 SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX.

-CJCE, 1977, cons. 20.

-CJCE, arrêt du 29/06/1994. Affaire FISCANO AB/Commission, recours en annulation, Recueil Page 2886.

-Solvens/Commission du 06/03/1974.

-Rapport public 2001 du Conseil d'Etat Français : Jurisprudences et Avis 2000.

-C.J.C.E du 05/10/1998 rendu dans l'affaire Société Alsacienne et Lorraine de Télécommunications et d'Electronique contre S.A Novassam.

-Déclaration de Loyola de Palacio à propos de la décision de la Commission du 03 Février 2004, http://miniliem.com.

-S.A Cimenteries CBR et autres contre Commission de la C.J.C.E du 15/03/1967.

-C.J.C.E Fiscano contre Commission du 29/06/1994 

-Syndicat des Agences de Voyages et de Tourisme du Sénégal (SAVTS)/ Compagnie Air France avait, Février 2001.

COURS :

-Cours « LOGIPROTECT », DESS Droit du Cyberespace Africain, Promotion 2007-2008.

-Laurence BOYE, « Le droit de la concurrence : Régulation et/ou contrôle des restrictions à la concurrence », EUI Working Paper LAW No 2004/9.

- Abdoulaye (S); Directeur -Fondateur du Forum de la régulation, « Eau -Electricité - Télécommunications Activités de régulation dans l'UEMOA», Cour de master en droit de la régulation promotion 2007-2008.

AUDIOVISUEL :

-Pascal (L), Directeur Général de l'Organisation Mondiale du Commerce ; in Emission « Internationales », 08 Février 2009 ; TV5 Monde.

MEMOIRES :

-M. Monnet (J) ; Ancien ministre français et commissaire au Gouvernement ; 1976, Page 413.

TABLES DES MATIERES

-Introduction :...............................................................................................2

-Première Partie : Tentative d'une définition de la notion juridique de Régulation...............8

-Chapitre Premier: Définitions du concept de régulation.................................................8

-Section Première: Un concept ambigu au contenu précis.................................. ..........8

-Paragraphe Premier: L'acceptation de plusieurs acceptions....................................................9

-Paragraphe Deuxième : L'intangibilité du contenu.................................................10

-Section Deuxième : L'examen des différentes modalités institutionnelles de la Régulation...12

-Paragraphe Premier : La régulation par l'intervention de l'Autorité publique...................12

-Paragraphe Deuxième : La régulation par absence d'intervention.................................13

-Chapitre Deuxième : La mise en oeuvre de la Régulation dans l'espace UEMOA...............15

-Section Première : L'encadrement de la concurrence des entreprises  par la régulation.........15

-Paragraphe Premier : L'interdiction de principe des ententes.....................................15

-Paragraphe Deuxième : L'exclusion des abus de position dominante.............................17

-Section Deuxième : La prohibition des interventions étatiques.....................................18

-Paragraphe Premier : La limitation des aides publiques............................................18

-Paragraphe Deuxième : L'obligation de libéralisation et de transparence par rapport aux monopoles et entreprises publiques........................................................................20

-Deuxième Partie : L'impact de la consécration d'une véritable notion juridique de Régulation dans l'activité économique UEMOA.....................................................................21

-Chapitre Premier : Le souci d'une double protection................................................22

-Section Première : La mise en place d'un marché protégé..........................................22

-Paragraphe Premier : La primauté du principe d'intégration sur la recherche de l'efficience économique...................................................................................................22

-Paragraphe Deuxième : Un cadre propice à l'épanouissement des entreprises opérant dans le marché communautaire......................................................................................24

-Section Deuxième : L'inexistence d'une réglementation spécifique à la protection du consommateur dans l'espace UEMOA...................................................................25

-Paragraphe Premier : Des règlements anticoncurrentiels............................................26

-Paragraphe Deuxième : Des directives multiples......................................................27

-Chapitre Deuxième : Un souci de consolidation d'une bonne concurrence communautaire....28

-Section Première : Les avancées du juge européen...................................................29

-Paragraphe Premier : La considérable réduction du principe de la personnalité des peines...29

-Paragraphe Deuxième : L'institution d'un régime spécifique de sanctions pécuniaires dans la régulation communautaire...................................................................................30

-Section Deuxième : L'hésitation du juge de la communauté ouest africain........................32

-Paragraphe Premier : Une certaine méconnaissance de l'étendue de ses pouvoirs.............32

-Paragraphe Deuxième : Une déclaration d'incompétence dommageable pour le respect des règles de concurrence régissant l'Union..................................................................34

ANNEXES :

Affaire: SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX/Commission ; 22 Novembre 2000.

Section du contentieux,

6ème et 4ème sous-sections réunies, sur le rapport de la 6ème sous-section
N° 207697 - Séance du 10 novembre 2000, lecture du 22 novembre 2000
SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX       
Texte intégral de la décision :

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, présentés pour la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX, demandant au Conseil d'Etat :

1° d'annuler la décision du 27 janvier 1999 par laquelle le Conseil des marchés financiers, statuant en matière disciplinaire, lui a infligé un blâme et une sanction pécuniaire de quatre-vingts millions de francs ;

2° de la relaxer de la procédure disciplinaire engagée contre elle ;

Vu les autres pièces du dossier ; la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 6 ; la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 ; la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 modifiée ; l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967; le décret n° 96-872 du 3 octobre 1996 ; le règlement général du Conseil des marchés financiers, homologué par arrêté du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du 9 novembre 1998 ; le règlement général du Conseil des bourses de valeur ; l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-935 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Considérant qu'au vu d'un rapport d'enquête établi par ses inspecteurs, la Commission des opérations de bourse a saisi le Conseil des marchés financiers en vue de l'ouverture d'une procédure disciplinaire à l'encontre de la société Dynabourse ; qu'à l'issue de cette procédure, le Conseil des marchés financiers a infligé à la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX, qui avait absorbé la société Dynabourse, un blâme et une sanction pécuniaire de quatre-vingts millions de francs ;

Sur les moyens relatifs à la procédure suivie devant le Conseil des marchés financiers :

Considérant, en premier lieu, que la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX soutient que la participation du rapporteur aux débats et au vote du Conseil des marchés financiers a méconnu les stipulations de l'article 6, § 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, aux termes duquel : «Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle» ;

Considérant que, lorsqu'il est saisi d'agissements pouvant donner lieu aux sanctions prévues par l'article 69 de la loi susvisée du 2 juillet 1996, le Conseil des marchés financiers doit être regardé comme décidant du bien-fondé d'accusations en matière pénale au sens des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, compte tenu du fait que sa décision peut faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant le Conseil d'Etat, la circonstance que la procédure suivie devant cet organisme ne serait pas en tous points conforme aux prescriptions de l'article 6, § 1, précité n'est pas de nature à entraîner dans tous les cas une méconnaissance du droit à un procès équitable ; que, cependant - et alors même que le Conseil des marchés financiers siégeant en formation disciplinaire n'est pas une juridiction au regard du droit interne - le moyen tiré de ce qu'il aurait statué dans des conditions qui ne respecteraient pas le principe d'impartialité rappelé à l'article 6, § 1, précité peut, eu égard à la nature, à la composition et aux attributions de cet organisme, être utilement invoqué à l'appui d'un recours formé devant le Conseil d'Etat à l'encontre de sa décision ;

Considérant que l'article 2 du décret susvisé du 3 octobre 1996 dispose : "Lorsque le conseil agit en matière disciplinaire, le président fait parvenir à la personne mise en cause (...) un document énonçant les griefs retenus, assorti, le cas échéant, de pièces justificatives ; il invite la personne mise en cause à faire parvenir ses observations écrites dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours ; l'intéressé est également informé qu'il peut se faire assister par toute personne de son choix" ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : "Les observations produites par la personne mise en cause sont communiquées au commissaire du gouvernement et à l'auteur de la saisine du conseil" ; qu'enfin, l'article 4 est ainsi rédigé : "Le président désigne, pour chaque affaire, la formation saisie et un rapporteur parmi les membres de celle-ci. Le rapporteur, avec le concours des services du Conseil des marchés financiers, procède à toutes investigations utiles. Il peut recueillir des témoignages. Il consigne le résultat de ces opérations par écrit. Les pièces du dossier sont tenues à la disposition de la personne mise en cause" ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le rapporteur, qui n'est pas à l'origine de la saisine, ne participe pas à la formulation des griefs ; qu'il n'a pas le pouvoir de classer l'affaire ou, au contraire, d'élargir le cadre de la saisine ; que les pouvoirs d'investigation dont il est investi pour vérifier la pertinence des griefs et des observations de la personne poursuivie ne l'habilitent pas à faire des perquisitions, des saisies ni à procéder à toute autre mesure de contrainte au cours de l'instruction ; qu'en l'espèce, il n'est pas établi ni même allégué que le rapporteur désigné après l'ouverture de la procédure disciplinaire consécutive à la saisine du Conseil des marchés financiers par le président de la Commission des opérations de bourse aurait, dans l'exercice de ses fonctions, excédé les pouvoirs qui lui ont été conférés par les dispositions rappelées ci-dessus, et qui ne diffèrent pas de ceux que la formation disciplinaire collégiale du Conseil des marchés financiers aurait elle-même pu exercer ; que, dès lors, il n'est résulté de sa participation aux débats et au vote à l'issue desquels il a été décidé d'infliger une sanction à la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX aucune méconnaissance du principe d'impartialité rappelé à l'article 6, § 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en second lieu, que si la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX soutient que le procès-verbal dressé le 1er avril 1998 par le service d'inspection de la Commission des opérations de bourse aurait été rédigé en contravention avec les dispositions de l'article 5 B de l'ordonnance du 28 septembre 1967 et de l'article 4 du décret du 23 juillet 1971, ce moyen n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Sur les moyens relatifs aux faits reprochés :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la télécopie adressée, le 20 mars 1998, par la personne chargée des fonctions de négociateur à la table d'arbitrage de la société Dynabourse au service conservation de ladite société, constituait un ordre d'apport de 4 089 000 actions à l'offre publique d'achat dont la date de clôture avait précisément été fixée au 20 mars 1998 ; que son annulation, postérieurement à cette date, constitue dès lors une révocation décidée en infraction avec l'article 5-2-11 du règlement général du Conseil des bourses de valeur, qui dispose que : «Les ordres peuvent être révoqués à tout moment jusque et y compris le jour de la clôture de l'offre» ; qu'il suit de là que le Conseil des marchés financiers n'a ni commis d'erreur de fait ni méconnu le principe de la présomption d'innocence en se fondant sur le grief tiré de ce que la société Dynabourse SA avait révoqué dans des conditions irrégulières l'ordre passé le 20 mars 1998 ;

Sur le moyen tiré du principe de la personnalité des peines :

Considérant que le principe de la personnalité des peines faisait obstacle à ce que le Conseil des marchés financiers infligeât à la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX un blâme à raison des manquements commis par la société Dynabourse avant son absorption par la requérante ;

Considérant, en revanche, qu'eu égard tant à la mission de régulation des marchés dont est investi le Conseil des marchés financiers qu'au fait qu'à la suite de la fusion intervenue le 6 juillet 1998, la société Dynabourse a, conformément aux dispositions de l'article 372-1 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, été absorbée intégralement par la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX sans être liquidée ni scindée, ni, en tout état de cause, l'article 121-1 du code pénal, ni le principe de la personnalité des peines ne faisaient obstacle à ce que le Conseil des marchés financiers prononçât une sanction pécuniaire à l'encontre de la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX ;

Considérant qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait méconnu le principe de personnalité des peines ne peut être accueilli qu'en ce qui concerne le blâme infligé à la société requérante ;

Sur le montant de la sanction pécuniaire :

Considérant qu'aux termes de l'article 69 II de la loi du 2 juillet 1996 : « Les prestataires de services d'investissement, les membres d'un marché réglementé, les entreprises de marché et les chambres de compensation sont passibles des sanctions prononcées par le Conseil des marchés financiers à raison des manquements à leurs obligations professionnelles (...) Les sanctions applicables sont l'avertissement, le blâme, l'interdiction à titre temporaire ou définitif de l'exercice de tout ou partie des services fournis. (...) En outre, le Conseil des marchés financiers peut prononcer, soit à la place soit en sus de ces sanctions, une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à cinq millions de francs ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés» ;

Considérant, en premier lieu, que le profit consécutif à la révocation irrégulière de l'ordre d'apport de la SNC Dynabourse Arbitrage dépend des paramètres retenus pour la valorisation des bons de cession ou de valeur garantie proposés par Allianz au titre de son offre subsidiaire ; que la société requérante soutient que l'évaluation faite par le Conseil des marchés financiers du profit que la société Dynabourse aurait tiré de l'irrégularité qui lui est imputée est entachée d'une erreur en ce qu'elle repose sur une volatilité de 20,9 %, alors que le taux de volatilité à retenir serait celui de 25 %, correspondant à la volatilité entre le 24 mars 1998 et le 3 avril 1998 des options d'achat à 360 F d'actions AGF à échéance juin 1998 ; que, toutefois, la volatilité d'une option d'achat ayant une échéance de trois mois et celle d'un bon de cession ou de valeur garantie ayant une échéance de plus de deux ans ne sont pas identiques ; qu'il suit de là que la requérante n'est pas fondée à soutenir que le Conseil des marchés financiers aurait à tort retenu un taux de volatilité évalué sur la base de la cotation des bons de cession ou de valeur garantie lors de leurs premières journées de négociation sur le marché du 23 au 30 avril 1998 ;

Considérant, en second lieu, que le montant maximum de la sanction pécuniaire susceptible d'être infligée, égal au décuple des profits indûment réalisés, étant de 225 580 250 F, le Conseil des marchés financiers n'a pas, eu égard à la gravité des faits reprochés, prononcé une sanction excessive en le fixant à quatre-vingts millions de francs ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX n'est fondée à demander l'annulation de la décision du 27 janvier 1999 du Conseil des marchés financiers qu'en tant qu'elle lui a infligé un blâme ;

D E C I D E : Article 1er : La décision du 27 janvier 1999 du Conseil des marchés financiers est annulée en tant qu'elle a infligé un blâme à la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX, au Conseil des marchés financiers et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Affaire : CIMENTERIES DU TOGO/COMMISSION DE L'UEMOA/ 20 JUIN 2001

ARRET DE LA COUR

20 juin 2001

Entre

Société des Ciments du Togo, SA et la Commission de l'UEMOA

La Cour composée de MM. Yves D. YEHOUESSI, Président ; Daniel L. FERREIRA, Juge rapporteur

; Mouhamadou NGOM, Juge ; Malet DIAKITE, Avocat Général; Raphaël P. OUATTARA, Greffier; rend le présent arrêt :

Considérant que par requête en date du 5 septembre 2000 parvenue à la Cour le 6 septembre 2000 et enregistrée au greffe de ladite Cour sous le numéro 01/2000, la Société des Ciments du Togo, par l'organe de son Conseil Maître G. K. AMEGADJIE, Avocat à la Cour d'Appel de Lomé Togo, a introduit un recours en annulation de la décision n°1467/DPCD/DC/547 du 7 juillet 2000 de la

Commission de l'UEMOA qui s'est déclarée incompétente pour enjoindre aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires pour le respect des règles de commerce et de concurrence régissant l'Union;

Considérant que la requérante expose qu'en décembre 1998, une société dénommée West African Cimento (WACEM) a été agréée par la République Togolaise comme entreprise de zone franche que l'Etat togolais venait de créer ;

Qu'aux termes de la loi togolaise relative à la zone franche, une entreprise agréée à la zone franche et qui y effectue ses activités, est une entreprise en réalité étrangère à l'économie et au territoire géographique du Togo et par conséquent de l'UEMOA ;

Que c'est pourquoi : - d'une part aux termes de l'article 27 de ladite loi togolaise, les ventes réalisées par les entreprises installées sur le territoire togolais à destination des entreprises de la zone franche, sont des exportations ;

- d'autre part aux termes de l'article 26 de la même loi, les produits d'une entreprise de la zone franche mis à la consommation sur le territoire douanier des pays de l'UEMOA, sont des exportations, lesquelles ne peuvent être effectuées que par une tierce société importatrice régulièrement installée sur le territoire douanier du Togo ;

Considérant que la requérante soutient en outre que, se prévalant de l'agrément que lui aurait donné le

Secrétariat Exécutif de la CEDEAO, la Société WACEM exporte sa production de ciment sur les territoires des Etats membres de l'UEMOA ;

Qu'elle fait observer que ces agissements de la Société WACEM, constituent des violations graves des dispositions des articles 76 et suivants du Traité de l'UEMOA instituant un marché commun des Etats membres et établissant le principe d'un Tarif Extérieur Commun au bénéfice des seules entreprises ressortissantes des territoires douaniers de chacun des Etats membres ;

Qu'elle estime dès lors que c'est en violation des dispositions du Traité de l' UEMOA que la

Commission s'est refusée à enjoindre à la République Togolaise de prendre les mesures adéquates pour faire cesser les agissements de la Société WACEM, gravement préjudiciables aux intérêts des opérateurs économiques régulièrement installés sur les territoires douaniers ;

Qu'elle sollicite en conséquence l'annulation de la décision de la Commission comme entachée d'illégalité ;

Considérant qu'à l'audience du 13 juin 2001, après lecture du rapport final par le juge rapporteur, la requérante a fait observer dans le cadre de la procédure orale :

- qu'après avoir saisi la Cour par télécopie, elle a été invitée par le greffier, par téléphone, à régulariser sa procédure ;

- qu'elle n'a jamais été mise en demeure de régulariser son recours conformément aux dispositions de l'article 32 des Statuts de la Cour ;

- d'une part aux termes de l'article 27 de ladite loi togolaise, les ventes réalisées par les entreprises installées sur le territoire togolais à destination des entreprises de la zone franche, sont des exportations ;

- d'autre part aux termes de l'article 26 de la même loi, les produits d'une entreprise de la zone franche mis à la consommation sur le territoire douanier des pays de l'UEMOA, sont des exportations, lesquelles ne peuvent être effectuées que par une tierce société importatrice régulièrement installée sur le territoire douanier du Togo ;

Considérant que la requérante soutient en outre que, se prévalant de l'agrément que lui aurait donné le Secrétariat Exécutif de la CEDEAO, la Société WACEM exporte sa production de ciment sur les territoires des Etats membres de l'UEMOA ;

Qu'elle fait observer que ces agissements de la Société WACEM, constituent des violations graves des dispositions des articles 76 et suivants du Traité de l'UEMOA instituant un marché commun des Etats membres et établissant le principe d'un Tarif Extérieur Commun au bénéfice des seules entreprises ressortissantes des territoires douaniers de chacun des Etats membres ;

Qu'elle estime dès lors que c'est en violation des dispositions du Traité de l' UEMOA que la

Commission s'est refusée à enjoindre à la République Togolaise de prendre les mesures adéquates pour faire cesser les agissements de la Société WACEM, gravement préjudiciables aux intérêts des opérateurs économiques régulièrement installés sur les territoires douaniers ;

Qu'elle sollicite en conséquence l'annulation de la décision de la Commission comme entachée d'illégalité ;

Considérant qu'à l'audience du 13 juin 2001, après lecture du rapport final par le juge rapporteur, la requérante a fait observer dans le cadre de la procédure orale :

- qu'après avoir saisi la Cour par télécopie, elle a été invitée par le greffier, par téléphone, à régulariser sa procédure ;

- qu'elle n'a jamais été mise en demeure de régulariser son recours conformément aux dispositions de l'article 32 des Statuts de la Cour ; susceptible de produire des effets de droit ;

Considérant que par mémoire en réplique en date du 26 mars 2001, la requérante soutient au contraire :

- que d'une part. même s'il est certain que l'alinéa 3 de l'article 26 du Règlement de Procédures, énonce que la requête est établie, outre l'original, en autant d'exemplaires certifiés conformes qu'il y a de parties en cause, il n'est nulle part écrit dans ce texte que les dispositions de l'alinéa 3 sont faites ad validitatem de la saisine de la Cour ;

- que d'autre part, il n'est dit nulle part que ce sont les originaux des actes (requête ou compromis) qui sont seuls de nature à saisir la Cour ; que c'est un principe général de droit qu'il n'y a ni irrecevabilité ni nullité sans texte ;

Qu'elle ajoute que par pli DHL en date du 10 novembre 2000, elle a fait tenir à Monsieur le Greffier de la

Cour. l'original et deux exemplaires de sa requête ; que c'est ce dernier qui a trouvé suffisant de notifier à la Commission une copie certifiée conforme de la télécopie de la requête ;

Considérant que la requérante a par ailleurs fait observer qu'elle a fondé son recours sur l'article 8 alinéa 2 du Protocole additionnel n °1 qui dispose que le recours en appréciation de la légalité est ouvert, en outre, à toute personne physique ou morale contre tout acte de l'Union lui faisant grief ;

Que toujours selon la requérante, la décision attaquée, signée par un Commissaire, est un acte de la Commission qui lui cause un préjudice ;

Qu'elle estime enfin que l'affirmation de la Commission selon laquelle pour être passible de recours en annulation, l'acte doit être de nature à créer une modification dans l'ordonnancement juridique préexistant, constitue un rajout illégal aux conditions légales d'exercice du recours ;

Considérant qu'il y a lieu d'abord de donner acte à la requérante de ce qu'elle renonce à ses demandes nouvelles contenues dans son mémoire ampliatif.

Considérant qu'il convient ensuite de préciser que la décision attaquée constitue bien un acte d'un organe de l'Union au sens de l'alinéa 2 de l'article 8 du Protocole additionnel n°1 relatif aux organes de contrôle ;

Qu'aux termes de cette disposition, " le recours en appréciation de la légalité est ouvert, en outre, à toute personne physique ou morale, contre tout acte d'un organe de l'Union lui faisant grief " ;

Considérant que les termes de la lettre de la Commission constituent une prise de position sur la réclamation de la société des ciments du Togo ;

Considérant que par cette lettre la Commission a arrêté de manière non équivoque, une mesure comportant des effets juridiques affectant les intérêts de la société des ciments du Togo et s'imposant obligatoirement à elle ;

Qu'au regard de ces observations. C'est en vain que la Commission tente de faire plaider que la décision n'est pas susceptible de recours en annulation ;

Considérant cependant qu'il y a lieu de constater que l'article 26 du Règlement de Procédures, qui n'est qu'une reprise de l'article 31 de l'Acte additionnel n°10/96 portant statuts de la Cour de Justice, dispose, en son alinéa 2, que la requête est établie, outre l'original, en autant d'exemplaires certifiés conformes qu'il y a de parties en cause ;

Que l'article 32 dudit acte additionnel dispose que, dans le cas où la requête n'est pas conforme aux dispositions de l'article 31, le greffier invite la requérante à régulariser son recours dans un délai qui ne peut excéder deux mois ;

Considérant que la question qu'il convient dès lors de se poser est celle de savoir si ces dernières dispositions ont été respectées ;

Considérant qu'il résulte des débats que la requérante a déclaré avoir été invitée par le greffier. Par téléphone, à régulariser son recours avant de se dédire par la suite pour affirmer qu'elle n'a jamais été mise en demeure de régulariser sa requête ;

Qu'en cet état d'incertitude et de contradiction qui demeure, c'est en vain que la requérante tente de soutenir que les dispositions de l'article 32 n'ont pas été respectées ;

Considérant que la requérante n'a transmis l'original de sa requête à la Cour que le 04 avril 2001 soit plus de deux mois après l'expiration du délai légal d'introduction de la requête ;

Considérant qu'il s'y ajoute qu'il est de règle que le dépôt de l'original de la requête dans les délais, s'impose particulièrement lors de l'introduction du recours en annulation ;

Considérant qu'il résulte donc de tout ce qui précède, que la recevabilité du recours dépend uniquement de la saisine régulière de la Cour par l'original de la requête dans le délai de deux (2) mois ;

Que par ailleurs les délais de l'article 32 des Statuts de la Cour de justice et de l'article 15 du

Règlement de Procédures sont d'ordre public ; qu'il n'appartient pas au juge ni aux parties d'en disposer à leur gré parce qu'ayant été institués en vue d'assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques ;

Qu'en conséquence, le recours tardif fait par la société des ciments du Togo par télécopie non régularisé dans les délais prévus par l'article 3, des Statuts, doit être déclaré irrecevable ;

Considérant qu'aux termes de l'article 60 du Règlement de procédures, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens ;

Considérant que la requérante a succombé en ses moyens : qu'il y a lieu de la condamner aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement contradictoirement en matière de recours en annulation :

- Donne acte à la requérante de ce qu'elle renonce aux demandes nouvelles contenues dans son mémoire ampliatif ;

- Déclare le recours irrecevable pour inobservation des dispositions de l'article 31 alinéa 3 de l'Acte additionnel n°10/96 portant Statuts de la Cour de Justice ;

- Condamne la Société des Ciments du Togo aux dépens.

* 1 Abdoullah Cissé, L'harmonisation du droit des affaires en Afrique : L'expérience de l'ohada à l'épreuve de sa première décennie, Revue Internationale de Droit Economique 2004- 2 (t. XVIII, 2)| ISSN 1010-8831 | ISSN numérique : en cours ISBN : 2-8041-4450-X | page 197 à 225.

* 2Toutefois, au-delà des soucis de rationalisation du système juridique africain, le Traité de l'OHADA s'inscrit dans un vaste mouvement de régulation des relations juridiques supervisé par les institutions financières internationales et ressortissant de la logique de fonctionnement du marché.

* 3 Télécoms, Banques, Marchés financiers, etc.

* 4 Rapport 2002 ; OMC ; « Marché et concurrence : Globalisation et transparence».

* 5 COULIBALY Abou Saib ; Docteur en Droit, Maitre-assistant, UFR /SJP Université de Ouagadougou, « Le Droit de la Concurrence de L'Union Economique et Monétaire Ouest Africain ».

* 6 On notera que c'est dans le cadre de l'Organisation Commune Africaine et Malgache que le Bureau Africain et Mauricien de Recherches et d'Etudes Législatives (BAMREL) fut crée pour l'élaboration de lois unifiés s'appliquant directement dans les Etats d'Afrique francophone. Cependant, cela s'avère être un échec !

* 7 Il s'agit d'un recours en nullité des sociétés continental can Company, établie à New York, et de sa filiale Europemballages Corporation, établie à Bruxelles, contre une décision de la Commission du 9 décembre 1971, relative à une procédure d'application de l'article 86 du Traité.

* 8 L'Union européenne est une construction d'un nouveau type, sans précédent historique, entre des États différents appartenant à l'Europe. L'Union européenne, en tant qu'institution, ne dispose pas de la personnalité juridique. Elle dispose cependant de compétences propres ( politique agricole commune (PAC), pêche, etc.), ainsi que des compétences qu'elle partage avec ses États membres. Il s'agit d'une organisation qui combine, suivant les domaines d'actions, le niveau supranational et le niveau intergouvernemental, sur un champ géographique restreint (comme le Mercosur, l' Association des nations de l'Asie du Sud-est, etc.) mais avec un rôle politique propre plus important que pour les autres organisations et un pouvoir de contrainte sur ses membres plus important.

* 9 COULIBALY Abou Saib ; Docteur en Droit, Maitre-assistant, UFR /SJP Université de Ouagadougou, « Le Droit de la Concurrence de L'Union Economique et Monétaire Ouest Africain ».

* 10 Bertrand du MARAIS ; « Droit public de régulation économique » ; Page 482.

* 11 Gérard Marcou, Pr. à l'Université Paris I (Panthéon Sorbonne): La régulation exprime ainsi la responsabilité ultime des gouvernants quant au niveau de satisfaction de certains besoins considérés comme essentiels.

* 12 Mondialisation (globalisation).

* 13 Par exemple le consommateur qui est très préoccupé par un service de qualité à des prix accessibles.

* 14 Pr. Abdoulaye SAKHO, Cours DESS Droit du cyber espace africain, « La régulation des Télécommunications », 2007-2008.

* 15 Cette notion n'est peut-être pas absente de l'esprit de certains. Pour les technocrates Jacobins, elle rejoindrait l'idée d'un contrôle ferme exercé par l'Etat sur les marchés. Au contraire, elle est critiquée par les libéraux viscéralement opposés à tout contrôle.

* 16 A-S. Mescheriakoff, Droit public économique, PUF, coll. Droit fondamental, 1994 ; D. Linotte et Romi, Services publics et droit économique, Litec, 4e éd., 2001.

* 17 Marie-Anne Frison-Roche ; Le droit de la régulation, Dalloz ; 2001 Chron. Page 610.

* 18 Conseiller d'État, directeur de Sciences-Po, in « La nécessité d'une réflexion générale et croisée sur la régulation: L'autorité du régulateur ».

* 19 Bertrand du Marais, Droit public de la régulation économique, Page 482.

* 20 Pr. Jean PAILLUSSEAU Prospectives du Droit économique, Dialogues avec Michel JEANTIN, Dalloz, p 97.

* 21 Prospectives du Droit économique, Dialogues avec Michel JEANTIN, Philippe DELEBECQUE (Clausula, Clausulae, Clausularum..., Dalloz, p 34 ; Michel JEANTIN.

* 22 Bien que nul ne doute que la jurisprudence soit, dans une certaine mesure, une source du droit.

* 23 Exemple : Arrêt de la Cour, 20 Juin 2001, Société des Ciments du Togo SA/La Commission de l'UEMOA, que nous développerons dans les pages qui suivent.

* 24 V. Les différentes définitions de la régulation, in « La régulation : monisme ou pluralisme ? », n° spécial des Petites Affiches, 10 juil. 1998, p. 5 et s. Sur le principe même de la pertinence de plusieurs définitions, v. A. Jeammaud, Introduction à la sémantique de la régulation juridique. Des concepts en jeu, in Les transformations de la régulation juridique, LGDJ, coll. « Droit et société. Recherches et travaux », 1998, p. 47-72, p. 53.

* 25 A.R.T.P au Sénégal, A.R.T.E.L au Burkina Faso et ARCEP en France etc.

* 26 Bertrand du Marais, Droit public de la régulation économique, Page 482.

* 27 En l'occurrence une définition technique, une définition en termes de politiques économiques et enfin une autre selon la sociologie politique selon Bertrand du Marais.

* 28 FRISON-ROCHE M. (A); Professeur des Universités à Sciences Po, directeur de la chaire Régulation ; « Définition du droit de la régulation économique ».

* 29 J.-Cl. Thoering, L'usage analytique du concept de régulation, in J. Commaille et B. Jobert (dir.), Les métamorphoses de la régulation politique, LGDJ, coll. « Droit et société », 1998, p. 35-53, p. 35.

* 30 SAKHO Abdoulaye Directeur -Fondateur du Forum de la régulation, « Eau -Electricité - Télécommunications
Activités de régulation dans l'UEMOA»,
Cour de master en droit de la régulation promotion 2007-2008.

* 31 V. F. Hayek, Droit, législation et liberté, 3 t. rééd. PUF, coll. « Quadrige », 1995, spéc. Le premier tome, Règles et ordre. 8.

* 32 M. Boiteux et C. Henry, « Services publics et concurrence : Leçons des expériences européennes », Annales des mines. Gérer et comprendre, 53, 1998, Page 4-15.

* 33 R. Chapus, « Droit administratif général, 12e éd., Paris, Montchrestien, 1998, L'administration consultative, no 607 et s.

* 34 Cours « LOGIPROTECT », DESS Droit du Cyberespace Africain, Promotion 2007-2008.

* 35 Association de marchands et d'artisans au Moyen-âge, dans le Nord de la France et en Flandre.

* 36 B. du Marais, « Quelle sécurité juridique pour un développement économique durable ? Le cas du microcrédit villageois » Actes de la journée d'études Développement rural durable, Académie des sciences morales et politiques et l4Académie des Sciences, Paris, Editions Tec et Doc, 2000, Page 199-217.

* 37 OCDE, « Coopération en matière de réglementation dans un mode interdépendant », Paris, 1994, Page 270 ; « La réforme de la réglementation », Paris, 1997.

* 38 On pourrait parler des organes de régulations comme ceux des Télécommunications, des marchés publics, de l'électricité, de l'Audiovisuel etc. cependant on a préféré les renvoyé a l'Annexe.

* 39 Note 1 de l'Annexe 1 du Règlement no 03/2002/CM/UEMOA.

* 40 COULIBALY Abou Saib ; Docteur en Droit, Maitre-assistant, UFR /SJP Université de Ouagadougou, « Le Droit de la Concurrence de L'Union Economique et Monétaire Ouest Africain ».

* 41 Note 3 de l'Annexe no 1 du Règlement no 03/2àà2/CM/UEMOA.

* 42 Note 3 de l'Annexe no 1 du Règlement no 03/2002/CM/UEMOA.

* 43 Gérard CAS, Roger BOUT, Etienne PETIT, « Lamy droit économique (1996) : concurrence, distribution, consommation », op/cit, Pages 680-681.

* 44 Pascal LAMY, Directeur Général de l'Organisation Mondiale du Commerce ; in Emission « Internationales », 08 Février 2009 ; TV5 Monde.

* 45 Karounga Diawara ; Review of European and Russian Affairs vol. 2 issue 1/2006 ; « Politique de la concurrence et intégration des marchés intérieurs : analyse comparative entre les perspectives canadienne et européenne (U.E) ».

* 46 Section du contentieux, 6ème et 4ème sous-sections réunies, sur le rapport de la 6ème sous-section N° 207697 -Séance du 10 novembre 2000, lecture du 22 novembre 2000 SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX.

* 47 Section du contentieux, 6ème et 4ème sous-sections réunies, sur le rapport de la 6ème sous-section N° 207697 -Séance du 10 novembre 2000, lecture du 22 novembre 2000 SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX.

* 48 M. Monnet (J) ; Ancien ministre français et commissaire au Gouvernement ; 1976, Page 413.

* 49 C.J.C.E, 1977, cons. 20.

* 50 Les entreprises et prestataires de services ne seraient plus soumis aux dispositions réglementaires (normes sociales, environnementales, etc.) du pays où ils opèrent, mais à celles de leur pays d'origine (où se trouve leur siège social), sauf pour certains éléments du droit du travail.

* 51 Karounga Diawara ; Review of European and Russian Affairs vol. 2 issue 1/2006 ; « Politique de la concurrence et intégration des marchés intérieurs : analyse comparative entre les perspectives canadienne et européenne (U.E) ».

* 52 CJCE, arrêt du 29/06/1994. Affaire FISCANO AB/Commission, recours en annulation, Recueil Page 2886.

* 53 Monsieur Oumar Gaye, Conseiller référendaire, Conseil d'Etat du Sénégal.

* 54 Nous avons opté mettre à titre d'exemple ces Directives relatives au secteur des Télécoms, abstraction faite des autres. Ce qui ne signifie nullement cependant, que nous allons passer sous silence les Directives qui réglementent les autres secteurs économiques.

* 55 Section du contentieux, 6ème et 4ème sous-sections réunies, sur le rapport de la 6ème sous-section N° 207697 -Séance du 10 novembre 2000, lecture du 22 novembre 2000 SOCIETE CREDIT AGRICOLE INDOSUEZ CHEUVREUX.

* 56 Même arrêt !

* 57 Dans cette affaire, étaient en cause deux sanctions (une sanction pécuniaire et un blâme) prononcées contre une société pour des faits commis par une seconde société, absorbée entre-temps par la première.

* 58 Laurence BOYE, « Le droit de la concurrence : Régulation et/ou contrôle des restrictions à la concurrence », EUI Working Paper LAW No 2004/9.

* 59 Déclaration de Loyola de Palacio à propos de la décision de la Commission du 03 Février 2004, http://miniliem.com

* 60 Conclusions de l'Avocat Général Malet DIAKITE ; Affaire : « Société des Ciments du Togo SA/Commission de l'UEMOA.

* 61 Conclusions de l'Avocat Général Malet DIAKITE ; Affaire : « Société des Ciments du Togo SA/Commission de l'UEMOA.






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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand