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Le contentieux de la fonction publique communautaire de la CEMAC

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par Zulandice ZANKIA
Université de Dschang - Cameroun - Diplôme d'études approfondies (DEA) 2008
  

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PREMIERE PARTIE: LE DOMAINE DU CONTENTIEUX DE LA FONCTION PUBLIQUE COMMUNAUTAIRE

Le contentieux de la fonction publique communautaire peut être présenté suivant deux critères fondamentaux: l'origine et la nature du contentieux. D'après l'origine du contentieux, on peut distinguer plusieurs types de problèmes. On parlera d'abord du contentieux disciplinaire, c'est-à-dire le contentieux qui a pour base une faute disciplinaire. La faute disciplinaire étant définie en droit communautaire comme tout manquement aux obligations auxquelles tout fonctionnaire est tenu au titre de leur statut et des règlements pris pour son application39(*). En zone CEMAC, la faute disciplinaire s'applique aux fonctionnaires encore en fonction, alors que dans l'Union Européenne, celle-ci s'étend aux anciens fonctionnaires de la communauté40(*). La fonction publique CEMAC consacre deux types de sanctions disciplinaires: les sanctions dites majeures et les sanctions dites mineures en fonction de la gravité de la faute41(*).

Il s'agira ensuite des autres contentieux n'ayant pas une origine disciplinaire, à savoir le contentieux pécuniaire et les autres contentieux lié à la carrière du fonctionnaire42(*). Le contentieux pécuniaire porte sur la rémunération des agents en terme de traitement de base et accessoires du salaire tels que les indemnités annexes et autres avantages. Le juge communautaire a eu à se prononcer plusieurs fois sur le calcul du traitement des agents et fonctionnaires de la communauté. Il en était question dans l'affaire Thomas Dakayi Kamga, et dans l'affaire Asngar Miayo c/ EIED43(*). Quant au déroulement de la carrière du fonctionnaire44(*), on parlera du contentieux de l'accès à la carrière d'une part et le contentieux de promotion de grade ou d'échelon d'autre part. Le contentieux de recrutement est abondant devant les juges administratifs internationaux et communautaires45(*). Le juge communautaire CEMAC n'a pas encore eu assez d'occasions pour se prononcer sur ce point, mais il a déjà statué sur la promotion de grades et d'échelon dans l'affaire ASNGAR MIAYO précitée et sur contentieux de sortie de la fonction publique.

En fonction de sa nature, le contentieux de la fonction publique peut revêtir deux formes. On peut distinguer le contentieux subjectif et le contentieux objectif. D'après les pouvoirs du juge saisi, Edouard LAFERRIERE46(*) a donné une classification du contentieux en quatre branches qui est à l'origine d'une distinction fondamentale toujours actuelle, celle qu'il opérait entre le contentieux de l'annulation et le contentieux de pleine juridiction. Nous déterminerons le domaine du contentieux de la fonction publique communautaire selon la finalité de la réclamation du requérant. Ce qui conduira à étudier dans un premier chapitre le contentieux de la légalité et dans un second chapitre le contentieux de la responsabilité dans la fonction publique communautaire.

CHAPITRE I : LE CONTENTIEUX DE LA LEGALITE DANS LA FONCTION PUBLIQUE COMMUNAUTAIRE

Le contentieux de la légalité regroupe l'ensemble des litiges soumis devant le juge communautaire qui ont pour finalité le respect des normes communautaires intéressant la condition des agents de la communauté. Précisons que la notion de légalité peut avoir une extension très large. En effet, « elle ne comprend pas seulement les règlements, mais aussi les principes généraux du droit et la jurisprudence »47(*). Dans le cadre du contentieux de la fonction publique communautaire, la légalité se mesure par rapport aux statuts du personnel, aux textes d'application desdits statuts, tels que les résolutions du conseil d'administration ou des actes des dirigeants des institutions et organes de la communauté. Le contentieux de la légalité peut être divisé en fonction de l'objet des recours en plusieurs branches. Il s'agira tantôt du contentieux de l'annulation, ou du contentieux de l'interprétation, ou encore du contentieux de l'inaction de l'administration communautaire. En application de l'article 48 al.3 du Statut de la Chambre Judiciaire de la Cour de Justice de la CEMAC, la Cour « connaît des recours en contrôle de la légalité des actes juridiques déférés à sa censure ». Nous étudierons le contentieux de l'annulation (SECTION I) et celui de l'interprétation (SECTION II).

SECTION I : LE CONTENTIEUX DE L'ANNULATION

Le contentieux de l'annulation vise les actes entachés d'un excès de pouvoir pris par une autorité administrative au sein de la communauté. Il trouve son fondement dans les articles 11 et 15 de la convention régissant la Cour de Justice Communautaire. La sanction prévue par l'article 15 de ladite convention est la déclaration de non conformité des actes soumis au contrôle de la légalité. Il s'agit là d'une réglementation étonnante de la part du législateur communautaire, car comment peut-on prévoir la simple non conformité comme sanction à l'illégalité de l'acte? Heureusement que le juge communautaire a compris l'enjeu du problème et accepte de recevoir les recours en annulation des actes communautaires48(*). Nous examinerons les conditions requises pour annuler un acte communautaire (Paragraphe I) puis les conséquences liées à l'annulation de l'acte (Paragraphe II).

Paragraphe I : Les conditions requises pour l'annulation de l'acte

Le recours pour excès de pouvoir est un recours largement ouvert sans qu'il ne soit prévu par un texte en vertu des principes généraux de droit qui reconnaissent l'existence de recours contre tout acte administratif. Edouard LAFERRIERE le définit comme « le procès fait à un acte »49(*) et en tant que tel, la question centrale qui devait être examinée devant le juge sera celle de la légalité de l'acte attaqué, mais cela ne signifie pas que l'application de la décision du juge ne puisse entraîner la prise en compte des droits subjectifs. Ce sera le cas de l'annulation d'une décision administrative portant licenciement d'un fonctionnaire qui entraîne sa réintégration dans son service et à son poste de travail. Le juge communautaire CEMAC a déjà eu à se prononcer en ce sens sur l'affaire Mokamanede John Wilfried c/ EIED de la CEMAC50(*). Pour que l'annulation de l'acte soit obtenue, il faut que deux conditions essentielles soient réunies: les conditions tenant à l'acte attaqué (A) et les conditions relatives à la personne du requérant (B).

A: Les conditions tenant à l'acte attaqué

Les actes qui peuvent être attaqués devant le juge pour annulation doivent être des actes pris par des institutions, organes de la communauté et surtout ceux pris par les autorités administratives chargées de la gestion de la carrière des fonctionnaires et autres agents de la communauté. Les textes de base pouvant servir à l'appréciation de la légalité dans le contentieux de la fonction publique communautaire peuvent être classés en trois catégories, à savoir les normes statutaires, les normes "infra statutaires" et les normes "supra statutaires".

Les normes "infra statutaires" ont été définies par BIANCARELI Jacques51(*) (ancien juge au Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes) comme « les dispositions générales d'exécution du statut et des directives internes adoptées par chaque institution ». Il n'est pas exclu que le contentieux porte sur une norme supra statutaire en application du texte sur les privilèges et immunités de la communauté. Deux conditions méritent d'être étudiées: l'existence d'un acte fautif (1) et la nature de l'acte attaquable (2).

1: L'existence d'un acte fautif

Pour être annulé, l'acte communautaire pris dans la gestion de la carrière des fonctionnaires et autres agents, doit être entaché d'un vice de forme ou de fond.

a: Le contrôle de la légalité externe

Encore appelé « moyen d'illégalité externe »52(*), il s'applique à la violation des règles de forme, de procédure et des règles de compétence. Cependant, le vice de forme, pour entraîner l'annulation de l'acte, doit être substantiel audit acte tel que le non respect de la procédure contradictoire ou consultative et l'absence de motivation. Malgré la violation d'une formalité substantielle de l'acte, le juge doit aussi chercher à savoir si l'auteur de l'acte était dans la possibilité d'agir légalement. C'est ici qu'une distinction devra être faite par le juge entre "formalités possibles" et «formalités impossibles". L'une des causes d'annulation de l'acte communautaire réside dans le respect des règles de compétence dans toutes ses dimensions, à savoir la compétence territoriale et surtout la compétence matérielle et personnelle. Le juge communautaire CEMAC a déjà eu à se prononcer sur la question de compétence dans l'affaire MOKAMANEDE précitée, où le Directeur de l'Ecole Inter-Etats de Douane a licencié ce dernier53(*), alors que le « licenciement des agents de l'encadrement supérieur relève de la compétence du conseil d'administration »54(*). En statuant ainsi, le juge a débouté le directeur de l'école des moyens de fond soulevés pour sa défense.

b: Le contrôle de la légalité interne

Il s'agit de la recherche d'un vice de fond dans l'acte pris par l'autorité administrative communautaire. En droit administratif interne comme en droit administratif communautaire, le juge se contentera à ce niveau de vérifier s'il y a eu violation de la règle de droit ou détournement de celle-ci pour un objectif autre que l'intérêt général communautaire. Relève du contrôle de la violation directe de la règle de droit, l'examen de la conformité de la décision de l'autorité administrative ou de l'organe communautaire aux règles de fond contenues dans les statuts ou dans les contrats, qu'il s'agisse de l'entrée en service, de la rémunération, des avancements ou de la discipline55(*). La Chambre Judiciaire de la Cour de Justice de la CEMAC s'est déjà prononcée plusieurs fois sur le sens du terme traitement, ce qui lui a permis de donner un sens large au terme traitement contrairement à ce que pensait l'autorité communautaire56(*). En droit du contentieux de la fonction publique internationale, le juge fait recours aux règles officieuses que les organisations ont adopté pour contrôler la légalité de leurs actes. C'est ce que le Tribunal Administratif de l'Organisation Internationale du Travail (TAOIT) applique souvent au nom de l'adage « patere legem quam fecisti »57(*). Nous espérons que le juge communautaire de la CEMAC fera recours à cet adage dans la gestion des conflits du travail entre les agents et la communauté pour ne pas se limiter seulement à la légalité formelle.

La notion de détournement de pouvoir permet au juge de contrôler les buts poursuivis par les auteurs de l'acte attaqué. Si la décision a été prise en fonction des intérêts personnels des dirigeants, contrairement à l'intérêt de la communauté, le juge en tiendra compte pour apprécier la validité de l'acte. C'est en réalité le contrôle des motifs ayant présidé à l'adoption de l'acte. Ce qui n'est pas une tâche facile, mais reste très important pour une bonne administration de la justice. Le juge n'hésitera pas à cet effet à annuler l'acte lorsque les motifs sont inexistants ou contradictoires58(*). La Chambre Judiciaire de la Cour de Justice de la CEMAC a eu l'occasion de se prononcer sur les motifs d'un acte de licenciement, mais n'a pas pris position puisqu'elle n'a pas examiné l'affaire au fond59(*).

Pour annuler l'acte, le juge tient compte de son caractère fautif. Il ne suffit cependant pas que l'acte soit fautif, la nature dudit acte doit également être prise en compte.

* 39 V. art. 75, Statut des fonctionnaires du Secrétariat Exécutif ; art. 85, Statut du personnel de l'ISTA.

* 40 V. art. 86, Statut des fonctionnaires des Communautés Européennes.

* 41 V. art. 76, Statut des fonctionnaires du Secrétariat Exécutif  de la CEMAC, voir annexe II.

* 42 BIANCARELI (J.) : « Le juge communautaire et le contentieux de la fonction publique communautaire », in Contentieux de la fonction publique internationale, Acte des journées d'études de Paris, Pedone, 1996, p. 203.

* 43 Arrêt n° 004 / CJ / CEMAC / CJ / 03 du 17 juillet 2003, Thomas Dakayi Kamga c/ CEMAC; Arrêt n° 003 / CJ / CEMAC / CJ / 05, Asngar Miayo c/ EIED, in Recueil de Jurisprudence de la CJ. CEMAC, annexe III.

* 44 PELLET (A.) : « La carrière des fonctionnaires internationaux », in, Les agents internationaux, Paris, Pedone, 1985, pp. 163 et s.

* 45 TFPCE ; Aff. F-22 /05, du 13 décembre 2006, Neophytos Neophytou c/ Commission ; Aff. F-12/05 du 11 juillet 2006, David Tas c/ Commission ; TANU, jugement n° 2004, OMS du 31 janvier 2001.

* 46 LAFERRIERE (E.) : Traité de la juridiction administrative et des recours contentieux, 1888, cité par CAUVIN (D.) : Pratique du contentieux de la fonction publique, Paris, Berger-Levrault, 1999, p. 21.

* 47 CAUVIN (D.) : Pratique du contentieux de la fonction publique, Paris, Berger-Levrault, 1999, p. 23.

* 48 Aff. Mokamanede John Wilfrid c/ EIED, arrêt n° 02 / CJ / CEMAC / CJ / 06 du 30 novembre 2006, annexe III.

* 49 Cité par CAUVIN (D.) : ouvrage précité, p. 22.

* 50 Arrêt n° 02 / CJ / CEMAC / CJ / 06 du 30 novembre 2006, précité, annexe III.

* 51 BIANCARELI (J) : « Le juge communautaire et le contentieux de la fonction publique communautaire », op. cit. p. 202.

* 52 BILONG (S.) : Cours de Droit Administratif Général, Université de Dschang, Faculté des Sciences Juridiques et Politiques, niveau 2, 2006/ 2007, non publié.

* 53 Décision n° 72 / CEMAC / EIED, du 17 novembre 2005.

* 54 Arrêt n° 02 / CJ / CEMAC / CJ / 06, du 30 novembre 2006, inédit, voir annexe III.

* 55 GENTOT (M.) : « Contrôle de la légalité et limite du pouvoir disciplinaire », in Contentieux de la fonction publique internationale, Paris, Pedone, 1996, p. 245.

* 56 Aff. Gozzo Samuel Aaron c/ CEBEVIRHA, arrêt n° 001/ CJ / CEMAC / CJ / 03 du 20 février 2003.

* 57 GENTOT (M.) : « Contrôle de la légalité et limite du pouvoir disciplinaire », article précité, p. 245.

* 58 V. TAOIT, Aff. N° 1204, Anderson, du 10 février 1993.

* 59 Aff. Mokamanede, Op. Cit.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand