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La participation du salarie au fonctionnement de la societe anonyme en droit ohada

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par Essoham Komlan ALAKI
Université de Lomé - DESS Droit des affaires 2004
  

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INTRODUCTION

Au commencement était la propriété des biens. Celle-ci était entre les mains du propriétaire qui l'exploitait en vue d'un plus grand profit. Devant l'importance et les contraintes liées à l'extension de l'exploitation individuelle, il a recouru au mécanisme juridique mis à sa disposition par le législateur en vue de la réunion des capitaux : la société1(*).

Ainsi, le droit commun des sociétés commerciales distingue, suivant leur régime, entre les sociétés de personnes et les sociétés de capitaux2(*). Dans les sociétés de personnes où l'intuitus personae est prédominant, les associés sont tenus solidairement et indéfiniment des dettes résultant de l'exploitation commerciale. A côté des sociétés de personnes, le législateur a

« institué » 3(*) les sociétés de capitaux dont la plus représentative est la société anonyme (SA). Suivant l'article 385 al.1er AUDSCGIE la société anonyme est « une société dans laquelle les actionnaires ne sont responsables des dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et dont les droits des actionnaires sont représentés par des actions ».

Dans le droit OHADA, la logique du fonctionnement de la société anonyme est la suivante : les associés, « propriétaires » de la société, ne peuvent pas, tous ensemble, la diriger. Il faut donc mandater une personne à cet effet. Mais la société anonyme est, par essence, une société de capitaux, c'est-à-dire une structure appelée, hormis l'hypothèse de la société anonyme unipersonnelle prévue par l'article 385 al 2, à réunir un grand nombre d'associés. La démocratie directe est plus difficile à appliquer, raison pour laquelle le législateur a choisi une démocratie indirecte, permettant ainsi la constitution d'organes intermédiaires chargés de la diriger au quotidien. Dans cette mesure, l'Assemblée Générale des actionnaires, organe souverain et hiérarchique, est compétente pour modifier les statuts, approuver les comptes, élire les autres organes et mettre fin à leurs fonctions.

Le Conseil d'Administration est chargé de déterminer les grandes lignes stratégiques. Composé d'actionnaires promus administrateurs4(*), il confie à un Président- Directeur Général (PDG) ou à un Président du Conseil d'Administration (PCA) et à un Directeur Général (DG) le soin de les mettre en oeuvre5(*). C'est à ce titre que lui incombe la gestion.

Dans le cadre de son activité, la société anonyme passe des contrats avec des personnes physiques ou morales. Les salariés sont de celles - là. Ils fournissent, en vertu d'un contrat de travail, leurs services plus ou moins spécialisés à la société et perçoivent en contrepartie un salaire. Le salarié est donc un travailleur c'est-à-dire « toute personne qui s'est engagée à mettre son activité professionnelle, moyennant rémunération, sous la direction et l'autorité d'une personne, physique ou morale, publique ou privée »6(*). Il s'agit ainsi des ouvriers, des employés, des agents de maîtrise, des techniciens et assimilés, des cadres ou des ingénieurs et assimilés7(*).

Le droit du travail règle les rapports entre les salariés et leur employeur : la société anonyme. Le droit des sociétés est en principe étranger aux problèmes des salariés8(*). Mais les choses ont évolué. Sous l'action de la mondialisation, les économies tendent à devenir un gigantesque « monopole » qui ne tient aucun compte du fait fondamental que les entreprises sont constituées d'hommes et de femmes qui y consacrent une grande partie de leur vie et apportent leur talent et leur dévouement. Or, l'avenir de ces entreprises et de leurs salariés ne peut dépendre uniquement des préoccupations strictement financières. Il est donc indispensable d'associer le personnel non seulement à la détermination des conditions de travail, mais aussi à l'exercice du pouvoir. Telle est la préoccupation majeure de ce travail : la participation des salariés au fonctionnement de la société anonyme en droit OHADA.

En effet, participer consiste à coopérer, à prendre part à quelque chose dont on partage la responsabilité patrimoniale ou professionnelle. La participation des salariés désigne les voies et moyens qui permettent au salarié d'exercer une influence plus grande sur des questions économiques, sociales et professionnelles de son entreprise individuelle ou sociétaire. Si la participation du salarié se résume habituellement à son association, par l'intermédiaire de ses représentants (Délégués du personnel), à la détermination des conditions générales de travail dans l'entreprise9(*), elle prend une ampleur nouvelle dans les sociétés anonymes. Ici, la participation suppose non seulement la mise à la disposition du salarié d'une plus grande information10(*), mais aussi sa prétention à participer au pouvoir de décision de la société jusque là détenu par les actionnaires.

Selon les modalités, on distingue entre la participation obligatoire imposée par la loi et la participation volontaire fondée sur le libre choix laissé aux employeurs et aux salariés d'instituer la participation au moyen d'accords individuels ou de conventions collectives. Selon la forme, la participation des salariés au fonctionnement de la SA recouvre la participation à la gestion (accès des salariés aux organes sociaux) et la participation financière (détention d'une fraction du capital social et vocation aux résultats de la société).

Cette prétention du salarié à participer au pouvoir patrimonial et moral de la firme s'accommoderait fort bien avec une mentalité socialiste qui a pendant longtemps rêvé d'une société sans classe.

Au XIXe siècle, la participation salariale est apparue comme une réponse aux contradictions de l'économie capitaliste naissante. On y rencontre plusieurs théories aux relents politiques et philosophiques. C'est ainsi que le courant « utopiste », le plus radical, propose de dépasser l'opposition entre capital et travail par une nouvelle organisation salariale fondée sur l'association. Le courant « humaniste », proche de la doctrine sociale de l'Eglise, estime que la participation permet d'assurer la dignité de l'homme au travail11(*). Le courant « productiviste » quant à lui, fait de la participation du salarié aux résultats et au capital, un facteur d'amélioration quantitative et qualitative des résultats de l'entreprise par la motivation des salariés de l'entreprise.

La pertinence de ces débats n'a pas réussi à ancrer la participation dans la conscience collective. Il a fallu attendre la fin de la première moitié du XXe siècle pour voir apparaître la forme la plus élaborée de la participation », la notion gaulliste de la participation qui devrait faire du salarié un « associé ».

Cependant, cette richesse du débat doctrinal n'a pas été cristallisée dans la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales. Cette loi, réformant celle centenaire du 24 juillet 1867, a brillé par son mutisme quasi général sur la participation des salariés. Elle ne consacre que la possibilité pour le salarié de cumuler un mandat social avec son contrat de travail12(*). Le mérite revient aux lois spécifiques postérieures et surtout à la loi du 15 mai 2001 sur les Nouvelles Régulations Economiques d'avoir révolutionné le domaine de la participation en faisant du salarié un « co-entrepreneur » de la société.

On observe que la participation des salariés a été érigée en système dans les droits européens et anglo-saxons.

En France, la participation au fonctionnement de la société est organisée par la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 « relative à la démocratisation du secteur public » qui consacre l'entrée obligatoire des salariés dans les organes de gestion et de surveillance des sociétés nationalisées et l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986 consacrant l'entrée facultative des salariés dans les sociétés privatisées. Ces textes ont été modifiés par les lois du 24 juillet 1994 et du 15 mai 2001. La participation financière est quant à elle, organisée par plusieurs systèmes participatifs tels que la participation obligatoire dans les entreprises de plus de cinquante salariés, l'intéressement facultatif, les divers Plans d'Epargne Entreprise (PEE) et les plans d'option sur actions (stock option).

Au Royaume Uni et aux Etats-Unis d'Amérique, il existe plusieurs formules de participation des salariés au Board, au capital et aux bénéfices de la société qui les emploie : partage du profit avec paiement en actions ou en numéraire, plans d'actionnariat collectif, plans d'option sur actions13(*). Toutefois, comme aucun des systèmes de participation n'est obligatoire, les entreprises demeurent libres de les instituer ou non.

Cette euphorie législative en matière de participation des salariés n'a pas contaminé l'Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés Commerciales et du Groupement d'Intérêt Economique (AUDSCGIE) qui s'est contenté de maintenir la philosophie de la loi de 1966 en prévoyant à côté du cumul du contrat de travail avec un mandat social (articles 317 et 426), l'attribution d'actions aux salariés (articles 639 et s.). A la rigueur, on a espéré que l'avant projet d'Acte Uniforme portant Droit du Travail devait permettre d'ouvrir les discussions sur la participation des salariés. Mais il n'en est rien.

Dès lors, quelle place le droit OHADA fait-il aux salariés dans le fonctionnement de la société anonyme ? Quelles formes de participation prévoit-il en faveur des apporteurs de travail au regard de la gestion qui revient de droit aux actionnaires, détenteurs du capital ? Quelle est l'efficacité de ces formules de participation ? Comment améliorer cette participation salariale en l'absence d'un cadre législatif approprié ? Pourquoi ne pas encourager les SA à recourir volontairement aux opérations d'actionnariat salarié afin de renforcer la participation des salariés à la gestion de leur entreprise ? Dans ces conditions, le salarié peut-il impunément glisser de la protection du droit social vers le régime sévère du droit des sociétés sans prendre un certain nombre de risques ?

L'actionnariat salarié14(*) constitue sans nul doute un élément de la démocratie participative. Son succès ne se mesure pas à l'aune des actifs générés. Elle a pour vocation première de rassembler tous les acteurs de l'entreprise autour d'objectifs communs, cette synergie développant chez chacun une conscience de la communauté d'intérêts qui préside au développement de l'entreprise. Les perspectives qui s'ouvrent à l'actionnariat salarié recoupent une série d'enjeux :

- améliorer la performance globale des entreprises,

- élargir les fonds propres des sociétés anonymes de l'espace OHADA soumises à la pression de l'environnement économique international,

- réduire, enfin, les inégalités et contribuer à l'émergence d'un droit actionnarial dans le cadre d'un nouveau contrat social dont il nous revient d'imaginer les fondements face aux défis polymorphes du XXIe siècle.

De l'analyse des textes, il ressort que dans les sociétés anonymes du droit OHADA, la participation des salariés ne fait pas défaut (première partie). Cependant, celle-ci est limitée, inefficace et mérite d'être améliorée par un recours volontaire aux opérations d'actionnariat salarié (deuxième partie).

PREMIERE PARTIE :

LA FAIBLESSE DE LA PARTICIPATION DES SALARIES A TRAVERS LE DROIT UNIFORME DES SOCIETES ANONYMES

L'idée de participation est devenue, depuis longtemps, sur le plan international, une de celles qui influencent avec force la structure de l'entreprise et de l'économie de la société industrielle moderne.

Seulement, on rencontre dans les pays de l'espace OHADA un scepticisme largement répandu et même une attitude de refus à l'égard de la participation des salariés. En effet, les rédacteurs de l'AUDSCGIE ont gardé un mutisme en ce qui concerne le statut, voire la participation effective du salarié dans la gestion de la Société Anonyme (SA).

On observe, à côté de certaines initiatives volontaires internes à certaines sociétés, des formes légales d'intervention du salarié dans le fonctionnement de l'entreprise (Chapitre I). Cette disparité peut s'expliquer par le fait que le législateur OHADA n'a pas entendu ériger la participation du salarié en une politique sociale et économique à atteindre, en une troisième voie après le communisme et le capitalisme.

Il s'ensuit que l'AUDSCGIE n'a pas entendu privilégier le salarié au détriment des détenteurs du capital même s'il lui consacre une place non moins importante en temps de crise. C'est à croire qu'il existe des cloisons étanches entre la gestion normale de l'entreprise et l'apparition des difficultés entraînant une procédure collective (Chapitre II).

CHAPITRE I

* 1 Georges RIPERT et René ROBLOT, Traité de Droit Commercial, Tome1, 17e LGDJ, Paris, 2002, n°1015.

* 2 Comp. article 6 al. 2 AUDSCGIE.

* 3 Article 1832 al. 1er code civil français : « La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d'affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter ».

* 4 Pour la composition du Conseil d'Administration, se référer aux pages intérieures.

* 5 Article 415 AUDSCGIE

* 6 Article 1er de l'Avant Projet d'Acte Uniforme portant Droit du Travail ; article 2 du Code de Travail du Togo (CTT) et du Code de Travail Ivoirien (CTI).

* 7 Article 73 de la Convention Collective Interprofessionnelle de la Côte d'Ivoire du 19 juillet 1977.

* 8 Pierre BEZARD, La Société Anonyme, éd. Les Guides Montchrestien, Paris, 1986, n°1597, p. 503.

* 9 Wiyao GNOM , La Participation des salariés à la vie de l'entreprise au Togo, Mémoire de Maîtrise en Droit des Affaires, 1990-1991, Université du Bénin, Togo, p. 11.

* 10 « Information institutionnalisée », selon l'expression de G. LYON-CAEN, J. PELISSIER, Droit du Travail, Paris, 1992, n° 763 ss.

* 11 PIE XI, Encyclique Quadragesimo anno, 15 mai 1931.

* 12 Pierre BEZARD, La Société Anonyme, éd. Les Guides MONTCHRESTIEN, Paris, 1986, n°1601, p.507.

* 13 Jean CHERIOUX, L'actionnariat salarié : vers un véritable partenariat dans l'entreprise ; Rapport d'information 500 (98-99) - Commission des Affaires Sociales du Sénat français ( www.senat.fr).

* 14 C'est « l'accès des salariés au capital d'une société. Ce peut être la société où ils sont employés (actionnariat dans l'entreprise) ou toute autre société (capitalisme populaire) », lexique des termes juridiques, 12e éd. ; Dalloz, Paris, 1999.

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