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Les enjeux géostratégiques de l'initiative pays pauvres très endettés (PPTE): le cas du Cameroun

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par Bruno ATANGANA
Université de Yaoundé II - Soa - DEA 2009
  

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Paragraphe 2 : l'impact politique des conditionnalités de l'initiative ppte.

Les réformes préconisées dans le cadre de l'Initiative PPTE prennent la forme de conditionnalités parce qu'elles sont imposées de l'extérieur et subies de l'intérieur par les autorités du pays qui les exécutent. Au Cameroun, ces conditionnalités ont parfois conduit les autorités à prendre des mesures impopulaires (A); la perspective de l'atteinte du point d'achèvement les obligeant cependant à des postures d'allégeance vis à vis de l'extérieur (B).

A) Les pressions internes liées aux mesures gouvernementales

Au plan interne, la conditionnalité se manifeste à travers une austérité budgétaire en matière macro-économique et une exigence de bonne gouvernance au plan structurel. Le cahier des charges désigné par le Mémorandum de Politique Economique et Financière que le Cameroun doit mettre en oeuvre, intègre la nécessité d'assurer une viabilité budgétaire; le respect des équilibres macro-économiques passe par une bonne traçabilité des recettes et des dépenses consacrées par le budget de l'Etat. L'objectif requis par les Institutions Financières Internationales au cours des six dernières revues qui ont jalonné l'Initiative PPTE consistait à réduire le train de vie de l'Etat et à accentuer la couverture des recettes non pétrolières par la mise en oeuvre d'une fiscalité incitative autrement appelée fiscalité de « porte à porte ». Il s'agit à cet effet d'appliquer une fiscalité tous azimut intégrant la taxe foncière, la taxe forestière, les droits d'assise et surtout la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA). Sur ce dernier point, il est à relever qu'au cours de l'exercice budgétaire 2003 - 2004, l'on a assisté à une augmentation de la pression fiscale déclenchée par la mise en application le 1er Janvier 2004 de la réforme de l'Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques (IRPP) prescrite par le FMI, ainsi qu'une augmentation de la TVA de 18,7% à 19,25.

Ces mesures fiscales ont cependant eu des effets pervers sur la croissance économique. A titre d'exemple ainsi que le relève Alexandre Djimeli31(*), la mise en application de la réforme de l'Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques a entraîné la chute du taux de croissance de 4,1% en 2003 à 3,6% en 2004. L'augmentation de la TVA au premier janvier 2005 a conduit le taux de croissance à 2,6% en 2005, à 3,2% en 2006, et à 3,6% en 2007 contrairement à la croissance économique moyenne de l'Afrique sub-saharienne qui passait de 4,9% en 2003 à 6,9% en 2004, puis de 6,1% en 2006 à 6,6% en 2007. Dans le même temps, le Fmi a prescrit au Cameroun l'indexation des prix du carburant à la pompe en conformité avec les prix du marché; d'où une augmentation des prix du carburant qui s'en est suivie, soit 5 Frs de plus par litre en octobre, novembre et décembre 2004 et 20Frs de plus en février 2005. Cette mesure qui visait à alléger la charge financière de la SONARA (considérée par le FMI comme « budgétivore »), et une fiscalité très élevée ont entraîné la baisse du niveau de vie des populations. Exaspérées par le coût des mesures gouvernementales, ces dernières se sont livrées à des grèves qui ont parfois tourné à l'émeute32(*), accentuant ainsi une pression sociale sur les autorités. Entre le souci de se conformer aux exigences du FMI et le risque d'une escalade de violence à l'intérieur du pays, les autorités camerounaises ont préféré éviter la confrontation populaire quitte à mécontenter les Institutions Financières33(*). Le revirement s'est opéré par une augmentation des salaires des fonctionnaires et agents de l'Etat et une politique de gel des prix du carburant intervenues au courant du mois de mars 2008.

D'autre part l'exigence de bonne gouvernance a contraint les autorités camerounaises à prendre des mesures de rétorsion34(*) contre les personnes soupçonnées de détournement de fonds publics ou coupables de corruption. L'on a ainsi relevé un remaniement ministériel en fin 2004 à l'occasion duquel le ministre des finances a été limogé ; et par la suite l'arrestation de plusieurs membres du gouvernement et des directeurs généraux de sociétés publiques. A l'analyse, ces mesures fortes participent d'une volonté du Cameroun de montrer des signaux positifs à la communauté des bailleurs de fonds, à ce titre il apparaît que la politique du gouvernement est influencée par l'extérieur et elle s'inscrit dans une dynamique d'allégeance et de conformisme.

B) Les dynamiques d'allégeance politique

L'application des conditionnalités en vue de bénéficier des retombées issues de l'Initiative PPTE obéit à une logique de rapports de pouvoir entre le Cameroun et ses bailleurs de fonds. Ces rapports de pouvoir génèrent des effets de coercition qui placent le Cameroun en position inférieure du fait de sa faible capacité d'action et de réaction. En conséquence, ce dernier fait naître une dynamique d'objectivation qui le cantonne à la sphère d'acteur secondaire et passif enclin à formuler des demandes et en attendre des réponses. Cela est perceptible à travers les lettres d'intention du gouvernement au FMI dans lesquelles le Cameroun adresse des demandes de dérogation pour non respect des critères de réalisation.

La relation ainsi établie s'assimile à l'allégeance politique, car la perspective d'une évaluation et d'une annotation des actions d'un Etat sous forme de compte rendu, participe de la construction d'un lien d'obligations entre l'évaluateur et celui qui est évalué. C'est dans le cadre de cette analyse que l'on peut lire les propos du chef de l'Etat camerounais à l'adresse du FMI35(*) : « aujourd'hui, le Cameroun se trouve face à de nouveaux défis. Il attend du Fonds monétaire international conseils et assistance pour préserver les acquis, mais plus encore pour asseoir les bases d'un développement économique et social vigoureux et durable (...). Nous croyons pouvoir compter sur le FMI pour la mobilisation des financements extérieurs nécessaires ». En effet c'est le FMI qui donne son aval pour le déclenchement de tout processus de financement par la communauté des bailleurs de fonds après notification de l'atteinte par un pays du point d'achèvement. Ces propos sont révélateurs de la situation dans laquelle se trouvent les autorités camerounaises: le besoin extrême de financements extérieurs soumet le Cameroun à la possibilité de tout faire pour les obtenir. De ce point de vue, on peut penser que l'obsession du Cameroun pour le point d'achèvement de l'Initiative PPTE l'ait poussé à une politique de flexibilité vis-à-vis de ses bailleurs de fonds ; c'est ce que relève Merckaert36(*) lorsqu'il affirme qu' « il y a deux catégories de pays : les pays dociles et ceux qui ne le sont pas , le Cameroun rentre dans la première catégorie, car pour atteindre le point d'achèvement, il a du intégrer en Octobre 2005 un nouveau programme du FMI qui l'obligea à insérer la SNEC dans le projet de privatisation ». Cet argument est soutenu par Babissakana37(*) qui, dénonçant la prolongation par le Cameroun de Facilité pour la Réduction de la Pauvreté et de la Croissance en 2009 - laquelle devait normalement prendre fin en Juin 2008- relève que le pays n'aurait pas dû signer un programme dont l'utilité n'est plus avérée.

Par ailleurs l'allégeance politique transparaît également dans les soutiens diplomatiques que le Cameroun essaie de se trouver, et qui peuvent lui permettre de parvenir au point d'achèvement de l'Initiative PPTE. Il tente ainsi de conjurer le poids des conditionnalités en s'alliant les puissances étrangères qui ont une influence au sein des instances financières internationales, à l'instar des Etats-Unis38(*).

Cette allégeance politique faite d'extraversion, est de nature à accorder une grande marge de manoeuvre aux puissances étrangères. Parce que le Cameroun a montré des signes de faiblesse, parce qu'il a mis en avant sa faible capacité de négociation tout au long de la gestion de son programme d'Initiative PPTE, il s'est exposé à des manoeuvres d'instrumentalisation de la part de ses partenaires étrangers.

DE L'INSTRUMENTALISATION DE L' INITIATIVE

PPTE

Deuxième partie :

L'hypothèse de l'instrumentalisation de l'Initiative PPTE est justifiée par le fait de la mise en place de ce programme aux fins géostratégiques, destinées à servir les intérêts des puissances utilisatrices. Profitant des maladresses du Cameroun, les principaux créanciers de ce dernier se sont servis de l'Initiative PPTE pour poursuivre des buts autres que ceux pour lesquels le programme d'allègement de dette a été mis en place. L'objectif de cette deuxième partie est de montrer que l'Initiative PPTE cache des visées géostratégiques. Toutefois il existe des chances pour le Cameroun de sortir du cycle infernal de dépendance que l'Initiative PPTE seule ne saurait lui permettre de surmonter.

Dans cette optique, le troisième chapitre traitera du cadre géostratégique de l'analyse ; le quatrième chapitre quant à lui évaluera les défis de l'après point d'achèvement et les enjeux liés aux intérêts du cameroun.

LE CADRE GEOSTRATEGIQUE DE L'ANALYSE

* 31 Voir Le Messager, « Cameroun: le FMI a fini par reconnaître son incompétence », le 11juillet 2008. Par Alexandre T. Djimeli et Léopold Chendjou.

* 32 Le 25 février 2008, suite à une grève des transporteurs revendiquant la baisse des prix du carburant, de violentes manifestations se sont produites principalement à Yaoundé, Douala et Bamenda entraînant des dizaines de victimes humaines et de nombreux dégâts matériels.

* 33 Jugeant les mesures gouvernementales de gel des prix de carburant et de relèvement des salaires des fonctionnaires trop coûteuses, le FMI s'est entrepris à négocier pour que le gouvernement revienne sur ses décisions. Voir La Nouvelle expression, « programme triennal: les contradictions du FMI »,16/06/2008.

* 34 Voir Le Messager de mars 2004 et en ligne www.CAA.cm

* 35 Voir Cameroon Tribune du Jeudi 11 Janvier 2007, p 7.

* 36 Voir Jean Merckaert, « dette des pays du Sud » in Rapport dette et développement 2005 - 2006.

* 37 Voir le Messager, « lettre ouverte de Babissakana au président de la République »

* 38 A l'occasion du passage au Cameroun le 5 Mai 2005 de Mme Cindy L. Courville (Directeur du Conseil National de Sécurité en charge de l'Afrique et conseillère du président Bush), et plus tard de la secrétaire d'Etat adjointe aux affaires africaines Jendayi Frazer, le Cameroun a sollicité par la voix du président Biya le soutien des Etats-Unis lors de l'examen de son dossier auprès de la Banque Mondiale et du FMI. Voir Le Messager, « Cameroun: géostratégie; les américains nient tout projet de base militaire au Cameroun »,18/05/2005 cité par Alexis Nzogang in Mémoire de DEA: « une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001: contribution à l'étude des dimensions pétrolières et militaires », Université de Yaoundé II 2005-2006.

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