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Déviances scolaires et controle social à  Yaoundé: Essai d'approche Sociologique du quotidien des jeunes à  l'école

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par Mahamat ABDOULAYE
Université de Yaoundé I - DEA Sociologie 2009
  

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III - JUSTIFICATION ET INTERET DU SUJET

Le choix porté sur l'étude ethnosociologique des institutions scolaires, en l'occurrence les établissements d'enseignement secondaire de la ville de Yaoundé, va au-delà du simple fait que les comportements des partenaires éducatifs mobilisent bien d'attention et occupe peu ou prou le contenu du discours officiel et des médias de tous les jours. Il s'agit là d'une urgence qui demeure une des priorités officielles de tous temps. Les comportements de résistance des acteurs scolaires (enseignants, élèves et familles), est-il besoin de le rappeler, se vivent avec acuité dans les espaces scolaires de la ville de Yaoundé. Ils prennent de plus en plus des proportions grandissantes et tendent à s'opposer à la logique de l'école considérée ici comme institution fabricant ses propres normes, ses principes de régulation et de fonctionnement. Ceci d'autant plus, comme le montrent les analyses institutionnelles, que l'institution éducative fonctionne sur la base d'un programme imposé par les instructions officielles, l'emploi du temps, les contrôles pour ce qui est des relations entre enseignants-élèves ; la discipline, le règlement intérieur et la relation dans l'établissement pour ce qui est du déroulement des rapports entre l'acteur et l'institution ; de façon générale, entre les partenaires de l'acte éducatif. C'est donc ce contraste qui, en réalité, est le point de départ de notre curiosité et nous détermine dans le choix de mener une investigation sur les comportements de résistance aux instituions dans les établissements scolaires d'enseignement secondaire à Yaoundé.

A partir de cette vitrine de résistance, de stratégies d'opposition aux institutions, il s'agit, non pas comme dans la perspective des études de la sociologie de l'éducation, au nombre desquelles s'inscrit notre recherche, de s'aligner derrière les prises de positions tumultueuses des débats journalistiques, politiques et littéraires en cours au sein de la classe intellectuelle camerounaise à savoir que : l'institution-Ecole devrait être ce creuset, cette matrice, ce moule où s'apprend, en se vivant, la démocratie qui ne signifierait rien d'autre que la possibilité, pour chacun, de participer effectivement, personnellement ou par délégation représentative, à tout ce qui le concerne et donc d'influencer les décisions majeures qui dicteront ou commanderont des comportements adéquats (G. Ntebe Bomba, 1991 :14), ni même d'examiner la situation scolaire confinée sous l'angle des paradigmes holistes de la situation éducative pour appréhender l'école comme le premier lieu de reproduction des attitudes de la société globale. Ce qui importe bien plus ici, c'est de décrire et d'analyser les stratégies et les résistances mises en oeuvre tant par les acteurs scolaires que par les élèves et les familles.

A travers une perspective microsociologique, nous entendons renouveler le regard sur l'école camerounaise, interroger le paradoxe d'une institution si familière et si complexe. En dévoilant l'implicite, il ne s'agit pas tant de dénoncer les dérives de l'école ou du système éducatif camerounais, qu'à souligner le brouillage des modèles qui lui donne sens. En s'intéressant au particulier, il s'agit moins de raisonner en termes d'appareil idéologique, de domination ou de reproduction, mais bien plus d'une relecture du fonctionnement actuel de l'institution scolaire camerounaise à travers l'observation des pratiques quotidiennes et à une conceptualisation conjuguée et articulée.

A la fois située dans le débat majeur qui a traversé la sociologie traditionnelle de l'éducation de ces trente dernières années, sur la stratification socioculturelle, la réussite scolaire et le système éducatif, la problématique de la reproduction et des inégalités scolaires se propose de rompre d'emblée avec «les figures obligées du discours sociologique » pour progresser dans l'explication sociologique des pratiques, vers l'ouverture de cette quasi- «boîte noire » qu'est jusqu'ici l'école, à l'aide des scalpels méthodologiques et paradigmatiques utilisés dans les travaux anglo-saxons, inspirés par l'interactionnisme symbolique, la phénoménologie sociale ou l'ethnométhodologie.

Il n'est plus question alors de débusquer les modes selon lesquels se réalise une inégalité jouée d'avance et de dévoiler la méconnaissance ou les intérêts cachés des acteurs, mais d'étudier «l'inégalité en train de se faire », «en prenant au sérieux la rationalité des acteurs » et en tentant de rendre compte de la manière dont, en situation, ils construisent le social.

Une telle considération vise une analyse qui se situe dans le sillage de la vie quotidienne de l'école, ce d'autant plus qu'«il est urgent de revenir aux problèmes essentiels de la vie sans qualité » (Maffesoli, 1985 : 16)

Cette recherche voudrait précisément opter pour une épure théorique de type interactionniste et ethnométhodologique pour approcher l'école camerounaise autour de ce que Goffman nommait «les faits secondaires » qui se dévoilent comme «l'infiniment petit », c'est-à-dire que l'on se situe à la petite échelle de détails et de banalités des relations interpersonnelles, pour analyser ce que les gens font, comment ils réagissent les uns aux autres, comment se modifient les comportements car, le chercheur ne considère jamais comme connu ou évident tel ou tel événement, pas plus que l'importance relative de celui-ci. C'est aux personnes qui sont étudiées d'en décider.

A partir des éléments de ce que Roy appelle l'«anthropologie du quotidien », nous pourrons ainsi identifier les «micro-inventions », c'est-à-dire les procédures, les raisonnements, les pratiques et les bricolages par lesquels les acteurs construisent le social et produisent au jour le jour, les normes sur lesquelles repose l'institution scolaire.

Il y a un besoin de saisir les formes particulières d'«invention du quotidien » (M. De Certeau et al., 1994) permettant de découvrir le rôle des acteurs dans la construction d'une nouvelle civilité scolaire. Nous pourrons donc y voir l'imaginaire scolaire qui s'avère très utile lorsqu'il s'agit de comprendre ce qui naît en dehors de la «normativité scolaire ». Mais pouvons-nous déceler les dynamiques scolaires dans les représentations lorsque les théories de la reproduction servent d'arrière-plan pour rendre compte des pratiques quotidiennes et exprimer les représentations ``spontanées'' qu'elles engendrent ?

A ce sujet, il sera davantage question de rompre avec les analyses qui ramènent toutes les réflexions vers des considérations macrosociologiques. Nous éviterons également l'approche simplificatrice de la sociologie de l'éducation ancienne qui n'accorde qu'une attention distraite aux interactions scolaires, à la vie quotidienne dans les établissements scolaires.

Il s'agit pour nous de s'insérer plutôt dans l'optique de la ``Nouvelle Sociologie de l'Éducation'' (NSE) selon laquelle la description des comportements en situation scolaire côtoie les réflexions sur le sens et sur les mutations contemporaines sous le prisme des relations symboliques dans les interactions quotidiennes.

Ainsi, feront l'objet d'une attention particulière, les interactions des acteurs scolaires, les stratégies institutionnelles des professeurs, des élèves et des familles, les perspectives qui guident leurs actions, les cultures dans lesquelles s'enracinent leurs conduites. Et en interaction avec les acteurs sociaux, sera décrite et analysée la manière dont ils comprennent et construisent leurs pratiques dans le cadre d'étude qui est le nôtre à savoir les établissements scolaires, dans leur déclinaison spectaculaire, en tant que ces objets sont doués d'un sens et d'une puissance participant des terroirs de la socialité scolaire qui réclament tous les jours, de plus en plus droit de cité.

En choisissant d'orienter cette étude vers la manière dont les acteurs scolaires interagissent, nous voudrions ainsi mettre en lumière les formes de déviances ordinaires qui se développent quotidiennement dans l'interaction avec la production sociale des normes. Ce déplacement de regard permettra de mettre à jour le « malaise » des acteurs scolaires, tiraillés entre idéaux professionnels, injonctions administratives et tactiques de survie individuelles.

Cette interaction scolaire au «ras du sol » jusqu'ici sous-estimée, négligée, ignorée, voire dépréciée par la sociologie dominante peut être le socle d'analyse pertinente surtout dans le cadre d'une société marquée par des «liens sociaux en mutation » (J. Nzhié Engono, 2005 : 131) et par la crise de tous ordres : politique, économique, sociale et culturelle.

En tant que lieu d'apprentissage et de socialisation qui met en relation les individus, l'institution scolaire peut être d'un grand intérêt dans la mesure où elle permettrait de lire la situation éducative au Cameroun, à partir d'une faille : celle de l'interaction symbolique entre les acteurs scolaires. Dans cette logique, toute une sociologie de l'éducation camerounaise peut se révéler.

Dans cette société plurielle, l'école camerounaise peut-elle se poser en cadre d'interaction symbolique ? La réponse à cette question laisse percevoir la nécessité et l'importance qu'il y a à orienter l'étude des institutions scolaires vers l'observation directe des interactions et activités pratiques et le refus de les évaluer en fonction de critères et normes extérieures aux situations ou aux comptes rendus que peuvent en faire leurs protagonistes.

Il s'agit donc, tout d'abord, d'accorder une place centrale à l'acteur et à son interprétation de la réalité, au «sens vécu », sans pour cela s'interdire d'étudier les «motifs refoulés » des sujets, ni les «fonctions latentes » ou pour utiliser l'expression la plus courante, «la dimension cachée » des discours et des comportements déviants.

L'effort de conceptualisation et la variété de notions et arguments qui précèdent tendaient à affiner l'intérêt que nous portons sur l'objet sociologique à étudier.

Dans le cadre de cette recherche, il s'agit enfin de comprendre «l'ici et maintenant » sans oublier les rapports sociaux, les situations singulières, sans les abstraire d'un espace social et d'un temps plus large, les trajectoires singulières des élèves, des enseignants et des familles, sans pour autant atomiser les individus, les caractères spécifiques de l'appropriation du savoir sans oublier pourtant que le savoir est un processus et un produit social, plus généralement, comprendre comment l'inégalité sociale se produit à travers des situations et des histoires singulières, culturelles et apparemment neutre socialement.

En somme, à travers une enquête sur la vie quotidienne dans les établissements scolaires du second degré, cette recherche tentera d'éclairer le débat politique et éducatif ; nous entendons interroger cet espace particulier de l'expérience scolaire au Cameroun dans le sens de sa fonctionnalité quotidienne en tenant compte du système d'interaction, c'est-à-dire du contexte économique, politique, culturel, social...

Après cette présentation, il s'agit maintenant de situer la méthodologie qui permettra de cerner le phénomène que nous étudions.

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"Ceux qui rĂªvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rĂªvent de nuit"   Edgar Allan Poe