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L'accès de la société civile à  la justice internationale économique

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par Farouk El-Hosseny
Université de Montréal - LLM 2010
  

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3) Fondement de l'accès à la procédure par la société civile

Il s'agit dans cette section d'analyser le fondement procédural repris par des décisions clés de l'organe d'appel de l'OMC et des tribunaux arbitraux appliquant l'ALENA ou les TBI. Ces décisions ont ouvert la porte (timidement certes) à la possibilité pour la société civile d'accéder à la justice internationale économique, une porte ouverte timidement puisqu'elle vise uniquement le droit d'accès à la procédure. Tel que nous l'avons évoqué plus haut, ce droit consacre seulement le droit d'intervenir et non le droit d'accès à la justice, qui vise le droit à un recours et à un juge, chose qui n'est pas prévue par la jurisprudence examinée ci-dessous.

Dans «Shrimps»360, trois ONG environnementales désiraient intervenir dans le but d'éclairer le groupe spécial sur les enjeux environnementaux en cause361. Le groupe spécial avait décidé que les interventions non sollicitées seraient rejetées puisqu'incompatibles avec les règles et les procédures régissant le règlement des différends (le Mémorandum). Toutefois, les parties ont été invitées à présenter les mémoires d'ONG en les annexant à leurs propres mémoires. Les mémoires d'ONG feraient partie intégrante de leurs dossiers, les parties étant donc les uniques responsables de leurs contenus.

L'organe d'appel a par contre infirmé cette décision. Il est même allé encore plus loin en accordant le droit au groupe spécial de considérer les interventions non

360 États-Unis -- Prohibition à l'importation de certaines crevettes et de certains produits à base de crevettes (Plaignants : Inde, Malaisie, Pakistan, Thailande), WT/DS58/AB/R, adopté le 6 novembre 1998, DSR 1998:VII, 2755.

361 Le Center for Marine Conservation (CMC), le Center for International Environmental Law (CIEL) et le Wolrd Wide Fund for Nature (WWF) qui est l'ONG de référence pour la protection des animaux à travers le monde. Voir H. GAO, op. cit., note 293, p.52.

sollicitées à condition que celles-ci soient pertinentes362. Selon l'organe d'appel, le pouvoir d'accepter les interventions non sollicitées d'amicus curiae relève de son pouvoir général de recueillir tout renseignement utile conformément à l'article 13 du Mémorandum363. La décision a également édicté que le groupe spécial peut, à sa discrétion, déroger aux procédures en vertu de l'article 12.1 du même accord.

Dans l'affaire CE- Asbestos364, cinq entités privées ont communiqué des mémoires dans le but d'intervenir dans la procédure. Deux mémoires, émanant d'autres organismes, ont été directement annexés au mémoire de l'Union européenne. Les arguments et les points soulevés dans ces derniers ont été effectivement pris en compte par le groupe spécial dans son analyse pour trancher ce différend, grâce à l'inclusion de ces mémoires dans les arguments des parties au litige. Ces dernières sont effectivement les seules à bénéficier du droit d'être entendues par le groupe spécial. Les trois autres ont été rejetés; ils provenaient de Ban Asbestos Network, l'Instituto Mexicano de Fibro-Industrias A.C, et ONE ("Only Nature Endures"), une ONG basée en Inde365.

Arrivé en appel, et vu le nombre important d'ONG, d'associations et d'organisations commerciales et industrielles qui songeaient à intervenir, l'organe d'appel a établi une procédure provisoire pour la communication des mémoires d'amicus curiae366. Ce pouvoir d'établir des procédures provisoires est prévu à

362 Jorge VINUALES, «Amicus Intervention in Investor-State Arbitration», Dispute Resolution Journal, Novembre 2006-Janvier 2007, p.74; R. BUCKLEY et P. BLYSCHAK, op. cit., note 36, p. 362; T. MERON, loc. cit., note 66, p.320.

363 C. CÔTÉ, op. cit., note 35, p. 406.

364 Communautés européennes - mesures affectant l'amiante et les produits en contenant (Plaignant : Canada), WT/DS135/R, adopté le 12 mars 2001.

365 Rapport du groupe spécial, Communautés européennes - mesures affectant l'amiante et les produits en contenant (Plaignant : Canada), WT/DS135/R, adopté le 18 septembre 2000; p. 447.

366 Rapport de l'organe d'appel, Communautés européennes - mesures affectant l'amiante et les produits en contenant (Plaignant : Canada), WT/DS135/R, adopté le 12 mars 2001; Paragraphe 51; R. BUCKLEY et P. BLYSCHAK, op. cit., note 36, p. 363.

l'article 16 (1) des Procédures de travail. Dans cette décision, l'organe a insisté sur les caractéristiques des entités désirant intervenir. Les critères étaient les suivants : leurs sources de financement, la description de leurs relations avec les parties, leurs intérêts dans l'affaire, leur degré de contribution à la procédure et l'identification des points de droit qu'ils voudraient traiter. L'organe d'appel a réitéré son pouvoir de discrétion de les accepter ou de les rejeter.

En effet, les critères et conditions de l'organe étaient si exigeants que les dixsept communications présentées ont été rejetées. Il est tout de même intéressant de noter que ce différend a suscité l'intérêt d'organisations et de personnes fort variées des quatre coins de la planète, allant d'entreprises minières d'amiante au Sénégal et en Inde à des professeurs et centres de recherches américains et australiens367. Cette diversité ou hétérogénéité des amicus curiae ne semble pas contredire la jurisprudence de l'organe d'appel. Il serait en effet disposé d'accepter les communications de toutes « personnes » autres que les parties au litige368. L'organe d'appel est au contraire uniquement intéressé à accepter les communications d'amicus curiae dans le seul cas où cela pourrait lui être bénéfique. Il est primordial que l'intervention puisse contribuer à résoudre une question de fait ou de droit, c'est à dire de pouvoir contribuer à la résolution du litige369.

De nombreuses décisions au niveau de l'ORD sont venues par la suite confirmer les précédents établis par les deux décisions examinées ci-dessus. En résumé, le groupe spécial tire ce pouvoir de l'article 13 du Mémorandum (selon

367 Id., note 353, Paragraphe 53-56 (Voir notes de bas de page dans la décision).

368 Id., note 353, Paragraphe 50. (Italiques ajoutées).

369 R. BUCKLEY et P. BLYSCHAK, op. cit., note 36, p. 363.

l'interprétation de l'organe d'appel). En revanche, l'organe d'appel exerce ce pouvoir de discrétion en vertu de l'article 17.9 du Mémorandum en concordance avec l'article 16 (1) des Procédures de travail370. La définition de l'amicus curiae n'est pas encore précise dans le sens où sa personnalité reste nébuleuse (individus, multinationales, lobbies corporatifs371, organisations intergouvernementales et non gouvernementales, etc.)372. La jurisprudence de l'OMC a cependant dégagé deux types de critères. Tout d'abord, des critères de ratione materiae qui portent sur l'intérêt juridique des intervenants tel que la démonstration du degré de contribution à la résolution du litige; ainsi que des critères de ratione personae portant sur leurs qualités telles que l'exigence d'impartialité373. En second lieu, seules les informations factuelles et techniques communiquées seraient recevables au stade du groupe spécial. En revanche, devant l'organe d'appel, seuls les arguments et les questions juridiques seraient considérés, de plus l'information et l'argumentation communiquées ne devraient pas être déjà traitées par les parties au litige374.

Dans Methanex Corporation, le tribunal a adopté l'approche de l'ORD et de l'Iran-US Claims Tribunal permettant les interventions d'amicus curiae375. Il s'agit d'un différend tranché dans le cadre du Chapitre XI de l'ALENA. Il opposait

370 Mitsuo MATSUSHITA, Thomas J. SHOENBAUM et Petros C. MAVROIDIS, « The World Trade Organisation : Law, Practice and Policy », Oxford, Oxford University Press, 2006, p.37; R. CASANOVA-JIMENEZ, op. cit., note 43, p.37; Rapport de l'organe d'appel, États-Unis - Imposition de droits compensateurs sur certains produits en acier au carbone, plomb et bismuth laminés à chaud originaires du Royaume-Uni, WT/DS138/AB/R; adopté le 10 mai 2000, Paragraphes 36-42.

371 l'American Iron and Steel Institute et la Speciality Steel Industry of North America, ont présenté des mémoires d'amicus curiae à l'Organe d'Appel dans États-Unis - Imposition de droits compensateurs sur certains produits en acier au carbone, plomb et bismuth laminés à chaud originaires du Royaume-Un (Plaignants : Communauté Européenne), WT/DS138/AB/R; adopté le 10 mai 2000.

372 Le panel a accepté les présentations d'amicus curiae de deux pêcheurs australiens portant sur leurs opinions personnelles des standards sanitaires australiens. Cette décision illustre l'admissibilité de toute personne, autre que les parties au différend, à intervenir en tant qu'amicus curiae, Voir H. GAO, op. cit., note 293, p.55; Id., note 36, p. 362.

373 H. ASCENSIO, loc. cit., note 67, p.912.

374 Communautés européennes - mesures affectant l'amiante et les produits en contenant, précité, note 353, Paragraphe 52; Rapport de l'Organe d'appel, Communautés européennes - Désignation commerciale des sardines, (Plaignants : Pérou), WT/ DS231/AB/R, adopté le 23 octobre 2002, Page 43, Paragraphe 169.

375 J. VINUALES, op. cit., note 362, p.356.

Methanex, une entreprise canadienne, et les États-Unis. En décidant ainsi, le tribunal a d'abord examiné la pratique des instances mentionnées ci-dessus et celle de la CIJ. Le tribunal a trouvé que la CIJ est liée par ses statuts pour limiter les différends et les interventions à ses procédures aux États uniquement. Cela ne s'appliquait pas au tribunal en cause, constitué dans le cadre du Chapitre XI de l'ALENA et régi par les règles d'arbitrages de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI)376.

Dans ce différend, les requérants étaient trois ONG ayant une expertise environnementale considérable. Il s'agissait de l'Institut international pour le développement durable, Communities for a Better Environment et Le Earth Island Institute377. Leurs demandes d'intervention reposaient sur l'importance de cette affaire vu les incidences environnementales et d'intérêt public en cause. Ils ont demandé également que l'interprétation du Chapitre XI de l'ALENA soit faite à la lumière des principes du développement durable. Ils ont souligné que leur intervention pourrait aider le tribunal dans cette tâche378.

Les demandes procédurales des amicus curiae se résumaient ainsi: pouvoir examiner les plaidoiries des parties et leurs documentations, assister aux audiences, présenter des mémoires écrits et pouvoir plaider oralement. En effet, eu égard à la complexité de l'affaire, le tribunal cherchait à recueillir le plus d'information possible et a donc accepté leurs communications écrites379. Il a considéré que la question de permission des mémoires d'amicus curiae était une question procédurale régie par

376 Methanex Corporation c. United States of America, Decision of the Tribunal on Petitions from Third Persons to Intervene as «Amici Curiae», 15 janvier 2001, p.4.

377 Le dernier était impliqué dans le différend de Shrimps traité plus haut.

378 Methanex Corporation c. United States of America, note 376, p.4

379 R. BUCKLEY et P. BLYSCHAK, op. cit., note 36, p. 360.

l'article 15(1) des règles d'arbitrage de la CNUDCI. Le tribunal a noté qu'il bénéficiait en vertu de cet article d'un pouvoir discrétionnaire quant à la conduite de l'arbitrage, et qu'il avait ainsi le pouvoir de permettre de telles interventions.

Concernant les questions d'accès aux audiences et des plaidoiries orales, le tribunal a conclu que l'article 25(4) des règles de la CNUDCI était applicable. L'article dispose que les audiences sont tenues à huis clos. Il fallait donc avoir le consentement des deux parties afin de déroger à cette règle, ce qui n'était pas le cas en l'espèce380. Selon le même raisonnement, le tribunal n'aurait pas le pouvoir d'accorder aux amicus curiae le droit d'examiner les plaidoiries des parties et leurs documentations, une conclusion qui a été retenue également dans UPS c. Canada381.

Dans ce dernier différend, régi par le règlement d'arbitrage de la CNUDCI, United Parcel Service of America (UPS) songeait à obtenir des dommages du Canada. Le préjudice justifiant les dommages découlerait de la concurrence déloyale de la part de Poste Canada, ce qui constituerait une violation des articles 1502 et 1503 de l'ALENA382. Selon UPS, en ayant un avantage grâce à son monopole du courrier à lettres, l'entreprise étatique canadienne violait la concurrence avec les entreprises privées, dont UPS. Deux entités canadiennes, Canadian Union of Postal Workers et the Council of Canadians voulaient intervenir en tant que parties au litige. Dans le cas où le tribunal refuserait, elles souhaitaient intervenir à titre d'amicus curiae. La justification serait leur intérêt direct dans l'instance car elles sont des parties prenantes affectées par le jugement. Elles ont également soulevé qu'elles pourraient

380 Methanex Corporation c. United States of America, Decision of the Tribunal on Petitions from Third Persons to Intervene as «Amici Curiae, précité note 376, p.19; J. VINUALES, op. cit., note 362, p.74.

381 United Parcel Services c. Canada, 24 mai 2007.

382 Anthony VAN DUZER, «Enhancing the Procedural Legitimacy of Investor-State Arbitration through Transparency and Amicus Curiae Participation», Mc Gill Law Journal (52 McGill L.J. 681), 2007, p. 13.

offrir une perspective différente de celle des parties383. De plus, elles désiraient contester la compétence du tribunal.

Le tribunal a décidé en premier temps que les interventions d'amicus curiae ne devraient jamais porter sur des questions juridictionnelles, les amici curiae ne pouvant pas empêcher les parties de régler leurs différends384. Le tribunal possède l'expertise et l'autorité de déterminer des questions procédurales telles que sa compétence385. Il s'agit de l'application du principe de kompetenz kompetenz, qui est d'ailleurs repris par l'article 21 du règlement d'arbitrage de la CNUDCI. Le tribunal a ensuite décidé qu'il n'avait pas le pouvoir d'ajouter une partie à l'instance. Cela contreviendrait à la nature consensuelle de l'arbitrage et à l'article 15 du règlement d'arbitrage de la CNUDCI. De plus, aucune des parties en l'espèce n'avait consenti à conduire l'arbitrage avec les intervenants386.

Dans l'affaire Vivendi c. la République argentine, cinq ONG387 ont présenté une requête << for Transparency and Participation as Amicus Curiae >> 388. Elles ont cité les précédents de Methanex et UPS en présentant leur requête. Les intervenants ont soutenu qu'ils avaient le droit de participer à ce différend en réclamant: << (...) the right of every person to participate and make their voices heard in cases where decisions may affect their rights >>389.

383 Id., note 369, p. 13.

384 R. BUCKLEY et P. BLYSCHAK, op. cit., note 36, p. 366.

385 J. VINUALES, op. cit., note 362, p.75.

386 Voir Article 15, Règlement d'arbitrage de la CNUDCI; A. VAN DUZER op. cit., note 382, p. 13.

387 Asociación Civil por la Igualdad y la Justicia (ACIJ), Centro de Estudios Legales y Sociales (CELS), Center for International Environmental Law (CIEL), Consumidores Libres Cooperativa Ltda. De Provisión de Servicios de Acción Comunitaria, et Unión de Usuarios y Consumidores. Voir Aguas Argentinas, S.A., Suez, Sociedad General de Aguas de Barcelona, S.A. and Vivendi Universal, S.A. v. The Argentine Republic (ICSID Case no. ARB/03/19), Order in Response to a Petition for Transparency and Participation as Amicus Curiae, p. 1.

388 La réponse à la requête a été rendue par décision provisoire le 19 mai 2005 dans Id., note 387.

389 Id., note 374, p. 2.

Les plaignants, soit le consortium dirigé par Vivendi, demandèrent au tribunal de rejeter l'intégralité de ces demandes. Ils demandèrent que le tribunal ne se considère pas lié par les précédents établis par d'autres tribunaux390. La République argentine approuva toutefois leur intervention. Au vu du désaccord entre les parties, le tribunal devait décider lui-même, sachant qu'aucun tribunal fonctionnant sous les règles du CIRDI n'avait déjà accordé le statut d'amicus curiae à une tierce partie au litige391.

Concernant l'accès aux audiences et leur ouverture au public, le tribunal a conclu que cela ne pourrait être fait qu'avec le consentement et l'accord des deux parties conformément à l'article 32(2) du règlement du CIRDI392. Cette disposition stipulait que le droit d'assister aux audiences est uniquement réservé aux parties au litige. Leur consentement était don nécessaire pour déroger à cette règle, ce qui était le cas dans Methanex et UPS et dans de nombreux différends à l'OMC où cela a été possible uniquement grâce au consentement des parties. Le tribunal a donc rejeté cette première demande des intervenants.

En ce qui concerne la communication de mémoires écrits, le tribunal a déterminé qu'il avait l'autorité et la compétence de les accepter en vertu de l'article 44 de la Convention du CIRDI. En vertu de cet article, les questions procédurales non prévues par le règlement seront déterminées selon la discrétion du tribunal393. Il considéra donc la question d'amicus curiae comme étant une question procédurale à

390 D. SCHNEIDERMAN, loc. cit., note 34, p. 77; Howard MANN, «The Final Decision in Methanex v. United States: Some New Wine in Some New Bottles», International Institute for Sustainable Development, Août 2005, en ligne: http://www.iisd.org, p.9.

391 Id., note 374, p. 3.

392 Aguas Argentinas, S.A., Suez, Sociedad General de Aguas de Barcelona, S.A. and Vivendi Universal, S.A. v. The Argentine Republic, précité note 387, p. 2; J. VINUALES, op. cit., note 362, p.76.

393A. VAN DUZER op. cit., note 382, p. 16.

trancher en vertu de son pouvoir résiduel394. Tel que nous l'avons soulevé plus haut, le tribunal dans Methanex était arrivé à une conclusion similaire en se basant sur l'article 15(1) des règles de la CNUDCI, l'équivalent de l'article 44 de la Convention du CIRDI.

Le tribunal a également élaboré des conditions en vertu desquelles de telles communications seront permises en se basant sur les précédents des autres juridictions qui se sont prononcées sur cette même question. Ces conditions sont au nombre de trois : (a) la pertinence quant à l'affaire en cause, (b) le caractère convenable de l'intervention d'une tierce partie d'agir en tant qu'amicus curiae dans ladite affaire et (c) la procédure à travers laquelle l'intervention d'amicus curiae sera effectuée et considérée395.

Les plaignants étaient contre une telle interprétation. Selon eux, la permission d'amicus curiae est une question substantive et non procédurale puisqu'ils seraient entraînés dans un litige avec des entités autres que les parties à l'arbitrage. En adoptant la position retenue dans Methanex, le tribunal refusa une telle approche. Il a réitéré fermement que l'amicus curiae n'est pas une partie au litige, son rôle unique est d'assister le tribunal dans sa décision396. Cette assistance consiste à transmettre au tribunal des arguments, des perspectives et des éléments d'expertises que les parties n'ont pas soulevés397. Le tribunal a également décidé que le mémoire présenté par les amici curiae pourra traiter des questions factuelles et des questions de droit398.

394 Id., note 387, p. 3.

395 Id., note 387, p. 4; J. VINUALES, op. cit., note 362, p.76.

396 Methanex Corporation c. United States of America, Decision of the Tribunal on Petitions from Third Persons to Intervene as «Amici Curiae, précité note 376, p.14.

397 Id., note 387, p. 4.

398 Id., note 387, p.10.

L'amicus curiae peut donc prendre des positions en soulevant des arguments sur les points de fait ou de droit. Cela est d'ailleurs explicitement prévu par l'article 37(2) du nouveau règlement d'arbitrage du CIRDI.

Enfin, de nombreuses décisions ont insisté sur le fait que les amici curiae pouvaient communiquer des mémoires dans la limite de la discrétion et de l'acceptation de la juridiction saisie. Il ne s'agit donc pas d'un droit. Seuls les États membres ou les parties aux différends ont le droit d'être entendu399. L'accès à la justice est uniquement garanti par la voie des traités, qui l'octroient a priori uniquement à un investisseur ou à un État.

Dans tous les cas étudiés, les intervenants ont soutenu que leur participation serait édifiante à la transparence de l'instance et donc à l'acceptation par le public des décisions de ces tribunaux400. L'accès de la société civile aux audiences serait désormais nécessaire afin de garantir la transparence du processus401. Ce dernier argument a longtemps été soulevé par la société civile en sa propre faveur. Dans la partie qui suit, nous aborderons la question de la transparence et de l'intérêt public en cause dans ces décisions ainsi que les effets suscités par les interventions d'amicus curiae.

399 M. MATSUSHITA et al., op. cit., note 370, p.37; J. VINUALES, op. cit., note 362, p.74; Rapport de l'Organe d'appel, ÉtatsUnis - Imposition de droits compensateurs sur certains produits en acier au carbone, plomb et bismuth laminés à chaud originaires du Royaume-Uni, WT/DS138/AB/R; adopté le 10 mai 2000, Paragraphes 42..

400 A. VAN DUZER op. cit., note 382, p. 13.

401 Id., note 382, p. 16.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci