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La preuve sur internet: le cas de la vente en ligne

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par Kouadio Pacôme FIENI
Université de Cocody-Abidjan - D.E.A. 2006
  

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II : L'application de la lex fori à l'administration des modes de preuve

349. CARBONNIER énonce que « pour être porté en justice, chaque moyen de preuve doit, selon sa nature, se couler dans une procédure particulière »250(*). Et HUET d'ajouter : « la preuve n'est réputée faite que si elle est régulièrement produite ou provoquée, selon une méthode et une procédure que la loi réglemente minutieusement »251(*).

350. Unanimité de la doctrine. Sur cette matière de l'administration des modes de preuve, il faut noter que la détermination de la loi applicable ne semble pas, a priori, soulever de grandes difficultés en droit international privé. La doctrine, en cas de conflit de lois dans l'espace, est unanime pour dire que seule la loi du for, loi de la procédure est apte à régir la matière.

351. Traditionnellement, on admet que les règles se rapportant aux conditions dans lesquelles les parties à une instance établissent la réalité de leurs allégations au regard des modes admis sont sans influence sur le résultat de la question de fond252(*).

352. Les dispositions relatives à l'administration des procédés de preuve ont pour objet immédiat la célérité253(*) et le bon ordre du procès254(*). D'ailleurs, « instituées en vue d'une bonne administration de la justice255(*), elles tiennent à l'activité proprement juridictionnelle du magistrat »256(*), autrement dit « de la façon dont procède, matériellement, le juge pour mener l'instance jusqu'à son terme »257(*).

353. L'application de la lex fori à la matière de l'administration des procédés de preuve se fera tantôt sous l'angle de l'administration des modes matériels de preuve (A), tantôt sous celui des modes immatériels258(*) de preuve (B).

A- L'administration des procédés matériels de preuve

354. Nous envisagerons, ici, l'administration, en cas de conflit de lois dans l'espace, des preuves littérales et des expertises.

355. Administration des preuves écrites. S'agissant de l'administration des preuves écrites, il faut observer que l'administration des incidents relatifs à la production des preuves écrites est indépendante de l'autorité ou de la force probante de ces procédés de preuve. Ce lien ne remet pas en cause la soumission de l'inscription de faux ou de la vérification d'écriture à la loi du juge saisi.

356. On conçoit que la lex loci actus, en tant que loi applicable à la crédibilité des modes écrits de preuve, doive régir l'admissibilité ou la recevabilité des procédures relatives à la contestation des écrits. On doit également concevoir qu'il appartient à la lex fori, en tant que loi applicable à l'administration des incidents relatifs à la preuve écrite, de déterminer les pouvoirs du juge saisi, ainsi que les formes de l'inscription de faux et de la vérification d'écriture.

357. Inscription de faux. Par exemple, dans le cadre d'une inscription de faux, c'est à la lex fori qu'il reviendra de procéder à la désignation du juge compétent pour connaître de la demande, de déterminer si l'inscription de faux doit être soulevée à titre principal ou à titre incident et de fixer les différentes phases de la procédure.

358. Vérification d'écriture. S'agissant d'une vérification d'écriture, la lex fori déterminera la juridiction apte à connaître de la contestation, ainsi que le délai d'introduction de la demande, et, enfin, indiquera si celle-ci doit être présentée à titre principal ou incident. HUET conclut alors en ces termes : « toute cette réglementation se rattache à la procédure, car elle touche à l'exercice même du pouvoir judiciaire : elle ne peut jamais dépendre que de la loi de l'Etat dont le juge tient ses pouvoirs de juridiction »259(*).

359. Expertises. Dans le même esprit, et ce dans le cadre de l'administration des expertises, on retiendra que la loi du for régira également l'expertise en écriture que le juge compétent aura, le cas échéant, ordonnée. Dans cette hypothèse, et à défaut d'accord entre les parties à la vente en ligne, le juge déterminera les pièces de comparaison nécessaires à la bonne exécution, par l'expert désigné, de sa mission. Bref, et de manière générale, toute expertise doit être exécutée conformément aux exigences de la lex fori, dès lors qu'elle se trouve ordonnée par une autorité judiciaire.

360. L'administration des procédés immatériels, à l'instar de l'administration des modes matériels de preuve, sera assujettie à la loi du juge saisi.

B- L'administration des procédés immatériels de preuve

361. Les procédés dits «immatériels» de preuve sont au nombre de trois : le témoignage, l'aveu et le serment. En cas de conflit de lois en la matière, il reviendra à la loi du juge saisi de régir les questions se rapportant à ces modes de preuve.

362. Administration du témoignage. D'abord, s'agissant du témoignage, il faut remarquer qu'étant stricto sensu considérées comme relevant des règles de procédure, ses formes d'administration doivent indéniablement ressortir à la compétence de la loi du juge saisi260(*). C'est la raison pour laquelle, lorsque ce procédé de preuve est administré en justice au moyen d'une procédure d'enquête, le «calendrier» de l'enquête sera nécessairement fixé par référence à la loi du juge saisi. Cette dernière régira également les modalités de convocation des témoins et celle de leur audition.

363. Il appartiendra encore à la loi du for de déterminer dans quelles conditions doivent se faire les dépositions, à savoir si les témoins doivent déposer successivement, s'ils peuvent faire l'objet d'une confrontation ou s'ils peuvent modifier leurs dépositions.

364. Administration de l'aveu. Ensuite, en ce qui se rapporte, à l'aveu, une doctrine unanime semble désigner la lex fori comme seule compétente pour déterminer les règles à respecter en vue d'obtenir et de provoquer un aveu. A cet égard, la procédure de la comparution personnelle, la détermination des personnes qui y sont soumises, les pouvoirs du juge en la matière, la fixation, le cas échéant, des conséquences attachées à la non-comparution et au refus de répondre d'un plaideur, seront gouvernés par la loi du juge saisi.

365. Nonobstant les réserves de certains auteurs261(*), il semble acquis que la lex fori ait également vocation à régir l'administration de l'aveu extrajudiciaire, tout comme elle est appelée à gouverner la production en justice du serment.

366. Administration du serment. Relativement au serment, enfin, la doctrine semble faire preuve d'une convergence d'opinions. L'administration du serment judiciaire, parce qu'elle tient essentiellement à la procédure de l'instance, doit incontestablement être assujettie à la loi du juge saisi.

367. Dans un ordre d'idée identique, lorsque le serment est déféré par une partie, le jugement devra préciser que la partie à laquelle le serment est déféré succombera dans sa prétention si elle refuse de le prêter et s'abstient de le référer. Ainsi, dans l'hypothèse de la vente en ligne, le serment, bien qu'il comporte des risques énormes pour la partie qui le défère, s'il est employé appellera l'application de la loi du juge devant lequel le litige est porté, c'est-à-dire la lex fori.

368. Les règles de preuves caractérisées par leur nature processuelle, comme cela vient d'être étudié, relèvent de la loi du juge saisi du litige. Il en va différemment des règles qui présentent une nature substantielle. Il convient de les examiner pour découvrir la loi appelée à les régir.

* 250Jean CARBONNIER, Droit civil. Introduction, op. cit., p. 314, n° 177.

* 251 André HUET, Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., n° 274.

* 252 Bernard AUDIT, Droit international privé, op. cit., n° 439.

* 253 La lenteur de la procédure est de nature à susciter une crise de confiance de la part des plaideurs. V. en ce sens Emmanuel JEULAND, Droit processuel, Paris, LGDJ, 2007, p. 108, n° 90.

* 254 Henri BATIFFOL, Les conflits de lois en matière de contrats : étude de droit international privé comparé, n° 438 ; Henri BATIFFOL et Paul LAGARDE, Droit international privé, op. cit., n° 709.

* 255 N'ayant pas reçu de définition technique, il peut paraître problématique de présenter la notion de « bonne administration de la justice ». Certes, l'expression est évocatrice car elle emprunte ses termes au langage courant. Elle semble donc faire référence à une acception communément reçue et non à une signification proprement juridique. De sorte qu'il n'y a, dans cette notion, aucune spécificité à l'égard du droit international privé puisqu'il s'agit, au contraire, d'une notion utilisée de façon tout à fait transversale (Nathalie LAVAL, « La bonne administration de la justice », Petites Affiches, 12 août 1999, n° 160, p. 12. V. aussi les développements de Monsieur JEULAND qui qualifie l'administration judiciaire de « discipline embryonnaire », Emmanuel JEULAND, Droit processuel, op. cit., p. 107 et s, n° 89 et s. Pour une analyse de la notion de bonne administration de la justice en matière de compétence juridictionnelle, v. Anne SINAY-CYTERMANN, « L'ordre public en matière de compétence judiciaire internationale », t. 1, thèse, Strasbourg, 1980, p. 244 et s, n° 122 et s.). Il faut préciser que l'administration de la justice ne se confond pas avec la procédure. Plus largement que la procédure, l'administration de la justice correspond à l'organisation et la gestion du service public de la justice (Thierry RENOUX et André ROUX, L'administration de la Justice en France, Que sais-je ?, Paris, PUF, 1994, p. 7). L'adjectif qualificatif de « bon » désigne, quant à lui, une certaine qualité de l'administration de la justice, voire une rationalité qui serait guidée par le sens commun (« Tout comme la bonne foi, les bonnes moeurs ou la conduite en bon père de famille, la bonne administration de la justice exprime par la présence de l'adjectif qualificatif "bon", la raisonnabilité, la normalité d'un comportement humain ou d'une situation », Nathalie LAVAL, « La bonne administration de la justice », op. cit., p. 18, n° 160). Par ailleurs, la notion peut aussi faire

référence au contexte et à la manière dont sont rendues les décisions judiciaires (Hélène PAULIAT, « Les différents modes d'administration de la justice en Europe et au Québec et leur influence sur la qualité », in L'administration de la justice en Europe et l'évaluation de sa qualité, sous la dir. de Marco FABRI, Jean-Paul JEAN, Philip LANGBROEK et Hélène PAULIAT, Paris, Montchrestien, 2005, p. 23). La notion de bonne administration de la justice sert alors à établir les conditions raisonnables qui permettent la viabilité du service public tout en conservant une qualité satisfaisante de la justice. Prise dans ce sens, la notion de bonne administration de la justice a donc la valeur d'un objectif à atteindre. Elle constitue, selon le mot de Nathalie NAVAL, un standard juridique dans le sens où elle s'adapte aux circonstances et où elle fait appel à l'expérience pratique qu'a le juge de sa fonction, sans que cela découle d'une règle juridique imposée (« Le standard (...) ne se prête pas à une application mécanique. C'est l'intuition et l'expérience pratique des choses de la vie qui inspirent et guident le juge dans l'application empirique du "standard". L'intuition et l'expérience prennent la place du raisonnement et de la logique », A.-A. AL-SANHOURY, « Le Standard Juridique », in Recueil d'études sur les sources du droit en l'honneur de François Gény, t. II : Les sources générales des systèmes juridiques actuels, Paris, Librairie du recueil Sirey, 1934, p. 146).

* 256 André HUET, Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., n° 274.

* 257 Pierre MAYER et Vincent HEUZE, Droit international privé, 9e éd., Paris, Montchrestien, 2007, p. 374, n° 506.

* 258 Il ne s'agit pas des procédés électroniques de preuve étudiés dans la première partie de ce travail. Ici, nous visons le témoignage, l'aveu, et le serment, qui apparaissent comme des procédés de preuve impalpables, à la différence de la preuve écrite classique, celle sur support papier.

* 259 André HUET, Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., n° 289.

* 260 Thierry VIGNAL, Répertoire international Dalloz, V° Preuve, n° 52.

* 261 BATIFFOL et LAGARDE, Droit international privé, op. cit., n° 709. Ces auteurs estiment que la compétence doit aller à la loi du lieu de l'aveu.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille