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La dynamique des droits de la défense dans le code de procédure pénale. Cas de la préparation du procès

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par Bernard BELBARA
Université de Ngaoundéré - DEA 2006
  

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B- Les particularités du système d'indemnisation du CPP255(*)

Contentons-nous d'examiner l'organisation et le fonctionnement de ce système (1) avant de s'attarder sur la procédure à respecter (2).

1- Organisation et fonctionnement du système camerounais d'indemnisation

Analysons les séparément.

186. Relativement à l'organisation du système, la juridiction compétente pour statuer sur l'action en indemnisation siègera toujours en collégialité et en premier ressort256(*). Il s'agira de toute évidence d'une commission ad hoc dont la composition sera tributaire de la qualité de l'auteur de la garde à vue ou de la détention provisoire abusives, magistrat ou fonctionnaire de la police judiciaire.

Quand la commission statuera sur des accusations portées contre des magistrats257(*), elle sera ainsi constituée :

o Président : un conseiller de la Cour Suprême,

o Membres : deux magistrats de la Cour d'Appel,

o Un représentant de l'autorité chargée du contrôle supérieur de l'Etat,

o Un représentant de l'administration en charge des finances publiques,

o Un représentant l'administration en charge de la fonction publique,

o Un député désigné par le Bureau de l'Assemblée Nationale,

o Le bâtonnier de l'ordre des avocats ou son représentant.

Quand elle statuera sur des demandes dirigées contre des OPJ, la commission se composée des autorités outre celles sus mentionnées, des représentants des administrations en charge de la police judiciaire (sûreté nationale ou gendarmerie) à raison d'un représentant par administration. Chaque administration devant désigner un représentant titulaire et un suppléant.

187. Quant au fonctionnement de la commission, relevons que cette dernière sera saisie par voie de requête dans les six mois de la cessation de la garde à vue, de la décision de non lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive. La procédure à suivre sera celle applicable devant la Chambre administrative de la Cour Suprême. Après débats, la décision sera rendue en chambre de conseil. La décision rendue doit être motivée car elle ouvre droit à appel devant la chambre judiciaire de la Cour Suprême, qui elle statuera en dernier ressort. Les délais d'appel sont similaires à ceux prévus pour le pourvoi en matière civile.

2- La procédure d'indemnisation

Des conditions de fond et de forme devront être remplies.

188. Traitant des conditions de forme, selon les termes de l'article 237 alinéa 6 du CPP, la commission sera saisie au moyen d'une requête. Celle-ci devra contenir l'exposé des faits et de toutes les indications importantes. Le délai de saisine de la commission est de six (06) mois à compter de la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive. Notons tout de même que les conditions de la responsabilité, sans être légères apparaissent draconiennes. Ce sont les suivantes :

Ø L'existence d'une garde à vue ou d'une détention abusive.

«L'abus« ici renvoie au premier chef à une privation de liberté anormalement longue, en violation des articles 119 et suivants (garde à vue) et 221 et suivants (détention provisoire) du CPP. Il peut de même s'agir d'une garde à vue ou d'une détention provisoire sans titre ou avec titre vicié eu égard à l'incompétence de l'autorité signataire ou de tout autre défaut l'affectant pouvant justifier sa nullité258(*).

Ø L'existence d'une décision de non lieu ou d'acquittement devenue irrévocable.

Les propos du Pr. FRANÇOIS ANOUKAHA sont hautement illustratifs. C'est pourquoi nous n'hésiterons pas à les reproduire. Selon cet imminent universitaire en effet, « cette condition259(*) suppose que la procédure se soit poursuivie jusqu'à la phase d'instruction ou de jugement. Or il peut y être mis fin dès le niveau de l'enquête. C'est dire que si l'individu a été irrégulièrement privé de sa liberté lors de cette phase et qu'il ait été mis un terme à l'affaire, il ne pourra pas être indemnisé. Redoutant alors la décision de non lieu du magistrat instructeur ou la décision d'acquittement du juge de jugement, l'autorité de police se dépêchera, après son forfait, de laisser l'individu en liberté à la clôture de la prétendue enquête ouverte. Il pourra en être de même de la décision de classement sans suite du procureur de la république usant de son pouvoir d'opportunité des poursuites ».

189. A nos yeux, dans l'optique de la garantie des droits de la défense, il aurait été heureux d'inclure les garde à vue abusives, voire fantaisistes s'étant soldées soit au niveau de la police judiciaire ou du parquet dans cette fourchette des bénéficiaires de ce système d'indemnisation.

Ø Autre condition, l'article 1er du CPP exige également que le demandeur à l'indemnisation rapporte la preuve qu'il « a subi du fait de (la) détention un préjudice actuel d'une gravité particulière ». La commission appréciera dès lors la gravité des atteintes, mieux du préjudice en fonction des pièces justificatives servies par le requérant, lesquelles permettront à coup sûr de déterminer l'assiette de l'indemnisation. Loin d'être à l'abri des critiques, cette dernière condition, loin de nous faire pleurer, suscite de réelles inquiétudes. On pourrait même dire que le législateur se moque des victimes des détentions abusives. Les termes de l'article 236 paraissent trop restrictifs. Si non, comment exiger un préjudice d'une gravité particulière si tant il est vrai que le seul fait pour un présumé innocent d'être détenu260(*) constitue en lui-même une mesure d'une particulière gravité ? Nos cellules de détention autres lieux de privation se seraient-ils entre temps transformés cercles de divertissement ?

190. À nos yeux un système automatique d'indemnisation devrait voir le jour, ne serait-ce qu'après la détention provisoire261(*). Pareille solution a par ailleurs déjà fait ses preuves dans certains pays étrangers comme l'Allemagne. En toue constance, l'application stricte de ces dispositions risque de ponctionner, voire d'idéaliser le droit à indemnisation car les victimes ne manqueront pas, à moins qu'elles n'existent pas encore. Le législateur a peut être pris peur de l'impact financier d'un éventuel système automatique indemnisation. Les droits de la défense, loin d'être célébrés s'en trouvent marginalisés, piétinés. Or, dans un pays à forte armature juridique, fortement pourvu en ressources comme le notre, les soucis économiques ne devraient pas prendre le pas sur les droits les plus élémentaires de l'homme. Car le risque à éviter est que notre procédure pénale ne soit à l'image de notre économie, sous développée.

191. Pour tout dire, les réactions du Droit positif en cas de violation des droits de la défense, sont de manière somme toute globale fortement dissuasives. En instaurant en amont un formalisme protecteur, en aval des sanctions et voire des mécanismes de cessation des privations illégales, notre législateur a fait oeuvre de visionnaire. Son travail est certes perfectible sur certains de ses aspects, mais l'heure nous semble venue de célébrer les droits et libertés de l'individu, d'un point de vue camerounais.

* 255 A signaler qu'indépendamment de l'entrée en vigueur du CPP le 1er janvier 2006, nombre de ses innovations ne sont pas encore traduites sur le plan pratique. C'est le cas de la commission que nous examinons et ce qui justifie l'usage du futur simple, par exemple, « Quand la commission ... statuera », en espérant qu'elle le fasse un jour.

* 256 Article 237 alinéa 1 du CPP.

* 257 Article 237 alinéa 2 du CPP.

* 258 F. ANOUKAHA, « La liberté d'aller et de venir au Cameroun depuis le nouveau code de procédure pénale », in Annales de la Faculté des sciences juridiques et politiques de l'Université de Dschang, op. Cit.

* 259 Celle de l'existence d'une décision de non lieu ou d'acquittement devenue irrévocable.

* 260 Qui plus est dans de sordides conditions !

* 261 Qu'on pourrait étendre à la garde à vue, si entre temps l'argument économique n'est pas mis en avant.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry