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La dynamique des droits de la défense dans le code de procédure pénale. Cas de la préparation du procès

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par Bernard BELBARA
Université de Ngaoundéré - DEA 2006
  

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CONCLUSION PARTIELLE

192. L'ensemble des règles de procédure protectrices de la personne poursuivie gravite autour de la présomption d'innocence. Cette dernière autorise la personne poursuivie à disposer de la puissance de l'Etat pour répondre aux accusations dont elle est victime. La mise en oeuvre de ce droit et corrélativement des droits de la défense ainsi que les statuts qui jalonnent la procédure, peut s'analyser comme une succession d'étapes, plus protectrices les unes que les autres, vers la reconnaissance de l'innocence ou de la culpabilité. User des droits de la défense contribue à sanctionner les excès et les erreurs.

193. Les procédures de garantie de l'exercice des droits de la défense constituent le dispositif le plus sensible de tout système judiciaire. Malgré le risque de « pré-jugement » de ralentissement inhérent au formalisme procédural, relevons tout de même que c'est un excellent instrument de la préservation des droits et libertés individuels, des droits de la défense. Il permet dans cette optique de prévenir en amont les comportements susceptibles de compromettre irrémédiablement les intérêts de la personne poursuivie. En cas d'inobservation de ces garanties préventives cependant, des mesures plus radicales pourront être prises pour assurer rétablir les droits de la défense. Ces dernières viseront d'abord l'acte irrégulièrement accompli, et se résument en la nullité avec ses diverses modulations. Ensuite, l'auteur de l'atteinte pourra aussi être sanctionné. C'est pourquoi toute une panoplie de sanctions civiles, disciplinaires et pénales est prévue à cet égard. En dernière analyse, la réparation de la situation contraire aux droits de la défense est prévue, à travers le concours de la procédure de libération immédiate et, s'il y a lieu, la personne victime de ces abus pourra se voir ouvrir les portes de l'indemnisation de l'article 236 du CPP, quoique cela relève encore de l'utopie.

CONCLUSION GENERALE

194. Au sortir de cette étude, il peut paraître redondant de vouloir conclure. Nous avons suivi les pas du législateur du 27 juillet 2005, et il nous a largement édifié, dans la mesure où le CPP tant attendu traduit fidèlement toute la sollicitude des pouvoirs publics camerounais quant à la modernisation d'une justice pénale, garante des droits des citoyens et reposant sur des principes républicains universellement admis262(*). C'est le pourquoi la théorie des droits de la défense, qui naguère n'était qu'une pure construction doctrinale, ponctuellement relayée par la jurisprudence, y occupe une place de choix. N'étant donc pas figée, mais essentiellement évolutive, la justice a besoin de se transcender afin de trouver un équilibre entre les règles de droit et les droits de l'homme. On pourra affirmer que, désormais, pour le législateur pénal, au delà de la personne poursuivie, il faudra considérer l'homme.

195. De manière plus radicale, cette mutation des droits de la défense est l'un des signes les plus probant de l'ouverture de la phase pré-sentencielle de notre procès pénal aux principes de l'équité procédurale, perfectionnement du modèle procédural pénal camerounais traditionnellement tiraillé entre les modèles inquisitorial et accusatoire.

196. Par ailleurs, l'exposé des diverses prérogatives nouvellement reconnues à la personne poursuivie constitue un parfait répondant aux droits de l'homme tels qu'aujourd'hui exaltés. La liberté individuelle s'en trouve célébrée, voire excellemment protégée. Elle traduit, quoiqu'on en dise, l'adaptation de la nouvelle procédure pénale aux nouvelles mentalités. Tout ceci nous permet de dire que les garanties inhérentes aux codifications internationales depuis longtemps ratifiées par notre pays, peuvent désormais être ressenties par les justiciables de toutes les catégories sociales. Ces traités internationaux relatifs aux droits de l'homme, faut-il le rappeler, sont incontestablement un facteur, voire un vecteur consolidant de l'Etat de droit263(*), notamment pour des Etats qui, à l'instar du Cameroun, sont en «espoir de démocratisation«264(*). Loin d'être un mirage, ces instruments juridiques offrent une protection juridique265(*), dès lors qu'ils sont attributifs de droits substantiels susceptibles d'invocabilité directe devant les tribunaux internes266(*).

Ce tableau n'est pas tout aussi reluisant comme on le laisserait croire. Le système est malheureusement perfectible.

197. D'abord au sujet de la consistance des attributions de l'avocat au niveau du stade policier de la procédure. Les pouvoirs de cet acteur, nous semble-t-il, doivent être légalement définis afin d'éviter tout télescopage avec ceux de la Police Judiciaire, car l'objectif est de faciliter le déroulement harmonieux des enquêtes, ce qui exige clarté, précision et objectivité. De la sorte, impératifs sécuritaires et libertés individuelles, pourront aller de pair. Le législateur pourrait à ce propos s'inspirer des évolutions consacrées en droit français, notamment par la Loi du 15 juin 2000 sur la protection de la présomption d'innocence ou de la Loi Perben du 09 mars 2004 sur les évolutions de la criminalité, pour antithétiques qu'elles soient.

198. Ensuite, au système d'indemnisation consacré par le code de procédure pénale, doit être substitué un système plus globalisant d'indemnisation qui englobera les éventuelles libérations de façade orchestrées par les OPJ véreux.

199. Enfin, pour assurer la productivité qualitative et quantitative du système de justice criminelle, la fluidité du travail du juge d'instruction nouvellement re-intronisé doit être à l'ordre du jour. Elle pourra passer par l'allègement de ses tâches administratives et peut être par l'adjonction d'autres acteurs, afin de mieux gérer les flux et d'éviter conséquemment les risques inhérents à une justice d'abattage. Il faudra donc songer à une augmentation du personnel judiciaire. L'exercice efficient des droits de la défense commande en bonne logique des structures, du personnel, bref de l'infrastructure.

200. D'un autre point de vue, les innovations du CPP sont à relativiser. Certes, et d'un point de vue théorique, on peut dire que le CPP, par la faiblesse de ses vides juridiques est un excellent outil de promotion des droits fondamentaux et la voie royale vers la consolidation de l'Etat de droit. Mais d'un point de vue pratique, des limites s'imposent. Comme le démontre, avec raison M. ATHANASE FOKO, les évolutions générées par le CPP ne doivent pas être prises à la lettre267(*). L'on devra en tout cas composer avec des limites d'ordre subjectif268(*) et objectif269(*).

201. Le modèle accusatoire de justice répressive correspond certes à un idéal de justice. C'est vrai, mais son application ou encore sa généralisation à toutes les phases du procès peut engendrer de sérieuses inégalités entre les usagers du service public de la justice. « La loi pénale s'impose à tous »270(*), cela ne fait l'ombre d'aucun doute, mais tous n'ont pas les mêmes potentialités pour bénéficier des facilités qu'elle offre. Ceci est d'autant plus vrai que les services d'un médecin ou d'un avocat sont intimement liés à la bourse du justiciable. Les justiciables financièrement démunis seront donc condamnés à leur triste sort. C'est pourquoi, sous peine d'instaurer une justice pénale de classe, le législateur, nous semble-t-il, doit être regardant sur ces aspects là271(*), étant donné que les droits de l'homme, exigence de la contemporanéité ne doivent pas céder le pas devant les préoccupations économiques. Car, à force d'avancer ces arguments, notre procès pénal, loin de se perfectionner, sera à l'image de notre économie, sous développé.

202. Quoiqu'il en soit, soyons optimistes. Le législateur national est certes à l'école des droits de l'homme ; il ne les professe cependant pas encore. Laissons lui donc le temps de se familiariser avec ces exigences des temps contemporains. L'écriture des lignes directrices du procès pénal camerounais n'a été qu'amorcée. Et d'ailleurs, « même si la loi présente des lacunes, la Cour Suprême qui est chargée de veiller à son application doit obliger les juges à plus de prudence, surtout lorsque la liberté (...) est menacée «272(*). Ces exigences là, et c'est par là que nous sortirons, doivent être enserrées dans des limites temporelles bien définies. C'est pourquoi, la justice pénale, loin d'être expéditive et lente, doit accélérée, car devant composer avec les autres garanties procédurales fondamentales. Aurons nous peut-être l'occasion de revenir sur ces questions de temps. En tout cas il faudra y penser, si tant il est vrai qu'elles ont énormément contribué à la refonte du procès pénal camerounais273(*).

* 262 Y. MBUNJA, « Les droits de la défense dans le code camerounais de procédure pénale », in Annales de la Faculté des sciences juridiques et politiques de l'Université de Dschang, Edition spéciale sur le Nouveau code de procédure pénale, vol.11, 2007, pp 57-77.

* 263 A. D. OLINGA, « Le contentieux camerounais devant le Comité des Droits de l'Homme et de la Commission africaine de Banjul », in Cahier africain des Droits de l'Homme, n°1 août 2001, pp 115-135.

* 264 Expression empruntée à L. SINDJOUN, La politique d'affection en Afrique noire, Boston University, 1998 ; p.3.

* 265 J.D. BOUKONGOU, « Le droit international des droits de l'homme : mirage ou protection juridique ? », in Annales de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université de Dschang, Tome 1, 1997, pp 102-120.

* 266 A. D. OLINGA, « L'applicabilité directe de la convention internationale relative aux droits de l'enfant devant le juge français », in RUTDH, 1995, n°24, pp 678 et ss.

* 267 A. FOKO, « Le nouveau code de procédure pénale : la panacée des garanties des libertés individuelles et des droits de l'homme au Cameroun ? In Annales de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université de Dschang, Edition spéciale sur le Nouveau code de procédure pénale, vol.11, 2007, pp 22-57.

* 268 Où l'auteur range l'analphabétisme de masse, les difficultés liées à la compréhension du langage juridique, la pauvreté ambiante.

* 269 Au sein desquelles l'auteur range les lenteurs judiciaires, l'insuffisance augmentation du personnel judiciaire...

* 270 Article 1er du CP.

* 271 Pourquoi ne pas songer à un système où des avocats ou encore des médecins seront d'office commis en cas de pauvreté établie, ces derniers devant être rémunérés par l'Etat ?

* 272 J. NGUEBOU, « La détention provisoire dans l'avant-projet camerounais de procédure pénale », Thèse de 3ème cycle, Université de Yaoundé, 1982, p. 394

* 273 Ce n'est pas un hasard si l'une raison ayant justifié la reforme de 2005 est la réduction des lenteurs judiciaires et l'exécution rapide des décisions de justice.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard