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Contribution de la gestion des aires protégées du bassin du Congo au développement durable à  l'échelle locale. Cas du Tri- national de la Sangha (TNS )

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par Danièle Fouth
Université du Maine - Master 2 sciences humaines et sociales option géographie et aménagement 2012
  

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Chapitre 2 : La gestion du Tri-national de la Sangha (TNS)

Avant d'aborder la question de la gestion du TNS, il convient de présenter une image de ce paysage.

1 Aperçu général du TNS

Les enquêtes biologiques menées par deux ONG de conservation, le WCS et le WWF vers la fin des années 1980 et le début des années 1990 ont mis en exergue la forte richesse biologique du paysage du Tri-National de la Sangha, région menacée par l'exploitation incontrôlée du bois et les activités de chasse illicite à des fins commerciales. Au cours de cette même période, les deux ONG ont établi des projets de terrain dans les différents sites.

Les gouvernements des pays concernés ont très vite réalisé l'importance de la région de la Sangha au niveau mondial et se sont engagés à y créer plusieurs aires protégées. En 1990, le Parc National Dzanga-Ndoki et la Réserve Spéciale Dzanga-Sangha en RCA sont classés et en 1993, le Parc National de Nouabale-Ndoki au Congo les a suivis. Au Cameroun, la zone de Lobéké a été classée parc national en 2001. Le fait que les trois zones de conservation soient contiguës et partagent les mêmes types de végétation, et les mêmes communautés locales - notamment, les peuples de la forêt qui ont des cultures et traditions communes et sont confrontés à des problèmes similaires - a fourni une excellente opportunité de développer un programme transfrontalier de conservation.

Suite au sommet des Chefs d'Etats d'Afrique Centrale de 1999 à Yaoundé avec la naissance subséquente de la COMIFAC, le Tri-National de la Sangha est devenu réalité dans le cadre d'un accord de coopération entre les trois pays concernés (Cameroun, RCA, Congo) signé le 07 décembre 2000 (TNS, 2008).

L'objet de l'accord est de coopérer afin de gérer ensemble un complexe transfrontalier de zones de conservation appelé Tri-National de la Sangha, en abrégé « TNS ». Plus spécifiquement les pays concernés s'engagent à une gestion en partenariat des domaines suivants :

- Harmonisation des législations ;

- Lutte anti-braconnage ;

- Recherche scientifique ;

- Suivi-écologique ;

- Contrôle de l'exploitation des ressources ;

- Ecotourisme ;

- Appui institutionnel et renforcement des capacités

- Implication des communautés riveraines et des opérateurs économiques ; - Financement des activités ;

- Partage des retombées ;

- Mise en place d'un système de communication transfrontalière (FTNS, 2011).

Le TNS comporte une zone protégée principale destinée à la conservation de la biodiversité. Les activités humaines y sont soit interdites, soit contrôlées. Il comporte également une zone périphérique à usages multiples au sein de laquelle il est permis d'exploiter des ressources; cette dernière doit faire l'objet d'une gestion durable des ressources forestières et fauniques.

La zone de protection principale du TNS comprend les Parcs nationaux de Lobéké (Cameroun), Dzanga-Ndoki (RCA) et Nouabalé Ndoki (Congo). La zone périphérique contient des forêts de production (concessions d'exploitation forestière industrielle, forêts communales, forêts communautaires), des zones de gestion de faune (concessions de chasse sportive, zones de chasse communautaire), des zones d'agroforesterie ainsi que des zones d'habitation.

Au niveau de la gestion, les conservateurs des trois parcs nationaux collaborent depuis plusieurs années à travers des rencontres annuelles. Des accords additionnels ont été élaborés en vue de la formalisation d'une stratégie conjointe de lutte contre les activités de braconnage et pour la libre circulation du personnel (TNS, 2010).

Le TNS est un modèle pionnier en matière d'initiatives de conservation transfrontalières et de développement d'une politique forestière dans le Bassin du Congo.

1.1 Localisation géographique et description du TNS

Le Paysage Tri-National de la Sangha est géographiquement situé entre les latitudes 3°32'12»N et 0°40'29»N; et les longitudes 15°28'26»E et 17°34'8»E. Sa superficie totale (parcs nationaux et leurs zones périphériques) s'élève à environ 44000 km2 et s'étend sur trois pays que sont le Cameroun, la République centrafricaine et la République du Congo (figure 2). La section congolaise du Paysage s'étend sur les départements administratifs de Sangha et de Likouala. Elle couvre environ 21470 km2 et comprend sur 4268 km2, le Parc National de Nouabalé-Ndoki (PNNN) et 5 unités forestières d'aménagement (UFA) qui couvrent une superficie globale d'environ 17280 km2. Le PNNN touche à l'ouest le parc national de

Dzanga-Ndoki (1220 Km2) et la réserve spéciale de Dzanga-Sangha (3359 Km2) qui constituent le segment TNS de la République centrafricaine. La section camerounaise est quant à elle, centrée sur le parc national de Lobéké (2178 km2) entouré par 14 UFA couvrant ensemble 9784 km2 (De Wasseige, et al., 2009).

Figure 7: Carte de localisation du TNS (TNS, 2008)

Toutefois, le paysage TNS doit être perçu en terme d'axes d'intervention et de collaboration qui à leur tour définissent les limites géographiques à un moment donné. Les frontières géographiques sont par conséquent définies par les institutions (parties prenantes) impliquées. Il s'agit d'un arrangement institutionnel flexible dans le cadre duquel les gouvernements et un ensemble de parties prenantes décident de collaborer et d'oeuvrer afin de développer une vision cohérente pour le développement et la gestion du paysage. On constatera par exemple que depuis 2000 les limites ont changé en RCA avec la prise en compte dans le paysage de plusieurs unités forestières au Nord de la réserve ou au Congo avec l'inclusion de l'unité d'aménagement de la CIB à Pokola, quoique n'étant pas situé en périphérie du parc Nouabale Ndoki. Dans ce dernier cas de figure, l'importance industrielle de ce site dans la région a un impact socio économique très significatif sur le segment TNS Congo.

Dans ses limites actuelles, le TNS est logé dans quatre préfectures ou départements :

· Le département de la Boumba et Ngoko (Cameroun) avec pour chef lieu Yokadouma;

· Le département de la Sangha Mbaéré (RCA) avec pour chef lieu Nola;

· Les départements de la Sangha et Likouala (Congo) avec pour chef lieu Ouesso et Impfondo, respectivement.

Les trois centres administratifs situés à la périphérie de l'espace sont Yokadouma, Nola et Ouesso. Impfondo est situé en dehors des limites définies actuellement pour le TNS.

Selon l'EDF (2006), l'occupation des sols est répartie entre les parcs nationaux, les réserves et les concessions forestières (figure 8).

Parcs nationaux Réserves

Concessions forestières

71

21

8

Figure 8: Pourcentage d'occupation des terres du paysage TNS

Les mesures économiques incitatives créées par les concessionnaires forestiers, l'installation de sites industriels près des scieries et la mise sur pied d'un vaste réseau routier ont entraîné une immigration massive des populations dans la région. Le développement des infrastructures et les mutations socio-économiques en cours se font à une vitesse impressionnante. Près des deux-tiers de la population des villes industrialisées sont des immigrants venus des zones situées à l'extérieur du TNS (Noiraud, 2010).

1.2 Situation socio économique

L'économie du TNS est entièrement fondée sur l'exploitation des ressources naturelles. Dans le secteur formel, il s'agit de l'exploitation du bois et dans le secteur informel, de la viande de brousse, du vin de palme, du poisson, des diamants, et d'autres PFNL. Au niveau local, l'agriculture revêt une certaine importance au Cameroun. Il est difficile de définir la façon dont cette économie extractive influence la situation socioéconomique et les activités des centres administratifs ou des villages riverains. Le constat qui est fait, est celui d'une pauvreté ambiante. Certains villageois trouvent un emploi, mais la plupart des emplois sont réservés aux travailleurs mieux formés qui sont emmenés d'ailleurs.

Selon les résultats d'un recensement fait en 2006, la population humaine est inégalement repartie avec un taux d'urbanisation considérablement plus élevé que la moyenne nationale au sein des pays du TNS (TNS, 2008). Les centres administratifs sont situés juste sur la périphérie du TNS. Toutefois, les économies de ces centres dépendent grandement de ce qui est produit sous forme de nourriture, viande de brousse et autres PFNL, ainsi que des revenus générés par les ressources forestières et fauniques tirées dudit paysage (Tadjuidje, 2010).

 

Population
bantous

Population
pygmées

Population totale
par pays

Pourcentage
d'homme

Pourcentage
de femme

Cameroun

63150

10500

73650

49

51

Congo

54950

5300

60250

49

51

RCA

53250

4150

57400

49

51

Total

171350

19950

191300

 
 
 

Figure 9 : Répartition de la population du TNS dans les différents segments (TNS, 2008)

L'économie basée sur l'extraction des ressources forestières connaît de toute évidence des fluctuations considérables. A la fin des années 1990, Yokadouma, point central de

l'exploitation (incontrôlée) de bois, était une ville en plein essor (TNS, 2008). Selon la même source, la crise du marché du bois survenue au cours des dernières années a causé la fermeture de plusieurs scieries et ainsi contribué de façon indirecte à la dégradation des services sociaux (santé, éducation), dont l'état n'était déjà pas satisfaisant

Les sociétés forestières jouent un grand rôle dans ce paysage (Figure 10). En effet, les villes d'exploitation industrielle de bois apparaissent dès lors dans ce paysage comme des îlots autonomes où le concessionnaire fournit infrastructures et services sociaux à ses propres ouvriers et à leurs familles.

Figure 10: Carte de localisation des concessions d'exploitation forestières dans le TNS
(JMN, 2010)

En effet, la population de celles-ci a doublé au cours des 10 dernières années et continue de s'accroître, quoique à un niveau réduit (Tadjuidje et al, 2011). La création d'un ensemble de petits camps industriels continue surtout au Nord Congo. Selon la politique forestière actuellement en vigueur au Congo, des scieries doivent être construites dans chaque concession. Même si la création d'opportunités d'emploi au niveau local est parfois présentée comme le principe phare à la base de la construction des scieries dans chaque concession, dans la réalité, près des deux-tiers des travailleurs des villes d'exploitation forestières sont des immigrants venus des régions situées en dehors du voisinage immédiat.

Lorsqu'on considère la proportion des pygmées vivant dans les segments nationaux du TNS (figure 9), on peut dire que ce complexe dispose d'une forte population autochtone. Ces populations ne sont pas sédentaires et exploitent les ressources forestières et fauniques de façon artisanale ou rudimentaire dans le cadre d'une vie semi-nomade largement dépendante de la disponibilité de ces ressources. Différents groupes de Pygmées sont présents au sein du TNS, il s'agit des «Baka» au Sud-est Cameroun, des «BaAka» ou « Bayaka » au Sud de la RCA et des «Mbenzélé» au Nord du Congo. Dans le cadre de la présente étude, le terme général « pygmée » est communément utilisé pour désigner les différents groupes ethniques « semi-nomades » de la forêt. Ils constituent la clé de toute stratégie de conservation, d'utilisation durable des ressources dans le TNS et même un facteur déterminant dans la certification des activités d'aménagement de la forêt. Mais en dépit des efforts amorcés dans le sens de la prise en compte de leurs intérêts, compte tenu du fait qu'ils sont « difficiles à saisir », une question importante demeure: comment les impliquer, les respecter, leur donner parole (une voix) et les intégrer dans les actions de développement.

 

Photo 1 et 2 :
Moungoulou7 ;
Bayaka pendant une
danse culturelle à
Bayanga

Clichés: Danièle

Fouth, juin 2012 et J. M. Noiraud 2010

 

7 Case de pygmées

Concernant l'éducation, le système scolaire dans le TNS reste faible. Il fait face à un manque chronique d'enseignants et de matériel didactique. En RCA par exemple, le nombre d'analphabètes est estimé à 28% et celui des personnes ayant arrêté les études après le cycle primaire à 41%. Ceci en raison de l'enclavement de la zone, des conditions de vie difficiles, de la pauvreté et des habitudes culturelles. Les fonctionnaires affectés dans cette zone, ne regagnent simplement pas leurs postes de travail pour les raisons ci-dessus évoquées. La fréquentation des écoles par les enfants des populations semi-nomades reste très faible. Des mesures pour remédier à cette situation sont prévues dans les plans d'aménagement des différents parcs, notamment à travers par exemple la vulgarisation d'un modèle de maîtres parents pris en charge par la commune ou par les projets de conservation. Dans le segment TNS Cameroun, l'état prend en charge 54% du personnel enseignant fonctionnaire ou contractuel d'administration. 40% des enseignants sont pris en charge par la commune dans les établissements publics. Les 6% restant travaillent pour le compte des établissements missionnaires créés dans la localité pour l'éducation des jeunes enfants Baka. Le système et le programme scolaire sont différents du programme officiel appliqué au niveau national. Le système est basé sur ORA (Observer-Réfléchir-Agir) dans des centres dits centre d'éducation de base (CEB) (Tadjuidje et al, 2011).

En dehors des populations locales, plusieurs acteurs sont présents dans le TNS. On peut citer les administrations nationales (déconcentrées et décentralisées), les partenaires au développement (partenaires techniques, partenaires financiers, ONG de conservation, instituts de recherche), le secteur privé (sociétés d'exploitations forestières, d'exploitations minières, de chasse, de tourisme), et d'autres formes de groupement (associations, églises, etc.).

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius