WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Responsabilités du Commissaire aux Comptes

( Télécharger le fichier original )
par Hounaida DALY
Institut supérieur de gestion de Sousse - Tunisie - Maitrise en sciences comptables 2004
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

LA DEUXIÈME PARTIE 

LA RESPONSABILITÈ PÉNALE ET DISCIPLINAIRE DU COMMISSAIRE AUX COMPTES

La responsabilité du commissaire aux comptes est considérable, parce qu'elle ne se limite pas seulement à une responsabilité civile visant la réparation d'un préjudice causé. Elle s'étend à une responsabilité pénale ; car l'importance et l'utilité du contrôle doivent être assurées par l'instauration d'un système répressif rigoureux.

Bien que les principaux textes incriminant le commissaire aux comptes fautif figurent dans le C.S.C, cette responsabilité pénale trouve son fondement dans plusieurs autres textes légaux, notamment dans le C.P., auquel renvoie d'ailleurs le C.S.C. quant au secret professionnel

Ensuite, s'agissant d'une profession libérale dont la déontologie est essentielle, une troisième source de responsabilité apparaît qui est la responsabilité disciplinaire.

Cette responsabilité n'est pas moins importante que les deux autres, car elle cherche essentiellement à garantir la valeur du contrôle en sanctionnant le manquement aux obligations fondamentales ainsi que le défaut de qualités éthiques.

CHAPITRE PREMIER:

LES INFRACTIONS AU DEVOIR DE PARLER

L'application du droit pénal propre au commissariat aux comptes suppose que le commissaire ait failli à l'une de ses obligations fondamentales par action ou par omission

Le droit pénal étant d'interprétation stricte, seules les incriminations expressément définies par la loi ou par les textes réglementaires peuvent servir de fondements textuels aux poursuites, puis le cas échéant, à la condamnation. Les unes tiennent au manquement à une obligation relative à l'organisation de la profession, les autres à une obligation propre à l'exécution des missions légales.

Concernant la première catégorie d'infractions, elles ne soulèvent pas de difficultés particulières. En effet, l'exercice irrégulier de la profession peut prendre généralement deux formes ; d'une part, il s'agit de l'atteinte aux monopoles professionnels94(*), et d'autre part, de l'exercice de la profession en situation de dépendance pour violation d'une incompatibilité professionnelle, bien que le législateur tunisien ne reconnaisse pas encore cette forme d'incrimination95(*)

On espère une intervention de la part de notre législateur incriminant le non respect des incompatibilités légales afin de mieux préserver l'indépendance du commissaire aux comptes, but que le législateur semble vouloir renforcer avec le C.S.C.

De plus, ces infractions « montrent l'importance attachée par le législateur à la compétence et à l'efficacité, à priori, du commissaire aux comptes, même si la sanction le frappe à posteriori96(*)

On suppose, maintenant, un commissaire aux comptes légalement désigné et normalement mis en mesure d'exercer ses fonctions. A ce professionnel, trois obligations, pénalement sanctionnées, s'imposent et qui découlent au fond, du sens véritable de la mission. En effet, le commissaire doit « la vérité », parfois « la dénonciation », parfois « le silence97(*)».

Les incriminations attachées à cette mission, plus intéressantes et qui attirent plus l'attention, peuvent être réparties en deux catégories : d'une part, l'infraction au devoir de vérité (Section I), et d'autre part, l'infraction au devoir de dénonciation (Section II).

SECTION I : L'INFRACTION AU DEVOIR DE VERITÉ :

On sait que la principale mission du commissaire aux comptes est l'expression d'une opinion motivée sur la sincérité et la régularité des états financiers98(*) sans toutefois s'immiscer dans la gestion de la société ni la critiquer.

On doit noter que la vérification ne se borne pas aux seuls documents comptables de la société contrôlée ; elle peut, en effet, s'étendre au contrôle des informations contenues dans le rapport du C. Adm. Ou du directoire, et des documents présentés à l'A.G. concernant la situation financière de la société et il s'agit dans ce cas des diligences spécifiques.

De ce fait, le commissaire aux comptes se voit attribuer d'autres missions outre sa tâche principale.

L'importance du commissariat aux comptes s'accroît davantage lorsqu'on voit le législateur incriminer l'infraction concernant l'une et l'autre missions. Ainsi, il parle de la fourniture ou de la confirmation d'informations mensongères sur la situation de la société attachées au contrôle (I), aussi des indications inexactes lors des modifications du capital (II) et de la contribution à l'établissement de faux comptes et faux documents comptables pour minorer l'assiette de l'impôt ou l'impôt lui-même (III).

I ? La fourniture ou la confirmation d'informations mensongères sur la situation de la société :

Selon les dispositions de l'art 271 C.S.C : « est puni d'un emprisonnement d'un an à 5 ans et d'une amende de 1200 à 5000 D99(*) , ou de l'une de ces deux peines seulement, tout commissaire aux comptes qui aura sciemment donné ou confirmé des informations mensongères sur la situation de la société ...».

Pour que le délit soit perpétré, il faut que le commissaire aux comptes ait donné ou confirmé des informations sur la situation de la société ; que ces informations soient mensongères ; que le commissaire aux comptes ait agi sciemment100(*) .

Ce délit se justifie par la nécessité de punir sévèrement les commissaires qui ont trahi la confiance que les associés et le public leur avaient accordée. Dans la réalité du prétoire français, le délit le plus fréquemment retenu est celui d'informations mensongères101(*).

L'art 271 C.S.C. constitue donc le fondement légal du délit, mais pour que l'infraction soit consommée, il faut encore satisfaire les autres éléments constitutifs.

Il convient de souligner que l'infraction suppose ainsi la réunion de l'élément matériel (A) et l'élément moral (B).

A. L'élément matériel :

Le législateur utilise dans l'art 271 C.S.C. les termes « donné ou confirmé» et crée ainsi un large domaine pour les actes matériels pouvant entrer dans le cadre de cet article.

Même si le législateur utilise le terme « informations » au pluriel, la confirmation ou la fourniture d'une seule information peut être condamnable102(*).

En effet, l'infraction suppose la réunion de deux conditions. Tout d'abord, il faut qu'il ait la communication d'informations concernant la société. Ces informations doivent être en rapport avec la mission du commissaire, c'est-à-dire concerner les comptes ou la situation financière de la société. En second lieu, l'information doit être mensongère, ce qui suppose non seulement l'inexactitude, mais encore la dissimulation103(*) .

Ainsi, il y a deux éléments dont la présence doit être établie, à savoir, une information mensongère et une transmission du commissaire de celle-ci. Toutefois, l'art 271 n'est pas très précis concernant le point de savoir quel doit être le contenu de l'information mensongère.

Alors une transmission matérielle de l'information mensongère par le commissaire aux comptes est nécessaire. Cette transmission est matériellement établie lorsque le rapport a donné ou confirmé le mensonge des dirigeants. Elle peut aussi prendre une autre forme que la rédaction d'un rapport.

L'art 271 C.S.C, étant peu précis, utilise seulement l'expression « donné ou confirmé » ; il s'ensuit que le mode de transmission est indifférent. Cela peut donc être fait, sous réserve d'en rapporter la preuve, par voie orale, écrite ou télématique, quel que soit le support, de manière publique ou privée104(*).

En pratique, c'est le rapport de certification du commissaire qui constituera le vecteur privilégié du mensonge105(*).

Il faut, pour que le texte s'applique, que les informations données ou confirmées sur la situation de la société soient mensongères106(*).

En effet, il a été jugé par la cour de cassation française que : « l'omission d'un renseignement ne peut, en principe, équivaloir à la communication d'une information inexacte ». La décision rendue dans une affaire relative à un défaut d'information sur les attributaires d'actions nouvelles dans le cadre d'un rapport relatif à la suppression du droit préférentiel de souscription ne contenait pas de mensonge susceptible de tromper les actionnaires107(*).

L'arrêt, en raison de l'utilisation de la formule « en principe » n'exclut nullement qu'une décision en sens contraire soit rendue108(*).

Dés lors que le silence ou l'abstention est équivalent à une affirmation, les juges peuvent prononcer une condamnation.

Ainsi, par exemple, l'abstention du commissaire aux comptes face à un bilan manifestement inexact qui couvre des malversations des dirigeants engage sa responsabilité pénale. En revanche, s'il refuse de certifier le bilan, il ne peut avoir donné ou confirmé une information mensongère.

Pour Mrs. Monéger et Granier, l'importance attachée à la mission du commissaire aux comptes impose la rigueur, et les juges sont, en matière pénale, pleinement informés des éléments leur permettant de former leur intime conviction109(*).

Par exemple, l'affaire A.M.R.E.P. illustre les conséquences d'une défaillance des commissaires aux comptes quand la société qu'ils contrôlent publie une note d'information110(*). En effet, les commissaires de cette société holding qui n'exerçait aucune activité industrielle et commerciale directe, certifiaient les comptes individuels et consolidés sans effectuer de contrôle au niveau des filiales, et également sans prendre l'attache de leurs confrères commissaires des filiales. Pourtant, il déclaraient dans le rapport général à l'assemblée qu'ils avaient procédé aux contrôles « en faisant application des normes professionnelles généralement admises ».

Dans la note d'information soumise à la commission des opérations de bourse, ils avaient fait des déclarations inexactes relatives aux situations provisoires consolidées du milieu d'exercice arrêtées au 30 juin.

La cour d'appel de Paris, par un arrêt du 10-7-1987, a condamné les deux commissaires aux comptes.

La chambre criminelle a rejeté leurs pouvoirs par arrêt du 2-4-1990 en énonçant que caractérise en tous ses éléments le délit d'informations mensongères reproché aux commissaires d'une société, la C. Ap. qui, après avoir exposé que cette société a émis un emprunt obligataire au vu d'une notice de présentation soumise au visa de la C.O.B, faisant état de vérifications opérées par les commissaires sur les éléments chiffrés extraits des comptes annuels et des comptes consolidés, relève que les plus significatifs de ces comptes, tels la situation nette, le résultat d'exploitation et le bénéfice sont faux.

La cour a également constaté que, malgré la rectification à la baisse du bénéfice surestimé de la principale filiale, les prévenus ont maintenu leur certification des comptes consolidés et ont fait figurer les chiffres au bilan initial dans la notice sans mentionner la révision en baisse des résultats de la filiale et du groupe, tout en observant que les intéressés ont reconnu que l'élimination des comptes réciproques entre la société mère et ses filiales n'a pas été effectuée, ce qui a eu pour conséquence de majorer l'actif et le passif consolidés.

Un commissaire aux comptes qui savait par son collaborateur que les documents comptables de base pour les deux derniers exercices n'avaient pas été produits et q'une remise non comptabilisée de papier financier avait été faite à la banque, se rend coupable du délit d'informations mensongères en attestant que les vérifications avaient été effectuées selon les normes professionnelles et que les comptes étaient sérieux111(*).

De plus, exagérer n'est pas toujours mentir ; et c'est aux juges de faire la part de l'exagération tolérée et du mensonge interdit112(*).

Il faut en dernier ressort, laisser à la sagesse des juges le soin de bien mesurer la saine application de la loi. Ils savent qu'en l'occurrence, leur décision a des conséquences considérables113(*).

* 94 _ Le droit positif prévoit une double protection pénale de la profession contre l'exercice illégal de celle-ci. Et le port illicite du titre de commissaire aux comptes : l'art. 26 de la loi de 1988, qui renvoie aux peines de l'art. 159 C. P. (emprisonnement de 2 ans et amende de 1000 D.), et l'art. 19 de la loi du 4-2-2002 qui prévoit les mêmes sanctions.

* 95 _ Par exemple l'art. 820-6 C.com. 6mois d'emprisonnement et 50 000 franc d'amende.

* 96 _ Y. Chaput: le commissaire aux comptes : partenaire de l'entreprise. Ed. Presses de la fonction nationale des sciences politiques 1999, p. 110.

* 97 _ Expressions empruntées au : J. Larguier et ph. Conte : droit pénal des affaires, Ed. Armant colin 1998, p. 343.

* 98 _ Cours de Mr. Radhouene Zarrouk année universitaire 2003-2004, I.S.G de Sousse.

* 99 _ Le législateur procède par une augmentation de la peine pécuniaire par rapport à ce que prévoyait l'ancien art. 85 C.Com : 120D à 1200D.

* 100 _ A. Touffait : Délits et sanctions dans les sociétés, 2°édition, p. 469.

* 101 _ P.A.Moreau et J. Guyénot : traité pratique des sociétés commerciales, les S.A., livre VII, p. 1811, librairie du journal des notaires et des avocats, paris 1988.

* 102 _ B.H. Dumortier: infractions relatives au contrôle des S.A., juris-classeur sociétés, fascicule 134-30, p. 19

* 103 _ Y. Guyon et G. Coquereau : le commissariat aux comptes, p. 298.

* 104 _ B.H.Dumortier: note sous cass. Crim., 2-4-1990, R.J.Com. 1992, p. 24.

* 105 _ Y. Chaput: op.cit., p.111.

* 106 _ Adolphe Touffait : op. cit. p. 475.

* 107 _ Cass. Crim., 27-1978, R.S.1978, P. 496, note Bouloc.

* 108 _ Ñ ÍÇÊ ÇáÊæ ãí Ó ãÑÇÞÈ ÇáÍÓÇÈÇÊ æ ÌÑíãÉ ÇáÕá 85 ãä ÇáãÌáÉ ÇáÊÌÇ ÑÈÉ ÏÑÇÓÇÊ ÞÇäæäíÉ 1995-1996 ? Õ? ?100

* 109 _ J. Monéger et T. Granier: le commissaire aux comptes, Ed. Dalloz 1995.

* 110 _ Cass. Crim., 2-4-1990, précitée.

* 111 _ Tribunal correctionnel Paris, 10-1-1980, R.S.1981. 142, note bouloc.

* 112 _ Larguier et Conte: op. cit. n° 384, p. 181.

* 113 _ Monéger et Granier : op. cit., n° 695,p. 181.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci