Chapitre 2 Le Capital investissement
2.1
Introduction
Pour les PME, la question de la relève est cruciale.
Les transmissions d'entreprises se heurtent souvent à une question de
financement : insuffisance de capitaux de la part des successeurs potentiels,
choix des mauvais partenaires financiers, absence de projet commun entre le
repreneur et ses financiers. De même, les jeunes entreprises issues de la
recherche, développant de nouvelles technologies, aboutissent souvent
à des échecs en l'absence d'un mode original de financement.
C'est de ces problématiques qu'est née la
vocation du capital investissement : accompagner ces entreprises en leur
apportant des solutions « sur mesure » bâties sur un projet en
commun, d'expériences et de valeurs partagées.
2.2
Définition
Le capital-investissement est une
activité financière consistant pour un investisseur à
entrer au capital de sociétés qui ont besoin de capitaux propres.
Le terme de capital-investissement concerne généralement
l'investissement dans des sociétés non cotées en bourse
(d'où son nom de capital non coté ou de private
equity en anglais en opposition au terme public). En
français cela correspond aux notions de capital fermé en
opposition au capital ouvert.
Les sociétés qui constituent un portefeuille de
participations en réalisant des opérations de
capital-investissement sont des sociétés de portefeuille ou des
fonds d'investissement. Les opérations de capital-investissement se
réalisent soit par achat de titres existants auprès
d'anciens actionnaires, soit par apport de fonds nouveaux à la
société, sous forme de souscription de titres nouvellement
émis par elle (augmentation de capital).
Elles sont réalisées par des
sociétés ou fonds d'investissement spécialisés
constitués ad hoc, privés ou publics, d'origine industrielle ou
financière (capital-investissement institutionnel avec notamment les
fonds de pension, les assureurs et les banques), des individus fortunés
et expérimentés (business angels ou investisseurs
providentiels).
Les investisseurs en capital ont pour objectif la
réalisation, par la cession ou la vente de leur part à plus ou
moins long terme (3 à 10 ans selon les secteurs économiques) de
plus-values. Cette « sortie » peut se faire soit de
gré à gré, soit par introduction en bourse.
2.3 Les différents segments du Capital
Investissement
Le capital-investissement se décompose en plusieurs
segments aux caractéristiques suivantes8(*) :
- Capital d'amorçage: les
investisseurs en Capital d'amorçage, le plus souvent des personnes
physiques, apportent du capital, ainsi que leurs réseaux et
expériences à des projets entrepreneuriaux qui n'en sont encore
qu'au stade de la Recherche et Développement. L'objectif de cette phase,
très risquée sur le plan financier, est de finaliser le
développement d'une technologie sous la forme de prototype permettant de
valider la réussite du pari technologique, et de commencer à
tester l'existence d'un marché. La signature d'un premier client assure
la transition au stade du capital risque.
- Capital-risque : les
investisseurs en capital-risque apportent du capital, ainsi que leurs
réseaux et expériences à la création et aux
premiers stades de développement d'entreprises innovantes à fort
potentiel. Le terme « risque » utilisé (dans les
autres pays, l'on emploie le plus souvent le terme de Venture
capital), traduit mal l'aspect d' "aventure entrepreneuriale", qui rend le
métier d'investisseur en capital fondamentalement différent des
métiers purement financiers. Les quelques projets qui réussissent
doivent plus que compenser les pertes en capital de ceux qui
échouent.
- Capital-développement : le
capital-développement concerne des entreprises qui ont franchi le stade
du capital risque, et donc validé le potentiel de leur marché, et
qui ont besoin de financements additionnels pour supporter et
accélérer leur croissance; soit leur croissance interne
(financement de leur besoin en fonds de roulement), soit leur croissance
externe (acquisitions).
- Capital-transmission :
également connues sous le terme anglais LBO, (Leveraged
buy-out), ces opérations d'acquisition par emprunt consistent
à acquérir la totalité du capital d'une
société rentable, évoluant généralement sur
un marche mûr, par une combinaison de capitaux et de financements
bancaires (dette structurée). Ils permettent à un dirigeant,
associé à un fonds de capital-investissement, de transmettre son
entreprise, ou plus généralement de préparer sa succession
en cédant son entreprise en plusieurs étapes (LBO à double
détente).
- Capital-retournement : les
investisseurs en capital-retournement acquièrent
généralement la totalité (voire une part majoritaire) du
capital d'une société en difficulté, puis y injectent les
ressources financières permettant la mise en oeuvre d'un plan de
redressement.
Figure 2.1 - Les différents segments du Capital
Investissement
Le graphique 2.2 rend compte des flux de capitaux levés
par le capital investissement depuis 1980 dans le monde et aux
États-Unis. Au cours des six dernières années (2002-2007),
l'activité du capital-investissement n'a cessé de progresser pour
atteindre de manière très probable un pic en 2007.
Figure 2.2 - Montants levés par le Capital
Investissement (1980-2007)
Selon des chiffres encore provisoires collectés par
Private Equity Intelligence (Preqin), le volume de montants levés dans
le monde par 726 fonds en 2007 dépasserait les 500 milliards de dollars.
En France, selon l'Association française des investisseurs en capital
(AFIC), le montant des capitaux levés par les fonds en 2007 stagnerait
à 10 milliards d'euros, alors que les montants investis par ces fonds
progressent de 24 % à 12,6 milliards d'euros. La situation
européenne, relevée par l'European Private Equity & Venture
Capital Association (EVCA), marquerait une nette décroissance des fonds
levés (74,3 milliards d'euros en 2007 contre 112,3 milliards en 2006)
avec un maintien du flux d'investissement autour de 70 milliards d'euros
Lorsqu'on les ramène au niveau de la capitalisation
boursière, ces chiffres peuvent sembler modestes. Ainsi, Jenkinson
(2007) estime que le stock d'actifs sous gestion du capital-investissement est
de l'ordre de 1 000 milliards de dollars, ce qui représente moins de 1%
du stock total d'actifs. Ceci sous-estime le poids d'un secteur qui intervient
sur des segments stratégiques du monde des affaires. En effet, comme le
souligne Morgan Stanley, cité par Jensen (2007), en 2006 les 2 700 fonds
existants ont été à l'origine de 25% de l'activité
mondiale des fusions acquisitions, de 50 % du volume des financements
structurés d'acquisitions et de 33 % du marché des introductions
en bourse (IPO)9(*).
* 8 Définitions sur le
site de l'Association Française des Investisseurs en Capital (AFIC)
www.afic.fr
* 9 Private equity et
capitalisme français, Jérôme Glachant, Jean-Hervé
Lorenzi et Philippe Trainar
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