WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Pratiques étudiantes et vécu de l'espace universitaire: le cas des campus de Tunis et de Manouba

( Télécharger le fichier original )
par Dhaher Najem
Université de Tunis - Diplôme d'études approfondies en urbanisme  2005
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Chapitre II: Les pratiques étudiantes sur le site universitaire

1- Budget-temps des étudiants................................................34

2- Pratiques étudiantes sur le site universitaire..............................41

2.1-Unité et diversité des modes de vie des étudiants...............41

2.2-Comportements des étudiants.....................................42

3- Sociabilité des étudiants....................................................47

3.1-Comment se gère la rupture avec le milieu familial............48

3.2-Qui fréquenter ?.......................................................................49

3.3-Mode d'occupation des espaces du site universitaire...........51

4- L'appropriation du site universitaire......................................55

5- L'appréciation de certains attributs du site universitaire ...............57

Chapitre III : Pratiques étudiantes et rapports à l'espace urbain

1- Dans quelle mesure les étudiants investissent la ville?......................62

1.1- Caractéristiques individuelles et rapports à l'environnement.....62

1.2- Rapports au centre ville...............................................63

1.3- Rythme de fréquentation de la ville.................................66

1.4- Type de fréquentation de la ville....................................68

Conclusion.........................................................................70

Bibliographie......................................................................73

Liste des tableaux..................................................................78

Liste des figures....................................................................80

Annexe:

protocole d'enquête................................................................81

Introduction

Vie étudiante, faculté, campus, universitaire sont autant de faits qui ont envahi nos pensées et qui nous ont fait rêver d'un espace convivial et ouvert, d'un lieu de circulation et de dialogue, d'échanges et d'idées. Mais, dès le franchissement des portes de l'université l'étudiant se heurte à la réalité d'un espace et de son vécu:

- absence d'équipements et de services urbains à l'exception des restaurants universitaires et des équipements sportifs,

- des campus isolés à l'extérieur de la ville avec une mauvaise desserte par autobus,

- l'éclatement du milieu universitaire qui détache sa résidence de son lieu d'enseignement.

En Tunisie et jusqu'à nos jours l'université représente pour la majorité de la population étudiante qui la fréquente un initiateur à la vie urbaine, elle ouvre des espaces à la ville notamment pour les étudiants et surtout les étudiantes issus des zones rurales ou peu urbanisées1(*). Elle permet leur entrée dans la vie sociale, culturelle et professionnelle et une présence justifiée parmi les habitants de la ville. Cependant les cadres spatiaux n'ont été jusque là que des réponses à des exigences d'ordre quantitatif.

La ville de Tunis comporte actuellement 72.000 étudiants sans tenir compte de ceux en formation continue. Ce nombre représente presque 5% de la population de la ville. Il y a lieu de citer également les 40 institutions universitaires qui occupent des espaces dans la configuration urbaine de la ville. Il me semble que l'on ne peut faire l'économie d'une réflexion sur leur place dans la ville. L'université est en mesure de devenir à mon sens un enjeu important dans la société tunisienne parce qu'un nombre considérable de la population va y accéder: 5,5% de la tranche d'âge des 20-24 ans en 1987 et 13,53 en 1996.

Ce nombre bien que faible actuellement est susceptible d'être augmenté dans les années à venir vu les différentes réformes qu'a subi l'enseignement supérieur à tous les niveaux2(*) . Mais aussi parce qu'à une époque où le niveau scientifique et technologique des emplois ne cesse de s'élever, il est clair que l'intégration dans la société passera pour la majorité des tunisiens par l'université.

Peut-on dire que cette population en rapide expansion qui a rarement suscité la curiosité des chercheurs en Tunisie constitue un paradoxe?

A la lecture des travaux écrits3(*) sur la question, les étudiants ont été le plus souvent considérés dans leurs rapports aux études et selon leur insertion professionnelle et leurs débouchés sur le marché de l'emploi. Si bien que l'on ignore la place de l'étudiant dans la ville et dans la société, la nature de son mode de vie et de ses pratiques extra scolaires. Bref, on ne s'est jamais réellement intéressé à la vie étudiante.

Dans notre recherche, on a préféré d'entrer dans ce monde non encore vraiment exploré en étudiant tout d'abord l'espace de vie des étudiants. Le travail s'intéresse à l'espace vécu des étudiants dans leur rencontre avec l'université entant qu'espace non seulement fonctionnel ou de travail mais également de résidence, de culture et de loisirs et surtout un lieu de passage à la vie urbaine et professionnelle. L'espace universitaire ici est un territoire approprié par ceux qui y vivent.

Pour cela, on a choisi deux campus de la ville de Tunis qui représentent deux formes d'organisation différentes de l'espace universitaire et de son implantation dans le tissu urbain. On a voulu saisir par ce choix la complexité des relations entre les étudiants et leur site universitaire.

Le premier site est le campus de Tunis qui est situé à proximité du centre ville dont la conception correspond plutôt au modèle de campus français qui, selon les propos de Jodelle Zetlaoui4(*) correspond à des regroupements de locaux d'enseignement sur de vastes espaces souvent implantés à proximité de grands ensembles, sans services de premières nécessité et de structure d'animation.

Le deuxième site choisi est le campus de Manouba qui reflète le nouveau mode d'organisation urbaine des espaces universitaires déclenché au début des années 1990. Implanté selon une logique anglo saxonne à l'extérieur de la ville sur un terrain qui contient déjà la faculté des lettres, le campus connaîtra selon les projets du ministère de l'enseignement supérieur l'installation sur le même terrain d'autres entités universitaires qui vont être délocalisées du centre ville de Tunis.

Historique

L'apparition en Tunisie d'institutions permettant de poursuivre des études supérieures remonte loin dans l'histoire.

Dès la construction de Tunis par les Hafsides comme nouvelle capitale d'Ifriqiya, la mosquée de la Zaytouna a pris la place de Kairouan dans le progrès scientifique du pays et dans la protection du patrimoine islamique jusqu'à nos jours.

Construite en 732 (an 114 de l'Hégire), la mosquée de la Zaytouna est considérée par certains comme la plus ancienne université islamique dans le monde.

L'enseignement dans cette mosquée se déroulait toujours conformément au modèle adopté par le prophète lui-même (voir plan ci-dessous), c'est-à-dire autour d'une "Halaka", où des maîtres appelés "Foukaha-s" donnaient des cours à des élèves accroupis en cercles concentriques, sur une natte dans un coin de la salle de prière.

L'apparition de la "madersa"5(*) fut un grand événement dans le monde arabo-musulman, puisqu'elle constituait le premier équipement conçu spécialement pour l'enseignement.

La madersa, institution officielle qui logeait des professeurs et des étudiants, percevant une bourse et dispensant d'un enseignement religieux n'éclipsera pas pour autant les mosquées dans ce rôle imminent. Les plus grandes universités islamiques, étaient attachées à des mosquées: c'est le cas de la Zaytouna à Tunis, d'Al Azhar au Caire, d'Al Qarawiyyine à Fès et aussi de la Nizamiyya à Baghdad.

Les "madersas" et les mosquées continuaient à abriter les cycles supérieurs de l'enseignement pendant plusieurs siècles.

La "madersa" comprenait des locaux d'enseignement, des bibliothèques, une salle de prière et des chambres pour loger les étudiants et dans certains cas, on y trouvait un bain maure et même une cantine6(*). C'est ainsi qu'on a pu considérer la mosquée comme le premier espace destiné à l'enseignement.

Cette situation n'a pas subi un grand changement de 1881 à 1956 c'est-à-dire durant toute la période coloniale qui n'a guère favorisé le développement d'un enseignement supérieur.

Après 1956, date de l'indépendance du pays, une structure universitaire nationale et moderne furent mise en place. En quelques années, plusieurs établissements d'enseignement supérieur furent créés jusqu'à la fondation de la première université tunisienne en 1960.

Figure 1

Evolution des effectifs étudiants de 1960 à 1997

Source: BEPP- Ministère de l'enseignement supérieur-1997

L'accroissement des effectifs scolaires dans l'enseignement supérieur est indiscutable et ce phénomène commence à être particulièrement spectaculaire ces dernières années.

En effet, le nombre des étudiants qui a été égal à 2310 en 1960 a modérément augmenté jusqu'à 1988 et a plus que triplé entre cette date et 1997 de 43.000 à 137.000 individus.

Le taux de croissance qui ne dépassait jusque là les 10.000 étudiants supplémentaires par an a changé depuis la rentrée universitaire 1997/1998 en atteignant les 16.000 étudiants.

La scolarisation massive des filles est aussi l'un des éléments marquants de l'évolution du système éducatif qui aura vraisemblablement des incidences non seulement sur la structure de la population étudiante mais aussi sur les rapports université/ville dans les prochaines années.

Tableau 1

Evolution du taux de féminisation

Année scolaire

65/66

72/73

77/78

82/83

87/88

92/93

97/98

Taux en %

21

23

28

30

37

40

46

Source: BEPP- Ministère de l'enseignement supérieur-1997

Aperçu sur les politiques de constructions universitaires:

Pour mieux comprendre comment l'étude du cadre de vie des étudiants est apparue comme l'un des axes majeurs de notre mémoire, rappelons brièvement comment cette question avait été appréhendée jusque là.

De la période coloniale et jusqu'à nos jours l'enseignement a connu diverses modifications tant dans ses structures que dans son contenu et sa finalité. C'est pourquoi la question universitaire a été toujours le terrain d'un certain nombre d'expériences aussi bien au niveau pédagogique qu'au niveau de la planification.

En dressant un bilan rapide des politiques de constructions universitaires en Tunisie depuis l'indépendance, nous pouvons constater que le rythme des efforts budgétaires et des autorisations de programmes destinés à l'enseignement supérieur a été toujours calqué sur celui de la croissance de la population étudiante. L'écart grandissant entre un budget de fonctionnement qui n'a progressé qu'à un rythme de 4.1% par an en termes réels entre 1980 et 1988 et les besoins résultant d'une croissance des inscriptions à un rythme de 7.1% par an pour la même période s'est traduit par un déclin des conditions de vie et de travail des étudiants dans la plupart des établissements universitaires. Les ratios m2 par étudiant déterminant les espaces affectés à l'enseignement, la recherche et l'administration, mais également ceux qui accueillent la vie universitaire sont très bas et sont parfois nuls pour les espaces de loisirs et de détente des étudiants.

L'organisation universitaire et le choix dans les objectifs de formation se matérialisent dans la forme de localisation de l'université sur le territoire. Toutefois, si l'on observe la mise en place des institutions universitaires en Tunisie dans les années 1960, et avant la naissance du campus de Tunis, on constatait que les quelques établissements qui existaient à l'époque ont été, pour la majorité, installés au centre de la ville de Tunis dans des bâtiments et des ensembles immobiliers qui servaient jusque là à d'autres organismes.

Affichant à peine 10.000 étudiants jusqu'en 1970, les établissements universitaires en Tunisie n'ont pas quitté à cette date la ville de Tunis. Et, ce n'est qu'avec la décision de l'Etat de décentraliser l'université au début des années 1970 que les établissements universitaires commencent à s'installer à Sfax, à Monastir et à Sousse.

Pendant la décennie qui a suivi, on n'a plus construit ou presque surtout dans la capitale (sauf des extensions au campus de Tunis qui recrutait à cette époque la quasi-totalité des nouveaux bacheliers à l'échelle nationale et qui ne dépassaient pas à cette époque 2000 étudiants supplémentaires par année).

Le territoire universitaire commence à connaître une certaine modification à partir du début des années 1990 qui entend harmoniser et consolider un véritable système d'enseignement universitaire. Les effectifs étudiants qui se développent d'une manière vertigineuse et l'espace universitaire qui, en conséquence, connaît depuis une nouvelle forme d'organisation de son territoire: «le campus» a été affecté également par ce changement. La vague de délocalisation de la fin des années 1990 qui s'est produite surtout dans la capitale (IPSI, ENSI, ENAU, ISG, ESC, ISCAE) s'est traduite dans l'espace par la construction du campus de Manouba dont l'implantation est inspirée des campus anglo-saxons avec un croisement des lieux d'enseignement et d'équipements conviviaux sur le territoire du campus.

Le manque de moyens financiers et de programmation ainsi que l'absence d'idéal communautaire avaient fait du campus de Tunis un ensemble souvent inachevé et où les activités extra pédagogiques avaient été négligées.

En effet, le développement remarquable des effectifs et des espaces universitaires qui est dû aux grands bouleversements sociaux et économiques amorcés depuis la fin des années 1980 ont promu de nouvelles conceptions des espaces de l'enseignement supérieur et des modes de vie étudiants.

Pour anticiper la croissance des effectifs étudiants, le projet de la carte universitaire mis en place en juin 1990 a tracé la politique de l'Etat en matière de constructions universitaires pour les deux prochains plans économiques et sociaux. En outre, on reconnaissait que les choix urbanistiques qui avaient été retenus dans l'implantation des différents sites universitaires dans les années passées et notamment le manque d'attention prêté aux infrastructures d'accompagnement n'ont pas favorisé le développement d'une vie universitaire sur ces sites. En effet, si les établissements dispersés dans le centre ville ont bénéficié en raison de leur position centrale des équipements et des activités qu'offrent la ville, ceux qui sont implantés à l'extérieur de la ville souffrent de l'isolement et du manque d'animation.

Actuellement, l'enseignement supérieur bien que confronté à des exigences d'ordre quantitatif, doit tenter de prendre en compte des exigences qualitatives nouvelles. Cette dimension est à vrai dire remarquable dans l'extension du campus de Manouba qui se traduit par une forte reprise de l'aménagement du site universitaire et l'introduction de quelques types d'animation sur ces sites. Les projets programmés par les services du ministère de l'enseignement supérieur montre l'intérêt accordé à ce sujet.

* 1 - D'après les résultats de notre enquête (voir annexe), 61% des étudiants interrogés sont originaires de petites localités ou de zones rurales.

* 2 - Le taux de scolarisation des enfants âgés de six ans est de 99,2%, celui de ceux dont l'âge est entre 6 et 12 ans est de 92,1%.

* 3 - Les très rares travaux écrits sur la vie étudiante en Tunisie n'ont jamais fait l'objet de recherche approfondie. Il y a lieu de citer celui de M Nourdine Dhahri : les conditions de vie des étudiants à l'université tunisienne- Série des sciences et de l'éducation n°3- CEREC- 1992.

* 4 - Joelle Z- Les maisons des étudiants : futur lieu de vie universitaire ou nouveau produit immobilier ? In Espaces et société n°80/81 ? 19966 Page 121.

* 5-La madersa créée au XI ème siècle à Baghdad, signifiait exactement lieu (préfixe ma) où l'on étudie (le sens de racine «DRS») c'est-à-dire un collège universitaire.

* 6-Il y a lieu de remarquer la ressemblance entre le modèle fonctionnaliste de la "Madersa" et la conception plus tard du campus américain comme modèle social et de gestion de la vie universitaire.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille