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Etude des relations russo- estoniennes depuis Tallinn

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par Jean- Francois Vasseur
Institut d'études des relations internationales Paris - Licence 2009
  

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2. vers plus de pragmatisme :

« Il n'y a pas de problèmes dans les rapports russo-estoniens dans les secteurs non politisés, notamment dans les questions qui ne sont pas liées à l'interprétation de l'histoire. » Urmas Paët, ministre estonien des affaires étrangères, Tallinn le 18 juin 2009 pour RIA Novosti

Depuis que l'Estonie a intégré l'Union Européenne en 2004, elle n'a d'autre choix que d'introduire plus de pragmatisme dans ses relations avec la Russie. L'Estonie est en mesure d'être une zone d'échange et de contacts privilégiée entre l'UE et Moscou, que ce soit au niveau économique, mais aussi par des mouvements de population et au niveau culturel. De par sa situation géographique, l'Estonie est bien consciente qu'elle se doit de tirer profit de cette position d'interface stratégique10(*), si elle parvient à introduire plus de pragmatisme dans ses relations avec Moscou, ce sera au bénéfice de l'UE, mais pourrait également être propice à l'avènement de l'Estonie comme maillon capital des relations « Est-Ouest », synonyme de point de passage obligé des flux de marchandises, de personnes, et de capitaux.

On relève trois principaux enjeux qui nécessitent une approche pragmatique. Le premier problème a été réglé avec succès, il s'agissait de la délimitation finale de la frontière russo-estonienne, ainsi que la conclusion d'un certain nombre d'accords visant à faciliter les relations économiques entre les deux pays. Le second est l'enjeu énergétique, avec en question le tracé des pipelines et la dépendance énergétique de l'Estonie, le dernier aspect concerne le commerce UE-Russie, c'est-à dire les voies de transit, qu'elles soient maritimes ou terrestres.

"Nous voudrions que l'on règle des problèmes très concrets comme les taxes douanières sur le bois ou bien sur les procédures pour monter les trains sur des axes compatibles avec les rails russes. Et puis il faudra discuter de sécurité énergétique et développer de notre côté, en Union européenne, une politique commune de l'énergie.", Urmas Paët, en marge de la réunion des ministres des affaires étrangères de l'UE, le 26 Mai 2008.

a. L'une des conditions principales pour pouvoir adhérer à l'Union européenne est l'absence de conflit frontalier.11(*) Après 10 ans de négociations, le traité frontalier entre la Russie et l'Estonie a été signé par le président de la République estonienne et ratifié en 2005 par le parlement estonien. Au terme des discussions avec la Russie, l'Estonie a décidé de faire définitivement le deuil des régions de Petseri et des zones situées au nord et au sud de la ville de Narva (5% du territoire estonien). Cependant, une fois le projet approuvé par les Estoniens transmis à la Douma russe, celui-ci n'obtint pas ratification en Russie en raison de l'allusion faite dans le texte au renoncement de l'Estonie à des territoires qui selon le traité de Tartu, leur appartiennent juridiquement. Néanmoins, le consensus a été obtenu de facto et la frontière est définitivement fixée, les postes frontières sont opérationnels et les contrôles sont effectifs. L'Estonie a donc accordée une concession au voisin russe, voulant transmettre un signe de bonne volonté en vue de la normalisation de ses rapports avec la Russie. Cela naturellement dans le but de satisfaire aux exigences de l'UE, mais également afin de pouvoir envisager une intensification relative des rapports politiques et économiques entre Tallinn et Moscou.

« Pour ce qui est de la possibilité d'une nouvelle rencontre, par exemple, avec le ministre russe des Affaires étrangères, nous avons toujours estimé que parler vaut mieux que garder le silence. Nous sommes toujours prêts à nous rencontrer pour discuter »

« L'invitation adressée à Sergueï Lavrov est valable depuis plusieurs années. », Déclaration de Urmas Paët devant le parlement estonien le 18 juin 2008

Egalement, l'Estonie est parvenue à mettre au point conjointement avec la Russie des accords concernant le régime des visas octroyés de part et d'autre de sa frontière. Ces accords interviennent dans le cadre du partenariat UE-Russie, ils visent à simplifier les déplacements d'un pays à l'autre, les citoyens russes peuvent désormais obtenir des visas multiples de longue durée. Les accords sur la réadmission des immigrés clandestins ont également été conclus.

L'Estonie désire également conclure des accords avec la Russie dans les domaines des taxes douanières pour la bois d'oeuvre, mais aussi pour simplifier les contrôles douaniers aux frontières afin de réduire le nombre de voitures stationnées en file (actuellement environ 200) quotidiennement au poste frontière de Narva, en attente de pouvoir se rendre en Russie. De même des accords pourraient être conclus au niveau des tarifs d'utilisation des chemins de fer russes pour le fret estonien ainsi que sur la protection réciproque des investissements.

b. Le second domaine nécessitant une approche pragmatique est celui de l'énergie. L'Estonie est dépendante du pétrole russe et depuis la dernière crise du gaz russo-Ukrainienne, et en raison de la fermeture prochaine de la centrale nucléaire lituanienne d'Ignalina imposée par Bruxelles, les Estoniens ont pris conscience de la nécessité de trouver d'autres sources d'approvisionnements12(*). Pour se faire, les Estoniens ont été plaider pour le raccordement de leur pays et des autres Etats baltes au réseau énergétique européen.13(*) Ils ont été entendus par Bruxelles qui a fixée comme l'une de ses priorités le « désenclavement énergétique » des pays baltes. Il y a déjà un câble sous marin qui relie les réseaux électriques finlandais et estonien (Estlink), et le doublement de ce câble est actuellement en projet, la Lituanie compte, elle, se connecter par voie sous-marine au réseau électrique suédois. Au niveau de l'approvisionnement en pétrole, le réseau Sarmatia (Caspienne-Tbilissi-Odessa-Gdansk), encore en construction, devrait approvisionner la raffinerie lituanienne de Mazeikiai, le désenclavement énergétique serait donc achevé.

Le lancement du programme Nordstream par un consortium germano-russe, visant à construire un pipeline reliant le port russe de Vyborg (frontière finlandaise) et le port allemand de Greifswald (ce double tube doit passer être installé au fond de la Baltique) a déplu aux Estoniens. Ces derniers ont vite fait savoir que pour des raisons environnementales, ce pipeline n'était pas idéal. Le réel problème ici est que le président du conseil de surveillance du consortium est Gerrard Schröder, qui n'est pas très apprécié en Estonie depuis qu'il a exprimé sa désapprobation à propos du déplacement par le gouvernement estonien du soldat de bronze en 2007.

« Fin mai, Nord Stream avait demandé aux autorités estoniennes la permission d'explorer le fond marin dans la zone économique estonienne en vue de corriger éventuellement l'itinéraire du gazoduc qui doit relier la Russie et l'Allemagne par le fond de la Baltique, mais, fin septembre, les autorités estoniennes ont rejeté la demande de cette société, invoquant les intérêts économiques et ceux de l'Etat. »Ria Novosti, 1 octobre 2007

De même, les Estoniens perçoivent ce projet bilatéral germano-russe comme une défaite du point de vue de l'ambition qu'ils ont de jouer le rôle d'interface entre l'UE et la Russie. En effet, ce sont certainement les relations houleuses entre l'Estonie et la Russie qui ont fait préférer à Gazprom (actionnaire majoritaire du projet) la voie sous marine à la voie terrestre, ceci également envisagé comme une sorte de petite mesure de rétorsion adressée au gouvernement estonien pour son « indocilité ».

Le fait que l'UE ne soit pas partie au projet et que les Estoniens n'aient pas été consultés sur le tracé du tube irrite ici l'opinion publique et le gouvernement. De même, la simple perspective de voir une compagnie russe stratégique travailler à quelques encablures de la côte estonienne rappelle des heures sombres et pourrait également être à l'origine du mécontentement:

« Urmas Paet a décliné la proposition de l'ex-Chancelier qui aurait souhaité le rencontrer. Les autorités estoniennes ont refusé récemment au Nordstream de mener des travaux d'exploration de leur zone maritime pour vice de forme dans la demande. La construction du gazoduc sous-marin pourrait donc prendre du retard, mais Urmas Paet a rappelé que l'ex-Chancelier s'est permis de critiquer le déplacement du Soldat de bronze... » « La balle est donc peut-être bien dans le camp de l'Estonie, qui est en train de signifier à Moscou que, si la Russie souhaite respecter les délais concernant le Nordstream, elle ferait bien de cesser toute action anti-estonienne. » Extrait du journal Kommersant du 7 Mai 2007 et traduit par Céline Bayou sur le site regard-est.com

Les Estoniens tiennent à améliorer leurs relations avec la Russie afin, également, de ne plus être exclus de ce genre de projet,14(*) qui concerne au delà de l'Allemagne et de la Russie, l'Europe entière.

c. L'Estonie est dors et déjà le point de passage privilégié pour le transit de marchandises entre l'UE et la Russie. Le tronçon ferroviaire Tallinn-Saint Pétersbourg est le plus chargé du continent européen pour le transport de fret, aussi bien en volume qu'en nombre de convois annuel. On a enregistré une forte croissance des tonnages transportés qui ont progressé de 185 %, soit un quasi-triplement, entre 1994 et 2003, en tonnes-km. Le tonnage moyen est aujourd'hui de 1700 tonnes par train quand il est de 352 tonnes par train de fret à la SNCF. Les marchandises les plus transportées à destination de l'UE sont les produits pétroliers raffinés (70%), les engrais (7%), les céréales (4%) et le charbon (3%). Les trains retournent ensuite à vide en Russie pour un nouveau chargement. Le projet européen nommé « rail Baltica » vise à construire une voie ferrée adaptée à un trafic de plus en plus intense entre Varsovie et Helsinki, passant par les villes de Bialystok, Kaunas, Riga, Tartu et Tallinn, cet axe de transit devrait être achevé en 2015, renforçant le rôle majeur de Tallinn comme intermédiaire dans les exportations et les importations européennes.15(*)

Les exportations européennes à destination de la Russie se font aujourd'hui majoritairement par voie maritime. Les ports Estoniens de Sillamaë et de Muuga (Tallinn), sont les principales portes d'entrée sur la Russie pour les marchandises mondiales et Européennes.16(*) Sillamaë est le principal point de passage pour les voitures neuves à destination du marché russe, et depuis sa mise en service en 2004, le trafic du port s'accroît exponentiellement. Le port de Muuga, est plus spécialisé dans l'acheminement de denrées alimentaires telles que les céréales, ainsi que dans le transit des métaux de construction.

Ainsi, le besoin d'une relation pragmatique entre l'Estonie et la Russie se fait plus que jamais sentir, en raison de la croissance de l'interaction économique et commerciale et à la vue de l'important potentiel de croissance pour ces échanges, donc de l'augmentation progressive du rôle stratégique de l'Estonie. En 2007, lors des événements du Soldat de bronze, le transit entre l'Estonie et la Russie avait été fortement ralenti (au niveau maritime et ferroviaire principalement), ces mesures avaient été adoptées par le Kremlin comme une sorte de sanction. Aujourd'hui, Tallinn désire éviter à tout prix que ce genre de problème se répète.

* 10 Annexe n°3

* 11 Annexe n°1

* 12 La possibilité de construire une centrale nucléaire de type EPR avait été évoquée, mais le projet ne sera certainement pas retenu.

* 13 Annexe n°6

* 14 Le manque à gagner pour l'Etat estonien est considérable

* 15 Annexe n°5

* 16 Voir sur carte en annexe n°1

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius