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Maroc- Union européenne: vers un "statut avancé"

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par Karim Bouzalgha
Université de Cergy Pontoise  - Masterr II droit des relations économiques internationales 2008
  

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CHAPITRE I :

LE CONTENU DU STATUT AVANCE

Le contenu du statut avance porte sur le renforcement du dialogue politique euro-marocain (Section I) et sur le renforcement des relations économiques (Section II)

Section I : Le renforcement du dialogue politique euro-marocain

Le dialogue politique euro-marocain, dans le cadre du statut avancé, se caractérise par une institutionnalisation (I) et par la participation du Maroc à certaines politiques européennes (II).

I/ L'institutionnalisation du dialogue bilatéral

L'institutionnalisation du dialogue politique se caractérise par la mise en place d'instances de promotion de l'Etat de droit (A) et par un soutien aux réformes politiques du Maroc (B).

A) La mise en place d'instances de promotion de l'Etat de droit

Le dialogue politique euro-marocain porte sur la promotion des droits de l'homme (1) et le prévoit une convergence politique (2).

1) Le dialogue euro-marocain en matière de droits de l'homme

Le titre Ier de l'accord d'association est consacré au dialogue politique (article 3, 4 et 5). Il permet la mise en place d'instances de dialogue politique renforcé, afin de promouvoir des valeurs communes: droits de l'homme, démocratie, bonne gouvernance, Etat de droit ...

Dans le passé, les droits de l'homme étaient l'un des principaux sujets de discorde entre l'UE et le Maroc. En effet, le programme MEDA était fondé sur « le respect des principes démocratiques et de l'Etat de droit ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales » (Appelé « clause droits de l'homme »). Cette clause est une condition politique pour l'aide financière, dont la violation est susceptible d'entrainer la  suspension du programme22(*).

Cette clause figure dans tous les accords d'association entre L'UE et les PTM. De même, on retrouve des clauses similaires dans les accords de l'UE avec les PECO et avec les ACP23(*). L'article 2 de l'accord d'association euro-marocain dispose:

 

« Le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l'homme, tels qu'énoncés dans la déclaration universelle des droits de l'homme, inspire les politiques internes et internationales de la Communauté et du Maroc et constitue un élément essentiel du présent accord ».

L'article 90 de la déclaration annexée à l'accord d'association explicite l'expression « élément essentiel ». Selon cette déclaration, la partie qui considère que l'autre a violé ses obligations peut prendre des mesures appropriées sans en référer au conseil d'association lorsqu'il s'agit d'une « urgence spéciale ». L'adoption de l'Acte unique européen en 1986 renforce les pouvoirs du Parlement Européen, l'article 237§2 instaure une procédure d'avis conforme en matière de traité d'adhésion et de protocole financier. En vertu de l'article 238§2, ces accords sont conclus à l'unanimité par le conseil après avis conforme du parlement, qui se prononce à la majorité absolue. Or, le 15 janvier 1992 le Parlement européen refuse de donner un avis conforme au 4ème protocole conclu entre la Communauté et le Maroc. Le Parlement critiquait ainsi les violations des droits de l'homme au Maroc.

Considérant ce refus du PE comme une ingérence dans ses affaires intérieures, le Maroc décide de geler les négociations relatives au renouvellement de l'accord de pêche et renonce au bénéfice dudit protocole. Cette crise s'est résolue par l'approbation du parlement le 28 octobre 1992 des négociations euro-marocaines pour un accord de 3ème génération, prévoyant une ZLE.

 

La mise en place de plusieurs instances de dialogue politique vise à éviter les incidents de ce genre, mais aussi, à rapprocher les deux partenaires autour de valeurs communes. Ainsi le Maroc est le premier pays du Sud Méditerranée à avoir un comité droits de l'homme dans le cadre du plan d'action, adopté en juillet 2005. Et depuis novembre 2006, le Maroc et l'UE ont eu deux rencontres du sous-comité Droits de l'Homme, démocratie et gouvernance.

Cependant, le sous comité droits de l'homme apparait comme une instance politique de dialogue, qui ne dispose pas d'un pouvoir propre de décision. Le but de cette instance est de promouvoir les droits de l'homme au Maroc par le dialogue et l'incitation. En effet, les articles 80 et 81 de l'accord d'association donnent le pouvoir de décision et de recommandation au Conseil d'association pour tous les domaines relevant de l'accord. Le conseil peut déléguer tout ou partie de ses pouvoirs au comité. Les sous comités comme le groupe de travail ah hoc sont crées sur la base de l'article 84 de l'accord, qui dispose que le Conseil peut créer tout groupe de travail ou organe nécessaire à la mise en ouvre de l'accord.

2) La convergence politique euro-marocaine

Pour les deux partenaires, le statut avancé se caractérise par une convergence politique. Le gouvernement marocain a proposé à la Commission Européenne plusieurs pistes dans lesquelles cette convergence peut être institutionnalisée. Il existe déjà une concertation au niveau gouvernemental, avec les réunions annuelles des ministres des affaires étrangères au conseil d'association et le dialogue politique renforcé au niveau des hauts fonctionnaires. Le statut avancé prévoit de mettre en place une commission parlementaire mixte Maroc-UE, afin d'ouvrir un forum d'échange entre les élus. L'institutionnalisation parlementaire fait partie de la convergence politique entre l'Union et le Maroc. A cet égard, l'article 190 du règlement intérieur du PE dispose:

« Le PE peut constituer des commissions parlementaires mixtes avec des parlementaires d'Etats associés à la Communauté ou d'Etats avec lesquels des négociations ont été engagées en vue d'une adhésion... Ces commissions peuvent formuler des recommandations à l'intention des parlementaires participants. En ce qui concerne le PE, celles-ci sont renvoyées à la commission compétente qui présente des propositions quant aux suites à leur donner ».

 

Un tel rapprochement institutionnalisé, entre le PE et le parlement marocain vise à promouvoir les échanges humains et politiques, et à favoriser la convergence des législations.  En effet, les relations interparlementaires, les contacts impliquant les parties politiques marocains et européens et les contacts personnels entre membres des parlements contribuent à une meilleure compréhension mutuelle et constituent une dimension essentielle du partenariat privilégié entre l'Union et le Maroc. Les partenaires envisagent des échanges entre élus et des programmes renforcés de stage pour les assistants parlementaires marocains tant dans les parlements des Etats membres qu'au PE. De plus, le statut avancé est un cadre approprié à la rencontre entre les partis politiques marocains et leurs homologues européens, pour faire converger leurs points de vue sur des thématiques d'intérêt commun. A terme, ces contacts peuvent aboutir à l'institutionnalisation d'une assemblée parlementaire euro-marocaine. Un tel parlement euro-marocain serait susceptible de faire des recommandations tant au gouvernement marocain qu'aux institutions communautaires et aussi de formuler des positions communes sur les problématiques couvertes par l'accord d'association.

 

B) Le soutien de l'UE aux réformes politiques du Maroc

L'UE soutient la transition démographique du Maroc (1) et soutient la modernisation de l'administration marocaine (2).

1) Le soutien à la transition démocratique du Maroc

Depuis la mort du roi Hassan II en juillet 1999, le Maroc a entrepris un important processus de démocratisation, avec notamment, le soutien politique et financier de l'Union Européenne. Lors de sa visite officielle au Maroc les 5 et 6 mai 2008, le président du parlement européen Hans Gert Pottering a déclaré que le statut avancé était « une réponse au rythme soutenu des réformes entreprise par le Royaume ». Cependant, plus qu'une réponse, la démocratisation du Maroc est un élément essentiel du statut avancé. Dans cette optique, le roi Mohamed VI a crée le 7 janvier 2004 l'Instance Equité et réconciliation, dirigée par l'ancien prisonnier politique Driss Ben Zekri. Cette commission, chargée d'enquêter sur les disparitions et détention arbitraires a distribué environ 800 millions de dirhams24(*) aux victimes des « années de plomb ». Mais, les coupables ne sont pas poursuivis en justice.

Dans son rapport intitulé « mise en oeuvre de la PEV en 2007, rapport de suivi du Maroc »25(*), la Commission Européenne note les progrès et lacunes du Maroc. L'Union se félicite de la réforme du code de la famille (« Moudawana ») adoptée en janvier 200426(*), de la réforme du code de la presse, du degré de transparence lors des élections législatives de septembre 2007, et des mesures de lutte contre la corruption. Sur le plan des conventions internationales, le rapport relève les progrès dans l'adoption des conventions des Nations Unies27(*) et la levée de certaines réserves28(*). Mais le rapport constate les dysfonctionnements persistants du système judiciaire, les sérieuses entraves à la liberté de la presse, les insuffisances dans la lutte contre le travail des enfants, et la situation dans les prisons (l'observatoire marocain des prisons fait état de violences et de tortures)29(*). De même la FIDH reconnait les avancées démocratiques du Maroc, mais souligne les importantes déclarations interprétatives (art. 2 et 15) et réserves (art. 9, 15, 16, 29) qui ont accompagnées la ratification de la Convention de lutte contre toutes formes de discrimination à l'égard des femmes30(*). La FIDH et les associations marocaines de droits de l'homme mettent aussi en avant le traitement des migrants subsahariens au Maroc (violences, pas d'accès aux soins, discriminations), le maintien formel de la peine mort (Depuis 1993, le Maroc a instauré un moratoire sur les exécutions), les discriminations à l'égard de la minorité  berbère, le manque d'indépendance de la justice et les violences commises dans la lutte contre le terrorisme31(*).

2) Le soutien de l'UE à l'administration marocaine

Comme en matière de droits de l'homme, Le Maroc aspire à se rapprocher des standards européens en matière de bonne gouvernance. Le programme d'appui à la mise en oeuvre de l'accord d'association (PAAA) a pour objectif spécifique d'appuyer l'administration et toutes les institutions publiques marocaines en apportant à celles-ci l'expertise, l'assistance technique et les outils de travail nécessaires à la réalisation des objectifs et au respect des obligations fixées dans l'accord d'association.

Le programme est « à la demande », c'est-à-dire que l'Administration marocaine formule ses besoins dans le cadre de plan opérationnels annuels. Il introduit le jumelage institutionnel consistant en l'envoi d'experts de l'administration européenne pour des missions de longue durée (jusqu'à 24 mois) au sein des administrations publiques marocaines. Ce programme vise notamment à aider le Maroc dans les domaines critiqués par le rapport32(*) (Administration pénitentiaire, fiscale, douanière33(*), système judicaire, administration policière...). Le statut avancé permettra la mise en place d'un système d'aide à l'appareil judicaire marocain, condition indispensable au renforcement de relations bilatérales. En effet, l'objectif est d'améliorer les conditions de détention, de développer les détentions alternatives, et les mesures de réinsertion pour lutter contre la surpopulation carcérale. Cette aide vise aussi à la formation des magistrats, notamment dans le domaine des affaires familiales (les pensions alimentaires, mesures éducatives, l'aide sociale aux familles...). Dans les domaines de moindre importance, il existe aussi des jumelages « courts » d'une durée de huit mois.

Le PAAA au Maroc s'articule en deux phases, avec un budget initial de 5 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 15 millions additionnels. La gestion du programme est assurée, avec l'appui de la Délégation de la Commission Européenne, par une Unité de Gestion du Projet (UGP) mise en place par le Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération du Maroc. Toute proposition de projet, en particulier émanant des Ministères et autres Administrations publiques marocaines ainsi que toute demande d'information doit être adressée à l'UGP. Il existe actuellement 25 opérations de jumelages. L'UGP finance aussi des projets ruraux, comme par exemple le projet « Appui à l'amélioration de la situation de l'emploi de la femme rurale et gestion durable de l'Arganeraie dans le Sud-ouest du Maroc » (projet Arganier). Ce projet  a pour objectifs globaux de contribuer au développement d'une participation active des femmes rurales en tant qu'acteur de développement économique et social de la région de l'Arganeraie et de contribuer à un regain d'intérêt des populations locales à la gestion et au développement durable de l'Arganeraie.

 

Tandis que l'accord d'association actuel organise le jumelage institutionnel, le statut avancé prévoit des opérations de jumelage au niveau décentralisé34(*). La coopération décentralisée consiste à développer des jumelages entre villes marocaines et villes européennes. L'exemple à suivre est celui du jumelage en Casablanca et Bordeaux, qui a donné lieu à de vastes échanges culturels, institutionnels et économiques. Il est vrai que la coopération décentralisée connait un succès particulier avec la France, principalement, pour des raisons historiques. Parmi les exemples récents, on peut citer la coopération décentralisée maroco-espagnole entre la région Tanger-Tétouan et celle d'Andalousie. Une convention de coopération portant sur la formation et le renforcement des capacités de bonne gouvernance locale a été signée en octobre 2007 à Tanger.

Le jumelage décentralisé est cependant caractérisé par des limites structurelles qui empêchent les villes marocaines de construire des partenariats et de profiter d'échanges avec les villes européennes. Le renforcement de la coopération décentralisée dans le cadre du statut avancé prévoit notamment de pallier à l'absence d'organisme spécifique chargé de la coopération internationale des collectivités locales. Car, en l'absence d'une telle structure, les villes marocaines s'engagent seules, avec des moyens modestes, en s'appuyant sur des liens personnels qu'ils entretiennent avec leurs homologues étrangers. Les partenariats se font alors au hasard des rencontres et les projets tantôt aboutissent, tantôt échouent.

De plus, la tutelle de l'Etat et les oppositions administratives entre pilotage locale ou étatique bloquent certaines initiatives. Surtout que les collectivités locales ont besoin d'un apport financier adapté, car elles n'ont pas de ressources suffisantes et sont dépendantes des subventions de l'Etat. Puis, de nombreux élus locaux marocains ne parlent pas de langues étrangères, et ont peu de capacité pour mobiliser les milieux d'affaires. Dans ce contexte, les partenariats conclus sont inégaux, et souvent, les villes du nord ne trouvent pas d'interlocuteurs crédibles au Sud. Ainsi, la mise en place d'une structure euro-marocaine de jumelage décentralisé et un soutien financier permettra de résoudre ses problèmes structurels qui limitent l'essor de la coopération décentralisée. Car pour le moment, seules les grandes villes peuvent conclure des partenariats. A cet égard, le comité des régions de l'UE pourrait promouvoir le dialogue entre les collectivités territoriales, et un statut d'observateur pourrait être accordé à l'Association Marocaine des Collectivités Locales au sein du comité.

* 22 Lire à se propos MEKAOUI (A.), Partenariat économique euro-marocain, L'Harmattan, 2000, pp. 237-256.

* 23 Un mécanisme de suspension à été ajouté lors de la révision mi-parcours de la convention de Lomé IV.

* 24 1 dirham équivaut à 11 Euros.

* 25 SEC(2008)398, Bruxelles le 3 avril 2008.

* 26 Pour en savoir plus, lire DAOUD (Z.) « Maroc : une transition périlleuse », Questions internationales, n°9, septembre-octobre 2004, pp. 94-102. Dorénavant, la famille est placée sous la responsabilité conjointe des époux, l'âge du mariage est portée à 18 ans pour les deux sexes, le divorce à la demande de l'épouse est admis, et la polygamie est strictement encadrée.

* 27 Retrouver le rapport sur http://ec.europa.eu/world/enp/pdf/progress2008/sec08_398_fr.pdf.

* 28Notons la levée de la réserve à l'article 20 de la convention de lutte contre la torture reconnaissant la compétence du Comité contre la torture.

* 29 Le Maroc n'a pas ratifié la Convention de l'OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical.

* 30Le texte de la Convention de lutte contre toutes formes de discrimination à l'égard des femmes est disponible sur http://www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/text/fconvention.htm.

* 31 Lire les recommandations de la FIDH, sur http://www.fidh.org/spip.php?article5410.

* 32 Ibid.

* 33 Une opération de jumelage existe pour aider les douanes marocaines dans la lutte contre le trafic de drogue.

* 34 Pour plus de détails au sujet du jumelage des collectivités locales, voir http://www.gemdev.org/publications/etatdessavoirs/pdf/abouhani.pdf

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