WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

De la responsabilité de la puissance occupante dans la protection de la propriété privée. Cas du m23 à  Goma.


par Josias WAYESU NAMUNINGA
Université Libre des Pays des Grands Lacs (ULPGL-Goma) - Licence en Droit Public 2013
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

UNIVERSITE LIBRE DES PAYS DES GRANDS LACS ULPGL/GOMA

B.P : 368 GOMA

FACULTE DE DROIT

DE LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE
OCCUPANTE DANS LA PROTECTION DE LA
PROPRIETE PRIVEE :

CAS DU M23 A GOMA

Par : WAYESU NAMUNINGA Josias

Travail de fin de cycle en vue de l'obtention du titre de licencié en Droit

Option Droit Public

Dirigé par le Prof. Kennedy KIHANGI BINDU

Encadré par le CT. Philippe TUNAMSIFU SHIRAMBERE

Année Académique 2013-2014

1

DEDICACE

À Mon père NAMUNINGA MUBALAMA Sylvain

À Ma mère BITAKI BANGALI Josephine,

Au CT. TUNAMSIFU SHIRAMBERE,

À tous les activistes de Droit de l'Homme et lanceurs d'alertes,

À tous les victimes de l'occupation de la ville de Goma par le M23,

À notre progéniture, sa génitrice, et à toute la famille NAMUNINGA.

WAYESU NAMUNINGA Josias

2

REMERCIEMENTS

Au seuil de ce travail sanctionnant la fin de notre cycle de licence en Droit, qu'il nous soit permis de remercier avec sincérité le Professeur KIHANGI BINDU Kennedy qui a bien voulu diriger ce travail, en dépit de ses innombrables occupations, sans oublier le chef des travaux TUNAMSIFU SHIRAMBERE Philippe notre encadreur, dont nous avons trouvé en lui un maitre sur, dévoué et s'est montré d'une disponibilité permanente à répondre à nos diverses préoccupations pendant l'encadrement et dans la réalisation du présent travail, mais aussi au corps professoral de l'Université Libre des Pays de Grands Lacs, en Général et de la faculté de droit en particulier, nous disons merci.

À Mon père NAMUNINGA MUBALAMA Sylvain et ma mère BITAKI BANGALI Josephine, nous disons un grand merci, qu'elle trouve ici avec Martin NAMUNINGA, Alain NAMUNINGA, Feza NAMUNINGA , Sylvain NAMUNINGA, Alice NAMUNINGA, David NAMUNINGA, Beatrice NAMUNINGA, Ishara NAMUNINGA, Joelle Namuninga et Jaelle NAMUNINGA, à travers ce chef d'oeuvre, le fruit de leur éducation et de leurs sacrifices que nous ne saurons jamais oublier.

Nous témoignons notre profonde gratitude aux collègues, camarades et compagnons de lutte, pour avoir réservé à notre endroit le sens d'amitié et du travail en équipe et pour les sacrifices endurés ensemble dont notamment : SABATA MUYISA Patrick, Nephty ABASSA BYENDA, Jean-Trésor Olenga LOMAMI, Mireille AMINA NGULU, Néema SALUMU Nénette, BULAMBO W. Michel, MAGAYANE Roger... à tous un grand merci.

A toute personne qui nous aurait rendu service, de loin de près et qui ne voit son nom repris dans ce carnet de reconnaissance, trouve avec les précités, l'expression de nos sentiments de gratitude les distingués.

WAYESU NAMUNINGA Josias

3

INTRODUCTION GENERALE

1. ETAT DE LA QUESTION

Dans un conflit international et/ou interne, il arrive souvent qu'une partie affaiblisse l'autre, prenne possession d'une portion de son territoire et l'occupe entant que Puissance occupante. Durant l'occupation, la puissance occupante n'est pas autorisée à tout faire ni administrer ce territoire selon son bon vouloir. Il a des limitations au regard du Droit international humanitaire (DIH).

En effet, la question de l'occupation militaire est une question qui passionne les chercheurs au vu du traitement que réserve la Puissance occupante à la population en otage, mais aussi au regard de son patrimoine. Contemporain des événements de cette dernière décennie en République Démocratique du Congo (RDC) où les Forces armés de la RDC ont fait usage de la pratique dite de repli stratégique, nous n'avons nullement hésité de mener nos recherches sur ce sujet. Toutefois, nous avouons que nous ne sommes pas le pionnier dans cette thématique, mais au moins, nous pouvons le prétendre quant à ce qui concerne l'occupation de la ville de Goma par le M23.

Ainsi, certains prédécesseurs comme RUNEZERWA Vincent et Léon Moladja Kabamba, pour ne citer que ceux-là, nous ont précédés en abordant respectivement : «De l'occupation militaire en DIH : cas de l'Ouganda en RDC au regard de l'arrêt de la CIJ du 19 Décembre 2005» et « Le DIH applicable aux conflits armés : Mythe ou réalité».

Pour le premier, R. Vincent, dans son étude sur la présence de l'armée Ougandaise à Kisangani, il se pose la question de savoir si l'Ouganda entant que puissante occupante avait respecté ses obligations en vertu du Droit International. En réponse, il estime que l'Ouganda serait responsable de l'ensemble des actes et omissions de ses forces armées sur le territoire de la RDC, qui violent les obligations lui incombant en vertu des règles pertinentes et applicables à la situation de l'espèce, du droit international relatif aux droits de l'homme et du DIH.

Si le point commun avec R. Vincent porte sur l'occupation, la première démarcation avec lui se situe sur le fait que notre étude se focalise sur l'occupation de la ville de Goma par le M23, entité non étatique/ groupe rebelle, afin de déterminer sa responsabilité et démontrer la nécessité de poursuite s'il ne s'était pas conformé à ses obligations afin de permettre à la population victime de recouvrer ses droits. La deuxième démarcation est que R. Vincent a analysé cette

4

question en s'appuyant sur une décision judiciaire de la Cour internationale de justice, où les Etats sont justiciables, notre étude incite à ce qu'il y est des poursuites judiciaires pénales pour déterminer la responsabilité individuelle et lutter ainsi contre l'impunité.

Pour le deuxième, Léon Moladja Kabamba, dans son étude sur « le DIH applicable aux conflits armés : Mythe ou réalité », il se pose la question de savoir si les mécanismes d'exécution du DIH sont suffisants et efficaces pour assurer son respect, sanctionner les violations commises et si ces mécanismes sont pertinents au regard de la complexité et de la nature actuelle des conflits armés. En réponse, il admet que les instruments juridiques assurant la mise en oeuvre du DIH, pour la protection des personnes et des biens affectés par la guerre ne sont pas à même de garantir le respect de celui-ci, au regard de l'évolution de la nature des conflits armés et de leur complexité (Guerres interétatiques sur fond de guerres civiles et de rivalités ethniques). Il poursuit en disant que l'émergence des nouveaux acteurs aux conflits armés (milice avec le recrutement des enfants du reste, non formés et très peu instruits, affamés et manipulés qui se transforment en criminels), rend difficile le respect du DIH, et par ce fait, inexistant pour des personnes non avisées1.

Si avec Léon Moladja Kabamba le point de convergence porte sur l'occupation militaire qui s'explique par les conflits armés, la démarcation avec lui se situe sur le fait que nous analyserons un cas pratique, une expérience vécue pendant l'occupation du M23 dans la ville de Goma et nous envisageons les pistes de solutions pour que la justice soit faite en nous référant sur un arrêt de la CIJ déjà rendu ; l'affaire des activités armées sur le territoire du Congo (RDC c. Ouganda).

1 L. MULADJA KABAMBA, Le Droit International Humanitaire applicable aux conflits armés: Mythe ou réalité, Mémoire, Inédit, sous la direction d'Honoré Tshitambwe Kazadi Shambuyi, Faculté de Droit, U.O.M, MBUJIMAYI, 2007-2008, p.6.

5

2. PROBLEMATIQUE

Il est vrai que l'histoire de l'humanité est faite de rapports de force, des luttes armées ou non entre des peuples ou des individus. C'est ainsi que nous affirmons, à la suite de Philippe TUNAMSIFU SHIRAMBERE, que depuis la nuit de temps, des conflits armés existent, d'autres naissent, accroissent et finissent par disparaitre. Malheureusement, l'actualité montre que les conflits armés existent encore et causent un nombre des victimes, en particulier parmi ceux qui devraient rester protégés par le droit : les membres de la population civile.2

Lorsque des exactions commises sont avérées, cela appelle la responsabilité des auteurs d'autant plus qu'aucune exemptions n'est possible car le DIH (ci-après DIH) s'applique à tous et à toutes les parties antagonistes. Ainsi, dans le cas de notre travail, nous nous assignons un devoir agréable de réfléchir sur les abus sur la propriété privée pendant la période d'occupation de la ville de Goma, chef-lieu de la Province du Nord-Kivu en République Démocratique du Congo, par le mouvement rebelle dénommé M23 (Mouvement du 23 mars).3

En effet, le DIH, autrement appelé droit de la guerre ou droit des conflits armés, s'applique uniquement dans le contexte des conflits armés.4 Il a deux grandes fonctions, notamment la règlementation de la conduite des hostilités et la protection des victimes des conflits armés. Les dispositions destinées à protéger les victimes des conflits armés se trouvent réunies dans quatre Conventions de Genève du 12 Août 1949 (pour l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en Campagne [I], pour l'amélioration du sort des blessés et des malades et des naufragés des forces armées sur mer [II], relative au traitement des prisonniers de guerre [III], et celle relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre [IV]). En plus viennent deux Protocoles additionnels du 8 juin 1977 (relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux [I] et celui relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux [II] et un troisième relatif à l'adoption d'un signe distinctif additionnel du 08 décembre 2005).

De ces Conventions, nous nous intéresserons beaucoup plus à la quatrième relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre dans le cadre de nos recherches. Cette limitation se justifie du fait qu'assurer la protection des personnes civiles et leurs biens est une obligation et un devoir reconnu à tout occupant. Ainsi, l'article 53 de cette Convention dispose :

2 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Droit international humanitaire, notes de cours dispensées en L1, Faculté de Droit de l'ULPGL, 2013-2014, p. 2.

3 Cette appellation fait référence à l'Accord du 23 mars 2009 entre le Gouvernement de la RDC et le groupe rebelle, Congrès national pour la défense du peuple.

4 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p.57.

6

Il est interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l'État ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires.5

En ce qui concerne l'occupation, la puissance occupante doit se comporter en administrateur temporaire voire en usufruitier6 ou en « bonus pater familias » et considéré usant d'un pouvoir « délégué », alors que celui qui a reçu un pouvoir par délégation ne remplace pas le délégataire, il a des limites dans la prise de certaines décisions.7

Afin de limiter encore davantage les risques d'abus de l'occupant, c'est en 1949 qu'on a franchi un pas de plus en prévoyant que même si des changements interviennent dans les institutions, le gouvernement du territoire occupé, suite à un accord entre les autorités du territoire et l'occupant, ou en raison d'une annexion, les personnes protégées ne pourront en aucun cas être privées du bénéfice de la 4e Convention à son article 47.8

Le régime de la protection de la propriété privée suivant ses prescrits, interdit le pillage dans la Convention de Genève a son article 339, il interdit à l'occupant qui doit se comporter en usufruitier ou administrateur temporaire de confisquer la propriété privée à l'exception du matériel de guerre (objectif militaires) et aussi l'admissibilité limitée de réquisition.10

Le mouvement du 23 mars (M23), n'avait pas agi sans cause, il y a un contexte lié à son agissement et le M23 avait un objectif très précis en occupant la ville de Goma et la cité de Sake, mais ce mouvement devrait observer bon nombre des règles pendant son occupation.

Durant l'occupation de Goma et de Sake, les combattants du M23 auraient commis des violations graves du DIH à l'encontre de la population civile et des membres des FARDC qui s'étaient rendus et ne participaient plus aux hostilités. Les violations commises incluent les meurtres, des viols, des cas de travail forcé, le recrutement et l'utilisation d'enfants, des traitements cruels, inhumains ou dégradants et des violations du droit à la propriété (pillage généralisé des biens publics et privés), violations du droit à un procès équitable11. De toutes ces

5 CICR, IVème Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre du 12 aout 1949, Article 53 : «Il est interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l'Etat ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires ».

6 Idem, p. 5;

7 J. WAYESU NAMUNINGA, De la délégation du pouvoir aux ministères par le premier ministre en RDC, TFC en Droit, ULPGL, 2012, p.20.

8 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p. 54

9Idem. p. 56

10 Ibidem.

11Nations Unies Droits de l'homme, Haut-Commissariat, Monusco, Rapport du bureau conjoint des Nations Unies

aux droits de l'homme sur les violations des droits de l'homme perpétrées par les militaires des forces armées

7

violations, il est important de rappeler que seules les violations du droit à la propriété vont faire l'objet de ce travail.

Au regard de ce qui précède, il y a lieu que les questions suivantes soient posées : dans quel contexte la ville de Goma a été occupée et quelles seraient les obligations de l'occupant ? En clair, en cas d'abus, quelle peut être la responsabilité de l'occupant ? Les réponses à ces deux questions permettront de comprendre d'une part ce qui avait poussé le M23 a occupé la ville de Goma, les obligations non dérogeables que le Mouvement du 23 mars (M23) devait assumer pendant l'occupation de la ville de Goma et de la cité de Sake, mais aussi d'essayer d'établir la responsabilité de tous actes posés en violation du DIH d'autre part.

3. HYPOTHESES DU TRAVAIL

Le mouvement du 23 Mars (M23), comme tout autre mouvement rebelle, n'était pas né par le fait du hasard ; plusieurs contextes expliquent sa naissance et son évolution. Il se peut que ce mouvement tire son origine à partir des élections du 28 Novembre 2011 en RDC et après nombreux appels lancés en faveur de l'arrestation du Général Bosco Ntaganda pour les crimes de guerre commis en 2002 et 2003 en Ituri. C'est alors que le Chef de l'Etat, Joseph Kabila, pour sauver son image à l'extérieur, décida que le cité soit arrêtée et jugé en RDC. En conséquence de cette décision, une mutinerie avait été lancée vers la fin du mois de mars 2012 par les ex-CNDP incorporés dans les FARDC. En date du 6 mai 2012, un communiqué a été publié annonçant la création du M23 par la décision de la branche armée du CNDP comme la résultante de l'inexécution des accords du 23 Mars 2009. Alors que les FADRC faisaient un repli stratégique vers Bweremana et Minova, en date du 20 et 22 novembre 2012, les éléments du M23 se sont emparés de la ville de Goma et de la cité de Sake.12

Pendant son occupation dans la ville de Goma et la cité de Sake, le M23 aurait pu se comporter en administrateur temporaire, comme cela est le rôle des forces armées et de la Police nationale pendant la période stable. Le M23 devrait à tout prix protéger la population civile et ses biens, et veiller au maintien de l'ordre public comme l'aurait fait l'Etat lui-même. Comme le droit de la guerre protège les civils y compris leurs biens qui se trouvent en territoire ennemi ou occupé en temps de conflit, les combattants et agents du M23 ne devraient pas porter atteinte à la propriété privée.

congolaises et des combattants du M23 à Goma et a Sake, Province du Nord-Kivu, ainsi qu'a Minora et dans ses environs, province du Sud-Kivu, entre le 15 Novembre et le 2 Décembre 2012, Mai 2013, disponible sur: http://www.ohchr.org/Documents/Countries/ZR/UNJHROMay2013fr.pdf

12Nations Unies Droits de l'homme, Haut-commissariat, Monusco, Rapport du bureau conjoint précité, p.7-9.

8

A son article 50, la IVème convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre prévoit que: « [l]a Puissance occupante facilitera, avec le concours des autorités nationales et locales, le bon fonctionnement des établissements consacrés aux soins et à l'éducation des enfants», pour dire que l'occupant est tenu non seulement de ne pas entraver cette activité, mais encore de la soutenir activement, voire de l'encourager, si les autorités nationales responsables sont défaillantes. Il devra alors s'abstenir de réquisitionner le personnel, les locaux et les matériels qui sont au service des établissements en question.13

D'après le rapport du bureau conjoint des Nations Unies aux Droits de l'homme, les rebelles du M23 qui étaient censés se comporter en administrateur temporaire et qui devraient respecter les prescrits de la 4e Convention de Genève en ce qui concerne la protection des personnes civiles en temps de guerre n'était pas respecter. Pendant son occupation, certaines violations des droits de l'homme étaient observées : les violences sexuelles, traitements cruels, inhumains ou dégradants, violation du droit à la liberté et sureté de la personne, violation du droit à la propriété, violation de l'interdiction du travail forcé, recrutements et utilisation d'enfants, violation du droit à un procès équitable.14

Le régime juridique de l'occupation protège la population contre l'arbitraire éventuel de la puissance occupante tout en permettant à celle-ci de prendre les mesures nécessaires pour assurer sa sécurité et l'ordre public. En effet, le régime de l'occupation de guerre est toujours un compromis entre les exigences de l'action militaire, par exemple la proximité du front des hostilités actives et la nécessité d'une administration continue des populations civiles. Si les Conventions de Genève et ses Protocoles Additionnels étaient respectées dans son vrai sens du terme, la population de Goma pendant l'occupation de la ville par la force négative du M23 devrait se sentir très à l'aise, comme si c'était le gouvernement légitime qui avait le contrôle de la situation ; l'administration temporaire devrait être observée pendant l'occupation.

En ce qui concerne la répression des infractions commises pendant la guerre ou pendant l'occupation avons 2 types de répression : la répression nationale et la répression internationale. Le DIH préconise un système de répression pénale qui impose aux Etats l'obligation de poursuivre les auteurs présumés d'infractions graves, de les chercher, de les déférer à leurs propres tribunaux, voire de les remettre pour jugement à un autre Etat (...). En l'absence de juridiction universelle pour juger des criminels de guerre, les Conventions et le premier Protocole ont donc établi un régime de compétence universelle et de poursuites obligatoires:

13 J. PICTET, 4e convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, Genève, comité international de la croix rouge, 1956, p.308

14Idem, p.13-15.

9

l'obligation de réprimer les infractions graves et donc indépendante de la nationalité de l'auteur, des victimes, du lieu où l'acte a été commis.15

Au regard de la situation qui a prévalue dans la ville de Goma pendant son occupation par le M23, des préjudices auraient été causées. Selon l'article 258 du CCL III, le dommage causé doit subir une réparation. Ainsi, en dépit de la loi d'amnistie pour faits de guerre promulguée en Février 2014, les exactions commises par le M23, une fois avérées, nécessitent réparation.

D'une façon générale, les poursuites devant les tribunaux nationaux sont très hypothétiques suite à l'insertion des présumés auteurs au sein des services publics. Une possibilité demeure alors de voir la CPI exercée sa compétence complémentaire. Compte tenu des dégâts et violation des normes du droit des conflits armés que la RDC a subi, la réparation des dommages serait très importante non seulement pour l'Etat mais aussi pour les particuliers.

4. CHOIX ET INTERET DU SUJET

Le choix de notre thème comme objet d'étude est dicté par le fait que le comportement de la puissance occupante nécessite une attention particulière et c'est une question qui intéresse toute les couches de la population, il permet de tester et d'apprécier les obligations et les responsabilités qu'avait le M23 à l'égard de la population civile qui était sous sa domination.

Ce travail de recherche présente également un triple avantage pour nous. D'abord, la nécessité personnelle d'approfondir la matière en rapport avec le droit de l'occupation en s'inspirant de la présence des forces rebelles du M23 dans la ville de Goma et la cité de Sake et d'approfondir le problème posé par l'occupation du territoire, donc réveiller la conscience de cette population pour qu'elle sache les actions à entreprendre lorsqu'elle a été dépossédée pendant l'occupation dans un conflit armé.

Par la suite, ce travail nous permettra de déterminer la responsabilité ou la culpabilité des auteurs des crimes commis pendant l'occupation du M23 dans la ville de Goma car ils doivent répondre de leurs actes qui ont été contraires aux Conventions internationales.

Enfin, ce travail nous permettra d'apprécier la faisabilité de réparation des dommages causés par l'occupant car les lois et coutumes de la guerre interdisent à la puissance occupante le pillage. C'est le cas de la CG à son article 33(2) interdit le pillage et la confiscation de la propriété privée à l'exception du matériel de guerre et même l'admissibilité limitée des réquisitions. Nous souhaitons que les organes compétents veuillent à la protection de la propriété

15 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p. 85

10

privée pendant l'occupation et que les auteurs soient sévèrement punis. Il sera aussi instructif pour prévenir pareille action dans le chef des occupants au regard de la responsabilité qui en découle.

5. METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE

En toute logique, il y a lieu de se convenir sur le fait qu'on ne peut aboutir à des constructions doctrinales valables sans méthode car toute discipline scientifique à un objet et une méthode. La méthode peut être étendue comme étant la marche rationnelle de l'esprit pour arriver à la connaissance ou à la démonstration d'une vérité. Pour réaliser un travail intellectuel, le chercheur doit choisir et préciser sa méthodologie.16 Ainsi, dans cette dissertation, nous avions fait usage de la méthode exégétique, la méthode comparative et la technique documentaire.

1) la méthode exégétique, qui est une démarche des juristes consistant au recours au texte en vue d'entrer dans l'esprit du texte, comprendre ce que voulait dire l'auteur.17 En d'autres termes, elle est une interprétation des règles de droit, tout particulièrement de celles contenus dans les lois. Dans ce travail, elle nous a permis de comprendre le sens de certaines dispositions (principes) d'usage dans un conflit armé qui sont, du reste non dérogeables, afin de s'imprégner de la manière dont le M23 s'était comporté pendant son occupation ;

2) la méthode comparative : elle est aussi une méthode importante dans l'élaboration d'un travail scientifique, elle nous a permis de comparé les situations similaires, par exemple l'occupation de l'Ouganda à Kisangani, la manière dont elle a été tranchée par la CIJ à celle du M23 à Goma et de la manière dont cette dernière devra être tranchée.

3) la technique documentaire : elle nous a servis de récolter les différentes données écrites, éditées et non éditées, des rapports et articles parues dans la presse écrites et audio visuelles, etc.

6. DELIMITATION DU SUJET

Délimiter un sujet de recherche, c'est le circonscrire, mieux cerner tous les contours à analyser. C'est pour cela que pour éviter un champ de recherche élargi, nous avons préféré limiter nos recherches en droit, dans le temps et dans l'espace.

Pour la délimitation en droit, notre recherche est en droit international et se limitera dans sa branche du DIH. Plus précisément, ce travail s'intéressera plus à la philosophie des règles

16 M. DJIANDIMA, Principes et usages en matière de rédaction d'un travail universitaire, CADICEC-UNIAPAC, Congo-Kinshasa, 2004, p. 21.

17M. DJIANDIMA, Op. Cit., pp. 26-27.

11

relatives aux territoires occupés dans un conflit armé avec pour base la IVème Convention de Genève de 1949.

Dans le temps, ce travail couvrira le début des hostilités entre les rebelles du M23 aux forces loyalistes ou aux FARDC période allant d'Avril 2012 à Novembre 2013. Toutefois, ce travail n'étant exhaustif, nous nous limiterons à la période pendant laquelle la ville de Goma a été sous occupation du M23 afin de s'imprégner du comportement de la puissance occupante dans la protection ou violation de la propriété privée.

Dans l'espace, considérant que le conflit armé qui fait l'objet de nos recherches est situé en RDC, ce travail se limitera au territoire de cette dernière Province du Nord Kivu, en couvrant uniquement la ville de Goma.

7. ANNONCE DU PLAN

Ce travail scientifique comprendra deux grands chapitres traitant du contexte d'occupation de Goma et obligation de l'occupant (Chapitre I) et de la responsabilité et sanctions de la puissance occupante pendant l'occupation (chapitre II).

12

CHAPITRE1 : CONTEXTE D'OCCUPATON DE GOMA ET

OBLIGATIONS DE L'OCCUPANT

Comme dans tous les domaines existants, l'occupation est aussi soumise à un certain nombre d'obligations à respectées. Ainsi les obligations de la Puissance occupante sont énoncées dans le Règlement de La Haye de 190718 et dans la IVème Convention de Genève, 19dans certaines dispositions du Protocol additionnel I et dans le DIH coutumier. Les accords passés entre la puissance occupante et les autorités locales ne peuvent priver la population d'un territoire occupé de la protection accordée par le DIH 20 et les personnes protégées elles-mêmes ne peuvent en aucun cas renoncer à leurs droits.21

Ainsi, dans ce chapitre, nous parlerons du contexte d'occupation (section1), et par la suite nous verrons les obligations de l'occupation (section2).

Section1 : CONTEXTE D'OCCUPATION

Comme tous les autres mouvements, le M23 n'était pas un mouvement apparu comme un « Deus ex Machina », 22ou comme un mouvement inattendu. Il tire donc ses origines quelque part, c'est ainsi que nous parlerons de l'origine du conflit (§1), et par la suite de son évolution(§2).

§. L'origine du conflit

Pour parler de l'origine du conflit entre les FARDC et le M23, nous donnerons différents contextes du conflit armé (A), l'engloutissement de la RDC (B).

A. Différents contextes du conflit armé

Le conflit qui a opposé les FARDC au M23 peut être circonscris dans plusieurs contextes : historiques (1), politique et sécuritaire (2) et socio-économique (3).

18 CICR, Règlement de la Haye de 1907, Article 42, 56 ;

19 CICR, IVème Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre du 12 aout 1949, Article 27, 34 et 47, 78 ;

20 Idem, Article 47 ;

21 Idem, Article 8 ;

22 Deus ex Machina est un mot latin signifiant un dieu descendu au moyen d'une machine

13

1. Contexte Historique

A la date du 23 Mars 2009, un Accord de paix entre le Gouvernement congolais et le Congrès National pour la Défense du Peuple (ci-après CNDP) fut signé. Il comporte 16 articles au total, dont l'article 4 fait allusion à la réconciliation nationale.23De ce fait, les deux parties étaient tenues aux respects des engagements mutuels pour l'effectivité de cet Accord. Surtout que l'on visait dans cette disposition le règlement pacifique des conflits et la cohabitation pacifique entre congolais(e), peu importe leurs origines, et non l'emploi de la force pour résoudre le problème.

De cet Accord, il en découle l'intégration de ce groupe armé (CNDP) dans les FARDC. Néanmoins, il s'est observé que Bosco Ntaganda maintenait une chaîne de commande parallèle au sein des FARDC. En avril 2012, les anciens rebelles du CNDP dénoncèrent l'inexécution de certaines dispositions de l'Accord du 23 mars 2009 aux termes desquels certains éléments du CNDP intégrés dans l'armée nationale devaient se voir accorder des positions militaires clés. En plus de cela, ils dénonçaient le non versement des soldes ainsi que les mauvaises conditions de vie des militaires intégrés, des allégations d'assassinats d'anciens combattants du CNDP à Dungu, Province Orientale. Des tensions ont également surgi alors que, durant la période d'intégration, le Gouvernement avait tenté de déployer d'anciens officiers du CNDP en dehors des Provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu et de démanteler les chaînes de commandement parallèles (maillons de la hiérarchie du CNDP encore en place) au sein de l'armée.24A la suite d'une vague de mutineries, un communiqué a été signé le 6 Juin 2012 portant création du mouvement du 23 Mars (M23).

2. Contexte politique et sécuritaire

Les contextes politiques des affrontements entre les FARDC et le M23 partent :

Ø De l'arrêt de confirmation des charges de Mr Thomas Lubanga à la CPI qui avait comme conséquences des appels de plus en plus nombreux en faveur de l'arrestation du général Bosco Ntaganda étant donné qu'il était le commandant en chef de la branche armée de l'UPC dont Lubanga en était responsable.25

23 Article 4 par 1 de l'accord de paix entre le Gouvernement et le CNDP prévoit que : «4.1. Les parties s'engagent à entretenir une dynamique de réconciliation, de pacification des coeurs et des esprits, ainsi que de bonne cohabitation intercommunautaire en tant qu'exigence primordiale de bonne gouvernance. Dans cette optique : a) Les parties conviennent de la création d'un mécanisme national chargé de définir et de conduire la politique de réconciliation entre Congolaises et Congolais, et de lutter contre la xénophobie ».

24Nations Unies Droits de l'homme, Haut-commissariat, Monusco, Rapport du bureau conjoint précité, p.8.

25 La Cour pénale internationale a lancé vendredi 13 juillet 2012 des mandats d'arrêt contre les deux principaux responsables des violences dans les Kivu (est de la République démocratique du Congo), le général mutin Bosco Ntaganda et le commandant suprême des rebelles des FDLR Sylvestre Mudacumura. Les juges de la CPI ont

14

Ø D'abord, il y aurait une convention de ne pas arrêter le Général Ntaganda pour préserver la paix fragile. Ensuite, la décision du Président Kabila de vouloir arrêter le General Bosco26 qui avait été à la base d'une mutinerie des ex-CNDP pourtant incorporés dans l'armée. Enfin, les recrutements au Rwanda et le communiqué du 6 juin 2012 portant création du M23.

Ø De l'insécurité généralisée à Rutshuru, la prise de Jomba, les violations des droits humains, etc. et d'après le rapport de RENADHOC, juste après le contrôle du territoire de Rutshuru par le M23, ce dernier a ouvert le siège de la CENI et emporté tous les kits électoraux. Les avis étaient partagés sur cet acte. Pour le M23, c'est dans un but de sécuriser davantage ces kits et pour certains analystes, cela faciliterait un enrôlement frauduleux des Rwandais sous autres cieux pour telle ou telle finalité politique. Des tueries individualisées et collectives ont été signalées sur l'ensemble du territoire de Rutshuru /Nord-Kivu :

- Tueries collectives enregistrées pendant les affrontements à Mbuzi, Ntamugenga,

Jomba, Bunagana, Kiwanja, Vitshumbi, Nyamilima, ... Le bilan de ces massacres

n'étant pas encore connu, exige une enquête spécifique dans les sites concernés. - Violences sexuelles faites aux femmes ;

délivré un mandat d'arrêt contre Bosco Ntaganda, 41 ans, pour trois chefs de crimes contre l'humanité, notamment meurtres et viols, et quatre chefs de crimes de guerre, commis dans les Kivu en 2002-2003. Il faisait déjà l'objet d'un mandat d'arrêt pour enrôlement d'enfants soldats lancé en 2006, pour les mêmes crimes que le chef de milice congolais Thomas Lubanga, condamné mardi par la CPI à 14 ans de prison. Les juges ont également lancé un mandat d'arrêt, pour neuf chefs de crimes de guerre, notamment meurtres, attaques contre la population civile et pillages commis en 2009 et 2010, contre le Rwandais Sylvestre Mudacumura, 58 ans, commandant suprême des rebelles des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR). Sur la base des éléments de preuve présentés par le bureau du procureur, les juges ont estimé qu'"il y a des motifs raisonnables de croire" que les deux hommes sont "responsables" de ces crimes, selon un communiqué de la CPI qui siège à La Haye. Cité par : le Réseau National des ONGs des Droits de l'Homme de la République Démocratique du Congo (RENADHOC), Rapport du réseau précité, p.11.

26Bosco Ntaganda, est un général de la République démocratique du Congo mais de nationalité Rwandaise. Surnommé "Terminator", il fut intégré dans l'armée congolaise. Le 13 juillet 2012, la Cour pénale internationale délivre à son encontre un mandat d'arrêt pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre. Recherché par la Cour Pénale Internationale pour crimes de guerre, le général Bosco Ntaganda a réalisé un long et sanglant parcours dans les conflits armés de la République démocratique du Congo. Né à Ruhengeri (Rwanda) en 1973 de parents rwandais, Bosco Ntaganda prend goût au maniement des armes dans l'est du Congo après un passage dans l'Armée Patriotique Rwandaise (APR). Une source bien informée indique qu'à partir de 1996 il «était présent dans l'expédition de l'APR en République Démocratique du Congo, puis adhéra àl'Alliance de Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL) de Laurent-Désiré Kabila» qui chassa Mobutu en mai 1997 de Kinshasa. Très vite, Bosco Ntaganda se retourne contre Laurent-Désiré Kabila en rejoignant le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD), mouvement politico-militaire pro-rwandais à Goma, dans la province du Nord Kivu à l'est du Congo, qui va en guerre contre le nouveau président congolais. Soutenu par le Rwanda et l'Ouganda, Bosco Ntaganda participe à l'aventure militaire d'août 1998 pour renverser Laurent-Désiré Kabila. Un fiasco, même si Kabila père sera assassiné quelques années plus tard, en janvier 2001. Cité par le Réseau National des ONGs des Droits de l'Homme de la République Démocratique du Congo (RENADHOC), Rapport du réseau précité, p.11.

15

- Menaces verbale ou téléphoniques d'emprisonnement ou de mort à l'égard de plusieurs leaders locaux ;

- Prolifération des taxes illicites ;

- Les fusillades enregistrées tant à domiciles qu'à la route ont fait des centaines des victimes parmi les civiles dont certains en sortent infirmes. Le bilan partiel des victimes peur ressortir du service médical de l'hôpital Général de Référence de Rutshuru.27

Sur le plan sécuritaire, pendant son occupation, plusieurs violations des DHO ont été commises.

De juillet 2012 à octobre 2013, Kibumba était sous contrôle des éléments du M23. Durant l'occupation de cette zone par ces derniers, qui a duré environ une année et demie, a connue plusieurs troubles sécuritaires consistant dans des pillages des biens de la population, dans des enrôlements forcés des adultes et enfants au sein du groupe armé, dans des tracasseries et exactions, ainsi que dans des viols des femmes, de jeunes filles et mineures, entretenus surtout par ces hommes en arme. De plus, il était imposé à la communauté une sorte de tribut régulier à chaque ménage.28Pour le BCNUDH, durant l'occupation de Goma et de Sake par le M23, des combattants de ce groupe armé ont perpétré des violations graves des DHO et du DIH. Le BCNUDH a documenté au moins 59 cas de violence sexuelle, dont 58 viols commis par des combattants du M23 à Goma et dans ses environs. Au moins 11 civils ont été exécutés arbitrairement et au moins deux autres ont été victimes d'une tentative d'exécution arbitraire par des combattants du M23. Le BCNUDH a également rapporté plusieurs cas de recrutement et d'utilisation d'enfants, de travail forcé, de traitement inhumain, cruel ou dégradant, et de pillage par les forces du M23 durant la même période. Ce qui crée une grande insécurité dans le chef de la population civile qui était sous son contrôle.29

3. Contexte socioéconomique

Les affrontements entre les FARDC et le M23 avaient produit beaucoup des conséquences sur le plan socioéconomique dans le territoire Rutshuru et une partie de

27Réseau National des ONGs des Droits de l'Homme de la République Démocratique du Congo (RENADHOC),National Network of CongoleseHumanRights NGO, Secrétariat Exécutif National, Rapport synthèse des violations des droits de l'homme commises par le mouvement dit M23 dans la province du nord - kivu : vers la sacralisation des crimes et de l'impunité en R.D.Congo, Rapport semestriel couvrant la période allant du 1er Juin au 30 Novembre 2012, Kinshasa, 04 Décembre 2012. Disponible sur : http : www.iccwomen.org/Rapport RENADHOC

28 Réponse Rapide aux Mouvements de Population (RRMP), Rapport d'Evaluation Multisectorielle Approfondie à Kibumba, 22 Novembre 2012 au 22 Novembre 2013, disponible sur : http://www.rrmp.org/contenu/rapport/1225.pdf

29Nations Unies Droits de l'homme, Haut-commissariat, Monusco, Rapport du bureau conjoint précité, p.4.

16

Nyiragongo. A cause des conflits armés qui ont séquentiellement sévi dans la zone, de juillet 2012 à octobre2013, la population de Kibumba a connu trois principales vagues de déplacements, à savoir : les vagues de juillet 2012, mars 2013 et octobre 2013. Pour la vague de juillet 2012, la population se serait déplacée vers le Rwanda et vers Kanyaruchinya à la suite des affrontements entre le FARDC et les éléments du M23. Concernant la vague de mars 2013, la population aurait fui vers le Rwanda, Goma et Mugunga, à cause des combats qui opposaient deux fractions du M23. Enfin, pour la vague d'octobre 2013, la population se serait déplacée vers le Rwanda à cause des opérations lancées contre les M23 par les FARDC. Les derniers affrontements se sont soldées avec la récupération de Kibumba par les FARDC, l'accalmie et le retour des déplacés dans cette zone.30

Outre les affrontements signalés dans la zone, des exactions et des tracasseries perpétrées par les éléments du M23 sur la population auraient conduit certains ménages à fuir leurs villages pour s'installer à Goma ou dans les camps de déplacés de Mugunga. Ces exactions et tracasseries consistaient entre autres dans les poursuites illégales, l'imposition des taxes, des travaux forcés, les viols, l'extorsion des biens,31mais aussi le rapport du RENADHOC montre qu'à la date du 21 novembre 2012 : la tracasserie routière imposée par les éléments du M23 en érigeant une barrière routière au niveau de KIBATI où on fait payer chaque camion qui se rend à Butembo venant de Goma et de Butembo à Goma, un montant de 350$ par Camion.32Donc il y avait une double taxation des produits commerciaux de premières nécessités.

B. Engloutissement de la région

Les efforts diplomatiques régionaux -menés essentiellement par l'intermédiaire de la CIRGL- ont porté sur la création d'une force militaire neutre chargée de lancer des opérations offensives contre leM23 et les FDLR. En octobre 2012, seule la Tanzanie s'était engagée à affecter certaines de ses troupes à cette mission hypothétique. Le Kenya, l'Angola et le Congo-Brazzaville semblaient peu disposés à conduire des opérations de contre-insurrection risquées dans l'est de la RDC, et le gouvernement rwandais a commencé en privé à faire pression pour qu'une telle intervention militaire n'ait pas lieu.

Le rôle du Président Museveni en tant que président de la CIRGL, en attendant, a été remis en question en raison d'allégations selon lesquelles le gouvernement ougandais soutiendrait le M23.33Quant aux Rwandais, Kigali semblait bien décidé à appliquer une politique consistant à corrompre le processus de la CIRGL de l'intérieur, en faisant semblant de le

30Réponse Rapide aux Mouvements de Population (RRMP), Rapport d'Evaluation Multisectorielle Approfondie à Kibumba, précité p.4.

31Idem

32Réseau National des ONGs des Droits de l'Homme de la République Démocratique du Congo (RENADHOC), Rapport du réseau précité, p.17.

33 Version préliminaire non officielle du «Rapport final du Groupe d'experts sur la République démocratique du

Congo 2012», transmise à l'agence de presse Reuters, 16 octobre 2012. Cité par : J. STEARNS, Du CNDP au

M23 : Évolution d'un mouvement armé dans l'est du Congo, Institut de la Vallée du Rift, Londres, 2012, p.61. 33 J. STEARNS, Op. Cit., p. 61

17

soutenir tout en entravant la concrétisation de tout résultat conséquent. Peu de progrès ont été accomplis lors d'un mini-sommet à l'ONU en septembre 2012, tandis que les relations entre le Rwanda et la RDC continuaient de se détériorer. Dans les médias, le Président Kagame a employé des mots très durs à l'encontre de son voisin, ainsi que duM23, accusant le gouvernement congolais d'être «en faillite idéologique» et alléguant qu'«il ne respecte pas ses propres citoyens et n'oeuvre pas pour eux».34

L'intérêt de la CIRGL est le règlement pacifique des conflits, qui est le plus bon des moyens pour faire face à un conflit, et donc elle ne faisait que lutter contre le recours à la force. Selon le rapport du RENADHOC, l'avènement des conflits armés au Nord- Kivu a déstabilisé la Province sur tous les plans : économique, politique, social, culturel etc.

A titre illustratif, sur le plan social il y a lieu de mentionner les faits suivants :35

Ø Nombreuses infrastructures : routes et ponts, écoles, unités médicales, maisons d'habitation et greniers, champs et pâturages ont été fortement endommagés ;

Ø La persistance des poches de résistance des groupes armés incontrôlés en milieux ruraux qui continue à jouer sur la circulation des personnes et de leurs biens, l'accès aux champs et par conséquent sur les productions agricoles et les échanges commerciaux entre les différents secteurs de développement ;

Ø La production animale a sensiblement baissé suite à la destruction des cheptels bovin caprin, ovin, et porcin par les multiples guerres ;

Ø La destruction du parc national des Virunga par l'abattage systématique de la faune et de la flore par les inciviques ;

Ø Le faible pouvoir d'achat de la population ne lui permet pas de se procurer ce dont elle a besoin ;

Ø La réduction sensible des revenus des populations ne leur permettant plus d'accéder aux services de base dont les soins médicaux, l'éducation, etc. ;

Ø L'augmentation du taux de chômage à la suite de la réduction des activités économiques ;

Ø Ces guerres ont réduit la population du Nord-Kivu à l'extrême pauvreté ;

Ø Les agriculteurs du Nord-Kivu, ne parviennent plus à récolter ce qu'ils ont semé car entre la mise en terre des semences et la récolte, des combats surgissent toujours et le seul salut possible pour les agriculteurs est espéré dans la fuite car les hommes en armes opérant au Nord-Kivu, ne reculent devant aucune exaction ;

Ø Le déracinement volontaire des populations autochtones ;

34 J. STEARNS, Op. Cit., pp. 61-62

35 Réseau National des ONGs des Droits de l'Homme de la République Démocratique du Congo (RENADHOC), Rapport du réseau précité, p.8.

18

Ø L'immunité totale pour les crimes commis sur les populations locales ;

Ø La promotion à des grades supérieurs accordés aux criminels et autres mutins ;

Ø La signature des accords des paix avec des criminels, qui comportent les germes d'une nouvelle guerre ;

Ø L'engagement de la RDC à éradiquer les FDLR et les LRA même si cela doit occasionner des mouvements des populations ainsi que des milliers des morts au sein des populations locales sans défense ; Etc.

§2. L'évolution du conflit

Il est vrai que les conflits naissent, accroissent (grandissent) et finissent par disparaitre.36Le conflit armé entre les FARDC au mouvement du 23 mars ne fait pas exception d'autant puisqu'il a commencé en 2012 pour prendre fin en Octobre 2013 avec la défaite du M23.C'est ainsi que nous parlerons de la nature du conflit (A) et la fin du conflit ou la libération de la ville de Goma et la fin de l'occupation (B).

A. Nature du conflit (qualification)

Le conflit entre les FARDC et le M23 était au départ un conflit interne, mais par la suite il s'est internationalisé suite à l'intervention des autres Etats dont le Rwanda et l'Ouganda. Ici nous parlerons des conflits internes internationalisés.

Les conflits internes sont des affrontements armés qui se déroulent dans les limites du territoire d'un seul Etat où les combats opposent le gouvernement et les insurgés armés. Ceux-ci se battent pour prendre le pouvoir ou dans le but de faire sécession afin de fonder leur propre Etat. Les origines des conflits internes sont diverses. Il peut s'agir du non-respect du droit de minorité ou de la violation des DHO par le régime dictatorial. Quant aux conflits internes, le principe de non-intervention dans les affaires des Etats les soustraits à l'action de l'ONU. Or, ils portent souvent les germes des éléments d'internationalisation, ne serait-ce qu'en raison d'appuis extérieurs apportés aux belligérants. Dans la réalité internationale de notre temps, la distinction entre les conflits armés internationaux et les conflits non internationaux est loin d'être claire.37

Les conflits internes internationalisés sont, en Afrique comme ailleurs, hors du tout doute raisonnable générateurs de menace pour la paix et la sécurité internationale tels que la RDC, la Guinée Bissau, le Lesotho et d'une certaine manière l'Afghanistan. L'exemple le plus caractéristique est celui de la RDC en 1960, l'ONU par son intervention a contribué à

36 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p.2.

37 Ibidem, p. 28.

19

l'internationalisation du conflit et en 1998 à partir du moment où certains Etats (Rwanda, Ouganda et Burundi) sont intervenus au côté des rebelles en laissant leurs militaires participer aux hostilités, le conflit qui, initialement, était « prétendu » interne était devenu conflit interne internationalisé. A dire vrai il s'agit d'une guerre par procuration ou conflit mixte.38

Mais comment identifier un conflit interne internationalisé ? Certaines hypothèses issues de la doctrine peuvent aider à identifier un conflit interne internationalisé :39

· L'Etat victime d'une insurrection reconnait les insurgés comme des belligérants ;

· Un ou plusieurs Etats étrangers interviennent avec leurs propres forces armés en faveur de l'une des parties ;

· Deux Etats interviennent avec leurs propres forces armées respectives en faveur de l'une des parties.

Mais aussi, une autre approche montre que, pour que l`action d`un groupe autonome soit imputable à l`Etat, il est nécessaire que celui-ci ait agi en fait pour son compte. Cela fut le même cas dans l'affaire Nicaragua c. Etats Unis, la Cour exige la preuve qu`un contrôle effectif ait été exercé, ou des instructions expresses données, par les États-Unis sur les actions militaires des contras ayant donné lieu à des violations du DIH pour que ces actions puissent leur être attribuées. La Cour est allée au-delà de ce qu`elle a semblé exiger dans un premier temps, qui revenait à établir la dépendance générale des rebelles vis-à-vis des États-Unis. L`objet de l`analyse change : il ne s`agit plus de déterminer si les contras agissaient de manière générale au nom des États-Unis, c`est-à-dire s`ils étaient un organe de facto de cet État. Dans ce cas, l`ensemble de leurs actes leur auraient été imputables. Au contraire, il devient nécessaire d`apporter la preuve d`un contrôle effectif des États-Unis sur chaque action des contras ayant donné lieu à des violations du DIH, ou que des instructions expresses de les commettre avaient été données.40

L'excellente illustration de ce concept « conflit interne internationalisé » nous donné par les conflits armés dans la région des Grands Lacs où le Rwanda, l'Ouganda et le Burundi

38 Idem

39 Il faut retenir que cette classification est essentiellement doctrinale, (P. VERRI, Dictionnaire du droit international des conflits armés, CICR, Genève, 1988, pp.37), mais le conflit armé interne est, au regard de l'article 3 commun aux conventions de Genève et au Protocol Additionnel II, un conflit armé non International (CANI), cité par : P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p.21.

40 A. KYRO MALIMUTOTO, la responsabilité des Etats tiers dans un conflit armé non international : appréciation des critères du control global et/ou effectif, Mémoire Inédit, Faculté de Droit, ULPGL-Goma, 2013, p.17.

20

soutiennent les rebelles qui combattent le gouvernement de Kinshasa appuyé par la Zimbabwe, le Tchad, l'Angola, la Namibie.41

Mais nous faisons aussi allusion au conflit récent entre les FARDC et le M23qui a dépassé le niveau interne pour s'internationalisé grâce à l'implication du Rwanda et de l'Ouganda. En suivant les trois caractères identifiant le conflit interne internationalisé, nous disons que le conflit entre les FARDC et le M23 était un conflit interne internationalisé, surtout que deux de ces 3 facteurs identifiant les conflits internes internationalisés sont confirmés.

Dans l'affaire du Nicaragua c. les Etats-Unis, la CIJ a estimé que les opérations d'un groupe armé non étatique ne peuvent être imputées à un État que si ce dernier exerce un « contrôle effectif » de ces opérations.42 C'est lors que le rapport au Conseil de Sécurité des Nations Unies montrait en détail que le M23 bénéficiait d'un soutien important militaire, financier et politique de la part de membres haut placés du gouvernement Rwandais, y compris du Ministre de la Défense et du chef d'état-major de la Défense du Rwanda. Il bénéficiait notamment :43

Ø De l'Assistance directe à la création du M23 à partir du territoire rwandais ;

Ø Du Recrutement effectué par les Forces rwandaises de défense pour le compte du M23 ;

Ø De l'Appui logistique des Forces rwandaises de défense au M23 ;

Ø De l'Implication directe de responsables Rwandais de haut rang dans la mobilisation de l'appui au M23 ;

Ø De l'Appui direct fourni au M23 par des unités des Forces rwandaises de défense lors d'opérations en RDC ;

Ø Du Soutien au M23 par des officiels Rwandais ;

Ø Du Soutien du Rwanda à des groupes armés et à des mutineries liées au M23 ;

Ø Du Soutien du Rwanda à des personnes visées par les sanctions, notamment le général Bosco Ntaganda. Toutes les illustrations données par ce rapport, servent de preuves pour montrer ou prouver le contrôle effectif du Rwanda sur la rébellion du M23.

Un autre rapport de l'ONG Human Rights Watch, montre que les membres du M23 « sont responsables de crimes de guerre commis à grande échelle, y compris des exécutions sommaires, des viols et des recrutements de force ». «Certaines autorités rwandaises pourraient

41 Idem

42 CIJ, 27 juin 1986, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua, §109, Rec. 1986 p. 62

43 Réseau National des ONGs des Droits de l'Homme de la République Démocratique du Congo (RENADHOC), Rapport du réseau précité, p.9.

21

être considérées comme complices de crimes de guerre en raison de l'appui militaire continu qu'elles apportent aux forces du M23 ».44

De manière chronologique, il y a lieu de retenir les dates suivantes :45

Ø En juillet 2012, le M23 contrôlait deux villes, Bunagana et Rutshuru. Suite à une médiation entamée en août par la Conférence internationale sur la région des Grands lacs à Kampala (Ouganda), les deux camps restent plus ou moins sur leurs positions d'août à la mi-octobre, respectant une trêve précaire émaillée d'accrochages entre le M23 d'une part et les FARDC ou la MONUSCO d'autre part. Le 9 novembre, la RDC lance un ultimatum de 14 jours au M23 pour désarmer. Les combats reprennent dans le territoire de Rutshuru, au nord de Goma, tenu par le M23.

Ø Le 17 novembre 2012, le M23 attaque les FARDC dans les environs de Kibumba, à une trentaine de kilomètres au nord de Goma, Mboga et Ruhondo. Il s'empare de Kibumba dont les FARDC se retirent malgré l'intervention des hélicoptères d'attaque de la MONUSCO, et se positionnait autour de Goma. La position du gouvernement congolais est alors claire : "Il n'y a pas de M23, c'est le Rwanda qui agresse la RDC" déclare son porte-parole Lambert Mende. Le 18 novembre, le M23 prend la ville de Goma et affirme qu'il s'agit d'une offensive des FARDC qu'il n'a fait que contenir et exige du gouvernement l'ouverture de négociations. Le même jour, le Secrétaire général de l'ONU condamne fermement « la reprise des hostilités par le M23 », son avancée vers Goma et « les violations graves des lois internationales humanitaires et des DHO commis par le M23. Il déplore les conséquences humanitaires dévastatrices des combats. Le Conseil de Sécurité de l'ONU condamne lui aussi les « attaques du groupe rebelle M23 » et exige leur arrêt.

Ø Le 20 novembre 2012, le Conseil de sécurité adopte à l'unanimité, la résolution 2076 (2012) dans laquelle il demande « le retrait immédiat du M-23 de la ville de Goma, de stopper ses avancées et de déposer les armes de manière permanente ». Il exprimait son intention d'envisager d'autres sanctions ciblées contre le leadership du M23 et de ses soutiens extérieurs. Le même jour, le M23 prennent le contrôle de Goma. Il demandait des sanctions contre deux chefs du groupe M23. L'Union européenne demandait au M23 « d'arrêter immédiatement l'offensive militaire contre Goma ». Le 21 novembre, la Cour

44 Réseau National des ONGs des Droits de l'Homme de la République Démocratique du Congo (RENADHOC), Rapport du réseau précité, p.10.

45 Idem

22

Pénale internationale CPI relance le dossier de l'arrestation de Bosco Ntaganda et Sylvestre Mudacumura.46

Ø Le même jour, pour ramener la paix dans cette région de l'Est de la RDC, le président de la RDC Joseph Kabila rencontre à Kampala ses homologues rwandais, le président Paul Kagame et ougandais, le président Yoweri Museveni. Les trois présidents font une déclaration commune appelant les combattants du M23 à se retirer de la ville de Goma conquise la veille, ce que ces derniers refusent car ils exigent avant tout retrait que le président de la RDC Joseph Kabila accepte de les rencontrer et de dialoguer afin de trouver une issue à cette guerre.

Ø Le 22 novembre 2012, la ville de Sake, à l'ouest de Goma, tombe sous le contrôle des Unités spéciales du Rwanda camouflées au sein du M23.

L'Institut de la Vallée du Rift par son projet Usalamaa publié une intéressante publication Du CNDP au M23 : Evolution d'un mouvement armé dans l'est du Congo ». Dans cette publication Jason Stearns évoque le contrôle du Rwanda et donc sa participation aux rebellions dans l'Est de la RDC.

Le soutien du Rwanda envers le CNDP a commencé tôt, des pressions étant exercées sur Nkunda pour qu'il ne rejoigne pas l'armée nationale en 2003, mais il n'est pas resté constant. Pendant une grande partie de l'histoire du CNDP, l'influence du Rwanda s'est limitée à des conseils, un soutien matériel mineur et une aide au recrutement de politiciens et de militaires. Ce n'est qu'après l'escalade militaire de 2008 que Kigali a déployé des unités entières de l'autre côté de la frontière pour attaquer le camp militaire de Rumangabo et appuyer l'avancée du CNDP vers Goma -et, même à l'époque, il ne s'agissait que de quelques centaines d'hommes. Lorsque le CNDP devint M23, cependant, l'ampleur et l'intensité du soutien augmentèrent considérablement, une des raisons principales en étant les difficultés que traversait la nouvelle rébellion à son tout début.

Rares sont les personnes qui ont tenté de comprendre les motivations du Rwanda -de poser la question qu'a adressée Kigali en réponse à un rapport de l'ONU particulièrement accablant :

Qu'est-ce que le Rwanda chercherait à obtenir à travers le M23 qu'il ne pourrait pas obtenir par d'autres moyens ? Dans quel but ultime le Rwanda soutiendrait-il une mutinerie en RDC ? Quelle serait l'utilité stratégique d'une implication active dans la déstabilisation du gouvernement central de la RDC ?47

Il est difficile de répondre à ces questions, car elles nécessitent de comprendre les processus décisionnels internes du FPR. Il est toutefois probable que de purs intérêts économiques jouent un rôle moins important qu'il n'a souvent été suggéré, et qu'au contraire, l'intervention rwandaise ait été motivée par un écheveau complexe de motivations politiques et économiques, fermement ancrées dans une culture du contrôle axée sur la sécurité.

46 La Cour pénale internationale a lancé vendredi 13 Juillet 2012 des mandats d'arrêt contre les deux principaux responsables des violences dans les Kivu (est de la République démocratique du Congo), le général mutin Bosco Ntaganda et le commandant suprême des rebelles des FDLR Sylvestre Mudacumura.

47 J. STEARNS, Op. Cit., p.64.Citant «Rwanda's Response to the Allegations Contained in the Addendum to the UN Group of Experts Interim Report», http://www.gov.rw/.

23

Lors des entretiens réalisés pendant plusieurs mois de 2012 avec des officiers des FRD et de l'ex-CNDP, ainsi que d'autres agents affiliés à la rébellion, divers avis ont été exprimés sur la raison pour laquelle le Rwanda a besoin d'une telle sphère d'influence. Même les personnes censées être au coeur de la rébellion n'étaient pas du même avis sur les raisons ayant poussé le Rwanda a apporté un soutien. D'après un ancien garde du corps de Nkunda, «le Rwanda pense que cette zone est à lui -peut-être pas en tant que terre lui appartenant, mais que zone sur laquelle il a son mot à dire». «Il considère qu'elle fait partie de sa sphère d'influence», a déclaré un chercheur qui avait interrogé des dizaines de dirigeants du FPR, «c'est un ensemble d'intérêts groupés, ce n'est pas un facteur isolé».48

De ce qui précède, il y a lieu que nous puissions affirmer que le M23 recevait le soutien extérieur, un soutien de la part du Rwanda qui avait un contrôle effectif sur les rebellions du CNDP et du M23 qui a été très visible.

B) L'occupation de la ville de Goma et fin du M23

Le 15 novembre 2012, de nouveaux affrontements ont éclatés au nord de la ville de Goma, Province du Nord-Kivu, entre les combattants du M23 et les loyalistes des FARDC. Après cinq jours d'affrontements, les rebelles du M23 se sont emparés de la ville de Goma et l'ont occupée le 20 novembre 2012. Conséquemment, ils avaient avancés jusqu'à prendre possession de la cité de Sake, territoire de Masisi, le 22 novembre 2012. Des militaires des FARDC s'étaient entre-temps retranchés vers Minova, territoire de Kalehe, Province du Sud-Kivu, où ils s'étaient regroupés.49

Comme l'occupation est temporaire et que l'occupant n'est qu'un usufruitier, l'occupation naisse, grandisse et disparaisse, c'est ainsi qu'une occupation prend fin lorsque la Puissance occupante se retire du territoire occupé ou en est chassée. Cependant, la présence prolongée de troupes étrangères ne signifie pas nécessairement que l'occupation continue. A la fin d'une occupation nous avons un transfert de l'autorité à un gouvernement local :50

- transfert qui rétablit le plein et libre exercice de la souveraineté

- met un terme à l'état d'occupation, si le gouvernement accepte la présence prolongée de troupes étrangères sur son territoire.

Néanmoins, le droit de l'occupation peut redevenir applicable si la situation sur le terrain change, c'est-à-dire si le territoire se trouve à nouveau « placé de fait sous l'autorité de l'armée

48 J. STEARNS, Op. Cit., pp. 63-64

49 Nations Unies Droits de l'homme, Haut-commissariat, Monusco, Rapport du bureau conjoint précité, p.6.

50 Idem

50 CICR, L'occupation et le droit international humanitaire : questions et réponses, consulté le 13/05/2014 à 23h47', disponible sur : http://www.icrc.org/fre/war-and-law/index.jsp

24

ennemie»,51 en d'autres termes, sous le contrôle de troupes étrangères sans le consentement des autorités locales.52

Parmi les bons moyens existant pour régler les conflits, nous avons « le dialogue » qui veut que les hostilités se règlent de manière pacifique (règlement pacifique des conflits), que les parties aux hostilités puissent parler et terminer les hostilités sans recourir aux armes. L'Article 2 al 2 de la IVème Convention de Genève veut que toute occupations y inscrive pour éviter des multiples violations du DIH.53

L'occupation étant dans la plupart des cas une situation temporaire, le M23 n'avait pas occupé définitivement la ville de Goma et la citée de Sake. Après avoir occupé la ville de Goma et la cité de Sake, un dialogue était tenu à Kampala pour tenter de trouver une solution de manière pacifique.

C'est ainsi qu'une rencontre à huis clos s'est tenue à Kampala entre les Présidents Joseph Kabila et Paul Kagame. Tandis qu'un sommet des Chefs d'Etats et de gouvernements de la CIRGL, tenue sans la présence du Chef d'Etat rwandais, a abouti à un accord selon lequel le M23 doit se retirer dans les 48 heures de Goma et se replier sur ses bases en échange d'un engagement de la RDC à discuter des griefs du M23. Il avait été aussi convenu que la MONUSCO occupera une zone neutre entre les positions tenues au préalable par les mutins et la ville de Goma, étant entendu qu'une force tripartite, composée d'une « force neutre », des FARDC et des mutins, serait déployée à l'aéroport.54

Dans le contexte de cet accord, des divergences de vue ou des tonalités différentes sont apparues dans le chef du leader politique du M23 et de la branche militaire du mouvement. Le premier, qui entend tout faire pour se rendre populaire et maintenir son emprise sur l'administration de la ville, y compris en cooptant des responsables et des membres locaux du parti présidentiel, a poussé ses exigences politiques toujours plus loin avant de quitter Goma, tandis que la seconde acceptait le retrait de Goma lequel ne se produirait cependant pas avant la fin de la semaine pour des raisons logistiques. Pendant ce temps, les FARDC, qui avaient abandonné un matériel militaire important à Goma avant de la déserter, menaçaient le M23 de prendre d'assaut la ville qui aurait été également pillée par les mutins, y compris le siège local de

51 CICR, Règlement de la Haye de 1907, Article 42

52 Idem

53 Article 42 al 2, La Convention s'appliquera également dans tous les cas d'occupation de tout ou partie du territoire d'une Haute Partie contractante, même si cette occupation ne rencontre aucune résistance militaire.

54 Éphémérides G.L. - Semaine du 24 au 30 novembre 2012, consulté le 28/06/2014 à 16h42, disponible sur : http://congosiasa.blogspot.be/2012/11/who-is-general-francois-olenga.html

25

la Banque centrale, et où le petit commerce reprenait vie, mais pas les banques, les activités humanitaires et de nombreuses entreprises. Aux alentours du 28 novembre, le chef des opérations de maintien de la paix à l'ONU annonçait que les mutins commençaient à évacuer Goma, retrait qui aurait dû avoir lieu le 26, tandis qu'un colonel du M23 évoquait la date du 29 pour un retrait gradué qui commencerait par le territoire de Masisi pour s'achever par Goma. Le jour même toutefois, le porte-parole militaire du M23 évoquait la date du lendemain pour le début du retrait, retrait qui devrait être observé par les chefs d'Etat-major des pays des Grands Lacs : certains témoins locaux, qui constataient la présence de nombreux mutins dans la ville, restaient sceptiques sur l'effectivité de ce retrait et sur la suite. Le jour du départ prévu des mutins, près de 300 policiers sont arrivés à Goma pour assurer la protection de la ville, les FARDC devant se redéployer le lendemain dans la ville et à l'aéroport55. Donc le 1er décembre 2012, suite au communiqué de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) du 24 novembre 2012, des rebelles du M23 s'étaient retiré de Goma, processus qui s'est poursuivi le jour suivant.56

Apres avoir abordé les origines et contexte des conflits armés entre les FARDC et le M23 dans la ville de Goma et la cité de Sake, nous allons voir les obligations qui incombent à l'occupant pendant l'occupation à l'égard de la population civile qui ne participe pas aux hostilités et qui doit être protégée, elle, avec ses biens (propriété privée).

Section 2 : LES OBLIGATIONS DE L'OCCUPANT

Comme tout occupant, le M23 avait aussi les mêmes obligations comme celles prévues pour la puissance occupante, de manière générale, pendant son occupation dans la ville de Goma, le M23 était un administrateur temporaire, un usufruitier, un garant de la sécurité, c'est ainsi que nous parlerons de la sécurité et de la protection des personnes(§1) et la protection de la propriété privée (§2).

§1. De la sécurité et de la protection des personnes

Ce paragraphe est subdivisé en deux points essentiels dont l'obligation de sécurisé le territoire sous control (A), et l'obligation de protégé ou sécurisé la population civile (B).

A. l'obligation de sécurisé le territoire sous control

55 Ibidem

56 Nations Unies Droits de l'homme, Haut-commissariat, Monusco, Rapport du bureau conjoint précité, p.6.

26

Du point de vue du DIH les civils dans un territoire occupé méritent et ont besoin de règles de protection particulièrement détaillées. Dans leur propre pays, ils sont au contact de l'ennemi contre leur volonté, simplement à cause du conflit armé qui a mené l'ennemi à prendre le contrôle du territoire sur lequel ils vivent. Les civils n'ont aucune obligation envers la puissance occupante hormis l'obligation inhérente à leur statut civil, à savoir de ne pas participer aux hostilités. Du fait de cette obligation, le DIH ne leur permet pas de résister par la violence à l'occupation de leur territoire, ni d'essayer de le libérer par la violence.57

A ce niveau nous allons développer huit points et nous ferons allusion au respect de la quatrième convention (1). Par la suite, à l'ordre juridique d'un territoire occupé (2), la protection des personnes privées de liberté (3), de manière brève nous parlerons de la protection de propriété privée (4), les interdictions spécifiques (5), l'Administration d'un territoire occupé (6), la protection des droits économiques, sociaux et culturels (7) et pour terminer nous parlerons de l'applicabilité des règles relatives aux territoires occupés en faisant référence à l'occupation du M23 (8).

1. Le respect de la quatrième convention

a. La protection des intérêts de la population du territoire : sa vie doit continuer le plus normalement possible, et de préférence ne pas se rendre compte du changement qui s'est opéré ;

b. La protection des intérêts de la puissance occupante : sécurité des forces d'occupations ;

c. La protection des intérêts de la puissance occupée : pas de changement du statut.58

2. L'ordre juridique d'un territoire occupé59

a. Le principe concernant la législation : les puissances occupantes doivent maintenir le droit local en vigueur ;

b. Exceptions à l'interdiction de légiférer :60 la puissance occupante peut assurer sa sécurité ; peut adopter des lois essentielles à la mise en oeuvre du DIH ; peut adopter des

57 S'il y a commission des actes hostiles, ils peuvent être punis selon l législation mise en place par la puissance occupante, mais ils ne perdent pas leur statut de civil protégés. (Ils peuvent cependant perdre leurs droits de communication selon CG IV, art.52 (2)) ils jouissent de la protection contre les effets des hostilités, sauf s'ils participent directement aux hostilités et pendant toute la durée de cette participation (voir PA I, art.51 (3)). Pour plus, lire M. SASSOLI, AA. BOUVIER et A. QUINTIN, Un droit dans la Guerre?, cas, documents et supports d'enseignements relatifs à la pratique contemporaine du droit international humanitaire, Vol. I, Présentation du droit international Humanitaire, Chapitre 8, 2e éd., S.D., pp.27-30.

58 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p.55.

59 GOLDSTEIN Éric, « Au coeur de l'occupation : le Sahara occidental, les droits de l'homme et le droit international humanitaire - In the Heart of the Occupation : Western Sahara, humanrights and international humanitarianlaw», in RBDI, vol. 43, 2010, pp. 15-74. Cité par M. SASSOLI, AA. BOUVIER et A. QUINTIN, Op.cit, p.178.

60 Cas de l'occupation et consolidation de l'Irak.

27

lois essentielles à la mise en oeuvre du droit international des droits humains ; peut légiférer autant que nécessaire pour maintenir l'ordre public. La puissance occupante peut-elle légiférer pour maintenir les conditions de vie de la population civile dans un territoire occupé ? Une puissance occupante peut-elle légiférer pour améliorer les conditions de vie de la population civile dans un territoire occupé?; autorisation du conseil de sécurité?

c. Règles spéciales sur la législation pénale (CG IV ; art. 64, 65,67 et 70) : la législation pénale en vigueur est appliquée par les tribunaux locaux existants; législation adoptée par la puissance occupante (raisons indiquées au point b) ci-dessus) cas de la non rétroactivité (CG IV, art.67); poursuites pénales pour des délits commis avant l'occupation (CG IV, art.70); compétence des tribunaux militaires (CG IV, art. 66); garanties judiciaires détaillées (CG IV, art. 68-75).61

3. La protection des personnes privées de liberté62

a. Le principe : contrairement aux combattants, les civils ne peuvent pas être privés de leur liberté ;

b. Les personnes inculpées ou condamnées (les garanties judiciaires CG IV, art. 71-75; la détention dans le territoire occupé CG IV, art. 76); un traitement humain CG IV, art.76; remise aux autorités locales à la fin de l'occupation CG IV, art. 77);

c. Les internés civils (décision relative à l'internement ou à la résistance forcée CG IV art. 78 : pour d'impérieuses raisons de sécurité ; décision administrative individuelle ; possibilité de faire appel ; révision semestrielle si possible) règles détaillées relatives à leur traitement CG IV, art. 79-135 ;

d. Prisonniers des guerres internés CG III, art. 463 (B) (1).64

61 Idem

62 Cas n° 154, CICR, Sud-Liban, Fermeture du camp d'Ansar, cité par M. SASSOLI, AA. BOUVIER et A. QUINTIN, Un droit dans la Guerre?, cas, documents et supports d'enseignements relatifs à la pratique contemporaine du droit international humanitaire, Vol. I, Présentation du droit international Humanitaire,2eéd., Chapitre 8, 2e éd., S.D., p.180.

63 L'Article 4 al 1 de a IVème CG dispose : Sont protégées par la Convention les personnes qui, à un moment quelconque et de quelque manière que ce soit, se trouvent, en cas de conflit ou d'occupation, au pouvoir d'une Partie au conflit ou d'une Puissance occupante dont elles ne sont pas ressortissantes. Al2, Les ressortissants d'un Etat qui n'est pas lié par la Convention ne sont pas protégés par elle. Les ressortissants d'un Etat neutre se trouvant sur le territoire d'un Etat belligérant et les ressortissants d'un Etat cobelligérant ne seront pas considérés comme des personnes protégées aussi longtemps que l'Etat dont ils sont ressortissants aura une représentation diplomatique normale auprès de l'Etat au pouvoir duquel ils se trouvent. Al3, Les dispositions du Titre II ont toutefois un champ d'application plus étendu, défini à l'article 13. Al4 Les personnes protégées par la Convention de Genève pour l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne du 12 août 1949, ou par celle de Genève pour l'amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer du 12 août 1949, ou par celle de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre du 12 août 1949, ne seront pas considérées comme personnes protégées au sens de la présente Convention.

28

4. Protection de la propriété privée

a. Interdiction du pillage CG IV, art. 33 (2) 65;

b. Interdiction de confisquer la propriété privée à l'exception du matériel de guerre ; mais cette règle connait une exception a ce qui concerne le matériel de guerre66.

c. Admissions limitée des réquisitions.67

5. Les interdictions spécifiques

a. Les déportations CG IV, art. 49 (1) ;68

b. Le transfert dans le territoire occupé de la propre population de la puissance occupante CG IV, art.49 (6) ;69

c. La destruction des biens CG IV, art. 53 sauf lorsqu'elle est rendue absolument nécessaire pour les opérations militaires.70

6. L'administration d'un territoire occupé

a. La responsabilité d'assurer la vie et l'ordre publics (domaine d'application : non seulement la sécurité, mais aussi la qualité de la vie ; une obligation de moyen et non de résultat ; une obligation soumise aux limitations fixées par le droit des droits humains pour toute action étatique ;71

b. La taxation ;72

c. L'administration des biens publics mais pas de confiscation, sauf pour les biens qui peuvent servir à des opérations militaires (cas Républiques Démocratique du Congo ; Rapport Mapping (1993-2003) (par.338), cas CIJ, Républiques Démocratique du Congo/Ouganda, affaire des activités armées sur le territoire du Congo (par.240-245,250) ;73

64 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p.56.

65 L'article 33 al.2 dispose ce qui suit : Le pillage est interdit et l'article 27 et 47 du Règlement de la Haye.

66 Lire à ce sujet l'article 53 al. 2 du Règlement de la Haye.

67 Voir l'article 52 du Règlement de la Haye de 1907. Et le Cas n° 130, CIJ/Israël, Mur de séparation/clôture de sécurité dans le territoire palestinien occupé [Partie A. par. 132 et Partie B., par. 8 et 32]

68 Cas n° 139, Israël, Affaires relatives à des arrêtés d'expulsion cité par M. SASSOLI, AA. BOUVIER et A. QUINTIN, Op. Cit., p.183.

69 L'article 49 de la CG IV dispose que : Les transferts forcés, en masse ou individuels, ainsi que les déportations de personnes protégées hors du territoire occupé dans le territoire de la Puissance occupante ou dans celui de tout autre Etat, occupé ou non, sont interdits, quel qu'en soit le motif.

70 A ce sujet l'article 43 de la CG IV dispose que : Il est interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l'Etat ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires.

71 Cas n° 301, Géorgie/Russie, Rapport de HumanRights Watch sur le conflit en Ossétie du Sud [par. 76-78, 84]

72 Règlement de la Haye, art. 48, 49 et 51.

73 Cité par M. SASSOLI, AA. BOUVIER et A. QUINTIN, Op. Cit, p.186.

29

d. Respect du statut des fonctionnaires CG IV, art.54.74

7. Protection des droits économiques, sociaux et culturels75

a. Vivres et fournitures médicales CG IV, art. 55 et 59-62, PA I, art. 69 (obligation de ne pas perturber le système d'approvisionnement local ; obligation d'assurer l'approvisionnement ; obligation d'autorisé le libre passage de l'aide) ;

b. La santé et l'hygiène publiques CG IV, art. 56, 57 `obligation de garantir la santé et l'hygiène publique, respect du personnel médical, respect des hôpitaux, respect des hôpitaux, respect de la société nationale de la Croix-Rouge ou du croissant rouge) ;

c. Les enfants et leur éducation CG IV, art. 50 76;

d. La protection des travailleurs (disposition limitant l'astreinte du travail CG IV, art. 51 ;

e. Interdiction de provoquer le chômage CG IV, art. 52 ;

f. La protection des biens culturels.77

8. La fin de l'applicabilité des règles relatives aux territoires occupés78

a) Pendant la durée d'une occupation selon la CG IV (art. 6(3)) mais pas selon le PA I (art. 3(b))

b) En cas d'autonomie ? : si le nouveau Gouvernement invite les anciennes forces d'occupation à rester ? ; au moins sur les questions administrées par le nouveau Gouvernement ? ; des élections peuvent-elles être mises en place par la puissance occupante (qui ne peut pas priver les personnes protégées de la protection accordée par la CG IV, selon son art. 47)79?

c) En cas de traité de paix

d) En cas de retrait de la puissance occupante : quel niveau de contrôle de facto la puissance occupante se retire doit-elle conserver pour que le DIH relatif à

74 L'article 54 de la CG IV dispose ce qui suit : Il est interdit à la Puissance occupante de modifier le statut des fonctionnaires ou des magistrats du territoire occupé ou de prendre à leur égard des sanctions ou des mesures quelconques de coercition ou de discrimination parce qu'ils s'abstiendraient d'exercer leurs fonctions pour des considérations de conscience.

75 VITE Sylvain, « L'articulation du droit international humanitaire et des droits économiques, sociaux et culturels en temps d'occupation », in W. KÄLIN, International Law, Conflict, and Development: The Emergence of a HolisticApproach in International Affairs, Leiden, Boston, M. Nijhoff, 2010, pp. 19-47. Cité par : M. SASSOLI, AA. BOUVIER et A. QUINTIN, op.cit., p.186.

76 L'article 50 de la CG IV dispose ce qui suit : La Puissance occupante facilitera, avec le concours des autorités nationales et locales, le bon fonctionnement des établissements consacrés aux soins et à l'éducation des enfants.

77 Idem, p.56.

78 BUGNION François, « La genèse de la protection juridique des biens culturels en cas de conflit armé », in RICR, vol. 86 n° 854, juin 2004, pp. 313-324. Cité par M., SASSOLI, A.A., BOUVIER et A. QUINTIN, Op.Cit., p.188.

79 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p.57.

30

l'occupation militaire (ou quelques-unes de ses règles) soit applicable même après le retrait des troupes ?

e) Par décision du conseil de sécurité des Nations Unies ? Ou d'une organisation sous régionale ?

f) La protection des personnes qui restent en détention ou ne sont pas encore rétablies CG IV, art. 6 (4).

Parmi les obligations de sécurisé le territoire sous control, l'article 43 du règlement de la Haye y fait aussi référence en abordant la question des institutions ou gouvernement du territoire occupé. Selon cet article, l'occupant doit être considéré comme administrateur de fait,80 C'est-à-dire que l'autorité du pouvoir légal ayant passé de fait entre les mains de l'occupant, celui-ci prendra toutes les mesures qui dépendent de lui en vue de rétablir et d'assurer, autant qu'il est possible, l'ordre et la vie publics, en respectant, sauf empêchement absolu, les lois en vigueur dans le pays.81

Cette disposition du règlement de la Haye ne vise pas seulement les habitants du territoire occupé ; elle protège aussi l'Etat, son individualité, ses institutions et ses lois. La nouvelle convention de Genève ne fait rien perdre de sa valeur à ce texte ; elle se borne à développer en ce qui concerne la protection des personnes civiles.

L'ingérence de la puissance occupante dans les institutions et le gouvernement d'un pays occupé a pour effet de transformer plus ou moins profondément la structure et l'organisation de ce pays.

Cette transformation risque d'aggraver la situation des habitants; aussi la disposition a-t-elle pour but d'éviter que les mesures prises par la puissance occupante en vue de rétablir et d'assurer l'ordre et la vie publics ne portent préjudices aux personnes protégées, elle n'interdit pas expressément à la puissance occupante de modifier les institutions ou le Gouvernements du territoire occupé.82

On peut, en effet, concevoir que certains changements soient nécessaires et même heureux ; au surplus, le texte dont il s'agit est de caractère essentiellement humanitaire : il vise à sauvegarder la personne humaine et non protéger l'Etat comme tel dans ses institutions politiques et son gouvernement. Ce qui importe, au sens de la convention, c'est que les interventions opérées dans l'organisation interne de l'Etat n'aient pas pour effet de priver les

80 Idem

81 Idem

82 L'article 43 du Règlement de la Haye ne comporte lui non plus qu'une interdiction relative, prescrivant de respecter, « sauf empêchement absolu, les lois en vigueur dans le pays ».

31

personnes protégées des droits et garanties créés en leur faveur. Il s'ensuit que la convention doit pouvoir leur être appliquée intégralement, même si la puissance occupante a procédé à des changements dans les institutions ou le Gouvernement du territoire occupé.

Donc la sécurité que doit garantir la puissance occupante au territoire sous control, doit être une sécurité totale, l'occupant comme administrateur temporaire doit se comporter en Administrateur temporaire, en tenant compte des toutes les limites que la IVème convention de Genève lui donne83. Apres les obligations de sécurisé le territoire sous control, le regard a été jeté aux deuxièmes obligations relatives à la sécurité de la population civile.

B. Obligation de protégé ou sécurisé la population civile

La CG IV vielle sur la protection des personnes civiles en temps de guerre, et l'interdiction d'attaquer des personnes civiles et des biens civils impliquent celle de tous actes de violence, qu'ils soient à titre offensif ou défensif. Les actes ou menaces de violence qui ont simplement pour objet de terroriser la population civile sont interdit.84

L'interdiction inclut les attaques lancées sans discrimination, il s'agit en particulier des attaques qui ne sont pas dirigées ou qui ne peuvent pas être dirigées, en raison des méthodes ou moyens de combat employés, contre un objectif militaire. Sont également considérés comme effectué sans discrimination les types d'attaques qui traitent comme objectif militaire unique un certain nombre d'objectifs militaires nettement espacés et distincts situés dans une ville, un village ou toute zone contenant une concertation analogue des personnes civiles ou des biens de caractère civil. Il en va de même des attaques qui causent incidemment des pertes et dommages civiles excessifs par rapport à l'avantage militaire concret et direct étendu.85

La présence ou le mouvement de la population civile ou des personnes civiles ne doivent pas être utilisés pour tenter de mettre des objectifs militaires à l'abri d'attaques ou de couvrir, favoriser ou gérer les opérations militaires.

En outre, les textes prévoient la conclusion, par des parties au conflit, d'arrangements locaux pour l'évacuation d'une zone assiégée ou encerclée, des blessés, des malades, des infirmes, des vieillards, des enfants et des femmes en couches, et pour le passage des ministres de toutes religions, du personnel et du matériel sanitaires à destination de cette zone.

Enfin, le protocole interdit d'affamer la population civile de l'adversaire. Les biens indispensables à la survie de la population civile, tels que les denrées alimentaires, les zones

83 J. PICTET, Op. Cit., p.295.

84 Ibidem

85 Idem

32

agricoles, les récoltes, les installations et réserves d'aux potables, les ouvrages d'irrigation ne doivent être ni attaqués, ni détruits, enlevés ou mis hors d'usage. Un belligérant ne peut déroger à cette règle que sur son propre territoire, et seulement si ce territoire se trouve sous son contrôle, à condition que des nécessités militaires impérieuses l'exigent.86

L'environnement lui-même est protégé contre les dommages étendus, durables et graves. Les méthodes ou moyens de guerre propres à causer de tels dommages et à compromettre, de ce fait, la santé ou la survie de la population sont interdits.87

La puissance occupante à multiples obligations qu'elle doit respecter pendant son occupation. C'est ainsi que nous avons fait allusion aux articles 47 à 78 de la Convention. Elle comporte la matière très importante du traitement à réserver par la puissance occupante aux habitants du territoire occupé (territoire sous control). Il faut, et il est important de se rappeler que les articles 27 à 34 sont communs à la section concernant les territoires occupés et celle qui concerne les étrangers sur le territoire d'un belligérant.88

1. Les principes importants qui régissent l'occupation

Les obligations de la puissance occupante sont aussi énoncées dans le Règlement de La Haye de 190789 et dans la Convention de Genève IV90 (CG IV, art. 27-34 et 47-78), ainsi que dans certaines dispositions du Protocole additionnel I et dans le DIC (Droit International coutumier).

Les accords passés entre la puissance occupante et les autorités locales ne peuvent priver la population d'un territoire occupé de la protection accordée par le DIH (CG IV, art. 47) et les personnes protégées elles-mêmes ne peuvent en aucun cas renoncer à leurs droits (CG IV, art. 8)91. Les envois de secours ne dégageront en rien la puissance occupante des responsabilités que lui imposent les articles 55, 56 et 59. Elle ne pourra détourner d'aucune manière les envois de secours de l'affectation qui leur a été assigné, sauf dans les cas de nécessité urgente, dans l'intérêt de la population du territoire occupé et avec l'assentiment de la puissance protectrice92.

86 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p.58.

87 Idem

88 J. PICTET, Op. Cit., p.293.

89 CICR, Règlement de la Haye de 1907, Article 42 a 56

90 CICR, IVème Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre du 12 aout 1949, Article 27,34 et 47,78 ;

91 A ce sujet, il est souligné par le texte de la IVe Convention de Genève précisément en ces dispositions ci-citées que les personnes protégées ne pourront en aucun cas renoncer partiellement ou totalement aux droits que leur assure la présente Convention et, le cas échéant, les accords spéciaux visés à l'article précédent.

92 J. PICTET, Op. Cit., p.347.

33

Les principales règles du droit applicable en cas d'occupation précisent que 93:

· L'occupant n'acquiert pas la souveraineté sur le territoire.

· L'occupation n'est qu'une situation temporaire et les droits de l'occupant se limitent à la durée de cette période.

· La puissance occupante est tenue de respecter les lois en vigueur dans le territoire occupé, à moins qu'elles constituent une menace pour sa sécurité ou un obstacle à l'application du droit international de l'occupation.

· La puissance occupante doit prendre des mesures en vue de rétablir et d'assurer, autant qu'il est possible, l'ordre public et la sécurité publique.

· Dans toute la mesure de ses moyens, la puissance occupante à le devoir d'assurer des conditions satisfaisantes d'hygiène et de santé publique, ainsi que d'approvisionner en vivres la population sous occupation et de lui dispenser les soins médicaux nécessaires.

· Les personnes civiles vivant dans un territoire occupé ne peuvent pas être enrôlées de force dans les forces armées de l'occupant.

· Les transferts forcés de personnes civiles, en masse ou individuels, à l'intérieur ou en dehors du territoire occupé sont interdits.

· Les transferts de ressortissants civils de la puissance occupante dans le territoire occupé, qu'ils soient forcés ou volontaires, sont interdits.

· Les peines collectives sont interdites.

· La prise d'otages est interdite.

· Les mesures de représailles à l'égard des personnes protégées ou de leurs biens sont interdites.

· La confiscation des biens privés par l'occupant est interdite.

· La destruction ou la saisie de biens appartenant à l'ennemi est interdite, sauf si elles sont absolument nécessaires pour des raisons d'ordre militaire.

· Les biens culturels doivent être respectés.

· Les personnes poursuivies pour un délit pénal doivent bénéficier des procédures respectant les garanties judiciaires reconnues sur le plan international (par exemple, elles

93 CICR, L'occupation et le droit international humanitaire : questions et réponses, précité, p.2-3.

34

doivent être informées des motifs de leur arrestation, inculpées d'un délit spécifique et jugées de façon équitable dès que possible).

· Le personnel du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge doit être autorisé à mener à bien ses tâches humanitaires. Le CICR, en particulier, doit avoir accès à toutes les personnes protégées, en tout lieu, qu'elles soient privées de liberté ou non.

Et donc le M23 entant que puissance occupante ne devrait pas aller au-delà de tous ces principes, surtout que l'objectif poursuivi par le législateur est de garantir la protection de la population civile et en protégeant la population civile, il fait allusion à tous les aspects nécessaires à la vie de l'homme, notamment sa propriété qui a un caractère privé (ses biens). Malgré les violations qui étaient perpétrées par le M23 pendant son occupation. C'est ainsi que dans la partie suivante nous allons parler de la propriété privée.

§2. La protection de la propriété privée

La propriété privée jouisse aussi de la garantie fondamentale et l'occupation a une obligation de la protégée autant que possible, mais exception est faite aux seuls objectifs militaires, et l'article 34 de la Constitution de la RDC garantie le droit à la propriété privée et à son premier alinéa 1 le législateur fait allusion à la sacralité de la propriété et si l'occupant a l'obligation de protéger cette propriété en tout temps, donc en cas de non-respect, il engage que sa responsabilité.94

La Convention de Genève et le règlement de la Haye, n'avaient pas gardé aussi silence sur la question relative à la propriété privée pendant les conflits armés et comme cela fait l'objet de notre recherche, nous parlerons de la protection des certains biens : tous les biens civils en général (A), par la suite la protection des biens par le M23 (puissance occupante) (B).

94 Article 34 al 1, 2, 3, 4, 5 de la constitution de la RDC du 18 Février 2006 disposent : al1, La propriété privée est sacrée.

Al2, L'Etat garantit le droit à la propriété individuelle ou collective acquis conformément à la loi ou à la coutume.

Al3, Il encourage et veille à la sécurité des investissements privés, nationaux et étrangers.

Al4, Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité octroyée dans les conditions fixées par la loi.

Al5, Nul ne peut être saisi en ses biens qu'en vertu d'une décision prise par une autorité judiciaire compétente.

35

A. La protection des certains biens : tous les biens civils en général

Les biens sont définis négativement par l'art. 52 al1 du Protocol « sont des biens de caractère civil tous les biens qui ne sont pas des objectifs militaires ». Par objectif militaire l'al2 de l'article 52 entend les objectifs qui sont milités aux « biens qui par leur nature, leur emplacement, leur destination ou leur utilisation apportent une contribution effective à l'action militaire et dont la destruction totale ou partielle, la capture ou la neutralisation offre en l'occurrence un avantage militaire précis ». En cas de doute, un bien est normalement affecté à un usage civil,... est présumé ne pas être utilisé en vue d'adopter une contribution effective à l'action militaire (art 52 al3).95

Les biens culturels et lieux de culte sont aussi protégés par l'art.53 du Protocol I et 16 du Protocol II. Il s'agit des monuments historiques, des oeuvres d'art ou des lieux de culte qui constituent le patrimoine culturel ou spirituel des peuples. Ces biens ne peuvent faire l'objet d'attaques. Il est aussi strictement interdit d'utiliser ces biens a l'appui de l'effort militaire ou d'en faire l'objet de représailles.

Les aliments, récoltes, bétail, eau potable (art. 54 du Protocol I) sont considérés comme des biens indispensables à la survie de la population civile et protégé contre les attaques. Cette disposition aussi l'utilisation de la famine come moyen de guerre.

B. Protection des biens par la puissance occupante

Pendant l'occupation militaire, la propriété privée doit bénéficier d'une protection particulière et ça devrait être la même chose avec le mouvement du 23 Mars pendant son occupation dans la ville de Goma.

C'est ainsi qu'un respect de la propriété doit exister pendant l'occupation militaire, et l'occupant doit se comporter toujours en bonus pater familias, administrateur temporaire.

L'article 33 al 2 de la CG IV interdit le pillage pendant l'occupation militaire (pendant les conflits armés), et donc c'est une obligation qui incombait aussi au mouvement du 23 Mars pendant son occupation dans la vie et que le non-respect engage automatiquement la responsabilité de l'occupant. Cette présente convention a donc pour objet la protection de la personne humaine. Elle contient aussi certaines dispositions relatives aux biens, destinés à épargner aux populations les souffrances résultant de la destruction de leur avoir mobilier ou

95 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p.58.

36

immobilier (maisons, titres,meubles, vêtements, provisions, instruments de travail, etc.).96La prohibition annoncée ici est un ancien principe du droit de la guerre consacré par le règlement de la Haye dans deux dispositions, à l'article 28 : « il est interdit de livrer au pillage une ville ou localité même prise d'assaut », et à l'article 47 : « le pillage est formellement interdit ». Si la convention de 1949 a omis le mot « formellement », c'est pour ne pas risquer d'affaiblir (par comparaison des textes) la portée d'autres dispositions énonçant des interdictions, et qui, tout en ne comportant pas d'adverbe, n'en ont pas moins elles aussi un caractère absolu.97

La prohibition a une portée générale, elle concerne non seulement le pillage résultant d'actes individuels en dehors du consentement de l'autorité militaire, mais encore le pillage organisé, comme l'histoire des conflits anciens en relate les effets (même avec l'occupation de la ville de Goma et la cité de Sake par le M23) alors que le butin alloué à chaque homme de troupe était considéré comme partie de sa solde.98Dans son extrême concision, l'alinéa 2 de l'article 33 est très net ; il ne laisse aucune échappatoire. Les hautes parties contractantes s'interdisent d'ordonner aussi bien que d'autoriser le pillage. Elles s'obligent de surcroit à empêcher et, le cas échéant, à réprimer le pillage individuel. En conséquence, elles devront, s'il y a lieu, prendre toutes mesures législatives appropriées. L'interdiction du pillage s'applique au territoire des parties au conflit comme aux territoires occupés. Elle garantit tous les catégories de biens, les propriétés des personnes privées comme celles des collectivités ou de l'Etat. En revanche, elle laisse intact de réquisition ou de saisie.99

Mais l'article 97 alinéa 1 de la CG IV, stipule que les objets et effets d'usage personnel ne comprennent non seulement les vêtements, le linge, les couvertures et objet de toilette, mais les livres, et, le cas échéant, une machine à écrire portative, les médicaments et, d'une manière générale, tout ce qui sert à la vie journalière. Une exception doit être faite sans doute pour les appareils photographiques, en raison de l'intérêt qui s'attache pour la puissance détentrice, à écarter tout élément propre à favoriser l'espionnage ou à alimenter éventuellement une propagande adverse. Ce droit pour les internés de conserver leur propriété souligne, une de plus,

96 Article 53 de la CG IV : « Il est interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l'Etat ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires.

97 J. PICTET, Op. Cit., p.244.

98 C'est précisément ce genre de pillage qu'envisageait le règlement de la Haye en interdisant de « livrer » au pillage une place ou un territoire.

99 Ibidem

37

que l'internement n'est qu'une mesure de sécurité et ne doit porter atteinte que moins possible aux prérogatives de la personne.100

La protection des biens est aussi visée à l'article 53. C'est là en quelque sorte une extension du cadre de la Convention qui a pour objet principal la protection des personnes. Elle se justifie parce que certaines atteintes à la propriété privée portent de graves préjudices à la situation matérielle et morale des personnes: Il est interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l'Etat ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires.101

La puissance occupante est tenue au respect de la propriété privée se trouvant sur son territoire, notamment :

- L'interdiction de pillage CG IV102 comme dit ci-haut ;

- Interdiction de confisquer la propriété privée à l'exception du matériel de guerre ; - Admissibilité limitée des réquisitions.

Tout au long de ce chapitre portant : contextes d'occupation de Goma et obligations de la puissance occupante, nous avons d'abord vu l'origine du conflit armé entre les FARDC et le M23 en donnant différents contextes du conflit. Ces contextes ont été analysés sur 3 points essentiels : historique, politique et sécuritaire, et socio-économique.

En effet, en occupant la ville de Goma, le M23 n'était qu'un administrateur temporaire, un usufruitier et donc il avait des obligations à respectées. Pendant son occupation, le M23 entant que puissance occupante avait deux obligations majeures à savoir l'obligation de sécurisé ou de protégé la population civile et l'obligation de protégé la propriété privée. En protégeant la population civile, l'obligation de sécurisé le territoire sous control s'impose d'office ainsi que l'obligation de protégé ou sécurisé la population civile. L'occupant a aussi l'obligation de protégé la propriété privée. Sur le plan interne, en RDC, elle jouisse d'une protection fondamentale ; article 34 de la Constitution qui dispose que la propriété privée est sacrée, et donc l'occupant a une obligation de la protégée, mais aussi l'article 33 al 2 de la CG IV interdit le pillage toujours dans le cadre de protégé la propriété privée revêtu d'un caractère sacré et

100 Idem, p.449.

101 ICRC. (Avril 2011). Protections des populations civiles et des personnes civiles en temps de guerre, article précité, p.15.

102 Article 33 de la CG al2 dispose : Le pillage est interdit ;

38

même l'article 97 al 1fait appel au respect de la propriété privée. Cependant, une exception est faite pendant les conflits armés aux seuls objectifs militaires qui peuvent subir des attaques.

Nous ne pouvons pas donc nous limiter seulement aux obligations qu'a la puissance occupante en période des conflits armés car les obligations engendrent toujours les responsabilités et des responsabilités découlent les sanctions. C'est ainsi que nous parlerons dans le chapitre deuxième de la responsabilité de l'occupant.

39

CHAPITRE 2 : LA RESPONSABILITE DE L'OCCUPANT

L'occupation de la ville de Goma par les rebelles du M23 devait se conformer aux règles du DIH. Ainsi, tout manquement engageait la responsabilité des insurgés et logiquement

nécessite une réparation pour les victimes. Cette obligation et responsabilité que nous
soulevons ne sont pas une première car la CIJ s'est déjà prononcé à plusieurs reprises dans ce sens. Pour ce qui concerne la RDC, au regard de l'occupation et des activités militaires de l'Ouganda sur le territoire de la RDC, la CIJ, dans l'affaire des activités armées sur le territoire du Congo (RDC c. Ouganda), conclut que l'Ouganda était responsable de l'ensemble des actes et omissions de ses forces armées sur le territoire de la RDC en tant que puissance occupante de l'Ituri.103 Il en est de même de l'ensemble des actes de pillage et de l'exploitation illégale des ressources naturelles commis dans le territoire occupé par les membres de l'UPDF.104 En conséquence, la CIJ avait considéré que ces faits avaient entraînés un préjudice pour la RDC et avait déclaré que l'Ouganda était tenu de réparer ledit préjudice.105

Dans ce chapitre, nous inspirant de cette décision judiciaire de la haute juridiction des Nations Unies, nous allons analyser les allégations contre le M23 au regard des actes commis pendant l'occupation de la ville de Goma (section 1) afin d'étudier le régime juridique pour établir la responsabilité s'il échait (section 2).

Section 1 : ANALYSE JURIDIQUE DES FAITS : allégations contre le M23 à

Goma

Il existe des preuves matérielles tangibles sur les violations et omissions graves que le M23 aurait commises pendant l'occupation. Avant de le démontrer pour engager sa responsabilité avec une attention particulière à la propriété privée (§2), il est important d'aborder au préalable le principe de responsabilité et les droits des victimes (§1)

§1. Le principe de responsabilité et les droits des victimes

Parmi les obligations juridiques que créent les violations du droit international des DHO et du DIH, l'une des plus importantes est de veiller à ce que leurs auteurs aient à rendre des comptes. Comme l'a indiqué le Secrétaire général de l'ONU, l'état de droit suppose que

103 CIJ, Affaire des activités armées sur le territoire du Congo (RDC c. Ouganda), arrêt du 19 décembre 2005,§180

104 Idem, § 236

105 Idem, §261

40

l'ensemble des individus, des institutions et des entités publiques et privées, y compris l'État lui-même, [aient] à répondre de l'observation de lois promulguées publiquement, appliquées de façon identique pour tous et administrées de manière indépendante, et compatibles avec les règles et normes internationales en matière de droits de l'homme. Il implique, d'autre part, des mesures propres à assurer le respect des principes de la primauté du droit, de l'égalité devant la loi, de la responsabilité au regard de la loi, de l'équité dans l'application de la loi, de la séparation des pouvoirs, de la participation à la prise de décisions, de la sécurité juridique, du refus de l'arbitraire et de la transparence des procédures et des processus législatifs.106

De plus, dans les Principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à la réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des DHO et de violations graves du DIH, l'Assemblée générale avait reconnu les obligations suivantes. Il s'agit de l'obligation de les respecter, de les faire respecter et de les appliquer comprend notamment celle «d'enquêter de manière efficace, rapide, exhaustive et impartiale sur les violations et de prendre, le cas échéant, des mesures contre leur auteur présumé, conformément au droit national et international ».107

En outre, l'Assemblée générale avait reconnu que cette obligation relève du droit coutumier et avait indiqué que les Principes fondamentaux et directives «ne créent pas de nouvelles obligations de fond en droit international ou interne, mais définissent des mécanismes, modalités, procédures et méthodes pour l'exécution d'obligations juridiques qui existent déjà en vertu du droit international relatif aux DHO et du DIH, qui sont complémentaires bien que différents dans leurs normes ».108

Les sections qui suivent traiteront de la responsabilité des auteurs de violations du droit international des DHO et du DIH selon qu'il s'agit d'États ou d'individus, ainsi que du droit des victimes à réparation. Un examen des modes non judiciaires de mise en oeuvre de la responsabilité auxquels il est possible de recourir de préférence à la justice pénale viendra clore le chapitre.

En matière de responsabilité, la responsabilité varie toujours, et dans le cadre de ce paragraphe, nous parlerons de la responsabilité de l'État en matière de violations du droit International des DHO et du DIH(A) et par la suite la responsabilité individuelle en matière de violations du droit international des DHO et du DIH (B).

106 «Rétablissement de l'état de droit et administration de la justice pendant la période de transition dans les sociétés en proie à un conflit ou sortant d'un conflit» (S/2004/616, par. 6). Cité par : Nations Unies, Droits de l'homme, Haut-commissariat, la protection Juridique internationale des droits de l'homme dans les conflits armés, New-York et Genève 2011, p.75.

107 Rapport du Secrétaire Général, Conseil de sécurité, (S/2004/616) concernant le rétablissement de l'état de droit et administration de la justice pendant la période de transition dans les sociétés en proie à un conflit ou sortant d'un conflit, Nations Unies, 23 aout 2004, consulté le 19 Juillet 2014 à 12h30 Disponible sur : www.ipu.org/splz-f/unga07/law.pdf

108 Idem

41

A. La responsabilité de l'État en matière de violations du droit International des

DHO et du DIH

La responsabilité de l'État en matière de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire est depuis longtemps un des fondements du droit international. Cette responsabilité découle du principe pactasuntservanda, qui veut que tout traité en vigueur lie les parties et doive être exécuté par elles de bonne foi.109 Par-delà même les obligations conventionnelles, le projet d'articles de la Commission du droit international sur la responsabilité de l'État rappelle ce principe du droit international que le manquement à l'obligation internationale d'un État constitue un fait internationalement illicite, qui engage la responsabilité internationale de cet État (projet d'articles 1 et 2). À cet égard, il convient de rappeler qu'en cas de conflit armé, un État est responsable des violations du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire qui lui sont imputables, telles que :110

· Les violations commises par les organes de cet État, y compris ses forces armées ; comme certaines violations commises par les FARDC quand il faisait le repli stratégique.

· Les violations commises par des personnes physiques ou morales habilitée à exercer des prérogatives de la puissance publique ; comme cela était le cas avec les militaires pendant l'occupation de a ville de Goma et la cité de Sake.

· Les violations commises par des personnes ou des groupes agissant en fait sur les instructions ou les directives ou sous le contrôle de cet État ;

· Les violations commises par des personnes ou des groupes privés qu'il reconnaît et adopte comme son propre comportement.111

Un État peut également être responsable d'un manque de diligence s'il omis de prévenir ou de sanctionner des violations du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire commises par des acteurs privés.

La jurisprudence tant internationale que régionale a établi que si un État est reconnu responsable de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire, cela devrait le conduire à adopter des mesures destinées à réparer les dommages qu'il peut avoir causés et à prévenir les violations futures. Ces mesures vont du versement d'indemnités aux victimes et à leur famille et de l'assurance donnée que cela ne se reproduira pas à l'adoption de mécanismes juridiques destinés à prévenir les violations futures. Si l'obligation de l'État de verser des réparations à la suite d'une violation du DIH ne prête pas à controverse, plusieurs tribunaux nationaux ont rejeté l'idée que la victime serait fondée à réclamer ces réparations sur la base de cette branche du droit.112 Dans l'affaire Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro, la CIJ a conclu que la Serbie avait violé ses obligations de prévenir les actes de

109 Convention de Vienne sur le droit des traités, art. 26. Cité par : Nations Unies, Droits de l'homme, Haut-commissariat, la protection Juridique internationale des droits de l'homme dans les conflits armés, précité, p. 76.

110 Nations Unies, La protection Juridique internationale des droits de l'homme dans les conflits armés, New-York et Genève 2011, p.76.

111 Voir l'Annuaire de la Commission du droit international, 2001, vol. II (deuxième partie), p. 77.

112 Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme : Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), Arrêt, C.I.J. Recueil, p.43, cité par : Nations Unies, La protection Juridique internationale des droits de l'homme dans les conflits armés, précité, p.77.

42

génocide et de poursuivre leurs auteurs. La Cour a statué que la Serbie devait « immédiatement prendre des mesures efficace pour s'acquitter pleinement de l'obligation qui lui incombe, en vertu de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide[...], de transférer au Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie les personnes accusées de génocide ou d'autres actes prohibés par la Convention et de coopérer pleinement avec ledit Tribunal ».113La Cour interaméricaine des droits de l'homme et la Cour européenne des droits de l'homme se fondent sur les règles du droit international coutumier relatives à la responsabilité de l'État pour ordonner le versement d'indemnités aux victimes de violations des droits de l'homme.114

Il y a lieu de noter qu'en droit international, le fait qu'une personne ait été déclarée coupable de violations flagrantes des droits de l'homme et du droit international humanitaire n'exonère pas l'État de ses responsabilités internationales,115 et réciproquement.116

B. La responsabilité individuelle en matière de violations du droit international des

DHO et du DIH

Nombre de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire peuvent être considérées comme des crimes par la législation nationale. Lorsque certaines conditions sont réunies, quelques-unes de ces violations peuvent également être qualifiées de crimes en droit international, avec des conséquences juridiques supplémentaires pour les États et les personnes. À la différence des «simples» violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire, les crimes internationaux peuvent en particulier donner lieu à des poursuites à l'échelon non seulement interne mais aussi international.117

Le génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre, par exemple, peuvent être jugés par un Tribunal pénal international ou même le tribunal interne compétent.

1. Les violations du droit international des DHO et du DIH considérées comme des crimes internationaux en vertu du droit pénal international

A ce niveau nous donnerons les définitions des crimes internationaux (a), et l'étendue de la responsabilité pénale individuelle (b).

a) Définitions des crimes internationaux

Certaines violations flagrantes ou inexcusables du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire sont considérées par la communauté internationale comme présentant une gravité telle qu'elles relèvent du droit pénal international,118 lequel

113Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), Arrêt, C.I.J. Recueil, p. 43.

114 La Cour interaméricaine des droits de l'homme, c'est un principe du droit international que toute violation d'une obligation internationale qui crée un préjudice donne naissance à une obligation d'offrir des réparations adéquates, laquelle est régi à tous égards par le droit international. Case of the Rochema Massacre v. Colombia, Judgement of 11 May 2007, Series C, No 163, par. 226

115 Lire à ce sujet le paragraphe 4 de l'article 25 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, qui dispose qu'«aucune disposition du présent Statut relative à la responsabilité pénale des individus n'affecte la responsabilité des États en droit international».

116 Nations Unies, Op. Cit., pp. 77-78.

117 Ibidem, p. 78

118 Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme : Le droit pénal international est un ensemble de règles internationales destinées à proscrire Certains types de conduites et à mettre en cause la responsabilité pénale des personnes qui adoptent ces conduites. A. CASSESE, International Criminal Law, 2nd ed., Oxford, Oxford University Press, 2008, p. 3.

43

définit une responsabilité pénale individuelle pour leur perpétration. Cette responsabilité individuelle est fondamentale pour que les auteurs de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire aient à en répondre. Dans une phrase devenue célèbre, le Tribunal militaire international de Nuremberg a souligné que «ce sont des hommes, et non des entités abstraites, qui commettent les crimes dont la répression s'impose, comme sanction du droit international». Depuis les années 1990, la communauté internationale a redoublé d'efforts afin de créer des mécanismes appropriés pour traduire en justice les personnes ayant commis des violations graves du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire.119

La définition la plus complète et la plus actuelle des crimes internationaux nous est offerte par le Statut de Rome de la CPI, dont les composantes sont essentiellement des violations du droit international des DHO et du DIH.120

· Génocide: ce crime s'entend, aux termes de l'article 6 du Statut de Rome, l'un quelconque des actes ci-après commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel:

a) Meurtre de membres du groupe ;

b) Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;

c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique total ou partielle ;

d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;

e) transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe ;

· Crimes de guerre : on entend par ces crimes (article 8 du Statut) :

a) les infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949 ;

b) les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés internationaux ;

c) en cas de conflit armé non international, les violations graves de l'article 3 commun et les autres violations graves des lois et coutumes applicables à ce type de conflits. Le Statut de Rome énumère des actes entrant dans chacune de ces catégories ; ce sont par exemple l'homicide intentionnel, la torture ou les traitements inhumains, le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter gravement atteinte à l'intégrité physique ou à la santé, la déportation ou le transfert illégal ou la détention illégale ; la prise d'otages ; le fait de déclarer qu'il ne sera pas fait de quartier ; l'utilisation de civils comme boucliers humains ;

· Crimes contre l'humanité : aux termes de l'article 7 du Statut, ce crime s'entend par l'un quelconque des actes ci-après lorsqu'il est commis dans le cadre d'une attaque

119 Nations Unies, Op. Cit., p. 79

120 Idem

44

généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque :

a) meurtre ;

b) extermination ;

c) réduction en esclavage ;

d) déportation ou transfert forcé de population ;

e) emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ;

f) torture ;

g) viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;

h) persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste [...], ou en fonction d'autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour; disparitions forcées de personnes;

i) crime d'apartheid ;

j) autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale. Il y a lieu de noter qu'en droit international coutumier, il n'est pas nécessaire qu'il y ait un lien entre les crimes contre l'humanité et un conflit armé.121

Restriction faite de la Convention contre la torture,122 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées,123 et des Protocoles

121Lire à ce sujet : Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme : Le Procureur c. Duko Tadic', par. 141.

122 L'article 4 dispose que «Tout État partie veille à ce que tous les actes de torture constitue en des infractions au regard de son droit pénal. Il en est de même de la tentative de pratiquer la torture ou de tout acte commis par n'importe quelle personne qui constitue une complicité ou une participation à l'acte de torture» et que «Tout État partie rend ces infractions passibles de peines appropriées qui prennent en considération leur gravité».

L'article 5 exige que tout État partie prenne les mesures nécessaires pour établir s compétence afin de connaître de ces infractions quand elles ont été commises sur tout territoire sous la juridiction dudit État ou à bord d'aéronefs ou de navires immatriculé dans cet État.

123 Aux termes de l'article 4: «Tout État partie prend les mesures nécessaires pour que la disparition forcée constitue une infraction au regard de son droit pénal». Et le paragraphe 2 de l'article 9 indique ce qui suit : «Tout État partie prend également les mesures nécessaires pour établir sa compétence aux fins de connaître d'un crime de disparition forcée quand l'auteur présumé de l'infraction se trouve sur tout territoire sous sa juridiction, sauf si

45

facultatifs à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant, l'un, l'implication d'enfants dans les conflits armés.124Et l'autre, la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, rares sont les instruments internationaux relatifs aux DHO qui contiennent des dispositions concernant la pénalisation des violations des DHO et les poursuites correspondantes. Mais même si certaines de ces violations ne sont pas visées dans des traités spécifiques, les auteurs, lorsque ces infractions constituent un génocide, des crimes contre l'humanité ou des crimes ou crimes de guerre peuvent être traduits en justice chaque fois que la CPI est compétente, ou en vertu du droit national, qui autorise parfois son application extraterritoriale à certaines violations graves du droit international des droits de l'homme.125

b) L'étendue de la responsabilité pénale individuelle

Au sujet de la responsabilité individuelle en matière de crimes internationaux, le Statut de Rome prévoit à article 25 §3 qu'«une personne est pénalement responsable et peut être punie pour un crime relevant de la compétence de la Cour», et énumère ensuite une série de comportements criminels, comme le fait de commettre le crime, de l'ordonner ou de s'en faire l'instigateur.

Il est particulièrement important que les spécialistes des DHO qui interviennent dans un conflit en cours aient à l'esprit qu'aux termes de l'article 25 §3(f) du Statut de Rome «la personne qui abandonne l'effort tendant à commettre le crime ou en empêche de quelque autre façon l'achèvement ne peut être punie en vertu du présent Statut pour sa tentative si elle a complètement et volontairement renoncé au dessein criminel». Cette disposition clef pourrait faciliter les initiatives des défenseurs des DHO qui tentent d'exploiter la menace d'éventuelles poursuites internationales pour influer sur le cours des événements. Certains des principes fondamentaux de la responsabilité pénale individuelle sont les suivants :

· Chacun à le devoir de désobéir à un ordre manifestement illicite ; l'ordre de commettre un génocide ou un crime contre l'humanité est manifestement illicite ;

· Les personnes sont pénalement responsables des crimes internationaux qu'elles commettent ;

· Les commandants et autres supérieurs hiérarchiques sont pénalement responsables des crimes internationaux commis en exécution de leur ordre et, de surcroît, en vertu du

ledit État l'extrade, ou le remet à un autre État conformément à ses obligations internationales ou à une juridiction pénale internationale dont il a reconnu la compétence.».

124 Le paragraphe 2 de l'article 4 se lit ainsi : «Les États parties prennent toutes les mesures possibles pour empêcher l'enrôlement et l'utilisation de ces personnes, notamment les mesures d'ordre juridique nécessaires pour interdire et sanctionner pénalement ces pratiques».

125Nations Unies, Op. Cit., p.82.

46

principe de la responsabilité du commandement qui sera analysé dans la sous-section suivante ;

· Les personnes sont pénalement responsables et passibles des peine qui sanctionnent les crimes internationaux si les éléments matériels du crime sont commis intentionnellement et sciemment.126

Ces principes s'appliquent à différentes sortes de crimes allant des infractions graves aux Conventions de Genève et des violations des lois et coutumes de la guerre ainsi que de l'article 3 commun, aux crimes contre l'humanité et au génocide qui engagent la responsabilité personnelle de quiconque a projeté, encouragé, ordonné ou commis le crime, ou en a facilité ou soutenu de quelque manière que ce soit le projet, la préparation ou l'exécution. Cette règle a été confirmée par les Statuts du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et du Tribunal pénal international pour le Rwanda et, ultérieurement, par le Statut de Rome.

On peut se demander également si les personnes doivent appartenir à un organisme étatique pour être pénalement responsables de violations graves du droit international des DHO et du DIH. La responsabilité individuelle à l'égard des violations de ces deux corpus juridiques qui constituent des crimes internationaux peut être déterminée sur la base du droit pénal international. Ainsi, la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dispose que «les personnes ayant commis le génocide ou l'un quelconque des autres actes énumérés à l'article III seront punies, qu'elles soient des gouvernants, des fonctionnaires ou des particuliers» (art. IV). C'est ce que réaffirment aussi les statuts des tribunaux pénaux internationaux susmentionnés et le Statut de Rome.

La Chambre de première instance du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie a affirmé que les rédacteurs de la Convention n'avaient pas tenu l'existence d'une organisation ou d'un système au service d'un objectif génocidaire pour un ingrédient juridique de l'infraction et que, ce faisant, ils n'avaient pas écarté la possibilité qu'une personne agissant seule cherche à détruire un groupe. Toutefois, la Chambre a relevé qu'il serait très difficile, dans la pratique, de prouver l'intention génocidaire d'une personne si les crimes commis n'étaient pas d'une grande ampleur et si l'infraction reprochée n'était pas soutenue par une organisation ou un système.127

Même en cas de génocide, cette appartenance à une organisation concerne non seulement les acteurs étatiques, mais aussi les protagonistes non étatiques d'un conflit armé. Les crimes contre l'humanité peuvent également être commis par des personnes appartenant à des groupes armés non étatiques. En ce qui concerne les crimes de guerre, dans la mesure où des entités non étatiques ont d'importantes obligations en matière de DIH, les violations qu'elles commettent s'inscrivent dans le même cadre juridique que celui applicable aux États. Ainsi, le Conseil de sécurité, dans sa résolution 1214 (1998), a rappelé à toutes les parties au conflit interne afghan que «tous ceux qui commettent ou ordonnent de commettre des violations des Conventions [de Genève] en portent individuellement la responsabilité», ce qui montre que le DIH moderne applique les mêmes règles aux acteurs étatiques et non étatiques.128

c) La responsabilité du commandement

Si le principe général est qu'il faut une participation directe à une violation du DIH pour que la responsabilité pénale individuelle puisse être mise en cause, le droit pénal international reconnaît l'importance du rôle que les chefs et les commandements peuvent jouer en veillant à ce que les personnes placées sous leurs ordres n'adoptent aucun comportement criminel qui se

126 Nations Unies, Op. Cit., pp. 82-83.

127Prosecutor v. GoranJelisic', case N° IT-95-10-T, Judgement of 14 December 1999, par. 100 et 101. 128 Nations Unies, Op. Cit., pp. 83-84

47

traduise par des violations flagrantes du droit international des DHO ou du DIH. A cet égard, le paragraphe 2 de l'article 86 du Protocole I indique que le fait qu'une infraction aux Conventions ait été commise par un subordonné n'exonère pas ses supérieurs de leur responsabilité en matière de supervision et de contrôle. Cependant, pour que la responsabilité du commandement soit engagée, il faut que le supérieur hiérarchique ait su ou ait eu des raisons de savoir que des violations étaient commises ou sur le point de l'être. En pareil cas, le supérieur est tenu d'adopter toute les mesures nécessaires pour prévenir ces violations, ou pour sanctionner leurs auteurs si elles ont lieu malgré tout.

La Chambre d'appel du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie a analysé les diverses composantes de la notion de responsabilité du commandement. Elle a rappelé que l'autorité de droit dont le commandant est investi crée une présomption de contrôle effectif. Elle a également étudié la portée de l'expression «ait eu des raisons de savoir», et a indiqué que la responsabilité du commandant serait engagée s'il avait omis d'intervenir alors qu'il avait suffisamment de renseignements alarmants concernant d'éventuelles violations. Elle a précisé que, si le fait que le supérieur ait eu connaissance des infractions passées de ses subordonnés et ait omis de les sanctionner ne permet pas, en lui-même, de conclure qu'il savait que des infractions analogues seraient commises par le même groupe de subordonnés, cela constituait cependant un renseignement suffisamment alarmant pour justifier une enquête plus poussée.129 Ainsi, elle a interprété la formule «ait eu des raisons de savoir» comme appelant à détermine si le supérieur disposait de suffisamment de renseignements alarmants de nature à l'alerter du risque que des infractions graves soient commises par ses subordonnés.

Dans une autre affaire,130 la Chambre de première instance du Tribunal a indiqué clairement qu'il n'est pas indispensable qu'un lien de cause à effet entre l'inaction du commandant et les infractions commises par son subordonné soit établi pour que la responsabilité du supérieur soit engagée. Elle a rappelé que, si un lien de cause à effet était requis, cela modifierait les fondements de la responsabilité du commandement qui a omis d'empêcher ou de sanctionner au point qu'il faudrait pratiquement qu'il ait participé à l'infraction commise par ses subordonnés.131

En effet, l'article 87§2 du Protocole I impose au supérieur une obligation d'empêcher les infractions. A ce sujet, la Chambre d'appel132 a indiqué que l'obligation générale du commandant de prendre les mesures nécessaires et raisonnables est bien ancrée dans le droit international coutumier et découle de l'autorité dont il est investi. Cette Chambre a souligné que «sont considérées comme «nécessaires» les mesures appropriées pour que le supérieur hiérarchique s'acquitte de son obligation (et montrant qu'il s'est véritablement efforcé de prévenir ou de punir), et comme «raisonnables celles qui sont raisonnablement en son pouvoir». Le critère est donc le point de savoir si le supérieur a omis ou non de prendre les mesures nécessaires et raisonnables pour prévenir et sanctionner l'acte criminel.133

129 Idem

130 Voir Prosecutor v. Hadúihasanovic' & Kubura, case No IT-01-47-A, Judgement of 22 April 2008, et en particulier le paragraphe 30.

131 Nations Unies, Op. Cit., pp. 84-85

132 Le Procureur c.SeferHalilovic', affaire no IT-01-48-A, arrêt du 16 octobre 2007, par. 63 et 64.

133 Nations Unies, Op. Cit., p. 86

48

2. Les obligations des États relatives aux crimes internationaux

Les États ont une série d'obligations et de responsabilités juridiques qui découlent du droit pénal international d'autant plus que les violations du droit international des DHO et du DIH constituent des crimes internationaux. Les Etats ont l'obligation d'enquêter et, si les éléments sont suffisants, de poursuivre la personne présumée responsable et de sanctionner l'auteur conformément à la loi, d'écarter la possibilité d'une amnistie dans certains cas, et d'offrir aux victimes ou à leur famille un recours et des réparations. Leur obligation d'étendre la compétence en matière de poursuites au-delà de leur territoire sera analysée dans la sous-section suivante. Dans le cadre de leur obligation de déterminer les responsabilités, ils doivent, en vertu du droit international, coopérer entre eux et aider les instances judiciaires internationales compétentes à enquête sur ces violations et à en poursuivre les auteurs.134

L'obligation de rechercher les responsabilités est expressément évoquée dans certains instruments des DHO et du DIH, et a été renforcée par les interprétations du droit. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques,135 imposent à tous les États parties l'obligation générale d'offrir un recours utile contre la violation des droits et libertés consacrés par ces instruments, et notamment celle d'enquêter et de punir les responsables.

L'Ensemble de principes actualisé pour la protection et la promotion des DHO par la lutte contre l'impunité évoque l'obligation des États de « mener rapidement des enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales sur les violations des DHO et du DIH et [de] prendre des mesures adéquates à l'égard de leurs auteurs, notamment dans le domaine de la justice pénale, pour que les responsables de crimes graves selon le droit international soient poursuivis, jugés et condamnés à des peines appropriées ».136

De plus, les résolutions adoptées par l'Assemblée générale et la Commission des droits de l'homme, les rapports établis dans le cadre des procédures spéciales de l'ONU et la jurisprudence des organes conventionnels des DHO ont tous systématiquement affirmé que les États ont l'obligation d'enquêter sur les violations du droit international des DHO et du DIH et de poursuivre leurs auteurs.

Le DIH établit une distinction entre les conflits armés internationaux et non internationaux. S'agissant des premiers, les États sont tenus de réagir aux manquements graves et autres aux

134Idem., p. 86

135Lire à ce sujet : Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme: le paragraphe 3 de l'article 2 dispose que: «Les États parties au présent Pacte s'engagent à: a) garantir que toute personne dont les droits et libertés reconnus dans le présent Pacte auront été violés disposera d'un recours utile, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles; b) garantir que l'autorité compétente, judiciaire, administrative ou législative, ou toute autre autorité compétente selon la législation de l'État, statuera sur les droits de la personne qui forme le recours, et développer les possibilités de recours juridictionnel; c) garantir la bonne suite donnée par les autorités compétentes à tout recours qui aura été reconnu justifié.».

136 Lire à ce sujet : Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme: E/CN.4/2005/102/Add.1, principe 19. Aux termes de l'Ensemble de principes, «l'expression «crimes graves selon le droit international» s'entend des infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949 et à leur Protocole additionnel de 1977 et d'autres violations du droit international humanitaire qui constituent des crimes selon le droit international, des génocides, des crimes contre l'humanité et d'autres violations des droits de l'homme protégés internationalement qui constituent des crimes selon le droit international et/ou dont le droit international exige des États qu'ils les sanctionnent pénalement, comme la torture, les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires et l'esclavage».

49

Conventions de Genève et au Protocole I137. En vertu des Conventions de Genève, les États s'engagent à respecter et faire respecter ces instruments en toutes circonstances. Plus précisément, ils s'engagent à promulguer une législation qui édicte des sanctions pénales appropriées à l'encontre des auteurs de violations graves du DIH.

En revanche, ni l'article 3 commun ni le Protocole II ne contiennent de dispositions spécifiques concernant les poursuites pour infractions ou manquements graves à leurs règles. Cependant, la jurisprudence du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et du Tribunal pénal international pour le Rwanda a établi que des crimes de guerre peuvent également être commis dans des conflits armés non internationaux.138

La Cour internationale de Justice s'est prononcée sur l'obligation de prévenir et de punir le génocide. Elle n'a considéré que «l'une des manières Les plus efficaces de prévenir la commission d'actes criminels, en général, est de prévoir des sanctions pénales à l'encontre des personnes qui viendraient à commettre de tels actes, et d'appliquer effectivement ces sanctions à ceux qui auraient commis les actes dont on cherche à éviter le renouvellement». De plus, la Cour a rappelé qu'en vertu de la Convention sur la prévention et la sanction du crime de génocide,139 les États parties ont l'obligation de procéder «à l'arrestation des personnes accusées de génocide se trouvant sur leur territoire même si le crime dont elles sont accusées a été commis hors de celui-ci et que, à défaut de les traduire devant leurs propres juridictions, ils les défèrent devant la cour internationale compétente pour les juger».140

§2. Les faits commis par le M23pendant son occupation

Le M23 entant que puissance occupante de la ville de Goma, avait commis beaucoup des violations qui engagent sa responsabilité. Parmi ces violations, nous avons notamment les violations du droit à la vie, les violences sexuelles, traitements cruels, inhumains ou dégradants, violation du droit à la propriété, recrutement et utilisation d'enfants, recrutement et utilisation d'enfant, violations du droit à un procès équitable.

Parmi les allégations contre le M23, nous allons focaliser plus notre attention à la violation du droit à la propriété privée. C'est ainsi que nous parlerons dès les violations du droit à la propriété privés commis par les FARDC (Responsabilité de l'Etat) (§2) et les violations du droit à la propriété commis par le M23 pendant l'occupation (§2).

A. Les violations du droit à la propriété Privés commis par les FARDC

Le BCNUDH a documenté des pillages de grande ampleur commis par des militaires des FARDC. Le 19 novembre 2012, ces derniers ont pillé plusieurs maisons avant de quitter la ville de Goma, province du Nord-Kivu, en particulier dans les quartiers de Ndosho et de Kyeshero. En outre, lors de leur retrait vers Minova, les militaires ont procédé de manière systématique au pillage de la ville de Minova, ainsi que d'au moins huit villages situés sur l'axe Minova-Nyamasasa (Mubimbi, Buganga, Kalungu, Kishindji, Bwisha, Nyamasasa, Ruhunde et Bishenge), territoire de Kalehe, province du Sud-Kivu, entre le 21 et le 25 novembre 2012, ainsi que des villages de Nyamasasa, de Ruhunde et de Kalungu entre le28 et le 30 novembre 2012. Des militaires des FARDC ont également pillé au moins deux camps de

137 Idem

138 Voir, en particulier, Le Procureur c. Duko Tadic, par. 86 à 136.

139Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, par. 426 et 443. 140 Nations Unies, Op. Cit., pp. 86-89

50

personnes déplacées internes situés sur le territoire de Kalehe, d'abord à Mubimbi dans la nuit du 22 au 23 novembre 2012 puis à Minova au cours de la nuit du 23 au24 novembre 2012. Dans les deux cas, ils ont attendu que l'aide humanitaire parvienne aux personnes déplacées internes avant de piller, la nuit suivante, les marchandises reçues.141Desmilitaires de la 8ème

région militaire ont occupé illégalement plusieurs maisons dans les villages de Nyamasasa, Ruhunde et Buganga.142

B. violations du droit à la propriété privée commis par le M23 pendant son occupation

Durant son occupation de la ville de Goma et de la cité de Sake dans le Nord-Kivu, le Mouvement du 23 Mars avait commis plusieurs violations et parmi ces violations nous avons le droit à la propriété privée.

- Du pillage généralisé des bureaux Gouvernementaux ;

- Du pillage de la Cour militaire et les commissariats de police du Nord-Kivu ;

- Du pillage des écoles ainsi que des magasins ;

- Du pillage des résidences privées ;

- Du pillage d'un grand nombre de véhicules ;

- L'envahissement illégal des plusieurs bâtiments publics et privés ;143

Et tous ces pillages se déroulaient souvent dans la violence ; les victimes recevaient des menaces s'ils ne remettaient pas leur argent et leurs biens.144

Nous avons aussi des principes relatifs à l'occupation qui visent à protéger les biens pendant l'occupation et ces principes prévoient que :

- La confiscation des biens privés par l'occupant est interdite ; alors que, suivant le

rapport du BCNUDH, le M23 n'avait pas respecté ce droit garanti par la CG IV ;

- La destruction ou la saisie de biens appartenant à l'ennemi est interdite, sauf si elles sont absolument nécessaires pour des raisons d'ordre militaire.

- Les biens culturels doivent aussi être respectés par l'occupation.

141 Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre le matériel employé dans le cadre d'une mission d'aide humanitaire est considéré comme un crime de guerre (voir article 8, paragraphe 2, alinéa e), point iii), du Statut de Rome).

142Op. Cit., p.11.

143Ibidem, p.15.

144Ibidem

51

Section2 : REGIME JURIDIQUE ET RESPONSABILITES

D'après l'adage juridique : « NullumCrimen, Nullapoena sine lege », on ne peut pas dire qu'un acte commis est une infraction sans qu'il existe un texte de loi qui l'interdit. C'est alors que nous donnerons les juridictions compétentes pour connaitre les crimes du M23 (§1), le Régime Juridique applicable (§2) et après les avoir vu les textes de lois qui incriminent les violations de droit à l'égard de la propriété privée pendant l'occupation, nous démontrerons les responsabilités du M23 qui était la puissance occupante (§2).

§1. Régime Juridique

Le DIH par définition est« l'ensemble des règles internationales, d'origines conventionnelle ou coutumière, qui sont spécifiquement destinées à régler les problèmes humanitaire découlant directement des conflits armés, internationaux ou non internationaux, et qui restreignent, pour des raisons humanitaire, le droit des parties au conflit d'utiliser des méthodes et moyens de guerre de leur choix ou protègent les personnes et biens affectés, ou pouvant être affecté par le conflit ».145C'est ainsi que, pour le cas du M23 traité dans ce travail, le DIH sera d'application.

Il existe cependant plusieurs textes qui protègent les victimes des conflits armés en période des conflits armés et parmi ces textes nous avons :

1. La IVème Convention de Genève de 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre ;

2. La Constitution de la RDC du 18 Février 2006 ;

3. Le Règlement de la Haye de 1907 pour le règlement pacifique des conflits internationaux ;

4. La loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant code pénale militaire.

1. La protection par la CG IV

A son titre III, section 1, la CG IV donne les dispositions communes aux territoires des parties au conflit et aux territoires occupes146.

A son article 27, la CG de Genève stipule que : « Les personnes protégées ont droit, en toutes circonstances, au respect de leur personne, de leur honneur, de leurs droits familiaux, de

145 P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p.11.

146 Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, 12 août 1949.

52

leurs convictions et pratiques religieuses, de leurs habitudes et de leurs coutumes. Elles seront traitées, en tout temps, avec humanité et protégées notamment contre tout acte de violence ou d'intimidation, contre les insultes et la curiosité publique ».

L'article 32 la CG IV stipule que : « Les Hautes Parties contractantes s'interdisent expressément toute mesure de nature à causer soit des souffrances physiques, soit l'extermination des personnes protégées en leur pouvoir. Cette interdiction vise non seulement le meurtre, la torture, les peines corporelles, les mutilations et les expériences médicales ou scientifiques non nécessitées par le traitement médical d'une personne protégée, mais également toutes autres brutalités, qu'elles soient le fait d'agents civils ou d'agents militaires.

A son article 33 de la CG IV dispose que :147« al1. Aucune personne protégée ne peut être punie pour une infraction qu'elle n'a pas commise personnellement. Les peines collectives, de même que toute mesure d'intimidation ou de terrorisme, sont interdites.

Al2. Le pillage est interdit.

Al3. Les mesures de représailles à l'égard des personnes protégées et de leurs biens sont interdites.

A son article 53, la CG IV dispose que: « Il est interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l'Etat ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires ».

A son article 55 al 2, la CG IV prévoit que : « La Puissance occupante ne pourra réquisitionner des vivres, des articles ou des fournitures médicales se trouvant en territoire occupé que pour les forces et l'administration d'occupation ; elle devra tenir compte des besoins de la population civile. Sous réserve des stipulations d'autres conventions internationales, la Puissance occupante devra prendre les dispositions nécessaires pour que toute réquisition soit indemnisée à sa juste valeur ».

147 Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, précité. P.11.

53

2. La protection par la constitution de la ROC du 18 février 2006telle que révisée

La Constitution de la RDC étant la loi fondamentale du pays, elle garantit aussi la protection de la propriété privée. C'est ainsi qu'à son article34, la Constitution dispose que :148 «Al1. La propriété privée est sacrée.

Al2. L'Etat garantit le droit à la propriété individuelle ou collective acquis conformément à la loi ou à la coutume.

Al3. Il encourage et veille à la sécurité des investissements privés, nationaux et étrangers.

Al4. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité octroyée dans les conditions fixées par la loi.

Al5. Nul ne peut être saisi en ses biens qu'en vertu d'une décision prise par une autorité judiciaire compétente.

3. Le règlement de la Haye de 1907

A son article 28, le règlement dispose que : « il est interdit de livrer au pillage une ville, ou localité, même prise d'assaut ». A son article 47 il reprend en disant que « le Pillage est formellement interdit ».149

4. La loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant code pénale militaire

A sa section 3eme le code pénal militaire nous parle des pillages et c'est aux articles 63, 64 et 65.150

1. L'Article 63 du code pénale militaire de la RDC dispose à l'Alinéa 1 que : Sont punis de servitude pénale à perpétuité tous pillages ou dégâts de denrées, marchandises ou effets, commis en bandes par des militaires ou par des individus embarqués, soit avec des armes ou force ouverte, soit avec bris des portes et clôtures extérieures, soit avec violences envers les personnes.

Al2. Dans tous les autres cas, le pillage est puni de dix à vingt ans de servitude pénale.

Al3. Néanmoins, si dans les cas prévus par le premier alinéa du présent article, il existe parmi les coupables un ou plusieurs instigateurs, un ou plusieurs militaires supérieurs

148 Cabinet du Président de la République, Constitution de la RDC du 18 Février 2006, in Journal Officiel de la RDC, 47ème année, n° spécial du 18 février 2006,Limeté, Kinshasa, 2006.

149 Le Règlement de la Haye de 1907 pour le règlement pacifique des conflits internationaux

150 Cabinet du Président de la République, Code pénale congolais du 18 novembre 2002, in Journal Officiel de la RDC, 47ème année, n° spécial du 20 Mars 2003, Limeté, Kinshasa, 2006.

54

en grade, la peine de servitude pénale à perpétuité n'est infligée qu'aux instigateurs et aux militaires les plus élevés en grade.

2. A son article 64 le Code Pénale militaire de la RDC dispose que :

Al1. En cas de pillages organisés par des militaires appartenant à une ou à plusieurs unités agissant de concert, la peine de mort sera prononcée.

Al2. Si ces pillages ont été commis avec la participation des individus non militaires, les juridictions militaires sont seules compétentes.

3. A son article 65 le code pénale militaire de la RDC dispose que :

Si les pillages ont été commis en temps de guerre ou dans une région où l'état de siège ou d'urgence est proclamé ou à l'occasion d'une opération de police tendant au maintien ou au rétablissement de l'ordre public, les coupables sont punis de mort.

§2. Juridictions compétentes pour les faits commis par le M23

En ce qui concerne les juridictions compétentes, nous avons certaines juridictions sur le plan interne (1) et d'autres sur le plan international (2).

1. Au niveau interne

Au niveau interne nous avons les juridictions militaires qui ont aussi plusieurs compétences, notamment : Une compétence étendue à l'égard des civils ; Une compétence étendue à l'égard de civils étrangers ; Une compétence affirmée même en l'absence de l'accusé. Mais aussi la Loi Organique n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire a formellement transféré la compétence de certains des crimes internationaux qui nous intéressent, à savoir le génocide et les crimes contre l'humanité, aux juridictions ordinaires de l'ordre judiciaire. L'article 91 de cette loi organique prévoit en effet que « les Cour d'appel connaissent également, au premier degré : 1) du crime de génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité commis par des personnes relevant de leur compétence et de celle des tribunaux de grande instance ». Ainsi, désormais la Cour d'appel est juge de premier degré pour ces deux crimes, tandis que la Cour de cassation est juge d'appel et, naturellement, de cassation.151

Ensuite, l'article 156-3 de la Loi Organique portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire ne prévoit l'abrogation que de certaines

151 Avocats Sans Frontières (ASF). (Avril 2014). La mise en oeuvre judiciaire du statut de Rome en République Démocratique du Congo. Consulté le 15 Juillet 2014, Disponible sur : http://www.asf.be/.../ASF_IJ_Mise-en-oeuvre-judiciaire-SDR 2014.pdf

55

dispositions du code judiciaire militaire relatives au recours en annulation. Cette loi organique demeure donc sans incidence sur les dispositions attribuant compétence aux juridictions militaire en matière de crimes internationaux, et notamment l'article 79 du Code Judiciaire Militaire qui prévoit que « Lorsque le Code Pénal Militaire définit ou réprime des infractions imputables à des justiciables étrangers à l'armée (tel est le cas des crimes internationaux- articles 164 et s.)., les juridictions militaires sont compétentes à l'égard de l'auteur, du co-auteur ou du complice, sauf dérogation particulière ». De même, cette ordonnance n'affecte en rien l'article 112-7 du Code judiciaire militaire en vertu duquel : « Sont également justiciables des juridictions militaires : (...) ceux qui, même étrangers à l'armée, provoquent, engagent ou assistent un ou plusieurs militaires, ou assimilés, à commettre une infraction à la loi ou au règlement militaires. Il en est de même de tous ceux qui commettent des infractions dirigées contre l'armée, la Police Nationale, le Service National, leur matériel, leurs établissements ou au sein de l'armée, de la Police Nationale ou du Service National ».

Cependant, en dehors de la faculté que la constitution de la RDC du 18 Février 2006 tel que modifié à ce jour reconnaît au Président de la République de substituer les juridictions militaires à celles de droit commun en période de guerre et sous certaines conditions, la Constitution limite clairement la compétence personnelle des tribunaux militaires aux seuls membres des forces armées et de la police. En dépit des dispositions contraires de la Constitution, les tribunaux militaires continuent cependant d'appliquer les dispositions du Code judiciaire militaire qui consacrent la compétence des juridictions des militaires à l'égard des civils dans plusieurs hypothèses.

2. Au niveau international

Sur le plan international nous avons la Cour Pénale International qui est une juridiction permanente chargée de juger les personnes accusées de génocide, de crime contre l'humanité, de crime d'agression et de crime de guerre, elle est une juridiction complémentaire, donc une juridiction qui complète les juridictions interne.

En ce qui concerne l'implication des Etats tiers dans le conflit armé qui a opposé les FARDC au M23, à l'occurrence le Rwanda et l'Ouganda, la RDC a la possibilité de saisir la CIJ (comme c'est fut le cas dans l'affaire des activités militaire sur le territoire de la RDC ou dans l'affaire Nicaragua c. Etats-Unis), de saisir le Conseil de sécurité quant à ce qui concerne l'invasion ou de saisir la Cour africaine des DHO. Par contre, les acteurs non étatiques, la RDC

56

peut aussi saisir la CPI (Article 13 (a)152 du statut de Rome) pour ce qui concerne les acteurs ougandais et peut aussi saisir le Conseil de sécurité (Article 13 (b) du statut de Rome)153afin qu'il demande à la CPI de se saisir des acteurs rwandais étant donné que le Rwanda n'est pas partie au Statut de Rome.

§3. La responsabilité de l'occupant

En occupant la ville de Goma, le M23 entant puissance occupante, engageait sa responsabilité et tout ce qui s'était passé pendant son occupation, il est le responsable numéro un, en attendant que l'affaire soit jugée devant une juridiction compétente.

En ce qui concerne les actes de pillage commis pendant l'occupation ; une atteinte au droit de propriété, nous tenons à rappeler que ces actes sont formellement interdits par divers instruments juridiques comme nous l'avions décrit précédemment. En guise de rappel, c'est le cas du règlement de la Haye de 1907 (article 28) ; de la IVe CG de 1949 (articles 33 alinéa 2 et 53) à l'exception des biens militaires, de la Constitution de la RDC telle révisée à ce jour (article 34).

De ce fait, l'article 63 du Code pénale militaire de la RDC punis de servitude pénale à perpétuité tous pillages ou dégâts de denrées, marchandises ou effets, commis en bandes par des militaires ou par des individus embarqués, soit avec des armes ou force ouverte, soit avec bris des portes et clôtures extérieures, soit avec violences envers les personnes. En plus de cela, les

152 En disposant quela Cour peut exercer sa compétence à l'égard d'un crime visé à l'article 5 (crime de génocide, crime contre l'humanité, crime de guerre et crime d'agression), conformément aux dispositions du présent Statut: a) Si une situation dans laquelle un ou plusieurs de ces crimes paraissent avoir été commis est déférée au Procureur par un État Partie, comme prévu à l'article 14. La RDC entant qu'Etat faisant partie au statut de Rome, peut saisir la Cour pour les acteurs Ougandais qui ont pritpar aux hostilités sur son territoire et même pour aller plus loin a son article 14 (1), le statut de Rome donne la possibilité selon la quelletout État Partie peut déférer au Procureur une situation dans laquelle un ouplusieurs des crimes relevant de la compétence de la Cour paraissent avoir étécommis, et prier le Procureur d'enquêter sur cette situation en vue de déterminersi une ou plusieurs personnes identifiées devraient être accusées de ces crimes. Et donc cette possibilité est aussi accordée à la RDC entant qu'Etat partie au statut de Rome et jouit des avantages nécessaires accordés par ce statut.

153L'article 13 (b), (c) à son tour donne a la cour la possibilité d'exercer sa compétence à l'égard d'un crime visé à l'article 5 (crime de génocide, crime contre l'humanité, crime de guerre et crime d'agression), conformément aux dispositions du présent Statut: b) Si une situation dans laquelle un ou plusieurs de ces crimes paraissent avoir été commis est déférée au Procureur par le Conseil de sécurité agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies; et donc le conseil de sécurité peut aussi saisir la cour s'il a prit connaissance des crimes relevant de la compétence de la cour, soit par l'Etat victime.

c) Si le Procureur a ouvert une enquête sur le crime en question en vertu de l'article 15. Et donc le procureur peut

ouvrir une enquête de sa propre initiative au vu de renseignements concernant des crimes relevant de la compétence de la Cour. Il peut aussi rechercher des renseignements supplémentaires auprès d'États, d'organes de l'Organisation des Nations Unies, d'organisations intergouvernementales et non gouvernementales, ou d'autres sources dignes de foi qu'il juge appropriées.

154 Lire à ce sujet : le Résumé du Rapport final du Groupe d'experts de l'ONU sur la RDC, consulté le 25 Mars 2014, disponible sur : www.lecongolais.cd/qui-sommes-nous/

57

articles 64 et 65 du Code pénale militaire prévoient que les coupable peuvent être punis de la peine de mort peut être.

En claire, dans l'intérêt des victimes, la responsabilité est indispensable, mais bien plus celle civile qui oblige les bourreaux à réparer les dommages causés. A ce sujet, l'article 258 du CCL III dispose que tout fait quelconque de l'homme qui cause préjudice à autrui nécessite une réparation par celui qui l'a commis. Les préjudices ayant étaient causés pendant un conflit armé, l'article 91 du Protocol Additionnel 1 dispose que la Partie au conflit qui violerait les dispositions des Conventions ou du présent Protocole sera tenue à l'indemnité, s'il y a lieu. Elle sera responsable de tous actes commis par les personnes faisant partie de ses forces armées.

Ainsi, le pillage des biens publics opérés au gouvernorat de Province, à la Cour militaire et les commissariats de police du Nord-Kivu, ainsi que les biens privés pillés dans les écoles, les magasins, les résidences privées, ainsi qu'un grand nombre de véhicules ne peuvent rester impunis. A cet effet, le préambule du Statut de Rome tout en démontrant la nécessité de la coopération internationale dans les poursuites des crimes graves touchant à l'ensemble de la communauté internationale, rappel « qu'il est du devoir de chaque État de soumettre à sa juridiction criminelle les responsables de crimes internationaux ».

Pour la participation des Etats, prenant référence de l'affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua C. Etats Unis), nous estimons que le Rwanda et l'Ouganda ont exercés un control effectif au M23 pour déterminer leurs responsabilités. Les raisons suivantes peuvent être appuyées pour soutenir cette responsabilité des Etats tiers :

Dans les rangs de la branche armée du M23, les combattants capturés et même visible dans la ville de Goma portaient la tenue de l'armée rwandaise, mais aussi ils recevaient certains renforts tant matériels que moral de la part du Rwanda. Et donc d'une part nous disons que le Rwanda avait une main mise sur le mouvement du 23 Mars. Et aussi Selon le Groupe d'experts sur la RDC, le M23 recevait un appui du Rwanda, qui prenait diverses formes (recrutement, renforts militaires, livraisons de munitions et appui-feu).154

Entant que Puissance occupante, le M23 est responsable des actes et des omissions graves ayant porté atteinte à la propriété privée (pillage des biens civils).

58

Nous affirmons que le mouvement du 23 Mars entant que puissance occupante de la ville de Goma et de la cité de Sake, est responsable de tous les actes illicites commis pendant son occupation (à l'égard de la propriété privée des civiles qui étaient hors combat et que leurs biens n'étaient pas parmi les objectifs militaire), il doit réparation aux victimes, donc

Les victimes de ses actes doivent être indemnisés et les auteurs doivent répondre de leurs actes devant les tribunaux compétents et cela suivant différents textes des lois interne et international. L'adoption de la loi d'amnistie et la publication des listes des bénéficiaires ne les dispenses en rien car elle concerne les faits de guerre.

En analysant ce chapitre portant responsabilités de l'occupant, nous l'avons subdivisé en deux sections principales à savoir l'analyse juridique des faits : allégation contre le M23 a Goma et régime juridiques et responsabilités.

Nous avons compris que pendant cette occupation de la ville de Goma, certaines violations du droit à la propriété privée avaient été commises par les FARDC et le M23 (force négative). En parlant de régime juridique, nous avons compris que ce ne sont pas toutes les juridictions qui sont compétentes pour connaitre l'affaire du M23.C'est ainsi que nous avons certaines juridictions compétentes sur le plan nationale : les tribunaux pénaux militaires et civiles selon le cas. Sur le plan international, nous avons la CPI et la CIJ, respectivement pour établir la responsabilité individuelle et étatique.

59

CONCLUSION GENERALE

Au terme de travail, pour arriver aux résultats escomptés, nous avons utilisés certaines méthodes et techniques. La méthode exégétique nous a servie dans la compréhension de certaines dispositions (principes) d'usage dans un conflit armé afin de s'imprégner de la manière dont le M23 s'était comporté pendant son occupation. La Technique documentaire nous a servis dans la récolte des différentes données écrites, éditées et non éditées, des rapports et articles parues dans la presse écrites et audio visuelles.

Tout au long de ce travail traitant : « De la responsabilité de la puissance occupante dans la protection de la propriété privée : cas du M23 à Goma », il nous a fallu parler en premier du contexte d'occupation de Goma et obligations de l'occupant. En parlant du contexte d'occupation, nous avons vu en premier lieu l'origine du conflit armé entre les FARDC et le M23. De l'origine du conflit, l'Accord du 23 mars selon le M23, découle également plusieurs contextes qui étaient à la base de l'occupation de la ville de Goma et même la cité de Sake ; contexte historique, contexte politique et sécuritaire, et contexte socioéconomique suivi de plusieurs violations des DHO.

Abordant l'évolution de ce conflit, nous avons opportun démontrer sa nature et avons trouvé qu'il était un conflit interne mais avec la présence des autres Etats comme le Rwanda et l'Ouganda, il s'est internationalisé. En nous référant à l'affaire du Nicaragua c. les Etats-Unis, où la CIJ a estimé que les opérations d'un groupe armé non étatique ne peuvent être imputées à un État que si ce dernier exerce un « contrôle effectif » de ces opérations. Cette affaire nous a permis de démontrer que les tiers exerçaient un effectif sur le M23.

Suite aux affrontements qui ont commencés au nord de la ville de Goma à la date du 15 au 20 novembre 2012, les rebelles du M23 avaient pris le contrôle de la ville en date du 20 novembre 2012, et même la cité de sake. Cependant, entant que puissance occupante, le M23 avait multiples obligations à l'égard de la population civile en protégeant aussi ses biens. En occupant la ville de Goma, le M23 n'était qu'un administrateur temporaire, un usufruitier et c'est pourquoi il n'avait pas tous les droits sur la ville de Goma qui était sous son contrôle. Le M23 avait donc certaines obligations majeures en occupant la ville de Goma, il devrait notamment

60

sécuriser et protégé les personnes civiles, protégé la propriété privée. En sécurisant et en protégeant les personnes, le M23 avait l'obligation de : sécuriser la ville sous son contrôle, de ne pas modifier l'ordre juridique de la ville sous son contrôle, d'assurer la protection des personnes privées de liberté, de protéger la propriété privée consacrée par la Loi Fondamentale de la RDC (Art. 33 al 2 CG IV et Art. 34 al.1 de constitution du 18 Février de la RDC tel que modifié à ce jour).

En protégeant la propriété privée, l'obligation de protéger certains biens : tous les biens civils en général pèsent sur la puissance occupante. C'est ainsi que la puissance occupante est tenue au respect de la propriété privée se trouvant sur son territoire, notamment tout en sachant que le pillage est interdite, la confiscation la propriété privée à l'exception du matériel de guerre est aussi interdite, ainsi que l'admissibilité limitée des réquisitions.

En cas de non-respect des obligations, la responsabilité s'engage et la poursuite pénale intervient. Le M23 pendant son occupation était responsable de tous les actes commis car il avait le contrôle de la ville de Goma et la cité de Sake. Les allégations contre le M23 à Goma démontrent que le M23 avait commis plusieurs faits à caractère infractionnel quand il occupait la ville de Goma et même la cité de Sake : le pillage à un haut niveau des biens de la population civile, principalement des biens civils.

En effet, le droit international humanitaire est défini comme :155

l'ensemble des règles internationales, d'origines conventionnelle ou coutumière, qui sont spécifiquement destinées à régler les problèmes humanitaire découlant directement des conflits armés, internationaux ou non internationaux, et qui restreignent, pour des raisons humanitaire, le droit des parties au conflit d'utiliser des méthodes et moyens de guerre de leur choix ou protègent les personnes et biens affectés, ou pouvant être affecté par le conflit.

Les règles de DIH, ont été édictées dans l'intérêt suprême des parties qui ne prennent pas ou plus part aux hostilités, et cela en limitant les méthodes employées pour nuire à l'ennemie ; c'est pourquoi on interdit même l'emploi de certaines armes pour affaiblir la partie adverse. On vise aussi la protection des personnes et même leurs biens (propriété privée) qui sont très exposés pendant la période des conflits armés contre tous les actes illicites.

Donc le M23, en administrateur temporaire, avait plusieurs obligations qu'il devrait observer pendant son occupation dont la protection des personnes civiles et leurs biens. Les victimes de ses actes doivent être indemnisés et les auteurs doivent répondre de leurs actes

155P. TUNAMSIFU SHIRAMBERE, Notes de cours précitées, p. 11.

61

devant les tribunaux compétents et cela suivant différents textes des lois interne et international. Sans ignoré que l'adoption de la loi d'amnistie et la publication des listes des bénéficiaires par le Président de la République ne les dispenses en rien car elle concerne les faits de guerre et donc réparation doit être faite.

Pour rendre effectives les poursuites judiciaires contre les auteurs actes illicites de même que la procédure de réparation pour les préjudices subis, nous recommandons une coopération judiciaire en trois phases. La première consistera à extrader les personnes suspectées d'avoir commis des crimes pendant la période couverte sur le territoire de la RDC. Si cette possibilité ne serait possible compte tenu de la peine de mort non encore abrogée dans le code pénal militaire Congolais, que les Etats concernés qui hébergent les présumés auteurs organisent des poursuites judiciaires équitables. Enfin, si l'Etat Congolais estimerait que le procès ne sera équitable, que les Etats membres de la CIRGL dont les juridictions ont la compétence universelle soient saisis.

En vue d'approfondir notre piste, il importe que d'autres chercheurs qui viennent après nous emboitent le pas de façon approfondie quant au point touchant la protection de personnes civiles pendant les périodes de guerre surtout que nous vivons dans une région conflictuelle et que la population sans distinction aucune doit prendre connaissance des ses droits pendant la période des guerres.

62

BIBLIOGRAPHIE

A. TEXTES JURIDIQUES

Cabinet du Président de la République, Constitution de la RDC du 18 Février 2006, in Journal Officiel de la RDC, 47ème année, n° spécial du 18 février 2006,Limeté, Kinshasa, 2006

Cabinet du Président de la République, Code Pénal Militaire du 18 novembre 2002, in Journal Officiel de la RDC, n° spécial du 18 Novembre 2002, Limeté, Kinshasa, 2003

Convention (IV) de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, 12 août 1949, Actes de la Conférence diplomatique de Genève de 1949, Vol. I, Berne, Département politique fédéral de Suisse

Convention de la Haye de 1907 relatif au règlement pacifique des conflits internationaux, Comité International de la Croix Rouge, Genève, 1907

Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux (Protocole I), 8 juin 1977, Comité international de la Croix-Rouge, Genève, 1977

B. DECISIONS JUDICIAIRES

CIJ, Affaire des activités armées sur le territoire du Congo (RDC c. Ouganda), arrêt du 19 décembre 2005, disponible sur http://www.icj-cij.org/docket/files/126/10435.pdf

CIJ, Affaire des activités militaires et paramilitaires des Etats-Unis au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis), arrêt du 27 juin 1986, disponible sur http://www.icj-cij.org/docket/files/70/6502.pdf

CIJ, Affaire relative à l'application de la convention pour la prévention du crime de Génocide (Bosnie-Herzégovine C. Bosnie-et-Monténégro), Arrêt du 26 Février 2007, Disponible sur http://ww.icj-cij.org/docket/files/91/13685.pdf

TPIY, Appel, Procureur c. Dusko Tadic, 2000 disponible sur www.tpiy.org/x/cases/tadic/tord/fr/01025AJ414429.htm

C. OUVRAGES

DJIANDIMA M., Principes et usages en matière de rédaction d'un travail universitaire, CADICEC-UNIAPAC, Congo-Kinshasa, 2004

NATIONS UNIES, La protection juridique internationale des droits de l'homme dans les conflits armés, New York, 2011 disponible sur

http://www.ohchr.org/Documents/Publications/HR_in_armed_conflict_FR.pdf

PICTET J., 4e convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, Genève, comité international de la croix rouge, 1956

63

SASSOLI M., BOUVIER AA., et QUINTIN A., Un droit dans la Guerre?, cas, documents et supports d'enseignements relatifs à la pratique contemporaine du DIH, Vol. I, Présentation du DIH, Chapitre 8, 2e éd., S.D.

STEARNS J., Du CNDP au M23 : Évolution d'un mouvement armé dans l'est du Congo, Institut de la Vallée du Rift, Londres, 2012

VERRI P., Dictionnaire du droit international des conflits armés, CICR, Genève, 1988 D. ARTICLES SCIENTIFIQUES

BIAD A., "Affaire des activités armées sur le territoire du Congo, République démocratique du Congo c. Ouganda (arrêt du 19 décembre 2005)", in Bulletin n° 16 du CREDHO de décembre 2006

BUGNION F., « La genèse de la protection juridique des biens culturels en cas de conflit armé », in RICR, vol. 86 n° 854, juin 2004

CICR, L'occupation et le DIH : questions et réponses, consulté le 13/05/2014, disponible sur : http://www.icrc.org/fre/war-and-law/index.jsp

GOLDSTEIN E., « Au coeur de l'occupation : le Sahara occidental, les droits de l'homme et le DIH - In the Heart of the Occupation : Western Sahara, humanRights and international humanitarianlaw», in RBDI, vol. 43, 2010

VITE S., « L'articulation du DIH et des droits économiques, sociaux et culturels en temps d'occupation », in W. KÄLIN, International Law, Conflict, and Development: The Emergence of a HolisticApproach in International Affairs, Leiden, Boston, M. Nijhoff, 2010

E. AUTRES DOCUMENTS

Éphémérides G.L. - Semaine du 24 au 30 novembre 2012, consulté le 28/06/2014, disponible

sur : http://congosiasa.blogspot.be/2012/11/who-is-general-francois-olenga.html

Nations Unies droits de l'homme, Haut-Commissariat, Monusco, Rapport du bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l'homme sur les violations des droits de l'homme perpétrées par les militaires des forces armées congolaises et des combattants du M23 à Goma et à Sake, Province du Nord-Kivu, ainsi qu'à Minora et dans ses environs, province du Sud-Kivu, entre le 15 Novembre et le 2 Décembre 2012, Mai 2013,disponible sur: http://www.ohchr.org/Documents/Countries/ZR/UNJHROMay2013_fr.pdf

Rapport du Projet Mapping concernant les violations les plus graves des droits de l'homme et du DIH commises entre mars 1993 et juin 2003 sur le territoire de la République démocratique du Congo, août 2010

Rapport du Secrétaire Général, Conseil de sécurité, (S/2004/616) concernant le rétablissement de l'état de droit et administration de la justice pendant la période de transition dans les sociétés en proie à un conflit ou sortant d'un conflit, Nations Unies, 23 aout 2004, consulté le 19 Juillet 2014 Disponible sur :www.ipu.org/splz-f/unga07/law.pdf

Réponse Rapide aux Mouvements de Population (RRMP), Rapport d'Evaluation Multisectorielle Approfondie à Kibumba, 22 Novembre 2012 au 22 Novembre 2013, disponible sur : http://www.rrmp.org/contenu/rapport/1225.pdf

64

Réseau National des ONGs des Droits de l'Homme de la République Démocratique du Congo (RENADHOC),National Network of CongoleseHumanRights NGO, Secrétariat Exécutif National, Rapport synthèse des violations des droits de l'homme commises par le mouvement dit M23 dans la province du Nord - Kivu : vers la sacralisation des crimes et de l'impunité en R.D.Congo, Rapport semestriel couvrant la période allant du 1er Juin au 30 Novembre 2012, Kinshasa, 04 Décembre 2012. Disponible sur : http : www.iccwomen.org/Rapport RENADHOC

Résumé du Rapport final du Groupe d'experts de l'ONU sur la RDC, consulté le 25 Mars 2014, disponible sur : www.lecongolais.cd/qui-sommes-nous/

F. THESES, MEMOIRES ET COURS POLYCOPIES

KYRO MALIMUTOTO A., la responsabilité des Etats tiers dans un conflit armé non international : appréciation des critères du control global et/ou effectif, Mémoire Inédit, Faculté de Droit, ULPGL-Goma, 2013

MULADJA KABAMBA L., Le DIH applicable aux conflits armés : Mythe ou réalité, Mémoire, Inédit, sous la direction d'Honoré TshitambweKazadiShambuyi, Faculté de Droit, U.O.M, MBUJIMAYI, 2007-2008.

RUSENZERA V., De l'occupation militaire en DIH : cas de l'Ouganda en RDC au regard de l'arrêt de la CIJ du 19 Décembre 2005, Mémoire Inédit, Faculté de Droit, ULPGL-Goma, 2011-2012

TUNAMSIFU SHIRAMBERE P., DIH, notes de cours dispensées en L1, Faculté de Droit de l'ULPGL, 2013-2014

WAYESU NAMUNINGA J., De la délégation du pouvoir aux ministères par le premier ministre en RDC, TFC en Droit, ULPGL, 2012

65

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE 0

1. ETAT DE LA QUESTION 3

2. PROBLEMATIQUE 5

3. HYPOTHESES DU TRAVAIL 7

4. CHOIX ET INTERET DU SUJET 9

5. METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE 10

6. DELIMITATION DU SUJET 10

7. ANNONCE DU PLAN 11
CHAPITRE1 : CONTEXTE D'OCCUPATON DE GOMA ET OBLIGATIONS DE

L'OCCUPANT 12

Section 1 : CONTEXTE D'OCCUPATION 12

§1. L'origine du conflit 12

§2. L'évolution du conflit 18

Section 2 : LES OBLIGATIONS DE L'OCCUPANT 25

§1. De la sécurité et de la protection des personnes 25

§2. La protection de la propriété privée 34

CHAPITRE 2 : LA RESPONSABILITE DE L'OCCUPANT 39

Section 1 : ANALYSE JURIDIQUE DES FAITS : allégations contre le M23 à Goma 39

§1. Le principe de responsabilité et les droits des victimes 39

§2. Les faits commis par le M23pendant son occupation 49

Section 2 : REGIME JURIDIQUE ET RESPONSABILITES 51

§1. Régime Juridique 51

§2. Juridictions compétentes pour les faits commis par le M23 54

§3. La responsabilité de l'occupant 56

CONCLUSION GENERALE 59

66

BIBLIOGRAPHIE 62

TABLE DES MATIERES 65






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King