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L'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso


par Abdoul Rachid ABDOU BOKAR ABDOU
Université Thomas SANKARA - Master 2020
  

Disponible en mode multipage

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MINISTÈRE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, BURKINA FASO

DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET DE ***********

L'INNOVATION Unité - Progrès - Justice

*********** ***********

UNIVERSITE THOMAS SANKARA

UNITÉ DE FORMATION ET DE RECHERCHE EN SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES

***********

MASTER II DROIT PUBLIC FONDAMENTAL

ANNÉE ACADÉMIQUE 2019-2020

L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE AU

BURKINA FASO

MEMOIRE

Présenté et soutenu publiquement par

ABDOU BOKAR ABDOU

Abdoul Rachid

Sous la direction du

Dr Sanwé Médard KIENOU Maître-assistant à l'Université

Pour l'obtention du Diplôme de
Master II de recherche en Droit
Public Fondamental

Nazi BONI

Avril 2021

Avril 2021

MINISTÈRE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, BURKINA FASO

DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET DE ***********

L'INNOVATION Unité - Progrès - Justice

*********** ***********

UNIVERSITE THOMAS SANKARA

UNITÉ DE FORMATION ET DE RECHERCHE EN SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES ***********

MASTER II DROIT PUBLIC FONDAMENTAL ANNÉE ACADÉMIQUE 2019-2020

 

L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE AU BURKINA FASO

MEMOIRE

Présenté et soutenu publiquement par

ABDOU BOKAR ABDOU

Abdoul Rachid Sous la direction du

Pour l'obtention du Diplôme de Dr Sanwé Médard KIENOU

Master II de recherche en Droit Maître-assistant à l'Université

Public Fondamental Nazi BONI

i

AVERTISSEMENT

« L'unité de formation et de recherche en sciences juridiques et politiques de l'Université Thomas SANKARA n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les mémoires qui doivent être considérées comme propres à leurs auteurs ».

ii

EPIGRAPHIE

« Il faut aux citoyens pour leur défense, pour la protection effective et efficace de leurs droits et de leurs libertés, une Cour suprême...devant laquelle, lésés par une loi, si cette loi...viole la Constitution, les citoyens puissent se pourvoir ; par laquelle ils puissent, chacun pour son compte et quant à ce qui est de lui, faire déclarer une telle loi inapplicable »1

Michel VERPEAUX.

1 Michel VERPEAUX, « Le contrôle de la loi par la voie d'exception dans les propositions parlementaires de la IIIème République », Revue Française de Droit Constitutionnel, n°04-1990, pp. 688-698.

iii

DEDICACE

A mes très chers père et mère ABDOU BOKAR Tsalha et YAOU Aïchatou, ces personnes

spéciales.

iv

REMERCIEMENTS

Mes remerciements vont en premier lieu à l'endroit du Docteur Sanwé Médard KIENOU pour
son suivi et sa disponibilité tout au long de ce travail. En effet, malgré son calendrier très
chargé, le Docteur n'a ménagé aucun effort pour nous faire profiter de sa sagesse.

Mes remerciements vont aussi à l'endroit de tout le corps professoral de l'UFR/SJP de
l'Université Thomas SANKARA et de la FADEG de l'Université de Tahoua pour la riche
formation et les conseils avisés.

A tous mes camarades de la première promotion LMD du Master 2, droit public fondamental.

A toutes les personnes qui ont consacré une partie de leur temps pour la réalisation du présent
document, les mots ne suffisent pas pour traduire ma gratitude.

v

LISTE DES SIGLES, ABBREVIATIONS ET ACRONYMES

ACCPUF : Association des Cours et Conseils constitutionnels ayant en Partage l'Usage

du Français.

CJCA : Conférence des Juridictions Constitutionnelles Africaines.

AIJC : Annuaire International de Justice Constitutionnelle.

Al. : Alinéa.

Alii : Autres auteurs.

AN : Assemblée Nationale.

ANDC : Association Nigérienne de Droit Constitutionnel.

Art. : Article.

BF : Burkina Faso.

CC : Conseil Constitutionnel.

CGD : Centre pour la Gouvernance Démocratique.

DDHC : Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen.

DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l'Homme.

Dir : Sous la direction de.

EJLS : European Journal of Legal Studies.

FADEG : Faculté de Droit, d'Economie et Gestion.

IDEA : International Diving Educators Association.

LGDJ : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence.

: Numéro.

Op.cit. : Opere Citato (précédemment cité).

OPU : Office des Publications Universitaires.

p. : Page.

vi

pp. : Pages.

PUF : Presse Universitaire de France.

QPC : Question Prioritaire de Constitutionnalité.

RBD : Revue Burkinabè de Droit.

RFDC : Revue Française de Droit Constitutionnel.

RIDC : Revue International de Droit Comparé.

RP : Revue Pouvoirs.

RTDH : Revue Trimestrielle des Droits de l'Homme.

UFR/SJP : Unité de Formation et de Recherche en Sciences Juridiques et Politiques.

. : Voyez dans ce sens.

Vol. : Volume.

VRÜ : Verfassung und Recht in Übersee.

§ : Paragraphe.

vii

SOMMAIRE

INTRODUCTION 1

TITRE I : LA CONSECRATION MITIGEE DE L'EXCEPTION

D'INCONSTITUTIONNALITE AU BURKINA FASO 9

CHAPITRE I : UNE CONSECRATION INSUFFISANTE DE L'EXCEPTION

D'INCONSTITUTIONNALITE 10

Section I : Un fondement constitutionnel de l'exception d'inconstitutionnalité 10

Section II : Un mécanisme longtemps rendu inopérant 19

CHAPITRE II : UNE QUALIFICATION ERRONEE DU MECANISME : UNE QUESTION

PREJUDICIELLE PAR NATURE 30

Section I : Une question soulevée devant le juge ordinaire 31

Section II : Une question tranchée par le Conseil constitutionnel 39

TITRE II : L'EFFICACITE PERCEPTIBLE DE L'EXCEPTION

D'INCONSTITUTIONNALITE AU BURKINA FASO 50

CHAPITRE I : L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE, UNE GARANTIE POUR

L'ETAT DE DROIT 51

Section I : Une subjectivation manifeste du contentieux constitutionnel 52

Section II : Une objectivation maintenue du contentieux constitutionnel 61

CHAPITRE II : L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE, UN SIGNE DE LA

LEGITIMITE DU JUGE CONSTITUTIONNEL 72

Section I : L'autorité des décisions rendues sur exception d'inconstitutionnalité 73

Section II : Un pouvoir législatif accordé au juge constitutionnel ? 80

CONCLUSION GENERALE 90

1

INTRODUCTION

« Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée...n'a point de constitution »2. Cette formule célèbre de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen atteste de la coïncidence qu'aménage le droit moderne entre norme constitutionnelle et garantie des droits3. Ainsi pouvons-nous y lire la nécessité, afin de garantir pleinement ces droits, de la mise en place d'un droit auquel seraient assujettis aussi bien les gouvernants que les gouvernés, un droit qui serait suprême : le droit constitutionnel. Celui-ci, comme son nom l'indique, est le droit de la Constitution4. Cette dernière étant la norme fondamentale, elle se situe ainsi au sommet de la hiérarchie des normes5. C'est donc cette norme supérieure, la Constitution, qui détermine comment la norme inférieure doit être créée. Cette hiérarchie peut être analysée comme une pyramide ou « un édifice à plusieurs étages » au sens de KELSEN6. En effet, afin d'assurer la cohérence et la stabilité du système juridique, il faut que les normes de rang inférieur soient conformes aux normes qui leur sont supérieures7. Cet impératif de cohérence, lorsqu'il s'applique au rapport entre les normes infra-constitutionnelles et la Constitution est appelé principe de constitutionnalité8. Ce principe est celui en vertu duquel la Constitution d'un Etat est la norme suprême au sein de son ordre juridique9.

Comme nous le rappelle le doyen HAURIOU, « sous l'empire de la Constitution, aucun pouvoir n'est souverain. Tout pouvoir public est susceptible d'être contrôlé, surtout par des moyens juridiques »10. Cela accorde une valeur symbolique et une place royale à la Constitution dans la hiérarchie des normes et donne par là même une acuité particulière à la question de sa protection11. A ce titre, selon Didier BOUTET, il est inévitable que l'Etat de droit s'entoure de

2 Article 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789.

3 Stéphanie HENNETTE-VAUCHEZ et Diane ROMAN, Droits de l'Homme et libertés fondamentales, Paris, Dalloz, 2015, 2ème édition, p. 209.

4 Xavier MAGNON, « Commentaire sous `'Le droit constitutionnel, Constitution du droit, droit de la Constitution» de L. Favoreu », Les Grands Discours de la Culture Juridique, 2017, 11 p. Disponible sur http://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01725353, consulté le 03 mai 2020 à 10h29.

5 Hans KELSEN, Théorie pure du droit, Neuchâtel, Editions de la Baconnière, 1957, p. 122.

6 Ibidem.

7 Ibidem.

8 Ottavio QUIRICO, « Le contrôle de constitutionnalité français dans le contexte européen et international : une question de priorité », EJLS, 2010, n°2, p. 34.

9 Ce principe a pour conséquence la constitutionnalisation progressive des branches du droit.

10 Maurice HAURIOU, Précis de droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2015, 2ème édition, p. 266.

11 Philippe ARDANT et Mathieu BERTRAND, Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, LGDJ, 2013, 25ème édition, p. 89.

2

protections12. La plus importante d'entre elles13 demeure la protection constitutionnelle des droits. Cette dernière doit être assurée par le juge constitutionnel. Celui-ci est chargé de veiller au respect des « normes dont la suprématie s'impose à tous, y compris au législateur »14. Pour ce faire, le contrôle de la constitutionnalité des lois se révèle être la voie du salut. En effet, il arrive souvent qu'en raison de la nature complexe de ses activités et au nom de l'efficacité de son action15, le législateur soit « porté à violer les droits et libertés garantis par la Constitution »16. Dans ce contexte, le juge constitutionnel qui est la « bouche de la Constitution »17 et le « gardien de la Constitution »18, assure non seulement la garantie des droits fondamentaux, mais aussi la protection de l'Etat de droit19. Ainsi a-t-on institué un contrôle de constitutionnalité qui est un mécanisme d'examen par l'organe faisant office de juge constitutionnel de la conformité des actes aux normes du bloc de constitutionnalité20.

Historiquement, le mécanisme de contrôle de constitutionnalité est apparu aux Etats-Unis d'Amérique alors même qu'aucune disposition constitutionnelle ne le prévoyait formellement21. C'est donc par la hardiesse d'un juge, le juge MARSHALL dans la célèbre affaire Marbury contre Madison22, que fut intenté pour la première fois, le contrôle juridictionnel de constitutionnalité23. Dans ce modèle américain, il s'agit d'un contrôle décentralisé qui est exercé à titre incident. Dans sa configuration classique, le contrôle de constitutionnalité revêt deux modalités : d'une part, le contrôle par la voie d'exception ; d'autre

12 Didier BOUTET, Vers un Etat de droit, Paris, l'Harmattan, 2000, p. 241.

13 Ibidem.

14 François LUCHAIRE cité par Pierre AVRIL et Jean GICQUEL, Lexique de droit constitutionnel, Paris, PUF, 2013, 4ème édition, p. 3.

15 Dieudonné KALUBA DIBWA, La justice constitutionnelle en République démocratique du Congo, Louvain-La-Neuve, l'Harmattan, 2013, p. 579.

16 Ibidem.

17Abdoulaye SOMA, « le statut du juge constitutionnel Africain », in Frédéric Joël AIVO, La constitution béninoise du 11 décembre 1990 : un modèle pour l'Afrique ? Mél. Maurice A. GLELE, l'Harmattan, 2014, pp. 451-480.

18 Jean-Louis ESAMBO KANGASME, Traité de droit constitutionnel congolais, Paris, l'Harmattan, 2017, p. 357.

19 Maria Nadège SAMBA-VOUKA, « La saisine des juridictions constitutionnelles dans le nouveau constitutionnalisme en Afrique : les cas du Bénin et du Congo », Annales de l'Université Marien NGOUABI, 20152017, p. 56.

20 Abdoulaye SOMA, « Modélisation d'un système de justice constitutionnelle pour une meilleure protection des droits de l'homme : trans-constitutionnalisme et droit international comparé », Revue trimestrielle des droits de l'homme, 2009, vol. 20, n°78, pp. 437-466.

21 Yédoh Sébastien LATH, « L'évolution du contrôle de constitutionnalité des lois dans les Etats d'Afrique francophone », in Oumarou Narey (dir.), La justice constitutionnelle, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 146.

22 Arrêt Marbury v/Madison rendu par la Cour Suprême des Etats-Unis en date du 24 février 1803. V°. Jean-Pierre DUPRAT. Elisabeth ZOLLER, « Les Grands Arrêts de la Cour Suprême des Etats-Unis », Paris, Revue Internationale de Droit Comparé, Vol. 62, n°3, 2010, pp. 841-845.

23 Yédoh Sébastien LATH , « L'évolution du contrôle de constitutionnalité des lois dans les Etats d'Afrique francophone », Op.cit., p. 146.

3

part, le contrôle par la voie d'action24. Ces deux modalités de contrôle de constitutionnalité ont impacté l'organisation des systèmes juridictionnels des Etats africains25.

L'évolution du contrôle de constitutionnalité des lois en Afrique est liée au processus de transformation des systèmes constitutionnels consécutifs aux contestations démocratiques des années 199026. Pour garantir avec efficacité la suprématie de la Constitution, les systèmes juridictionnels des Etats africains ont connu des évolutions substantielles à travers la diversification des modalités du contrôle de constitutionnalité27. Les Etats africains ont opté pour un système mixte de contrôle de constitutionnalité des lois, cumulant aussi bien les procédés du contrôle par la voie d'action et par la voie d'exception que ceux du contrôle a priori28 et a posteriori29. A la différence du contrôle a priori, le contrôle a posteriori s'exerce après l'entrée en vigueur de la loi. La constitutionnalité de celle-ci est contestée alors qu'elle est appliquée30. En effet, malgré le système de contrôle de constitutionnalité des lois a priori consacré par les Constitutions des Etats31, il arrive que certaines lois ou dispositions inconstitutionnelles passent tout de même par les mailles du filet. Il faut en effet reconnaître avec Fatin-Rouge STEFANINI que le contrôle abstrait opéré sur une norme qui n'a pas encore été appliquée ne permettrait pas de saisir « toutes les inconstitutionnalités contenues de manière latente dans une loi »32 et qui ne se révèleront que lors de son application33. Il a donc été institué un contrôle de constitutionnalité des lois a posteriori pour pallier toute application d'une loi inconstitutionnelle. Le contrôle a posteriori a de ce fait été perçu comme un « palliatif » du défaut du contrôle a priori qui n'était pas systématique34. Ainsi, les Etats africains se sont

24 Ibidem.

25 Yédoh Sébastien LATH, « L'évolution du contrôle de constitutionnalité des lois dans les Etats d'Afrique francophone », Op.cit., p. 148.

26 Gérard CONACA (dir.), L'Afrique en transition vers le pluralisme politique, Paris, Economica, 1993 cité par Yédoh Sébastien LATH dans l'acte du colloque international sur La justice constitutionnelle tenu à Niamey en 2016 sous la direction de Oumarou NAREY, Op.cit., p. 145.

27 Oumarou NAREY (dir.), La justice constitutionnelle, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 149.

28 Article 155 de la Constitution du Burkina Faso du 02 juin 1991.

29 Article 157 de la Constitution du Burkina Faso du 02 juin 1991.

30 Jean-Louis ESAMBO KANGASME, Le droit constitutionnel, Louvain-La-Neuve, l'Harmattan, 2013, p. 120.

31 L'article 157 al.1 de la Constitution burkinabè prévoit que le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président du Faso ; le Premier ministre ; le Président de l'Assemblée Nationale ; un dixième (1/10) au moins des membres de l'Assemblée Nationale.

32 Fatin-Rouge STEFANINI, « La question préjudicielle de constitutionnalité : étude du projet français au regard du droit comparé », in Annuaire International de Justice Constitutionnelle, 23-2007-2008. Constitution et liberté d'expression-Famille et droit fondamentaux, pp. 13-23.

33 Ibidem.

34 Marine HAULBERT, Les techniques juridictionnelles de contrôle de constitutionnalité a posteriori, Mémoire de Master 2 en droit public général soutenu à l'Université Montpellier I, 2012-2013, p. 28.

4

inscrits dans un processus de redynamisation de la justice constitutionnelle35. Cependant, le juge constitutionnel n'a qu'une compétence d'attribution. Il n'exerce son office qu'après avoir été saisi au préalable36, sauf exception37. La saisine constitue de ce fait la condition nécessaire à l'exercice de la garantie juridictionnelle de la Constitution. Dans ces conditions, elle devient un enjeu majeur.

L'une des revendications constitutionnelles liées au processus démocratique est relative à l'ouverture du droit de saisine aux particuliers38. En effet, pour faire participer plus efficacement les citoyens au contentieux constitutionnel, les Constitutions des Etats d'Afrique francophone ont consacré le procédé du contrôle par la voie d'exception, ce qui tend à conférer une réalité nouvelle et une effectivité à l'accès du citoyen au juge constitutionnel39. Ainsi écrivait à ce sujet le doyen Georges VEDEL : « la porte étroite » de la juridiction constitutionnelle est devenue « une porte ouverte »40. Cette reconnaissance du droit de saisine aux particuliers tend à conférer un caractère subjectif au contentieux constitutionnel41 avec l'émergence de la justice constitutionnelle. Pour ce faire, ce contrôle de constitutionnalité a posteriori et précisément celui par voie d'exception, se fait, selon les législations, de manière variée. Il est différemment aménagé par les Etats42. A ce titre, il existe plusieurs modalités de saisine du juge constitutionnel en matière de protection des droits et libertés publiques, les unes directes, les autres indirectes43. En effet, Abdoulaye SOMA prévient qu'il ne faut pas perdre de vue la réalité juridique évidente que les pays ont en pratique souvent introduit telle ou telle

35 Yédoh Sébastien LATH, « L'évolution du contrôle de constitutionnalité des lois dans les Etats d'Afrique francophone », Op.cit., p. 148.

36 Maria Nadège SAMBA-VOUKA, « La saisine des juridictions constitutionnelles dans le nouveau constitutionnalisme en Afrique : les cas du Bénin et du Congo », Annales de l'Université Marien NGOUABI, n°16(1), 2015-2017, pp. 54-71.

37 L'article 157 al.3 de la Constitution du Burkina Faso du 2 juin 1991 prévoit un pouvoir d'auto-saisine en disposant que « Le Conseil constitutionnel peut se saisir de toute question relevant de sa compétence s'il le juge nécessaire ».

38 Oumarou NAREY (dir.), La justice constitutionnelle, Op.cit., p. 152.

39 Ibidem.

40 Georges VEDEL, « L'accès des citoyens au juge constitutionnel. La porte étroite », La vie judiciaire, n°2344, 1991, pp. 1-14.

41 Yédoh Sébastien LATH, « L'évolution du contrôle de constitutionnalité des lois dans les Etats d'Afrique francophone », Op.cit., p. 152.

42 Maria Nadège SAMBA-VOUKA, « La saisine des juridictions constitutionnelles dans le nouveau constitutionnalisme en Afrique : cas du Bénin et du Congo », Op.cit., p. 56.

43 Jean-Louis ESAMBO KANGASME, Traité de droit constitutionnel congolais, Op.cit., p. 357.

5

variante dans tel ou tel modèle de base, si bien qu'on remarquera plusieurs types de justice constitutionnelle à travers le monde44.

Etant donné la variabilité du contrôle a posteriori de constitutionnalité des lois selon les Etats, il nous a semblé important, voire nécessaire d'étudier, en particulier, celui du Burkina Faso, notre terre d'accueil. Ce pays marque une préférence pour l'exception d'inconstitutionnalité45 qui peut être soulevée par toute personne partie à un procès contre une loi présumée inconstitutionnelle qui serait sur le point de lui être appliquée. D'où le choix de notre thème : « L'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso ».

Le présent thème de droit constitutionnel, comme n'importe lequel d'ailleurs, appelle, préalablement à toute analyse de fond, un éclairage conceptuel46. En effet, Charles EISENMANN nous enseigne qu'il faut nécessairement commencer par résoudre clairement le problème de la fixation des concepts qui forment l'armature d'un thème, sinon, poursuit-il, on discuterait dans l'obscurité en vain47. Ainsi, selon Eric NGANGO YOUMBI, l'exception d'inconstitutionnalité s'entend d'une possibilité offerte au justiciable, à l'occasion d'un procès devant une juridiction quelconque, d'invoquer qu'une disposition légale est non-conforme à la Constitution. Il soulève alors l'inconstitutionnalité de la loi qui est sur le point de lui être appliquée48. Les Constitutions de la plupart des pays d'Afrique de l'Ouest permettent à une autorité judiciaire faisant office de juge de première instance de renvoyer cette question à la juridiction constitutionnelle compétente49. Ibrahim SALAMI lui, définit l'exception d'inconstitutionnalité comme « un moyen de défense dans une procédure juridictionnelle ou comme une technique visant à contester, à l'occasion d'un procès, la constitutionnalité de la loi »50. Ces définitions doctrinales convergent avec celles consacrées par les textes en la matière au Burkina Faso. Ainsi, à la lecture des articles 25 de la loi organique n°011-2000/AN du 27

44 Abdoulaye SOMA, « Modélisation d'un système de justice constitutionnelle pour une meilleure protection des droits de l'homme : trans-constitutionnalisme et droit constitutionnel comparé », Revue Trimestrielle des Droits de l'Homme, 2009, vol.20, n°78, pp. 437-466.

45 Article 157 al.2 de la Constitution du Burkina Faso du 2 juin 1991.

46 Jean-Calvin Aba'a OYONO, « Les mutations de la justice à la lumière du développement constitutionnel de 1996 », VRÜ/Droit et politique en Afrique, Asie et Amérique latine, vol.34, n°2, 2001, pp. 196-219.

47 Charles EISENMAN, Cours de Droit Administratif, Tome I, Paris, LGDJ, 1982, cité par Jean-Calvin Aba'a OYONO dans « Les mutations de la justice à la lumière du développement constitutionnel de 1996 », Op.cit., pp. 196-106.

48 Eric NGANGO YOUMBI, La justice constitutionnelle au Bénin, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 341.

49 Marcus BOCKENFORD et alii, Les juridictions constitutionnelles en Afrique de l'Ouest : analyse comparée, IDEA International, Fondation Hanns Seidel, 2016, p. 130.

50 Ibrahim David SALAMI, « Exception d'inconstitutionnalité et principe d'égalité au Bénin et au Congo », Revue Burkinabè de Droit, n°51-2ème semestre, 2016, pp. 9-41.

6

avril 200051 et 157 al.2 de la Constitution, l'exception d'inconstitutionnalité est un moyen qui peut être soulevé par un justiciable « devant une juridiction, quelle qu'elle soit » pour contester la constitutionnalité de la loi qui va lui être appliquée. La juridiction « est tenue de surseoir à statuer et de saisir le Conseil constitutionnel qui doit se prononcer sur la constitutionnalité du texte en litige dans le délai d'un mois ». Il ressort clairement de ces différentes définitions que l'exception d'inconstitutionnalité est une bouée de sauvetage tendue au citoyen pour garantir la plénitude de la protection de ses droits et libertés en écartant l'application d'une loi dont « la régularité par rapport à la Constitution est contestée »52.

Par ailleurs, il y a lieu de noter qu'il existe des notions quelque peu voisines qui pourraient prêter à confusion. A cet égard, il paraît opportun de les distinguer. Ainsi pouvons-nous remarquer l'existence, à côté de « l'exception d'inconstitutionnalité », de la « Question Prioritaire de Constitutionnalité » (QPC) et de la « question préjudicielle ». Par essence53, il y a exception d'inconstitutionnalité lorsque la question de constitutionnalité est soulevée devant le juge ordinaire à l'occasion d'un procès et tranchée par lui-même54. La question préjudicielle pour sa part, est celle qui oblige le tribunal à surseoir à statuer jusqu'à la décision de la juridiction compétente55. Quant à la QPC, elle a été instituée en France en 200856. Dans cette procédure française, lorsque l'inconstitutionnalité de la loi est soulevée, elle sera transmise à la juridiction suprême de l'ordre juridictionnel concerné (Conseil d'Etat ou Cour de cassation) avant d'être renvoyée (ou pas) au Conseil constitutionnel. La QPC est complexe autant qu'elle favorise la collaboration entre les juridictions suprêmes et le Conseil constitutionnel57.

Sous l'influence tardive des Etats-Unis qui avaient fait de la Cour suprême l'un des piliers de la Constitution de 178758, de nombreux pays européens ont décidé, après 1945, de combiner le principe de légalité avec le principe de constitutionnalité permettant une véritable protection des normes constitutionnelles. Il en est ainsi désormais, en Allemagne, en Italie, en

51 Il s'agit de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 portant composition, organisation, attributions et fonctionnement du Conseil constitutionnel du Burkina Faso et procédure applicable devant lui.

52 Pierre AVRIL et Jean GICQUEL, Lexique de droit constitutionnel, Paris, PUF, 2013, 4ème édition, p. 3.

53 Nous faisons référence au système juridique américain qui a été le premier à consacrer le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité. La procédure authentique de ce mécanisme serait donc celle ayant cours dans cet ordre juridique.

54 Louis FAVOREU et alii, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2019, 21ème édition, p. 291.

55 Serge GUINCHARD (dir.), Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 2014, 21ème édition, p. 766.

56 Après des années de réticence, la France a fini par consacrer le contrôle juridictionnel a posteriori des lois devant le juge constitutionnel notamment par la révision constitutionnelle de 2008 et la loi organique du 10 décembre 2009.

57 Jean-Louis ESAMBO KANGASME, Le droit constitutionnel, Op.cit., p. 113.

58 Jean-Paul VALETTE, Droit constitutionnel, Paris, l'Harmattan, 2013, p. 59.

7

Espagne, au Portugal, en Grèce, en Pologne ou en Hongrie, mais aussi en France. Cette évolution explique l'emprise de la hiérarchie des normes dans la plupart des démocraties59. Toutefois, bien qu'il sera fait cas de plusieurs systèmes juridiques dans un but comparatif, il y a lieu, pour nous, de préciser que la présente étude concerne fondamentalement le Burkina Faso qui, a institué la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité tout en confiant le monopole de ce contrôle au seul juge constitutionnel60.

L'étude de la question de l'exception d'inconstitutionnalité revêt un intérêt juridique pas des moindres, tant d'un point de vue théorique et pratique qu'au regard de l'actualité de la justice constitutionnelle au Burkina Faso. D'abord, du point de vue théorique, cette étude nous permettra de nous rendre compte de l'importance capitale que présente l'exception d'inconstitutionnalité pour le justiciable. En effet, la portée de ce mécanisme est aussi « de rendre la justice constitutionnelle accessible à tous les acteurs de la vie nationale »61, ce qui, dès lors, inclut le citoyen. Ce dernier va progressivement devenir la « pierre angulaire »62 de la justice constitutionnelle. Cette participation citoyenne à la justice constitutionnelle contribuera sans doute à assainir l'ordre constitutionnel. Ensuite, d'un point de vue pratique, l'analyse de cette thématique nous permettra de mettre en évidence les règles de compétence et de procédure pour la mise en oeuvre de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso. Nous remarquerons par ricochet que, au Burkina Faso, cette modalité de contrôle a posteriori reste encore un domaine pauvre et quasiment inexploré. Enfin, du point de vue de l'actualité, la recrudescence de la saisine du juge constitutionnel burkinabè par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité est assez révélatrice du changement de paradigme qui est en train de s'opérer dans la mise en oeuvre de ce mécanisme. En effet, rien qu'en 2019, le Conseil constitutionnel a été saisi à, au moins trois reprises par le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité. Cette actualité fait davantage toute la particularité du sujet.

L'analyse de cette thématique impose de mettre en lumière la portée concrète de l'exception d'inconstitutionnalité en découvrant notamment les tenants et aboutissants de ce mécanisme au Burkina Faso. De ce fait, la question que l'on doit impérativement se poser est

59 Ibidem.

60 Ainsi dispose l'article 152 al.1 de la Constitution du Burkina Faso du 2 juin 1991.

61 Eric NGANGO YOUMBI, La justice constitutionnelle au Bénin, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 341.

62 Théodore HOLO, « Le citoyen, pierre angulaire de la justice constitutionnelle au Bénin », Communication au 6ème Congrès de l'Association des Cours et Conseil constitutionnels ayant en partage l'usage du français, Marrakech, du 4 au 6 juillet 2012.

8

celle de savoir, l'exception d'inconstitutionnalité est-elle parfaitement consacrée et quels en sont les impacts dans l'ordre constitutionnel burkinabè ?

Tout au long de cette étude, nous nous efforcerons d'analyser les moyens juridiques servant de fondement à l'exception d'inconstitutionnalité. Mais il faut admettre qu'au Burkina Faso, ce mécanisme a connu une consécration mitigée (TITRE I). Par ailleurs, il convient aussi de s'interroger sur les effets de ce mécanisme. Cela se fera notamment à travers l'analyse de l'efficacité de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso (TITRE II).

9

TITRE I : LA CONSECRATION MITIGEE DE
L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE AU
BURKINA FASO

En droit romain, l'exception a été un moyen que l'on a longtemps accordé au défendeur63 afin qu'il puisse présenter ses objections face aux prétentions du demandeur64 dans un procès civil. Avec l'évolution du droit, l'exception a pris plusieurs formes. Elle évoque l'idée d'un droit anormal et exorbitant, de dérogation tantôt au droit commun, tantôt à un principe ou à une règle de justice65. Ainsi parle-t-on d'une part d'exception d'illégalité66 et d'autre part d'exception d'inconstitutionnalité67. Cette dernière consiste à accorder au justiciable la possibilité de présenter ses objections face à une loi inconstitutionnelle et en faire écarter l'application68 dans un procès le concernant. En droit constitutionnel contemporain, l'exception d'inconstitutionnalité est perçue comme un moyen d'accès du particulier à la justice constitutionnelle. En effet, il fallait impérativement permettre aux citoyens d'être directement associés à la protection de leurs droits69 et libertés. Cela, le Burkina Faso l'a très vite compris, car ayant consacré ce mécanisme. Mais, cette consécration nous parut quelque peu mitigée. Cela se caractérise non seulement par des insuffisances observées dans cette consécration (Chapitre I) mais aussi et surtout par la qualification juridique erronée du mécanisme. Il s'agirait plutôt d'une question préjudicielle de constitutionnalité (Chapitre II).

63 Thi Hong NGUYEN, La notion d'exception en droit constitutionnel français, Thèse de Doctorat en droit public soutenue en date du 28 mai 2013 à l'Université Paris I Panthéon Sorbonne, p. 8.

64 Ibidem.

65 Ibrahim David SALAMI, « Exception d'inconstitutionnalité et principe d'égalité au Bénin et au Congo », RBD, n°51-2ème semestre, 2016, pp. 9-41.

66 Moyen de défense procédural par lequel une partie allègue en cours d'instance l'illégalité de l'acte qui lui est opposé. V°. Serge GUINCHARD et Thierry DEBARD (dir.), Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 2014, 21ème édition, p. 411.

67 Moyen de défense procédural par lequel une partie allègue en cours d'instance l'inconstitutionnalité de la loi qui lui est opposée. Ce moyen est consacré par l'article 157 al.2 de la Constitution du Burkina Faso du 11 juin 1991.

68 Théodore HOLO, « Emergence de la justice constitutionnelle », RP, 2009/2, n°129, pp. 101-114.

69 Marilisa D'AMICO, « Juge constitutionnel, juges du fond et justiciables dans l'évolution de la justice constitutionnelle italienne », AIJC, n°5-1989, 1991, pp. 79-96.

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CHAPITRE I : UNE CONSECRATION INSUFFISANTE DE

L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE

La consécration de l'exception d'inconstitutionnalité fait naître une nouvelle ère, celle de la reconnaissance d'un droit d'accès du citoyen au prétoire du juge constitutionnel70. Au Burkina Faso, force est de constater que l'exception d'inconstitutionnalité a une valeur constitutionnelle (Section I). Toutefois, il y a lieu de remarquer que malgré sa consécration expresse, l'exception d'inconstitutionnalité peine à être effective, car ayant longtemps été un mécanisme inopérant en droit burkinabè (Section II).

Section I : Un fondement constitutionnel de l'exception
d'inconstitutionnalité

L'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso fait l'objet d'une reconnaissance et d'une garantie constitutionnelle71. Cependant, cela n'a pas toujours été le cas. En effet, cette constitutionnalisation de l'exception d'inconstitutionnalité a été relativement tardive (§1). Par ailleurs, il faut noter que l'exception d'inconstitutionnalité est dotée d'un référentiel normatif assez fourni en droit burkinabè (§2).

§1 : Une consécration constitutionnelle tardive

Le caractère tardif de la consécration est relatif au fait que l'exception d'inconstitutionnalité n'a d'abord longtemps été prévue que par une loi organique (A) avant de faire ensuite l'objet d'une consécration constitutionnelle expresse (B).

70 Marilisa D'AMICO, « Juge constitutionnel, juge du fond et justiciables dans l'évolution de la Justice constitutionnelle italienne », Op.cit., pp. 79-96.

71 Article 157 al.2 de la Constitution burkinabè du 02 juin 1991.

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A. Un mécanisme longtemps prévu par la seule loi organique

Longtemps réservée à des requérants privilégiés72 ou politiques73, la saisine du juge constitutionnel pour le contrôle de la constitutionnalité des lois connaîtra un tournant décisif avec le vent démocratique qui souffla sur les Etats africains dans les années 199074. Pour déclencher le contrôle de constitutionnalité de la loi, « la solution la plus démocratique consiste à ouvrir au maximum cette compétence en la remettant à tout citoyen » disait Philippe ARDANT75. Véritable sentinelle démocratique76, l'exception d'inconstitutionnalité a pu ouvrir la voie à la compétence citoyenne pour le déclenchement d'un contrôle de constitutionnalité des lois. Ainsi, le Burkina Faso, attaché aux valeurs et aux idéaux démocratiques, a institué le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité. Cette dernière a été affirmée pour la toute première fois dans la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 portant composition, attributions, organisation, fonctionnement et la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel77. Cette loi à son article 25 dispose que « Lorsqu'une exception d'inconstitutionnalité est soulevée par un justiciable devant une juridiction, quelle qu'elle soit, celle-ci est tenue de surseoir à statuer et de saisir le Conseil constitutionnel qui doit se prononcer sur la constitutionnalité du texte en litige dans le délai d'un mois qui court à compter de sa saisine par la juridiction concernée ». Une disposition manifestement inconstitutionnelle, car selon Augustin LOADA et Luc Marius IBRIGA, « une lecture de la Constitution autorise à dire que le constituant originaire n'entendait accorder aucun droit de saisine aux citoyens, ni directement, ni indirectement. Il y a là une révision de la Constitution qui ne dit pas son nom »78. Il est de ce fait étonnant que cette disposition ait pu passer le test de constitutionnalité79. Pour

72 L'article 157 al.1 de la Constitution burkinabè prévoit que le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président du Faso ; le Premier ministre ; le Président de l'Assemblée Nationale ; un dixième (1/10) au moins des membres de l'Assemblée Nationale.

73 Jean-Paul VALETTE, Droit constitutionnel, Paris, l'Harmattan, 2013, p. 60.

74 Oumarou NAREY (dir.), La justice constitutionnelle, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 146.

75 Philippe ARDANT et Mathieu BERTRAND, Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, LGDJ, 2013, 25ème édition, p. 94.

76 Julien BONNET et Pierre-Yves GAHDOUN, La question prioritaire de constitutionnalité, Paris, PUF, 2014, p. 38.

77 Loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 portant composition, attributions, organisation, fonctionnement et procédure applicable devant le Conseil constitutionnel modifiée par la loi organique n°034-2000/AN du 13 décembre 2000.

78 Augustin LOADA et Luc Marius IBRIGA, Droit constitutionnel et institutions politiques, Ouagadougou, coll. Précis de droit burkinabè, PADEG, 2007, p. 422.

79 V°. Chambre constitutionnelle de la Cour suprême, décision n°02-2000/CS/CC du 31 août 2000 sur la Constitutionnalité de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 relative au Conseil constitutionnel.

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Relwendé Louis Martial ZONGO, il s'agit là d'une « anomalie » juridique80. Quoi qu'il en soit, la toute première mise en oeuvre de l'exception d'inconstitutionnalité est intervenue sur la base de cette loi. Il s'agit de l'affaire de la Société Etudes et Réalisation des Ouvrages Hydrauliques jugée par le Conseil constitutionnel dite décision EROH81. Avec cette loi, le Burkina Faso a jeté les bases de l'exception d'inconstitutionnalité dans son ordre juridique.

Cette consécration de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso est tant originale que salutaire d'autant plus qu'en France, la possibilité pour le citoyen de contester la constitutionnalité d'une loi n'a été admise qu'avec la révision constitutionnelle de 200882, soit huit (8) ans après le Burkina Faso. Par ailleurs, contrairement au Burkina Faso, plutôt que de retenir l'appellation exception d'inconstitutionnalité, la France a baptisé ce mécanisme Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC)83. Ainsi, l'article 61-1 de la Constitution française dispose « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ».

Il est vrai que la France a innové le mécanisme avec une qualification originale de QPC. Mais, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'une procédure instaurant un contrôle de constitutionnalité sur les lois déjà promulguées et sur initiative des citoyens-justiciables au même titre que l'exception d'inconstitutionnalité prévue en droit burkinabè84. D'ailleurs, en Afrique de l'Ouest, cette possibilité avait déjà été offerte par le constituant sénégalais à ses citoyens depuis 199285. De ce point de vue, nous sommes bien loin du « mimétisme global »86 destiné à permettre aux pays africains de se conformer87 au système français. Pour une fois, le mimétisme juridique semble avoir pris un sens inverse. Toutefois, force est de constater que la

80 Relwendé Louis Martial ZONGO, « L'accès de l'individu au juge constitutionnel burkinabè », Revue Burkinabè de Droit, n°59-1er semestre, 2020, pp. 139-164.

81 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2007-04/CC du 29 août 2007 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la société EROH.

82 Loi constitutionnelle n°2008-724/AN de modernisation des institutions de la Vème République adoptée le 9 juillet 2008 et promulguée le 23 juillet 2008 en France.

83 Loi Organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution.

84 Il faut tout de même préciser que cela ne suffit pas pour parler d'une exception d'inconstitutionnalité proprement dite pour des raisons que nous aurons à développer dans le chapitre suivant de ce même titre.

85 Loi n°92-22 du 30 mai 1992 portant révision de la Constitution au Sénégal.

86 Sama W. Jacob Marie-CONSTANTIN, La protection des droits fondamentaux par le juge constitutionnel, Mémoire de recherche pour l'obtention d'un Master 2 en droit public fondamental, UO2, 2012, p. 5.

87 Kader HAMIDOU GARBA, La protection des droits fondamentaux par le juge constitutionnel : cas du Burkina Faso et du Niger, Mémoire de recherche pour l'obtention d'un Master 2 en droit public fondamental, UO2, 2019, p. 6.

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consécration de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso a longtemps reposé sur cette loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 200088. Même si une telle consécration est admirable, nous lui préférerions une consécration constitutionnelle formelle.

B. Une récente constitutionnalisation expresse du mécanisme

Dans l'ensemble des Etats d'Afrique francophone, les constituants ont opéré une consécration constitutionnelle stimulante du contrôle par la voie d'exception89, corrigeant ainsi les faiblesses de la justice constitutionnelle90. Tout particulièrement, le Burkina Faso a bien assez tôt réussi à prévoir la possibilité d'un contrôle de constitutionnalité des lois après leur promulgation. Cela notamment depuis la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 200091. Mais selon nous, au regard de l'importance de ce mécanisme, il aurait mieux fallu lui donner une importance plus notoire notamment en le consacrant dans la Loi Fondamentale. En réalité l'exception d'inconstitutionnalité bénéficierait d'un caractère sacré si elle avait été prévue par la Constitution. D'ailleurs, Delphine Emmanuel ADOUKI ne disait-elle pas que c'est la garantie constitutionnelle qui permet aux juridictions constitutionnelles de faire preuve de plus d'audace ?92 En effet, dans la mesure où c'est la Constitution elle-même qui est mise en litige93, l'exception d'inconstitutionnalité doit être prévue par cette même Constitution.

Certes, il convient de rappeler que les articles 3 de la Constitution de la IIème République et 5 de la Constitution de la IIIème République au Burkina Faso disposaient : « (...) toute loi, tout acte contraire à ses dispositions sont nuls et non avenus. En conséquence, tout citoyen a le droit de se pourvoir devant la Cour suprême contre les lois et actes inconstitutionnels »94. Cependant, la Constitution de la IVème République a pour sa part restreint l'étendue de la saisine du juge constitutionnel en la réservant aux seuls politiques. Il a fallu attendre la révision constitutionnelle de 201295, soit douze (12) ans après la loi organique, pour que ce mécanisme soit inscrit dans le texte de la Constitution burkinabè. Cette dernière, après la révision de 2012,

88 Article 25 de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 relative au Conseil constitutionnel.

89 Oumarou NAREY, La justice constitutionnelle, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 152.

90 Eric NGANGO YOUMBI, La justice constitutionnelle au Bénin, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 347.

91 Loi Organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 portant composition, attributions, organisation, fonctionnement et procédure applicable devant le Conseil constitutionnel.

92 Delphine Emmanuel ADOUKI, « Contribution à l'étude des décisions du juge constitutionnel en Afrique », Revue Française de Droit International, n°95-2013/3, pp. 611-638.

93 Denis BARABGER, Le droit constitutionnel, Paris, PUF, 2013, 6ème édition, p. 25.

94 Augustin LOADA et Luc Marius IBRIGA, Droit constitutionnel et institutions politiques, Op.cit., p. 420.

95 Loi constitutionnelle n°033-2012/AN du 11 juin 2012.

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prévoyait, quoique non expressément, à son article 157 alinéa 2, l'exception d'inconstitutionnalité. Cet article est libellé ainsi qu'il suit : « Si, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation. Le Conseil constitutionnel se prononce dans un délai déterminé par la loi ». Ce même article 157 alinéa 2 fut reconduit avec le même dispositif dans la Constitution révisée en 201396. Le constituant burkinabè reprenait ainsi quasi in extenso, la formulation française97 si bien que l'on serait tenté d'affirmer que le Burkina Faso venait également de consacrer la QPC française. Mais en réalité, il n'en est rien. En effet, la loi organique n°011-2000/AN précitée maintient toujours l'expression exception d'inconstitutionnalité. C'est avec la révision constitutionnelle récente de 201598 que la Constitution burkinabè va consacrer expressément l'exception d'inconstitutionnalité. En effet, cette Constitution prévoit : « En outre, tout citoyen peut saisir le Conseil constitutionnel sur la constitutionnalité des lois, soit directement, soit par la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité invoquée dans une affaire qui le concerne devant une juridiction. Celle-ci doit surseoir jusqu'à la décision du Conseil constitutionnel qui doit intervenir dans un délai maximum de trente jours à compter de sa saisine »99. Avec cette affirmation expresse du mécanisme dans le texte de la Constitution, l'exception d'inconstitutionnalité est sacralisée au Burkina Faso100. Dès lors, le constitutionnalisme ne peut que se réjouir « lorsque le prétoire de la justice constitutionnelle n'est plus réservé aux seuls gouvernants, lorsqu'il ouvre ses portes aux citoyens »101, disait Francis DELPERE.

A ce titre, la justice constitutionnelle, à travers ce mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité, devient l'épine dorsale de l'organisation étatique102 burkinabè. Pour mettre en oeuvre l'exception d'inconstitutionnalité, le juge constitutionnel burkinabè dispose d'un référentiel normatif assez conséquent.

96 Loi constitutionnelle n°035-2013/AN du 12 novembre 2013.

97 Agnero Privat MEL, « La saisine du juge constitutionnel en Afrique francophone », RBD, n°52-1er semestre/2017, pp. 104-144.

98 Loi constitutionnelle n°072-2015/CNT du 5 novembre 2015.

99 Article 157 al.2 de la Constitution burkinabè du 2 juin 1991 révisée par la loi de révision constitutionnelle n°072-2015/CNT.

100 Le caractère sacré du mécanisme repose sur le simple fait qu'il est prévu par la loi fondamentale qu'est la Constitution.

101 Francis DELPERE, Le recours des particuliers devant le juge constitutionnel, Paris, Economica, 1991, p. 18.

102 Fatima DIALLO, Le juge constitutionnel dans la construction de l'Etat de droit au Sénégal, Mémoire de DEA soutenu à l'Université Gaston Berger de Saint-Louis, 2007, p. 35.

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§2 : Les référentiels normatifs de l'exception d'inconstitutionnalité

L'exception d'inconstitutionnalité, comme n'importe quel autre moyen d'ailleurs, doit se référer à un certain nombre de normes. Ainsi, il convient de distinguer les normes de contrôle ou normes de référence103 (A) et les normes contrôlées (B).

A. La richesse des normes de contrôle ou normes de référence

Les normes de référence sont par hypothèse toutes des normes constitutionnelles104 ou ayant une valeur constitutionnelle105. Il s'agit des normes « mettant en oeuvre la Constitution »106, des normes sur le fondement desquelles le juge constitutionnel opère son contrôle107 notamment celui a posteriori. Ce sont les normes faisant partie du bloc de constitutionnalité. En effet, les juridictions constitutionnelles en général et le juge constitutionnel burkinabè en particulier apprécient la validité des normes qui leur sont soumises en référence au bloc de constitutionnalité108.

Ainsi, au plan national, comme normes de référence, il y a en premier lieu, les dispositions et les principes à valeur constitutionnelle109 et en deuxième lieu, les lois organiques110. Si les premiers ne posent pas de difficultés quant à leur insertion dans le bloc de constitutionnalité, les deuxièmes peuvent susciter un débat dans la mesure où toutes les juridictions constitutionnelles n'ont pas les mêmes normes de référence111. Toutefois, au Burkina Faso, le problème ne se pose pas ou du moins, ne devrait pas se poser dans la mesure où le juge intègre la loi organique comme une norme de référence pour le contrôle de

103 Eric NGANGO YOUMBI, La justice constitutionnelle au Bénin, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 400.

104 Francis HAMON et Michel TROPER, Droit constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2014, 35ème édition, p. 745 et Ss.

105 Ibidem.

106 Eric NGANGO YOUMBI, La justice constitutionnelle au Bénin, Op.cit., p. 400.

107 Fatima DIALLO, Le juge constitutionnel de l'Etat de droit, Mémoire de DEA, Op.cit., p. 35.

108 Djibrihina OUEDRAOGO, « Le contrôle de constitutionnalité des Règlements des Assemblées parlementaires dans les Etats de l'Afrique de l'ouest francophone », Revue Française de Droit Constitutionnel, n°117, 2019/1, pp. 119-143.

109 Un principe à valeur constitutionnelle est un principe dégagé par le Conseil constitutionnel et dont le respect s'impose au législateur comme aux organes de l'Etat. Il est une norme juridique à part entière.

110 Il s'agit des lois votées par le Parlement pour préciser ou compléter la Constitution. V°. Serge GUINCHARD, Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 2014, 21ème édition, p. 574.

111 La Cour constitutionnelle du Bénin par exemple tient compte, dans une certaine mesure, des règlements des Assemblées comme normes de référence.

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constitutionnalité, nous apprend Djibrihina OUEDRAOGO112. En effet, le juge constitutionnel burkinabè, dans sa décision rendue en date du 04 juillet 2007 a affirmé que « Considérant qu'il est de principe que toute violation d'une loi organique par d'autres dispositions législatives même de nature organique et n'ayant pas le même objet, est une violation de l'article de la Constitution qui renvoie à cette loi organique »113. De ce raisonnement du Conseil constitutionnel burkinabè, il ressort que la loi organique est un prolongement de l'article de la Constitution qui l'a prévu. Dès lors, la violation de cette loi organique serait une violation « médiate »114 de la Constitution. Par voie de conséquence, la loi organique reste potentiellement une norme de référence pour le juge constitutionnel burkinabè.

En outre, au plan international, les normes et instruments internationaux auxquels le préambule de la Constitution burkinabè renvoie expressément font partie du bloc de constitutionnalité et donc logiquement, des normes de référence du juge constitutionnel. En effet, c'est seulement lorsque le préambule renvoie à ces normes internationales qu'elles intègrent le bloc de constitutionnalité. Du reste, la valeur constitutionnelle du préambule n'est aujourd'hui plus contestable. En effet, la Constitution burkinabè elle-même consacre la valeur constitutionnelle de son préambule115. En outre, le juge constitutionnel burkinabè, dans son avis consultatif n°2003-08 sur le statut de la CPI, a affirmé que « dans le préambule, partie intégrante de la Constitution, le Burkina Faso a souscrit à la DUDH et aux instruments internationaux »116. A travers cet avis, le Conseil constitutionnel burkinabè a considéré le préambule comme une norme supérieure, car ayant valeur constitutionnelle pouvant servir de référence au juge constitutionnel. D'ailleurs, comme son homologue français117, le juge constitutionnel burkinabè s'est déjà référé au préambule de la Constitution, plus précisément à l'article 14 du Pacte International Relatif aux Droits Civils et Politiques dans sa décision rendue sur exception

112 Djibrihina OUEDRAOGO, « Le contrôle de constitutionnalité des Règlements des Assemblées parlementaires dans les Etats de l'Afrique de l'ouest francophone », Op.cit., pp. 119-143.

113 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2007-03/CC du 04 juillet 2007 sur la conformité avec la Constitution du 02 juin 1991 de la loi organique n°033-2006/AN du 21 décembre 2006 portant modification de la loi organique n°014-2000/AN du 16 mai 2000 portant composition, organisation, attributions et fonctionnement de la Cour des comptes et procédure applicable devant elle.

114 Ibidem.

115 V°. La dernière phrase du préambule de la Constitution du 2 juin 1991 qui est libellée comme suit : « ADOMPTONS ET APPROUVONS la présente Constitution dont le présent préambule fait partie intégrante ».

116 V°. Avis juridique n°2003-08/CC sur le Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale adopté le 17 juillet 1998 in Augustin LOADA, Avis et décisions commentés de la justice constitutionnelle burkinabè de 1960 à nos jours, CGD, 2009, p. 49.

117 V°. Conseil constitutionnel français, décision n°71-44/CC du 16 juillet 1971, Liberté d'association.

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d'inconstitutionnalité en date du 09 juin 2017118. Ainsi, à l'instar de Dominique CHAGNOLLAUD, nous pouvons affirmer que le contrôle de la conformité à la Constitution, soit-il par voie d'action ou par voie d'exception, « ne s'exerce pas seulement par rapport au seul texte constitutionnel »119, mais plutôt à tout le « bloc de constitutionnalité »120 dont le Conseil constitutionnel se trouve être le garant121. Abdoulaye SOMA qualifie d'ailleurs le contrôle de constitutionnalité d'un examen des actes pris sous la juridiction de l'Etat aux normes du bloc de constitutionnalité122. Maria Nadège SAMBA-VOUKA elle, définira même le contrôle de constitutionnalité comme un mécanisme qui permet au juge de vérifier la conformité de la loi à la Constitution et au bloc de constitutionnalité123. Ainsi, les normes internationales, après avoir été au départ exclues124, font aujourd'hui partie du bloc de constitutionnalité qui est en perpétuelle extension125.

En somme, la Constitution burkinabè reconnaît la valeur constitutionnelle de son préambule, lequel énonce son attachement à un certain nombre de normes et de conventions internationales formant ainsi le bloc de constitutionnalité. Outre ces normes de référence, il est tout aussi important de connaître la nature exacte de la norme pouvant être contestée sur exception d'inconstitutionnalité.

B. La nature de la norme contrôlée

Il s'agit pour l'essentiel de la norme pouvant être attaquée par le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité. Le Burkina Faso, dans sa première consécration de l'exception d'inconstitutionnalité126, n'avait pas du tout précisé la nature de la norme contre laquelle ce grief pouvait être opposé. En effet, à la lecture combinée des articles 25 de la loi organique n°011-2000/AN précitée et 58 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel, il

118 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2017-013/CC du 09 juin 2017 précédemment citée.

119 Dominique CHAGNOLLAUD, Droit constitutionnel contemporain, Paris, Dalloz, 2013, 7ème édition, p. 74.

120 Cette notion désigne, à tort ou à raison, l'ensemble des règles et principes à valeur constitutionnelle sur lesquels s'exerce le contrôle de conformité du juge constitutionnel.

121 Bernard CHANTEBOUT, Droit constitutionnel et science politique, Paris, Dalloz, 1999, 16ème édition, p. 607.

122 Abdoulaye SOMA, « Modélisation d'un système de justice constitutionnelle pour une meilleure protection des droits de l'Homme : trans-constitutionnalisme et droit constitutionnel comparé », RTDH, 2009, Vol.20, n°78, pp. 437-466.

123 Maria Nadège SAMBA-VOUKA, « La saisine des juridictions constitutionnelles dans le nouveau constitutionnalisme en Afrique : les cas du Bénin et du Congo », Op.cit., pp. 54-71.

124 V°. Conseil constitutionnel français, DCC n°74-54 D.C du 15 janvier 1975.

125 Bachir YELLES CHAOUCHE, Le Conseil constitutionnel en Algérie, Alger, OPU, 1999, p. 72.

126 Article 25 de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 sur le Conseil constitutionnel.

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n'y a aucune clarté sur la nature véritable de la norme contrôlée. Il ressort de ces dispositions que « Lorsqu'une exception d'inconstitutionnalité est soulevée par un justiciable devant une juridiction, quelle qu'elle soit, celle-ci est tenue de surseoir à statuer et de saisir le Conseil constitutionnel qui doit se prononcer sur la constitutionnalité du texte en litige dans le délai d'un (1) mois qui court à compter de sa saisine par la juridiction concernée »127. Ainsi, l'expression « texte en litige » employée par ces articles peut être perçue comme un « fourre-tout » pouvant englober tout texte quelle qu'en soit la nature. Mais, depuis 2012, le champ des actes soumis au contrôle de constitutionnalité par voie d'exception en droit burkinabè est particulièrement réduit et précis. Hans KESLSEN recommandait à ce titre une grande prudence avant de faire rentrer dans le champ des actes soumis à la justice constitutionnelle « un acte public »128. Il fallait, selon lui, veiller à éviter une confusion entre constitutionnalité et légalité129.

Enclin à cette prudence, le Burkina Faso a désormais cantonné l'exercice de l'exception d'inconstitutionnalité uniquement aux dispositions de nature législative130. Autrement dit, l'exception d'inconstitutionnalité ne peut être dirigée que contre une loi. Le Conseil constitutionnel n'est que « juge de la loi »131. Cela est notable avec l'article 157, alinéa 2 de la Constitution qui prévoit que « En outre, tout citoyen peut saisir le juge constitutionnel sur la constitutionnalité des lois »132. Seule la loi peut donc être attaquée suivant la voie de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso. Par ailleurs, les ordonnances peuvent être attaquées en exception d'inconstitutionnalité. En effet, dans le cadre de la règlementation constitutionnelle133, les ordonnances donnent lieu à la production d'actes normatifs équivalant à la loi134, aussi bien en ce qui concerne leur force active et passive qu'en ce qui concerne le

127 L'article 25 de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 portant composition, organisation, fonctionnement, attributions et procédure suivie devant le Conseil constitutionnel et l'article 58 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel sont libellés dans les mêmes dispositifs.

128 L'acte public est mis ici pour qualifier tous les actes de nature règlementaire, c'est-à-dire les actes administratifs au nombre desquels se trouvent les décrets et les arrêtés.

129 Hans KELSEN, « La garantie juridictionnelle de la Constitution », RDP, 1928, p. 230.

130 Article 157 al.2 de la loi constitutionnelle n°033-2012/AN du 11 juin 2012 portant révision de la Constitution utilise l'expression « disposition législative ».

131 Philippe BLACHER, Le droit constitutionnel, Paris, Hachette, 2015, 3ème édition, p. 39.

132 Loi constitutionnelle n°072-2015/CNT du 5 novembre 2015 portant révision de la Constitution.

133 Luis-Maria DIEZ-PICAZO, « Actes législatifs du Gouvernement et rapports entre les pouvoirs : l'expérience espagnole », RFDC, n°32/1997, pp. 727-744.

134 Livio PALADIN, « Actes législatifs du gouvernement et rapports entre les pouvoirs : l'expérience italienne », RFDC, n°32/1997, pp. 693-711.

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régime de leur contrôle135. Ces actes restent dans le champ d'action du juge constitutionnel136. C'est ce qui ressort notamment dans la décision du Conseil constitutionnel burkinabè du 15 mars 2019 sur le recours en inconstitutionnalité d'une ordonnance137. Dans cette décision, le juge constitutionnel a certes rejeté la requête du requérant mais n'a pas exclu la possibilité de formuler une exception d'inconstitutionnalité contre une ordonnance.

Certes, par principe, la justice constitutionnelle n'est pas chargée de contrôler la constitutionnalité des actes administratifs138, car l'inverse aboutirait à la dénaturation des droits des contentieux constitutionnel et administratif139. Cependant, la justice constitutionnelle, étant en dehors des pouvoirs étatiques traditionnellement connus, doit pouvoir assurer le respect de la Constitution dans tous les domaines. Quoi qu'il en soit, au Burkina Faso, l'article 152 de la Constitution a clairement limité le domaine de compétence de la juridiction constitutionnelle en disposant que « Le Conseil constitutionnel est l'institution compétente en matière constitutionnelle et électorale. Il est chargé de statuer sur la constitutionnalité des lois, des ordonnances ainsi que la conformité des traités et accords internationaux avec la Constitution »140. Dès lors, le contrôle des actes administratifs est exclu de ses compétences. Tout de même, le constituant burkinabè aurait pu accorder ce pouvoir au Conseil constitutionnel, car, qui d'autre qu'un juge constitutionnel pour dire le droit constitutionnel ? Encore faut-il que le contrôle de constitutionnalité par voie d'exception soit véritablement opérant au Burkina Faso.

Section II : Un mécanisme longtemps rendu inopérant

Le caractère opérant de l'exception d'inconstitutionnalité est consubstantiel à son effectivité. Même si l'exception d'inconstitutionnalité est effectivement consacrée au Burkina Faso, il y a lieu de déplorer sa non-utilisation par les justiciables (§1). Cet état de fait est sans

135 Alessandro PUZZORUSSO, « Actes législatifs du gouvernement et rapports entre les pouvoirs : aspects de droit comparé », RFDC, n°32/1997, pp. 677-697.

136 Louis FAVOREU, « Le pouvoir normatif primaire du Gouvernement en droit français », RFDC, n°32/1997, pp. 713-726.

137 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2019-002/CC sur l'inconstitutionnalité d'une ordonnance.

138 Placide MOUDOUDOU, « Réflexion sur le contrôle des actes réglementaires par le juge constitutionnel africain : cas du Bénin et du Gabon », Annales de l'Université Marien NGOUABI, 2011-2012 ; 12-13 (3), pp. 65-91.

139 Ibidem.

140 Article 157 al.1 de la Constitution burkinabè du 02 juin 1991.

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doute la résultante du faux départ de la Cour de cassation et du Conseil constitutionnel (§2) dans la première mise en oeuvre du mécanisme.

§1 : L'utilisation insuffisante du mécanisme par les justiciables

Le non recours par les justiciables au mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité serait dû à leur manque de confiance à l'égard de la juridiction constitutionnelle (A). Mais, il y a lieu de se demander aussi pourquoi les avocats n'y font pas recours (B).

A. Le manque de confiance des justiciables au Conseil constitutionnel

L'incrédulité se traduit par le manque de confiance des justiciables au Conseil constitutionnel. Ce manque de confiance est la résultante du mode de désignation141 de ses membres. Cela, d'autant plus que ceux-ci méconnaissent généralement qu'ils ont « un devoir d'ingratitude » envers ceux qui les ont nommés142. Dès lors, bien que la justice constitutionnelle soit considérée par beaucoup d'auteurs comme le « rempart légitime »143 des citoyens, ceux-ci la perçoivent comme une institution politisée144, un partenaire loyal du pouvoir politique145. Ce qui confirme le point de vue de Delphine Emmanuel ADOUKI pour qui « ...le juge constitutionnel africain n'est qu'« un pouvoir d'Etat »146, institué par la Constitution et assujetti au pouvoir politique, qui préside à sa désignation, au point d'en être totalement `'asservi» »147. Ainsi, pour la plupart des citoyens, le juge constitutionnel se présente comme une des facettes de l'expression du pouvoir politique148 et ne résout que des questions politiques. Il ne serait rien

141 Abraham Hervé DIOMPY, « Les dynamiques récentes de la justice constitutionnelle en Afrique francophone », Revue Electronique Afrilex, février 2014, 31 p.

142 Robert BADINTER, s'inspirant de l'expression utilisée par Thomas MORE, rappelle en 1986 dans son allocution devant le Conseil constitutionnel français que les juges constitutionnels ont un devoir d'ingratitude envers le pouvoir de nomination. Oui le devoir d'ingratitude parce que le Conseil constitutionnel est un contrepouvoir au pouvoir qui le nomme.

143 Théodore HOLO, « Emergence de la justice constitutionnelle », Revue Pouvoirs, 2009/2, n°129, pp. 101-114.

144 Babacar GUEYE, « La démocratie en Afrique : succès et réticences », Op.cit., pp. 5-26.

145 Placide WenneGoundi ROUAMBA, « Réflexion critique sur la « doctrine » des juridictions constitutionnelles en Afrique noire francophone : le cas du Burkina Faso », RBD, n°50-2ème semestre, 2015, pp. 197-229.

146 Delphine Emmanuel ADOUKI, « Contribution à l'étude de l'autorité des décisions du juge constitutionnel en Afrique », RFDC, n°95-2013/3, pp. 611-638.

147 Ibidem.

148 Ibidem.

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d'autre qu'un juge électoral149. D'ailleurs, pour François LUCHAIRE, la saisine des particuliers devrait se résumer au seul contentieux des élections150. Cette méfiance de la population explique la rareté de la saisine du juge constitutionnel d'autant plus qu'en vingt (20) ans, la fréquence du recours en exception d'inconstitutionnalité laisse encore à désirer au Burkina Faso. En effet, depuis sa toute première consécration en 2000151 à aujourd'hui, l'exception d'inconstitutionnalité n'a pu être actionnée qu'à quelque neuf (9) occasions seulement152, si bien que certains observateurs la qualifieraient de droit illusoire153. Le constat de la méfiance de la population burkinabè à l'égard du juge constitutionnel a été fait par Salifou SAMPINGBO qui avait déclaré que « le public perçoit généralement le travail du juge constitutionnel à travers les proclamations des résultats des élections alors que d'autres attributions sont dévolues au juge constitutionnel »154. Ainsi, le prétoire du juge ressemblerait à « une scène théâtrale dont les rideaux tombés à la fin de la représentation, restaient fermés jusqu'à la prochaine échéance électorale »155. Cette mauvaise presse du Conseil constitutionnel156 burkinabè constitue son « péché originel »157. Par ailleurs, ce manque de confiance à l'égard de la juridiction constitutionnelle serait dû à une inculture juridique de la population burkinabè158. En effet, au Burkina Faso, l'écrasante majorité des conflits continue de se régler en dehors du prétoire des juges159. Or, l'accès du citoyen au juge constitutionnel est conditionné par l'accès au juge ordinaire.

149 Philippe BELLOIR, La Question Prioritaire de Constitutionnalité, Paris, l'Harmattan, 2012, 1ère édition, p. 28.

150 François LUCHAIRE, « La saisine du Conseil constitutionnel et ses problèmes », RDP, n°4-2001, pp. 141-155.

151 Consécration intervenue à travers la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000.

152 Il s'agit des décisions suivantes : DCC n°2007-04/CC du 29 août 2007 ; DCC n°2016-08/CC du 12 juillet 2016 ; DCC n°2017-013/CC du 9 juin 2017 ; DCC n°2018-007/CC du 20 mars 2018 ; DCC n°2019-001/CC du 12 février 2019 ; DCC n°2019-002 du 15 mars 2019 ; DCC n°2019-015/CC du 23 juillet 2019 ; DCC n°2020-030/CC du 13 novembre 2020 ; DCC n°2021-006/CC du 08 février 2021.

153 Stéphane BOLLE, disponible en ligne sur l'adresse http://la-constitution-en-afrique.over-blog.com/article-16538693.html consulté le 22 avril 2020 à 10h32.

154 Salifou SAMPINGBO, Sidwaya n°6387 du lundi 23 Mars 2009, cité par Kader HAMIDOU GARBA, La protection des droits fondamentaux par le juge constitutionnel : cas du Burkina Faso et du Niger, Op.cit., p. 71.

155 Agnero Privat MEL, « La saisine du juge constitutionnel en Afrique francophone », RBD, n°52-1er semestre/2017, pp. 104-144.

156 Bernard CHANTEBOUT, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2006, 23ème édition, p. 546.

157 Ibidem.

158 CGD, Rapport sur la justice et l'Etat de droit au Burkina Faso, septembre 2011, Bibliothèque de l'Assemblée, p. 55. Voir dans le même sens André DROLET, Projet de rapport sur l'accès à la justice dans l'espace francophone : le rôle des parlements, Session de l'Assemblée Parlementaire de francophonie, Juillet 2015, p. 18. En outre, il faut ajouter que l'accès à la justice est conditionné par l'accès au droit. Voir dans ce sens Amina BALLA KALTO, « La problématique de l'accès à la justice au Niger », Revue Electronique Afrilex, juillet 2013, 29 p.

159 CGD, Rapport sur la justice et l'Etat de droit au Burkina Faso, Op.cit., p. 59.

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Contrairement au Burkina Faso, n'ayant pourtant été institué qu'en 2008160, le contrôle de constitutionnalité des lois a posteriori connaît, en France, un grand succès. En effet, depuis cette date, le Conseil constitutionnel français rend environ soixante-quinze (75) décisions QPC par an161. Ainsi, au 30 juin 2019, le Conseil constitutionnel français a rendu sept-cent-six (706) décisions QPC162. En onze années d'existence, la QPC aura été un véritable succès. C'est une « révolution juridique » selon Jean-Jacques URVOAS163.

Cet énorme fossé entre le Burkina Faso et la France dresse un constat alarmant quant à l'application de l'exception d'inconstitutionnalité dans le pays des hommes intègres164. De notre analyse, malgré sa double consécration à savoir constitutionnelle165 et législative166, le contrôle de constitutionnalité par voie d'exception demeure quasi-inexistant au Burkina Faso.

Qu'est-ce qui peut bien expliquer cette carence en saisine du juge constitutionnel de la part des justiciables ? Pourquoi les avocats n'y ont-ils pas recours ? C'est un point qui mérite réflexion.

B. L'inaction des avocats des parties au procès

Le recours en exception d'inconstitutionnalité est désormais largement ouvert aux citoyens167. Pourtant, il n'était, naguère, nullement prévu de donner à chaque citoyen le pouvoir de contester la constitutionnalité des lois168. C'est ce qui a poussé le doyen Georges VEDEL à affirmer que « la porte étroite » de la justice constitutionnelle est devenue « une porte ouverte »169. Et la justice constitutionnelle est censée être rendue au nom du peuple ! S'exclame Dimitri LOHRER170, parce que l'essentiel de l'exception d'inconstitutionnalité est de permettre

160 Date à laquelle la QPC a été introduite en France par la loi de révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

161 Statistiques disponibles en ligne sur l'adresse http://www.conseil-constitutionnel.fr consultée le 13 août 2020 à 12h48.

162 « Bilan statistique » disponible sur le site du Conseil constitutionnel français sur l'adresse précédemment citée.

163 Jean-Jacques URVOAS, Rapport d'information sur la question prioritaire de constitutionnalité, enregistré à la Présidence de l'Assemblée Nationale le 27 mars 2013.

164 Le pays des hommes intègres est l'appellation donnée à l'ex Haute Volta, actuel Burkina Faso.

165 Article 157 al.2 de la Constitution burkinabè du 02 juin 1991.

166 Article 25 de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 relative au Conseil constitutionnel.

167 Jean-Paul VALETTE, Droit constitutionnel, Paris, l'Harmattan, 2013, p. 65.

168 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2010, 9ème édition, p. 43.

169 Georges VEDEL, « L'accès des citoyens au juge constitutionnel. La porte étroite », La Vie Judiciaire, n°2344, 1991, pp. 1-14.

170 Dimitri LOHRER, La protection non juridictionnelle des droits fondamentaux, Thèse de Doctorat en droit public soutenue en date du 5 juin 2013 à l'Université de Pau et des Pays de l'Adour, p. 10.

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au peuple d'avoir son mot à dire sur les normes adoptées171 démocratiquement. Par ce mécanisme, il peut véritablement s'opposer à l'arbitraire du pouvoir, disaient Jean GICQUEL et Jean-Eric GICQUEL172. De ce fait, ce peuple doit prendre conscience de cet arc-en-ciel juridique173 et s'en servir au mieux. Mais, on ne peut s'empêcher de constater avec Isaac Yankhoba NDIAYE que même après son ascension constitutionnelle, ce mécanisme « reste peu connu et méconnu »174. En effet, le nombre de recours en exception d'inconstitutionnalité introduit à ce jour au Burkina Faso demeure dérisoire175. Cette insuffisance serait reprochable aux avocats des parties au procès qui oublient et/ou s'abstiennent de s'en prévaloir.

Au Burkina Faso, en France, comme ailleurs, ce sont les avocats qui actionnent généralement ce recours176. De ce fait, on peut légitimement se demander pourquoi, au Burkina Faso, les avocats des parties n'ont-ils pas assez souvent recours à l'exception d'inconstitutionnalité ? Pour l'essentiel, il est possible d'accuser une certaine inculture constitutionnelle des avocats. Selon notre opinion, les avocats, étant plus habitués aux contentieux et aux procédures devant les juridictions ordinaires, oublient de faire appel aux dispositions constitutionnelles en général et à l'exception d'inconstitutionnalité en particulier dans leurs différentes affaires. Pour Marthe FATIN-ROUGE STEFANINI, cela serait dû au fait que la formation des avocats a longtemps été orientée plus vers le droit conventionnel que le droit constitutionnel177. De ce fait, l'utilisation de l'instrument conventionnel est considérée comme plus aisée que le recours aux normes et à la jurisprudence constitutionnelle178. Ainsi préféreraient-ils soulever une exception d'inconventionnalité179 qui reste dans le sillage de la

171 Marie-Anne COHANDET, Droit constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2015, p. 204.

172 Jean GICQUEL et Jean-Eric GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, Montchrestien, 2014, 28ème édition, p. 87.

173 Telle est la qualification donnée au droit constitutionnel en général et à l'exception d'inconstitutionnalité en particulier. V°. Jean GICQUEL et Jean-Eric GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Op.cit., p. 87.

174 Isaac Yankhoba NDIAYE, « L'accès à la justice constitutionnelle par le citoyen », Communication au 6ème Congrès de l'Association des Cours et Conseil constitutionnels ayant en partage l'usage du français, Marrakech, du 4 au 6 juillet 2012.

175 Seulement sept recours depuis la consécration du mécanisme en 2000 à nos jours.

176 Cela est dû au fait que les avocats sont les professionnels de droit qui maîtrisent sûrement le mieux les règles de procédure.

177 Marthe FATIN-ROUGE STEFANINI, « La question préjudicielle de constitutionnalité : étude du projet français au regard du droit comparé », Annuaire International de Justice Constitutionnelle, n°23, 2007, pp. 13-23.

178 Ibidem.

179 Jean-Louis DEBRE cité par Jean GICQUEL et Jean-Eric GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Op.cit., p. 119.

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compétence du juge ordinaire180 plutôt qu'une exception d'inconstitutionnalité181 qui est l'apanage d'un juge spécial182. En outre, cela serait lié au fait que la majorité des avocats s'intéressent plus au droit des affaires ou plus généralement au droit privé. Le droit public en général et le droit constitutionnel en particulier ne leur paraissant pas être d'un grand secours, les avocats manquent de se servir des moyens juridiques que leur offre la Constitution, oubliant que celle-ci est « la base de l'ordre juridique »183 dont dépend le droit privé. Ainsi, cette inculture constitutionnelle des avocats constitue l'un des plus grands obstacles au développement du mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso. Un tel constat nous conduit irrésistiblement à épouser la formule de Jean du Bois de GAUDUSSON selon laquelle, une « Constitution sans culture constitutionnelle n'est que ruine du constitutionnalisme »184. Il existe donc bel et bien, à la lecture d'Adama KPODAR, « une assimilation entre constitutionnalisme et droit constitutionnel »185.

Par ailleurs, si le caractère inopérant du mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso peut être imputable à sa non-utilisation par les justiciables, il est également possible d'accuser le faux départ des juridictions ordinaire (Cour de cassation) et constitutionnelle (Conseil constitutionnel) sur la première mise en oeuvre de l'exception d'inconstitutionnalité, ce qui aurait refroidi les ardeurs des justiciables.

§2 : Le faux départ des juridictions ordinaire et constitutionnelle

Certes, la fébrilité de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso peut s'expliquer par la non-saisine de l'opportunité de la part des justiciables. Mais, si les citoyens n'y ont pas recours, c'est en partie dû à la toute première attitude des juridictions ordinaire et

180 Voir les jurisprudences Cass., Ch. Mixte, 24 mai 1975 ; Société des cafés Jacques Vabre et CE., Ass., 20 octobre 1989, Nicolo.

181 Cette procédure est perçue comme étant plus complexe, plus lourde et plus lente dans la mesure où elle oblige le juge ordinaire à surseoir et à renvoyer la question à la juridiction constitutionnelle qui a trente jours pour statuer.

182 Voir les articles 157 al.2 de la Constitution du 02 juin 1991 et 25 de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 relative au Conseil constitutionnel.

183 Adama KPODAR, « Bilan sur un demi-siècle de constitutionnalisme en Afrique noire francophone », Revue Electronique Afrilex, Janvier 2013, 33 p.

184 Jean du Bois de GAUDUSSON, « Constitution sans culture constitutionnelle n'est que ruine du constitutionnalisme, poursuite d'un dialogue sur quinze années de `'transition en Afrique et en Europe, Démocratie et liberté : tension, dialogue, confrontation », In Slobodan MILACIC, Démocratie et liberté : tension, dialogue, confrontation, Mélanges en l'honneur de Slobodan MILACIC, Bruxelles, Bruyant, 2008, pp. 333-348.

185 Adama KPODAR, « Bilan sur un demi-siècle de constitutionnalisme en Afrique noire francophone », Op.cit., 33 p.

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constitutionnelle. La susceptibilité de la Cour de cassation (A) et le manque d'audace du juge constitutionnel (B) ont sans nul doute découragé les justiciables.

A. La susceptibilité décourageante de la Cour de cassation

Au terme de l'article 157 alinéa 2 de la Constitution burkinabè, en tant que partie au procès, le citoyen peut avoir accès au juge constitutionnel186, ce dernier étant détenteur du monopole de la vérification de la constitutionnalité des lois187. Selon Marilisa D'AMICO, ce sont les juridictions ordinaires qui entretiennent une relation directe avec le juge constitutionnel188. Celui-ci n'est saisi que par le juge du fond, ajoute Jean-Louis ESSAMBO KANGASME189. Ce qui lie le sort de l'exception d'inconstitutionnalité à l'humeur du juge ordinaire. En effet, il peut arriver que la juridiction ordinaire du fond refuse de donner suite à la requête du justiciable et ainsi refuser de transmettre la question190 exceptionnelle de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. Si l'exception d'inconstitutionnalité a produit ses effets ailleurs191, c'est assurément parce qu'elle est de plus en plus entrée dans « la conscience des justiciables et des tribunaux ordinaires »192. Or, le refus des juridictions ordinaires de saisir le juge constitutionnel sur l'exception d'inconstitutionnalité soulevée devant elles s'apparente assurément à un handicap freinant l'aboutissement de ce mécanisme.

En droit constitutionnel burkinabè, c'est la Cour de cassation qui s'était au départ montré hostile193 envers la procédure laissant, par là même, apparaître « les susceptibilités d'un système judiciaire jaloux »194 de la plénitude de compétence du juge constitutionnel. En effet, lors de la

186 Marilisa D'AMICO, « Juge constitutionnel, juges du fond et justiciables dans l'évolution de la justice constitutionnelle italienne », Op.cit., pp. 79-96.

187 Louis FAVOREU, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2019, 21ème édition, p. 291.

188 Marilisa D'AMICO, « Juge constitutionnel, juges du fond et justiciables dans l'évolution de la justice constitutionnelle italienne », Op.cit., pp. 79-96.

189 Jean-Louis ESSAMBO KANGASME, Le droit constitutionnel, Louvain-La-Neuve, l'Harmattan, 2013, p. 101.

190 Cela se fait, notamment en France, à travers une décision de non-renvoi des juridictions suprêmes des deux ordres juridictionnels à savoir le Conseil d'Etat et la Cour de cassation.

191 Nous faisons référence à la France notamment où il y a une forte production de jurisprudences rendues sur QPC, l'équivalent de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso. V°. Supra., p. 19.

192 Bianca SELEJAN-GUTAN, « L'exception d'inconstitutionnalité en Roumanie : instrument de protection des droits ou dilatoire ? », Revista Românâ de Drept Comparat, n°1-2012, pp. 65-79.

193 Comme le fera plus tard son homologue français avec des décisions de non-renvoi trois plus nombreuses que des décisions de renvoi. V°. Francis HAMON et Michel TROPER, Droit constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2014, 35ème édition, p. 741.

194 Elena-Simina TANASESCU, « L'exception d'inconstitutionnalité qui ne dit pas son nom ou la sémantique constitutionnelle roumaine », RIDC, Vol.65, n°4/2013, pp. 905-939.

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première mise en oeuvre de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso, le Premier Président de la Cour de cassation avait refusé le droit à l'exception d'inconstitutionnalité. Il s'agit de la tristement195 célèbre jurisprudence EROH196 rendue par le juge constitutionnel burkinabè. Dans cette affaire, la Société Etudes et Réalisations d'Ouvrages Hydrauliques (EROH) demandait à ce que le Conseil reconnaisse le bien-fondé de l'exception d'inconstitutionnalité qu'elle a soulevée sans succès devant le Premier Président de la Cour de cassation. Le requérant soutient que sa requête est recevable sur la base des articles 4 et 5 de la Constitution qui disposent que « tous les burkinabè et toute personne vivant au Burkina Faso bénéficient d'une égale protection de la loi. Tous ont droit à ce que leur cause soit entendue par une juridiction indépendante et impartiale » et que « tout ce qui n'est pas interdit ne peut être empêché » ; de l'article 25 de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 qui est libellé comme suit : « lorsqu'une exception d'inconstitutionnalité est soulevée par un justiciable devant une juridiction, quelle qu'elle soit, celle-ci est tenue de sursoir à statuer et de saisir le Conseil constitutionnel... ».

Malheureusement, le juge en charge de l'affaire avait refusé de faire le renvoi et de saisir le Conseil constitutionnel tel que commandé par cet article 25 de la loi organique ci-haut citée. Sur ce point, comme l'ont si bien écrit Francis HAMON et Michel TROPER, en refusant de faire passer le recours, le juge ordinaire s'est érigé en « juge constitutionnel négatif »197. Or, si la Constitution a spécialement chargé un organe du contrôle de la constitutionnalité des lois198, c'est qu'elle a voulu, par là même, maintenir dans ce domaine, l'incompétence des autres juridictions199. Pourtant, le juge de la Cour de cassation ne semblait pas de cet avis en empêchant que le contrôle de constitutionnalité « remonte »200 vers la juridiction constitutionnelle. Cela est contraire au principe de l'existence même d'une juridiction constitutionnelle spécialisée201. Il s'agit manifestement d'un zèle dont a fait preuve le juge ordinaire. Cela décourage encore plus les citoyens qui nourrissaient déjà une méfiance à l'égard

195 Ce sont les innombrables critiques formulées par certains auteurs, notamment les doctrinaires burkinabè envers cette jurisprudence qui en ont essentiellement fait la notoriété.

196 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2007-04/CC du 29 août 2007 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la société EROH.

197 Francis HAMON et Michel TROPER, Droit constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2014, 35ème édition, p. 741.

198 Article 152 de la Constitution burkinabè du 02 juin 1991.

199 Gérard CONAC et Didier MAUS (dir.), L'exception d'inconstitutionnalité, Nancy, Les éditions STM, 1990, p. 84.

200 Guillaume DRAGO, Contentieux constitutionnel français, Paris, PUF, 2011, 3ème édition, p. 72.

201 Francis HAMON et Michel TROPER, Droit constitutionnel, Op.cit. p. 741.

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du système de justice constitutionnelle202. Plus déplorable encore demeure le manque d'audace du juge constitutionnel burkinabè pour rappeler le juge ordinaire à l'ordre à travers sa décision.

B. La frilosité du juge constitutionnel

L'exception d'inconstitutionnalité rapproche la Constitution des citoyens203. Pour sa première mise en oeuvre au Burkina Faso, elle avait suscité beaucoup d'enthousiasme. C'était en effet l'occasion de mettre en oeuvre un mécanisme qui n'existait pas encore en France204. Mais, aussi surprenante soit-elle, la solution du Conseil constitutionnel burkinabè a été de rejeter cette requête de la société EROH en décidant que conformément à l'article 25 de la loi organique invoquée par le requérant, c'est la juridiction qui doit saisir le Conseil et qu'en l'espèce, ce n'est pas la juridiction qui a saisi le Conseil mais la partie qui a soulevé l'exception d'inconstitutionnalité, que dès lors, il sied de déclarer la requête irrecevable205.

Même si juridiquement correcte en la forme206, cette décision reste critiquable parce que de notre point de vue, la loi organique, en disposant que « celle-ci est tenue de sursoir à statuer et de saisir le juge constitutionnel », ne donne pas un autre choix au juge ordinaire que de solliciter l'intervention du juge constitutionnel. Mais, le juge constitutionnel burkinabè n'a pas daigné condamner cette méconnaissance par le juge ordinaire de son obligation. Ce qui a poussé certains auteurs à voir dans cette décision, une grande occasion manquée et à accuser un manque de courage du juge constitutionnel burkinabè207. Comment pouvait-on penser autrement ?

Ce constat bien qu'amer, n'est pas excessif, car la juridiction constitutionnelle burkinabè s'est limitée à une interprétation littérale208 de la loi organique qui régit l'exception d'inconstitutionnalité. Elle aurait pu refuser cette requête en la forme, mais par un obiter

202 V°. Supra., p. 20.

203 Denis BARABGER, Le droit constitutionnel, Paris, PUF, 2013, 6ème édition, p. 25.

204 En France, le comité Balladur avait semble-t-il essayé en vain d'introduire ce mécanisme jusqu'en 2008.

205 V°. Article 1er de la décision rendu par le Conseil constitutionnel burkinabè.

206 Augustin LOADA, Avis et Décisions commentés de la justice constitutionnelle burkinabè de 1960 à nos jours, CGD, 2009, p. 122.

207 Augustin LOADA, Avis et Décisions commentés de la justice constitutionnelle burkinabè de 1960 à nos jours, Op.cit., p. 122 et ss.

208 Ceci est malheureusement une habitude du juge constitutionnel burkinabè. V°. Séni Mahamadou OUEDRAOGO et Djibrihina OUEDRAOGO, « Libres propos sur la transition politique au Burkina Faso : du contexte au texte de la Charte de la transition », Revue Electronique Afrilex, février 2015, 28 p.

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dictum209 dont les Hautes Cours ont le secret du maniement, ouvrir une brèche pour le recours des justiciables210. Du point de vue de la doctrine burkinabè, « Cette dernière option aurait été la meilleure. L'exception d'inconstitutionnalité ouvrait des espoirs pour le développement de la justice constitutionnelle au Burkina Faso »211. Le juge constitutionnel burkinabè aurait pu agir comme son homologue béninois qui ne manque pas de censurer de façon constante les juges qui se prononcent sur l'opportunité de la question soulevée ou qui choisissent de ne pas lui renvoyer la question212. Par sa frilosité213, il venait de fermer les portes d'accès du contentieux constitutionnel burkinabè214, car c'est l'action citoyenne qui donne toute sa vitalité à la justice constitutionnelle215. La preuve en est qu'après cette première tentative, il aura fallu attendre neuf (9) années plus tard pour voir un nouveau recours en exception d'inconstitutionnalité être intenté au Burkina Faso216. Avec cette décision, le juge constitutionnel burkinabè n'a fait qu'accentuer les critiques déjà pesantes sur les juridictions constitutionnelles africaines. En effet, pour Babacar GUEYE, la faiblesse quantitative de la jurisprudence constitutionnelle est due au manque de hardiesse du juge constitutionnel qui s'enferme dans une conception minimaliste de ses prérogatives217. Au même titre que Dodzi KOKOROKO, nous nous interrogeons sur la raison qui pourrait amener cette institution, malgré la liberté dont elle dispose, à se limiter ou à agir dans un sens plutôt que dans un autre218.

Le Conseil constitutionnel aurait pu, par cette jurisprudence, se dégager de ce que Hugues PORTELLI appelle une « subordination au pouvoir politique »219 pour se rapprocher

209 Expression latine signifiant littéralement « soit dit en passant ». En droit procédural, opinion ou observation incidente faite par le juge qui, bien que se trouvant à l'intérieur de la décision rendue, ne constitue pas un raisonnement juridique justifiant celle-ci. Dès lors, l'obiter dictum n'a pas l'autorité de la chose jugée.

210 Stéphane BOLLE, Op.cit., ibidem.

211 Augustin LOADA, Avis et Décisions commentés de la justice constitutionnelle burkinabè de 1960 à nos jours, Op.cit., p. 123.

212 Ibrahim David SALAMI et Diane O. Melone GANDONOU, Droit constitutionnel et institutions du Bénin, Cotonou, Editions CEDAT, 2014, p. 380.

213 Cela, à l'inverse du juge constitutionnel béninois qui fait habituellement montre de grand courage. Voir dans ce sens l'article de Placide MOUDOUDOU, « Réflexion sur le contrôle des actes réglementaires par le juge constitutionnel africain : cas du Bénin et du Gabon », Annales de l'Université Marien NGOUABI, 2011-2012 ; 1213 (3) : pp. 65-91.

214 Augustin LOADA, Avis et décisions de la justice constitutionnelle burkinabè de 1960 à nos jours, Op.cit., p. 123.

215 Théodore HOLO, « Emergence de la justice constitutionnelle », Revue Pouvoirs, n°129-2009/2, pp. 101-114.

216 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2016-08/CC du 12 juillet 2016 sur l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 497°3 du code de procédure pénale ou affaire BADO Abdoulaye.

217 Babacar GUEYE, « La démocratie en Afrique, succès et réticences », Revue Pouvoirs, n°129-2009/2, pp. 5-26.

218 Dodzi KOKOROKO cité par Maria Nadège SAMBA-VOUKA, « La saisine des juridictions constitutionnelles dans le nouveau constitutionnalisme en Afrique », Op.cit., pp. 54-71.

219 Hugues PORTELLI, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2011, 9ème édition, p. 354.

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d'une véritable juridiction constitutionnelle220. Mais, le juge constitutionnel burkinabè nous aura laissé sur notre faim, tuant dans l'oeuf, par la même occasion, l'avenir de l'exception d'inconstitutionnalité en l'abandonnant « aux désidératas des juridictions ordinaires »221. On ne peut en effet s'empêcher de penser que cette attitude, ce premier faux départ de la Cour de cassation et du Conseil constitutionnel a découragé et refroidi les ardeurs des justiciables sur l'effectivité de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso. L'on se demande l'intérêt de consacrer un droit dont la jouissance n'est pas garantie222.

Le mécanisme instituant un moyen d'accès du citoyen-justiciable à la justice constitutionnelle au Burkina Faso souffre d'un autre mal qui est celui de sa qualification juridique erronée.

220 Ibidem.

221 Stéphane BOLLE, Op.cit., ibidem.

222 Guetwendé Gilles SAWADOGO, Les insuffisances de la Constitution burkinabè du 02 juin 1991, Mémoire de Licence soutenue à l'Université Privée de Ouagadougou, 2014. Disponible en ligne sur l'adresse https://www.memoireonline.com/11/17/10153/m-Les-insuffisances-de-la-constitution-burkinabe-du-02-juin-199119.html consulté le 12 septembre 2020 à 18h36.

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CHAPITRE II : UNE QUALIFICATION ERRONEE DU
MECANISME : UNE QUESTION PREJUDICIELLE PAR

NATURE

L'exception d'inconstitutionnalité était, au Burkina Faso, un mécanisme relativement complexe dans sa mise en oeuvre. Cette complexité est imputable à plusieurs facteurs. Ces facteurs sont d'ordre sociologique223 et juridique224. Par ailleurs, il faut noter plus précisément la complexité due à la nature même du mécanisme qui s'apparente plus à une question préjudicielle d'un type spécifique225 qu'à une exception d'inconstitutionnalité telle que conçue dans le Common Law226. En effet, « si le juge de l'action n'est pas le juge de l'exception, on ne saurait parler d'exception d'inconstitutionnalité », dira Isaac NDIAYE227. Il s'agirait d'un « big-bang juridictionnel »228, d'une question préjudicielle. Cette dernière est définie comme une question « qui oblige le tribunal à surseoir à statuer jusqu'à ce qu'elle ait été soumise à la juridiction compétente »229. Mais, au Burkina Faso comme dans d'autres pays de l'espace ouest africain230, la tendance est de qualifier la question préjudicielle d'exception d'inconstitutionnalité231. L'affirmation de la nature préjudicielle du mécanisme burkinabè réside dans le fait que la question est posée devant le juge ordinaire appelé aussi « juge a quo » (Section I) mais celle-ci est tranchée par le Conseil constitutionnel jouant le rôle du « juge a quem » (Section II).

223 Nous faisons référence à la non-utilisation du mécanisme par les citoyens-justiciables qui sont les premiers destinataires de ce droit. V°. Supra., p. 20.

224 La difficulté juridique se rapporte au fait que le justiciable se trouverait dans une impasse lorsque la juridiction du fond refuserait d'effectuer le renvoi, car celui-ci ne dispose d'aucune voie légale pour contraindre cette juridiction à s'exécuter.

225 Thierry Serge RENOUX, « L'exception telle est la question », RFDC, n°4-1990, pp. 651-658. Voir la distinction qui est faite entre la question préjudicielle proprement dite et la QPC sur le site https://www.conseil-constitutionnel.fr/nouveaux-cahiers-du-conseil-constitutionnel/qpc-textes-applicables-et-premieres-decisions consulté le 23 septembre 2020 à 22h28.

226 Aux Etats-Unis, l'exception d'inconstitutionnalité est tranchée par le juge devant lequel la question a été soulevée. Le contrôle de constitutionnalité est dit diffus ou décentralisé.

227 Isaac Yankhoba NDIAYE, « L'accès à la justice constitutionnelle par le citoyen », Communication au 6ème Congrès de l'Association des Cours et Conseil constitutionnels ayant en partage l'usage du français, Marrakech, du 4 au 6 juillet 2012.

228 Dominique ROUSSEAU, « La question préjudicielle de constitutionnalité : un big-bang juridictionnel ? », Revue du Droit Public et de la Science Politique, n°125/2009, p. 631.

229 Serge GUINCHARD (dir.), Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 2014, 21ème édition, p. 766.

230 Il en est ainsi du Niger et du Bénin qui ont également consacré l'expression « exception d'inconstitutionnalité » alors qu'il n'en est rien. Voir les articles 132.al 2 de la Constitution nigérienne et 122 de la Constitution béninoise.

231 Léon Kos'Ongenyi ODIMULA LOFUNGUSO, La justice constitutionnelle et la judiciarisation de la vie politique congolaise, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 130.

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Section I : Une question soulevée devant le juge ordinaire

Comme n'importe quelle exception de procédure soulevée devant le juge ordinaire, l'exception d'inconstitutionnalité doit respecter quelques exigences classiques (§1). Toutefois, au Burkina Faso, la procédure devant le juge ordinaire demeure remarquablement simplifiée (§2).

§1 : Un mode d'introduction classique de l'exception

Le caractère classique réside dans le fait qu'on ne peut soulever une exception d'inconstitutionnalité que dans le cadre d'un procès, c'est-à-dire uniquement à titre incident (A). Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que ce moyen peut être invoqué à n'importe quel moment de la procédure (B).

A. Un mécanisme intervenant à titre incident

L'exception d'inconstitutionnalité n'est pas un recours direct232. L'article 157 alinéa 2 de la Constitution burkinabè dispose que « tout citoyen peut saisir le Conseil constitutionnel sur la constitutionnalité des lois...par la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité invoquée dans une affaire le concernant devant une juridiction ». A la lecture de cette disposition, il ressort que c'est au cours d'une instance qu'un justiciable pourra soulever qu'une disposition législative est contraire à la Constitution233. Il s'agit d'un mécanisme tendant à introduire un contrôle incident de constitutionnalité des lois234. Pour Théodore HOLO, l'exception d'inconstitutionnalité est exclusivement réservée au justiciable235. Le mot justiciable signifie qu'il soit dans un litige236. De ce fait, l'exception d'inconstitutionnalité n'est

232 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2010, 9ème édition, p. 243.

233 Marie-Claire PONTHOREAU, Droit(s) constitutionnel(s) comparé(s), Paris, Economica, 2010, p. 373.

234 Alessandro PIZZORUSSO, « Un point de vue comparatiste sur la réforme de la justice constitutionnelle française », RFDC, n°4-1990, pp. 659-671.

235 Théodore HOLO, « Le citoyen, pierre angulaire de la justice constitutionnelle au Bénin », Communication au 6ème Congrès de l'Association des Cours et Conseil constitutionnels ayant en partage l'usage du français, Marrakech, du 4 au 6 juillet 2012.

236 Antoine MESSARA, « Le citoyen et la justice constitutionnelle : problème et aménagement à la lumière de l'étude de la Commission de Venise et en perspective comparée », Communication au 6ème Congrès de l'Association des Cours et Conseil constitutionnels ayant en partage l'usage du français, Marrakech, du 4 au 6 juillet 2012, p. 125.

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qu'une « parenthèse dans le procès », insiste Ibrahim SALAMI237. Ainsi, à l'inverse du contrôle a priori par voie d'action qui est abstrait, l'exception d'inconstitutionnalité est pour sa part un contrôle concret de la constitutionnalité des lois. Cela signifie qu'elle doit être soulevée, à peine d'irrecevabilité238, devant un juge ordinaire, dans « un cas concret en litige »239. Dès lors, seule une partie au procès peut soulever l'inconstitutionnalité d'une loi promulguée240. Tel est le principe du contrôle par voie d'exception241. Par ailleurs, le juge constitutionnel burkinabè a affirmé que seuls les justiciables ayant le statut de citoyen peut valablement soulever une exception d'inconstitutionnalité242. Ainsi, le citoyen burkinabè ne peut être lié au contentieux de la constitutionnalité des lois qu'en qualité de justiciable. En effet, pour Catherine CASTANO, l'exception d'inconstitutionnalité ne serait qu'une voie dérogatoire qui accorde aux citoyens la possibilité d'invoquer l'inconstitutionnalité d'une loi lors d'un procès243, et seulement au cours du procès. C'est aussi le point de vue de Pierre BON pour qui la question de constitutionnalité se pose à l'occasion d'un procès se déroulant devant le juge ordinaire244.

Le juge constitutionnel burkinabè n'est pas resté en marge de ces considérations. En effet, il va réaffirmer dans l'un des considérants de sa décision du 08 août 2019 « que le citoyen...ne peut saisir le Conseil constitutionnel sur la constitutionnalité d'une loi que par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité soulevée devant une juridiction dans une affaire le concernant... »245. Cette décision du Conseil constitutionnel fait de la nécessité d'un litige ordinaire246 une obligation préalable conditionnant sa saisine par le citoyen. Dès lors, contrairement à l'idée répandue, l'exception d'inconstitutionnalité « ne crée pas une saisine du Conseil constitutionnel par le justiciable, mais un simple renvoi par le juge » ordinaire247. Cela conforte l'idée selon laquelle au Burkina Faso, il s'agit plus d'une question préjudicielle de

237 Ibrahim David SALAMI, « Exception d'inconstitutionnalité et principe d'égalité au Bénin et au Congo », Revue Burkinabè de Droit, n°51-2ème semestre, 2016, pp. 9-41.

238 Philippe BELLOIR, La Question Prioritaire de Constitutionnalité, Paris, l'Harmattan, 1ère édition, p. 25.

239 Alec STONE, « Qu'y a-t-il de concret dans le contrôle abstrait aux Etats-Unis », RFDC, n°34/1998, pp. 227250.

240 Ibidem.

241 Guillaume DRAGO, Contentieux constitutionnel français, Paris, PUF, 2011, 3ème édition, p. 36.

242 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2020-030/CC du 13 novembre 2020 et DCC n°2021-006/CC du 08 février 2021.

243 Catherine CASTANO, « L'exception d'inconstitutionnalité : la contrainte du droit, la force du politique », RFDC, n°4-1990, pp. 631-649.

244 Pierre BON, « L'exception d'inconstitutionnalité en Espagne (Question de constitutionnalité) », RFDC, n°41990, pp. 679-683.

245 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2019-017/CC sur le recours en inconstitutionnalité de la loi n°044-2019/AN du 21 juin 2019 modifiant la loi n°025-2018/AN du 31 mai 2018 portant Code pénal.

246 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2010, 9ème édition, p. 243.

247 Thierry Serge RENOUX, « L'exception telle est la question », RFDC, n°4-1990, pp. 651-658.

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constitutionnalité adressée par le juge ordinaire au Conseil constitutionnel que d'une exception d'inconstitutionnalité. Sauf ce recours préjudiciel, la juridiction constitutionnelle ne connaîtra pas de la saisine des justiciables248. D'ailleurs, dans un système concentré de contrôle de constitutionnalité249, ce titre « exception d'inconstitutionnalité » paraît impropre et n'a été adopté que par facilité, dixit Louis FAVOREU250.

Par ailleurs, force est de constater que ce mécanisme, maladroitement appelé « exception d'inconstitutionnalité », pourra être soulevée à n'importe quel moment de la procédure.

B. Une requête introduite à tout moment de la procédure

Il y a lieu de préciser qu'au Burkina Faso, le moyen tiré de l'exception d'inconstitutionnalité devant le juge ordinaire est généralement introduit par un mémoire du requérant251. Toutefois, ce moyen peut aussi être soulevé oralement à l'audience par le justiciable252, c'est-à-dire en plein procès devant le juge du fond. Ainsi, au Burkina Faso, l'exception d'inconstitutionnalité peut être soulevée à n'importe quel moment de la procédure, devant n'importe quel juge, quel que soit le litige dont il est question253 et par n'importe laquelle des parties254. En effet, le législateur organique burkinabè n'ayant fait aucune spécification255, l'exception d'inconstitutionnalité devrait pouvoir être soulevée à tout moment et à toute hauteur de la procédure ou de débat256 quel que soit le litige en cause et peu importe la juridiction

248 Abdoulaye SOMA, « Modélisation d'un système de justice constitutionnelle pour une meilleure protection des droits de l'homme : trans-constitutionnalisme et droit constitutionnel comparé », Op.cit., pp. 437-466.

249 Dominique CHAGNOLLAUD, Droit constitutionnel contemporain, Paris, Dalloz, 2013, 7ème édition, p. 72.

250 Louis FAVOREU, « L'exception d'inconstitutionnalité est-t-elle indispensable en France ? », Les méthodes de travail des juridictions constitutionnelles, Annuaire International de Justice Constitutionnelle, n°8-1992, 1994, pp. 11-22.

251 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, DDC n°2019-015/CC sur l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 67 de la loi du 13 novembre 1996 portant code pénal. Dans cette décision, il ressort clairement que le requérant avait introduit le moyen tiré de l'exception d'inconstitutionnalité dans un mémoire soumis au juge du fond.

252 Voir le deuxième considérant de la décision du Conseil constitutionnel burkinabè dans sa décision du 13 novembre 2020 dans lequel il est transcrit que le requérant avait « soulevé oralement à l'audience, l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 53 de la loi sus-évoquée ». Lire aussi Ibrahim David SALAMI, « Exception d'inconstitutionnalité et principe d'égalité au Bénin et au Congo », RBD, n°51-2ème semestre, 2016, pp. 9-41.

253 Jean-Paul VALETTE, Droit constitutionnel, Paris, l'Harmattan, 2013, p. 66.

254 Ibrahim David SALAMI et Diane O. Melone GANDONOU, Droit constitutionnel et institutions du Bénin, Op.cit., p. 379.

255 Lire la loi organique n°011/2000/AN du 27 avril 2000 sur le Conseil constitutionnel.

256 Ibrahim David SALAMI et Diane O. Melone GANDONOU, Droit constitutionnel et institutions du Bénin, Op.cit., p. 379.

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ordinaire devant laquelle il est pendant257. L'exception peut dès lors être soulevée à tous les stades du procès, dès la prise de connaissance par les parties des textes applicables au litige258. Par ailleurs, contrairement à ce que laisse entendre l'article 157 alinéa 2 de la Constitution, l'exception d'inconstitutionnalité n'est pas réservée qu'au citoyen burkinabè. Le Conseil peut aussi accueillir les requêtes émanant des étrangers259.

Par contre, l'affirmation selon laquelle toutes les juridictions sont compétentes doit être nuancée260 notamment en droit comparé français. En effet, le législateur organique français a expressément prévu l'exclusion de certaines juridictions. D'abord, le moyen tiré de l'inconstitutionnalité est irrecevable devant le juge d'instruction. Si un tel moyen doit être présenté au cours d'une information judiciaire, seule la juridiction d'instruction du second degré est compétente261. De même, il est interdit de soulever la QPC devant les Cours d'assises262. Toutefois, les parties disposent de la faculté de soulever la QPC avant le procès devant la cour d'assises d'appel dans un écrit accompagnant la déclaration transmis à la Cour de Cassation263. Ensuite, pour d'autres juridictions, l'exclusion résulte du fait qu'elles ne relèvent pas des juridictions suprêmes. Tel est le cas du Tribunal des conflits qui ne relève ni du Conseil d'Etat ni de la Cour de cassation, mais est appelé à se prononcer sur la répartition des contentieux entre l'ordre judiciaire et l'ordre administratif. Le tribunal des conflits est donc exclu de la question prioritaire de constitutionnalité. De même, la Cour supérieure d'arbitrage, la Haute Cour chargée de juger le Président de la République ne peuvent recevoir une QPC264.

A propos de cette exclusion de la Cour d'assises du nombre des juges habilités à recevoir des questions de constitutionnalité, Alessandro PIZZORUSSO estime que « si l'on retient, comme on le fait en Italie et en France, qu'ils (les juges populaires) doivent être des juges aussi bien du droit que du fait, dans le cadre d'un collège mixte, on ne voit pas pourquoi on devrait leur interdire de participer à des décisions qui aboutissent à soulever des questions de

257 Relwendé Louis Martial ZONGO, « L'accès de l'individu au juge constitutionnel burkinabè », Op.cit., pp. 139164.

258 Mémorandum sur la loi organique relative à l'exception d'inconstitutionnalité au Maroc, Conseil National des Droits de l'Homme, Mars 2013, p. 4.

259 L'article 25 de la loi organique n°011/2000/AN du 27 avril 2000 sur le Conseil constitutionnel fait référence à « tout justiciable ». Ce qui, dès lors, intègre les étrangers se trouvant dans un contentieux sur le sol burkinabè.

260 Philippe BELLOIR, La question prioritaire de constitutionnalité, Paris, l'Harmattan, 1ère édition, 2012, p. 27.

261 Article 23-1 al.3 de la loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à la QPC.

262 Philippe BELLOIR, La question prioritaire de constitutionnalité, Op.cit., p. 27.

263 Article 23-1 al.4 de la loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009.

264 Philippe BELLOIR, La question prioritaire de constitutionnalité, Op.cit., p. 28.

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constitutionnalité »265. Ainsi, selon notre analyse, le système burkinabè serait le mieux adapté dans la mesure où il permet une participation inclusive de toutes les juridictions quelles qu'elles soient266 à la mise en oeuvre du contentieux de la constitutionnalité des lois à travers notamment le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité. En outre, force est de constater qu'au Burkina Faso, la procédure est d'une remarquable simplicité.

§2 : Une procédure remarquablement simplifiée

Au Burkina Faso, la loi n'est pas exhaustive sur la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité267. De ce point de vue, la simplicité de la procédure réside dans l'absence d'examen de la recevabilité de la requête (A) et de l'immédiate obligation de renvoi (B) du juge ordinaire.

A. Une absence d'examen de la recevabilité de la requête

Sur la recevabilité de l'exception devant le juge ordinaire, la législation burkinabè brille par son silence. En effet, au Burkina Faso, les conditions de recevabilité de la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité ne sont ni prévues par la Constitution ni par la loi organique sur le Conseil constitutionnel. Il s'agit là d'une « erreur digne d'un profane du droit qui a été commise par le législateur »268. Toutefois, cette omission, soit-elle intentionnelle ou pas, profite tout de même aux justiciables. Ainsi, à défaut de toute précision sur la question, la requête en exception d'inconstitutionnalité n'est soumise à aucune condition autre que celle de l'existence d'un procès encore moins à un contrôle préalable de la part du juge du fond.

Par contre, en droit comparé français, le juge ordinaire opère un contrôle de pertinence sur la requête en inconstitutionnalité269. Il s'agit d'un double filtrage tendant à la vérification de la recevabilité de la requête dont une première vérification par le juge du fond et une

265 Alessandro PIZZORUSSO, « Un point de vue comparatiste sur la réforme de la justice constitutionnelle française », RFDC, n°4-1990, pp. 659-671.

266 A la seule et unique condition de répondre à la qualité de juridiction. V°. Infra., pp. 39-40.

267 Augustin LOADA, Avis et Décisions commentés de la justice constitutionnelle burkinabè de 1960 à nos jours, Op.cit., p. 122.

268 Ibrahim David SALAMI et Diane O. Melone GANDONOU, Droit constitutionnel et institutions du Bénin, Op.cit., p. 380.

269 Ibidem.

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deuxième par la juridiction suprême de l'ordre concerné. Ainsi, pour le premier filtrage, pour que la QPC soit recevable, il faut que la disposition législative contestée ait un lien avec le litige270. Cela est une condition sine qua non pour sa recevabilité devant le juge ordinaire. Il faut que la décision au fond soit différente selon que la loi est inconstitutionnelle ou non271. Le recours sera donc déclaré irrecevable lorsque la norme contestée n'est pas applicable en l'espèce et si le demandeur à l'instance principale ne puisse pas obtenir satisfaction même en cas d'inconstitutionnalité de la norme contestée272. Dès lors, seule une QPC soulevée contre une loi directement applicable au litige273 demeure recevable devant le juge du fond. Celui-ci doit vérifier si la disposition contestée commande l'issue du procès274. A cet effet, Thierry Serge RENOUX écrivait que « Le moyen tiré de l'inconstitutionnalité d'une disposition législative ne peut être soulevée que lorsque la disposition contestée commande l'issue du litige, la validité de la procédure ou constitue le fondement des poursuites... »275. C'est seulement lorsque cette condition est remplie que le juge du fond pourra transmettre la question au juge suprême qui opèrera alors un second filtrage. La juridiction suprême elle, vérifiera si la question est nouvelle276 ou si elle présente un caractère sérieux277.

Il est clair qu'il existe, au regard de la procédure, une très grande différence entre le mécanisme burkinabè et celui français. Par ailleurs, ce refus d'accorder au juge ordinaire burkinabè la possibilité d'avoir un regard sur la recevabilité de la requête en exception d'inconstitutionnalité nous paraît appréciable au moins sur un double point de vue. D'abord, cela nous semble judicieux parce qu'il permet de garantir la célérité de la procédure278. En effet,

270 Article 23-2 de la loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution française.

271 Christian AUTEXIER, « L'exception d'inconstitutionnalité en droit allemand », RFDC, n°04-1990, pp. 672675.

272 Ibidem.

273 Philippe ARDANT et Mathieu BERTRAND, Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, LGDJ, 2013, 25ème édition, p. 94.

274 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2010, 9ème édition, p. 44.

275 Thierry Serge RENOUX, « L'exception telle est la question », Op.cit., pp. 651-658. Voir aussi la décision du Conseil constitutionnel français, DCC n°2010-1, QPC du 28 mai 2010.

276 Une question déjà tranchée par le juge constitutionnel ne saurait être recevable à moins qu'il y ait eu un changement de circonstances. V°. Conseil constitutionnel français, DCC n°2009-595 du 3 décembre 2009 sur l'application de l'article 61-1 de la Constitution. Voir aussi Mathieu BERTRAND et Michel VERPEAUX (dir.), L'autorité des décisions du Conseil constitutionnel, Paris, Dalloz, 2010, p. 25.

277 Article 23-4 de la loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à la QPC. Sur le caractère sérieux de la question, lire Christian AUTEXIER, « l'exception d'inconstitutionnalité en droit allemand », Op.cit., pp. 672-675.

278 Tandis qu'au Burkina Faso, lorsqu'une exception d'inconstitutionnalité est soulevée, le juge du fond doit effectuer sans attendre le renvoi au Conseil constitutionnel qui doit statuer dans un délai d'un (1) mois, en France, une QPC peut prendre plus de six (6) mois pour être vidée : trois (3) mois pour la juridiction suprême et trois (3)

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la requête passera du juge ordinaire au juge constitutionnel en moins de temps que s'il y avait un contrôle préalable de la requête comme c'est le cas en France. Ensuite, cela permettrait d'éviter que le juge ordinaire se substitue au juge constitutionnel parce qu'en procédant à un examen de la recevabilité de la requête, le juge ordinaire pourrait indirectement s'adonner à un véritable contrôle de constitutionnalité279. Comme l'a si bien expliqué Thierry SANTOLINI, il serait difficile pour les juges ordinaires de ne pas aborder « le fond » de la question d'inconstitutionnalité et d'empiéter aussi sur la compétence exclusive du juge constitutionnel280. Ainsi, le constitutionnalisme281 gagnerait mieux à maintenir cette procédure remarquablement simplifiée qui ne donne au juge ordinaire nul autre choix que de surseoir à statuer et d'effectuer le renvoi préjudiciel au Conseil constitutionnel.

B. Une obligation immédiate de renvoi préjudiciel

L'article 157, alinéa 2 de la Constitution du Burkina Faso dispose en des termes clairs « En outre, tout citoyen peut saisir le Conseil constitutionnel sur la constitutionnalité des lois, soit directement, soit par la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité invoquée dans une affaire qui le concerne devant une juridiction. Celle-ci doit surseoir à statuer jusqu'à la décision du Conseil constitutionnel qui doit intervenir dans un délai maximum de trente jours à compter de sa saisine ». Pour sa part, la loi organique relative au Conseil constitutionnel282 à son article 25 emploie l'expression « celle-ci est tenue de surseoir à statuer... ». Il ressort de ces deux dispositions que dès l'instant où une exception d'inconstitutionnalité aura été soulevée devant une juridiction, celle-ci doit immédiatement surseoir à statuer et saisir le Conseil constitutionnel. Le juge ordinaire se trouve dès lors en situation de compétence liée aussi bien pour le sursis à statuer que pour le renvoi283. Ainsi, on remarque qu'au Burkina Faso,

mois pour le Conseil constitutionnel (annoter que le juge du fond a 8 jours pour transmettre la QPC à la juridiction suprême). Cf., les articles 23-4 et 23-10 de la loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution française.

279 Thierry SANTOLINI, « La question prioritaire de constitutionnalité au regard du droit comparé », Revue Française de Droit Constitutionnel, n°93, 2013/1, pp. 83-105.

280 Ibidem.

281 Le constitutionnalisme est une théorie du droit qui insiste sur le rôle et la fonction de la Constitution dans la

hiérarchie des normes ainsi que sur le contrôle de constitutionnalité. Voir dans ce sens Théodore HOLO, « Emergence de la justice constitutionnelle », Revue Pouvoirs, n°129, 2009/2, pp. 101-114.

282 Loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 sur le Conseil constitutionnel.

283 Relwendé Louis Martial ZONGO, « L'accès de l'individu au juge constitutionnel burkinabè », Op.cit., pp. 139164.

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l'introduction d'un moyen d'inconstitutionnalité oblige le juge du fond à surseoir sans condition et à effectuer le renvoi préjudiciel.

Toutefois, on pourrait voir un certain manque de rigueur dans la formulation de la loi organique sur le Conseil constitutionnel qui s'est simplement limitée à disposer que la juridiction du fond « est tenue de surseoir à statuer ». En effet, le législateur organique, afin qu'il ne subsiste aucune ambigüité, aurait pu se montrer beaucoup plus rigoureux à l'image des législateurs organiques nigérien et béninois. A ce titre, la loi organique sur la Cour constitutionnelle du Niger dispose à son article 26 que « La juridiction devant laquelle l'exception d'inconstitutionnalité a été soulevée transmet immédiatement à la Cour constitutionnelle l'expédition ou, à défaut, l'attestation du jugement avant-dire-droit. Dans les cinq (5) jours, la personne qui a soulevé l'exception d'inconstitutionnalité saisit la Cour constitutionnelle par requête adressée à son président »284. Pour sa part, la loi organique sur la Cour constitutionnelle du Bénin précise que la juridiction devant laquelle l'exception d'inconstitutionnalité a été soulevée « doit saisir immédiatement et au plus tard dans les huit jours la Cour constitutionnelle et surseoir à statuer jusqu'à la décision de la Cour »285.

A l'évidence, les législateurs organiques nigérien et béninois se sont montrés beaucoup plus rigoureux que celui burkinabè sur l'obligation faite au juge ordinaire d'effectuer illico presto286 le renvoi préjudiciel dès qu'une exception d'inconstitutionnalité aura été soulevée devant lui. Mais, quoi qu'il en soit, cette obligation de renvoyer immédiatement la question au juge constitutionnel est aussi sous-entendue dans la formule consacrée par la loi organique sur le Conseil constitutionnel burkinabè. En effet, selon notre analyse, lorsque le législateur organique affirme que la juridiction « est tenue de surseoir » sans autre condition, il l'oblige par là même à s'exécuter immédiatement. C'est donc à tort que la Cour de cassation burkinabè s'était adonnée à un contrôle du caractère sérieux de la requête en exception d'inconstitutionnalité introduite dans l'affaire EROH287. La Cour affirmait que « l'exception soulevée l'est à des fins purement dilatoires et que le moyen tiré de ce chef n'a pas un caractère sérieux...et que le juge doit écarter tout moyen dilatoire »288. Sauf qu'il ne lui revenait pas

284 Loi organique n°2012-35 du 19 juin 2012 déterminant l'organisation, le fonctionnement de la Cour constitutionnelle du Niger et la procédure suivie devant elle.

285 Article 24 al.2 de la loi organique n°91-009 du 4 mars 1991 sur la Cour constitutionnelle du Bénin.

286 Expression tirée du latin illico et de l'italien presto qui signifie « immédiatement ».

287 V°. Conseil constitutionnel, DCC n°2007-04/CC du 29 août 2007 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la Société EROH.

288 V°. Ordonnance de référé n°11/2007/G.C/C.ASS du 05 juillet 2007.

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d'exercer un tel contrôle. Les conditions de recevabilité de la question sont laissées à la seule discrétion du Conseil constitutionnel.

Section II : Une question tranchée par le Conseil constitutionnel

Lorsqu'une exception d'inconstitutionnalité est soulevée devant une juridiction, celle-ci transmet la question au Conseil constitutionnel qui a compétence exclusive289 pour la trancher. Pour ce faire, il sied de rappeler qu'il y a eu une évolution dans le mode de saisine du juge constitutionnel (§1). Il nous paraît opportun d'évoquer également le déroulement de l'instance constitutionnelle (§2).

§1 : L'évolution du mode de saisine du Conseil constitutionnel

Au titre de l'évolution du mode d'introduction de la question de constitutionnalité au prétoire du juge constitutionnel, il y a lieu de retenir qu'au départ, seule une juridiction avait la compétence pour saisir le juge constitutionnel (A). Mais, désormais, les parties à une instance peuvent directement saisir le juge constitutionnel d'une exception d'inconstitutionnalité : c'est ce qu'il conviendrait d'appeler « une saisine directe par voie d'exception » (B).

A. L'exigence de la qualité de juridiction

En droit constitutionnel burkinabè, exception faite du cas de la saisine politique290, l'accessibilité du prétoire du juge constitutionnel n'a jamais été aisée. Il est vrai que l'exception d'inconstitutionnalité devait permettre aux justiciables d'accéder au juge constitutionnel. Mais, cette accession se fait par l'intermédiaire des juges ordinaires291. Toutefois, l'exception d'inconstitutionnalité peut être déclarée irrecevable pour de nombreuses raisons. En effet, la non reconnaissance du pouvoir de saisir le juge constitutionnel peut résulter de la nature même

289 L'exclusivité de la compétence du Conseil constitutionnel pour statuer sur la constitutionnalité des lois est tirée de l'article 152 al.1 de la Constitution du 02 juin 1991.

290 Il s'agit de la saisine a priori réservée aux personnalités citées à l'alinéa premier de l'article 157 de la Constitution du Burkina Faso.

291 Bertrand DE LAMY, « Les principes constitutionnels dans la jurisprudence judiciaire. Le juge judiciaire, juge constitutionnel ? », RDP, n°3-2002, pp. 780-820.

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de l'organe292 devant lequel le litige est en cours. Il s'agit des organes n'ayant pas la qualité de juridictions293. L'exclusivité du droit de saisine du juge constitutionnel est donnée aux seules juridictions. En effet, l'article 25 de la loi organique relative au Conseil constitutionnel dispose clairement que la juridiction devant laquelle l'exception d'inconstitutionnalité a été soulevée « est tenue de surseoir à statuer et de saisir le Conseil constitutionnel »294. Il ressort qu'une exception d'inconstitutionnalité ne peut être soulevée que devant un organe ayant la qualité de juridiction. Le juge constitutionnel burkinabè l'a très bien exigé dans sa décision n°2018-007/CC du 20 mars 2018295. Dans cette affaire, monsieur BIRBA Ousmane, conseiller à la Cour d'appel de Ouagadougou, est traduit devant le Conseil Supérieur de la Magistrature, statuant comme conseil de discipline, « pour faute professionnelle et manquement grave aux obligations liées à son statut ». Devant cette instance, il soulève l'exception d'inconstitutionnalité des articles 17 alinéa 2, et 30 de la loi organique n°049-2015/CNT du 25 août 2015 portant organisation, composition, attributions et fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature et 137 al. 2 de la loi organique n°050-2015/CNT du 25 août 2015 portant statut de la magistrature. Le conseil de discipline sursoit à statuer et saisit le Conseil constitutionnel sur décision n°2018-03/CSM/CD du 24 février 2018296. La solution du Conseil constitutionnel burkinabè a été de déclarer la requête de monsieur BIRBA Ousmane irrecevable aux motifs que, au terme de l'article 126 de la Constitution297, le conseil de discipline n'a pas le statut de juridiction et qu'aucune loi ne lui donne ce statut298, si bien qu'il n'a pas compétence pour faire le renvoi au Conseil. Ainsi, selon le Conseil constitutionnel burkinabè, l'exception d'inconstitutionnalité ne peut valablement être soulevée que devant la Cour de cassation, le Conseil d'Etat, la Cour des Comptes, le tribunal des conflits et les Cours et tribunaux institués

292 Philippe BELLOIR, La question prioritaire de constitutionnalité, Paris, l'Harmattan, 2012, 1ère édition, p. 28.

293 Il s'agit notamment des juridictions relevant de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif tel que prévu à l'article 126 de la Constitution burkinabè ou d'un organe ayant reçu la qualité de juridiction par une loi spéciale.

294 Article 25 de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 sur le Conseil constitutionnel.

295 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2018-007/CC du 20 mars 2018 sur le recours en exception d'inconstitutionnalité des articles 17 alinéa 2, et 30 de la loi organique n°049-2015/CNT du 25 août 2015 portant organisation, composition, attributions et fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature et 137, alinéa 2, de la loi organique n°050-2015/CNT du 25 août 2015 portant statut de la magistrature

296 C'est cette décision qu'on qualifie, en droit du contentieux constitutionnel, de « décision de renvoi ». Celle-ci conditionnait la recevabilité de l'exception devant le juge constitutionnel.

297 Selon cet article, les juridictions de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif au Burkina Faso sont : la Cour de cassation, le Conseil d'Etat, la Cour des Comptes, le tribunal des conflits et les Cours et tribunaux institués par la loi.

298 V°. Le 6ème considérant de la décision sus-évoquée.

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par la loi parce qu'étant les seuls organes ayant la qualité de juridictions au sens de la Constitution burkinabè299.

Par ailleurs, l'exception d'inconstitutionnalité doit être introduite par une décision de la juridiction devant laquelle elle a été soulevée300. Comme l'a si bien souligné Pierre BON, la logique voudrait que « la question d'inconstitutionnalité soit posée par les juges ou les tribunaux »301. Ces derniers sont de ce fait les véritables titulaires du pouvoir de saisir la juridiction constitutionnelle302. Dès lors, l'introduction de la requête devant le Conseil constitutionnel est déterminée par la décision de renvoi du juge a quo. Il en résulte qu' « en aucune manière » le juge constitutionnel ne peut être saisi par les parties303. Ainsi le Conseil constitutionnel a-t-il rejeté la demande du requérant qui l'avait saisi directement après le refus de la Cour de cassation dans l'affaire EROH304.

Toutefois, ce régime a évolué. Désormais, à la seule condition d'être en procès devant l'une des juridictions visées par l'article 126 de la Constitution, le justiciable peut saisir directement le Conseil constitutionnel d'une exception d'inconstitutionnalité.

B. La consécration d'une saisine directe par voie d'exception

Le contrôle de constitutionnalité en droit burkinabè s'était pendant longtemps limité au contrôle a priori par voie d'action et au contrôle a posteriori par voie d'exception. Mais, la révision constitutionnelle de 2015305 allait sonner le glas de ce régime restreint de saisine du juge constitutionnel. En effet, l'article 157 al. 2 de la Constitution dispose « ... En outre, tout citoyen peut saisir le Conseil constitutionnel sur la constitutionnalité des lois, soit directement, soit par la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité invoquée dans une affaire qui le concerne devant une juridiction... »306. Nombreux sont ceux qui ont applaudi cette nouvelle réforme, car le constituant burkinabè avait semblé consacrer une saisine directe du Conseil par

299 Article 126 de la Constitution du Burkina Faso du 02 juin 1991.

300 Eric NGANGO YOUMBIA, La justice constitutionnelle au Bénin, Paris, l'Harmattan, 2016, p. 381.

301 Pierre BON, « L'exception d'inconstitutionnalité en Espagne (question de constitutionnalité) », RFDC, n°41990, pp. 679-683.

302 Marilisa D'AMICO, « Juge constitutionnel, juges du fond et justiciables dans l'évolution de la justice constitutionnelle italienne », Annuaire International de Justice Constitutionnelle, n°5/1989, 1991, pp. 79-96.

303 Augustin LOADA, Avis et Décisions commentés de la justice constitutionnelle burkinabè de 1960 à nos jours, Op.cit., p. 122.

304 Décision n°2007-04/CC du 29 août 2007 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la société EROH.

305 Loi n°072-2015/CNT du 5 novembre 2015 portant révision de la Constitution du 02 juin 1991.

306 Article 157 al.2 de la Constitution burkinabè du 02 juin 1991 révisée courant 2015.

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le citoyen comme c'est le cas au Bénin307. Mais, le juge constitutionnel burkinabè ne l'entendait pas de cette oreille. Pour lui, cette saisine directe du citoyen consacrée par la Constitution est une saisine qui ne peut non plus intervenir qu'à l'occasion d'un cas concret en litige308. La saisine est conditionnée par l'existence d'un procès. Ainsi, le juge constitutionnel, dans sa décision du 09 juin 2017, a rappelé que « le citoyen ne peut valablement saisir directement le juge constitutionnel sur la constitutionnalité des dispositions d'une loi déjà promulguée que s'il est partie à une instance pendante devant une juridiction et au cours de laquelle les dispositions législatives attaquées ont étés invoquées pour lui être fait application »309.

C'est également ce qui ressort de sa décision n°2019-017/CC du 08 août 2019310. Dans cette dernière, quatre citoyens tous résidants à Ouagadougou ont, sur la base de l'article 157 alinéa 2 de la Constitution, saisi directement le Conseil constitutionnel pour voir déclarer l'inconstitutionnalité des dispositions de la loi n°044-2019/AN du 21 juin 2019 modifiant la loi n°025-2018 du 21 mai 2018 portant code pénal. Mais, interprétant cet article 157 de la Constitution, le juge constitutionnel décida que le citoyen « ne peut saisir le Conseil constitutionnel de la constitutionnalité d'une loi que par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité soulevée devant une juridiction dans une affaire le concernant, soit directement par lui-même soit par les diligences de cette juridiction »311. Plus récemment encore, le Conseil constitutionnel a réitéré cette position en déclarant irrecevable la requête introduite directement par cinq (5) citoyens pour l'inconstitutionnalité des articles modificatifs du code électoral312. Au regard des décisions sus-évoquées, cela était tout à fait prévisible, à moins que le Conseil constitutionnel ne se résolve à opérer « un demi-tour jurisprudentiel », a ironisé Ousséni ILLY313. Voilà à quoi se réduit donc la saisine directe du citoyen au Burkina Faso, une saisine directe certes, mais par voie d'exception.

307 Article 122 de la Constitution du Bénin.

308 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2017-014/CC du 09 juin 2017 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la loi sur la Haute Cour de Justice.

309 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2017-014/CC du 09 juin 2017.

310 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2019-017/CC du 08 août 2019 sur le recours en inconstitutionnalité de la loi n°044-2019/AN du 21 juin 2019 modifiant la loi n°025-2018 du 21 mai 2018 portant code pénal.

311 V°. Le septième considérant de la décision n°2019-017/CC du 08 août 2019.

312 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2020-024/CC du 16 octobre 2020 sur le recours de DICKO Harouna et quatre autres en inconstitutionnalité des dispositions des articles 50, 122.2, 148, 155 et 236 du Code électoral.

313 Propos tenus par le Professeur Ousséni ILLY lors de la journée d'étude sur « L'universalité du vote » organisée le 06 octobre 2020 par l'Institut de Recherche sur les Finances, les Investissements au service du Développement (IRFID) dans la salle de la réforme de l'Etat à l'ENAM.

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Pourtant, le constituant burkinabè nous avait paru bien décidé à consacrer la saisine directe du particulier indépendamment de tout procès, une saisine a posteriori et par voie d'action. En effet, quand on jette un regard sur le dispositif de l'article 122 de la Constitution béninoise, il ressort que le citoyen peut saisir le juge constitutionnel « soit directement soit par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité ». Il y a là, à première vue, une même écriture dans les Constitutions béninoise et burkinabè mais une interprétation différente de la part des juges constitutionnels béninois et burkinabè, étrangement. Selon Relwendé Louis Martial ZONGO, « c'est exactement comme si l'on retirait au citoyen-plaideur de la main gauche ce qu'on lui avait donné de la main droite, dans l'euphorie de la révision constitutionnelle de 2015 »314. Le juge constitutionnel burkinabè venait-il de torpiller un droit accordé par la Constitution aux citoyens ? Quoi qu'il en soit, le juge constitutionnel est la « bouche de la Constitution »315. La Constitution est ce que le juge dit qu'elle est. Le juge constitutionnel est « le seul dépositaire de la vérité constitutionnelle »316. C'est son rôle d'interpréter la Constitution pour préciser ou éclairer ses dispositions317. Il en est « l'interprète authentique »318 et son interprétation prévaut sur celle des doctrinaires319. Il a rendu sa décision et nous devons nous en tenir.

La bonne nouvelle tirée de cette décision controversée du juge constitutionnel burkinabè réside dans l'assouplissement de la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité. Cette décision consacre entre autres le dépassement320 de l'exigence de la qualité de juridiction pour saisir le juge constitutionnel. En affirmant que le citoyen ne peut directement saisir le Conseil constitutionnel que par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité, le juge constitutionnel burkinabè venait de soustraire l'exception d'inconstitutionnalité des désidératas des magistrats, juges du fond. Grâce à cette saisine directe par voie d'exception, le justiciable burkinabè n'a nul besoin de la bénédiction du juge chargé de trancher le litige au principal avant de faire entendre sa cause au prétoire du Conseil constitutionnel. L'exception d'inconstitutionnalité peut

314 Relwendé Louis Marial ZONGO, « L'accès de l'individu au juge constitutionnel burkinabè », Op.cit., pp. 139164.

315 Abdoulaye SOMA, « Le statut du juge constitutionnel africain », Op.cit., p. 451.

316 Marie-Claire PONTHOREAU, « Réflexions sur le pouvoir normatif du juge constitutionnel en Europe continentale sur la base des cas allemand et italien », Cahiers du Conseil Constitutionnel, n°24-2008, 8 p.

317 Dominique CHAGNOLLAUD, Droit constitutionnel contemporain, Paris, Dalloz, 2013, 7ème édition, p. 75.

318 Marie-Anne COHENDET, Droit constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2015, p. 204.

319 Robert Mballa OWONA, « L'autorité de la chose jugée des décisions du juge constitutionnel en Afrique francophone », in Oumarou NAREY (dir.), La justice constitutionnelle, Op.cit., p. 424.

320 En parlant du « dépassement » de l'exigence de la qualité de juridiction, nous faisons allusion au refus de recevoir la requête introduite directement par les parties au procès ordinaire. Ce dépassement ne concerne ainsi que les parties en litige. Un autre organe qui n'a pas la qualité de juridiction ne saurait saisir valablement le Conseil constitutionnel d'un recours préjudiciel en exception d'inconstitutionnalité.

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désormais être introduite devant le Conseil constitutionnel soit directement par le justiciable, soit par les diligences de la juridiction du fond321. Cela est une particularité du paysage constitutionnel burkinabè322. Toutefois, l'exception d'inconstitutionnalité sur saisine des parties au litige peut entraîner des perturbations dans le déroulement du procès323. Cela a été le cas notamment « dans l'affaire du Procès du dernier gouvernement Tiao. Dans cette affaire, c'est le Conseil constitutionnel qui, à travers une missive, avait informé la Haute Cour de Justice de sa saisine et l'avait enjoint à surseoir à statuer »324.

En tout état de cause, l'évolution du mode de saisine du juge constitutionnel burkinabè par la voie exceptionnelle facilitera aux justiciables l'accès au juge constitutionnel. Cette évolution leur permettra de ne plus être bloqués par le refus des juridictions ordinaires comme ce fut le cas dans l'affaire EROH. Ce qui est rassurant pour les justiciables qui se voient s'ouvrir davantage les portes325 de l'instance constitutionnelle.

§2 : Le déroulement de l'instance constitutionnelle

L'ouverture de l'instance constitutionnelle est actée dès le moment de l'introduction de la requête devant la juridiction constitutionnelle. La requête doit, sous peine d'irrecevabilité, obéir à une forme rigoureusement précisée (A). Il s'en suit une procédure contradictoire devant le juge constitutionnel (B).

A. L'introduction de la requête

Les développements sur l'introduction de la requête paraissent peu utiles, mais ils sont nécessaires pour une compréhension des lecteurs. En effet, l'introduction de la question exceptionnelle de constitutionnalité devant le Conseil constitutionnel burkinabè obéit à un

321 Théodore HOLO, « Le citoyen, pierre angulaire de justice constitutionnelle au Bénin », Communication au 6ème Congrès de l'Association des Cours et Conseil constitutionnels ayant en partage l'usage du français, Marrakech, du 4 au 6 juillet 2012.

322 Kader HAMIDOU GARBA, La protection des droits fondamentaux par le juge constitutionnel : cas du Niger et du Burkina Faso, Op.cit., p. 49.

323 Relwendé Louis Martial ZONGO, « L'accès de l'individu au juge constitutionnel burkinabè », RBD, n°59-1er semestre, 2020, pp.139-164.

324 Ibidem.

325 Francis DELPERE (dir.), Le recours des particuliers devant le juge constitutionnel, Paris, Economica, 1991, p. 18.

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certain nombre de conditions procédurales bien précisées par le règlement intérieur de cette juridiction326. Ce règlement intérieur précise que le Conseil constitutionnel est saisi par requête qui doit être enregistrée au greffe du Conseil327. Cela suppose que la requête soit nécessairement rédigée sous forme écrite328. Comme toutes les juridictions, le Conseil constitutionnel est très tatillon sur les formalités. Le manquement aux simples conditions de forme peut valoir rejet de la requête. Ainsi, à peine d'irrecevabilité, la requête doit être adressée au Président du Conseil constitutionnel et doit impérativement contenir les noms, prénoms, adresse et qualités du ou des requérants, le nom du ou des parties incriminées, ainsi que l'exposé des faits et des moyens invoqués329.

Le justiciable voulant saisir le Conseil constitutionnel directement par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité est donc tenu de respecter ces conditions tenant à la forme de sa requête. Etant donné la complexité de la procédure, il est prévu que le requérant puisse se faire assister par un conseil de son choix330. Il s'agit du ministère d'avocat. Au Burkina Faso, ce ministère d'avocat qui aurait bien pu être dissuasif pour la saisine par le citoyen331 reste facultatif332 contrairement à l'Egypte où il est obligatoire et au Togo où le cas de figure n'est même pas prévu333. Il s'agit là d'une volonté de faciliter au justiciable l'accès au prétoire du juge constitutionnel burkinabè. Cela est d'autant plus manifeste que l'article 45 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel précise que la procédure devant la juridiction est, entre autres, gratuite. Cela signifie que la requête est dispensée de tous frais d'enregistrement ou de timbre334.

Par ailleurs, si la question de constitutionnalité est introduite par les diligences de la juridiction du fond, les mêmes conditions demeurent de rigueur. En effet, dans sa lettre335 adressée au Président du Conseil constitutionnel, le juge qui effectue le renvoi doit prendre le

326 V°. Le règlement intérieur du Conseil constitutionnel burkinabè du 06 mars 2008.

327 Article 46 al.1 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel.

328 Article 45 al.1 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel.

329 Article 47 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel.

330 Article 46 al.2 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel.

331 Théodore HOLO, « Le citoyen, pierre angulaire de la justice constitutionnelle au Bénin », Communication au 6ème Congrès de l'Association des Cours et Conseil constitutionnels ayant en partage l'usage du français, Marrakech, du 4 au 6 juillet 2012.

332 Article 46 al.3 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel.

333 Abdelaziz BENJELLOUN, « La recevabilité des saisines » in ACCPUF, L'accès au juge constitutionnel : modalités et procédures, Deuxième congrès de l'ACCPUF, Libreville, 2000 p. 605.

334 Ibidem.

335 V°. La lettre n°2019-02/CPI du Président de la Chambre de Première Instance du tribunal militaire de Ouagadougou introduite au greffe du Conseil constitutionnel le 19 juillet 2019.

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soin de mentionner toutes les informations relatives à l'identité des parties au litige ainsi que les mémoires en écrit distinct et motivé336 de ces derniers. La motivation consiste à transcrire de manière précise et détaillée la disposition législative contestée ainsi que la norme à valeur constitutionnelle que ladite disposition législative a prétendument violée. D'ailleurs, à ce propos, le Conseil constitutionnel a eu à affirmer dans sa décision du 15 mars 2019337 que la disposition contre laquelle est soulevée une exception d'inconstitutionnalité doit être celle applicable au litige pendant devant la juridiction du fond. Dans cette affaire, le requérant, sieur ZERBO Jean Noël a intenté un procès devant le Tribunal administratif aux fins de l'annulation de l'arrêté n°2005-2825/MFPRE/SG/DGFP/DPE du 6 octobre 2005 qui l'a reclassé de la catégorie A3 à celle de A2 au lieu de A1. Par ailleurs, en date du 21 décembre 2018, l'intéressé introduit une requête devant le Conseil constitutionnel aux fins de déclaration en inconstitutionnalité de l'Ordonnance n°69-066/PRES/TPF/F du 28 novembre 1969 précisant l'incidence financière des reconstitutions de carrière dont peuvent bénéficier les fonctionnaires et agent temporaires de l'Etat. Le juge constitutionnel décida que « considérant qu'il ressort de l'examen de la procédure de saisine du Tribunal administratif de Ouagadougou, que l'Ordonnance n°69-066/PRES/TPF/F du 28 novembre 1969 n'est pas la disposition législative invoquée et pendante devant lui, décide qu'il sied de déclarer la requête du sieur ZERBO Jean Noel irrecevable »338. Avec cette décision, le juge constitutionnel burkinabè venait à son tour de consacrer l'obligation de correspondance entre la disposition législative contestée par voie d'exception et le procès a quo. Le justiciable ne peut invoquer l'inconstitutionnalité d'une loi par voie d'exception que si et seulement si cette loi lui est opposable339.

Quoi qu'il en soit, l'examen préliminaire des recours est confié à un rapporteur désigné par le président du Conseil. Celui-ci procède à l'instruction de l'affaire en vue d'un rapport écrit à soumettre au Conseil. Il entend, le cas échéant les parties. Il peut également entendre toute personne dont l'audition lui paraît opportune ou solliciter par écrit des avis qu'il juge nécessaires. Il fixe aux parties des délais pour produire leurs moyens soulevés et énonce les points à trancher340. Le rapport est déposé au secrétariat général qui le communique sans délai

336 Dominique ROUSSEAU (dir.), La Question prioritaire de constitutionnalité, Paris, Gazette du Palais, 2012, 2ème édition, p. 137.

337 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2019-002/CC sur la requête aux fins de déclaration en inconstitutionnalité de l'Ordonnance n°69-066/PRES/TFP/F du 28 novembre 1969 précisant l'incidence financière des reconstitutions de carrière dont peuvent bénéficier les fonctionnaires et agents temporaires de l'Etat.

338 V°. Le dernier Considérant de cette décision du Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2019-002/CC.

339 Bernard CHANTEBOUT, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2014, 31ème édition, p. 581.

340 Article 48 du Règlement intérieur du Conseil constitutionnel burkinabè.

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aux membres du Conseil. Il est lu à l'audience par le rapporteur. Tous ces éléments concourent à faire ressortir le caractère contradictoire dans la procédure devant le Conseil constitutionnel.

B : L'application du principe du contradictoire

Le constituant burkinabè place le Conseil constitutionnel au rang d'une simple « institution »341 ayant pour rôle la répartition des compétences entre les pouvoirs342. Ce qui ne laisse apparaître que son caractère politique. Mais, grâce au mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité, désormais, « un véritable procès constitutionnel s'ouvre »343. Par ailleurs, même si le procès constitutionnel présente certaines caractéristiques par rapport aux autres types de procès, il n'en demeure pas moins qu'il y a un procès lequel, dans les grandes lignes, reste conforme au modèle général344. Dès lors, comme dans toute procédure juridictionnelle, le principe du contradictoire demeure présent dans le contentieux constitutionnel et plus précisément dans la procédure de l'exception d'inconstitutionnalité. Ce principe du contradictoire est posé par l'article 45 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel qui dispose que « La procédure devant le Conseil constitutionnel est gratuite, écrite, et le cas échéant, contradictoire. Le caractère contradictoire de la procédure consiste en l'échange entre les parties, des écrits et des pièces ». En effet, cette possibilité pour les parties de présenter contradictoirement leurs observations345 implique non seulement qu'elles aient communication du mémoire des autres parties, mais aussi qu'elles soient mises en mesure d'y répondre346. Dès que le Conseil constitutionnel est valablement saisi d'une exception d'inconstitutionnalité, il avise le Président de la République, Le Premier Ministre et le Président de l'Assemblée qui peuvent lui adresser leurs observations347. Ainsi se profile l'image d'un face-à-face avec d'un côté les requérants qui exposent leurs griefs contre la loi en y soulevant les moyens d'inconstitutionnalité, de l'autre le gouvernement qui défend la loi, répond point

341 Article 152 de la Constitution du Burkina Faso.

342 Bernard CHANTEBOUT, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2014, 31ème édition, p. 573.

343 Stéphanie HENNETTE-VAUCHEZ et Diane ROMAN, Droits de l'Homme et libertés fondamentales, Op.cit., p. 224. Voir aussi Dominique ROUSSEAU, « Le procès constitutionnel », RP, n°137/2011/2, pp. 47-55.

344 Louis FAVOREU et alii, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2015, 17ème édition, p. 277.

345 Francis HAMON et Michel TROPER, Droit constitutionnel, Paris, LGDJ, 2011, 32ème édition, p. 837.

346 Louis FAVOREU et alii, Droit constitutionnel, 17ème édition, Op.cit., p. 277.

347 Stéphanie HENNETTE-VAUCHEZ et Diane ROMAN, Droits de l'Homme et libertés fondamentales, Paris, Dalloz, 2015, 2ème édition, p. 224.

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par point aux arguments de la saisine et conclut au rejet du recours ; entre les deux, le Conseil, instance tierce, qui statue au vu de cet échange d'arguments348.

Le paysage constitutionnel burkinabè est admirable d'autant plus qu'en Afrique francophone, malgré l'institution du mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité, certaines juridictions constitutionnelles restent fermées aux justiciables. A l'image du Tchad où le procès en constitutionnalité n'est pas contradictoire, les documents produits n'ayant qu'une valeur de renseignement, les parties n'ont aucun accès au prétoire, à aucune étape de la procédure349. Toutefois, au Burkina Faso, excepté en matière de contentieux électoral350, les séances du Conseil constitutionnel ne sont pas publiques et les intéressés ne peuvent pas demander à y être entendus oralement, vu le caractère écrit de la procédure. Néanmoins, si le Conseil estime les auditions nécessaires pour la manifestation de la vérité, il peut les ordonner351. Il ne reste plus qu'à franchir un dernier cap en tenant le procès en exception d'inconstitutionnalité en audience publique. Cela donnerait plus de légitimité aux décisions rendue par le Conseil constitutionnel.

348 Dominique ROUSSEAU, « Le procès constitutionnel », Revue Pouvoirs, n°137, 2011/2, pp. 47-55.

349 Gilbert KOLLY, « Le procès équitable », in ACCPUF, L'accès au juge constitutionnel : modalités et procédures, Deuxième congrès de l'ACCPUF, Libreville, 2000 p. 639.

350 Article 45 al.3 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel.

351 V°. L'article 48 du règlement intérieur du Conseil constitutionnel.

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Conclusion Partielle

Contrairement à la plupart des pays de l'Afrique francophone et même à la France, le Burkina Faso a très tôt amorcé son ascension vers un système de justice constitutionnelle ouvert aux citoyens. Ainsi, guidé par l'appel vers l'émancipation de son système constitutionnel, le Burkina Faso a entendu consacrer le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité comme un moyen d'accès à la justice constitutionnelle. Néanmoins, la consécration de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso aura été imbibée d'imperfections. Ces imperfections vont de l'insuffisance liée à sa constitutionnalisation tardive jusqu'à sa qualification erronée. Cette seconde insuffisance demeure la plus notoire. Cela, parce qu'il n'existe pas à proprement parler d'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso. Il s'agit plutôt d'une question préjudicielle de constitutionnalité352. En effet, deux critères permettent d'identifier une question préjudicielle : la compétence exclusive du juge a quem et le lien de dépendance stricte entre le procès principal et le procès incident353. Le mécanisme burkinabè respecte exactement ces deux critères. Il est donc erroné de le qualifier d'exception d'inconstitutionnalité. Ainsi, à défaut de consacrer une qualification particulière et originale354, le législateur organique aurait dû s'en tenir à l'appellation « question préjudicielle » qui se rapproche le plus du mécanisme burkinabè. Par ailleurs, la particularité du paysage constitutionnel burkinabè en la matière réside dans l'extraordinaire souplesse de la procédure. Celle-ci, en plus de n'exiger aucun contrôle de la requête de la part du juge a quo, se voit encore allégée par la consécration jurisprudentielle d'une saisine directe par voie d'exception. Cette nouveauté permet au justiciable de ne pas attendre que le juge du fond fasse le renvoi et de saisir lui-même le Conseil constitutionnel. Cela devrait faciliter la mise en oeuvre de ce mécanisme. Toutefois, il est à déplorer la non utilisation du mécanisme par ses destinataires que sont les citoyens justiciables. Cet état de fait soulève dès lors la question de son efficacité.

352 Relwendé Louis Martial ZONGO, « L'accès de l'individu au juge constitutionnel burkinabè », Op.cit., pp. 139164.

353 MAGNON Xavier, « La QPC est-elle une question préjudicielle ? », HAL/Archives ouvertes, https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01663454, consulté le 4 septembre 2020 à 12h26.

354 Comme ce fut le cas pour la France qui a innové en qualifiant le mécanisme de Question Prioritaire de Constitutionnalité.

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TITRE II : L'EFFICACITE PERCEPTIBLE DE
L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE AU
BURKINA FASO

L'exception d'inconstitutionnalité en droit constitutionnel burkinabè demeure un mécanisme dont l'effectivité355 est de nos jours encore à la traîne. Cela soulève la problématique de son efficacité. Cette efficacité de l'exception d'inconstitutionnalité doit s'apercevoir dans la production d'effets probants dans sa mise en oeuvre. Au regard de toutes les limites perçues au premier titre de cette étude, l'on pourrait légitimement s'interroger sur comment un mécanisme non effectivement appliqué par ses bénéficiaires peut s'avérer efficace. Cette efficacité ne peut s'appréhender que de manière anticipative et au regard des quelques décisions déjà rendues en la matière. En effet, on ne peut que se projeter l'image de l'efficacité de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso. Ainsi, l'exception d'inconstitutionnalité peut se présenter comme une réelle garantie pour la protection de l'Etat de droit (Chapitre I). Par ailleurs, à travers ce mécanisme, le juge constitutionnel peut ou pourra prétendre à une certaine légitimité (Chapitre II).

355 Au-delà de sa reconnaissance abstraite dans des textes de loi, il y a lieu de vérifier le caractère réel et concret du mécanisme.

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CHAPITRE I : L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE,
UNE GARANTIE POUR L'ETAT DE DROIT

L'Etat de droit « n'est généralement plus seulement un Etat de droit au sens formel, à savoir un Etat dans lequel chacun, y compris l'Etat, est soumis au droit. De nos jours, pour qualifier un Etat d'Etat de droit, on exige en outre qu'il soit un Etat de droit au sens matériel, ce qui signifie que les droits de l'Homme doivent y être reconnus et que leur respect doit être garanti notamment par un contrôle de constitutionnalité des lois »356. Ainsi, selon Patrice COLLAS, c'est l'exercice du contrôle de constitutionnalité des lois qui transforme un Etat en Etat de droit357. Il en est l'élément décisif358. Eric GOSSOJO lui, dira même que c'est le contrôle de constitutionnalité qui marque l'avènement de l'Etat de droit359. Les droits de l'Homme ont ainsi profondément bouleversé l'approche classique de l'Etat de droit360. Il faut donc protéger les individus des violations des droits fondamentaux, surtout celles émanant du législateur361. L'Etat de droit est une expression qui, aujourd'hui, fait facette362, chaque Etat s'en réclame363. Le Burkina Faso n'est pas resté en marge de cette prétention, car ayant institué un contrôle de constitutionnalité des lois notamment celui par voie d'exception. L'exception d'inconstitutionnalité est de ce fait un moyen de protection de l'Etat de droit à travers la protection des droits fondamentaux. Ces derniers étant des droits subjectifs, l'exception d'inconstitutionnalité s'avère dès lors être une manifestation de la subjectivation du contentieux constitutionnel (Section I). Toutefois, à travers les effets de l'exception d'inconstitutionnalité, on dénote un certain maintien du caractère objectif du contentieux constitutionnel (Section II).

356 Marie-Anne COHENDET, Droit constitutionnel, Op.cit., p. 202.

357 Patrice COLLAS, « Le contrôle de constitutionnalité en U.R.S.S », RDP, n°4-1990, pp. 1035-1053.

358 Hugues PORTELLI, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2015, 11ème édition, p. 30.

359 Eric GOSSOJO, « L'établissement d'un contrôle de constitutionnalité selon Catherine II de Russie et ses répercussions en France », RFDC, n°33-1998, pp. 87-99.

360 Marie-Pauline DESWARTE, « Droits sociaux et Etat de droit », RDP, n°4-1995, pp. 951-986.

361 Pierre PACTET et Ferdinand MELIN-SOUCRAMANIEN, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2017, 35ème édition, p. 74.

362 Léo HAMON, « L'Etat de droit et son essence », RFDC, n°4-1990, pp. 699-712.

363 Ibidem.

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Section I : Une subjectivation manifeste du contentieux
constitutionnel

La subjectivation du contentieux constitutionnel réside non seulement dans le fait que l'exception d'inconstitutionnalité demeure un moyen de protection pour les droits et libertés des individus (§1) mais aussi dans le fait qu'elle conduit à une appropriation de la Constitution par les justiciables (§2).

§1 : Un gage pour les droits et libertés individuels

Dans tout système juridique en général et au Burkina Faso en particulier, l'exception d'inconstitutionnalité se révèle être un moyen efficace pour la protection des droits fondamentaux (A) à telle enseigne qu'elle soit elle-même perçue comme un droit fondamental (B).

A. La protection affermie des droits fondamentaux

L'expression droits fondamentaux désigne simplement « les droits et les libertés constitutionnellement protégés »364, « ni plus ni moins »365. La protection de ces droits fondamentaux, à travers l'exception d'inconstitutionnalité, contribue au perfectionnement de l'Etat de droit366. Claude EMERI affirmait il y a quelques années déjà que l'Etat de droit, c'est la limitation du pouvoir au bénéfice des libertés individuelles367, car la société n'existe que par l'individu et pour l'individu368. Les droits fondamentaux des individus sont donc une composante essentielle369, le socle370 de l'Etat de droit. A ce titre, il faut protéger ces droits

364 Louis FAVOREU et alii, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2018, 20ème édition, p. 916.

365 Léon Dié KASSABO, « La protection des droits fondamentaux à l'épreuve de la lutte contre le terrorisme en droit international », RBD, n°55-Spécial, 2018, pp. 235-266.

366 Henri OBERDORFF, Droits de l'Homme et libertés fondamentales, Paris, LGDJ, 2011, 3ème édition, p. 237.

367 Claude EMERI, « L'Etat de droit dans les systèmes polyarchiques européens », RFDC, n°9/1992, pp. 27-41.

368 Jean GICQUEL et Jean-Eric GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Op.cit., p. 87.

369 Yves LEJEUNE, Droit constitutionnel belge. Fondements et institutions, Bruxelles, Larcier, 2014, 2ème édition, p. 279.

370 Jacques CHAVLIER, L'Etat de droit, Paris, Montchrestien, 2003, 4ème édition, p. 104.

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parce que « le but de toute association politique est la protection des droits naturels et imprescriptibles de l'homme »371.

Le Burkina Faso s'est lancé dans ce processus en consacrant l'exception d'inconstitutionnalité372. Ce contrôle juridictionnel de constitutionnalité « est d'une sollicitude pour les droits et libertés fondamentaux »373. La garantie juridictionnelle des droits fondamentaux se trouverait affaiblie sans droit d'accès au juge constitutionnel par les individus374. En effet, l'instauration d'un contrôle de constitutionnalité des lois par voie d'exception a pour objectif de renforcer une protection juridique375 et efficace376 des droits fondamentaux. Dès lors, l'objectif de l'exception d'inconstitutionnalité est la construction d'un Etat de droit crédible377. Ainsi, l'exception d'inconstitutionnalité serait le parachèvement de la vengeance du citoyen378 contre les lacunes liées au non-respect379 et à l'érosion des garanties380 des droits fondamentaux.

Dans beaucoup de législations, le contrôle a posteriori de constitutionnalité des lois n'est recevable que si la loi faisant grief porte atteinte à une liberté ou un droit fondamental. Il en est ainsi en France où une QPC ne peut valablement être soulevée que contre une disposition législative portant atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution381. Le Burkina Faso avait emboîté le pas à la France avec sa révision constitutionnelle intervenue en 2012 où l'article 157 alinéa 2 prévoyait que l'exception d'inconstitutionnalité n'a pour seul objet que de faire cesser une atteinte aux droits et libertés fondamentaux382. Toutefois, certains auteurs critiquent, à juste titre, cette volonté de réduire l'action du citoyen-justiciable devant le juge constitutionnel

371 Article 2 de la DDHC du 26 août 1789.

372 Loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 relative au Conseil constitutionnel.

373 Jean GICQUEL et Jean-Eric GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, LGDJ, 2015, 29ème édition, p. 231.

374 Relwendé Louis Martial ZONGO, « L'accès de l'individu au juge constitutionnel burkinabè », Revue Burkinabé de Droit, n°59-1er semestre, 2020, pp. 139-164.

375 Pascal MBONGO, « Droit au juge et prééminence du droit. Bréviaire processualiste de l'exception d'inconstitutionnalité », Recueil Dalloz, 2008, p. 2089.

376 Julien BOUDON, Manuel de droit constitutionnel. Tome 1. Théorie générale-Histoire-Régimes étrangers, Paris, PUF, 2015, p. 111.

377 Elena-Simina TANASESCU, « L'exception d'inconstitutionnalité qui ne dit pas son nom ou la nouvelle sémantique constitutionnelle roumaine », RIDC, Vol.65, n°4/2013, pp. 905-939.

378 Patrick WAFEU TOKO, « Le juge qui crée le droit est-il un juge qui gouverne ? », Les Cahiers de Droit, Vol.54, n°1/2013, pp. 145-174.

379 Olivier DUHAMEL et Guillaume TUSSEAU, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, Seuil, 2013, 3ème édition, p. 798.

380 Raymond COULON, Droits de l'Homme en peau de chagrin, Paris, l'Harmattan, 2000, p. 224.

381 Article 61-1 de la Constitution française et article 23-1 de la loi organique relative à la QPC.

382 V°. Loi constitutionnelle n°033-2012/AN du 11 juin 2012.

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à ses seuls droits subjectifs. Selon Ottavio QUIRICO, limiter l'exception d'inconstitutionnalité aux seuls droits fondamentaux exclut le citoyen du contrôle de la Constitution dans son ensemble383. Ce qui, à notre analyse, est trop réducteur dans la mesure où les citoyens ont tout aussi intérêt à ce que la Constitution dans son entièreté soit respectée.

Le constituant burkinabè va finalement opérer un changement et se départir du modèle français avec la réforme de 2015384. Ainsi, à l'issue de cette réforme, l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso peut être soulevée contre toute disposition législative contraire à la Constitution. Point n'est donc besoin que ladite disposition viole un droit fondamental de la personne humaine. Dès lors qu'elle est contraire à la Constitution, elle devient susceptible d'être attaquée par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité. Toutes les lois peuvent donc faire l'objet d'une exception d'inconstitutionnalité contrairement à la France qui reste dans l'exigence des lois portant atteinte aux droits fondamentaux385. Cette nouvelle réforme est propice à ce qu'il convient désormais d'appeler un « Etat de droit constitutionnel »386.

Quoi qu'il en soit, l'exception d'inconstitutionnalité est, au Burkina Faso, un puissant moyen mis à la disposition du justiciable pour une protection affermie de ses droits et libertés fondamentaux. Au regard de ses évolutions, l'exception d'inconstitutionnalité est ou serait elle-même en passe de devenir un droit fondamental.

B. L'exception d'inconstitutionnalité, un droit fondamental

Parmi les fonctions de la justice constitutionnelle, celle relative à la protection des droits fondamentaux est aujourd'hui mise en avant comme la forme la plus achevée de l'Etat de droit387. Dès lors, la question de la protection des droits fondamentaux de la personne humaine constitue la quintessence même d'un Etat de droit. Cet état de fait propulse les moyens de protection de l'Etat de droit au rang de principes fondamentaux d'importance capitale. A ce titre, l'exception d'inconstitutionnalité constitue le printemps de la protection des droits fondamentaux et par là même, garantit l'Etat de droit. Par analogie, l'exception

383 Ottavio QUIRICO, « Le contrôle de constitutionnalité français dans le contexte européen et international », EJLS, Vol.3, n°1/2010, pp. 77-98.

384 Loi de révision constitutionnelle n°072-2015/AN du 5 novembre 2015.

385 Article 61-1 de la Constitution française de 1958.

386 Jacques Djoli, ESENG'EKELI, Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, Paris, l'Harmattan, 2013, p. 36.

387 Guillaume DRAGO, Contentieux constitutionnel français, Op.cit., p. 64.

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d'inconstitutionnalité serait donc un mécanisme indispensable pour la prospérité de l'Etat de droit au Burkina Faso. Ce mécanisme serait même perçu comme un droit fondamental des citoyens388.

Par ailleurs, il est vrai que l'exception d'inconstitutionnalité n'est pas un droit reconnu à tous les citoyens, mais seulement aux justiciables, c'est-à-dire à ceux dont les droits pourraient être violés à cause de l'application d'une loi inconstitutionnelle. Mais, il n'en demeure pas moins un droit fondamental lorsqu'on s'adonne à la vérification empirique des éléments constitutifs des droits fondamentaux. En effet, leur caractère fondamental « dérive de leur constitutionnalité doublée de leur subjectivité et de leur justiciabilité »389. Sous ces trois critères, conditions et réserves, ces prérogatives constitutionnelles pourront être appelées indifféremment droits fondamentaux390. Ainsi, « les droits fondamentaux sont conçus comme l'ensemble des prérogatives, droits, libertés et principes, consacrés par la Constitution et invocables par l'individu à titre subjectif devant le juge constitutionnel »391.

Les conditions posées par cette doctrine ne sont nullement inaccessibles pour l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso. Ainsi, premièrement, l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso remplit la condition de constitutionnalité, car étant prévue par la Constitution du 02 juin 1991 notamment à son article 157 al.2. La constitutionnalité de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso n'est donc aujourd'hui plus à démontrer et ne pose plus aucune polémique392. Deuxièmement, l'exception d'inconstitutionnalité remplit la condition de subjectivité dans la mesure où un justiciable peut s'en prévaloir au cours d'un procès pour sauvegarder ses droits et intérêts. Théodore HOLO relevait déjà que l'exception d'inconstitutionnalité est « un contrôle subjectif » de constitutionnalité393. L'exception d'inconstitutionnalité serait donc un droit subjectif accordé aux justiciables, un droit qui leur permettrait de contester une loi en ce qu'elle porte atteinte à un droit fondamental ou plus globalement, en ce qu'elle soit contraire à la Constitution. Enfin, troisièmement, l'exception d'inconstitutionnalité se révèle être une cause qui est justiciable par

388 Marilisa D'AMICO, « Juge constitutionnel, juges du fond et justiciables dans l'évolution de la justice constitutionnelle italienne », Op.cit., pp. 79-96.

389 Abdoulaye SOMA, « La séparation des pouvoirs comme droit fondamental dans le constitutionnalisme contemporain », Revue électronique Afrilex, 2018, 26 p.

390 Ibidem.

391 Ibidem.

392 Pour rappel, au Burkina Faso, l'exception d'inconstitutionnalité était, au départ, posée dans la loi organique sur le Conseil constitutionnel. Mais depuis la révision constitutionnelle de 2012, l'exception d'inconstitutionnalité a été constitutionnalisée.

393 Théodore HOLO, « Emergence de la justice constitutionnelle », Op.cit., pp. 101-114.

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la juridiction constitutionnelle. La justiciabilité de l'exception d'inconstitutionnalité réside dans le fait qu'elle permet de porter le moyen tiré de l'inconstitutionnalité de la loi devant le Conseil constitutionnel qui tranchera ainsi sur la question de constitutionnalité.

Toutefois, pour d'autres auteurs à l'image de Dominique ZAMBO, la première condition à elle seule est suffisante pour garantir la fondamentalité de l'exception d'inconstitutionnalité394. En effet, selon lui, la Constitution, norme fondamentale, est le « siège normatif » des droits fondamentaux395 et apporte aux libertés leurs premières garanties396. De ce fait, dès lors que le constituant a entendu consacrer l'exception d'inconstitutionnalité dans le corpus du la norme fondamentale qu'est la Constitution, il a, par là même, entendu consacrer le caractère fondamental de ce mécanisme. La saisine du juge constitutionnel par le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité est sans conteste un droit fondamental du justiciable burkinabè.

A travers ce mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité, les justiciables n'hésiteront pas à solliciter directement la Constitution pour protéger leurs intérêts personnels et individuels.

§2 : Une appropriation de la Constitution par les justiciables

L'appropriation par les citoyens-justiciables de la norme constitutionnelle à travers le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité est rendue possible grâce à la normativité de plus en plus accrue de la Constitution (A). C'est en effet cette normativité de la norme fondamentale qui permet aux justiciables de faire appel à la Constitution pour protéger leurs intérêts personnels et individuels (B).

A. La normativité de la Constitution

L'évolution du droit constitutionnel contemporain en général et du droit constitutionnel burkinabè en particulier fait naître une nouvelle tendance, celle de la normativité de la Constitution. L'exception d'inconstitutionnalité demeure le mécanisme qui traduit le mieux

394 Dominique Junior ZAMBO, « Protection des droits fondamentaux et droit à la juridictio constitutionnelle au Cameroun : continuité et ruptures », La Revue des Droits de l'Homme (en ligne), n°15/2019, 36 p.

395 Ibidem.

396 Bernard STIRN, Les libertés en question, Op.cit., p. 9.

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cette normativité de la Constitution. Ce mécanisme consiste notamment à sanctionner le non-respect des principes à valeur constitutionnelle, des droits fondamentaux de l'Homme qui s'imposent de manière contraignante dans tout système juridique, dans tout Etat qui se réclame du nombre des Etats de droit. Cela s'avère être le propre de la normativité. En effet, la contrainte ou l'impérativité constitue l'élément distinctif de la norme397 et le trait spécifique de la normativité398. Ainsi, la Constitution est désormais perçue comme une règle devant être respectée dans toute sa substance au même titre que n'importe quelle autre règle juridique ayant une force exécutoire et contraignante. Elle est devenue normative dira-t-on. Ceci est dû au fait que la Constitution est de plus en plus considérée par moult doctrinaires comme une norme juridique399, une règle de droit400. Dès cet instant, la normativité de la Constitution n'est plus à contester401. En effet, la Constitution contient des règles directement applicables par les juges402 dans les contentieux relevant de leurs compétences. Au doyen FAVOREU d'ajouter que désormais « Toutes les normes constitutionnelles sont d'application directe et n'ont pas besoin du relais de la loi pour être rendue opérationnelles »403. Cela conduit indubitablement le droit constitutionnel à se départir des reproches le cantonnant à un simple contrôle institutionnel. Grâce à l'exception d'inconstitutionnalité, les règles constitutionnelles ne sont plus seulement des orientations générales ou des intentions politiques404. Désormais, la référence à la Constitution n'a pas pour seul intérêt de connaître l'organisation et le fonctionnement du pouvoir politique405. Le droit de la Constitution n'est plus seulement le droit des institutions politiques406. Il s'agit désormais d'un véritable droit, un droit juridictionnel qui est mis en oeuvre

397 Franc De Paul TETANG, « La normativité des constitutions des Etats africains d'expression française », RFDC, n°104-2015/4, pp. 953-978.

398 Ibidem.

399 Alexandra VIALA, « La question de l'autorité des décisions du Conseil constitutionnel », in Dominique ROUSSEAU (dir.), Le Conseil constitutionnel en question, Paris, l'Harmattan, 2004, p. 145.

400 Louis FAVOREU, « L'exception d'inconstitutionnalité est-elle indispensable en France ? », AJC, n°8-1992, 1994, pp. 11-22.

401 Boubacar BA, « Le préambule de la Constitution et le juge constitutionnel en Afrique », Revue Electronique Afrilex, janvier 2016, 36 p.

402 Bertrand de LAMY, « Les principes constitutionnels dans la jurisprudence judiciaire. Le juge judiciaire, juge constitutionnel ? », Op.cit., pp. 780-820.

403 Louis FAVOREU cité par Bertrand de LAMY, « Les principes constitutionnels dans la jurisprudence judiciaire. Le juge judiciaire, juge constitutionnel ? », Op.cit., pp. 780-820.

404 Bernard CUBERTAFOND, Le nouveau droit constitutionnel, Paris, l'Harmattan, 2008, p. 19.

405 Jacques MOREAU (dir.), Droit public. Tome 1. Théorie générale de l'Etat et Droit Constitutionnel. Droit administratif, Paris, Economica, 1995, 3ème édition, p. 211.

406 Louis FAVOREU, « La justice constitutionnelle en France », Les Cahiers de Droit, Vol.26, n°2/1985, pp. 301337.

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par la justice constitutionnelle. Ainsi, la Constitution « quitte l'étape métaphysique pour accéder à la positivité »407.

Rendre normative la Constitution, telle est, entre autres, le but de la justice constitutionnelle. Charles EISENMANN écrivait que « le sens de la justice constitutionnelle est de garantir la répartition de la compétence entre législation ordinaire et législation constitutionnelle (...) ; elle fait des règles constitutionnelles des normes juridiquement obligatoires, de véritables règles de droit en y attachant une sanction ; sans elle, la Constitution n'est qu'un programme politique, à la rigueur obligatoire moralement, un recueil de bons conseils à l'usage du législateur, mais dont il est juridiquement libre de tenir ou de ne pas tenir compte (...). La justice constitutionnelle transforme donc en normes véritablement juridiques ce qui seulement se voulait tel. La Constitution devient ainsi et ainsi seulement la règle de droit suprême »408. L'on voit dès lors se dessiner le « nouveau visage » du contentieux constitutionnel409.

L'exception d'inconstitutionnalité participe activement à l'instauration d'une Constitution à caractère normatif et contraignant. En effet, à travers ce mécanisme, le Conseil constitutionnel applique les règles constitutionnelles dans un cas précis en litige. La réponse du Conseil constitutionnel à la question posée par les justiciables déterminera l'applicabilité de la disposition législative qui fait grief, par rapport à la norme fondamentale qu'est la Constitution. C'est dans cet ordre d'idée que le Conseil constitutionnel burkinabè a bloqué, sur demande des requérants, l'application des articles 21 et 33 de la loi organique sur la Haute Cour de Justice, car ces articles violent les articles 1, 2 et 4 de la Constitution qui proclament le principe d'égalité devant les juridictions et le principe du double degré de juridiction ainsi que des principes généraux de droit à valeur constitutionnelle qui gouvernent tout procès juste et équitable410. Dès lors, force est de constater que cette normativité de la Constitution, devenue précise avec le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité, accentue le caractère subjectif du contentieux constitutionnel dans la mesure où les justiciables auront tendance à soulever l'exception dans le seul et unique but de protéger leurs intérêts personnels.

407 Jacques Djoli ESENG'EKELI, Droit constitutionnel. L'expérience congolaise, Op.cit., p. 44.

408 Charles EISENMANN cité par Dominique CHAGNOLLAUD, Droit constitutionnel contemporain, Op.cit., p. 71.

409 Guillaume DRAGO, « Le nouveau visage du contentieux constitutionnel », RFDC, n°84-2010/4, pp.751-760.

410 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, Décision n°2017-013/CC du 09 juin 2017 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la loi sur la Haute Cour de Justice.

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B. La protection d'intérêts personnels

Toute la critique autour de l'exception d'inconstitutionnalité est son caractère subjectif. Ce mécanisme tend à faire du contentieux constitutionnel un contentieux de plus en plus subjectif. Cela, dans la mesure où, l'exception d'inconstitutionnalité a une propension de sauvegarde des intérêts personnels et individuels des justiciables. D'ailleurs, sans intérêt direct et personnel, le justiciable ne saurait valablement soulever une exception d'inconstitutionnalité. En effet, lorsque l'article 157 al.2 de la Constitution du Burkina Faso précise que le citoyen ne peut soulever une exception d'inconstitutionnalité que « dans une affaire qui le concerne » directement, cela signifie que le droit à l'exception d'inconstitutionnalité est conditionné par un intérêt à agir du requérant411. Du point de vue d'Antoine MESSARA, cette condition de l'intérêt dans tout recours par voie d'exception est un principe général qui n'exige pas une disposition spécifique412.

La subjectivité de l'exception d'inconstitutionnalité se relève du fait que les citoyens ne soulèvent ce moyen que pour leur propre défense413. On assiste, selon l'expression d'Olivier DUHAMEL, à « une appropriation inédite de la Constitution par les citoyens »414. La Constitution n'est plus seulement l'affaire des pouvoirs publics415, elle devient la chose des citoyens pour servir leurs intérêts. Dominique ROUSSEAU nous indiquera à cet effet qu'avec l'exception d'inconstitutionnalité, « la Constitution est sortie de l'univers clos des facultés de droit pour entrer dans les prétoires »416. Dès lors, avocats et juges ont un intérêt professionnel à connaître le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité parce qu'il y va de l'intérêt du justiciable que soit soulevé le moyen de l'argument constitutionnel417. L'exception d'inconstitutionnalité serait alors encline à ne faire que l'objet des jeux d'intérêts. Ainsi, on est en droit de craindre un éventuel abus de droit à l'exception d'inconstitutionnalité418. Le cas échéant, comme l'a si bien démontré Bianca SELEJAN-GUTAN dans l'un de ses riches

411 Théodore HOLO, « Le citoyen, pierre angulaire de la justice constitutionnelle au Bénin », Op.cit., pp. 101-114.

412 Antoine MESSARA, « Le citoyen et la justice constitutionnelle : problème et aménagement à la lumière de l'étude de la Commission de Venise et en perspective comparée », Op.cit., ibidem.

413 Pierre PACTET et Ferdinand MELIN-SOUCRAMANIEN, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2006, 25ème édition, p. 77.

414 Olivier DUHAMEL, « La QPC et les Citoyens », Revue Pouvoirs, n°137-2011/2, pp. 183-191.

415 Gilles BADET, Les attributions originales de la Cour constitutionnelle du Bénin, Cotonou, FES, 2013, p. 182.

416 Dominique ROUSSEAU (dir.), La Question prioritaire de constitutionnalité, Paris, Gazette du Palais, 2012, 2ème édition, p. 1.

417 Ibid., p. 4.

418 Bianca SELEJAN-GUTAN, « L'exception d'inconstitutionnalité en Roumanie : instrument de protection des droits ou technique dilatoire ? », Op.cit., pp. 65-79.

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articles, « le grand succès de l'exception d'inconstitutionnalité » deviendrait alors « l'un de ses plus grands ennemis »419.

Par ailleurs, la manière relativement facile420 dont l'exception d'inconstitutionnalité peut être soulevée devant un tribunal ordinaire et surtout la suspension obligatoire du procès suite à un tel soulèvement, vont inéluctablement conduire à une situation paradoxale : « la transformation de l'exception, par certains justiciables, en technique dilatoire du procès, utilisée au seul but de tergiverser l'action principale »421. C'est en cela que le rôle de filtre des juridictions ordinaires422 permettrait de vérifier si l'exception est manifestement infondée. Mais avec la consécration jurisprudentielle d'une saisine directe par voie d'exception au Burkina Faso423, les justiciables ont le champ libre pour jouer au dilatoire au maximum de leurs intérêts personnels et parfois mesquins. Du moins, cela serait à craindre au Burkina Faso lorsque les avocats prendront conscience de l'utilité de ce mécanisme424. Afin de prévenir toute tentative et entreprise dilatoire, en Roumanie, le sursis à statuer a été rendu facultatif. Ainsi, dans le but d'assurer la célérité de la justice et de préserver les intérêts de la partie adverse qui risquerait de voir son action paralysée par une requête dilatoire en exception d'inconstitutionnalité, le procès au fond peut alors continuer son cours en attendant la décision de la juridiction constitutionnelle425. Toutefois, il est donné la possibilité au justiciable, en aval de la décision constitutionnelle, de faire ultérieurement recours contre la décision rendue par le juge du fond426.

L'exception d'inconstitutionnalité est certes un moyen de protection des droits fondamentaux. Mais, il est clair que certains justiciables useront de ce mécanisme pour servir d'autres intérêts personnels d'autant plus qu'au Burkina Faso, l'exception d'inconstitutionnalité n'est pas dirigée que contre les lois portant atteinte aux droits fondamentaux mais plutôt contre toute disposition législative contraire à la Constitution dans son ensemble427. Quoi qu'il en soit, même si l'exception d'inconstitutionnalité est un droit subjectif, force est de constater avec

419 Bianca SELEJAN-GUTAN, « L'exception d'inconstitutionnalité en Roumanie : instrument de protection des droits ou technique dilatoire ? », Op.cit., pp. 65-79.

420 Ibidem.

421 Ibidem.

422 Il s'agit de la procédure de la Question Prioritaire de constitutionnalité telle qu'instituer en France.

423 V°. Supra., p. 40.

424 V°. Supra., p. 22.

425 Bianca SELEJAN-GUTAN, « L'exception d'inconstitutionnalité en Roumanie : instrument de protection des droits ou technique dilatoire ? », Op.cit., pp. 65-79.

426 Ibidem.

427 Article 25 de la loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 sur le Conseil constitutionnel.

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Laurent ECK que ce droit subjectif découle du droit objectif et est reconnu par lui428. Dès lors, la subjectivation du contentieux constitutionnel n'est pas l'unique intérêt de l'exception d'inconstitutionnalité. Dans ses effets, l'exception d'inconstitutionnalité présente également des caractères fortement objectifs.

Section II : Une objectivation maintenue du contentieux
constitutionnel

Il n'y a pas de doute sur le caractère fortement subjectif de l'exception d'inconstitutionnalité. Toutefois, il subsiste quelques éléments soutenant le maintien du caractère objectif du contentieux constitutionnel même à travers l'exception d'inconstitutionnalité. Cela, dans la mesure où, d'une part, l'exception d'inconstitutionnalité se révèle être un purgatoire pour les normes inconstitutionnelles (§1), et d'autre part, elle permet une revalorisation du principe démocratique (§2).

§1 : Un purgatoire des normes inconstitutionnelles

Contrôle de constitutionnalité a posteriori, l'exception d'inconstitutionnalité contribue à affirmer la suprématie de la Constitution dans l'ordre juridique en ce sens qu'elle permet d'assoir la supériorité de la Constitution (A) et qu'elle contribue par la même occasion à la constitutionnalisation de toutes les branches du droit (B).

A. Un mécanisme assurant la supériorité de la Constitution

En consacrant l'exception d'inconstitutionnalité, la Constitution burkinabè « crée une arme contre la déviation des parlementaires »429. En effet, la loi n'est plus l'arche sainte qu'elle était430. Pour le doyen HAURIOU, le pouvoir législatif reste le dernier pouvoir dangereux pour

428 Laurent ECK, L'abus de droit en droit constitutionnel, Paris, l'Harmattan, 2010, p. 71.

429 Frédéric ROUVILLOIS, « Michel Debré et le contrôle de constitutionnalité », RFDC, n°46-2001, pp. 227-235.

430 Jean GICQUEL et Jean-Eric GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Op.cit., p. 209.

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les libertés431. Ce qui constitue un renversement du « mythe Rousseauiste »432 selon lequel « la loi ne peut mal faire »433. Selon Jean RIVERO, cela conduit irrésistiblement au passage d'une « protection de la liberté par la loi » à une « protection des libertés contre la loi »434. C'est dans ce cadre que la constitutionnalité a remplacé la légalité dans sa fonction de véhicule des valeurs essentielles435. Le principe de constitutionnalité surclasse de ce fait celui de légalité. Par voie de conséquence, la Constitution est supérieure à la loi et à toute autre règle de droit dans l'ordre interne. Désormais, la loi « n'est plus un tout mais une part du droit »436. Alors, si dans un système juridique la Constitution est la norme suprême, une loi contraire à la constitution n'est pas du droit437. Le cas échéant, la loi ne sera pas non plus l'expression de la volonté générale, absolument pas. D'ailleurs, le Conseil constitutionnel français a eu à affirmer dès 1985 que « La loi votée n'exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution »438. Pour assurer ce respect, il fallait mettre en place un contrôle de constitutionnalité. Ce qui fut effectivement fait au Burkina Faso439.

Il ressort du manuel de Jean BOUDON que « Le contrôle de constitutionnalité établit une césure radicale entre la Constitution et tous les autres actes juridiques (...). Le contrôle de constitutionnalité a donc pour premier objectif de protéger la Constitution contre toutes les normes juridiques fatalement inférieures »440. Dès lors, la Constitution étant supérieure à toute autre règle de droit étatique441, le contrôle de constitutionnalité demeure la sanction juridique du non-respect de cette norme suprême442. Ainsi, en plus de la protection des droits de l'Homme, le but de la justice constitutionnelle est de défendre les principes de la suprématie de

431 Hauriou cité par Jean GICQUEL et Jean-Eric GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, LGDJ, 2015, 29ème édition, p. 227.

432 Mahamadou Mounirou SY, La protection constitutionnelle des droits fondamentaux en Afrique, Paris, l'Harmattan, 2007, p. 463.

433 Ibidem.

434 Jean RIVERO cité par Marie-Claire PONTHOREAU, Droit(s) constitutionnel(s) comparé(s), Op.cit., p. 370.

435 Louis FAVOREU cité par Bertrand de LAMY, « Les principes constitutionnels dans la jurisprudence judiciaire. Le juge judiciaire, juge constitutionnel ? », RDP, n°3-2002, pp. 780-820.

436 Marie-Claire PONTHOREAU, « Réflexions sur le pouvoir normatif du juge constitutionnel en Europe continentale sur la base des cas allemand et italien », Cahiers du Conseil Constitutionnel, n°24/2008, 8 p.

437 Michel TROPER, « Marshall, Kelsen, Barak et le sophisme constitutionnaliste », in E. ZOLLER (dir.), Marbury v. Madison : 1803-2003. Un dialogue franco-américain, Paris, Dalloz, 2003, pp. 215-228.

438 V°. Conseil constitutionnel français, Décision n°85-197 DC du 23 août 1985.

439 Articles 152 al.1, 155 et 157 de la Constitution du 02 juin 1991.

440 Julien Boudon, Manuel de droit constitutionnel, Op.cit., p. 99.

441 Pierre PACTET et Ferdinand MELIN-SOUCRAMANIEN, Droit constitutionnel, Op.cit., p. 73.

442 Michel VERPEAUX, La Constitution, Paris, Dalloz, 2008, p. 68.

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la constitution443. De ce point de vue, le contrôle de constitutionnalité prend un caractère objectif. Or, l'exception d'inconstitutionnalité est une approche exceptionnelle qui permet d'assurer le contrôle de la Constitution444. Ce mécanisme permet « « une protection circonstanciée » de la Constitution »445. Dès lors, le caractère objectif du contentieux constitutionnel est valable tant pour le recours direct446 que pour le recours indirect qu'est l'exception d'inconstitutionnalité447. A ce titre, Thierry SANTOLINI écrivait que « Le contentieux de constitutionnalité possède à la fois des implications subjectives et objectives »448. De sorte que « le procès constitutionnel apparaît comme le lieu d'une protection médiatisée de la Constitution où les préoccupations individualistes des parties se trouvent mêlées à la défense du bien commun. Naturellement, les premiers concernés par cette dualité sont les particuliers. Leur action est d'abord destinée à protéger des intérêts personnels, mais elle offre également, au juge constitutionnel, l'occasion d'assurer la défense objective de l'ordonnancement »449. De ce fait, l'action des particuliers se trouve, en quelque sorte, captée par l'effet attractif de l'intérêt général450 qu'est de garantir la supériorité de la Constitution451. Pour asseoir définitivement cette supériorité de la Constitution dans l'ordre interne, l'exception d'inconstitutionnalité s'avère être la voie la plus rapide452. Dans un tel schéma, la mission du juge constitutionnel « va apparaître comme étant fondamentalement objective, dans la mesure où elle va s'exercer dans l'intérêt du droit »453.

En tout état de cause, l'exception d'inconstitutionnalité se préoccupe, en quelque sorte, de garantir le respect de la hiérarchie des normes. Cette hiérarchie des normes « est une donnée

443 Arslan ZÜHTÜ, « L'accès de particuliers à la justice constitutionnelle en Turquie », Communication lors du 2ème séminaire international de la Conférence des Juridictions Constitutionnelles Africaines tenue à Alger du 24 au 27 novembre 2017.

444 Ibrahim David SALAMI, « Exception d'inconstitutionnalité et principe d'égalité au Bénin et au Congo », RBD, n°51-2ème semestre, 2016, pp. 9-41.

445 Ibidem.

446 Célestin Keutcha TCHAPNGA, « Le juge constitutionnel, juge administratif au Bénin et au Gabon ? », RFDC, n°75-2008/3, pp. 551-583.

447 Ibidem.

448 Thierry SANTOLINI, « Les parties dans le procès constitutionnel en droit comparé », Cahiers du Conseil Constitutionnel, n°25/2008, 10 p.

449 Ibidem.

450 Ibidem.

451 Michel VERPEAUX, « Le contrôle de la loi par la voie d'exception dans les propositions parlementaires sous la IIIème République », RFDC, n°4-1990, pp. 688-698.

452 Valérie BERNAUD et Marthe Fatin-Rouge STEFANINI, « La réforme du contrôle de constitutionnalité une nouvelle fois en question ? », RFDC, n°2/2008, pp. 169-199.

453 Mame Ndiaga WADE, Accès au juge constitutionnel et constitutionnalisation du droit, Thèse de Doctorat en droit public soutenue à l'Université d'Aix-Marseille, le 18 décembre 2015, p. 48.

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objective »454. Au Burkina Faso comme dans tout système francophone de justice constitutionnelle, l'exception d'inconstitutionnalité se présente comme un « renouveau »455 de la Constitution. Avec ce « renouveau », la Constitution prend la figure du phénix456 qui renaît de ses cendres. Ainsi, grâce à l'exception d'inconstitutionnalité457, « sa majesté »458 la Constitution retrouve sa couronne. Celle-ci lui permettrait de pénétrer toutes les branches du droit.

B. Un mécanisme facilitant la constitutionnalisation des branches du droit

Le contrôle de constitutionnalité permet de vérifier la conformité des textes infra constitutionnels à la norme fondamentale. Il peut s'opérer soit par voie d'action459, soit par voie d'exception460. Dans la mesure où, ce contrôle de constitutionnalité peut être provoqué par toute personne partie à un procès461 quel que soit le litige, la Constitution devient le ciment, ou dira-t-on le fondement de tout le système juridique de l'Etat. Cela s'explique par le fait qu'elle « informe, pénètre et saisit l'ensemble des branches du droit »462. Ainsi se dévoile un autre côté objectif de l'exception d'inconstitutionnalité en ce qu'elle facilite la constitutionnalisation463 des branches du droit. En effet, cette constitutionnalisation des branches du droit ne peut que se percevoir de manière objective. Il s'agit là d'un regain d'intérêt du droit constitutionnel. Le pan du contentieux est en train de prendre le dessus sur le pan institutionnel du droit de la Constitution. Cette dernière devient la référence dans l'ordre juridique étatique. C'est donc grâce à l'exception d'inconstitutionnalité que le droit constitutionnel s'offre une bouffée d'oxygène et retrouve son souffle de vie. En effet, pour Louis FAVOREU, si le droit constitutionnel doit « investir » toutes les branches du droit, l'exception d'inconstitutionnalité

454 Michel TROPER et Dominique CHAGNOLLAUD, Traité international de droit constitutionnel. Tome 1. Théorie de la Constitution, Paris, Dalloz, 2012, p. 744 et Ss.

455 Francis DELPERE, « Le renouveau du droit constitutionnel », RFDC, n°74-2008/2, pp. 227-237.

456 Ibidem.

457 Christian STARCK, La Constitution, cadre et mesure du droit, Paris, Economica, 1994, p. 25.

458 Adama KPODAR cité par Karim DOSSO, « Les pratiques constitutionnelles dans les pays d'Afrique noire francophone : cohérences et incohérences », RFDC, n°92-2012/2, pp. 57-85.

459 Article 155 de la Constitution burkinabè du 02 juin 1991.

460 Article 157 al.2 de la Constitution burkinabè du 02 juin 1991.

461 Ibidem.

462 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, Paris, Montchrestien, 2006, 7ème édition, p. 455.

463 La constitutionnalisation du droit est le processus qui, par le moyen du principe de constitutionnalité, concourt à assurer l'unité du droit ou de l'ordre juridique en donnant un socle commun à l'ensemble des branches du droit.

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serait la meilleure manière d'y parvenir464. Cela est une aubaine pour le droit constitutionnel notamment celui burkinabè dans la mesure où cette constitutionnalisation est, pour le Conseil constitutionnel, l'occasion d'harmoniser les actes465 et/ou les normes du droit positif burkinabè. Telle qu'elle a été conçue, l'exception d'inconstitutionnalité permet d'assurer la cohérence du système normatif466 afin de parvenir à une unification de l'ordre juridique467. Par ce mécanisme, le juge constitutionnel procède à « l'expurgation...des normes pathogènes et à l'anéantissement des normes viciées »468.

Au Burkina Faso, l'exception d'inconstitutionnalité a déjà eu à concerner un certain nombre de domaines et de branches du droit. Il en est ainsi du droit de la fonction publique469, du domaine de la magistrature470, du droit civil471 ou encore du droit pénal472. Dans ce dernier cas, le juge constitutionnel burkinabè, en déclarant l'inconstitutionnalité de l'article 497-3° du code de procédure pénale, a entendu, contrairement à son homologue français473, reconnaître un droit d'appel à la partie civile dans un procès pénal. Selon le raisonnement du Conseil constitutionnel burkinabè, la non-reconnaissance de ce droit à la partie civile constitue une violation du principe d'égalité d'accès au juge. Même si la doctrine burkinabè critique cette décision en y voyant notamment « une admission en clair-obscur du droit d'appel de la partie civile »474, nous nous contenterons du constat qu'il y a là « un accroissement du poids des normes constitutionnelles en raison de leur incidence directe sur diverses catégories de relations

464 Louis FAVOREU, « L'exception d'inconstitutionnalité est-elle indispensable en France ? », Op.cit., pp. 11-22.

465 Marie-Pauline DESWARTE, « Droit sociaux et Etat de droit », RDP, n°4-1995, pp. 951-986.

466 Elena-Simina TANASESCU, « L'exception d'inconstitutionnalité qui ne dit pas son nom ou la nouvelle sémantique constitutionnelle roumaine », RIDC, Vol.65, n°4/2013, pp. 905-939.

467 Guillaume DRAGO, Contentieux constitutionnel français, Op.cit., p. 61.

468 Joseph DJOGBENOU, « Les parties dans le procès constitutionnel », extrait du cours de Théorie générale du procès, Université d'Abomey Calavi, Master 2 Droit privé fondamental et droit des institutions judiciaires, 20192020, pp. 29-43.

469 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2019-001/CC du 12 février 2019 sur l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 166 de la loi portant statut général de la fonction publique.

470 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2018-007/CC du 20 mars 2018 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la loi portant statut de la magistrature.

471 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2007-04/CC du 29 août 2007 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la société EROH.

472 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2016-08/CC du 12 juillet 2016 sur l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 497°3 du code de procédure pénale.

473 V°. Conseil constitutionnel français, décision n°2013-363 QPC du 31 janvier 2014 sur la constitutionnalité de l'article 497 du code pénal français.

474 Séni Mahamadou OUEDRAOGO, « L'admission en clair-obscur du droit d'appel de la partie civile en matière pénale : à propos de la décision n°2016-08/CC sur l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 497-3° du code de procédure pénale », RBD, n°52-1er semestre/2017, pp. 245-255.

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juridiques »475. La machine est ainsi lancée pour qu'il se produise une constitutionnalisation des branches du droit burkinabè. Ou pour le dire autrement en reprenant les termes de Dominique ROUSSEAU, « le droit privé et le droit public sont aujourd'hui « branchés » sur les principes énoncés dans la Constitution »476. Comme l'a si bien détaillé Georges VEDEL, « Le droit constitutionnel est formé...par des « têtes de chapitres » qui se prolongent dans les autres branches du droit... »477.

Par ailleurs, on assiste à l'effacement des frontières entre les branches du droit, le droit constitutionnel servant de fil conducteur reliant les unes aux autres. En effet, pour Louis FAVOREU, « la jurisprudence constitutionnelle est en train de remettre en cause la distinction classique entre droit public et droit privé, en imposant comme soubassement commun à toutes les branches du droit, un droit constitutionnel qui retrouve ses fonctions originelles de droit fondamental »478. Les différentes branches du droit voient se dessiner leurs dimensions constitutionnelles479, car selon Bernard CUBERTAFOND, le droit constitutionnel est devenu englobant480.

Toutefois, cela semble tout à fait dérisoire au Burkina Faso dans la mesure où le recours en exception d'inconstitutionnalité n'est toujours pas encore une pratique vraiment rependue. La constitutionnalisation véritable des branches du droit au Burkina Faso devra alors encore attendre. Quoi qu'il en soit, il s'avère qu'en perspective, l'exception d'inconstitutionnalité soit potentiellement un puissant moyen pour la constitutionnalisation du droit au Burkina Faso. En effet, ce mécanisme permettra de purger le système juridique de ses normes inconstitutionnelles et d'assurer, par la même occasion, la suprématie de la Constitution. C'est justement en cela que l'exception d'inconstitutionnalité présente un caractère objectif. Toutefois, cet élément n'est pas le seul à pouvoir plébisciter le caractère objectif de l'exception d'inconstitutionnalité. En poussant un peu loin la réflexion, nous remarquerons que l'exception d'inconstitutionnalité peut également servir à asseoir une bonne démocratie au Burkina Faso.

475 Antoine JEAMMAUD et Antoine LYON-CAEN, « Suprématie de la Constitution et droit social » in Michel TROPER et Dominique CHAGNOLLAUD, Traité international de droit constitutionnel. Tome 3. Suprématie de la Constitution, Paris, Dalloz, 2012, p. 665.

476 Dominique ROUSSEAU, La Question Prioritaire de Constitutionnalité, Op.cit., p. 3.

477 Georges VEDEL, Manuel élémentaire de droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2002, p. 6.

478 Louis FAVOREU, « La justice constitutionnelle en France », Les Cahiers de Droit, Vol.26, n°2/1985, pp. 301337.

479 Ibidem.

480 Bernard CUBERTAFOND, Le nouveau droit constitutionnel, Op.cit., p. 20.

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§2 : Un mécanisme revalorisant le principe démocratique

La revalorisation de la démocratie au Burkina Faso à travers le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité peut s'analyser sur deux points. Le premier consiste à constater que, d'une certaine manière, l'exception d'inconstitutionnalité est une voie pour la participation du peuple au pouvoir (A). Le second consiste à observer l'avènement de ce qu'il convient d'appeler démocratie constitutionnelle (B).

A. Une voie pour la participation du peuple au pouvoir

Le lien entre l'exception d'inconstitutionnalité et la démocratie n'est pas tout à fait évident à établir. Certes, l'analogie peut sembler curieuse et inopérante. Mais en réalité, elle a tout son sens notamment dans un Etat de droit. Il ne s'agit pas là d'une réflexion isolée dans la mesure où une abondante doctrine aborde le contrôle de constitutionnalité en général et le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité en particulier comme une manifestation de la démocratie dans un Etat de droit. A ce titre, il ressort des écrits de Bertrand STIRN que même s'il n'y a pas nécessairement de coïncidence entre contrôle de constitutionnalité et démocratie, « les deux vont de plus en plus souvent de pair »481. En effet, l'idée de démocratie est essentiellement composite482. Elle ne se réduit pas au simple pouvoir de la majorité. Elle se définit également par le respect des libertés et des droits des minorités483. Dès lors, en assurant ces fonctions, le contrôle de constitutionnalité est pressenti pour garantir le caractère démocratique d'un régime484. En outre, la démocratie permet aux citoyens de disposer de mécanismes de protection contre les gouvernants485. C'est justement dans cette perspective que s'inscrit l'exception d'inconstitutionnalité : protéger les citoyens contre l'arbitraire des gouvernants et contre des lois liberticides486.

Il sied de rappeler qu'en droit constitutionnel contemporain, la démocratie se fonde sur les droits fondamentaux487. De l'avis de Christian STARCK, l'auto-détermination des membres

481 Bernard STIRN, Les libertés en question, Paris, Montchrestien, 2004, 5ème édition, p. 55.

482 Cyril BRAMI, Des juges qui ne gouvernent pas, Paris, l'Harmattan, 2005, p. 153.

483 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, 9ème édition, Op.cit., p. 57.

484 Ibidem.

485 Babacar GUEYE, « La démocratie en Afrique, succès et réticences », Op.cit., p. 5-26.

486 Stéphanie HENNETTE-VAUCHEZ et Diane ROMAN, Droits de l'Homme et libertés fondamentales, Paris, Dalloz, 2015, 2ème édition, p. 255.

487 Jean Paul JACQUE, Droit constitutionnel de l'Union Européenne, Paris, Dalloz, 2012, 7ème édition, p. 63.

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du peuple dépend des moyens de protection de leurs droits488. Etant un moyen de protection des droits fondamentaux489, le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité fait ainsi corps avec la démocratie. En effet, en protégeant les droits fondamentaux, l'exception d'inconstitutionnalité devient « un puissant moyen de légitimation démocratique »490. Au Burkina Faso, cette nouvelle forme de légitimation démocratique est au rendez-vous depuis plus de vingt (20) ans. C'est dire que les responsables politiques burkinabè ont compris assez tôt cette exigence démocratique. Assurément, cette volonté commune de l'ensemble de la classe politique permet d'améliorer et d'étendre les droits de l'Homme et du citoyen491 au Burkina Faso. En effet, il serait vain de parler d'un Etat de droit sans démocratie et sans garantie pour les droits humains. Ces trois éléments ne font plus qu'un, car chacun pris isolément n'aurait aucun sens sans les deux autres. Autrement formulé, la démocratie n'existe idéalement que dans un Etat de droit et la protection des droits fondamentaux constitue la sève nourricière de l'Etat de droit.

Par ailleurs, dans une démocratie, il convient que le peuple soit associé ; qu'il soit au four et au moulin de l'exercice du pouvoir. A cette quête de l'idéal démocratique, l'exception d'inconstitutionnalité paraît être, à bien des égards, un canal de contrôle du pouvoir par le peuple. En effet, ce mécanisme a comme vertu de permettre au peuple de vérifier en permanence que les pouvoirs constitués ne violent pas le dépôt qui leur a été confié492. Cela, d'autant plus qu'en démocratie, il est de principe que la volonté du peuple soit respectée vaille que vaille. Selon Elisabeth ZOLLER, pour que ce principe « soit autre chose qu'un aveu pieux, il faut que les pouvoirs constitués ne puissent pas méconnaître, modifier ou altérer les volontés du pouvoir constituant sans être sanctionnés »493. Ainsi, l'exception d'inconstitutionnalité constitue une véritable sentinelle démocratique494 qui alerte et informe le pouvoir politique de la teneur des revendications du peuple et au besoin, désavoue le pouvoir politique lorsque le pacte constitutionnel est violé495. A travers ce mécanisme, le peuple s'oppose au pouvoir et participe

488 Christian STARCK, La Constitution cadre et mesure du droit, Op.cit., p. 69.

489 V°. Supra., pp. 51-53.

490 Yacouba OUEDRAOGO, « Les paradoxes de la protection des droits de l'Homme dans les organisations africaines d'intégration régionale », RBD, n°55-Spécial, 2018, pp. 143-165.

491 Catherine CASTANO, « L'exception d'inconstitutionnalité : la contrainte du droit, la force du politique », RFDC, n°4-1990, pp. 631-649.

492 Jean BOUDON, Manuel de droit constitutionnel. Tome 1. Théorie générale-Histoire-Régimes étrangers, Op.cit., p. 100.

493 Elisabeth ZOLLER, Droit constitutionnel, Paris, PUF, 1998, 2ème édition, p. 99.

494 Julien BONNET et Pierre-Yves GAHDOUN, La Question Prioritaire de Constitutionnalité, Op.cit., 128 p.

495 Ibidem.

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au pouvoir496. Dès lors, si la démocratie est bien « le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple »497, alors l'exception d'inconstitutionnalité est une « condition sine qua non de la démocratie »498. Au Burkina Faso, pays des hommes intègres, à travers l'alinéa 2 de l'article 157 de la Constitution, un avertissement est lancé aux pouvoirs constitués : ils sont sous la surveillance étroite des citoyens.

En fin de compte, l'exception d'inconstitutionnalité contribue à préserver la démocratie au Burkina Faso499 de sorte qu'elle corresponde à la fin de ce qu'il convient d'appeler le « légicentrisme »500. L'essentiel est que le peuple puisse avoir le dernier mot sur les normes adoptées démocratiquement501. Il est également possible d'analyser le caractère démocratique de l'exception d'inconstitutionnalité sur un tout autre plan même si quelque peu similaire à celui que nous venons de développer. Il s'agit de ce qu'il convient d'appeler démocratie constitutionnelle.

B. L'émergence d'une démocratie constitutionnelle

Hans KELSEN écrivait que « Le mot d'ordre démocratie domine les esprits, aux XIXème et XXème siècles, d'une façon presque générale. Mais précisément pour cette raison, le mot, comme tout mot d'ordre, a perdu son sens précis. Par le fait que pour obéir à la mode politique on croit devoir l'utiliser à toutes les fins possibles et en toute occasion, cette notion, dont on a abusé plus que toute autre notion politique, prend les sens les plus divers »502. La démocratie n'est plus seulement l'exercice du pouvoir par le biais des représentants du peuple. La démocratie est surtout l'exercice du pouvoir par des représentants élus sous le contrôle du peuple qui a désormais la possibilité de saisir le juge constitutionnel pour s'opposer à ses

496 Ariane VIDAL-NAQUET, « La justice constitutionnelle est-elle un nouveau canal de participation, d'opposition et/ou de contrôle du peuple au pouvoir ? », HAL/Archives ouvertes, février 2014 disponible sur https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01794761, consulté le 13 octobre 2020 à 6h40.

497 Cette formule nous vient d'Abraham LINCOLN, 16ème président des Etats-Unis d'Amérique lors de son discours de Gettysburg le 19 novembre 1863.

498 Michel TROPER, « Le juge constitutionnel et la volonté générale », Analisi e dirito, 1999, pp. 131-144.

499 Relwendé Louis Martial ZONGO, « L'accès de l'individu au juge constitutionnel burkinabè », RBD, n°59-1er semestre, 2020, pp. 139-164.

500 Francisco MELEDJE DJEDJRO, Droit constitutionnel, Op.cit., p. 75.

501 Marie-Anne COHENDET, Droit constitutionnel, Op.cit., p. 204.

502 Hans KELSEN cité par Luc KLEIN, « Démocratie constitutionnelle et constitutionnalisme démocratique : essai de classification des théories juridiques de la démocratie », RFDC, n°109-2017/1, pp. 121-141.

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représentants. Le sens de la notion de démocratie est aujourd'hui largement multiple, si bien qu'on parle désormais d'une démocratie constitutionnelle.

Le juge constitutionnel est parfois présenté comme l'allié du peuple, car « il a la possibilité de se retourner contre les représentants du peuple lorsque ceux-ci voudraient travestir la volonté du peuple »503. Il casse ainsi la fusion supposée du peuple et de ses représentants. En effet, au regard de l'importance et de la place accordée au contrôle de constitutionnalité dans tout Etat qui se réclame démocratique, force est de tirer la conclusion selon laquelle il n'y a de démocratie que constitutionnelle, c'est-à-dire celle qui s'exerce dans le respect des principes et valeurs édictées par la Constitution. Ce qui, dès lors, accorde au Conseil constitutionnel, juge de la Constitution, une place au sommet d'un Etat démocratique. Le Burkina Faso ne fait pas exception. En effet, le constituant burkinabè a entendu donner au juge constitutionnel la compétence d'un contrôle de constitutionnalité aussi bien a priori, grâce à la saisine des requérants privilégiés504, qu'a posteriori, grâce à la saisine ouverte aux citoyen-justiciables505. Cette multiple possibilité de saisine du Conseil constitutionnel burkinabè nous permet de mieux comprendre la doctrine d'Ibrahim SALAMI. Pour cet auteur, l'exception d'inconstitutionnalité est « une démocratisation de la saisine du juge constitutionnel »506. Tout citoyen qui est convaincu de l'inconstitutionnalité d'une loi qui serait sur le point de lui être appliquée peut librement la contester devant le juge constitutionnel. L'expression selon laquelle « la loi n'exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution »507 trouve toute sa substance ici. Tel est le sens de la démocratie constitutionnelle.

Le droit constitutionnel en général et l'exception d'inconstitutionnalité en particulier apparaissent comme le droit protecteur de la personne confrontée au pouvoir, même le plus démocratique. L'exception d'inconstitutionnalité est de ce fait même, une démocratie constitutionnelle, « la démocratie qui protège les droits individuels », ajoute Agnero MEL508. La démocratie s'est donc reconstruite sur les droits individuels. Selon le mot de Luc KLEIN, il s'agit là d'une refondation de la démocratie sur l'individu509. Cette reconfiguration de la

503 Gilles BADET, Les attributions originales de la Cour constitutionnelle du Bénin, Op.cit., p. 173 et Ss.

504 Article 157 al.1 de la Constitution Burkinabè du 02 juin 1991.

505 Article 157 al.2 de la Constitution Burkinabè du 02 juin 1991.

506 Ibrahim David SALAMI et Diane O. Melone GANDONOU, Droit constitutionnel et institutions du Bénin, Cotonou, Editions CEDAT, 2014, p. 380.

507 V°. Conseil constitutionnel français, Décision n°85-197 DC du 23 août 1985.

508 Agnero Privat MEL, « La saisine du juge constitutionnel en Afrique francophone », RBD, n°52-1er semestre, 2017, pp. 104-144.

509 Luc KLEIN, « Démocratie constitutionnelle et constitutionnalisme démocratique : essai de classification des théories juridiques de la démocratie », Op.cit., pp. 121-141.

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démocratie avec le juge constitutionnel comme garant, fait des citoyens les détenteurs et les acteurs du pouvoir dans un Etat de droit. Au demeurant, le concept même de justice constitutionnelle est lié à celui de l'Etat de droit et de la démocratie510. L'on s'aperçoit avec Pierre BRUNET que « Le juge constitutionnel, à travers son contrôle de constitutionnalité, protège les droits de la minorité de la menace que fait peser à leur encore la tyrannie de la majorité. Cet argument est très convaincant d'autant plus qu'il est fondé sur cette idée que le pouvoir absolu corrompt absolument ce que nul n'oserait contester. Le juge constitutionnel est le représentant de la souveraineté du peuple parce qu'il oblige le législateur à respecter la volonté du peuple souverain déclarée dans la Constitution »511.

L'exception d'inconstitutionnalité est désormais indissociable avec les concepts de l'Etat de droit et de la démocratie. Avec ce mécanisme, le peuple dispose d'un puissant moyen juridique, d'une arme contre l'arbitraire du pouvoir512 et les déviations du parlement513. La saisine du juge constitutionnel par le citoyen est donc une véritable démocratie, une démocratie constitutionnelle qui se donne pour mission de protéger les droits individuels. Tels sont les desseins de l'Etat de droit. Par ailleurs, la montée en puissance de cette démocratie constitutionnelle dans les Etats modernes et notamment au Burkina Faso laisse entrevoir l'avènement d'une nouvelle forme de société politique que Guillaume TUSSEAU qualifie

d' « Etat constitutionnel »514. En effet, en consacrant l'exception d'inconstitutionnalité, le constituant burkinabè autorise le peuple à sécuriser lui-même sa Constitution en traduisant les lois inconstitutionnelles devant le Conseil constitutionnel du Faso. Ce qui, par conséquent, accorde une certaine légitimité au juge constitutionnelle.

510 Pierre BRUNET, « Le juge constitutionnel est-il un juge comme les autres ? Réflexions méthodologiques sur la justice constitutionnelle », in Olivier JOUANJAN, La notion de justice constitutionnelle, Paris, Dalloz, 2005, pp. 115-135.

511 Ibidem.

512 Olivier ROUQUAN, Droit constitutionnel et gouvernance politique, Paris, Gualino, 2014, p. 37.

513 Frédéric ROUVILLOIS, « Michel Debré et le contrôle de constitutionnalité », RFDC, n°46-2001, pp. 227-235.

514 Guillaume TUSSEAU, « Le pouvoir des juges constitutionnels », in Michel TROPER et Dominique CHAGNOLLAUD, Traité international de droit constitutionnel. Tome 3. Suprématie de la Constitution, Paris, Dalloz, 2012, p. 169.

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CHAPITRE II : L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE, UN SIGNE DE LA LEGITIMITE DU JUGE CONSTITUTIONNEL

La question de la légitimité du juge constitutionnel est essentiellement évoquée par les acteurs politiques, lorsque certaines de ses décisions leur déplaisent, en lui opposant leur légitimité populaire515. Cela est d'autant plus vrai que selon le point de vue de quelques doctrinaires à l'image de Xavier MAGNON, une juridiction constitutionnelle est une juridiction dont la jurisprudence gêne le pouvoir516. En effet, les représentants ont acquis leur légitimité directement du peuple qui les a élus, tandis que le juge constitutionnel n'aurait aucune légitimité élective, si bien que l'on pourrait se demander s'il est légitime de contrôler la constitutionnalité des lois517. Toutefois, il y a lieu pour nous de remarquer que la qualité de représentant ne dépend pas principalement de l'élection. Elle est liée à la participation au pouvoir législatif518. Or, le Conseil constitutionnel contribue, d'une manière ou d'une autre, à l'élaboration des lois, il peut donc être considéré comme un représentant du souverain, au même titre que le Parlement. Son rôle dans la détermination de la volonté générale est alors parfaitement légitime519. Cette légitimité est confirmée par le peuple qui accepte volontiers de porter sa plainte contre l'oeuvre des parlementaires devant le Conseil constitutionnel par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité. Par ailleurs, la légitimité d'une décision du juge constitutionnel renvoie à l'autorité de celle-ci520. Cette autorité s'étend même aux décisions rendues par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité (Section I). Au regard des effets de celles-ci, l'on s'apercevra que le juge constitutionnel dispose d'un véritable pouvoir législatif (Section II).

515 Théodore HOLO, « Emergence de la justice constitutionnelle », Revue Pouvoirs, n°129, 2009/2, pp. 101-114.

516 Xavier MAGNON, « L'apport de la question prioritaire de constitutionnalité à la protection des droits et libertés dans les différents champs du droit : une synthèse », HAL/Archives ouvertes, 13 p. Disponible sur https://hal.archives-ouvertes.fr/hal consulté le 13 août 2020 à 09h58.

517 Victor Ferrerese COMELA, « Est-il légitime de contrôler la constitutionnalité des lois ? », in Michel TROPER & Dominique CHAGNOLLAUD (dir.), Traité international de droit constitutionnel. Tome 3. Suprématie de la Constitution, Paris, Dalloz, 2012, p. 69.

518 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, 9ème édition, Op.cit., p. 57.

519 Ibidem.

520 Serge SURIN, « La légitimité interprétative du juge dans le procès constitutionnel », HAL/Archives ouvertes, 2017, disponible en ligne sur https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01663454 consulté le 13 août 2020 à 11h12.

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Section I : L'autorité des décisions rendues sur exception
d'inconstitutionnalité

La détermination de l'autorité des décisions rendues par le juge constitutionnel s'impose comme l'une des exigences fondamentales du nouveau constitutionnalisme521. Il convient alors de s'intéresser à l'autorité de celles rendues sur exception d'inconstitutionnalité. On dénote notamment une certaine relativité de principe des effets des décisions rendues sur exception d'inconstitutionnalité (§1). Mais, en pratique, ces décisions ont tendance à s'imposer de manière absolue (§2).

§1 : La relativité de principe des effets de la décision

En principe, les décisions rendues par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité ne produisent d'effet qu'entre les parties en litige (A). Mais, la tendance est aujourd'hui vers un effet erga omnes de ces décisions (B).

A. L'effet inter partes de la décision

Contrôle de constitutionnalité opéré a posteriori, c'est-à-dire en aval de l'entrée en vigueur de la loi522, l'exception d'inconstitutionnalité, il faut le rappeler, est un moyen soulevé par une partie à un litige pendant devant une juridiction. Le requérant ayant invoqué le moyen d'inconstitutionnalité demande au juge de ne pas lui appliquer une loi inconstitutionnelle. De ce fait, l'intérêt de l'exception serait d'écarter la loi inconstitutionnelle du procès en cours. Ainsi, l'exception d'inconstitutionnalité, dans sa version originale523, tend juste à l'inapplication de la norme querellée dans l'instance en cours. Dès lors, il peut être fait application de la même disposition dans un autre procès, sur un autre justiciable qui lui, n'aurait pas soulevé le moyen d'inconstitutionnalité. Le Conseil constitutionnel français a rappelé très

521 Delphine Emmanuel ADOUKI, « Contribution à l'étude des décisions du juge constitutionnel en Afrique », RFDI, n°95, 2013/3, pp. 611-638.

522 Isaac Yankhoba NDIAYE, « L'accès à la justice constitutionnelle par le citoyen », Communication au 6ème Congrès de l'Association des Cours et Conseil constitutionnels ayant en partage l'usage du français, Marrakech, du 4 au 6 juillet 2012.

523 Il s'agit de l'exception d'inconstitutionnalité consacrée aux Etats-Unis dans la célèbre affaire Marbury c/ Madison dans lequel la Cour Suprême rappelle qu'il revient à elle seule et uniquement à elle de prononcer la constitutionnalité ou l'inconstitutionnalité d'une loi.

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récemment ce principe. Ainsi, dans sa décision rendue le 02 octobre 2020, le juge constitutionnel français rappelle qu' « En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité... »524. C'est assurément la raison pour laquelle l'on qualifie souvent ce recours de contrôle subjectif525. En effet, assuré au moyen d'une exception d'inconstitutionnalité, ce contrôle n'aboutit pas à l'annulation d'une loi reconnue inconstitutionnelle mais à son inapplication au litige en cours526. Il s'ensuit qu'une loi déclarée inconstitutionnelle par cette voie ne cesse pas d'exister dans l'ordre juridique ; elle pourrait, cependant, être appliquée dans une autre affaire527. De cette manière, la décision d'inconstitutionnalité n'aurait qu'un effet inter partes, c'est-à-dire entre les parties au procès. Cela signifie que l'exception d'inconstitutionnalité n'a, en principe, qu'une autorité immédiate528 certes, mais relative529 de chose jugée.

Il faut avouer que l'effet inter partes est ou devrait être le corollaire de tout moyen d'exception. Au même titre que l'exception d'illégalité530 ou l'exception d'inconventionnalité531, la décision rendue par la voie d'une exception d'inconstitutionnalité ne devrait avoir autorité qu'entre les parties concernées par le litige dont il est question. Etant un héritage du paysage juridique américain, l'exception d'inconstitutionnalité ne vaut que pour le juge du fond et dans l'affaire qu'il est amené à trancher. Dans cette hypothèse, l'inconstitutionnalité constatée par le juge n'a qu'un effet déclaratoire532.

Certes, l'autorité des décisions rendues par une juridiction constitutionnelle est généralement établie par la Constitution de l'Etat533 et cela, qu'il s'agisse d'un contrôle de constitutionnalité a priori ou d'un contrôle de constitutionnalité a posteriori, notamment par le

524 V°. Conseil constitutionnel français, décision n°2020-858/859, QPC du 02 octobre 2020.

525 V°. Supra., p. 52.

526 Anne RASSON, « La valeur de la distinction entre autorité absolue et autorité relative de la chose jugée », AIJC, n°27, 2011, pp. 593-612.

527 Jean-Louis ESSAMBO KANGASME, Le droit constitutionnel, Op.cit., p. 110.

528 Dieudonné DIBWA KALUBA, La justice constitutionnelle en république démocratique du Congo, Op.cit., p. 576.

529 Louis FAVOREU et alii, Droit constitutionnel, 21ème édition, Op.cit., p. 291.

530 V°. Les deux arrêts rendus par le Conseil d'Etat en date 18 mai 2018.

531 Dans ce type de contrôle, le juge constitutionnel est incompétent. V°. Conseil Constitutionnel français, décision n°74-54/DC du 15 janvier 1975, IVG. C'est le juge judiciaire qui est compétent depuis l'affaire des cafés Jacques Vabre rendu par la Chambre plénière de la Cour de cassation en date du 15 mai 1975 et plus tardivement le juge administration depuis l'arrêt CE, Ass., 20 octobre 1989, Nicolo.

532 Albrecht WEBER, « Notes sur la justice constitutionnelle comparée : convergences et divergences », AIDC, n°19, 2003, pp. 29-41.

533 Anne RASSON, « La valeur de la distinction entre autorité absolue et autorité relative de la chose jugée », Op.cit., pp. 593-612.

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mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité. Mais, sur ce point, au Burkina Faso, la Constitution du 02 juin 1991 brille par son silence. Par conséquent, nous sommes en droit de nous demander s'il convient de retenir l'effet inter partes classique des décisions rendues sur exception d'inconstitutionnalité à proprement parlé534, ou si au contraire il y a lieu de retenir une autre solution au Burkina Faso.

Quoi qu'il en soit, il convient de préciser que cette exigence d'effet inter partes n'est valable que dans le modèle de contrôle diffus ou décentralisé de constitutionnalité : c'est le cas du modèle américain. Par ailleurs, pour le système de contrôle centralisé à l'image de celui burkinabè où la compétence pour le contrôle de constitutionnalité des lois n'est reconnue qu'à un juge spécial à savoir le Conseil constitutionnel, l'effet inter partes des décisions rendues sur exception d'inconstitutionnalité paraît logiquement insensé et contre-productif. Ainsi, nous remarquerons la tendance en pratique vers un effet erga omnes des décisions intervenues sur exception d'inconstitutionnalité.

B. La tendance vers un effet erga omnes de la décision

Tel que précisé tantôt, une décision rendue sur exception d'inconstitutionnalité ne devrait avoir qu'une autorité relative de chose jugée et ne produire d'effet qu'entre les parties au litige. Mais, au regard de la « modélisation »535 faite par chaque pays de son système de justice constitutionnelle, l'on s'aperçoit que ce principe doit fortement être relativisé, sinon abandonné notamment dans les systèmes d'Afrique noire francophone536. En effet, c'est lorsque les juridictions ordinaires sont dotées d'une compétence constitutionnelle que leurs décisions sur la constitutionnalité d'une loi revêtiront un effet inter partes. Même dans cette hypothèse, lorsque la question de constitutionnalité arrivera sur la table de la juridiction Suprême, la décision de cette dernière revêtira un effet erga omnes, naturellement. Pour les systèmes où il est institué une juridiction constitutionnelle spécialisée qui statue en premier et dernier ressort en matière de constitutionnalité des lois, le problème ne se pose guère, car la décision de cette juridiction aura d'office un effet erga omnes. A ce propos, Abdoulaye SOMA écrivait qu' « En

534 Il convient de rappeler qu'il y a eu tout un débat sur la commodité de retenir la qualification « exception d'inconstitutionnalité » ou s'il convient plutôt de parler d'une « question préjudicielle de constitutionnalité ». V°. Supra., p. 30.

535Abdoulaye SOMA, « Modélisation d'un système de justice constitutionnelle pour une meilleure protection des droits de l'homme : trans-constitutionnalisme et droit constitutionnel comparé », Op.cit., pp. 437-466.

536 Il s'agit essentiellement des Etats ayant choisi le modèle européen de justice constitutionnelle fondé sur une juridiction constitutionnelle spécialisée.

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ce qui concerne les systèmes où la juridiction constitutionnelle est placée au sommet de la hiérarchie judiciaire, comme aux Etats-Unis, en Suisse, en Afrique du Sud, en Inde et au Nigeria, sa pratique et sa politique jurisprudentielles déploient un effet erga omnes. De la même manière, dans les systèmes où la juridiction constitutionnelle n'est pas intégrée à l'ordonnancement juridictionnel ordinaire de l'Etat et où la justice constitutionnelle est une branche parallèle spécialisée, à l'image de la France, de l'Algérie, du Burkina Faso, du Bénin, du Gabon et de l'Autriche, ses décisions sur la constitutionnalité de telle ou telle norme revêt une telle autorité »537.

A la lumière de cette doctrine, il est clair que même si le constituant burkinabè n'a pas précisé la portée de l'autorité de la décision rendue par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité, celle-ci devrait être revêtue de l'effet erga omnes. Comme l'a fortement rappelé Delphine Emmanuel ADOUKI, les décisions rendues par les juridictions constitutionnelles africaines sont non seulement incontestables, elles produisent, en outre, un effet erga omnes538. Toutes les décisions du Conseil, y compris celles relevant de l'exception d'inconstitutionnalité sont revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée539. Alors, on peut certes reprocher au constituant et au législateur de n'avoir pas précisé clairement les effets du contrôle de constitutionnalité des lois a posteriori. Mais, toujours est-il qu'au Burkina Faso, cet absolutisme des décisions rendues sur exception d'inconstitutionnalité s'observe dans la pratique.

§2 : L'absolutisme observé des effets de la décision

La décision d'inconstitutionnalité a autorité absolue de chose jugée540, qu'elle soit intervenue a priori ou par exception d'inconstitutionnalité. A ce titre, on peut observer ce caractère absolu à travers l'opposabilité de la décision aux pouvoirs publics (A) en plus de son imposition aux juridictions ordinaires (B).

537 Abdoulaye SOMA, « Modélisation d'un système de justice constitutionnelle pour une meilleure protection des droits de l'homme : trans-constitutionnalisme et droit constitutionnel comparé », Op.cit., pp. 437-466.

538 Delphine Emmanuel ADOUKI, Op.cit., pp. 611-638.

539 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, 7ème édition, Op.cit., p. 165.

540 Pierre BON, « L'exception d'inconstitutionnalité en Espagne (question de constitutionnalité) », RFDC, n°4, 1990, pp. 679-683.

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A. L'opposabilité de la décision aux pouvoirs publics

Il ressort des dispositions de la Constitution que les décisions du Conseil constitutionnel burkinabè « s'imposent aux pouvoirs publics... »541. Ce paramètre exige que les décisions rendues par la juridiction constitutionnelle par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité, et pas seulement, doivent être parfaitement respectées dans tout l'ordonnancement juridique interne concerné. Comment pourrait-il en être autrement ? S'interroge Abdoulaye SOMA542. Selon lui, « « l'obligatoriété » des décisions rendues par le juge constitutionnel est un principe du droit généralement observé »543.

La détermination de la nature et de la portée de l'autorité des décisions des juridictions constitutionnelles africaines paraît, a priori, être une question dépourvue d'intérêt, tant il est vrai que les dispositions constitutionnelles qui la consacrent semblent claires. Mais, selon Delphine Emmanuel ADOUKI, il ne s'agit en réalité que d' « une obscure clarté » car, poursuit-elle, « ces dispositions constitutionnelles ne livrent manifestement pas toutes les clefs de compréhension en droit positif de l'autorité des décisions du juge constitutionnel »544, « à l'exception du Niger où l'alinéa 2 de l'article 134 de la Constitution dispose : « Tout jet de discrédit sur les arrêts de la Cour est sanctionné conformément aux lois en vigueur » »545.

Par ailleurs, Dominique ROUSSEAU expliquait que les décisions du Conseil doivent scrupuleusement être exécutées par les pouvoirs publics546. A ce titre, claire ou obscure, l'autorité des décisions du Conseil constitutionnel est vraisemblablement respectée par tous les pouvoirs publics au Burkina Faso. En effet, le Parlement ne s'est jamais aventuré à adopter en termes identiques un texte que le Conseil venait de censurer notamment sur exception d'inconstitutionnalité. Ce respect de l'autorité des décisions du Conseil constitutionnel dont fait montre les pouvoirs publics est notoire et sans conteste. Le Conseil constitutionnel burkinabè l'a lui-même reconnu lors du deuxième Congrès de la conférence Mondiale sur la justice constitutionnelle tenu à Rio de Janeiro en Janvier 2011. En effet, à cette occasion, la délégation du Conseil constitutionnel du Faso affirmait en des termes clairs qu'« On sait par ailleurs que l'article 2, alinéa 1 de la loi n°011-2000/ AN du 27 avril 2000 portant composition, organisation,

541 Article 159 al.2 de la Constitution burkinabè.

542 Abdoulaye SOMA, « Modélisation d'un système de justice constitutionnelle pour une meilleure protection des droits de l'homme : trans-constitutionnalisme et droit constitutionnel comparé », Op.cit., pp. 437-466.

543 Ibidem.

544 Delphine Emmanuel ADOUKI, « Contribution à l'étude des décisions du juge constitutionnel en Afrique », Op.cit., pp. 611-638.

545 Ibidem.

546 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, 7ème édition, Op.cit., p. 170.

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attributions et fonctionnement du Conseil constitutionnel et procédure applicable devant lui, qui prévoyait la prise en compte de l'avis du Conseil Supérieur de la Magistrature dans la nomination des magistrats au Conseil constitutionnel, a été modifié par la loi organique n°034-2000/AN du 13 décembre 2000. Cette loi modificative comporte la formule « sur proposition du Ministre chargé de la justice ». Il est important de noter que cette modification est intervenue suite à la décision n°02-2000/CS/CC du 31 août 2000 sur la constitutionnalité de la loi organique n°011-2000 relative au Conseil constitutionnel. Par cette décision, le Conseil avait déclaré la formule « Après avis du Conseil Supérieur de la Magistrature » inconstitutionnelle. Le législateur organique a donc tiré les conséquences de cette décision en biffant la formule incriminée. De ce qui précède, on peut inférer que les décisions du Conseil constitutionnel ont, au Burkina Faso, un certain impact sur les pouvoirs publics »547. Toutefois, cette autorité peut parfois être rudement mise à mal lorsque le Conseil constitutionnel, sur demande de ces mêmes pouvoirs publics, revient sur ses décisions. En effet, le Conseil constitutionnel burkinabè avait déclaré un traité contraire à la Constitution pour violation du principe de laïcité548. Trois mois plus tard, il a déclaré le même traité non amendé conforme à la constitution549.

Quoi qu'il en soit, les décisions rendues, aussi bien a priori qu'a posteriori par le Conseil constitutionnel sont généralement respectées par les pouvoirs publics burkinabè. Cette autorité des décisions du juge constitutionnel s'étend aussi aux juridictions ordinaires.

B. L'imposition de la décision aux juridictions ordinaires

L'imposition aux autres juridictions des décisions rendues par le Conseil constitutionnel peut paraître quelque peu complexe à envisager. Cette complexité réside dans le fait qu'il n'existe aucune hiérarchie entre le Conseil d'Etat, la Cour de cassation et le Conseil constitutionnel. Ce dernier n'est pas le supérieur des deux juridictions suprêmes. Le Conseil d'Etat et la Cour de cassation sont et demeurent les deux cours suprêmes au sommet des deux ordres de juridiction. Le Conseil constitutionnel reste un juge spécialisé en matière

547 Conseil Constitutionnel du Burkina Faso, « Séparation des pouvoirs et l'indépendance des Cours constitutionnelles et instances équivalentes », Communication à l'occasion du deuxième Congrès de la Conférence Mondiale sur la Justice Constitutionnelle tenu à Rio de Janeiro, du 16 au 18 janvier 2011, 15 p.

548 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, avis juridique n°2007-03/CC du 20 avril 2007 sur la conformité à la Constitution de l'accord de prêt entre le Burkina Faso et la Banque Islamique de Développement.

549 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, avis juridique n°2007-11/CC du 20 juillet 2007.

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constitutionnelle. Cette « absence de hiérarchie se traduit par le fait qu'il n'existe pas »550, aussi bien dans le système burkinabè que celui français, une « sanction du non-respect de l'autorité des décisions du Conseil constitutionnel par les autres juges. Le Conseil ne peut pas annuler les jugements des autres juridictions »551. De ce fait, force est de constater que la question de l'imposition des décisions du juge constitutionnel sur les autres juges devient moins aisée dans sa mise en oeuvre.

Toutefois, l'article 159 de la Constitution du Burkina Faso dispose à son deuxième alinéa que « Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ». Cette disposition traduit l'autorité de la chose jugée attachée aux décisions du Conseil constitutionnel. Il en résulte que lorsqu'un arrêt est rendu sur la non-conformité d'une loi, il s'impose à toutes les juridictions de la République. Selon Dieudonné KALUBA, cette autorité s'impose même aux juridictions suprêmes des deux ordres552. Ainsi, en matière d'exception d'inconstitutionnalité, lorsque le Conseil constitutionnel rend sa décision sur la constitutionnalité de la disposition contestée, le juge a quo doit en tirer les conséquences. Dès lors, s'il s'agit d'une décision de conformité, le juge du fond en charge de l'affaire doit appliquer la disposition dans le procès en cours devant lui. Au contraire, s'il s'agit d'une décision de non-conformité, le juge a quo doit également en tenir compte.

Par ailleurs, cette large autorité dont sont revêtues les décisions du Conseil constitutionnel, si d'une part elle force l'admiration, d'autre part, elle suscite quelques inquiétudes. Ainsi, en permettant au juge constitutionnel de déclarer l'inconstitutionnalité d'une loi qui est déjà en application, l'exception d'inconstitutionnalité semble être un mécanisme tendant à accorder un pouvoir législatif au juge constitutionnel.

550 Marc GUILLAUME, « L'autorité des décisions du Conseil constitutionnel : vers de nouveaux équilibres ? », Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, n°30, 2011/1, pp. 49-75.

551 Ibidem.

552 Dieudonné DIBWA KALUBA, La justice constitutionnelle en République démocratique du Congo, Op.cit., p. 584.

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Section II : Un pouvoir législatif accordé au juge constitutionnel ?

L'exception d'inconstitutionnalité a propulsé le juge constitutionnel burkinabè au rang

d' « organe législatif partiel »553 et serait davantage un contre-pouvoir qu'une autorité554. Ainsi, le juge constitutionnel serait devenu ce que d'aucuns appelleraient un législateur négatif (§1). Ce pouvoir manifestement important fait miroiter le risque d'un gouvernement des juges au Burkina Faso (§2).

§1 : Le juge constitutionnel, un législateur négatif

Le rôle de législateur négatif du juge constitutionnel s'aperçoit notamment dans son pouvoir d'abrogation des lois en vigueurs (A). Par ailleurs, il faut noter que le juge constitutionnel burkinabè n'a pas tendance à moduler les effets de cette abrogation (B).

A. L'abrogation de la loi par le juge constitutionnel

L'exception d'inconstitutionnalité est sans conteste le mécanisme par lequel le juge constitutionnel peut se prévaloir d'un pouvoir législatif. En effet, par ce mécanisme, le juge constitutionnel peut « geler » une loi, car dès lors qu'il la déclarera inconstitutionnelle, celle-ci ne pourra plus être appliquée. Tel que l'a écrit Pierre BON, la décision d'inconstitutionnalité doit entraîner la disparition de la norme contestée de l'ordonnancement juridique555. Mais, « est-ce que le pouvoir d'annuler les lois ne fait pas du Conseil constitutionnel un organe du pouvoir législatif ? », se questionne Bachir Yelles CHAOUCHE556. A cette interrogation, Mahamadou SY répondra que le juge constitutionnel semble être un « législateur à l'envers »557 dans la mesure où « ses annulations entrainent les mêmes effets que l'abrogation, ou mieux encore, le retrait de la loi »558. De ce point de vue, si par principe le juge constitutionnel ne

553 Patrick Wafeu TOKO, « Le juge qui crée le droit est-il un juge qui gouverne ? », Les Cahiers de Droit, Vol.54, n°1, 2013, pp. 145-174.

554 Ibidem.

555 Pierre BON, « L'exception d'inconstitutionnalité en Espagne (question de constitutionnalité) », Op.cit., pp. 679-683.

556 Bachir YELLES CHAOUCHE, Le Conseil constitutionnel en Algérie, Op.cit., p. 117 et Ss.

557 Mahamadou Mounirou SY, La protection constitutionnelle des droits fondamentaux en Afrique, Paris, l'Harmattan, 2007, p. 461.

558 Ibidem.

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maîtrise guère l'édiction d'une nouvelle norme, le fait qu'il gère directement la disparition d'une norme fait de lui un « législateur négatif »559.

En droit constitutionnel comparé nigérien, afin que ne subsiste aucune ambiguïté, la Constitution précise clairement que toute disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'exception d'inconstitutionnalité « est caduque de plein droit »560. De même qu'en droit constitutionnel français où la Constitution prévoit qu'une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement d'une QPC « est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel »561. Cette référence à « l'abrogation » permet de bien faire comprendre que la décision du Conseil constitutionnel emporte sortie de vigueur de la disposition législative litigieuse562.

Qu'en est-il du droit constitutionnel burkinabè ?

Hélas, une fois de plus, les textes en la matière au Burkina Faso restent silencieux sur cette question. Toutefois, la pratique observée dans le système juridique burkinabè laisse également croire à un effet abrogatoire des décisions d'inconstitutionnalité du Conseil constitutionnel burkinabè. Le rôle actif joué par le juge constitutionnel burkinabè fait de lui un véritable « jurislateur », selon le mot d'Ibrahim MOUMOUNI563. On peut parfaitement étayer cette affirmation en analysant le nouveau code de procédure pénale burkinabè. En effet, suite à la décision du 12 juillet 2016 rendue sur exception d'inconstitutionnalité par le Conseil constitutionnel qui a déclaré l'article 497°3 de l'ancien code de procédure pénale contraire à la Constitution, car refusant le droit d'appel à la partie civile dans un procès pénal564, le législateur a tenu à abroger cette disposition et à accorder désormais ce droit d'appel à la partie civile notamment à l'article 317-2 du nouveau code de procédure pénale565.

Outre cette décision, une autre décision d'inconstitutionnalité ou de non-conformité a été rendue par le Conseil une année plus tard sur l'exception d'inconstitutionnalité des articles

559 Pascale DEUMIER, « Les effets dans le temps des décisions QPC : un droit des conséquences des décisions constitutionnelles », Les Nouveaux Cahiers du Conseil Constitutionnel, n°46, 2015, pp. 65-77.

560 Article 132 al.2 de la Constitution nigérienne du 25 novembre 2010.

561 Article 62 al.2 de la Constitution française.

562 Pascal MBONGO, « Droit au juge et prééminence du droit. Bréviaire processualiste de l'exception d'inconstitutionnalité », Recueil Dalloz, 2008, p. 2089.

563 Ibrahim MOUMOUNI, « La Constitution : la fin de la hiérarchie des normes en droit interne ? », in Oumarou NAREY (dir.), La Constitution. Actes du Séminaire Scientifique Tenu à Niamey du 24 au 26 octobre 2018, ANDC, p. 291.

564 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2016-08/CC du 12 juillet 2016 sur exception d'inconstitutionnalité de l'article 497°3 du code de procédure pénale.

565 V°. La loi n°040-2019/AN du 29 mai 2019 portant code de procédure pénale au Burkina Faso.

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21 et 33 de la loi organique sur la Haute Cour de Justice566. Ce qui prouve que les décisions du juge constitutionnel ont une valeur législative567 et donc que le Conseil constitutionnel burkinabè a un pouvoir législatif. Ainsi, au Burkina Faso, sur les sept (7) fois que le Conseil a été saisi par exception d'inconstitutionnalité, celui-ci a rendu deux décisions de non-conformité et donc d'abrogation jurisprudentielle. Ce pouvoir d'abrogation dont dispose le juge constitutionnel est, selon notre analyse, une méconnaissance de la règle du parallélisme de forme et de compétence qui régit tout acte juridique. En effet, selon cette règle, seul le législateur qui a adopté la loi peut être compétent pour l'abroger. Dès lors, l'exception d'inconstitutionnalité constitue « un empiètement sur le législatif »568, un brouillard dans les institutions569.

De ce qui précède, il convient d'admettre que le juge constitutionnel est un représentant du peuple. Cela, parce que la représentation n'est pas liée au mode de nomination mais dérive de la qualité de co-législateur570. Dès lors, le juge constitutionnel peut être considéré comme un représentant du souverain, car il participe de manière décisionnelle à l'exercice du pouvoir législatif571. Ainsi, il est désormais clair que grâce à ce mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité, le juge constitutionnel burkinabè participe au pouvoir législatif, car disposant désormais d'un pouvoir d'abrogation sur les lois. Toutefois, force est de constater que l'abrogation immédiate d'une disposition législative peut parfois causer une insécurité juridique dans le droit positif. D'où l'intérêt de la modulation des effets de la décision d'abrogation qui fait défaut au Burkina Faso.

B. L'absence de modulation des effets de la décision d'abrogation

Dans cet argumentaire, il s'agirait de se questionner sur le fait de savoir si l'abrogation intervenue par le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité a un effet immédiat ou bien un effet différé. Ce choix entre abrogation immédiate ou différée s'exercera généralement au

566 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2017-013/CC du 09 juin 2017 sur l'exception d'inconstitutionnalité des articles 2, 21 et 33 de la loi organique sur la Haute Cour de Justice.

567 Anne RASSON, « La valeur de la distinction entre autorité absolue et autorité relative de la chose jugée », Op.cit., pp. 593-612.

568 Frédéric ROUVILLOIS, « Michel Debré et le contrôle de constitutionnalité », RFDC, n°46, 2001, pp. 227-235.

569 Yves GAUDEMET, « Brouillard dans les Institutions : à propos de l'exception d'inconstitutionnalité », Revue de Droit Public, n°3, 2009, pp. 581-587.

570 Cyril BRAMI, Des juges qui ne gouvernent pas, Op.cit., p. 174.

571 Ibidem.

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regard des conséquences manifestement excessives qu'emporterait une abrogation immédiate. Le Conseil constitutionnel burkinabè reste muet sur la détermination de la portée des effets de l'inconstitutionnalité constatée572. Il se contente de dire que la disposition querellée est contraire à la Constitution573 tout en laissant aux pouvoirs publics et aux juridictions le soin de tirer les conséquences de cette inconstitutionnalité.

En droit constitutionnel comparé français par contre, le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution dispose qu' « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision... ». En application de cette disposition, le juge constitutionnel français prend souvent le soin de déterminer la portée de l'inconstitutionnalité constatée au regard des effets que produirait l'abrogation immédiate de la norme. Ces effets sont parfois, mais pas toujours, précisés par le Conseil. Ainsi par exemple, le Conseil constitutionnel a pu dire dans une décision QPC rendue en 2010 que « l'abrogation immédiate de l'article L. 337 du code de la santé publique, devenu son article L. 3212?7, méconnaîtrait les exigences de la protection de la santé et la prévention des atteintes à l'ordre public et entraînerait des conséquences manifestement excessives »574. Plus récemment en 2014, le Conseil jugeait que « Considérant, en premier lieu, que l'abrogation immédiate du 8° bis de l'article 706-73 du code de procédure pénale aurait pour effet non seulement d'empêcher le recours à une garde à vue de quatre-vingt-seize heures pour des faits d'escroquerie en bande organisée, mais aussi de faire obstacle à l'usage des autres pouvoirs spéciaux de surveillance et d'investigation prévus par le titre XXV du livre IV du même code et aurait dès lors des conséquences manifestement excessives ; qu'afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité du 8° bis de l'article 706-73 du code de procédure pénale, il y a lieu de reporter au 1er septembre 2015 la date de cette abrogation »575. Par ailleurs, dans cette même décision, le Conseil poursuit son raisonnement en ajoutant que « les mesures de garde à vue prises avant la publication de la présente décision et les autres mesures prises avant le 1er septembre 2015 en application des dispositions déclarées contraires à la Constitution ne

572 Séni Mahamadou OUEDRAOGO, « L'admission en clair-obscur du droit d'appel de la partie civile en matière pénale : à propos de la décision n°2016-08/CC sur l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 497-3° du code de procédure pénale », RBD, n°51-1er semestre/2017, pp. 245-255.

573 Djibrihina OUEDRAOGO et Séni Mahamadou OUEDRAOGO, « Libres propos sur la transition politique au Burkina Faso : du contexte au texte de la Charte de la transition », Revue Electronique Afrilex, février 2015, 28 p.

574 V°. Conseil constitutionnel français, décision n°2010-71, QPC du 26 novembre 2010.

575 V°. Conseil constitutionnel français, décision n°2014-420/421 QPC du 09 octobre 2014.

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peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité »576. C'est ce qui a amené Xavier MAGNON à dénoncer cette modulation des effets dans le temps des décisions de censure et l'usage de l'abrogation différée, car celle-ci ne profitait pas au justiciable577 à l'origine de la question exceptionnelle de constitutionnalité. Or, cette modulation devrait être mise en balance avec le souci de l'effet utile578 au nom duquel la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision 579. Pour Pascal DEUMIER, « la disparition de la disposition inconstitutionnelle jouant pour l'avenir et pour les instances en cours » serait préférable580.

Au regard de cette critique, l'absence de modulation ou d'abrogation différée dans le paysage constitutionnel burkinabè reste l'option la plus profitable pour les justiciables qui seraient enclins à soulever une exception d'inconstitutionnalité. Par ailleurs, ce pouvoir législatif qui est accordé au Conseil par le mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité peut s'avérer redoutable dans un Etat démocratique tel que le Burkina Faso. Ainsi, si la naissance du juge constitutionnel marque la fin d'un absolutisme de la loi, avec ce mécanisme de l'exception d'inconstitutionnalité, ne faut-il pas craindre le début d'un autre ?

§2 : Le risque apparent d'un gouvernement des juges

La théorie du gouvernement des juges survient quand le juge constitutionnel a le pouvoir de remettre en cause une loi votée par le parlement notamment par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité. Dès lors, cette théorie se révèle manifestement dangereuse (A). Toutefois, cette théorie du gouvernement des juges paraît, en réalité, relativement excessive au Burkina Faso (B).

576 Voir le 27ème et dernier considérant de la décision n°2014-420/421 QPC du 09 octobre 2014.

577 Xavier MAGNON, « L'apport de la question prioritaire de constitutionnalité à la protection des droits et libertés dans les différents champs du droit : une synthèse », HAL/Archives ouvertes, 13 p.

578 Dans le domaine de l'interprétation des lois, un argument d'interprétation d'effet utile est un argument qui découle de l'adage selon lequel « le législateur ne parle pas pour rien dire » et qu'« il ne reste pas silencieux pour rien ». V°. Stéphane BEAULAC et Frédéric BERARD, Précis d'interprétation législative, Montréal, LexisNexis, 2014, 1ère édition, 566 p.

579 Pascale DEUMIER, « Les effets dans le temps des décisions QPC : un droit des conséquences des décisions constitutionnelles », Op.cit., pp. 65-77.

580 Ibidem.

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A. Une théorie manifestement dangereuse

L'expression « gouvernement des juges » traduit cette large autorité des « sages » du Conseil qui ont le pouvoir de paralyser l'action des représentants du peuple. En effet, Le spectre du gouvernement des juges plane généralement sur le juge constitutionnel car, c'est le seul juge dont le législateur ne peut défaire ce qu'il a décidé et dont la spécificité tient au caractère sans appel de ses décisions581. A ce titre, la Constitution burkinabè prévoit que « Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours... »582. Le contrôle par voie d'exception est nuisible dans la mesure où il confère au juge constitutionnel un pouvoir excessif583. Pour certains doctrinaires burkinabè à l'image d'Augustin LOADA, censurer la loi après sa promulgation et sa mise en application s'apparente à un crime de « lèse-majesté »584, car le peuple n'a pas à être contrôlé585. Cela conduit en effet au déclin de la souveraineté nationale du fait du juge constitutionnel586. C'est pourtant un tel pouvoir que le constituant burkinabè a entendu accorder au Conseil en consacrant l'exception d'inconstitutionnalité. Naturellement, cela soulève quelques inquiétudes. Le danger réside notamment dans le fait que l'on risque de passer de l'Etat de droit à l'Etat des juges587. On peut alors légitimement redouter une dérive vers un gouvernement des juges588, un despotisme juridictionnel589.

Par ailleurs, certains auteurs iront même plus loin en observant un pouvoir constituant qui serait accordé au juge constitutionnel. Il ne peut certes y avoir d'ingérence de la part du juge dans l'exercice du pouvoir constituant590, mais celui-ci voit de plus en plus son rôle récupéré par le juge constitutionnel qui, implicitement représente sa propre volonté591. Ce qui conforte l'argument de Dominique CHAGNOLLAUD selon lequel le véritable auteur d'une

581 Patrick Wafeu TOKO, « Le juge qui crée le droit est-il un juge qui gouverne ? », Op.cit., pp. 145-174.

582 Article 159 al.2 de la Constitution du Burkina Faso du 02 juin 1991.

583 Pierre PACTET et Ferdinand MELIN-SPUCRAMANIEN, Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 2017, 35ème édition, p. 74.

584 Augustin LOADA et Luc Marius IBRIGA, Droit constitutionnel et institutions politiques, Op.cit., p. 120.

585 Cyril BRAMI, Des juges qui ne gouvernent pas, op.cit., 2005, p. 20.

586 Oladé Okunlola Moïse LALEYE, La Cour constitutionnelle et le peuple au Bénin, Paris, l'Harmattan, 2018, p. 342.

587 Dominique CHAGNOLLAUD, Droit constitutionnel contemporain, Op.cit., p. 83.

588 Marie-Anne COHENDET, Droit constitutionnel, op.cit., p. 203.

589 Oladé Okunlola Moïse LALEYE, La Cour constitutionnelle et le peuple au Bénin, Paris, l'Harmattan, 2018, p. 338.

590 Eleonora BOTTINI, « L'intervention du juge constitutionnel dans l'exercice du pouvoir constituant », Jus Politicum/Revue de droit politique, n°18/2017, pp. 117-154. Disponible en ligne sur http://juspoliticum.com/article/L-intervention-du-juge-constitutionnel-dans-l-exercice-du-pouvoir-constituant-1187.html consulté le 26 juillet 2020 à 23h38.

591 Ibrahim MOUMOUNI, « La Constitution : la fin de la hiérarchie des normes en droit interne ? », in Oumarou NAREY (dir.), La Constitution. Op.cit., p. 291 et ss.

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norme « n'est pas l'auteur du texte mais l'interprète ultime de ce dernier »592. Interpréter un texte, c'est en droit, lui donner une vie juridique, ajoutera Dominique ROUSSEAU593. C'est donc le juge qui crée la norme constitutionnelle applicable594. De ce fait, en donnant une interprétation de la Constitution autre que celle que le Constituant avait imaginé, on peut dire que le juge constitutionnel a un pouvoir de modification de la Constitution. D'où la qualification d'un « troisième pouvoir constituant de l'interprète »595. Le cas du juge constitutionnel burkinabè est assez illustratif. En effet, en affirmant que la saisine directe du juge constitutionnel par le citoyen596 ne saurait intervenir que par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité597, le juge constitutionnel burkinabè s'est constitué en « troisième pouvoir constituant de l'interprète » car, selon nous, il y a là un désaccord entre la volonté du constituant et l'interprétation qui en est faite par le juge. Le droit de la Constitution est ainsi réécrit pas le juge constitutionnel598 burkinabè. Dès lors, il ne saurait être contesté que les juges créent du droit et par conséquent aient une part au gouvernement599.

Si le spectre du gouvernement des juges qui sous-tend le contrôle de constitutionnalité par voie d'exception se révèle être un danger pour l'Etat de droit, il semble pourtant qu'au Burkina Faso le danger ne soit pas aussi imminent qu'il y paraît.

B. Une théorie relativement excessive

Il existe toujours le danger « d'une aristocratie de robe »600 qui « s'arroge le pouvoir constituant et muselle le pouvoir législatif sous couvert d'interprétation de la Constitution »601. Avec Marie-Anne COHENDET, on peut répondre à cela que le juge, et en particulier le juge

592 Dominique CHAGNOLLAUD, Droit constitutionnel contemporain, Op.cit., p. 87.

593 Dominique ROUSSEAU, La justice constitutionnelle en Europe, Paris, Montchrestien, 1996, 2ème édition, p. 34-35.

594 Ibidem.

595 Séverin Andzoka ATSIMOU, « La participation des juridictions constitutionnelles au pouvoir constituant en Afrique », RFDC, n°110, 2017/2, pp. 279-316.

596 Article 157 al.2 de la Constitution burkinabè.

597 V°. Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2019-017/CC du 08 août 2019 sur le recours en inconstitutionnalité de la loi portant code pénal.

598 Bernard CUBERTAFOND, Le nouveau droit constitutionnel, Op.cit., p. 18.

599 Michel TROPER, « Le bon usage des spectres du gouvernement des juges », in Jean-Claude COLLIARD et Yves JEGOUZO, Le nouveau constitutionnalisme. Mélanges en l'honneur de Gérard CONAC, Paris, Economica, 2001, p. 49.

600 Marie-Anne COHENDET, Droit constitutionnel, Op.cit., p. 204.

601 Ibidem.

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de la constitutionnalité des lois, « ne bloque pas la volonté générale, il ne fait que l'orienter vers la bonne procédure. Il serait donc un simple aiguilleur, un frein et non pas un véritable pouvoir de blocage »602. Ainsi, a priori, il n'y a rien, dans ce droit constitutionnel jurisprudentiel, qui sorte du rôle normal du juge. D'ailleurs, pendant longtemps, on a même dû constater de sa part une certaine timidité603. En effet, conscient de la menace des accusations qui pèserait sur lui s'il outrepassait le cadre de son office, le juge constitutionnel burkinabè a tendance à s'autolimiter604. Même si son pouvoir d'auto-saisine relance le débat605.

Formule tous usagers, locution « passe partout » la théorie du gouvernement des juges, ne fait que souligner négativement une préoccupation qui justifie l'affirmation suivant laquelle le XXème est celui des juridictions constitutionnelles comme le XIXème a été celui du parlement606. Cela traduit le passage de l'Etat légal, marqué par la prééminence du Parlement, à l'Etat de droit marqué par la prééminence du juge607. Ainsi, tout se passe comme si, pour qu'il n'y ait pas de gouvernement des juges, le contrôle de constitutionnalité des lois, s'il doit s'accomplir, doit respecter la prééminence du Parlement, expression de la volonté populaire. Mais, pour que l'expression « gouvernement des juges » corresponde à la réalité, il faut qu'il y ait substitution de ceux-ci au législateur608. Or, il n'en est rien. La réalité est que le Conseil ne gouverne pas, et « en tant que juge, il ne pourrait gouverner. Cela, parce que certains domaines lui échappent, car il ne dispose pas d'une compétence générale, mais seulement d'une compétence d'attribution »609.

Par ailleurs, selon Elisabeth ZOLLER, le « gouvernement des juges » commence là où le juge statue sans texte610. Pourtant, le juge constitutionnel n'est pas créateur du droit dans la mesure où il ne part pas du néant, il se fonde toujours sur une disposition constitutionnelle pour lui donner un sens611. De ce fait, il découvre le droit612. Ainsi, qu'il s'agisse d'un contrôle de constitutionnalité a priori ou d'une exception d'inconstitutionnalité, « il est moins question

602 Ibidem.

603 Bernard CHANTEBOUT, Droit constitutionnel, Op.cit., p. 559.

604 Le manque d'audace du juge constitutionnel burkinabè dans l'affaire EROH est assez illustratif.

605 Article 157 al.3 de la Constitution du Burkina Faso.

606 Mahamadou Mounirou SY, La protection constitutionnelle des droits fondamentaux en Afrique, Op.cit., p. 463.

607 Michel VERPEAUX, La Constitution, Paris, Dalloz, 2008, p. 69.

608 Mahamadou Mounirou SY, La protection constitutionnelle des droits fondamentaux en Afrique, Op.cit., p. 464.

609 Ibidem.

610 Elisabeth ZOLLER, Droit constitutionnel, Op.cit., p. 242.

611 Ibrahim MOUMOUNI, « La Constitution : la fin de la hiérarchie des normes en droit interne ? », Op.cit., p. 291.

612 Ibidem.

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d'un gouvernement du juge constitutionnel que d'un gouvernement par procuration qui célèbre en réalité la volonté du souverain et le sacre du citoyen »613. Cela s'explique par le fait que son pouvoir de contrôle des lois découle de la volonté du peuple souverain exprimée dans la loi fondamentale qu'est la Constitution614. C'est en effet de là que le juge constitutionnel burkinabè tire sa légitimité. De ce fait, lorsqu'il affirme la conformité d'une loi à la Constitution, il lui donne aussi un label de légitimité615. Ainsi, le juge devient garant et témoin616. Il y a lieu donc de conclure à l'excessivité de cette théorie du « gouvernement des juges » qui ne saurait effectivement s'appliquer au juge constitutionnel burkinabè et ce, malgré son important pouvoir de censure sur les lois résultant de l'exception d'inconstitutionnalité. Le juge constitutionnel ne gouverne donc pas au Burkina Faso. Quoi qu'il en soit, c'est toujours le peuple souverain qui a le dernier mot. C'est dans ce sens que Georges VEDEL affirmait que « Si les juges ne gouvernent pas, c'est parce que, à tout moment, le souverain, à la condition de paraître en majesté comme constituant peut, dans une sorte de lit de justice, briser leurs arrêts »617.

613 Patrick Wafeu TOKO, « Le juge qui crée le droit est-il un juge qui gouverne ? », Op.cit., pp. 145-174.

614 Article 152 de la Constitution burkinabè.

615 Mahamadou Mounirou SY, La protection constitutionnelle des droits fondamentaux en Afrique, Op.cit., p. 465.

616 Ibidem.

617 Georges VEDEL, « Schengen et Maastricht », RFDA, n°2, 1992, pp. 178-180. Extrait de Olivier BEAUD, « Le cas français : l'obstination de la jurisprudence et de la doctrine à refuser toute idée de limitation au pouvoir de révision constitutionnelle », Jus politicum, n°18, disponible en ligne sur http://juspoliticum.com/article/le-cas-francais-l-obstination-de-la-doctrine-a-refuser-toute-idee-de-limitation-au-pouvoir-de-revision-constitutionnelle-1170.html, consulté le 26 juillet à 23h.

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Conclusion partielle

L'efficacité de l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso s'observe par le fait que ce mécanisme participe à l'instauration d'un Etat de droit durable. En droit constitutionnel contemporain, l'Etat de droit est substantiellement lié à la protection des droits fondamentaux des citoyens. Grâce à l'exception d'inconstitutionnalité, les droits fondamentaux des citoyens burkinabè seront efficacement sauvegardés. En cela, l'exception d'inconstitutionnalité présente un intérêt subjectif. Toutefois, le constituant burkinabè n'ayant pas limité l'objet du recours en exception d'inconstitutionnalité aux seuls droits fondamentaux mais à toute disposition inconstitutionnelle, l'on voit se dessiner l'intérêt objectif de ce mécanisme au Burkina Faso. Ainsi permet-il d'assurer efficacement la supériorité de la Constitution tout en favorisant une constitutionnalisation de toutes les branches du droit. De même, l'exception d'inconstitutionnalité présente un intérêt démocratique dans la mesure où, elle permet in fine la participation du peuple au pouvoir en raison du fait que le citoyen pourra, à tout moment et si besoin est, rappeler le pouvoir législatif à l'ordre en s'appuyant sur le juge constitutionnel. Ce dernier obtient par là un label de légitimité618. Cette légitimité se manifeste par l'autorité des décisions rendues notamment sur exception d'inconstitutionnalité. Ces décisions s'imposent dès lors, de manière absolue aux pouvoirs publics et à toutes les autorités tant administratives que juridictionnelles. Le respect par ces pouvoirs et autorités des décisions du juge constitutionnel témoigne alors de la légitimité du juge et de ses décisions. Même s'il faut par ailleurs craindre un empiètement du juge constitutionnel sur les compétences du pouvoir législatif du fait que ses décisions de non-conformité intervenant par la voie de l'exception d'inconstitutionnalité ont un effet abrogatif, sa légitimité n'est pas pour autant entravée dans la mesure où il tient cette compétence de par la Constitution elle-même.

618 Mahamadou Mounirou SY, La protection constitutionnelle des droits fondamentaux en Afrique, Op.cit., p. 465.

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CONCLUSION GENERALE

Moyen indirect d'accès du citoyen au juge constitutionnel, l'exception d'inconstitutionnalité est sans commune mesure le moyen le plus efficace pour la protection des droits du citoyen. Si son effectivité laissait encore à désirer au lendemain de sa consécration du fait notamment de sa non utilisation par les citoyens, l'exception d'inconstitutionnalité est aujourd'hui dans une propension grandissante au Burkina Faso. Ce mécanisme avait souffert de sa procédure qui était non seulement complexe619, mais aussi non clairement précisée par la Constitution et la loi organique sur le Conseil constitutionnel. Il fallait donc s'en remettre au juge constitutionnel lorsqu'il sera saisi pour vérifier les exigences procédurales qu'imposait ce mécanisme. Mais, quand il eut enfin eu l'occasion, le juge constitutionnel burkinabè manqua d'audace pour rappeler aux juridictions ordinaires leur obligation de renvoi. C'est en cela que la première décision du Conseil constitutionnel sur exception d'inconstitutionnalité aura été mitigée620. Mais, progressivement, l'exception d'inconstitutionnalité devient plus facile à mettre en oeuvre au Burkina Faso grâce notamment à la consécration par le juge constitutionnel burkinabè d'une saisine directe par voie d'exception. Si par cette décision621, la juridiction constitutionnelle avait entendu fermer les portes de la saisine directe par le citoyen, elle venait, par la même occasion, de simplifier la procédure de mise en oeuvre de l'exception d'inconstitutionnalité en soustrayant cette saisine des désidératas des juridictions ordinaires. Ce qui sous-entend que le justiciable n'a nullement besoin d'attendre la décision de renvoi de la juridiction ordinaire.

Ainsi, l'exception d'inconstitutionnalité devient un puissant moyen pour la protection de la Constitution en général et des droits fondamentaux en particulier. Cette protection des droits fondamentaux fait du Burkina Faso un Etat de droit622. C'est d'ailleurs la fonction la plus

619 Cette complexité résidait dans le fait les juridictions ordinaires avait la latitude de bloquer le processus en refusant d'effectuer le renvoi préjudiciel sans pour autant que le justiciable ne dispose d'un autre moyen de recours.

620 Séni Mahamadou OUEDRAOGO, « L'admission en clair-obscur d'un du droit d'appel de la partie civile en matière pénale : à propos de la décision n°2016-08/CC sur l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 497-3° du code de procédure pénale », Op.cit., pp. 245-255.

621 Conseil constitutionnel burkinabè, DCC n°2017-014/CC du 09 juin 2017 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la loi sur la Haute Cour de Justice.

622 Salif YONABA, « La place des droits de l'homme dans la Constitution de la quatrième république », Mél. Jacques Velu : Présence du droit public et droits de l'homme, Bruxelles, 1992, pp. 1223-1233. Cité par Kader GARBA HAMIDOU, La protection des droits fondamentaux par le juge constitutionnel : cas du Burkina Faso et du Niger, Op.cit., p. 90.

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déterminante et la plus importante d'une juridiction constitutionnelle623. Par ce mécanisme, le juge constitutionnel burkinabè devient le garant des droits du citoyen et le dernier rempart de celui-ci contre l'arbitraire de la loi, fruit des élus du peuple. C'est ainsi qu'on pourrait apercevoir un pouvoir législatif ou même un pouvoir créateur du juge constitutionnel.

Par ailleurs, si l'exception d'inconstitutionnalité peut, dans une certaine mesure, être considérée comme un moyen de participation du peuple au pouvoir, le rôle du Conseil constitutionnel dans le processus de fabrication des lois624, « s'il satisfait la logique juridique, heurte la logique démocratique qui suppose que les lois sont l'expression de la volonté du peuple souverain »625. Posée dans ces termes, la question de la légitimité du contrôle de constitutionnalité des lois est insoluble, car enfermée dans un dilemme parfait : ou bien il n'existe pas de contrôle des lois, et le principe démocratique peut souffrir sous le coup de décisions du législateur contraires aux libertés et violant la Constitution adoptée par le peuple, ou bien il existe un contrôle des lois, et le principe démocratique peut souffrir également de la soumission progressive de la volonté des représentants élus par le peuple à une institution sans légitimité élective626. Mais, le juge constitutionnel doit exercer son pouvoir créateur pour assurer une correspondance maximale du droit avec l'état de la société. Ce réalisme qui s'impose au juge contribue à le doter d'une légitimité fonctionnelle627. Dans ce contexte, le Conseil constitutionnel apparaît, du fait du silence et de l'impuissance du Parlement, comme le seul lieu où la volonté législative du gouvernement puisse être efficacement discutée628 : « au déclin du face-à-face gouvernement-Parlement a correspondu l'essor du face-à-face Exécutif-Conseil constitutionnel, ce dernier apparaissant comme le contrepoids moderne d'un nouvel équilibre constitutionnel. Pour cela, le Conseil puise sa légitimité dans le déséquilibre accentué des pouvoirs »629.

Quoi qu'il en soit, le constituant a consacré l'exception d'inconstitutionnalité au Burkina Faso, le juge constitutionnel a assouplie sa procédure de mise en oeuvre, les autorités et pouvoirs publics respectent les décisions qui en découlent. Mais, du reste, le mécanisme demeure encore d'une timide application. L'exception d'inconstitutionnalité sommeille encore au Burkina Faso, tel un livre qui ne cesse de s'empoussiérer dans les meubles d'une

623 Théodore HOLO, « Emergence de la justice constitutionnelle », Op.cit., p. 101-114.

624 Dominique CHAGNOLLAUD, Droit constitutionnel contemporain, Op.cit., p. 86.

625 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, 9ème édition, Op.cit., p. 52.

626 Ibidem.

627 Cyril BRAMI, Des juges qui ne gouvernent pas, Op.cit., p. 174.

628 Dominique ROUSSEAU, Droit du contentieux constitutionnel, Op.cit., p. 56.

629 Ibidem.

bibliothèque désaffectée. Le citoyen-justiciable n'en a sûrement pas effectivement connaissance pour s'en prévaloir. Il y a lieu alors de privilégier la promotion du Conseil constitutionnel burkinabè afin que les citoyens prennent conscience de l'opportunité qui s'offre à eux. C'est justement cette saisine quasi-inexistante du juge constitutionnel qui fait qu'on ne puisse pas raisonnablement parler d'un gouvernement du juge constitutionnel au Burkina Faso. Celui-ci n'est en effet pratiquement jamais solliciter a fortiori avoir l'occasion de s'imposer au Burkina Faso. Toutefois, si le citoyen burkinabè n'est suffisamment pas mature pour savoir user de l'exception d'inconstitutionnalité, que fait le juge constitutionnel de son pouvoir d'auto-saisine630 pour une protection plus efficace des droits fondamentaux du citoyen ?

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630 Un pouvoir que lui a accordé la Constitution du 02 juin 1991 à son article 157 al.3.

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IV. LES SOURCES

A. SOURCES NATIONALES

1. LES TEXTES CONSTITUTIONNELS

· Constitution burkinabè du 02 juin 1991 in JORBF

· Constitution béninoise du 11 décembre 1990 disponible sur https://www.wipo.int, consulté le 17 août 2020.

· Constitution nigérienne du 25 novembre 2010 in JORN.

· Constitution française du 04 octobre 1958 in JORF.

107

2. LES TEXTES LEGISLATIFS

· Loi organique n°011-2000/AN du 27 avril 2000 portant composition, organisation, attributions, fonctionnement et procédure applicable devant le Conseil constitutionnel burkinabè.

· Loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-

1 de la Constitution française.

· Loi organique n°2012-35 du 19 juin 2012 déterminant l'organisation, le fonctionnement et la procédure suivie devant la Cour constitutionnelle du Niger.

· Loi organique n°91-009 du 4 mars 1991 relative à la Cour constitutionnelle du Bénin.

· Loi n°2008-74/AN du 23 juillet 2008 portant révision de la Constitution en France.

· Loi n°040-2019/AN portant code de procédure pénale au Burkina Faso.

· Le règlement intérieur du Conseil constitutionnel burkinabè du 06 mars 2008.

B. SOURCES INTERNATIONALES

· Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789.

· Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948.

· Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples du 27 juin 1981.

· Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques du 16 décembre 1966.

V. JURISPRUDENCE

- Cour suprême des Etats-Unis, arrêt Marbury /c Madison du 24 février 1803.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°02-2000/CS/CC du 31 août 2000 sur la constitutionnalité de la loi organique relative au Conseil constitutionnel.

- Conseil constitutionnel burkinabè, avis juridique n°2003-08/CC du 14 avril 2003 sur le statut de Rome de la Cour Pénale Internationale.

- Conseil constitutionnel burkinabè, avis juridique n°2007-03/CC du 20 avril 2007 sur la conformité à la Constitution de l'Accord de prêt entre le Burkina Faso et la Banque Islamique de Développement.

- Conseil constitutionnel burkinabè, avis juridique n°2007-11/CC du 20 juillet 2007 sur la conformité à la Constitution de l'Accord de prêt entre le Burkina Faso et la Banque Islamique de Développement.

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- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2007-04/CC du 29 août 2007 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la société EROH.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2016-08/CC du 12 juillet 2016 sur l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 497°3 du code pénal.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2017-013/CC du 09 juin 2017 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la loi organique sur la Haute Cour de Justice.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2018-007/CC du 20 mars 2018 sur l'exception d'inconstitutionnalité de la loi sur le Conseil Supérieur de la Magistrature.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2019-001/CC du 12 février 2019 sur la requête en inconstitutionnalité de l'alinéa 1er de l'article 166 de la loi n°081-2015/CNT du 24 novembre 2015 portant Statut Général de la Fonction Public de l'Etat.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2019-002/CC du 15 mars 2019 sur l'inconstitutionnalité d'une ordonnance.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2019-015/CC du 23 juillet 2019 sur le recours en inconstitutionnalité de la loi du 13 novembre 1996 portant code pénal.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2019-017/CC du 08 août 2019 sur le recours en inconstitutionnalité de la loi n°044-2019/AN du 21 juin 2019 portant code pénal.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2020-024/CC du 16 octobre 2020 sur le recours de DICKO Harouna et quatre autres en inconstitutionnalité des dispositions des articles 50, 122.2, 148, 155 et 236 du Code électoral.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2020-030/CC du 13 novembre 2020 sur l'exception d'inconstitutionnalité de l'article 53 de la loi n°010-2016/AN du 26 avril 2016 portant composition, organisation, attributions, fonctionnement de la Cour administrative d'appel et la procédure applicable devant elle.

- Conseil constitutionnel burkinabè, décision n°2021-006/CC du 08 février 2021 sur la requête de l'Etat du Burkina Faso en exception d'inconstitutionnalité de l'article 90 de la loi n°032-2018/AN du 26 juillet 2018 portant création, composition, organisation, attributions et fonctionnement du Conseil d'Etat et procédure applicable devant lui.

- Conseil constitutionnel français, décision n°71-44/CC du 16 juillet 1971, Liberté d'association.

- Conseil constitutionnel français, décision n°74-54/CC du 15 janvier 1975, IVG.

- Conseil constitutionnel français, décision n°85-197/DC du 23 août 1985.

- Conseil constitutionnel français, décision n°2009-595 du 3 décembre 2009.

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- Conseil constitutionnel français, décision n°2010-71, QPC du 26 novembre 2010.

- Conseil constitutionnel français, décision n°2013-363, QPC du 31 janvier 2014 sur la

constitutionnalité de l'article 497 du code pénal français.

- Conseil constitutionnel français, décision n°2014-420/421, QPC du 09 octobre 2014.

- Conseil constitutionnel français, décision n°2020-858/859, QPC du 02 octobre 2020.

- Cour constitutionnelle du Bénin, décision n°96-049 du 12 août 1996.

- Cour constitutionnelle du Bénin, décision n°96-060 du 26 septembre 1996 sur plainte de

dame MELO GOMEZ pour violation du droit d'aller et venir.

- Cour constitutionnelle du Bénin, DCC n°98-073 du 30 septembre 1998 à propos d'une

requête introduite par une SARL dénommée HAGE ALI TRADING.

- Cour constitutionnelle du Bénin, DCC n°03-90 du 28 mai 2003.

- Cour constitutionnelle du Bénin, DCC n°13-064 du 9 juillet 2013.

VI. SITES WEB

V' Bibliothèque numérique You Scribe en ligne, https://www.youscribe.com, consulté dernièrement le 08 octobre 2020 à 18h52.

V' Conseil constitutionnel du Burkina Faso, https://www.conseil-constitutionnel.gov.bf, consulté dernièrement le 18 octobre 2020 à 16h47.

V' Conseil constitutionnel français, https://www.conseil-constitutionnel.fr, consulté dernièrement le 06 octobre 2020 à 17h58.

V' Revue des Droits de l'Homme en ligne, https://www.journals.openedition.org/revdh, consulté dernièrement le 22 septembre 2020.

V' Revue électronique Afrilex, https://www.afrilex.u-bordeaux4.fr, consulté dernièrement le 30 septembre 2020 à 10h11.

110

TABLE DES MATIERES

AVERTISSEMENT i

EPIGRAPHIE ii

DEDICACE iii

REMERCIEMENTS iv

LISTE DES SIGLES, ABBREVIATIONS ET ACRONYMES v

SOMMAIRE vii

INTRODUCTION 1

TITRE I : LA CONSECRATION MITIGEE DE L'EXCEPTION

D'INCONSTITUTIONNALITE AU BURKINA FASO 9

CHAPITRE I : UNE CONSECRATION INSUFFISANTE DE L'EXCEPTION

D'INCONSTITUTIONNALITE 10

Section I : Un fondement constitutionnel de l'exception d'inconstitutionnalité 10

§1 : Une consécration constitutionnelle tardive 10

A. Un mécanisme longtemps prévu par la seule loi organique 11

B. Une récente constitutionnalisation expresse du mécanisme 13

§2 : Les référentiels normatifs de l'exception d'inconstitutionnalité 15

A. La richesse des normes de contrôle ou normes de référence 15

B. La nature de la norme contrôlée 17

Section II : Un mécanisme longtemps rendu inopérant 19

§1 : L'utilisation insuffisante du mécanisme par les justiciables 20

A. Le manque de confiance des justiciables au Conseil constitutionnel 20

B. L'inaction des avocats des parties au procès 22

§2 : Le faux départ des juridictions ordinaire et constitutionnelle 24

A. La susceptibilité décourageante de la Cour de cassation 25

B. La frilosité du juge constitutionnel 27
CHAPITRE II : UNE QUALIFICATION ERRONEE DU MECANISME : UNE QUESTION

PREJUDICIELLE PAR NATURE 30

111

Section I : Une question soulevée devant le juge ordinaire 31

§1 : Un mode d'introduction classique de l'exception 31

A. Un mécanisme intervenant à titre incident 31

B. Une requête introduite à tout moment de la procédure 33

§2 : Une procédure remarquablement simplifiée 35

A. Une absence d'examen de la recevabilité de la requête 35

B. Une obligation immédiate de renvoi préjudiciel 37

Section II : Une question tranchée par le Conseil constitutionnel 39

§1 : L'évolution du mode de saisine du Conseil constitutionnel 39

A. L'exigence de la qualité de juridiction 39

B. La consécration d'une saisine directe par voie d'exception 41

§2 : Le déroulement de l'instance constitutionnelle 44

A. L'introduction de la requête 44

B : L'application du principe du contradictoire 47

Conclusion Partielle 49

TITRE II : L'EFFICACITE PERCEPTIBLE DE L'EXCEPTION

D'INCONSTITUTIONNALITE AU BURKINA FASO 50

CHAPITRE I : L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE, UNE GARANTIE POUR

L'ETAT DE DROIT 51

Section I : Une subjectivation manifeste du contentieux constitutionnel 52

§1 : Un gage pour les droits et libertés individuels 52

A. La protection affermie des droits fondamentaux 52

B. L'exception d'inconstitutionnalité, un droit fondamental 54

§2 : Une appropriation de la Constitution par les justiciables 56

A. La normativité de la Constitution 56

B. La protection d'intérêts personnels 59

Section II : Une objectivation maintenue du contentieux constitutionnel 61

§1 : Un purgatoire des normes inconstitutionnelles 61

A.

112

Un mécanisme assurant la supériorité de la Constitution 61

B. Un mécanisme facilitant la constitutionnalisation des branches du droit 64

§2 : Un mécanisme revalorisant le principe démocratique 67

A. Une voie pour la participation du peuple au pouvoir 67

B. L'émergence d'une démocratie constitutionnelle 69
CHAPITRE II : L'EXCEPTION D'INCONSTITUTIONNALITE, UN SIGNE DE LA

LEGITIMITE DU JUGE CONSTITUTIONNEL 72

Section I : L'autorité des décisions rendues sur exception d'inconstitutionnalité 73

§1 : La relativité de principe des effets de la décision 73

A. L'effet inter partes de la décision 73

B. La tendance vers un effet erga omnes de la décision 75

§2 : L'absolutisme observé des effets de la décision 76

A. L'opposabilité de la décision aux pouvoirs publics 77

B. L'imposition de la décision aux juridictions ordinaires 78

Section II : Un pouvoir législatif accordé au juge constitutionnel ? 80

§1 : Le juge constitutionnel, un législateur négatif 80

A. L'abrogation de la loi par le juge constitutionnel 80

B. L'absence de modulation des effets de la décision d'abrogation 82

§2 : Le risque apparent d'un gouvernement des juges 84

A. Une théorie manifestement dangereuse 85

B. Une théorie relativement excessive 86

Conclusion partielle 89

CONCLUSION GENERALE 90

BIBLIOGRAPHIE 93

TABLE DES MATIERES 110






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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore