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La participation des salariés en droit des sociétés commerciales


par Dilane Gildas DJIOKENG FEUJIO
Université de Dschang - Master 2 2019
  

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CONCLUSION DU CHAPITRE I

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Il ressort des précédents développements que le droit OHADA se sert des formules du cumul d'un mandat social avec un contrat de travail et du délégué du personnel prévu dans les législations sociales des États membres pour faire davantage participer les salariés à la gestion de la société in bonis. Cependant, cette participation s'avère très insuffisante en raison des carences du régime de cumul de fonctions et de l'absence d'institutions de représentation collective des salariés tel que le comité d'entreprise. L'on pense au regard des analyses qui ont précédées qu'il est nécessaire de rendre obligatoire la participation des salariés dans les organes dirigeants de l'entreprise en supprimant le caractère facultatif de l'administrateur salarié, et en consacrant une institution collective de représentation tel que le comité d'entreprise. De même en temps de difficultés, les salariés devraient être très impliqués dans la gestion de la société.

CHAPITRE II : L'IMPLICATION MITIGÉE DES SALARIÉS DANS LA
GESTION DES DIFFICULTÉS DE LA SOCIÉTÉ COMMERCIALE

Lorsque se présentent les difficultés économiques ou financières, la gestion de la société devient extraordinaire. Ces difficultés peuvent être légères ou sérieuses, et nécessiter respectivement une action extra judiciaire appelée la conciliation ou une action judiciaire appelée règlement préventif. Mais ces difficultés peuvent êtres très graves et plonger l'entreprise dans une situation de crise économique dite de la cessation des paiements : cette dernière nécessitera un traitement spécial selon que l'entreprise peut être sauvée (redressement judiciaire) ou pas (liquidation des biens). Les conséquences de ces situations sont si importantes que toutes les parties prenantes de l'entreprise devraient s'impliquer dans leurs résolutions. Les salariés, parce qu'ils sont le relais entre la vie interne et externe de l'entreprise, sont plus susceptibles de maitriser les causes du/des problème(s), de le(s) détecter très rapidement, et avoir ainsi des idées de résolution. Parce qu'ils sont (on pourrait dire) autant affectés que les associés et les créanciers, par l'issue de la procédure, ils devraient logiquement être impliqués dans leurs traitements. C'est la raison pour laquelle les procédures collectives qui visent à résoudre ces difficultés ne peuvent se faire sans l'intervention des salariés ou de leurs représentants. Mais le droit OHADA à travers son AUPCAP, laisse perdurer les réminiscences d'une gestion exclusive des salariés. Il semble moins en faire des acteurs que de simples « spectateurs ou victimes »137. Dans ce sens, puisqu'il implique de façon très mitigée les salariés dans la gestion des crises économiques de l'entreprise (section 1) il est nécessaire de chercher les moyens qui favoriseront une meilleure participation des salariés (section 2).

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137 YANPELDA (V.), « Les salariés dans les procédures collectives OHADA. Acteurs ou spectateurs ? », Revue de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, n°1, 2011, p. 37. Les salariés sont des spectateurs s'ils n'agissent pas et des victimes lorsqu'ils subissent l'impact des difficultés à travers notamment les licenciements, les reclassements etc.

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SECTION I : LA PARTICIPATION DES SALARIÉS DANS LE TRAITEMENT DES DIFFICULTÉS DE LA SOCIÉTÉ LIMITÉE À L'EXISTENCE DE LA CESSATION DES PAIEMENTS

En droit OHADA des entreprises, les salariés sont impliqués dans la gestion des difficultés économiques de leurs employeurs. Mais cette implication est mitigée pour plusieurs raisons. Déjà, si le salarié n'est pas également associé/actionnaire, ou dirigeant, il est impuissant dans la prévention de la cessation des paiements (crise économique138) de son entreprise alors même que les restructurations qui peuvent en sortir sont susceptibles de l'affecter139. Il ne peut s'exprimer qu'en cas de cessation des paiements140 en provoquant l'ouverture des procédures curatives (paragraphe 1), ou en accordant des concessions sur ses avantages (paragraphe 2) en vue de la résolution de la crise.

PARAGRAPHE I : LA POSSIBILITÉ D'OUVERTURE DES PROCÉDURES
COLLECTIVES CURATIVES PAR LES SALARIÉS

En principe, l'ouverture d'une procédure collective curative est l'apanage du débiteur qui est obligé de déclarer sa cessation des paiements141. Mais n'ayant pas « l'assurance que le débiteur y défère spontanément »142, le législateur a étendu le champ de compétence à plusieurs autres personnes. Ainsi, explicitement, l'acte uniforme donne la possibilité aux salariés de demander l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire soit en tant que créancier de l'entreprise (A), soit en tant qu'informateur du juge compétent en vue de sa saisine d'office (B).

138 La crise économique est entendue ici comme toute difficulté économique ou financière de nature à compromettre le fonctionnement normal de l'entreprise.

139 La quasi exclusion du salarié des procédures préventives peut s'expliquer par le fait qu'à cette étape des crises, la société étant toujours in bonis, sa gestion est toujours normale, ses dirigeants de ce fait ont toujours l'exclusivité de tous leurs pouvoirs de gestion. Les procédures préventives étant considérées comme des actes de gestion. Aussi, ces procédures ont été instituées dans l'intérêt du débiteur pour qui, elles sont des moyens de protection judiciaires, et qui seul, peut décider de leur opportunité ; Voir, KOUAMO (D.R.), L'implication du salarié dans la prévention et le traitement des difficultés entreprises dans l'espace OHADA. Le cas du Cameroun, thèse, Université de Nantes, 9 janvier 2018, p. 179-182.

140 Article 25 al.2 de l'AUPCAP : « La cessation des paiements est l'état où le débiteur se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à l'exclusion des situations où les réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face à son passif exigible ».

141 Article 25 et 228 de l'AUPCAP. 142KOUAMO (D.R.), op. cit., p. 227.

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A - L'action individuelle des salariés en tant que créanciers de la société

À la différence des procédures préventives d'apurement du passif, l'AUPCAP élargit le champ des requérants d'une ouverture des procédures curatives. D'après l'article 28, l'orée de ces procédures peut être l'initiative d'un créancier qui justifie d'une créance certaine, liquide et exigible, à l'encontre de l'entreprise débitrice. Ce dernier a le droit de saisir la juridiction compétente et demander l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens à l'encontre de son débiteur. L'initiative n'est plus l'apanage du débiteur comme c'est le cas avec les procédures préventives. Et ceci se justifie aisément par le fait que l'objectif poursuivi dans les procédures curatives n'est plus uniquement la protection du débiteur, mais plus largement, la défense des intérêts de toutes les parties prenantes (internes et externes) de l'entreprise. C'est également l'une des raisons de la restriction des pouvoirs de gestions des organes de la société à ce stade, à travers la gestion de la procédure par des acteurs externes, l'assistance ou le dessaisissement du débiteur143. Bref, les créanciers ont un intérêt à assigner le débiteur en justice en vue de demander son redressement ou sa liquidation. Cet intérêt à agir est d'ailleurs la condition sine qua none de l'assignation et se matérialise par l'exigence des caractères cumulatifs de certitude, liquidité et exigibilité de la créance144. Comme le rappelle le professeur KALIEU, « le droit d'assignation des créanciers n'est pas systématiquement mis en oeuvre. Il faut que le créancier ait un intérêt personnel à demander l'ouverture d'une procédure collective contre son débiteur », au risque de se verser dans un abus de droit d'ester145.

Le salarié dans la mesure où il est créancier envers son employeur de son salaire, a également la qualité pour demander l'ouverture d'une procédure curative en cas de retard ou de non-paiement. À cet effet, sa demande doit préciser la nature et le montant de sa créance et viser le titre sur lequel elle se fonde. Dans ce cas, la juridiction compétente statuant sur l'ouverture de la procédure « adéquate », peut entendre le salarié demandeur ou les représentants du personnel146.

Toutefois, il faut préciser que le salarié n'est pas un créancier ordinaire. Ceci dans la mesure où à la différence de tous les autres créanciers dans la masse, il bénéficie d'une

143 Chapitre 3 de l'AUPCAP.

144 Jl s'agit là des conditions cumulatives comme l'ont laissé entendre les juges : Arrêt Cour d'appel de Ouagadougou, n° 52 du 16 avril 2004, « SOSACO /BATEC, BTM », Ohadata J-08-20.

145 KALIEU ELONGO (Y. R.), « Notion de procédure collective », in Encyclopédie du droit OHADA, Paris, Lamy, 2011, p. 1259.

146 Article 32 al.1 de l'AUPCAP.

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protection légale : c'est le super privilège des salariés147. Il devra être désintéressé « au plus tard, dans les dix (10) jours qui suivent la décision d'ouverture et sur simple décision du juge-commissaire »148. Cette protection est due en raison de la nature alimentaire particulière de sa créance.

Cependant, ce n'est que très marginalement que l'on peut considérer cette action individuelle des salariés en qualité de créanciers comme des mesures de participation directe au traitement des crises de la société. En effet, elles contraignent ces derniers à n'agir que si leurs salaires n'ont pas été convenablement payés. Or, la cessation des paiements peut bien exister en l'absence d'une irrégularité dans le paiement des charges sociales. Il aurait été nécessaire de leurs consacrer un droit d'action directe sans besoin d'être créanciers car plus vite la crise est résolue, plus sûr est leur avenir et leur bien être dans l'entreprise. Malheureusement, en l'état actuel du droit des entreprises OHADA, aucune technique ne permet aux salariés lambda de faire une alerte tant au niveau interne (auprès des organes de contrôle) qu'au niveau externe (auprès d'une juridiction compétente) sur une crise dont ils ont connaissance. Pourtant, très souvent, ils s'enquièrent rapidement de l'existence d'une crise à travers leur place centrale dans l'entité contrairement aux autres créanciers. Or en l'absence d'un tel droit d'alerte à eux reconnu, la situation risque de s'envenimer en raison du manque de diligence des dirigeants optimistes sur leur capacité à résorber la crise. Il devient alors intéressant de s'interroger sur les moyens de participation du salarié non créancier ou lambda.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault