WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La confiance en l'administration


par Anthony LANGOUREAU
Université Jean Moulin Lyon 3 - Droit Public fondamental 2019
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Paragraphe 2- La démocratisation de l'action administrative comme pilier de la relation de confiance

La participation des administrés à la prise de décision de l'administration est l'élément principal de la démocratisation de l'action administrative. Il s'agit d'associer certaines personnes ou catégories de personnes à l'élaboration des décisions administratives. La participation peut être définie comme « une forme d'association et d'intervention des citoyens à la préparation et à la prise de décision administrative »24(*).

Il s'agit d'une thématique centrale dans un contexte de crise de la représentation en France. Son objet est donc politique. En effet, l'idée est de faire participer les citoyens à la prise de décision de l'administration pour permettre de renforcer, d'une part, la portée de la décision, et d'autre part, la confiance des citoyens et des administrés envers leur administration puisque ces derniers auront participé à l'élaboration des décisions qui les gouvernent.

L'association des administrés à la prise de décision se fait à des degrés variables, allant de la simple désignation de représentants spécifiques dans des instances consultatives, jusqu'à l'émission d'un avis sur un projet donné. La participation est également mise en avant par l'administration européenne, qui en a fait l'un de ses principes fondamentaux (A). Néanmoins, nous verrons qu'il existe désormais un nombre important de mécanismes en droit interne permettant de mettre en place une participation effective des administrés à la prise de décision de l'administration (B). Enfin, il sera nécessaire d'analyser ce que la doctrine appelle parfois « la démocratie participative dans le domaine environnemental »25(*) qui constitue un modèle à suivre en termes d'association des usagers à la prise de décision des pouvoirs publics.

A- La participation : un principe mis en avant par l'administration de l'Union européenne

Depuis sa création la Commission européenne, qui est l'organe central de l'administration publique au niveau européen, a été extrêmement critiqué du fait de la « rigidité » de ses fonctionnaires. En effet, les processus décisionnels de la Commission européenne étaient couverts par le principe du secret. Il était, par exemple, impossible pour le public de contribuer à sa prise de décision. L'évolution de ce système, vers une prise en compte de l'administré, est la résultante de deux évènements. Le premier est le rejet du traité du traité de Maastricht par les Danois en 1992. En effet, lors du second referendum organisé sur le traité de Maastricht, la Commission a adopté un code de conduite concernant l'accès du public aux documents26(*), dans le but de convaincre les Danois. Finalement, ce code de conduite a abouti à la déclaration n°17 du traité de Maastricht selon laquelle : « la transparence du processus décisionnel renforce le caractère démocratique des institutions ainsi que la confiance du public envers l'administration ». Le second épisode a été la démission de la Commission Santer suite à la publication d'un rapport d'un comité d'experts indépendant en mars 1999 mettant en lumière les abus dans le domaine de la culture du secret et l'absence de responsabilité collective des membres de la Commission : cela a forcé la main de la Commission en l'obligeant à s'interroger sur la question de l'ouverture de sa propre administration. Finalement, c'est le traité de Lisbonne du 13 décembre 2007 et, plus précisément son article 11, qui inscrit dans le marbre le principe selon lequel chaque citoyen doit avoir « le droit de participer à la vie démocratique de l'Union »27(*) ; de même, chaque décision doit être « prise aussi ouvertement et aussi près que possible des citoyens [de l'Union] »28(*).

Il convient toutefois de préciser que ce principe de participation, en droit communautaire, n'englobe que les décisions individuelles. C'est à dire des actes pris à l'encontre de destinataires identifiables. Par conséquent, en droit communautaire, il n'y a aucun droit à la participation dans le cadre d'une procédure normative. Cela signifie que la portée de ce droit à la participation reste très limitée et ne permet pas d'assurer une réelle participation du public à l'exercice du pouvoir. Finalement, ce droit à la participation a été limitée à un simple droit à être entendu29(*). Néanmoins, la reconnaissance d'un tel principe témoigne de la volonté de l'administration européenne de vouloir se rapprocher de ses administrés. Puisque, malgré le fait que l'institution du droit à la participation n'a pas eu l'effet démocratique escompté, elle a permis de mettre en lumière la volonté des institutions européennes d'obtenir la confiance du public.

Comme nous venons de l'observer, la participation, bien qu'interprétée comme un droit à être entendu par le juge européen, reste un principe qui a été mis en avant par l'Union européenne. Par conséquent, cela a permis la diffusion de ce principe dans les différents systèmes juridiques des États membres de l'Union. C'est pourquoi il convient désormais de s'interroger sur les différents mécanismes permettant la participation des administrés aux prises de décisions de l'administration en droit interne.

B- Les mécanismes témoignant une volonté d'intégrer davantage l'administré à la prise de décision de l'administration

Comme le soulignait déjà le Conseil d'État en 201130(*), il existe beaucoup de mécanismes de participation des administrés à cette prise de décision. En effet, la tendance actuelle est d'intégrer l'usager au processus décisionnel de l'administration. Il semble donc pertinent de ne traiter dans cette partie que ce qui semble relever des procédures principales permettant de mettre en oeuvre au mieux le principe de participation. Ainsi, nous verrons qu'il existe deux types de mécanismes de participation et de consultation, à savoir, les procédures indirectes (1) et directes (2).

1- Les mécanismes de participation et de consultation indirectes

Les mécanismes de participation et de consultation indirectes sont des procédures permettant d'intégrer indirectement l'administré à la prise de décision. Il est possible de dégager deux principaux mécanismes de participation indirecte.

Tout d'abord, l'un des principaux mécanismes indirects permettant l'exercice du principe de participation est le développement du droit à l'information. En effet, l'information constitue le corollaire du droit à la participation, puisque, sans information, il est impossible pour les administrés de participer à la prise de décision.

C'est la loi n°1978-753 du 17 juillet 1978 portant sur diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public qui est venue consacrer ce droit. L'objectif était d'accroître la transparence des décisions administratives. Il s'agit d'une loi très novatrice en matière de droit d'accès à l'information puisqu'elle ouvre à toute personne physique ou morale le droit d'obtenir, auprès de tout service public, administration, collectivité territoriale, établissement public, organisme privé gérant un service public, la communication de tout document administratif, à l'exception des documents couverts par le secret défense national. En outre, cette loi institue la Commission d'accès aux documents administratifs chargée de veiller au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs. Enfin, la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, est venue ajouter l'obligation, pour les autorités administratives de permettre un accès simple aux droits qu'elles édictent.

Par conséquent, sauf exception législative, l'administration doit répondre aux demandes formulées par les administrés. De ce fait, le développement de l'information a permis le l'émergence des mécanismes de participation directe à la prise de décision de l'administration. Car , exercer son droit à l'information c'est aussi participer indirectement à la prise de décision de l'administration. L'administration est soumise à un devoir de transparence envers les administrés, donc elle doit être irréprochable lors de sa prise de décision puisqu'elle sera soumise aux regards des usagers exerçant leur droit à l'information.

Le deuxième mécanisme permettant aux citoyens de participer indirectement à la prise de décision de l'administration concerne les organes collégiaux à vocation consultative. Il s'agit d'organes présents au niveau national et local dans lesquels les administrés sont invités à participer à la vie administrative. Á l'échelle nationale, la représentation des administrés s'effectue de différentes manières au sein de ces organes31(*). Dans un premier temps, il est possible de recourir à la nomination par les autorités administratives ou politiques de responsables associatifs ou syndicaux, de personnes issues de la société civile ou réputées pour leurs connaissances particulières sur un sujet donné. C'est le cas, par exemple, de la commission nationale consultative des droits de l'Homme. Dans un second temps, on peut avoir recours à l'usage du principe électif. Il s'agit, pour les administrés, d'élire des représentants spécifiques chargés de défendre les intérêts des administrés lors de la consultation par l'administration de ces organes collégiaux. Á titre d'exemple, il est possible de citer les parents d'élèves élus aux conseils d'établissement ou encore les représentants des étudiants aux différents conseils des Universités. Néanmoins, il convient de préciser que le 12 septembre 2018 le premier ministre a annoncé la suppression de vingt commissions consultatives sur le plan national. En effet, cette mesure s'inscrit dans un mouvement de réduction de ces organes nationaux32(*) au profit des organes locaux et des procédures de participation directe des administrés.

Ainsi, localement, c'est la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, introduisant un nouveau chapitre dans le code général des collectivités territoriales sur la participation des habitants et des usagers à la vie des services publics, qui est venue prévoir, d'une part, la mise en place d'une commission consultative des services publics locaux. Il s'agit d'un organisme composé de représentants d'associations locales, nommés par l'assemblée ou l'organe délibérant de la collectivité. D'autre part, suite à l'instauration des conseils de quartier, le maire peut « associer à l'élaboration, à la mise en oeuvre et à l'évaluation des actions intéressant le quartier »33(*) . Ainsi, ces derniers peuvent « lui faire des propositions sur toute question concernant le quartier ou la ville »34(*). De plus, cette loi a instauré la possibilité pour les conseillers municipaux de créer des comités consultatifs sur tout problème communal concernant tout ou partie du territoire de la commune35(*). On peut également citer à titre d'exemple les commissions communales et intercommunales pour l'accessibilité, institués par la loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées qui est venue imposée aux communes et intercommunalités de 5 000 habitants et plus, d'établir un constat de l'état d'accessibilité de leur territoire et d'engager une réflexion pour améliorer la situation. Ainsi, ces commissions communales, composées de représentants de la commune et d'associations représentants les usagers et les personnes handicapées sont tenues d'établir un rapport annuel et de l'adresser au préfet, qui est libre d'en tirer ou non les conséquences.

Finalement, il existe un grand nombre de mécanismes de participation indirecte des citoyens. Néanmoins, contrairement aux procédures de participation directe, elles n'ont pas le même impact sur la décision prise par l'administration. Effectivement, au sein des mécanismes de participation directe, l'administré joue un rôle prépondérant dans la prise de décision

2- Les mécanismes de participation et de consultation directe

Les mécanismes de participation et de consultation directe se distinguent des mécanismes de participation indirecte puisqu'ils ont pour objet d'intégrer directement l'administré à la procédure de prise de décision de l'administration.

L'enquête publique est la procédure de participation la plus célèbre. Elle a pour objectif de permettre au public d'être informé et de formuler des avis (appréciation, suggestion ou contre-proposition) sur des projets locaux d'envergure. Durant longtemps, l'enquête publique manquait d'effectivité. En effet, cette dernière pouvait intervenir à un stade où le projet était déjà bien avancé, sinon achevé. Par conséquent, l'avis des administrés perdait tout intérêt. C'est la raison pour laquelle l'enquête publique peut désormais être précédée d'une procédure de consultation préalable. Une concertation du public est notamment prévue pour toute élaboration ou révision d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un plan local d'urbanisme36(*). Finalement, l'objectif de l'enquête publique est de permettre à chacun de s'exprimer et de participer à l'élaboration d'un projet local.

La seconde procédure de participation directe la plus connue est le débat public. Les débats publics peuvent intervenir lors d'enquêtes publiques ou lors de l'élaboration de « grandes opérations publiques d'aménagement d'intérêt national de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics et des sociétés d'économie mixte présentant un fort enjeu socio-économique ou ayant un impact significatif sur l'environnement. Ils peuvent être organisés par la Commission nationale du débat public »37(*). Le débat public permet à tous les citoyens de confronter leurs opinions au maître d'ouvrage et de lui poser des questions, soit lors des réunions publiques, soit par internet. Il s'agit d'une procédure principalement utilisée dans le domaine environnemental, c'est pourquoi nous y reviendrons dans un développement axé sur cette thématique ultérieurement.

Ensuite il existe d'autres procédures de consultation des citoyens par la voie d'internet. En effet, la digitalisation des consultations par l'administration est de plus en plus mise en avant et développée par l'administration38(*). Les consultations par internet sont très diversifiées ; il n'y a pas de formalisme préétabli. Ainsi, l'administration utilise ce canal pour la réalisation d'enquêtes, de sondages, afin de recueillir des propositions ou des contributions des administrés à la politique publique. Malgré tout, les modalités de consultation électronique commencent à bénéficier d'une assise textuelle, ce qui montre l'importance donnée par les pouvoirs publics à ce mode de consultation. Désormais, la participation à une enquête publique peut se faire par voie électronique39(*). Selon la loi Grenelle II, « les décisions réglementaires de l'État et de ses établissements publics sont soumises à la participation du public lorsqu'elles ont une incidence directe et significative sur l'environnement »40(*), or, la loi précise que cette participation peut se faire par voie électronique. On constate la mise en place d'une incitation à recourir à ce mode de consultation : la loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit du 17 mai 201141(*) prévoit, dans son article 16, qu'une autorité administrative pourra désormais substituer une consultation sur internet à la réalisation d'une consultation obligatoire d'une commission consultative exigée par un texte. Enfin, l'alternative électronique participe également à un mouvement de simplification de l'action administrative développé ultérieurement.

Pour finir, il est également possible de citer à titre d'exemple, les états généraux, les Grenelles, les forums, les panels ainsi que les conférences de citoyens. Tous ces mécanismes sont également des outils, relativement peu connus, il faut l'avouer, permettant d'intégrer l'administré au processus de de prise de décision de la part de l'administration.

Force est de constater qu'il existe un nombre extrêmement important de mécanismes permettant d'intégrer l'administré au processus d'élaboration de la décision administrative. Il convient désormais de s'attarder sur le cas de la participation dans le domaine environnemental. En effet, en matière environnementale le principe de participation est un principe fondamental. L'objectif des pouvoirs publics est de créer une véritable démocratie participative dans le domaine de l'environnement42(*). C'est pourquoi le droit de l'environnement fait figure de modèle à suivre en matière de participation des administrés.

C- La démocratie participative en matière environnementale

La participation des administrés en matière environnementale revêt une portée très forte. Ainsi, nous verrons dans un premier temps qu'il s'agit de la particularité du domaine environnemental (1). Dans un second temps, il conviendra d'analyser les modalités de mise en oeuvre de ce principe de participation (2).

1- La particularité du domaine environnemental en matière de participation des administrés à la prise de décision de l'administration

La démocratie participative se caractérise, dans le domaine environnemental, par le nombre important de procédures permettant de prendre efficacement l'avis des administrés en compte lors de la prise de décision. En effet, pour concilier le développement économique et la protection environnementale, il a été décidé d'impliquer le public à la prise de décision. Finalement, c'est la prise de conscience du changement climatique qui a conduit les pouvoirs publics à intégrer les administrés au processus administratif.

Pourtant, durant longtemps, l'une des caractéristiques du droit français de l'environnement a été d'être un « droit sans principes »43(*) alors que dans d'autres pays le droit de l'environnement faisait l'objet d'une protection particulière, parfois même d'une protection constitutionnelle. L'évolution est intervenue grâce à la Charte mondiale de la nature du 28 octobre 1982, d'une part, qui met en avant la participation à l'élaboration des décisions concernant directement l'environnement au sein de son article 23, la déclaration de Rio du 14 juin 1992, d'une autre part, qui énonce le droit à l'information et à la participation en matière environnementale, et enfin la Convention d'Aarhus du 25 juin 1998 qui encourage également l'accès à l'information et la participation du public à la prise de décision.

Á cette époque, le droit à l'information et la participation dans le domaine environnemental était très limité. Ainsi, c'est d'abord avec la loi n°95-101 du 2 février 1995, dite loi Barnier, que ce droit a finalement intégré l'ordre interne. Ainsi, l'article 1 de la loi du 2 février 1995 reconnaît expressément le principe de participation, selon lequel « chaque citoyen doit avoir accès aux informations relatives à l'environnement, y compris celles relatives aux substances et activités dangereuses ». Par conséquent, en droit de l'environnement le principe de participation constitue un fondement majeur ayant une valeur très importante.

Ce qui introduit définitivement la participation en matière environnementale dans le droit interne, c'est la Charte de l'environnement. En effet, il s'agit d'une charte composée de 10 articles et dont l'objectif est la préservation de l'environnement. Elle dispose d'une valeur constitutionnelle depuis son adossement à la Constitution par la loi constitutionnelle n°2005-205 du 1er mars 2005. Par conséquent, l'intégralité des mesures se trouvant dans cette charte ont également obtenue une valeur constitutionnelle, le Conseil constitutionnel44(*) ainsi que le Conseil d'État45(*) l'ont rappelé en 2008 par suite d'un débat doctrinal concernant la portée de la charte. Quoiqu'il en soit, dans son article 7 la charte dispose que « toute personne a le droit [...] d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ». De ce fait, ce qui fait la particularité du droit de l'environnement c'est que le principe de participation en matière environnementale dispose d'une valeur suprême, ce qui a permis d'en faire l'un des principes fondateurs de la relation entre l'administration de l'environnement et le public.

Ainsi, après avoir analysé ce qui constitue la particularité de la matière environnementale concernant le principe de participation. Il convient d'analyser ce que cela induit.

2- la mise en oeuvre du principe de participation en matière environnementale

La participation des administrés en matière environnementale intervient principalement lors de trois procédures distinctes.

Tout d'abord, le public peut décider de participer à la prise de décision lors d'enquêtes publiques environnementales46(*). Elles sont plus approfondies que les enquêtes publiques classiques. Ces dernières, ont été instituées par la loi n° 83-63 du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et aux opérations susceptibles d'affecter l'environnement. Elles ont un champ d'intervention large ce qui permet d'intégrer au mieux l'administré à la décision environnementale future. L'enquête publique environnementale permet aux usagers d'être informé d'un projet d'aménagement ou d'un plan d'urbanisme et de faire des observations sur le projet que l'administration souhaite mettre en place. Néanmoins, bien que le champ de ces enquêtes soit très large, on peut déplorer que l'autorité décisionnaire ne soit pas tenue de se soustraire aux résultats de l'enquête rédigée par le commissaire-enquêteur.

La seconde procédure de participation est la concertation environnementale47(*). L'objectif de la concertation est d'informer le public d'un projet d'aménagement ou de diffusion des documents d'urbanisme afin et de recueillir son avis. Il s'agit d'une procédure instituée par l'article 1er de la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en oeuvre des principes d'aménagement. La procédure de concertation est la suivante : l'autorité compétente, pour exercer une telle procédure, doit tout d'abord délibérer sur les objectifs et les modalités de la concertation du public. Ensuite, cette dernière doit s'exercer durant toute la durée de l'élaboration du projet, afin de pouvoir recueillir les observations des administrés à tous les niveaux du projet. Enfin, le bilan de la concertation doit être présenté devant l'organe délibérant de la collectivité par l'exécutif qui est à la tête du projet. L'intérêt d'une telle procédure est de pouvoir associer réellement le public à la prise de décision de l'administration. Effectivement, la logique voudrait que l'autorité administrative adopte le projet soumis à concertation et modifié par les observations des administrés. Or, dans les faits, l'autorité compétente n'est aucunement liée par le sens de ces observations48(*).

Enfin, le dernier mécanisme de participation le plus connu est le débat public49(*). Il s'agit d'une procédure permettant d'informer le public d'un projet d'aménagement ou d'équipement ayant une incidence sur l'environnement ou l'aménagement du territoire. L'idée est également de laisser la possibilité au public de débattre avec le maître d'ouvrage et la faculté de formuler des remarques.

Il a été introduit en France par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement. Ainsi, cette loi ne s'est pas contentée d'introduire cette procédure en droit interne. Elle a créé la Commission nationale du débat public chargée de la mise en oeuvre de ces débats. Toutefois, le débat public a longtemps été très critiqué. En effet, certains lui reprochaient d'intervenir lorsque le projet était déjà bien avancé. De plus, le manque d'indépendance et de moyen de la Commission nationale du débat public était pointé du doigt. Enfin, il lui était reproché son manque d'information relative à sa mise en place. Les usagers ne bénéficiaient pas d'un suivi suffisant leur permettant de s'assurer que leurs observations étaient belles et bien prises en compte. C'est la raison pour laquelle l'article 134 de la loi du 27 février 2002 a procédé à un remaniement de la Commission nationale du débat public. Effectivement, cette dernière s'est vu octroyer le statut d'autorité administrative indépendante, une évolution majeure pour la procédure du débat public50(*) puisque cela a permis d'accroître ses moyens ainsi que son champ d'action.

Néanmoins, cette loi ne vient pas résoudre le problème de l'après débat. Par conséquent, elle n'apporte aucune réponse concernant le manque d'information qui précède le débat public. C'est pourquoi, pour que le débat public ne soit pas qu'une procédure ayant pour objectif d'apaiser les rancoeurs, l'article L.121-13 du code de l'environnement prévoit l'obligation pour le maître d'ouvrage de rendre publique sa décision de poursuivre ou non le projet ainsi que les modalités de cette poursuite et les modifications éventuellement apportées au projet.

Par conséquent, parler de démocratie participative dans le domaine environnemental semble prématuré. Comme nous venons de le voir, ces procédures permettent certes d'associer l'administré à la prise de décision de l'administration, mais, il ne s'agit en aucun cas de faire du public un codécideur. Elles ont toutefois le mérite de renforcer les obligations à la charge du maître d'ouvrage.

Comme nous venons de l'analyser, l'administration, dans l'idée de renforcer la confiance que peuvent avoir les administrés envers elle, s'est mise à perfectionner et mettre en avant des mécanismes lui permettant d'interagir avec le public, pour prendre en compte leurs intérêts réciproques. Cela lui a permis d'orienter sa conduite afin d'améliorer ses rapports avec ses usagers. Néanmoins, dans certains domaines, l'administration a fait de l'intérêt des usagers une véritable ligne de conduite.

Section 2- L'intérêt des usagers au centre de l'appareil administratifs

La prise en compte des intérêts des administrés par l'administration n'est pas récente. Durant trop longtemps l'administration a agi seule sans se préoccuper du public. Ainsi, cela a contribué à laisser l'image d'une administration éloignée des intérêts de la société civile dans l'inconscient collectif. Par conséquent, comme nous essayons de le démontrer, l'administration n'a de cesse de vouloir regagner la confiance du public. La première démarche employée est celle d'accroître ses interactions avec le public. La seconde innovation mise en place par les pouvoirs publics a été de réformer l'administration fiscale afin d'y intégrer le contribuable et d'en faire la pierre angulaire de l'action administrative fiscale (Paragraphe 1).

* 24 M.Prieur,« Le droit à l'environnement et les citoyens : la participation », RJE 1998,p.398.

* 25 Jean-Luc Pissaloux, « La démocratie participative dans le domaine environnemental », Revue française d'administration publique, 2011/1-2,(n°137-138), pages 123 à 137.

* 26 JOCE L 340, 31 décembre 1993, p41-42.

* 27 Article 10, Traité sur l'Union européenne

* 28 Article 3, Traité sur l'Union européenne

* 29 Voir,entre autres, affaire 234/84, Belgique contre Commission des Communautés européennes [1986], Recueil 2263, paragraphe 27.

* 30 Rapport du Conseil d'État,  « consulter autrement. Participer effectivement », 2011.

* 31 Décret n°2006-672, relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractères consultatif, du 8 juin 2006.

* 32 Circulaire du 21 octobre 2017 : réduit déjà leur nombre.

* 33 Article 1er de la Loi n°2002-276, relative à la démocratie de proximité, du 27 février 2002.

* 34 Article 1er de laLoi n°2002-276, relative à la démocratie de proximité, du 27 février 2002.

* 35 Art. L.2143-2 du code général des collectivités territoriales.

* 36 Art. L.121-16 du code de l'urbanisme.

* 37 Art. L.121-1 du code de l'environnement.

* 38 Sur ce point , « La pratique des consultations sur internet par l'administration », Hafida Belrhali-Bernard, Revue française d'administration publique, 2011/1-2 (n° 137-138), pages 181 à 192.

* 39 Art. L.123-13 du code de l'environnement.

* 40 Art. L. 120-1 du code de l'environnement.

* 41 Loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, JORF, 18 mai 2011, p8537.

* 42 Cit. Ibidem (Pissaloux : la démo participative : regarder la page

* 43 Voir C.Huglo et C. Lepage-Jessua, « la véritable nature du droit de l'environnement »,

esprit, mai 1995, p70.

* 44 Décision n° 2008-564 DC , loi relative aux organismes génétiquement modifiés du 19 juin 2008.

* 45 Conseil d'Etat, Ass, Commune d'Annecy, 3 octobre 2008.

* 46 Art. L. 123-1 à L. 123-16 et R. 123-1 à R. 123- 46 du code de l'environnement.

* 47 Art. L.300-2 du code de l'urbanisme.

* 48 Conseil d'Etat, Association de défense du cadre de vie du Grand Angoulême, 16 juin 2000, req. N°194495.

* 49 Art. L.121-1 à L.121-15 et R.121-1 à R121-16 du code de l'environnement.

* 50 Jean-Luc pissaloux, « Le renouveau du débat public », la Revenue du Trésor, juillet 2003, p419-428.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand