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La force du verbe dans la tradition orale wolof: l'exemple des chants du Cercle de la jeunesse de Louga

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par Ousseynou WADE
Université Cheikh Anta DIOP de Dakar - DEA 2007
  

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Exposé n° 2 : Présentation du projet de thèse

Le choix du thème de recherche : « La force du verbe dans la tradition orale wolof l'exemple des chants du Cercle de la Jeunesse de Louga », résulte de plusieurs raisons essentielles :

- La première est liée à l'intérêt que l'on porte au discours oral. En effet, l'oralité resurgit avec force sur plusieurs formes malgré l'attrait grandissant pour les TIC : sms, mail, etc,

- En second lieu, le phénomène du Cercle de la Jeunesse de Louga a attiré notre curiosité car depuis des décennies ses chants accrochent et intéressent les auditeurs. Le public continue d'adopter cette production même si le répertoire ne se renouvelle pas. En un mot, les chants du Cercle restent encore actuels.

- En outre, la dimension que la Troupe de Louga a prise ne laisse pas indifférent un spectateur attentif. Nonobstant son aura internationale, aucune étude ne s'était encore intéressée à ce monumental patrimoine culturel qui, avant les indépendances jusqu'à nos jours, véhicule une forte tradition du groupe wolof.

Ces raisons ont fait naître en nous la volonté de travailler autour des chants du Cercle de la Jeunesse de Louga tout en essayant de déceler la force du verbe déclamé dans ce qui constitue le quotidien du groupe Wolof.

Le verbe est vu ici comme la dimension supérieure de la parole. C'est la parole qui influe sur les hommes et les amène à adopter telle ou telle autre conduite. Cet acte de langage en vue d'infléchir sur le comportement de l'autre dépend surtout de la situation de parole, la performance.

L'impact du verbe dans la tradition se révèle à travers les textes de la Troupe de Louga. En effet, ce corpus connaît des moments d'énonciation spécifique. De la naissance à la mort, en passant par les différentes cérémonies qui jalonnent sa vie, l'individu subi les pouvoirs de cette parole proférée.

L'analyse de l'impact du verbe dans cette société d'oralité, à partir des chants du Cercle, a donc nécessité un cadrage socioculturel afin de dégager l'interaction entre le milieu, la langue et le comportement du groupe.

Pour ce faire, le passage au corpus était la voie obligée. Ainsi, dans notre démarche, il fallait un recueil et contrairement au conte qui nécessite un traditionniste, nous nous sommes rabattu sur les enregistrements de la Troupe que la radio diffusion du Sénégal a pu conserver dans ces Archives. Notre choix pour les cassettes audio a été conforté par l'inexistence de répertoire fixé à partir de l'écrit.

Cette étape franchie, nous nous sommes attelé à transcrire les textes, un par un avec des auditions répétées. De manière systématique, l'écoute et la transcription se sont faites simultanément, par à coup. Des retours en arrière sont aussi opérés à chaque fois que cela était nécessaire.

Les premiers textes obtenus ont subi des rectificatifs avant d'être soumis à l'approbation de spécialistes pour une correction de la transcription wolof.

Ce travail achevé, nous avons débuté la traduction des textes wolof vers le français. Pour éviter toute influence sur l'orientation adoptée, nous avons d'abord fait sortir un fil conducteur entre les textes et classer ces derniers avant de procéder aux interviews et recoupements avec les membres du Cercle ciblés.

C'est au cours de ces rencontres que des rectificatifs ont été apportés sur la mise en forme des textes et sur les indications scéniques pour leur éventuelle mise en scène.

A propos du Cercle, les interviews accordées par Mademba Diop15(*) dit Masse, Saliou Ndiaye16(*) et Birahim Dieng17(*) se sont faites séparément et successivement à Dieuppeul, aux Parcelles Assainies à Louga. Avec les autres membres rencontrés, c'est plutôt des débats ouverts sur plusieurs questions. Mais pour l'essentiel les informations recueillies se recoupent fortement.

Pour l'exploitation de toutes ces données, nous avons adopté un plan en trois parties.

La première partie composée de deux chapitres constitue un ancrage du verbe dans le contexte socioculturel du Ndiambour. Ce cadrage montre en même temps les mutations intervenues sur les plans politico-religieux et culturels. A la suite, l'organisation de la société wolof fera l'objet du second chapitre. De même, la typologie du verbe wolof servira à fixer les repères à partir desquels l'analyse s'est basée.

La deuxième étape est totalement consacrée au corpus. Sa présence se justifie par les nombreuses précisions apportées aux textes pour leur compréhension : occasion de déclamation mais aussi des précisions pour la mise en scène des chants lors des spectacles.

Dans la même foulée, les problèmes liés à la collecte, à la transcription et à la traduction seront évoqués.

La troisième étape consacrée aux procédés stylistiques, répertorie les raccourcis langagiers et à tout autre moyen facilitant la rétention car participant de ce que Austin appelle les actes perlocutoires de la parole dans Quand dire c'est faire.

Cet avant dernière étape s'est aussi intéressée aux figures de rhétorique.

Enfin, la dernière étape dégagera les thèmes majeurs du répertoire du groupe qui reflètent en même temps les préoccupations de la collectivité. L'étude débouchera sur les fonctions des chants.

A partir de cette étude, nous envisageons démontrer que le verbe régit le quotidien et le destin de l'homme des sociétés d'oralité, en particulier le groupe wolof. Après avoir délimité l'aire dans laquelle s'exerce le répertoire du Cercle nous constatons que la force du verbe apparaît à plusieurs niveaux d'analyse. A tous les moments de la vie du groupe (baptême, mariage, travaux champêtres....) le chant est présent et constitue un motif de déclamation.

Ainsi proféré, le verbe trace un destin pour l'individu, construit une réputation. En un mot, il oriente, exalte, rappelle les valeurs mais aussi il fixe les événements marquants la vie du groupe. A travers le verbe niche dès cet instant toutes les règles de conduite de la communauté.

Avec un examen transversal de ces chants nous ferons ressortir les procédés d'expression inhérents à cette production. Ces techniques donnent à cette production toute sa valeur littéraire

C'est dire que la poétique des textes oraux africains peut révéler une richesse insoupçonnée.

En dernier lieu, nous dégagerons des perspectives quand on sait qu'il reste beaucoup à faire dans le champ de la littérature orale africaine.

Le travail de fixation d'un corpus de références intégrant chants, contes, légendes, épopées.... est impérieux. A la suite de ce corpus, il faudrait une étude fouillée pour construire une véritable poétique des textes oraux africains.

Le plus handicap auquel nous nous sommes confronté réside d'ailleurs dans cet état de fait.

V. BIBLIOGRAPHIE COMMENTÉE

1. Les articles

1.1 « La poésie orale dans l'ouest africain », Lilyan KESTELOOT in « Ethiopiques » n° 56, 2ème semestre 1992, pp 65-84

Dans cet article, Lilyan KESTELOOT se penche sur quelques manquements dans la recherche poétique orale dans l'ouest africain.

La poésie orale, dénommée poésie-chant est partout associée au chant ou à un support musical. C'est d'ailleurs ce qui confère à cette poésie un caractère populaire. Elle est l'apanage de tout individu qui en exprime le désir. C'est pour lever l'équivoque entre celle-ci est la poésie historique ou épique qui est du ressort des griots que Mme KESTELOOT apporte ces précisions. Elle propose cette méthodologie d'analyse des chants (poèmes-chants). Pour elle, l'accompagnement musical doit nous obliger à nous attarder sur certains aspects. Il s'agit d'identifier la distribution du texte sur la chaîne mélodique, et de mesurer l'écart entre le rythme naturel de ces langues et celui qui introduit la musique. Ce travail doit être fait dans chaque genre dans une même langue et ensuite le reprendre pour chaque langue avec des locuteurs différents. À partir de là, ou pourra donc répertorier les figures et structures dans les corpus en tenant compte des six règles stylistiques.

Pour la chercheuse, tant que ce travail n'est pas fait, il serait illusoire de détenir une synthèse qui soit digne de ce nom. C'est pour dire que beaucoup reste à faire dans le domaine de la recherche en ce qui concerne la poésie orale africaine. Lilyan Kesteloot, forte de ce constat va plus loin est propose des pistes d'études. Son approche est fondée sur la prosodie (le rythme) qui est le sceau de la poésie. Cette étude du chant ne va pas sans la musique qui lui impose une mesure.

Mais la difficulté réside dans l'exploitation des textes fixés à partir de l'écrit (chant transcrit) dont la musique est systématiquement absente. La solution qu'elle propose consiste à se rabattre sur les vers (retour d'une même unité de mesure donnée et encadrée par la mélodie) répétés. Pour Madame KESTELOOT, ces vers répétés fondent le rythme même s'ils sont inégaux.

Pour une autre entrée, le noyau fixe dans les chants poèmes marque un temps fort du rythme. Egalement ces litanies, refrains ou échos régularisés peuvent servir de support pour ressortir le rythme. Les chants sans refrains, ni répétitions échappent à cette loi. Dans ces chants les strophes classiques (dizaine de vers ou formule selon l'expression d'OKPAWHO) constituent la dominante et l'étude s'intéressera à cet aspect.

Dans la traque de la prosodie, le chercheur doit aussi s'arrêter sur les phonèmes (allitérations, thèmes sonores), les jeux de mots, la danse des sons et la danse des mots.

En définitive, Madame KESTELOOT conclut qu'il n'est pas facile de séparer l'étude des phonèmes, des rythmes et de la syntaxe en poésie orale. Tous interviennent dans le tissu sonore du chant. Dans l'étude des métaphores-figure, s'appuyant sur MESCHONNIC, elle écarte tout formalisme. En Afrique, ces formules pullulent dans les chants-poèmes et ne fonctionnent pas sur le même registre que la poésie écrite même si elles « frappent » l'oreille étrangère.

Lilyan Kesteloot revient pour affirmer la rareté, le caractère rare, partiel ou inexistant d'études monographiques sur la poésie orale africaine surtout en poésie orale wolof.

Pour une véritable étude de la typologie, Mme KESTELOOT suggère de sortir des généralités et de repérer les genres dans chaque langue avec leur dénomination locale. De même, elle constate que les typologies avancées renvoient souvent à celle de Ruth FINNEGAN

L'analyse des insuffisances de la poésie orale dans l'ouest africain est intéressante à plus d'un titre. Elle a le mérite d'informer sur l'état des recherches et les zones à prospecter. Ainsi, la clarification de certains concepts est d'un apport inestimable. D'ailleurs, elle participe à la stabilisation du lexique de la critique en poésie orale africaine

En plus, cet article conforte notre position sur la nécessité et l'urgence de la constitution d'outils d'analyse de cette poésie d'autant plus que l'idée est partie d'une spécialiste, experte sur la question.

Cependant, vu les études menées ces dernières années, quelques idées émises méritent d'être relativisées. Dans sa méthodologie d'analyse, Mme KESTELOOT conseille que l'on associe musicalité et texte. A ce stade d'analyse les chercheures non spécialistes de la question musicale se confrontent à des limites objectives. Le non initié en musique traitera de mesure, de temps et d'autres aspects liés à la musicalité qu'avec approximation. En recherche la rigueur scientifique écarte toute approximation

1.2 « Problèmes posés par la lecture des textes transcrits de l'oralité », Othniel DOSSEVI in « Annales de la faculté des lettres et sciences humaines de Dakar », n° 9, pp 131-169, 1979, PUF

S'inscrivant dans une dynamique de renaissance des lettres africaines, Dossevi se propose de revisiter la tradition orale pour en découvrir la richesse littéraire. De son point de vue, c'est une source d'inspiration profonde comme jadis avec les poètes de la Pléiade se sont mirés à la source Antique.

Mais, le passage de l'oralité aux textes transcrits laisse perplexe. Les circonstances de performance et le talent de l'exécutant semblent s'estomper. Les transcriptions sont vues comme des textes conformes à la tradition des ancêtres. Les séquences fixes, figés donnent au texte une sorte de crédibilité.

Ainsi, c'est lors de l'interprétation que les initiateurs apportent un éclairage sur le texte. Aujourd'hui, ceux sont les spécialistes qui assument ce rôle. Cependant, le texte est l'objet de remise en cause à chaque interprétation. C'est une pensée vivante sans cesse renouvelée.

Le premier constat qui se dégage est l'effacement des inconvénients de l'oralité par la transcription. Le texte devient polyphone, son appréciation multiple. Alors que s'établit un rapport de confiance entre le lecteur et « l'écrivain de l'oralité », le texte transcrit affiche un silence mystérieux à l'image des oeuvres plastiques. Ainsi, se pose la question de l'anonymat.

Dossevi revient sur la richesse de l'art africain lié au caractère hermétique de ses oeuvres. C'est aussi un caractère spécifique de l'art africain traditionnel. De même, dans l'Europe moderne, baignée dans une tradition d'écriture, certaines oeuvres ne portent pas la marque de leur créateur. C'est dire que l'anonymat total n'existe guère. L'oeuvre porte le fruit du talent d'un artiste quand bien même les circonstances de création le font passer au second plan. Le texte n'informe pas sur le créateur. Il porte moins la marque du créateur que celle du commanditaire, du goût des clients ou des nécessités de son utilisation.

Dans l'analyse de Dossevi, cette modestie du créateur est loin d'être liée à un manque de considération qu'on lui devait. Il se réclame des modèles des Anciens transmis par la tradition et l'apprentissage. Il se soumet aux formes ancestrales.

Même si la part de son travail et de sa technique est évidente, pour la bonne marche de la société, il reste dans les rangs. Sa discrétion est sagesse et nécessité car toute distinction d'individualité est poursuivie par la jalousie des hommes et des dieux. La distinction de l'individu n'a pas besoin d'être chantée.

D'ailleurs, lors de la performance, le créateur proclame souvent sa maladresse devant ses inspirateurs ou ses initiateurs. C'est là l'aveu d'une nouvelle création et non une fidèle reproduction

Dossevi compare la démarche du créateur africain au classicisme occidental adossé à un modèle ancien. Il précise que l'artiste africain est plus préoccupé d'illustrer les idées autour desquelles doivent se regrouper les membres de la société. Il assure la destination de l'oeuvre sans nuire aux commanditaires.

Du côté de l'audimat, Dossevi considère que les auditeurs viennent chercher une confirmation des règles du bonheur enseignées par les chefs et la confirmation de son appartenance au groupe. Chaque auditeur est capable de déceler dans le récit tout ce qui est contraire à l'intérêt du groupe.

Dossevi relève une rupture entre la littérature écrite avec la tradition. L'individualité et la responsabilité de l'auteur émergent de plus en plus même si les conditions de création et les fonctions des oeuvres ne mettent pas en lumière le créateur. Mais ses auteurs prônent le retour aux valeurs traditionnelles classiques.

Pour autant, le conte offre un terrain habile de contestation, de rajeunissement des institutions et un renouvellement des thèmes littéraires. Le conteur exprime sa personnalité.

Tous ces constats amènent à dire que les textes recueillis doivent être suspects. Considérés comme des récits ancestraux, ces textes ressemblent à des versions individuelles, propres à chaque narrateur.

Dossevi tire en conclusion que les textes oraux ne sauraient avoir une lecture unique. Il s'agit de se démarquer de la vision des anciens pour porter le besoin actuel.

L'article de Dossevi participe à l'éclairage conceptuel nécessaire pour l'analyse des textes recueillis de l'oral. En outre, l'anonymat des ces textes trouve une interprétation permettant d'ouvrir un vaste champ d'étude.

Mais ce qu'on peut reprocher à Dossevi dans son article, c'est de se limiter exclusivement à des constacts sans proposer des débuts de solution. Il est important d'attirer l'attention des chercheurs sur la collecte et la traduction mais il serait beaucoup plus intéessant d'esquisser des palliatifs.

1.3 « De la valeur éducative du genre narratif dans les sociétés africaines traditionnelles », Jean NTAKIRUTIMA in « Ethiopiques » n° 77, 2ème semestre 2006, pp 173-192.

Dans son propos préliminaire, NTAKIRUTIMA part du postulat que l'oralité joue un rôle de support à certains groupes sociaux et à certaines sociétés où les échanges se font de bouche à oreille. Elle est une composante importante dans la formation de l'identité communautaire et l'identité individuelle.

Dans cette étude, il explore la fonction didactique des contes, légendes, fables et autres genres narratifs similaires dans les sociétés africaines traditionnelles. Même si la principale cible reste les jeunes, cet enseignement est aussi destiné aux adultes.

Il circonscrit cet enseignement en sept points :

- Genre narratif et l'enseignement de l'histoire ancestrale

Le genre narratif est le médium favori de conservation et de transmission de l'histoire. Par elle, des valeurs sociales sont véhiculées de génération en génération.

Les faits racontés sont enjolivés de prouesses surnaturelles. C'est par le talent des conteurs, par la maîtrise du verbe que les jeunes sont initiés au passé des aïeux : passé glorieux, pratiques valeureuses, origines légendaires sont connus par l'entremise des épopées. Ainsi, certains historiens ne s'y trompent plus car ils érigent en nécessité la connaissance de la source orale pour comprendre le passé des peuples.

- Genre narratif et enseignement des structures de l'univers

L'auteur montre que l'homme est un être qui éprouve le besoin de connaître son univers. De ce fait les productions africaines narratives ont tentés d'expliquer les mystères de la nature. La démarche est fondée sur une logique surnaturelle. Les narrations faites transmettent le sens de l'identité, de la multiplicité, de l'individualité et de la communauté.

- Genre narratif et enseignement de l'écologie

Le désir de connaître les interactions entre les espèces a amené l'initiation aux significations des espèces. L'astuce a consisté à humaniser animaux et végétaux dans las récits. Le mélange entre le naturel et le surnaturel rend l'histoire plus captivante.

- Genre narratif et enseignement de la morale sociale

Les rencontres vespérales étaient l'occasion de faire le bilan de la journée. Celui-ci détermine le conte de la veillée en relation avec les faits marquants du jour.

L'oralité (les textes oraux) apparaît donc comme une véritable école du soir : transmission des modèles, des normes sociales... La norme est toujours sanctionnée positivement tandis que les conduites répréhensibles entraînent nu sort négatif du héros.

Les animaux servent de personnages dans ces types de récits. La symbolique du règne animal partagée par plusieurs cultures permet à ces productions narratives de voyager dans l'espace et le temps.

- Genre narratif et enseignement de la langue aux plus jeunes

L'écoute attentive de la parole dès le jeune âge offre une utilisation efficace et précise de la langue. En effet, les structures des récits intègrent dans la plupart du temps les structures de la langue. L'acquisition de la langue poétique, policée est faite au détriment de la langue ordinaire. L'importance que revêt la parole en Afrique exige un verbe raffiné selon le message à délivrer.

A leur tour, les plus jeunes reprennent les récits et perfectionnent progressivement leur structure langagière.

- Genre narratif et enseignement de l'art oratoire

La situation d'écoute ne se réduisant pas à une simple consommation, les jeunes qui reçoivent les récits requièrent en même temps le statut de juge. La profération n'a de sens et de valeur qu'après le jugement de l'auditoire. Les jeunes sont impliqués dans la narration et peuvent reprendre, répéter ces textes oraux. Ils sont du coup initiés à l'art oratoire.

- Genre narratif et formation publique continue

En plus de l'art oratoire, les contes participent à la formation avec les types énigmatiques. C'est une formation aux débats, au discernement.

L'éducation est ouverte et se déroule au moment où tout le monde est disponible : le soir, après les travaux. C'est ce qui fait son caractère public et continue.

Le processus de formation est acquisition pour les jeunes et renforcement pour les moins jeunes. Les niveaux d'interprétation et de compréhension sont variables selon les degrés de maturité.

Le travail de Jean NTAKIRUTIMA a l'intérêt de révéler quelques-unes des facettes de l'éducation traditionnelle en Afrique. A travers les genres narratifs. Les domaines sériés permettent de voir directement l'impact de cette éducation. Les renvois vers les textes comme illustration rendent l'étude plus intéressante et renforce les théories développées.

Cependant, l'auteur limite son étude au genre narratif. Il pourrait explorer les genres qui intègrent des séquences de chants et/ou de gestuelles. L'analyse d'éléments rythmés, internes aux chants, occuperait une large part dans l'éducation traditionnelle.

2. Les ouvrages

2.1 Introduction à la poésie orale, Paul ZUMTHOR, Paris, Seuil, 1983, 308 pages

Dans cette vaste étude, Paul ZUMTHOR passe en revue différents aspects de la poésie traditionnelle orale. L'ouvrage s'organise en quatre grandes parties : l'oralité poétique, les formes, la performance, rôles et fonctions

Il passe par une clarification conceptuelle et essaie de traquer une éventuelle spécificité de la poésie orale. Dans un second mouvement P. ZUMTHOR jette un regard sur la voix et souligne la nécessité à la cerner pour une base théorique de la poésie orale. En outre, il lève l'amalgame qui consiste à considérer toute littérature non européenne comme folklore. ZUMTHOR part de la notion de performance pour clarifier le concept d'oralité. Ainsi, des influences sont relevées selon le rapport à l'écrit.

Le premier point est consacré à l'universalité de la poésie orale. ZUMTHOR situe dans le temps ces productions et les décalages possibles lors de la performance. Cela implique des difficultés d'interprétation ou de reconstitution. Mais quelques indices permettent de rétablir l'oralité conservée par l'écrit.

ZUMTHOR termine cette première partie en insistant sur la résurgence des cultures marginalisées. Les brèches ouvertes permettent à ces cultures de reprendre racine par des survivances ou des reliques. II note aussi l'évolution des créations selon le mode de naissance :

-La création individuelle -fonction originelle

-La création intertribale - show business

-La création cérémonial- fixité

Dans la deuxième partie consacrée aux formes et genres, l'auteur pose la difficulté à cerner la poésie orale. Paul ZUMTHOR revient sur la différenciation entre oeuvre, poème et texte. De prime abord une spécificité ne se dégage pas. Cependant, la performance détermine la forme. De ces constatations ZUMTHOR en dégage ce qu'il appelle la forme d'une macro-forme qui s'organise autour de trois axes : Le premier axe est déterminé par des situations de discours ; Le deuxième axe voit la devise au coeur du chant dans certaines circonstances ; Le dernier axe fait ressortir les poèmes nés d'une émotion causée par un beau paysage, la mort ou l'amour.

Concernant l'épopée, ZUMTHOR considère que c'est le genre le plus et le mieux étudié. Il fait le panorama des études sur le genre et l'intérêt que cela a suscité. Pour une harmonisation des perceptions, il revient sur les concepts de "poème épique", héritée d'Aristote pour la dissocier de la notion " d'épopée". ZUMTHOR dégage deux types d'épopée. L'épopée historique et l'épopée mythique.

Les spécialistes de l'oralité ont mal cerné leur objet car ils travaillent sur une poésie fluctuante. Cette spontanéité alliée à une règle inéluctable s'illustre dans la poésie orale africaine. C'est pourquoi analyser la poésie orale requiert beaucoup de prudence car le dessein initial et les effets produits ne sont valables et gardent sa plénitude que lors de la performance. Les frontières textuelles mouvantes sont tributaire de la nature bariolée, cumulatif du texte oral même si d'aucuns y décèlent parfois des parties fixes.

L'enchaînement fonctionnel fait ressortir une différence entre la poésie orale et la poésie écrite. Mot image et idée s'enchaînent et font énigme.

Par ailleurs, tout parasite venant de l'extérieur bouleverse le système d'information. Mais l'art de l'exécutant consiste à récupérer ces « bruits » et à les transformer en information une situation d'écoute. La performance est une instance de réalisation plénière avec des règles qui englobent occasion, public, émetteur et un but à long terme.

Paul ZUMTHOR étudie les circonstances de production et les moyens (voix-geste-médiat). Il fait voir la relation émotionnelle qui existe entre exécutant et public. Il distingue quatre situations performancielles : La convention ; Le naturel ; L'historique ; Le libre :

A la suite, dans les moyens, il avance que la parole poétique n'a une existence que par la voix, état second du langage. Le rythme est un prélude vocal. Il affirme que la poésie orale n'a que des règles prosodiques. Le seul langage efficace d'analyse serait les mathématiques et la musique.

La structuration poétique renseigne beaucoup sur la mélodie. Ainsi les sons intègrent l'allitération et la rime. Si la première est répandue, la seconde apparaît dans la poésie orale qui coexiste avec une culture de l'écriture ou se réduit à la voyelle ou à l'assonance

Ensuite, ZUMTHOR aborde le mode de la performance en opposant le dit et le chanté. Dans le chanté le locuteur marque plus son espace que quand il s'agit du dit. Trois modalités s'y dégagent : le dit (voix parlée), le récitatif et le chant mélodique.

Dans « la présence du corps », l'auteur y analyse le geste dans la poésie orale. En fait, pour lui, tout ce qui s'adresse à l'autre est constituante de l'oralité. Les mouvements du corps sont donc intégrés à une poétique. Le geste est érigé en rite. Il a son code en fonction des cultures.

La dernière partie de l'étude s'arrête sur le statut de l'interprète. Il se différencie souvent du poète, du compositeur et du chanteur. Parfois, le texte appartient à l'anonymat. Mais en oralité, la place de l'exécutant est plus essentielle. L'interprète se réduit à celui que l'on voit lors de la performance. Il est un professionnel. Son rôle s'apparente à celui du griot de l'Afrique occidentale

L'interprète n'obéit pas à une institution, il est libre. Son rôle, solidaire ou partagé, se manifeste différemment : soliste, duo, alterné ou en choeur.

Quant à l'auditeur, il fait partie de la performance. Un groupe d'auditeurs ne reçoivent pas de la même manière le message. Il se crée un dédoublement car l'auditeur n'est pas forcément le destinataire. On a donc deux situations d'écoute : une écoute reprise et une écoute muette. Le mécanisme d'impersonnalisation de la parole assure son appropriation par l'autre.

L'immixtion des médiats change fondamentalement les rapports.

Dans la durée, le processus de mémorisation n'est plus le même avec le temps. Il y a impossibilité de répéter la première performance. L'archivage se fait par des moyens technologiques ou par la mémoire. Malgré les pertes notées, il y a possibilité d'autres performances. Les pertes et les déplacements thématiques sont en translation. Aussi le caractère mouvant de l'oeuvre orale crée des variantes liées à la dérobade aux lois de la société d'écriture. Cependant une stabilité est notée avec les chants de danse et de travail et chez les peuples en contact avec l'écriture. Les variantes sont la conséquence de l'intervention e différentes personnes et des circonstances de performance.

Dans cette perspective, ZUMTHOR montre que la performance est fête, convergence des volontés. De la poésie orale naquît donc des rites. Ils sécurisent et confirment les tabous protecteurs. C'est dire qu'en Afrique, la parole rythmée et chantée revêt une puissance de vie et de mort. La performance est, de ce fait, action dans les formes ouvertes, collectives. Le chant rameute les combattants lors des guerres. Elle est une arme.

L'oeuvre de Paul ZUMTHOR, par son ampleur explore presque tous les domaines de l'oralité. La délimitation des parties laisse entrevoir les points soulevés. En ce qui concerne la poésie orale, il traite des questions récurrentes qui se posent pour leur analyse. Il nous est d'un grand apport si l'on constate le caractère rare de documents sur la critique des « textes oraux » en littérature africaine orale.

Le reproche du document est lié à son ampleur. En effet, les questions pointus qu'il aborde égare parfois et se déteint sur les aspects saillants introduits dans les parties ou sous parties. Avec le caractère universel qu'il voulait donner à son étude, amène ZUMTHOR a évoqué la réalité de presque toutes les grandes civilisations, voire celles qui se sont évanouies en ce début du troisième millénaire. De ce fait, le travail pourrait être actualisait sur plusieurs aspects.

2.2 La place de la littérature orale en Afrique, Elolongué EPANYA YONDO, Paris, La pensée Universelle, 1976, 123 pages.

Dans son propos introductif, EPANYA YONDO évacue la polémique autour de la littérature orale et s'appuie sur SEBILLOT Paul qui a employé pour la première fois le terme repris par M. NILSON en 1933 dans son ouvrage Homer and Mycenae. A la suite, il appelle à s'investir pour mieux comprendre le fonctionnement des cultures africaines pour mieux les défendre. C'est pourquoi il essaie dans ce travail de donner les différents genres de la littérature orale africaine, ses caractéristiques, sa fonction sociale et ses rythmes.

EPANYA YONDO nous apprend que le genre permet à l'homme d'orienter son comportement selon la situation ou l'événement. Les genres relatent tout ce qui conditionne la vie de l'homme de la naissance à la mort.

Mais OYONDO avoue qu'il n'est pas aisé d'établir une classification en dehors des cycles établis. Le schéma suivant ressort de son étude :

Les mythes

Ils permettent à l'homme de réguler son comportement à son environnement. L'apprentissage se fait grâce à un processus initiatique au bout duquel l'homme africain saisit les institutions et les interdits qui s'y attachent.

Les contes et les fables

Le conte, mamelle nourricière, présente avec la fable un double aspect. Ils fonctionnent comme une satire sociale. Le détournement par les animaux permet de se dérober à la répression. Ils constituent l'instrument essentiel de la critique populaire.

La légende

Elle est au coeur de l'activité ludique et appartient au profane contrairement au mythe qui est du domaine du sacré. Elle prépare à recevoir le mythe. La légende retrace les sources des aventures du groupe et les mouvements migratoires. Elle oblige l'homme à se fonder sur l'homme.

L'épopée

En tant que fille de la légende, elle est déclamée par une catégorie particulière de professionnels. Elle porte en elle l'héritage du patrimoine culturel. Elle est souvent entrecoupée de chants lyriques. Le récitant doit être doté d'un talent de communication avéré et d'une imagination très fertile. La mise en scène lui donne une portée plus grande que les autres genres.

La comptine

Genre rarement signalé, il participe au développement psychique de l'enfant et fonctionne comme une récréation. Sous forme de chanson ou de formulettes, la comptine donne l'occasion aux enfants d'exercer leurs aptitudes mentales et devient un support aux jeux.

La berceuse

Proche de la comptine, elle est dédiée aux bébés. Par sa douceur, elle joue le rôle de calmant lorsque l'enfant pleure ou quand on veut l'endormir. Le contenu prend une orientation d'éveil et d'éducation.

Enigmes et devinettes

Nous avons là deux genres qui s'interpénètrent car la devinette pose une énigme. Elles inaugurent les veillées. Malgré leur forme énigmatique et elliptique, elles ont un emploi profane. Elles font appel au sens de l'observation et à la dextérité mentale.

La chantefable

Peu connue, elle met en interférence fable et musique. Ils ne sont pas autonomes mais ils constituent deux mouvements d'un même verbe et se recoupent harmonieusement. Le chant intensifie la puissance émotive de la narration.

Proverbes et maximes

Ils traversent tous les genres oraux de la littérature orale africaine et servent de repère, d'illustration à une idée.

Le proverbe véhicule la sagesse traditionnelle et fait la synthèse d'un récit alors que la maxime fonctionne en formule plus succinctes et exprime les observations de la vie quotidienne. Proverbes et maximes sont le fruit de bon sens et le résultat d'une réflexion profonde.

Autres genres

La devise, sous forme de formule ou de longue tirade, est employée aussi bien par des individus, des familles, des clans etc. Elle renferme de manière condensée le passé glorieux du groupe. Elle entretient le sentiment de dignité et du sens de l'honneur.

La poésie religieuse loge dans les chants initiatiques et sacrés. Elle détermine la qualité des rapports d'une communauté. Les relations sont établies pour assurer l'équilibre social.

Les généalogies constituent un genre beaucoup plus répandu en Afrique de l'ouest. Elles sont consacrées à la lignée des chefs et à leurs exploits. Elles structurent l'histoire des familles, des groupes ou du clan et parfois celle du peuple.

La poésie-chant accompagne l'action mais aussi les autres genres comme le conte, la légende ou l'épopée (tout récit). Toutes les activités quotidiennes sont rythmées de chants qui maintiennent le rythme et l'entrain.

Après ce panorama des genres, Yondo précise que le professionnalisme est de mise. Malgré le caractère collectif de son produit, la culture négro-africaine génère des groupes qui se distinguent dans l'art de la transmission. Qu'il soit professionnel ou amateur, l'émetteur de tels discours a toujours une facilité d'élocution et un pouvoir de mémorisation. Cet homme orchestre est doté d'un verbe étincelant. Dans beaucoup de société, ceux sont les griots qui jouent ce rôle. Traditionnalistes attitrés, ils ont un compagnonnage séculaire avec la couronne ou avec une catégorie sociale particulière. Même si leur statut diffère selon les sociétés, ils partagent le pouvoir de l'expression.

Caractéristiques de la littérature orale négro-africaine

1. La parole

Elle au centre de cette littérature qui fonctionne de bouche à oreille et constitue son support principal. C'est aussi un héritage à enrichir avant d'être léguer aux générations à venir.

2. Les participants

Le public lors de la déclamation est constitué essentiellement d'enfants car c'est le moment privilégié pour leur formation. Durant l'initiation, ils se familiarisent de plus en plus avec cette parole.

Le regroupement rappelle la nécessité pour des individus vivants en société de se retrouver pour consolider le sentiment d'appartenance à un groupe. C'est une littérature anonyme que chacun peut reprendre à son compte

3. Rythme et sens du beau

A la base du récit, comme d'ailleurs des chants, il y a le rythme. C'est surtout celui des instruments à percussion et non celui de la voix humaine. Les images, figures de vocabulaire et autres procédés forment le rythme secondaire.

Quant à la notion de beau en Afrique, elle est liée à une psychologie collective. Elle est ainsi une conception très relative.

Fonction sociale de la littérature orale négro-africaine

La littérature orale négro-africaine est le miroir de la vie. Chaque genre à un but précis et participe à la formation de l'africain de la naissance à l'âge adulte. De la berceuse au genre ésotérique, il s'habitue à un milieu naturel, à la morale sociale et à l'histoire du groupe. Après mémorisation, la transmission est assurée dans les rapports de tous les jours entre membres de la communauté. L'expérience de l'ancêtre est mise à la portée de tous.

L'oeuvre d'YONDO présente un grand intérêt pour notre thème de recherche car il participe au déblayage de la typologie des genres oraux. L'étude met en évidence des genres considérés souvent comme mineurs. En plus, la situation performancielle est prise en charge dans la plupart des cas. L'ultime partie qui traite de la fonction complète les caractéristiques essentielles de la littérature orale africaine.

L'analyse d'YONDO gagnerait en intérêt avec un peu plus de profondeur dans l'analyse. Malgré la pertinence et la valeur du texte, il reste l'abécédaire des étudiants en situation d'initiation dans la recherche. Il ne rentre pas dans les considérations pointues, complexes et variés qui foisonnent dans le système de l'oralité. Cette simplicité fait peut être la valeur et l'intérêt de l'oeuvre pour nous autres qui investissons le champ de la recherche.

2.3 Approches littéraires de l'oralité africaine, sous la direction d'Ursula BAUMGARDT et Françoise UGOCHUKWU, Paris, Editions Karthala, coll. Tradition orale, 2005, 334 pages.

En hommage à Jean DERIVE, un collectif de chercheurs de six nationalités différentes, ses disciples, apporte une contribution sur quelques aspects de l'oralité. L'ouvrage se compose de cinq parties.

Ursula BAUMGARDT, auteur de l'article intitulé « La parole comme engagement : l'exemple d'un répertoire de contes peuls du Cameroun », part d'un éclairage des termes qui désignent la parole dans les parlers orientaux du peul.

Il dégage les formes suivantes de parole :

- Les paroles qui engagent

- La représentation de la parole et le contexte narratif

- Le statut de la parole cérémoniale

- La parole comme motif narratif véhiculant la calomnie et la rumeur

Françoise UGOCHUKWU pour sa part, dans « Parole et régulation de la communication en pays igbo (Nigéria) », tente de montrer comment la parole est un outil de régulation sociale. Il fait ressortir quatre idées fondamentales. Du point de vue social, il souligne que le baptême est l'occasion de donner une identification et une reconnaissance des siens par le nom. Ainsi, la parole permet l'insertion dans le groupe en lui imprimant la marque de l'humain. Le nom facilite les situations de présentation, de salutation et de louange.

Dans sa profération, il révèle la puissance de la parole. Elle fonctionne comme gris-gris : elle est arme et contrepoison. Le troisième niveau qu'il dégage concerne les interdits qui encadrent la civilisation de la parole. Elle est contrôlée. Le dernier point met l'accent sur les médiateurs ou intermédiaires c'est-à-dire les personnes qui s'interposent lors de la déclamation de la parole réglementée.

Quant à Ansoumane CAMARA, il jette un regard sur la littérature produite dans la zone malinké, dans son article intitulé : « Le conte et l'épopée dans la littérature des Malinké de la haute Guinée ». Après avoir campé l'aire géographique où résident les Maninka ou Malinké, Camara décline les composantes de leur littérature. Dans son étude, il se focalise sur le conte (tali) et l'épopée (fasa). Il distingue trois catégories de conte : le conte à djinns, le conte à animal, le conte à être humain. Il souligne le caractère moralisateur de ces contes. En ce qui concerne l'épopée, il dégage les trois types recensés dans la société Malinké : l'épopée historique, l'épopée des chasseurs et l'épopée agricole.

Il termine en exhortant les chercheurs à la transcription de ces chefs-d'oeuvre pendant qu'il est encore temps.

L'article de Laetitia LEONELLI, « De la variabilité en littérature orale : l'exemple de trois récits wolof », aborde trois variantes de conte dans la société wolof. L'intérêt de son étude porte surtout sur les différences entre les versions la première est une version féminine, la deuxième, une version féminine et la troisième une version unilingue, un texte en français sans la version wolof. L'originalité qu'il relève est le personnage en jeu : une tête, un fait rare dans la culture wolof pour un conte initiatique.

En même temps, il pose le problème de la transcription et de la traduction des textes collectés.

« Qui est le monitor ? Sur les traces de maître initiateur dans quelques contes wolof » de Ndiabou Séga TOURE analyse le personnage du maître initiateur dans des contes wolof. Le maître y prend des figures différentes. Il est agresseur ou auxiliaire. Mais parfois, il combine les deux rôles.

« Les devinettes burkinabé : jeux de langage à propos des yeux », KAM SIE ALAIN.

Alain KAM SIE fait ressortir  « les jeux du langage » qui se cachent dans ces devinettes et les champs sémantiques qu'elles couvrent. Il les met en relation avec la société qui les utilise. A la suite, il précise le sens du genre choisi et ses quelques-unes de ses caractéristiques : ludique ; réflexionnel et mémorielle

Denis DOUYON, dans « La représentation de la femme dans un récit dogon », rappelle le rôle de la femme qui apparaît comme écartées de la gestion de la cité. Dans les contes dogons, elles jouent un rôle clé dans la société. L'exemple qu'il du récit sur la création du monde qu'il donne conforte le rôle de la femme dans cette société. Elle est un personnage central des relations humaines.

Julia Ogier-Guindo « Parole magique en Nouvelle- Calédonie : les vivaa, textes oraux traditionnels an a'jié » nous mène dans l'univers de la Nouvelle-Calédonie.

Les vivaa, parole magique, sont analysés dans l'aire culturelle a'jié. Il précise les différentes acceptions du terme. Il englobe aussi bien le succès, l'objet rituel et rituel lui-même. Les vivaa informent sur les noms des clans et des lieux mais aussi sur les végétaux, les animaux. Par les vivaa, on est en contact avec l'invisible. Le contexte d'énonciation détermine le registre sacré.

La troisième partie qui porte sur «  littérature et pratique sociale » traite de certains aspects de l'oralité chez les Kpélé et les malinké.

D'abord, André CAMARA dans « Parole, figures et signes : autour de l'art graphique Kpélé contemporain » montre les liens entre l'art graphique et l'art oratoire dans ce qu'il désigne les cordes à proverbes. Ces proverbes se déploient dans les activités artisanales et les scarifications, les tatouages et autres enduits corporels. Ce peuple qu'il est à cheval sur la Guinée et le Libéria accorde une grande importance à la parole. Celle-ci est redoutée et elle s'exprime dans les genres ludique ou sérieux. Les cordes à proverbes sont représentées par des images et signes graphiques sur des morceaux de calebasse. Les activités de tatouage, de teinture, de poterie, de la forge constituent son lieu d'expression.

Ensuite Agnieszka KEDZIERSKA, dans son article «  l'envol du vautour » : parole, action et objet dans les rituels funéraires des chasseurs malinké analyse les rituels du cycle des cérémonies funéraires dédiés aux chasseurs malinké. Il révèle une tradition méconnue en s'appuyant sur un corpus constitué d'un chant hermétique. Pour les initiés, ces rituels se font sur plusieurs séquences. Il nous fait découvrir le sens social, symbolique et ésotérique de ces rituels. Ils sont vus comme une absorption symbolique du chasseur décédé. C'est aussi une façon de rendre accessible et compréhensible la mort.

L'avant dernière partie ayant pour titre « Néo-oralité » englobe deux articles. Le premier, « la néo-oralité au Gabon : analyse de la figure du serpent dans les légendes urbaines » est de Léa Zame AVEZO'O. Il rend compte des légendes urbaines contemporaines, de petites histoires transmises de bouche à oreille et parfois relayées par la presse à sensation. Elles sont brèves et anonymes. Sur les six textes recueillis, l'image du serpent pourvoyeur de richesse est constante. En contrepartie, il faut respecter les interdits sous peine de déchéance. Ces légendes offrent une lecture du monde moderne avec une reprise des motifs des contes traditionnels. Cette forme libre et accessible est un mise en garde contre une certaine forme d'enrichissement.

Le second article, « Naissance et développement d'une littérature orale urbaine : le répertoire de jåkulu de Bobo-Dioulasso » de Alain SANO étudie un phénomène nouveau dans la ville de Bobo-Dioulasso notamment la création d'ensemble musical appelé jåkulu. Il investisse tous les espaces publics et devient une marque d'identité pour les jeunes d'u même quartier. Il relais les griots traditionnels dans les cérémonies de grande envergure. Son répertoire est une création collective, une expression d'une vision du monde. Elle fonctionne comme la mémoire du quartier, de sa quotidienneté.

La dernière partie sous-titrée « littérature d'expression française et littérature orale » regroupe trois articles. Marlène HOENSCH dans «  Le roman contemporain africain, avatar du conte ? » fait la comparaison entre les rituels d'initiation et leur apparition en littérature sous une forme de contes et de romans. Les constantes qu'il dégage tournent autour de la structure initiatique, la dualité et les acteurs de l'initiation. L'espace labyrinthique clos et piégé caractérise son cadre.

Le deuxième article, « Poéticité et quête identitaire dans Fer de lance de Bernard Zadi ZAOUROU, l'ivoirien Gabriel SORO s'arrête sur un passage du poète qu'il analyse comme un texte clos puis un texte ouvert pour mettre en évidence la déstructuration de l'extrait ; le rapport entre l'écriture et la poéticité et enfin la signification. Il en résulte une caractéristique commune aux poètes : leur souffrance ; le sentiment tragique et leur éternelle insatisfaction.

Le troisième et dernier article, « Poétique du n'zassa dans D'éclairs et de foudres de Jean-Marie ADIAFFI » de Kouadio Kobeman N'GUETTIA souligne l'authenticité du poème de ADIAFFI. Ce dernier s'enracine dans la culture agni et se confond au n'zassa (tissu bariolé). Le poète réfute les formes figées, fixées par la réglementation. Il puise dans la source de la littérature orale agni mêlée de proverbes, de théâtralité et de contes. Même si certains voient en ADIAFFI un pro-césairien dans la forme, sa poésie ne saurait être interprétée sans la référence à la culture agni.

Cet ouvrage collectif donne des repères et une visibilité importante à notre approche. La diversité des analyses permet de marquer la différence des approches. Les quatre premières parties qui retraitent des aspects de la parole est d'un apport essentiel pour l'étude de notre corpus. Les auteurs des textes recueillis confortent notre conviction sur la contextualisation pour l'analyse des chants.

Malgré leur intérêt, les articles ont toujours la limite liée à leur concision. Les articles soulèvent des interrogations inédites. Par contre, le caractère condensé de l'article ne permet pas un large développement pur trouver une réponse aux questions agitées.

VI. EXTRAIT DU CORPUS

NJÀNGAAN (Ballet)

Chant populaire

Enfin la pluie est venue. Depuis une semaine, tout le monde est aux champs pour enfouir le grain. Reste à niveler le terrain pour favoriser la naissance des jeunes pousses de mil ou d'arachide. Les cultivateurs sont éparpillés dans les champs. Les femmes venues apporter leur contribution se regroupent et font une exhibition.

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* 15 Inspecteur de la jeunesse, ancien Directeur de cabinet au ministère de la jeunesse.

* 16 Administrateur civil, il était à la retraite lors notre rencontre.

* 17 Agent des postes à la retraite.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery