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Politique, pauvreté et stabilité. le Sénégal peut-il basculer dans des violences sociales

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par Vivien MANEL
Institut français de géopolitique - Université Paris 8 - Master I géopolitique 2008
  

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B - Santé et pauvreté dans la région de Tambacounda

Tambacounda

Dakar

DIFFERENCES EN PERSONNEL DE SANTE ENTRE
DAKAR ET TAMBACOUNDA

1200

1000

400

800

600

200

0

Médecins

551

45

Infirmiers

1187

121

Sages
femmes

208

61

Source : Annuaire de la santé, Ministère de la santé et de la prévention

A la faiblesse de la couverture médicale en infrastructures idoines (1 hôpital, 310 cases de santé dont seulement 201 fonctionnelles...), s'ajoute celle des effectifs en personnel de santé qualifié comme le montre le graphique ci-dessus surtout en comparaison avec ceux de la région de Dakar. De plus, la prépondérance des assistants de santé communautaire (environ 180) et des matrones (150) qui, après une brève formation, ne disposent que de connaissances rudimentaires, ne permet pas de satisfaire les besoins de santé des 688 702 soit 5,5 % de population nationale (en 2006). Les conditions climatiques (une très forte chaleur de mars à juillet), ainsi que l'enclavement et l'éloignement de la région par rapport aux grandes villes comme Dakar, Thiès ... sont souvent évoquées comme raison par le personnel de santé pour ne pas rester dans la zone. Selon les enseignements de l'opération "Identification physique et géographique", lancée en juillet 2007 par le ministère de la Santé et de la prévention médicale, concernant son personnel sur l'ensemble du territoire, l'une des pratiques récurrentes

94

96

dans cette administration est le cumul d'emploi. Dans les zones reculées du sud du pays comme Tambacounda (540 km et 6 à 8 h de trajet depuis Dakar), on a découvert des centaines de médecins qui ont quitté leur service à la suite d'une permission. Ils n'y sont plus jamais retournés, mais continuent de percevoir leur salaire, alors qu'ils travaillent dans des cliniques privées de la capitale.

Du coup, il n'est pas rare par exemple de voir des femmes enceintes qui, pendant toute la durée de leur grossesse, n'ont rencontré aucun personnel de santé qu'il soit médecins, assistants communautaires de santé et/ou matrones formés sur le tas. Le taux d'accouchements assistés n'était en 2005 que de 28 % selon la région médicale de Tambacounda alors que la moyenne nationale est de 48 %, d'où une forte mortalité maternelle qui s'évalue selon la même source à 1200 décès pour cent mille naissances vivantes. De même, la santé de l'enfant reste marquée par des taux de mortalité supérieure aux moyennes nationales. Nous avons :

+ mortalité infantile : 75 %o (moyenne nationale de 61%%o)

+ mortalité infanto juvénile : 164 %o (moyenne nationale de 121%o)

Par ailleurs, fortement arrosée pendant la saison des pluies et face à la faiblesse du réseau d'évacuation d'eau, ce qui permet la formation de nombreuses flaques d'eau favorables à la prolifération des moustiques, la région de Tambacounda reste très touchée par le paludisme. Une maladie qui continue d'être l'une des principales causes de morbidité, en milieu rural principalement.

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Tableau 3 : PRINCIPAUX MOTIFS DE CONSULTATION PAR DEPARTEMENT

Maladies diagnostiquées

Bakel

Kédougou

Tambacounda

Nombre

%

Nombre

%

Nombre

%

Accès palustre simple

15403

42,2

8106

25.7

38685

31.2

Accès palustre grave

1554

4.3

1137

3.6

2372

1.9

Infections Respiratoires Aigues

3700

10.1

2229

7.1

8418

6.8

Maladies de peau

2522

6.9

1508

4.8

9639

7.8

Maladie Diarrhéiques

1285

3.5

1494

4.7

3581

2.9

Parasitoses
intestinales

1033

2.8

902

2.9

4015

3.2

Syndrome dysentérique

540

1.5

995

3.1

2370

1.9

Source : Région médicale de Tambacounda, 2006

Malgré sa situation de région carrefour, le taux de prévalence du sida fait partie des plus faibles du pays. Il était en 2004 respectivement de 0,5 % et 0,3 % pour les hommes et les femmes.

Vu l'étendue de la région et son enclavement endémique, l'accès aux soins de santé pour la plupart des populations reste extrêmement compliquée, notamment en cas d'urgence. Ainsi, faute de ne pouvoir se déplacer dans les centres hospitaliers mieux équipés des autres régions, celles-ci se tournent massivement vers l'automédication et la médecine traditionnelle. Il faut de surcroît noter que toutes ces statistiques, bien qu'elles soient alarmantes, ne prennent pas en compte les cas de maladies non déclarées, ce qui laisse penser que la situation sanitaire de la région est beaucoup plus grave qu'elle ne paraît. Elle l'aurait été encore plus si, les pouvoirs publics n'avaient sollicité l'appui d'une multitude d'ONG comme l'Unicef, le Fnuap, la Jica, l'OMS ~ pour intervenir dans la région. Celles-ci

aident principalement à la construction et à l'équipement de postes, cases de santé et centres de santé, à la distribution de moustiquaires imprégnées et à la sensibilisation des populations.

Mais, méme si les pouvoirs publics ont consenti beaucoup d'effort dans la mise à disposition auprès des populations d'une eau de qualité et en quantité suffisante, il reste que dans une région fortement rurale comme Tambacounda où la population est très dispersée, ces mesures n'ont pas véritablement d'impact. Selon le DSRP, En milieu rural, le taux d'accès à l'eau potable a connu une progression passant de 56% en 2000 à 64% en 2004. Les usagers des bornes-fontaines qui représentent 35% des ménages ruraux consomment à peine 20 l/j/pers. La production annuelle d'eau se chiffre à 1 705 179 m3 dans la région de Tambacounda soit 2,5 m3/p/an. En matière d'assainissement, le taux d'accès en milieu urbain a connu une progression limitée sur la période 2000-2004, passant de 56 % à 57%. En milieu rural, 28% des ménages ne disposent d'aucun système d'évacuation des excréta, alors que la plupart des ménages sont équipés de latrines traditionnelles qui ne répondent pas aux normes internationales.

Au total, les difficultés de la majorité des populations de Dakar et de sa banlieue ainsi que celle de la région de Tambacounda à accéder à des soins de qualité, à des logements salubres, à l'eau potable et à un système d'assainissement adéquat, mettent en lumière la très forte dépendance entre santé et pauvreté. Mais elles font aussi de ces territoires des espaces particuliers. En effet pour sortir de leurs difficiles conditions ou tout au moins pour bénéficier d'une amélioration quelle qu'elle soit, les populations, sans être crédules, semblent plus réceptives aux promesses qui leur sont faites. Du coup, cette banlieue à forte densité de population et partant à fort potentiel électoral devient l'enjeu ou le théâtre de l'expression des rivalités de pouvoir entre différents acteurs, les forces politiques en particulier. C'est ce que confirme Astou Diagne, une habitante de Diamaguene dans la banlieue de Pikine : « Lors des campagnes électorales, les politiciens sont venus dans notre localité avec des promesses bien ficelées, surtout celles liées à l'accès de l'eau potable, mais nous n'avons toujours pas de branchement d'eau bien

100

que nous ayons fait des demandes à la SDE (Société des eaux). Nous souffrons trop pour l'eau ici » (Adigbli, 2009). L'attractivité de la banlieue dakaroise se traduit également par le fait que lors des dernières élections locales par exemple, alors qu'il n'a fallut que deux jours à la majorité des partis politiques pour traverser la vaste région de Tambacounda, il a fallu en moyenne six « meeting » en six jours pour parcourir un territoire de 550 km2.

Toutefois, autant ces territoires peuvent servir les ambitions d'hommes politiques et faciliter leur ascension sur ce landerneau, autant ils peuvent servir de baromètre pour mesurer le rejet ou non des populations face aux autorités qui les gouvernent. Comme nous l'indique la carte des résultats électoraux (mars 2009) pour les communes, la partie Quest du Sénégal, où se concentre plus de 70% de la population et plus de 60% des communes les plus peuplées (Dakar (Pikine, Guédiawaye), Diourbel, Kaolack, Fatick, Louga, Saint-Louis, Thiès...), a été gagnée par l'opposition. En revanche, la région de Tambacounda, malgré la déprise dont elle semble faire l'objet, a été gagnée par la majorité présidentielle.

Mais au-delà des aspects purement politiques et électoralistes, la région de Dakar, sa banlieue en particulier et celle de Tambacounda (Kédougou) qui cristallisent toute la pauvreté voire la misère de la majorité des Sénégalais, ont été dernièrement, l'espace d'expression de manifestations inédites du mécontentement social avec l'exemple de la marche des imams. Autrement dit, si ces populations se servent de moyens légaux et démocratiques (le vote) pour cautionner ou rejeter des politiques gouvernementales, elles sont également capables de se mobiliser, de sortir dans les rues pour exprimer leurs souffrances de façon pacifique mais aussi très violente. Ceci d'autant qu'à la faveur de la tenue du sommet de l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI) en 2008, malgré le brusque renchérissement des coüts des produits de grande consommation, l'Etat avait continué à investir massivement (800 milliards de F Cfa (1,2milliards €) selon la presse privée) dans l'érection d'infrastructures routières et hôtelières et dans l'embellissement de certaines artères de Dakar. De plus, du fait de la

très forte urbanisation de la région (96 % de la population), les espaces consacrés à l'agriculture sont quasi inexistants dans la région tandis qu'à Tambacounda, du fait de la faible densité et de l'étendue de son territoire, un important potentiel agricole est disponible. Il convient dès lors de voir la situation agricole (agriculture vivrière) dans ces deux régions et au-delà les politiques mises en oeuvre par les pouvoirs publics.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein