WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Service public, intérêt public et concurrence dans le domaine des énergies renouvelables

( Télécharger le fichier original )
par Marion COQUE
Université Montpellier I - Master I droit public général 2011
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Chapitre 2: Les conséquences de la promotion des énergies renouvelables

I: Les effets du soutien de la puissance publique aux énergies renouvelables sur la concurrence

A-La fin du monopole par une alternative au nucléaire

B- La régulation par la réglementation en faveur des énergies renouvelables aboutissant à une forme de libéralisation

II: Les énergies renouvelables intégrées dans la notion de service public de l'électricité A-une prise en compte conforme à l'exigence de la mutabilité du service public

B-Le développement durable, nouvelle notion clef de l'intervention publique

« Et la lumière fut nationalisée » prit pour titre René Gaudy dans son ouvrage évoquant la naissance de « Électricité de France » (EDF)1.

L'entreprise « Électricité de France » fut en effet créée le 8 avril 1946 par une loi votée par l'assemblée nationale, ce qui revenait en effet à nationaliser la lumière. Cela montre directement l'intervention historique de la puissance publique dans le secteur de l'électricité.

La nationalisation est le « transfert législatif de propriété du secteur privé au secteur public. C'est une manifestation certaine de la souveraineté de l'Etat »2.

Dans le cadre de la nationalisation du secteur de l'électricité, tout les biens des entreprises de production, de transport et de distribution électricité furent transmis à l'État. Cette nationalisation s'inscrivait dans le cadre de la deuxième vague de nationalisation.

La nationalisation française avait en effet fait l'objet de trois vagues, l'une en 1936 qui concernait principalement la banque de France et les sociétés ferroviaires, la deuxième aux alentours de 1945 dans laquelle était incluse la nationalisation d'EDF-GDF, Renault et les grandes banques de dépôt. La troisième fut lancée en 1981 et touchait le secteur des moyennes banques et grandes sociétés industrielles.

Depuis, le gouvernement est revenu sur ces vagues de nationalisation en procédant à des privatisations, qui en est à l'opposé puisque ces opérations ont consisté à ramener la propriété de ces entreprises dans le giron du secteur privé. Là aussi trois étapes peuvent être observées, la première en 1986 en réaction à la nationalisation de 1982 prévoit une soixantaine de privatisation notamment celles de BNP Paribas, Société Générale et Suez, la deuxième entre 1988 et 1993 qui concernait Renault ou le Crédit Local de France, puis une troisième après 1993 qui n'était plus seulement motivée par des motifs politiques mais économiques . C'est dans ce cadre là, qu'eut lieu la privatisation de France Télécom qui lui permit de racheter Orange sur le marché anglais. C'est également dans ce cadre qu'il fut procédé à la privatisation d' EDF- GDF, posant ainsi les premiers jalons de l'ouverture à la concurrence du secteur de l'énergie.

De nombreuses mutations ont donc affecté le secteur de l'électricité mais depuis la fin du 20ème siècle et le début du 21ème siècle, les mutation se sont accélérées.

L'union Européenne dans sa directive de 1996 (directive 96/92/EG) a en effet mis en exergue la nécessité grandissante de procéder à une libéralisation totale du secteur de l'électricité. La France a donc procédé à une libéralisation progressive par étape : en 2000 n'étaient concernés que les « gros industriels » qui pouvaient choisir l'entreprise qui produirait leur électricité. En 2004 le champs a été étendu à tout les professionnels et enfin en 2007, la mise en concurrence du secteur a été totale en permettant à tous les clients de choisir leur opérateur électrique.

Du monopole, le secteur de l'énergie est donc passé à une libéralisation .

Néanmoins, « il faut rappeler que le marché de l'électricité se décompose en un marché de la production et un marché de la fourniture, cependant que le transport et la distribution demeurent des services publics confiés aux opérateurs historiques ou à des filiales : Réseau de transport d'électricité (RTE), Électricité réseau distribution France

1 René Gaudy « Et la lumière fut nationalisée » Éditions sociales 1978

2 « Dictionnaire du vocabulaire juridique » édition Litec 3ème édition sous la direction de Rémy Cabrillac

1

(ERDF) et Distributeurs non nationalisés (DNN). »3

Toutes les activités n'ont donc pas été ouvertes à la concurrence, seulement la production.

L'ouverture à la concurrence n'a été que très faible dans un premier temps du fait notamment du monopole historique d' EDF qui lui a permis de conserver des avantages économiques et techniques mais ensuite, un autre facteur a considérablement bouleversé le secteur de l'énergie, c'est celui de l'introduction des préoccupations environnementales dans les débats politiques et économiques.

Cela est apparu notamment avec l'entrée en vigueur le 16 février 2005 du protocole de Kyoto qui imposait une réduction de 5,2% aux pays de l'OCDE, sur la période 20082012.

L'Union Européenne va accorder une grande place aux énergies renouvelables et dans sa directive du 27 septembre 2001, elle va affirmer que « Le potentiel d'exploitation des sources d'énergie renouvelables est actuellement sous-utilisé dans la Communauté. La Communauté reconnaît la nécessité de promouvoir en priorité les sources d'énergie renouvelables, car leur exploitation contribue à la protection de l'environnement et au développement durable (1) » ou encore « La promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables est au premier rang des priorités de la Communauté, comme l'a souligné le livre blanc sur les sources d'énergie renouvelables (2) »4

Cela va transparaitre dans les objectifs de l'Union Européenne. En mars 2007, les chefs d'État et de gouvernement de l'UE ont prévu une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 30 % d'ici 2020.

Les Etats européens se sont également engagés à faire passer la part des énergies renouvelables dans la consommation globale d'électricité à 20 % (seulement 9% aujourd'hui).5 Leur engagement a été scellé par le paquet climat énergie adopté le 23 janvier 2008 par la Commission Européenne.

La France a montré son implication dans la protection environnementale notamment avec les lois Grenelle I du 3 aout 2009 de programmation relative à la protection de l'environnement et Grenelle 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.

Ce qui a également permis une prise de conscience des préoccupations environnementales fut les pics de consommations qui sont survenus et la hausse du prix du baril du pétrole couplée avec l'annonce de la fin de ces énergies traditionnelles. Cela a poussé les Etats à régir, notamment la France. Cela s'est traduit par une politique de soutien aux énergies renouvelables particulièrement avec les lois grenelle I et grenelle II6. La France s'étant fixée avec grenelle I une consommation brute d'énergie d'ici à 2020 de 23 % d'énergie renouvelable(article 2), elle a dû ensuite programmer cet objectif en mettant en place des instruments pour y parvenir.

Le pays est dans un mouvement de « transition énergétique ». La transition énergétique « est le passage d'une société fondée sur la consommation abondante d'énergies fossiles, à une société plus sobre et plus écologique . Concrètement, il faut faire des économies d'énergie, optimiser nos systèmes de production et utiliser le plus possible

3 Royland Peylet « la nouvelle organisation du marché de l'électricité » AJDA 2011 P311

4 Directive 2001/77/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 septembre 2001 relative à la promotion de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables sur le marché intérieur de l'électricité point 1 et 2

5 Selon le site gouvernemental http://www.developpement-durable.gouv.fr

6 loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement et loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement

2

3

les énergies renouvelables7 ». L'objectif du président actuel est d'ailleurs de « Faire de la transition énergétique un levier pour un nouveau modèle de croissance verte, durable et solidaire8 ».

La politique publique a ainsi tenté de soutenir et promouvoir les énergies renouvelables mais de ce fait elles ont eu une action certaine sur l'équilibre économique du marché de l'électricité. Ces énergies ont commencé de ce fait à s'imposer comme alternative possible et sérieuse au nucléaire.

Ces énergies s'opposent aux énergies fossiles parce qu'elles sont exploitées de façon à ce que leur réserves ne soient pas épuisées. Le secteur de l'énergie regroupe un ensemble de sources diverses: le pétrole brut, le gaz naturel, les combustibles (charbon, biomasse), le rayonnement solaire, l'énergie hydraulique, l'énergie géothermique et l'énergie des combustibles nucléaires. Les énergies renouvelables sont les énergies solaires, éolienne, hydraulique, biomasse créée par photosynthèse et une partie des énergies marines. Ainsi que les énergies dues à la gravité (énergies marémotrice) où à la géodynamique interne (énergie géothermique). Elle s'opposent donc aux énergies comme le pétrole et le nucléaire dont le renouvellement est « infiniment plus lent que leur consommation » 9. La catégorie des « énergies nouvelles » sont quand à elle principalement renouvelables. C'est en effet le développement des énergies renouvelables qui a primé ses dernières années. Cette catégorie d'énergies nouvelles désigne donc à peu de chose près les énergies renouvelables.

La production d'énergie ainsi définie recouvre une diversité de source mais l'acheminement se fait quand à lui sur le même réseau électrique. Il y a donc concurrence entre les productions d'électricité et non sur acheminement en lui-même. Depuis le 1er janvier 2008, ERDF est chargée de la gestion du réseau de distribution métropolitain d'électricité, activité exercée auparavant par EDF Réseau Distribution. ERDF est une filiale à 100 % du groupe EDF, née de l'obligation de séparation juridique du gestionnaire de réseau de distribution10 imposée par une directive de 200311. Cette séparation s'explique par le fait de « garantir que l'opérateur du réseau n'utilise pas son monopole de transport pour avantager les installations de production de son entreprise au détriment des compétiteurs. Elle doit aussi permettre de veiller à ce que les conditions d'accès aux réseaux soient identiques pour toutes les installations de production, en vérifiant l'orientation vers les coûts de la tarification adoptée, son caractère non discriminatoire et l'absence de subventions croisées entre activités. »12. Ainsi cette séparation permettrait de garantir la libre concurrence entre les opérateurs d'électricité.

Ainsi s'applique le droit de la concurrence et plus particulièrement le droit public de la concurrence car c'est l'État qui par le biais de sa réglementation peut perturber le cours du marché et avantager l'opérateur historique. Selon Sophie Nicinski, Le droit public de

7 Source site gouvernemental http://www.transition-energetique.gouv.fr/transition-energetique/progres-economique-social-et-ecologique-0

8 Déclaration de François Hollande selon le site gouvernemental précité

9 Source site www.futura-sciences.fr définition énergies renouvelables

10 Conseil de la concurrence Décision n° 10-D-14 du 16 avril 2010 relative à des pratiques mises en oeuvre dans le secteur de la valorisation électrique du biogaz

11 Directive 003/54/CE, du 26 juin 2003, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité abrogeant la directive 96/92/CE, transposée en France par la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz.

12 Conseil de la concurrence Avis n° 00-A-29 du 30 novembre 2000 relatif à la séparation comptable entre les activités de production, transport et distribution d'électricité.

4

la concurrence se définirait « comme l'ensemble des règles de droit destinées à assurer, maintenir et préserver une libre concurrence entre opérateurs, et applicable à tout acte ou activité administratifs ayant un effet explicite ou implicite sur la concurrence »13. Également s'applique la régulation. Selon M. A Frison Roche « l'objet du droit de la régulation n'existe que dans des secteurs particulièrement ouvert à la concurrence et qui ne peuvent pas en eux-même produire leur équilibre 14». Le but recherché est également l'équilibre de la concurrence. Ces deux notions seront étroitement liées dans leur mise en oeuvre dans le secteur de l'électricité.

Afin de définir si il y a non-respect de la concurrence, il faut cependant rechercher si les entreprises peuvent être en concurrence. Pour cela il est nécessaire de procéder à la délimitation du marché pertinent. Le Conseil de la Concurrence a donné une définition de cette notion: « Le marché, au sens où l'entend le droit de la concurrence, est défini comme le lieu sur lequel se rencontrent l'offre et la demande pour un produit ou un service spécifique. En théorie, sur un marché, les unités offertes sont parfaitement substituables pour les consommateurs qui peuvent ainsi arbitrer entre les offreurs lorsqu'il y en a plusieurs, ce qui implique que chaque offreur est soumis à la concurrence par les prix des autres ».

Ainsi ne peut être pris pour cible d'étude, l'énergie au sens large mais seulement le marché de l'électricité car une offre est substituable à une autre. Celui-ci a également été délimité par le conseil de la concurrence comme « comprenant l'électricité produite par les centrales et celle importée par le biais des interconnexions (marché amont). Cette électricité est ensuite vendue en gros (marché intermédiaire) ou au détail (marché aval), exportée ou encore utilisée pour compenser les pertes sur le réseau15 ».

La difficulté de l'application du droit de la concurrence est dans le fait que EDF, ainsi que les distributeurs non-nationalisées ou les entreprises locales de distribution, soient chargées de la mise en oeuvre de missions de service public. Ces missions sont relatives au développement équilibré de l'approvisionnement en électricité, à la fourniture d'électricité ainsi qu'au développement et à l'exploitation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité.16 Ainsi cette activité anciennement monopolistique est encore chargée de mission de service publique ce qui peut compliquer l'application du droit de la concurrence. L' État doit jongler entre le service public et la libéralisation. Il se doit donc intervenir mais il dans le même temps freiné par les règles du droit de la concurrence.

Un service public peut être qualifié comme tel selon les critères de l'arrêt Narcy rendu par le Conseil d'État17, s'il y a exercice d'une mission d'intérêt général, s 'il est dénoté un contrôle de la personne publique et qu'il y a détention de prérogatives de puissances publiques. Le service public doit être recherché dans « l'intention des gouvernants 18» qui répondent aux « nécessité du moment » car il y a intérêt général. L'intérêt public est la mise en oeuvre de l'intérêt général par le biais de l'action public.

13 Sophie Nicinsky AJDA 2004 p751 « les évolutions du droit administratif de la concurrence »

14 Marie-Anne Frison-Roche « le droit de la régulation » revue concurrence et distribution Dalloz 2001 N°7

15 Conseil de la concurrence avis n° 07-D-43 du 10 décembre 2007 relative à des pratiques mises en oeuvre par électricité de France

16 Article 2 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité

17 Conseil d'État 28 juin 1963 arrêt « Narcy »

18 André de Laudabère, traité de droit administratif, tome I, 1980 p818 cité par « glossaire de la gouvernance public » sous la direction de Laurence Lemouzy » sous Service public

5

Des impératifs d'intérêt général dominent encore dans le secteur de l'électricité malgré l'ouverture à la concurrence du fait de la nécessité de l'intérêt public.

Le service public peut également avoir été défini tel quel par la loi. C'est le cas pour l'électricité car en nationalisant l'énergie en 1946, celui-ci l 'a fait entrer dans l'ordre du service public. Mais en 1946, la « distribution désignait tout à la fois l'acheminement et la commercialisation (la fourniture) d'électricité. Il faut désormais dissocier l'activité d'acheminement (qui reste un monopole et reste un service public) de l'activité de fourniture (vente de l'électricité aux clients), qui ne sera un service public qu'à l'égard des clients domestiques. »19

Toutes ces mutations ont pu entraîner des conséquences sur la notion du service public et des risques de conflit entre les différents acteurs :

Les nouveaux opérateurs sur le marché utilisant les énergies renouvelables, l'intervention publique partagée entre mission de service public, soutien aux énergies renouvelables et nécessité de respecter le droit de la concurrence, et enfin l'opérateur historique qu'est EDF.

Les conséquences de ces interactions se mesurent en droit public économique, mais aussi afin d'évaluer au mieux tout les tenants et aboutissants, ces notions partent à la rencontre du droit de l'environnement, du droit de l'urbanisme et du droit des contrats afin de souligner l'impact des politiques publiques.

En définitive, comment s'est déroulé l'émergence des énergies renouvelables sur le marché, n'a t-elle pas été un moyen d'ouvrir à la concurrence le secteur de l'électricité, là où la déréglementation du nucléaire avait échoué? Le service public de l'électricité a t-il vu sa définition évoluer du fait de l'apparition des énergies renouvelables et de l'ouverture à la concurrence?

L'angle utilisé afin de répondre à cette problématique est presque historique car il propose d'appréhender les facteurs qui ont conduit à l'apparition des énergies renouvelables sur le marché, pour ensuite s'intéresser aux comportement de l'action publique une fois les énergies renouvelables installées sur le marché, afin d'en apprécier les effets.

Il semble que l'apparition des énergies renouvelables dans le paysage français et européen ait vu le jour par le biais d'un contexte propice à son émergence (Partie I). Des interrogations se posaient sur le service public de l'électricité, qui une fois résolues ont permis d'enrichir et conforter ce service public afin qu'il puisse continuer à porter les énergies renouvelables. De même une ouverture insuffisante à la concurrence du nucléaire a rendu nécessaire l'apparition d'une alternative et celle-ci s'est esquissée par l'émergence des énergies renouvelables .

Une fois en position sur le marché, la puissance publique a promu ces énergies et cela a donc eu des effets inévitables à la fois sur la concurrence, mais également sur la notion de service public (Partie II).

19 Jean-Yves Chérot « Droit public économique » 2007 deuxième édition. Édition économica p864

6

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand