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La preuve du contrat électronique

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par Florent SUXE
Université Jean Monnet Paris XI - Master 2 droit des contrats 2012
  

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Florent Suxe

La preuve du contrat électronique

Mémoire sous la direction de Madame le Professeur Françoise Labarthe

1

Master 2 Recherche en Droit des Contrats

2011-2012

Université Jean Monnet (Paris XI)

2

SOMMAIRE

Introduction Page 3

Partie 1 La preuve écrite du contrat électronique Page 7

Chapitre I L'admission de l'écrit électronique au sein des preuves littérales Page 8

I L'équivalence conditionnée de l'écrit électronique et de l'écrit papier Page 9

II Le pré-requis indispensable au principe de l' équivalence probatoire : la validité de la

signature électronique Page 13

Chapitre II Les formes de l'écrit électronique Page 19

I L'écrit électronique et les formes traditionnelles de la preuve littérale Page 19

II : La lettre électronique : équivalent de la lettre sur support papier Page 23

Partie II Les limites de la preuve écrite du contrat électronique Page 28

Chapitre I L'imperfection intrinsèque de la preuve électronique Page 28

I Les vices entachant la perfection de l'écrit électronique Page 29

II La procédure de contestation de la preuve littérale électronique Page 32

Chapitre II Les remèdes à l'imperfection de l'écrit électronique Page 36

I Les remèdes directs à l'imperfection de l'écrit électronique Page 36

I Les remèdes indirects à l'imperfection de l'écrit électronique Page 44

Conclusion Page 45

Bibliographie Page 47

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Introduction

Le développement des nouvelles technologies a profondément modifié les rouages du commerce. Initié par la création de l'arpanet1 qui donnera lui même naissance à l'internet2, ce phénomène a en effet largement contribué à l'accroissement et à l'accélération des échanges en offrant tant au professionnel qu'au consommateur de nouveaux supports de conclusion des contrats.

Un auteur écrit d'ailleurs à cet égard « depuis que le panier d'osier ou de métal s'est transformé en panier virtuel, la visite des magasins et autres lieux de consommation est désormais possible en tout lieu et à toute heure. Libéré de toute contrainte physique, le « cyber-consommateur » peut aujourd'hui pratiquement tout acheter sans avoir à se déplacer au-delà du lieu où se trouve son ordinateur et sans avoir à solliciter d'autres muscles que ceux qui déplaceront sa souris »3. Ainsi, il est aujourd'hui plus facile que jamais d'acheter un bien ou de commander un service depuis chez soi, sans contact physique avec son co-contractant.

Cette mutation des modes de consommation, caractérisée par la dématérialisation du support de conclusion du contrat, s'est accompagnée irrémédiablement d'un changement dans la méthode classique de perception du contrat.

C'est pourtant très tardivement que le Droit français s'est adapté à cette évolution sous l'impulsion des travaux entrepris et entérinés par les institutions communautaires4. Il aura en effet fallu attendre que l'Union Européenne adopte plusieurs directives pour que le législateur français intègre dans Code civil et le Code de la consommation les spécificités inhérentes au développement du « contrat électronique », vecteur de développement du « commerce électronique ».

1 Arpanet (acronyme anglais de « Advanced Research Projects Agency Netwok »), est le premier réseau à transfert de paquets développé aux Etats Unis par la DARPA. Il est l'ancêtre de l'internet.

2 Internet est un système d'interconnexion d'Autonomous System et constitue un réseau informatique mondial, utilisant un ensemble standardisé de protocoles de transfert de données. Il s'agit d'un réseau de réseaux, sans centre névralgique, composé de millions de réseaux aussi bien publics que privés. Il transporte un large spectre d'informations et permet l'élaboration d'applications et de services variés comme le courrier électronique, la messagerie instantanée et le World Wide web.

3 E.Grimaux, « La détermination de la date de conclusion du contrat par voie électronique », Comm. Comm. Elect. 2004, chr. N° 10, p. 15

4 Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrat à distance, JOCE n° L 144, 4 juin 1997, p. 21 ; Directive 1999/93 CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999, sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques, JOCE n° L 13, 19. janv. 2000, p. 12 ; Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur, JOCE L 178, 17 juill. 2000, p. 1

4

Le but était clair, il s'agissait de permettre la réalisation du marché unique, en soulevant l'ensemble des obstacles juridiques à la validité et à la preuve du contrat électronique tout en assurant la confiance dans l'économie numérique.

La consécration d'un régime propre au contrat électronique a d'ailleurs fait naître une nouvelle classification des contrats fondée sur le support de conclusion des engagements contractuels qui, traditionnellement et conformément au principe du consensualisme, n'existait pas.

En principe, tout contrat se forme par l'échange des consentements de sorte que la manière dont cette rencontre se réalise n'était pas, sauf exception, un élément déterminant quant à la formation du contrat. Ce n'est que dans un second temps qu'elle prenait de l'importance, sur le terrain de la preuve des droits et obligations des parties.

Quoiqu'il en soit, la notion de contrat électronique est difficile à cerner. En effet, d'une part, le concept, qui nous vient du Droit Communautaire, recouvre deux dénominations distinctes selon qu'il est conclu par un professionnel avec quiconque ou selon qu'il l'est par un professionnel avec un consommateur. Dans le premier cas, il est dénommé « contrat électronique », dans le second, « contrat à distance ».

D'autre part, seul le contrat à distance est défini clairement à l'article L 121-16 du Code de la Consommation5 comme : « toute vente d'un bien ou toute fourniture d'une prestation de service conclue, sans la présence physique simultanée des parties, entre un consommateur et un professionnel qui, pour la conclusion de ce contrat, utilisent exclusivement une ou plusieurs techniques de communication à distance ».

Au contraire, le « contrat électronique » n'est défini que de manière allusive par le Code Civil et la loi LCEN6 du 21 juin 2004.

Ainsi, l'article 1369-4 du Code civil dispose : « Quiconque, propose, à titre professionnel, par voie électronique, la fourniture de biens ou la prestation de services, met à disposition les conditions contractuelles applicables d'une manière qui permette leur conservation et leur reproduction ».

Si la démarche était de définir le contrat électronique, la méthode est quelque peu maladroite. En effet, la définition n'est énoncée à priori qu'en vue d'élaborer une règle - le

5 Ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 portant transposition de directives communautaires et adaptation au droit communautaire en matière de droit de la consommation, JORF 25 août 2001, p. 13645. Ce texte assure la transposition fidèle de la directive 97/7/CE du 20 mai 1997

6 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, JORF, 22 juin 2004, p. 11168

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professionnel qui fait une offre par voie électronique doit mettre à disposition les conditions contractuelles...- de sorte qu'elle s'apparente plus à un champ d'application de la règle énoncée qu'à une véritable définition générale du contrat électronique.

On ne peut pas en réalité considérer que l'initiative du contrat électronique soit l'apanage du professionnel. D'ailleurs l'article 1369-1 du Code civil évoque la possibilité de mettre à disposition des conditions contractuelles par voie électronique. Cela renvoie à la formulation de l'offre et il semble bien que l'article ne réserve pas cette possibilité au seul professionnel. Au demeurant, l'article 1369-6 du Code civil qui exclut du régime propre au contrat électronique les contrats conclus par échange d'e-mails confirme que la définition donnée à l'article 1369-4 est réservée aux contrats conclus directement en ligne sur un site internet.

Si l'on délaisse ce critère organique, on peut du moins s'inspirer du critère matériel - la proposition par voie électronique de fourniture de biens ou d'une prestation de services- pour transposer cette « définition » au non-professionnel offrant. Ainsi, le Code civil ne définirait que le contrat électronique initié par le professionnel, pour en déterminer le régime aux articles 13694 et suivants et il conviendrait de s'inspirer de ce concept pour élaborer une définition au moins doctrinale du contrat électronique initié par le non-professionnel.

En outre, la critère matériel de définition du contrat électronique est pour le moins lacunaire. On ne sait à la lumière de l'article 1369-4, pas plus qu'aux articles suivants, ce qu'est la « voie électronique ».

La loi LCEN ne nous en apprend pas davantage, son article 1er ne définit que la « communication au public par voie électronique » par référence à l'utilisation d'un « procédé de communication électronique » : « On entend par communication au public par voie électronique toute mise à disposition du public ou de catégories de public, par un procédé de communication électronique, de signes de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature qui n'ont pas le caractère d'une correspondance privée ».

Enfin, on ignore à la lecture du Code civil ou de la loi LCEN s'il est indispensable pour la qualification du contrat que la voie électronique soit celle exclusivement utilisée lors de la conclusion. Cette précision est pourtant fondamentale, comment qualifier un contrat dont le contenu a été proposé par e-mail et accepté par courrier postal ?

La définition du contrat à distance par l'article L 121-16 du Code de la consommation ne comporte pas de telles lacunes. Ainsi on apprend que l'utilisation d'une « technique de communication à distance » -ce qui englobe la voie électronique- doit être exclusive lors de la

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conclusion du contrat. Dans notre exemple, l'envoi par courrier postal de l'acceptation ne ferait pas obstacle à la qualification de contrat à distance.

Qui plus est, le Code de la consommation ajoute que le contrat doit être conclu sans la présence simultanée des deux parties, ce qui écarte de sa définition les contrats conclus à l'aide d' une technique de communication à distance alors que les parties sont néanmoins en face l'une de l'autre : ainsi lorsqu'elles concluent via l'internet au moyen d'ordinateurs dans la même pièce.

A la lumière des « indices » qui nous sont donnés par les définitions générales du Code civil et du Code de la consommation, on peut considérer, avec la démarche la plus logique qui soit, que le contrat électronique est le contrat de vente de biens ou de prestation de services qui est conclu exclusivement par la voie électronique.

A cet égard, on peut à priori dresser une liste non limitative des différentes façons de conclure ce contrat : par l'intermédiaire d'ordinateurs, via un réseau fermé, ou encore via un réseau ouvert tel l'internet, soit directement en ligne depuis le site du cyber-commerçant soit par échanges d'emails, ou enfin par telex et sms.

L'adoption de dispositions propres à la définition et à la formation du contrat électronique ne pouvait suffire à assurer complètement son intégration.

En effet, la faculté de prouver un contrat revêt pour les parties un intérêt au moins aussi important que la possibilité de le conclure, à telle enseigne que nombreux sont les praticiens qui tiennent pour indu ce qui n'est pas prouvé et considèrent comme inexistant un engagement dont la formation ne peut être démontrée.

Cette conception, quoique critiquable - un contrat qui n'est pas prouvé peut néanmoins exister, ce qui démontre une confusion entre la forme et la preuve du contrat- tente de refléter l'impasse dans laquelle se trouve la partie qui n'est pas en mesure de prouver l'existence du contrat.

En effet, conformément à l'article 1315 du Code civil, il appartient à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver. Le demandeur qui ne parvient pas à faire la preuve du contrat électronique doit donc être débouté.

Les acteurs du commerce électronique n'échappent pas à cette obligation. A cet égard, nous nous proposons de comprendre comment les parties peuvent faire la preuve de leur contrat électronique.

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En réalité, le système probatoire réglemente et hiérarchise les modes de preuves 7 en obligeant le justiciable à fournir un écrit lorsque sa demande dépasse un certain montant. Il est ainsi indispensable de permettre aux parties à un contrat électronique de se prévaloir d'un écrit dématérialisé, autrement appelé « écrit électronique » sauf à leur empêcher de pouvoir exercer leurs droits.

C'est sur ce postulat que le législateur français a transposé par la loi du 13 Mars 2000 la directive communautaire du 13 décembre 1999 consacrant le principe d'équivalence de l'écrit électronique et de l'écrit sur support papier.

De gros efforts ont été entrepris par le législateur pour permettre aux parties de se prévaloir d'une preuve écrite de leur contrat électronique (Partie I). Malgré cela, après plusieurs années de recul, on s'aperçoit à quel point leur situation reste fragile tant il leur est difficile de se conformer aux exigences d'un système éminemment complexe (Partie II).

Partie 1 La preuve écrite du contrat électronique

La loi française contraint parfois les parties à pré-constituer une preuve écrite de leur contrat dans la perspective d'un éventuel litige. Cette obligation posée par l'article 1341 du Code civil est durement sanctionnée car elle oblige le juge à débouter le demandeur lorsqu'il ne parvient pas à fournir un écrit.

Il faut par conséquent s'entendre sur la notion d'écrit car cet aspect est fondamental pour les parties à contrat électronique qui disposent d'un écrit à priori très différent du manuscrit traditionnel. Si l'on se réfère à une interprétation historique de la règle aujourd'hui contenue à l'article 13418 du Code civil, il faut d'emblée écarter l'écrit établi sur un support électronique. En effet, l'écrit a toujours été appréhendé sous une forme matérialisée, le support faisant partie intrinsèque de sa définition9.

7 Issu d'une doctrine classique incarnée par Ihering selon laquelle la justice est au dessus de la liberté, le système probatoire français est pour partie « de preuve légale ». La fonction juridictionnelle appartient à l'Etat qui ne peut pas se désintéresser de la manière dont les justiciables prouvent leurs droits, d'où la modélisation et la hiérarchisation des modes de preuves.

Cet a vis est partagé par plusieurs auteurs, voir R. Legeais, Les règles de preuve en droit civil. Permanences et transformations, th. Poitiers, 1955, p. 134 et s. ; E. Bonnier, Traité pratique des preuves en droit civil et en droit criminel, 3e éd., 1982, t. 1, n° 177, p. 220.

8 L'ordonnance des Moulins prise par le Roi Charles IX en 1566 a inspiré le régime probatoire issu de l'article 1341 du Code civil.

9 Ainsi on peut notamment relever les tablettes d'argile, le papier actuel traditionnel ou encore le parchemin

8

Ainsi, il devenait indispensable pour la sécurité du commerce électronique d'assurer une équivalence entre l'écrit électronique et l'écrit sur support papier, à défaut, les parties pouvaient être déboutées au seul motif que l'écrit électronique n'est pas un écrit au sens de l'article 1341 du Code civil. Pour ce faire le législateur a adopté une loi du 13 décembre 200010 pour intégrer l'écrit électronique au sein des preuves littérales (Chapitre I).

Après avoir fixé le cadre général de l'équivalence de l'écrit électronique et de l'écrit sur support papier, le législateur a tiré toutes les conséquences de ce principe en transposant à l'écrit électronique les concepts propres à l'écrit papier (Chapitre II)

Chapitre 1 L'admission de l'écrit électronique au sein des
preuves littérales

La loi du 13 mars 2000 n'a pas porté atteinte au contenu de l'article 1341 du Code civil. Bien au contraire, le législateur n'a pas voulu libéraliser le régime juridique du contrat électronique en permettant aux parties d'échapper à l'obligation de prouver par écrit.

Or comme nous l'avons évoqué, la conception traditionnelle de la preuve littérale devait conduire au rejet de l'écrit électronique. La loi du 13 Mars 2000 a permis d'éviter cet écueil en ajoutant au Code civil un article 1316 définissant l'écrit comme suit : « La preuve littérale, ou preuve par écrit, résulte d'une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d'une signification intelligible, quels que soient leur support et leurs modalités de transmission ».

D'emblée, on perçoit à quel point l'approche du législateur français est empreinte de neutralité technologique, l'intelligibilité semble être la seule véritable condition à laquelle est suspendue la qualification d'écrit11. En effet, détachée de toute idée de support, cette définition de la preuve littérale englobe à priori les traces écrites produites par l'intermédiaire d'une technologie quelconque. On peut ainsi y intégrer la preuve par SMS, MMS ou encore celle établie par la voie d'ordinateurs au moyen de l'internet comme l'e-mail .

10 Loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relatives à la signature électronique, JORF 14 mars 2000, p. 3968.

11 A cet égard, on ne peut pas considérer que les impulsions électronique qui n'ont pas encore été traduites par la machine soient considérées comme intelligibles.

9

Ce progrès n'aurait cependant pas suffit à garantir une réception de l'écrit électronique équivalente à celle de l'écrit papier. En conséquence, le législateur s'est attelé à élaborer d'autres dispositions censées garantir cette équivalence (Section I). A cet égard, la reconnaissance de l'écrit électronique ne pouvait être aboutie qu'en admettant la validité de la signature électronique. (Section II)

Section 1 L'équivalence conditionnée de l'écrit électronique et de

l'écrit papier

Énoncé à l'article 1316-1 du Code civil, le principe d'équivalence probatoire de l'écrit électronique et de l'écrit papier imprègne l'ensemble des articles subséquents (I). La résonance généralisée de ce principe pose question. En effet, cette opiniâtreté démontre à quel point le législateur a redouté une résistance des juges vis à vis de la reconnaissance de l'écrit dématérialisé.

Il reste qu'il est bien inutile aux parties d'agir en justice en demandant l'exécution du contrat électronique -et de se prévaloir du principe de l'équivalence- si elles ne sont pas parvenues à conserver l'acte. Aussi, par faveur au consommateur, le législateur a obligé le professionnel à conserver le contrat pendant une certaine durée (II).

§1 La consécration du principe de l'équivalence probatoire de l'écrit électronique et

de l'écrit papier

Avant la loi du 13 Mars 2000, la jurisprudence avait déjà eu l'occasion d'admettre la recevabilité d'un écrit électronique.

On retiendra surtout pour sa pédagogie un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de Cassation le 2 décembre 199712 qui a statué en ces termes : « l'écrit peut être établi et conservé sur tout support, y compris les télécopies, dès lors que son intégrité et l'imputabilité de son contenu à l'auteur désigné ont été vérifiées, ou ne sont pas contestées ».

Malgré le contexte commercial de l'affaire, la Cour de Cassation ne s'est pas prévalue du

12 Cass.Com, 2 Dec 1997, D. 1998, p. 192, note D. R Martin

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principe de liberté de la preuve et a raisonné en termes d'admissibilité de l'écrit, ce faisant, elle semble implicitement avoir fait application du principe d'équivalence probatoire entre l'écrit papier et l'écrit électronique.

En effet, dès lors que l'on sait avec certitude d'une part, qu'un écrit n'a pas été altéré depuis sa création et d'autre part, que la personne à qui on l'oppose en est bien l'auteur -ou lorsque ce dernier ne conteste pas ces circonstances- on doit en principe en admettre la recevabilité.

Or, jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 13 Mars 2000, un juge pouvait aisément refuser d'admettre une preuve électronique -quand bien même son intégrité et son imputabilité n'étaient pas contestables- au seul motif qu'il ne s'agissait pas d'un écrit au sens de l'article 1341 du Code civil.

Les articles 1316-1 et suivants du Code civil tendent justement à éviter cet écueil en obligeant expressément le juge à prendre en compte l'écrit électronique en tant que véritable preuve littérale. En effet ce dernier est « admis en preuve au même titre que l'écrit électronique ».

Néanmoins, cette reconnaissance de l'écrit dématérialisé ne s'est pas faite au détriment de la sécurité juridique car le législateur l'a accueilli sous réserve « que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité ».

Au demeurant, il y a là une rupture avec l'approche généraliste du législateur dans l'article 1316 du Code civil. En effet, plutôt que d'instaurer un principe d'équivalence pour l'écrit électronique en lui assignant le respect de certaines conditions, le législateur aurait pu exiger le respect de ces conditions pour l'écrit de manière générale sans pour autant faire une différence entre l'écrit électronique et l'écrit papier.

Le libellé de 1'article 1316 du Code civil aurait pu être le suivant : «Qu'il soit sous forme électronique ou sur support papier, l'écrit est admis en preuve sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité ».

Une telle rédaction aurait évité la stigmatisation des failles dont souffre l'écrit électronique, lesquelles au demeurant peuvent tout aussi bien affaiblir l'écrit papier -en témoigne l'existence d'une procédure de contestation de l'écrit- ce qui montre bien qu'il n'y a pas « similitude » mais « équivalence » entre l'écrit électronique et l'écrit sur support papier.

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Si l'article 1316-1 du Code civil a trait aux conditions de recevabilité de l'écrit électronique en tant que moyen de preuve par écrit, tout autre est l'objet de l'article 1316-3 du Code civil qui admet que « l'écrit sur support électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier ».

La formule est brutale et surprenante, elle pourrait faire croire que le juge est lié par une preuve dès lors qu'elle répond à la qualification d'écrit électronique au sens des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil, or, il n'en est rien.

Le régime légal probatoire oblige le juge à recevoir en preuve un écrit répondant aux conditions de recevabilité mais ne le contraint en aucune façon à considérer que cet écrit rend vraisemblable l'existence du droit ou du fait allégué13 . Il s'agit donc d'une plutôt d'une incitation faite au juge d'accorder à un écrit électronique la force probante qu'il lui accorderait si ce dernier était établi sur support papier.

Selon la même idée mais au sujet d'une situation différente, l'article 1316-2 du Code civil incite le juge à régler un conflit de preuves « lorsque la loi n'a pas fixé d'autres principes, et à défaut de convention valable entre les parties [...] en déterminant par tous moyens le titre le plus vraisemblable, quel qu'en soit le support », autrement dit, le législateur entend ici éviter qu'un juge ne tranche le conflit en faveur de l'écrit sur support papier sur le seul fondement d'une conception « ancienne » de la preuve littérale tenant pour « reine des preuves » l'écrit manuscrit.

Malgré tout, le principe de l'équivalence a ses limites. Ainsi il est exigé des parties qu'elles conservent la preuve de leur contrat dans des conditions aptes à garantir l'intégrité de l'écrit électronique. Aussi cette contrainte est elle difficile à respecter, notamment pour le consommateur qui n'est pas en mesure d'assurer un archivage du contrat dans les règles de l'art de sorte que la loi fait peser cette contrainte sur les épaules du professionnel.

§ 2 L'intégrité de l'écrit électronique et la conservation du contrat électronique

L'article 1316-1 du Code civil oblige les parties à un écrit électronique à le conserver « dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité ». Ainsi, il appartient aux parties à un contrat électronique de mettre en oeuvre un procédé permettant de préserver la preuve de leur

13 Affirmation à relativiser lorsque existe une convention de preuve, voir infra Partie 2 Chapitre 1 Section 2

12

accord dans des conditions telles que le contenu de l'écrit électronique présenté au juge serait identique à celui existant au jour de l'établissement de l'acte.

Cette opération peut s'avérer délicate lorsqu'elle suppose un ou plusieurs transferts de données numériques car c'est notamment à ce moment qu'il existe un risque d'altération de l'écrit.

Une telle atteinte portée au contenu de l'acte serait fatale à la partie qui s'en prévaut car il est loisible au juge de le rejeter au seul motif qu'il ne s'agirait pas d'un écrit électronique au sens de l'article 1316-1 du Code civil.

La conservation renvoie traditionnellement à la notion d'archivage défini selon un auteur comme l'opération qui « a pour finalité d'assurer une valeur juridique aux documents de leur établissement jusqu'au terme du délai de conservation ».14

C'est pourquoi le législateur a imposé dans certains cas à l'une des parties au contrat l'obligation d'assurer elle-même l'archivage du contrat électronique alors que la directive du 8 juin 200015 ne prévoyait qu'un archivage optionnel.

Ainsi, La loi LCEN du 21 juin 2004 a introduit un article L 134-2 au Code de la consommation aux termes duquel « lorsque le contrat est conclu par voie électronique et qu'il porte sur une somme égale ou supérieure à un montant fixé par décret, le contractant professionnel assure la conservation de l'écrit qui le constate pendant un délai déterminé par ce même décret et en garantie à tout moment l'accès à son co-contractant si celui-ci en fait la demande ».

Selon le décret du 16 février 2005 pris pour son application16, ce texte applicable aux contrats de consommation conclus par voie électronique déclenche l'obligation pour le professionnel de procéder à un archivage du contrat conclu lorsque son montant dépasse 120 euros. Le délai de conservation est de 10 ans à compter de l'exécution du service ou de la livraison du bien qui fait l'objet du contrat, ainsi il commencera à courir à compter de la conclusion du contrat pour celui dont l'exécution est immédiate.

Cette disposition favorise le consommateur en prenant en compte l'inégalité de moyens des parties. En effet, il est logique de l'imposer au professionnel qui, s'il ne dispose pas des

14 L'auteur distingue les deux notions, selon lui, la conservation a trait à la conservation d'un droit tandis que l'archivage s'appliquerait à un support. E. Caprioli, « L'archivage électronique », JCP G n° 38, 14 septembre 2009

15 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur, JOCE L 178, 17 juill. 2000, p. 1

16 Décret n° 2005-137 du 16 Fév. 2005 pris pour l'application de l'article L 134-2 du Code de la consommation, JORF 18 Fév. 2005, texte n° 26

13

moyens aptes à respecter cette contrainte, peut en confier l'exécution à un tiers spécialisé présentant les caractéristiques d'un tiers de confiance.

Au demeurant, cette activité s'est largement développée et se trouve notamment pratiquée par des professionnels possédant des labels délivrés par l'AFNOR17 en vertu de normes privées censées assurer aux clients toute confiance dans des prestations de qualité.

Il aurait été vain d'imposer cette obligation au consommateur dont la maîtrise de la technique électronique est plus que douteuse. En effet, comme le rappelle un auteur :« qui, parmi les cyber-consommateurs sait, par exemple, que l'archivage de ses messages sur sa messagerie électronique n'est pas enregistré sur son propre disque dur, mais sur les données détenues par son hébergeur ? »18.

S'il est indispensable aux parties de conserver l'acte dans des conditions aptes à garantir son intégrité, le respect de cette condition ne suffit pas à garantir les parties de le recevabilité de leur preuve. En effet, l'écrit électronique n'en reste pas moins une preuve littérale dont la validité est subordonnée à l'existence d'une signature propre à l'auteur. Il était nécessaire par conséquent d'assurer la transposition de la directive du 13 décembre 1999 consacrant la validité de la signature électronique.

Section 2 Le pré-requis indispensable au principe de l'équivalence
probatoire : la validité de la signature électronique

La loi du 13 Mars 2000 a consacré la validité de la signature électronique en introduisant dans le Code civil un l'article 1316-4 aux termes duquel «elle consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache ».

Cette disposition fait écho à l'article 1316-1 du Code civil qui exige de l'écrit électronique que soit dûment identifiée la personne dont il émane. Là encore, cette intégration de la signature électronique a été assurée par la loi au travers d'une approche fonctionnelle de la preuve par écrit, et plus précisément de la signature nécessaire à sa perfection (I).

17 Association française de normalisation

18 A.Penneau, « La forme et la preuve du contrat électronique » , 6.60 p 329 in l'acquis communautaire, le contrat électronique , Judith Rochfeld, Etudes juridiques, Economica 2e édition

14

Au delà de cette définition générale, la loi a procédé à une reconnaissance graduée des signatures électroniques en fonction des garanties offertes par chacune d'entre elles afin d'attacher notamment à la signature dite « sécurisée » une présomption réfragable de fiabilité (II).

§ 1 La reconnaissance de la signature électronique

La reconnaissance de la signature électronique a été rendue possible par la consécration d'une définition fonctionnelle de la signature. En effet, l'article 1316-4 alinéa 1er du Code civil dispose que « la signature nécessaire à la perfection d'un acte juridique identifie celui qui l'appose. Elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte ».

La disposition met véritablement l'accent sur les fonctions de la signature dès lors que celle-ci doit « identifier » celui qui l'appose et « manifeste son consentement » aux obligations qui découlent de l'acte signé.

Cette approche fonctionnelle se distingue de l'approche traditionnelle de la signature qui tendait à intégrer le support de la signature dans sa définition. Ainsi, une interprétation historique de la règle contenue dans l'article 1341 du Code civil, héritée de l'ordonnance des Moulins, devait conduire à exclure la signature électronique, dès lors que le législateur -qui ne définissait cependant ni l'écrit ni la signature- avait établit la règle à une époque où on ne pouvait anticiper le progrès technologique.

Par hypothèse, il ne pouvait imaginer l'arrivée de la signature dématérialisée. C'est pourquoi traditionnellement, on ne pouvait concevoir qu'une signature manuscrite.

Au demeurant, si l'on a coutume de distinguer la signature « manuscrite » de la signature « électronique », l'emploi du terme « manuscrite » n'est pas à proprement parler le meilleur terme pour refléter la réelle différence séparant la signature électronique de la signature qui ne l'est pas.

En effet, qu'elle soit numérique ou manuscrite, la réalisation de la signature nécessite toujours l'emploi de la main. Dans le premier cas, l'auteur l'utilise pour taper manuellement au clavier un code personnel et secret censé l'identifier. Dans le second il l'emploie afin de pouvoir tenir son stylo.

Ce n'est pas l'usage de la main qui distingue la signature électronique de celle qui ne l'est pas, mais c'est le lien que cette signature entretient avec elle. En effet, on ne retrouve pas dans le code qui fait office de signature numérique la marque personnifiée d'un geste physique.

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Supposons deux personnes distinctes à la signature manuscrite et électronique identique. On peut les distinguer quant à la signature manuscrite car le geste de la main est propre à son auteur tandis que pour le code confidentiel, il est impossible de distinguer les auteurs d'un même code.

Un code confidentiel peut être propre à un titulaire comme une signature manuelle est la marque de son auteur. Ceci dit, il est plus difficile de démontrer qu'un code chiffré a été subtilisé par un tiers que de montrer le décalage entre la signature de l'auteur réel du document et celui dont la signature a été reproduite, entendu comme l'auteur supposé.

Quoi qu'il en soit, les auteurs étaient largement favorables à une conception fonctionnelle de la signature. Notamment, l'un d'entre eux l'a très tôt définie comme « un procédé d'identification manifestant l'adhésion de celui qui en use »19. Selon lui, « n'importe quel signe suffisamment distinctif peut constituer une signature s'il remplit cette double fonction d'approbation et d'identification qui est traditionnellement dévolue à la signature ».

Malgré tout, il était indispensable de garantir la réalisation par la signature électronique des fonctions de la signature en général. C'est pourquoi le législateur a imposé aux parties à un écrit électronique de recourir à un « procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache ».

Concrètement, une signature électronique doit, pour être valable, permettre d'identifier en toute certitude son utilisateur et pouvoir être rattachée sans nul doute à l'acte qu'elle approuve.

Ces conditions permettent au juge d'écarter la preuve d'un contrat électronique lorsque l'écrit électronique qui lui est soumis ne comporte pas de signature ou lorsque celle-ci n'est pas suffisamment « fiable » au sens de l'article 1316-4 alinéa 2 du Code civil.

A cet égard, la loi du 13 mars 2000 a mis en place un système organisant un accueil distinct de la signature électronique suivant son degré de fiabilité. La réforme reprend en cela le système porté par la directive du 13 décembre 1999 qui avait opté pour une gradation des signatures électroniques en consacrant notamment « la signature électronique avancée ».

19 J. Larrieu, « les nouveaux moyens de preuve : pour ou contre l'identification des documents informatiques à des écrits sous seing privés ? », Cah. Lamy Dr. Inf., 1988, H, n° 5

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§2 La reconnaissance graduée de la signature électronique

Aux termes de l'article 1316-4 alinéa 2 du Code civil, la fiabilité du procédé de signature utilisé par le signataire est « présumée, jusqu'à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ». Cette disposition, mise en oeuvre par le décret du 30 septembre 200120 conduit à distinguer deux types de signatures électroniques :

· La signature électronique « simple »21 définie par l'article 2 du décret comme « une donnée qui résulte de l'usage d'un procédé répondant aux conditions définies à la première phrase du second alinéa de l'article 1316-4 du Code civil ».

· La signature électronique sécurisée, définie comme « une signature électronique qui satisfait, en outre, aux exigences suivantes :

-être propre au signataire

-être créée par des moyens que le signataire puisse garder sous son contrôle exclusif

-garantir avec l'acte auquel elle s'attache un lien tel que toute modification ultérieure de l'acte soit détectable. »

L'essence du dispositif est de faire reposer le caractère sécurisé d'une signature électronique sur l'existence d'un certificat délivré par un prestataire de services répondant aux caractéristiques d'un tiers de confiance22.

En effet l'article 2 définit les conditions dans lesquelles la signature peut être regardée comme sécurisée de la manière suivante : « La fiabilité d'un procédé de signature électronique est présumée jusqu'à preuve contraire lorsque ce procédé met en oeuvre une signature électronique sécurisée, établie grâce à un dispositif sécurisé de création de signature électronique et que la vérification de cette signature repose sur l'utilisation d'un certificat électronique qualifié ».

Ce certificat doit établir avec certitude que l'ensemble des données utilisées pour signer sont propres au signataire, de sorte qu'on connaît avec certitude l'identité du signataire. Enfin, le

20 Décret n° 2001-272 du 30 Mars 2001. I. de lamberterie et J.f Blanchette, Le décret du 30 mars 2001 relatif à la signature électronique : JCP E 2001, 1269

21 Cette dénomination n'est pas employée par le texte mais par la doctrine. Voir notamment A. Penneau, «La forme et la preuve du contrat électronque », in L'acquis communautaire, le contrat électronique, J.Rochfeld, Etudes juridiques, Economica 2010.

22 Il s'agit d'un« Prestataire de service de certification électronique » selon la dénomination employée par le décret, les conditions d'une telle qualification sont définies au chapitre III du décret.

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certificat doit garantir au destinataire de l'écrit électronique que la signature utilisée s'y rattache et lui permettre de détecter la moindre anomalie. Il doit donc pouvoir vérifier la signature et détecter la moindre altération ou modification du document signé.

A priori, peu de procédés de signatures électroniques semblent respecter ces conditions23. En revanche, ce n'est pas le cas de la signature électronique reposant sur un procédé cryptographique.

La cryptographie regroupe selon un auteur24 : « l'ensemble des méthodes qui permettent de coder un message afin de le rendre incompréhensible pour quiconque n'est pas doté d'un moyen de le déchiffrer »25 L'utilisateur d'un procédé cryptographique peut ainsi encrypter un message -le rendre incompréhensible- à l'aide d'une fonction mathématique appelée algorithme26 et laisser à son destinataire le soin de le décrypter -lui rendre son intelligibilité- en « cassant »l'algorithme.

Cette science, au départ utilisée à des fins militaires, s'est développée et permet depuis 1978 de remplir une fonction de signature électronique27 . En effet, les techniques actuelles font usage d'un algorithme connu du public mais qui ne fonctionne que si l'on insère dans le calcul une suite de chiffres ou de lettres appelée « clef ».

Dans le système de cryptographie à « clé publique »28, les parties disposent chacune d'une clé connue du public et d'une autre, privée. Ainsi, l'expéditeur du message le crypte à l'aide de la clé publique du destinataire et de sa propre clé privée de sorte que le destinataire ne peut le décrypter qu'en faisant inversement usage de sa propre clé privée et de la clé publique de l'expéditeur.

La signature électronique est réalisée dans la mesure où le destinataire, qui ne peut décrypter le message qu'avec la clé publique de l'expéditeur, sait avec certitude que le signataire est l'auteur du message.

En outre, la technique permet de garantir que le message n'a pas été altéré ou modifié en cours de transmission. En effet, l'expéditeur applique au message qu'il a rédigé une « fonction de

23 Voir infra Partie 2

24 D.Mougenot, Droit des obligations, la preuve, n°121-1, p 172, Larcier 2002.

25 D.Mougenot, Droit des obligations, La preuve, n°121-2 p 172, Larcier 2002.

26 Il s'agit selon l'encyclopédie d'un « ensemble d'instructions qui permettent à une personne agissant mécaniquement ou à une machine d'obtenir, à partir de données et un nombre fini d'étapes, la solution à un problème »

27 Le principe de la cryptographie à double clef a été élaboré en 1976 par Diffie et Hellman, deux chercheurs mathématiciens.

28 Également dénommé « à double clef » ou encore « cryptage asymétrique »

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hachage irréversible 29» qui a pour effet de créer un résumé du texte. C'est alors ce résumé qui sera crypté et non l'intégralité du message , lesquels seront tous deux envoyés au destinataire.

Ce dernier applique alors à son tour la fonction de hachage au message intégral et en compare le résultat au résumé envoyé par l'expéditeur une fois décrypté. La comparaison permet de mettre en évidence l'existence d'une altération du message.

L'emploi de cette technique permet d'établir un véritable écrit électronique sécurisé au sens des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil. En effet, son utilisation est parfaitement compatible avec le système mis en oeuvre pour « la signature électronique sécurisée ». Le certificat électronique qualifié délivré par le prestataire de service de certification électronique permet de garantir que la clef publique concorde bien avec l'identité de l'expéditeur. Le processus se déroule de la manière suivante :

- Le destinataire se procure la clé publique de l'expéditeur en s'adressant au tiers certificateur, lequel lui remet le certificat accompagnant la clé publique

- il déchiffre ensuite la signature avec la clé publique

- Après quoi, il doit vérifier la validité du certificat auprès du certificateur

Finalement, le cadre général mis en place par le législateur français apparaît pour le moins complexe. Néanmoins, cette rigidité répond aux besoins de sécurité du commerce électronique en obligeant ses acteurs à mettre en oeuvre des procédés aptes à garantir non seulement leur identité mais aussi l'intégrité de l'acte électronique.

Au surplus, le principe de l'équivalence de l'écrit électronique et de l'écrit papier se poursuit au travers de la forme que revêt la preuve littérale.

29 Il s'agit d'une fonction particulière qui, à partir d'une donnée fournie en entrée, calcule une empreinte servant à identifier rapidement, bien qu'incomplètement, la donnée initiale.

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Chapitre 2 : Les formes de l'écrit électronique

Le législateur a tiré toutes les conséquences de l'équivalence de l'écrit électronique et de l'écrit papier, en transposant à l'écrit électronique les contraintes propres à l'acte sous seing privé et à l'acte authentique (Section I).

Qui plus est, l'ordonnance du 16 juin 2005 récemment mise en oeuvre par le décret du 5 février 2011, a offert aux parties la possibilité de conclure un contrat électronique selon de nouvelles modalités en consacrant dans le code civil l'équivalence de la lettre électronique et de la lettre sur support papier (Section II).

Section 1 L'écrit électronique et les formes traditionnelles de la preuve littérale

Il était indispensable à l'émancipation du commerce électronique d'instaurer un principe d'équivalence probatoire entre l'écrit électronique et l'écrit papier. Pour autant, il aurait été possible d'admettre cette équivalence tout en réservant un statut particulier à l'écrit électronique.

Cependant, le législateur n'a pas véritablement distingué ce dernier de son homologue sur support papier, tant lorsqu'il s'agit d'un acte sous seing privé (I) que lorsque l'acte est authentique (II)

§1 L'acte sous seing privé et les contraintes propres à l'écrit sur support papier

Les articles 1322 et suivants du Code civil définissent le régime juridique applicable à l'écrit sous seing privé30. Notamment, les parties doivent respecter plusieurs contraintes propres à sa validité sous peine de ne pouvoir prouver leurs droits et obligations.

Ces contraintes sont distinctes suivants la nature du contrat dont les parties veulent

30 Il s'agit de l'écrit rédigé et conclu sous signatures privées

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prouver le contenu. En premier lieu, l'article 1325 du Code civil oblige les parties à un contrat synallagmatique à établir autant d'écrits sous seing privés que de parties ayant un intérêt distinct sauf à confier l'écrit unique à un tiers indépendant mandataire commun aux deux parties31.

La conception de l'original dans l'univers électronique pose problème. En effet, celle-ci variera selon la technologie utilisée et la manière dont les parties à un contrat électronique échangent leurs consentements. Notamment, on peut se demander à quel moment l'original est constitué lorsque plusieurs transmissions de données numériques ont été rendues nécessaires pour conclure le contrat32.

Enfin, l'original est fréquemment conservé par le professionnel sans qu'un exemplaire n'ait été envoyé au co-contractant.

C'est pourquoi un dernier alinéa a été intégré à l'article 1325 aux termes duquel « l'exigence d'une pluralité d'originaux est réputée satisfaite pour les contrats sous forme électronique lorsque l'acte établi est conservé conformément aux articles 1316-1 et 1316-4 et que le procédé permet à chaque partie de disposer d'un exemplaire ou d'y avoir accès ».

En second lieu, lorsque les parties ont conclu un contrat unilatéral dans lequel une seule des parties « s'engage envers l'autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible », l'acte sous seing privé constatant le contrat doit comporter outre la signature de celui qui souscrit l'engagement, la mention, « écrite par lui-même » de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres.

L'article 1326 du Code civil tel qu'énoncé a fait l'objet d'une modification par la loi du 13 Mars 2000 pour adapter cette contrainte particulière à l'impossibilité d'insérer dans l'écrit électronique une mention manuscrite.

De ce fait, la mention n'avait plus à être écrite par le débiteur, « de sa main » mais « par lui même ». La modification entendait ainsi permettre de considérer qu'une telle mention avait été apposée lorsque le débiteur l'avait écrite par l'intermédiaire d'un clavier, qu'il s'agisse d'un clavier numérique, informatique ou digital.

Cependant, le texte était lacunaire dès lors qu'il ne disait rien quant aux conditions de mise en oeuvre de cette exigence. En effet, l'important était d'établir un système apte à garantir que ladite mention avait bien été apposée par le débiteur lui même, à défaut, on ne pouvait que

31 C.Cass, Civ 1ère, 17 Oct. 1955, Gaz Pal. 1955, 2, 394 ; C.Cass, Civ 1ère, 2 juil. 1952, D. 1952, 703

32 A.Penneau, « La forme et la preuve du contrat électronique » , 6.50 p 311 in l'acquis communautaire, le contrat électronique , J.Rochfeld, Etudes juridiques, Economica 2e édition

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déplorer cette lacune mettant en échec l'esprit de l'article 1326 du Code civil.

C'est un arrêt rendu par la Cour de Cassation le 13 mars 200833 qui est venu pallier cette lacune en considérant que la formalité devait être accomplie au moyen d'une technologie comportant « des procédés d'identification conformes aux règles qui gouvernent la signature électronique ou un tout autre procédé permettant de s'assurer que le signataire est le scripteur de ladite mention ».

Autrement dit, les exigences propres à la mention écrite par la main du débiteur sont réputées satisfaites dès lors que les conditions d'authentification plus générales de l'écrit électronique sont remplies. Certains auteurs ont en cela dénoncé l'existence d'un déclin de la formalité manuscrite par suite d'un « effet boomerang » du principe d'équivalence34.

L'analyse des conditions mises en place par le législateur pour assurer le respect de ces formalités par les parties à un écrit électronique montre à quel point ces formalités, naturelles lorsqu'il s'agit d'un écrit sur support papier, le sont beaucoup moins lorsque l'écrit est établi sous forme électronique. Le législateur aurait tout simplement pu dispenser les parties à un écrit électronique d'avoir à les respecter.

Ces « excès » sont la manifestation du soucis du législateur qui est d'assurer une intégration complète de l'écrit électronique au sein des preuves littérales. Ce dernier ne peut assimiler l'écrit électronique et l'écrit papier tout en permettant au premier d'être dispensé des obligations propres au second.

Dans la même ligne directrice, la loi du 13 mars 2000 a mis en place l'acte authentique électronique, tandis qu'un décret du 10 août 200535 est venu en préciser les conditions d'application, en modifiant de fond en comble le décret du 26 Novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires.

33 Cass. Civ 1ère, 13 mars 2008, Bull. Civ., I, n° 73, JCP G 2008, II, 10081, obs. E. Putman, Défresnois 2008, art 1346, obs. R. Libschaber

34 A.Penneau, « la forme et la preuve du contrat électronique », 6.52 p 319, in l'acquis communautaire, le contrat électronique , J. Rochfeld, Etudes juridiques, Economica 2ème édition.

35 Décret n° 2005-973du 10 août 2005 modifiant le décret n°71-941 du 26 nov. 1971 relatif aux actes établis par les notaires, JORF 11 août 2005, p. 13096. Voir B. Reynis, « L'acte authentique électronique », Défresnois, 25 avri. 2005, n° 1, p. 100.

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§2 La consécration de l'acte authentique électronique

L'instauration de l'acte authentique électronique à l'article 1317 du Code civil avait suscité d'importantes controverses doctrinales dans l'attente de la parution des décrets du 10 août 200536.

Notamment, les auteurs avaient redouté qu'un tel acte puisse être établi à distance, sans la présence physique simultanée des parties et du notaire chargé d'instrumenter l'acte. En effet, selon M.Flour, la présence réelle du notaire constitue « un élément substantiel. Elle en est, à la lettre, indispensable. »37

M.Raynouard, confirme ce point de vue, selon lui, « l'intervention du notaire n'est pas uniquement une garantie matérielle du contenu de l'acte et du consentement manifesté par les parties ; le notaire a un rôle fondamental de conseil, son intervention entraînant un surplus de réflexion et assurant une prise de conscience de l'acte conclu »38. Le décret du 10 août 2005 n'a pas porté réellement atteinte à cette conception de l'authenticité.

En effet, selon l'article 16 du décret de 1971 modifié, il appartient au notaire d'instrumenter l'acte au moyen « d'un système de traitement et de transmission de l'information » agréé par le conseil supérieur du notariat, celui-ci doit alors faire usage d'un procédé de signature électronique conforme au décret du 30 mars 2001 pris en application de l'article 1316-4 du Code civil.

L'article 20 du décret donne au notaire instrumentaire la possibilité d'instrumenter l'acte à distance, néanmoins, les parties qui ne sont pas en sa présence doivent livrer leur consentement ou leur déclaration par devant un autre notaire qui participe à l'acte et y appose également sa signature.

Un telle disposition « sauve » la notion d'authenticité dès lors que la présence d'un autre notaire est indispensable à la constitution de l'acte authentique électronique. Lorsque l'une des parties n'est pas présente devant le notaire instrumentaire, la seule signature de ce dernier ne suffit pas à conférer l'authenticité à l'acte.

Finalement, l'écrit électronique peut revêtir la forme d'un acte authentique ou encore d'un

36 Voir notamment I. de Lamberterie (dir.), Les actes authentiques électroniques. Réflexion juridique prospective, Mission de recherche « droit et justice », La Documentation française, 2002, passim ; M. Grimaldi et B. Reynis, « L'acte authentique électronique », Défresnois, 2003, p. 1023.

37 J.Flour, « Sur une notion nouvelle de l'authenticité », Rep Desfresnois 1972, n° 5, p. 981

38 A. Raynouard, « Sur une notion ancienne de l'authenticité : l'apport de l'électronique », Rep.Desfresnois, 2003, n° 18, p 1117

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acte sous seing privé. Quoiqu'il en soit il obéit tout de même aux contraintes qui pèsent sur la preuve littérale, qu'il s'agisse de celles relatives à la pluralité d'originaux, l'existence d'une mention écrite par la main même du signataire, ou encore la présence d'un notaire lorsque l'acte est authentique.

Plus concrètement, cet écrit électronique peut cette fois-ci revêtir la forme d'un email, d'un sms, d'un telex ou encore même d'une page sur un écran d'ordinateur lorsque le contrat est conclu directement en ligne sous réserve que les parties aient respecté les conditions prescrites aux articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil.

Aussi, l'ordonnance du 16 juin 200539 a consacré une nouvelle modalité d'établissement et de remise d'un écrit par voie électronique. En effet, cette réforme a intronisé la figure de « la lettre électronique » en tant qu'équivalent de la lettre sur support papier.

Il s'agit pour les parties de pouvoir disposer des mêmes garanties que lorsqu'elles échangent par la voie d'un courrier sur support papier, ce qui était d'ailleurs l'objectif que l'article 26 de la LCEN du 21 juin 2004 avait assigné au gouvernement à qui elle avait confié la charge d'assurer « l'adaptation des dispositions législatives subordonnant la conclusion, la validité ou les effets de certains contrats à des formalités papier au contexte électronique et ce par voie d'ordonnance ».

Si l'objectif était surtout d'introduire un équivalent à la lettre sur support papier lorsqu'une telle formalité était requise à peine de validité d'un acte juridique, il n'en reste pas moins qu'une telle innovation emporte certaines conséquences sur le terrain de la preuve du contrat électronique.

Section 2 La lettre électronique, équivalent de la lettre sur support

papier

Les articles 1369-7 et suivants du Code civil distinguent deux types de lettres électroniques:la lettre électronique simple et la lettre électronique recommandée.

Quoi qu'il en soit, l'expéditeur ne peut y recourir que lorsque celle-ci a trait à la conclusion ou à l'exécution du contrat. Justement, lorsqu'elle comporte une offre de contracter, il

39 Ordonnance n° 2005-674 du 16 juin 2005 relative à l'accomplissement de certaines formalités contactuelles par la voie électronique, JORF 18 Fév. 2005, texte n° 26

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y a tout lieu de penser qu'elle ne pourra déboucher sur la conclusion d'un contrat électronique que si le destinataire formule son acceptation par l'intermédiaire d'un moyen de communication électronique.

En outre, l'article 1369-8 du Code civil qui consacre la lettre recommandée électronique permet à l'expéditeur d'opter pour « la lettre recommandée tout électronique » ou « la lettre recommandée hybride »40. Autrement dit, l'expéditeur peut exiger du tiers41 -il peut s'agir de la poste ou d'un autre établissement concurrent- chargé de l'envoi, qu'il remette au destinataire le contenu de la lettre électronique imprimé sur un support papier ou qu'il adresse cette lettre par la voie électronique.

Au demeurant, on peut raisonnablement se demander si le recours à une «lettre recommandée hybride » ne fait pas obstacle à la qualification du contrat électronique. Ni l'article

L 121-16 du Code de la consommation ni l'article 1369-3 du code civil qui définissent respectivement le contrat à distance et le contrat électronique nous permettent d'y répondre.

En tout état de cause, si la lettre électronique doit respecter certaines conditions à peine d'invalidité , elle offre certaines garanties de preuve entre les parties (I) et peut d'ailleurs être datée avec certitude grâce à un procédé électronique relativement complexe (II).

§1 De la lettre électronique simple à la lettre recommandée électronique

A la lecture de l'article 1369-7 du Code civil, il n'existe pas de condition particulière à la validité de la lettre électronique simple42. Au contraire, l'article 1369-8 du Code civil exige du courrier électronique recommandé qu'il soit « acheminé par un tiers selon un procédé permettant d'identifier le tiers, de désigner l'expéditeur, de garantir l'identité du destinataire et d'établir si la lettre a été remise ou non au destinataire ».

A priori, une telle formulation laisse à penser que les exigences propres à l'identification de l'expéditeur et du destinataire ne se distinguent pas de celles relatives à la recevabilité d'un écrit électronique.

Or il n'en est rien. En effet, le décret d'application du 5 février 2011 ne consacre aucune

40 Expressions employées par E.A Caprioli, « les lettres recommandées électroniques », cahiers de droit de l'entreprise, mai 2011, n° 3, p. 68

41 Lorsqu'il est chargé d'acheminer une lettre recommandée électronique, il doit y apposer un ensemble d'informations l'identifiant, dont le contenu est fixé à l'article 1 du décret du 2 Février 2001

42 Mis à part son champ d'application restreint

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garantie particulière apte à assurer l'identification des correspondants, ainsi, l'article 1er du décret oblige seulement l'expéditeur à « indiquer » au tiers chargé de l'acheminement du courrier : «- son nom et son prénom ou sa raison sociale ainsi que son adresse de courrier électronique et son adresse postale

- le nom et le prénom ou la raison sociale du destinataire ainsi que son adresse postale de courrier électronique ».

Le système n'est donc pas sécurisé. Il ne garantit en rien l'identité des correspondants et surtout, de l'expéditeur. On peut saluer la souplesse de ce dispositif favorable à l'expansion du commerce électronique. Néanmoins, on peut s'interroger sur la capacité d'une lettre électronique recommandée à constituer un écrit électronique au sens des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil.

En effet, les exigences propres à l'identification de l'expéditeur sont si souples qu'elles ne garantissent en rien l'origine de la lettre et par conséquent, le respect de la condition d'authentification de l'écrit électronique. On aurait pourtant pu concevoir un système offrant de telles garanties et substituant à l'exigence d'une signature électronique une simple vérification d'identité43.

En l'absence d'un tel dispositif, on doit conseiller à l'expéditeur de prendre toutes les mesures aptes à assurer son identification, en faisant notamment usage d'une signature électronique sécurisée au sens de l'article 1316-4 du Code civil.

En revanche, on pourrait aussi considérer que les exigences propres à la lettre recommandée électronique se substituent à celles propres à l'écrit électronique. Ainsi, une lettre recommandée électronique serait un écrit électronique au sens des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil.

Cette interprétation pourrait se concevoir. En effet, l'esprit de la réforme était d'approfondir l'équivalence de l'écrit sur support papier et de l'écrit électronique, en consacrant un équivalent électronique à la lettre papier lorsqu'elle est exigée pour la conclusion ou l'exécution du contrat.

Néanmoins, une lettre recommandée papier n'est pas nécessairement un écrit, par exemple, si la lettre ne comporte pas de signature. On ne comprendrait pas pourquoi un traitement si différent serait accordé à la lettre recommandée lorsqu'elle est établie et envoyée par

43 Il est indispensable de garantir l'origine de l'écrit, pour autant, une vérification de l'identité de l'expéditeur d'un message par un tiers est apte à garantir l'origine du message tout autant qu'une signature propre à l'auteur. Le législateur aurait pu adapter la notion d'écrit électronique au mécanisme de la lettre électronique.

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voie électronique.

Ces interrogations renvoient à un débat sur le notion d'écrit électronique car les exigences qui lui sont propres sont lourdes et peu compatibles avec le besoin de rapidité des échanges. Un auteur dénonce à cet égard un « échec de l'écrit électronique »44 dans la mesure où rares sont les écrits établis et échangés par la voie électronique répondant à cette qualification. Il milite pour un assouplissement de la notion. Un telle simplification serait d'autant plus attendue pour la lettre recommandée électronique que la jurisprudence récente n'apparaît pas réellement favorable à la recevabilité de l'e-mail à titre d'écrit électronique 45.

En outre, il existe une condition indispensable et préalable à l'utilisation de la « lettre recommandée tout électronique ». En effet, l'article 1369-8 alinéa 2 oblige l'expéditeur à obtenir l'accord du destinataire lorsque ce dernier n'est pas un professionnel.

On peut dès lors se demander si cet accord peut être contenu dans une clause générale figurant dans un contrat précédent. Une interprétation restrictive de la loi conduirait à exiger de l'expéditeur qu'il obtienne l'accord du destinataire avant chaque envoi d'une lettre recommandée46, on attend également un éclaircissement sur ce point.

Enfin, le décret du 20 avril 2011 a mis en oeuvre les conditions relatives à l'apposition d'une date d'expédition et de réception de la lettre électronique par un procédé électronique, ce qui peut revêtir un enjeu important pour les parties au contrat.

§2 l'horodatage de la lettre électronique

Les articles 1369-7 et 1369-8 du Code civil avaient fait preuve d'innovation en consacrant un équivalent au « cachet de la poste ». En effet, celui-ci se trouvait remplacé par un procédé électronique permettant d'apposer la date d'expédition et la date de réception sur la lettre électronique.

Cependant, le législateur avait renvoyé au pouvoir réglementaire le soin de préciser selon quelles conditions sa fiabilité était présumée. C'est maintenant chose faite. Le décret du 20 avril 2011 relatif à l'horodatage des courriers expédiés ou reçus par voie électronique pour la

44 L.Grynbaum, « Le droit de l'écrit électronique : un frein au commerce en ligne (un e-mail n'est pas un écrit électronique au sens du Code civil, selon la Cour de Cassation) », Lamy Droit de l'immatériel, 2011, n° 67, p. 33

45 Voir infra Partie 2 Chapitre 1 Section 1

46 L. Grynbaum, « pour une bonne réception de la lettre recommandée électronique », JCP E n°8, 24 Février 2011

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conclusion ou l'exécution d'un contrat47 a consacré la notion d'horodatage.

Il s'agit « d'une information permettant de démontrer qu'une donnée -un document, un enregistrement d'audit ou une signature électronique- existait à un instant donné »48.

Selon l'article 2 du décret, « le procédé d'horodatage électronique est présumé fiable si le prestataire de services d'horodatage (PSHE) mettant en oeuvre ce procédé et le module d'horodatage utilisé satisfont aux exigences fixées » au chapitre 2. Il peut alors être utile aux parties d'avoir recours à un PSHE certifié et qualifié. Ces qualités cumulatives présument que le PSHE respecte bien l'ensemble de ces exigences.

Si cette information peut s'avérer précieuse entre les parties à un contrat électronique, on peut se demander par ailleurs si elle peut l'être à l'égard d'un tiers.

En effet, l'article 1328 du Code civil précise les conditions de l'opposabilité d'un acte juridique aux tiers en prenant appui sur la notion de date certaine : ainsi, l'acte sous seing privé ne leur est opposable que du jour où ils a été enregistré, du jour du décès de l'un de ceux qui l'a souscrit ou du jour où sa substance est constatée dans un acte dressé par un officier public.

On peut se demander si l'horodatage par un procédé électronique fiable répondant aux conditions fixées par le décret permet d'établir une date certaine au sens de l'article 1328 du Code civil49. A priori, dès lors que le décret n'en dit rien, il ne paraît pas possible d'interpréter de manière extensive l'article 1328 pour l'élargir au procédé de l'horodatage car ce dernier semble dresser une liste limitative des situations dans lesquelles on peut concevoir une date certaine, il faut attendre un positionnement jurisprudentiel sur ce point.

En conclusion, On ne peut pas nier que de lourds efforts ont été réalisés par le législateur pour assurer l'intégration de l'écrit électronique dans le régime légal probatoire. Malgré tout, la pratique a démontré l'échec de cette intégration face à la lourdeur des conditions du principe de l'équivalence de l'écrit papier et de l'écrit électronique. Ainsi, comme l'a écrit un auteur, l'utilité de l'écrit électronique à titre probatoire « semble inversement proportionnelle à l'ampleur des questions juridiques que sa perspective a suscité et suscite encore »50. A cet égard, on dénote une

47 Décret n° 2011-434 du 20 avril 2011 relatif à l'horodatage des courriers reçus ou expédiés par voie électronique pour la conclusion ou l'exécution d'un contrat, JO 21 Avr. 2011 n° 94

48 Définition de la norme NF Z 42-013 (archivage électronique). Ceci dit, sa définition officielle, plus complexe, est donnée par l'article 1 du décret sous le libellé « procédé d'horodatage électronique ».

49 Thierry Piette Coudol, « Fiabilité de la date et horodatage de l'article 1369-8 du Code civil », Revue Lamy Droit de l'immatériel, n° 72, 2011

50 A.Penneau, « la forme et la preuve du contrat électronique » in l'acquis communautaire, le contrat électronique Judith Rochfel, 6.59 . p 328

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grande fragilité de la preuve électronique à plusieurs points vue.

Partie 2 : Les limites de la preuve écrite du contrat

électronique

La preuve électronique doit être accueillie lorsque deux conditions sont réunies.

En premier lieu, elle doit être recevable, c'est à dire légalement admissible en tant que mode de preuve.

Ainsi, il importe à cet égard de prendre en compte le taux du litige et de distinguer selon qu'il dépasse ou non la somme de 1500 euros. A cet égard, la preuve est libre lorsque le litige n'atteint pas cette somme. Auquel cas, l'écrit n'est pas soumis à des conditions particulières de validité - même si la jurisprudence remet parfois en cause cette solution51- et doit uniquement emporter la conviction du juge.

Au contraire, la preuve écrite électronique est soumise aux conditions de l'article 1316-1 et 1316-4 du Code civil lorsque le taux du litige dépasse le seuil en question dès lors qu'un écrit est exigé aux termes de l'article 1341 du Code civil.

En second lieu, l'écrit électronique doit emporter la conviction du juge, c'est à dire, rendre vraisemblable l'existence du fait allégué. Pour les parties à un contrat électronique, cet écrit devra rendre vraisemblable l'existence du contrat ainsi que son contenu.

Comme nous l'avons précédemment évoqué, la pratique fait généralement peu de cas des exigences relatives à la recevabilité de l'écrit électronique. Ainsi il est rare que les parties aient fait usage d'un procédé de signature suffisamment fiable pour garantir l'authentification de leur écrit.

Les parties pourraient même renoncer à mettre en oeuvre un quelconque procédé de signature devant toute la complexité du système, afin d'ignorer ses contraintes et ses coûts. En outre, même lorsque les contraintes ont été respectées, on peut s'interroger sur la pleine efficacité

51 Voir par exemple C.Cass. Civ 1ère, 30 sept 2010, la Cour exige de l'e-mail qu'il soit conforme aux conditions de l'article 1316-1 et 1316-4 alors que le litige aurait pu être réglé sous un autre angle dès lors que la demande n'excédait pas 1500 euros.

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de la présomption de fiabilité attachée à la signature électronique lorsque celle-ci est conforme au décret du 30 mars 2001.

Ces propos - qui seront démontrés - font apparaître les limites tenant à l'imperfection intrinsèque de la preuve électronique (Chapitre I).

Fort heureusement pour la sécurité du commerce électronique, de nombreux remèdes peuvent être mis en oeuvre pour consolider la preuve électronique et éviter aux parties d'être déboutées pour ne pas être parvenues à respecter les exigences des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil (Chapitre II).

Chapitre 1 L'imperfection intrinsèque de la preuve
électronique

Lorsqu'il est reconnu par celui auquel on l'oppose, ou légalement tenu pour reconnu, l'acte sous seing privé a, aux termes de l'article 1322 du Code civil « entre ceux qui l'ont souscrit et entre leurs héritiers et ayants cause, la même foi que l'acte authentique ». Cependant, les articles 1323 et suivants du Code civil et 287 du Code de procédure civile permettent au défendeur de contester la preuve littérale qui lui est opposée. Ainsi, ce dernier peut désavouer son écriture ou sa signature et dénier avoir pris l'engagement allégué par le demandeur (Section 2).

A ce titre, l'écrit électronique n'échappe pas au régime général relatif à la contestation d'une preuve littérale de sorte que le défendeur peut user des moyens qui lui sont offerts pour soulever les vices entachant la perfection de la preuve électronique qui lui est opposée (Section 1)

Section 1 les vices entachant la perfection de l'écrit électronique

Le décret du 30 mars 2001 attribue une réelle autorité à la signature électronique sécurisée. Au contraire, le texte est très lacunaire sur la signature électronique simple. Cette différence emporte pour le demandeur l'obligation de prouver qu'il a mis en oeuvre une signature

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suffisamment fiable lorsque que le procédé utilisé ne correspond pas aux exigences du décret (I). Malgré tout, si l'on s'interroge sur les limites de la présomption de fiabilité attachée à la signature sécurisée, on s'aperçoit qu'elle n'est pas sans failles (II).

§1 L'imperfection de la signature électronique simple

Le commerce électronique est pratiqué d'une telle façon qu'il est rare que les parties à un contrat électronique disposent d'un écrit électronique parfait au sens des articles 1316-1 et 13164 du Code civil et ce quelle que soit la manière dont le contrat est conclu.

Tout d'abord, ce constat est redoutable pour les contrats qui sont conclus directement en ligne. En effet, les professionnels du commerce électronique ne souhaitent pas avoir recours à des prestations de tiers certificateur pour offrir à leurs co-contractants la possibilité de créer un écrit électronique conforme aux exigences légales de sécurité.

Ainsi, par exemple, les sites internet ne sont généralement pas conçus pour accueillir une signature électronique sécurisée. C'est pourquoi celle-ci est absente des contrats de consommation et des contrats pear to pear.

Quant à la signature électronique simple, la saisie des codes de carte bancaire n'est pas apte, à priori, à remplir une fonction de signature dès lors qu'elle n'établit pas avec certitude l'identité du contractant. Ce dernier peut avoir utilisé des codes ne lui appartenant pas.

De telles critiques peuvent également être faites à l'adresse des contrats conclus par échange de e-mails. En effet, la première chambre civile a rendu un arrêt le 30 septembre 2010 aux termes duquel il appartient au juge de vérifier que l'e-mail remplit bien les conditions mises par les articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil à la validité de l'écrit électronique ou de la signature électronique lorsque l'expéditeur dénie en être l'auteur.

Un tel arrêt rend pour le moins fragile la situation des parties à un contrat électronique et constitue un « frein pour le commerce en ligne » selon l'expression consacrée par un auteur52 dès lors qu'il est peu probable que l'e-mail soit apte à remplir de telles exigences.

En effet, outre les conditions de création et de conservation du courriel, ce dernier n'est pas signé en principe par un procédé sécurisé au sens de l'article 1316-4 alinéa 2 du Code civil.

52 L.Grynbaum, « Le droit de l'écrit électronique : un frein au commerce en ligne (un e-mail n'est pas un écrit électronique au sens du Code civil, selon la Cour de Cassation) », Lamy Droit de l'immatériel, 2011, n° 67, p. 33

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Cet arrêt aurait pourtant pu permettre à la Cour de cassation d'admettre l'e-mail en tant qu'écrit électronique et par hypothèse, annoncer un assouplissement des exigences en la matière.

Ceci dit il ne s'agirait pas pour autant d'en conclure l'inaptitude de l'e-mail à constituer une preuve électronique. Tout d'abord, il peut paraître exagéré d'affirmer comme le soutient une partie de la doctrine, que cet arrêt disqualifie irrémédiablement l'e-mail du statut d'écrit électronique au sens du Code civil.

D'une part, il n'est pas exclu que la jurisprudence accueille l'e-mail sous la qualification d'écrit électronique simple si l'on admet que le code d'entrée dans la messagerie électronique, secret et personnel, remplit une fonction d'identification de l'auteur des e-mails. Auquel cas, le raisonnement peut conduire à présumer que le titulaire des codes est bien l'expéditeur du message.

D'autre part, l'arrêt rendu par la cour de cassation est limité à un double point de vue. En effet, il astreint les juges à vérifier que l'e-mail remplit les conditions de qualification de l'écrit électronique seulement lorsque le défendeur nie être l'auteur du message.

Enfin, il n'empêche pas l'e-mail de faire la preuve d'un contrat électronique lorsque le taux du litige est inférieur à 1500 euros, auquel cas, la preuve est libre de sorte qu'il n'est pas nécessaire aux parties de fournir un moyen de preuve apte à répondre aux conditions de qualification de l'écrit électronique.

En outre, les parties ne sont pas épargnées par des difficultés de preuve lorsqu'elles ont conclu leur contrat en mettant en oeuvre un procédé de signature électronique sécurisé. En effet, on peut également douter de la capacité d'un tel procédé à être parfaitement fiable.

§2 L'imperfection de la signature électronique sécurisée

Outre les cas de fraude du prestataire du service de certification, de la péremption du certificat accompagnant la signature ou de sa révocation par le signataire, il faut réserver le cas où les données de signature électronique ont été subtilisées par un tiers53.

Auquel cas, le signataire de l'acte n'est pas en réalité le véritable titulaire de la signature.

53 Voir pour un exemple identique en Droit belge, Dominique Mougenot, Droit des obligations, la preuve , p. 226, Larcier 2000.

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Cette particularité démontre la différence fondamentale qui sépare la signature électronique de la signature manuscrite.

En effet, lorsqu'elle est électronique, le prestataire de service de certification n'atteste que le lien entre la signature et son titulaire, la délivrance d'un certificat ne permet pas d'assurer que cette signature a bien été utilisée par son titulaire, de sorte qu'elle identifie le titulaire et non le véritable signataire.

Par exemple, lorsque les parties mettent en oeuvre un procédé de signature cryptographique sécurisé, l'émetteur du message peut avoir subtilisé une clé privée qui ne lui appartient pas de sorte que ce message apparaîtra avoir été émis et signé par le titulaire de la clé alors qu'en réalité, il a été émis par un tiers.

Au contraire, lorsque la signature est manuscrite, elle peut avoir été reproduite frauduleusement par un tiers mais une analyse graphologique permettra de démontrer qu'elle n'a pas été apposée par la personne de son véritable titulaire.

Par conséquent, on constate bien les limites de la signature « désincarnée ». L'article 1316-4 du Code civil et le décret de 2001 la présument fiable lorsqu'elle repose notamment sur la délivrance d'un certificat qualifié, mais ce système peut s'avérer dangereux pour le titulaire des données.

Au demeurant, l'écrit électronique doit être contesté au travers d'une procédure de vérification d'écritures ouverte par le droit commun au défendeur qui conteste avoir écrit ou signé le document qui lui est opposé. Cette procédure s'applique tant lorsque les parties ont mis en oeuvre un procédé de signature électronique simple que lorsque la signature est sécurisée.

Section 2 La procédure de contestation de la preuve littérale
électronique

L'article 1324 du Code civil oblige celui qui veut contester une preuve littérale à désavouer son écriture ou sa signature. Auquel cas, lorsqu'il s'agit de contester un écrit ou une signature électronique, l'article 287 alinéa 2, introduit dans le code de procédure civile par le

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décret du 3 décembre 200254, oblige le juge à vérifier « si les conditions mises par les articles 1316-1 et 1316-2 du code civil à la validité de l'écrit ou de la signature électroniques, sont satisfaites ».

Selon certains auteurs, la procédure de vérification d'écriture, ouverte à l'égard des actes sous signatures privées qui comprennent notamment l'écrit électronique, n'est pas ouverte à un simple courriel car il ne s'agit pas d'un acte sous seing privé comme les autres55. L'arrêt rendu par la Cour de cassation le 30 septembre 2010 a contredit ce raisonnement en soumettant le courriel à la procédure de vérification d'écritures56.

Cependant il ne suffit pas au défendeur de soulever l'irrégularité de l'écrit électronique pour l'écarter. Ainsi, il lui appartient de dénier son engagement.

C'est d'ailleurs la solution qu'a consacrée la cour de cassation par l'arrêt du 30 septembre 2010, dans la mesure où elle n'a obligé les juges à vérifier ces conditions que dans la mesure où le défendeur avait nié être l'auteur de l'e-mail. Il s'agit au demeurant d'une condition indispensable au déclenchement de la procédure de vérification d'écriture.

Le défendeur doit donc dénier être l'auteur du message ou à tout le moins prétendre que le contenu de l'e-mail ne correspond pas à celui qui était le sien initialement. Il ne peut se suffire d'invoquer la simple irrecevabilité de l'écrit ne répondant pas aux conditions de qualification de l'écrit électronique.

Auquel cas, la procédure de contestation de la preuve littérale conduit à distinguer selon que l'écrit électronique est revêtu d'une signature électronique simple ou sécurisée.

Ainsi, lorsque la preuve électronique prend la forme d'un écrit électronique sécurisé, c'est au défendeur qu'il appartiendra d'établir les éléments aptes à convaincre le juge de la nécessité de renverser de cette présomption aux termes de l'article 288-1 du Code de procédure civile.

Pour ce faire, la démarche peut le conduire à s'appuyer sur une expertise technique ou encore sur un faisceau d'indices susceptibles de faire douter le juge en se référant à dire d'experts, à la consultation de techniciens ou de revues spécialisées ou enfin en obtenant des témoignages. A cet égard la doctrine met en garde le législateur contre le risque que représente l'invocation de l'aléa technologique57.

54 Décret n°2002-1436 du 3 décembre 2002, JORF, 12 déc. 2002, p. 20482

55 O.Cachard, « le désavoeu d'écritures : de la lettre missive au simple courrier électronique », Lamy n° 80, 2001.

56 Cass, Civ 1ère 30 septembre 2010, Bull. Civ. I, n° 178.

57 A.Penneau, « la forme et la preuve du contrat électronique », in L'acquis communautaire, le contrat électronique, Coll. Etudes juridiques, édition économica 2010.

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En effet, les juges étant souvent sensibles à cet argument, nombreux sont ceux qui redoutent une véritable défiance du juge vis à vis de l'écrit électronique et par conséquent une lecture contra legem du principe de l'équivalence probatoire de l'écrit électronique et de l'écrit papier. Une telle résistance pourrait conduire le législateur à renforcer la présomption de fiabilité attachée à l'écrit électronique sécurisé, pourquoi pas en lui substituant une présomption à caractère irréfragable.

Lorsque les parties ont mis en oeuvre un procédé de signature électronique sécurisé reposant sur une technologie de cryptographie asymétrique, on peut se demander si l'allégation par le défendeur de la perte ou du vol de sa clé privée peut suffire à renverser la présomption de fiabilité attachée à la signature électronique sécurisée.

A priori, il semble conforme à l'esprit de la présomption -sauf à mettre en échec l'autorité attachée à la signature sécurisée- d'obliger le titulaire de l'acte à établir les éléments aptes à rendre vraisemblable l'existence du fait qu'il allègue.

Quoi qu'il en soit, lorsque le défendeur est parvenu à convaincre le juge, on peut se demander s'il n'encourt pas pour autant une condamnation en responsabilité civile. En effet, si l'on reconnaît un devoir de confidentialité à la charge du titulaire des clés, sa négligence pourrait être considérée comme fautive de sorte qu'il pourrait être condamné à réparer le préjudice résultant pour le demandeur -débouté pour n'être pas parvenu à fournir un écrit sans faille- de la perte du procès.

D'ailleurs, une forme de réparation en nature de ce dommage pourrait avoir lieu en obligeant le détenteur de la clef négligent à exécuter la convention qu'il n'a pas cependant pas signé.58

En outre, une telle résistance des juges est d'autant plus redoutée pour l'écrit électronique

simple.

En effet, si l'article 1316-4 du Code civil ne semble pas l'écarter, ni même le décret de 2001 qui, mieux, le consacre en reconnaissant la signature électronique simple, il n'existe pas de régime propre à sa contestation. L'article 287 du Code de procédure civile se contente à cet égard de rappeler les exigences générales relatives à la recevabilité de l'écrit électronique.

De ce constat, il pourrait être déduit qu'il n'appartient pas au défendeur d'établir le

58 Cette théorie est notamment défendue par lemagistrat belge D. Mougenot, « Droit des obligations, la preuve », Larcier 2002, p. 228. Dans le même sens, P. Lecocq et B.Vanbrabant. Cette solution pourrait se concevoir en Droit français car le système probatoire belge mis en place par la loi du 9 juillet 2001 sur la signature électronique et les autorités de certification est similaire au système français.

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manque de fiabilité de la preuve électronique, au contraire, c'est au demandeur qu'il appartient d'établir de manière positive les éléments aptes à démontrer que l'écrit est revêtu d'une signature présentant des garanties de fiabilité.

Cette contrainte procédurale serait extrêmement lourde pour celui qui entend se prévaloir d'une preuve électronique voire impossible à réaliser. A cet égard, un auteur démontre qu'il n'y aurait donc pas que les preuves négatives qui seraient diaboliques59

Une autre voie pourrait alors être exploitée et consisterait à introduire une présomption de fait favorable à celui qui se prévaut de l'écrit électronique.

Deux types de présomption pourraient être employées. La première consisterait à nier l'opposition entre la signature électronique simple et la signature sécurisée en instaurant une présomption de fiabilité de l'écrit électronique, quelles que soient ses garanties de fiabilité. Il appartiendrait alors au défendeur de renverser la présomption.

L'autre, plus conforme à l'esprit de la loi du 13 mars 2000 attribuant une autorité supérieure à la signature sécurisée, imposerait au demandeur de justifier d'indices de fiabilité, à charge pour l'autre de les contredire60. Pour l'instant, la jurisprudence ne n'a pas entériné ces propositions.

Finalement, la démarche entreprise par le législateur n'a pas rencontré le succès qui était escompté. Les contraintes mises en place par la loi du 13 mars 2000 et du décret du 30 mars 2001 sont si lourdes qu'elles ne semblent pas prendre en compte les réalités pratiques du commerce électronique et fragilisent par conséquent le contrat électronique.

Malgré tout, l'apparente fébrilité de l'écrit électronique est compensée par un ensemble de remèdes auxquels les parties peuvent avoir recours pour solidifier la preuve de leur contrat.

59 J. Devèze, « Perseverare diabolicum. A propos de l'adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information par le décret n° 2002-1436 du 3 décembre 2002 », Comm.Comm. Elect. Mars 2003, étude n° 8, p. 12

60 C'ette thèse est notament défendue par Anne penneau, note préc.

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Chapitre 2 Les remèdes à l'imperfection intrinsèque de
l'écrit électronique

Il est vrai, le système probatoire français règlement et hiérarchise les modes de preuves. Ainsi les sujets de droit ne sont parfois pas totalement libres de la manière dont ils prouvent leurs droits et obligations.

Néanmoins, la loi tente ça et là d'assouplir la tâche des parties en admettant plusieurs remèdes à l'imperfection de l'écrit. Qu'il soit directs (section I) ou indirects (section II), ces remèdes tendent à libéraliser le régime probatoire français en permettant aux parties de se prévaloir d'un écrit électronique non conforme aux exigences des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil.

Section 1 : Les remèdes directs à l'imperfection de l'écrit
électronique

Tout d'abord, les articles 1347 et suivants du code civil organisent les exceptions aux règles découlant du système de preuve légale. Ainsi, la loi reconnaît tantôt aux parties la possibilité de fournir un commencement de preuve par écrit. Tantôt, elle les autorise même à fournir le moyen de preuve de leur choix sous réserve de démontrer l'impossibilité d'établir une preuve par écrit (I).

En second lieu, le régime probatoire français n'est pas d'ordre public. Ainsi, les parties peuvent souverainement se libérer des contraintes inhérentes à l'obligation de prouver littéralement par l'intermédiaire d'une convention de preuve (II)

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§1 La consolidation de l'écrit électronique imparfait par l'existence d'autres
moyens de preuve

La jurisprudence s'est efforcée d'adopter, depuis les années 1970, une conception extensive des exceptions à l'obligation de prouver littéralement consacrées au fur et à mesure par le législateur. Ce phénomène est d'ailleurs décrit par certains auteurs comme la preuve de ce que, au-delà du formalisme probatoire véhiculé par la lettre du Code civil, la conviction du juge est devenue toute puissante même en matières d'actes juridiques61.

Aussi ces exceptions sont elles utiles pour les parties à un contrat électronique dont le montant dépasse le seuil de 1500 euros à compter duquel elles sont tenues de fournir une preuve par écrit à l'appui de leur prétentions.

En premier lieu, l'article 1347 du Code civil permet aux parties de consolider une preuve écrite imparfaite en établissant un commencement de preuve par écrit. Il s'agit de « tout acte par écrit qui est émané de celui contre lequel la demande est formée, ou de celui qu'il représente, et qui rend vraisemblable le fait allégué ».

Ce texte est tout à fait transposable au cas de l'écrit électronique imparfait. En effet, il n'apparaît pas absurde, par exemple, que des parties échangent plusieurs informations par la voie postale traditionnelle après avoir conclu leur contrat par voie électronique.

Ainsi, un simple courrier envoyé par le défendeur et faisant mention du contrat serait à même de constituer un commencement de preuve par écrit. Par conséquent, il aurait pour effet de consolider l'écrit électronique imparfait et éviterait au demandeur d'être débouté au seul motif qu'il n'est pas parvenu à établir une preuve recevable du contrat qu'il a allégué.

Qui plus est, il n'apparaît pas nécessaire que le commencement de preuve par écrit soit établi sur support papier, ainsi il pourrait tout aussi bien s'agir d'un courriel faisant état d'une réclamation en rapport au contrat conclu.

En second lieu, l'article 1348 alinéa 2 du code civil autorise le demandeur à fournir une copie de l'acte original lorsque celui-ci ou le dépositaire n'a pas « conservé le titre original et présente une copie qui en est la reproduction non seulement fidèle mais aussi durable ». Cette

61 X. Lagarde, « Vérité et légitimité », et Philippe Théry, « Les finalités du droit de la preuve en Droit privé », in Droits, 1996, n° 23, p. 31 et s. et p. 41 et s. ; E. Jeuland, « Nouvelles technologies et procès civil- Rapport général pour les pays de Droit civil », 17 septembre 2007, in XIIIe congrès mondial de droit processuel, Bahia, Brésil.

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disposition est essentielle en matière d'acte électronique dans la mesure où elle peut notamment être d'un grand secours lorsque les données informatiques ont étés perdues à la suite d'opérations de transfert ou encore par suite de l'altération du matériel informatique sur lequel était stocké l'acte.

Pour autant, ce texte n'apparaît pas d'une grande utilité pour les parties à un contrat électronique dont la preuve est imparfaite. D'une part, on peut douter de la capacité de la copie à constituer une reproduction fidèle et durable de l'original tant le risque est grand que le contenu ait subi une altération lors des opérations de manipulation.

D'autre part, le texte a pour objet de remédier aux inconvénients liés à la perte de l'original en autorisant un demandeur à fournir une simple copie. Il ne s'agit pas de lui permettre de passer outre les exigences des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil dès lors qu'il détient une copie de l'original imparfait. On ne voit donc pas en réalité pourquoi on pourrait admettre qu'une copie soit recevable alors même qu'elle est la reproduction fidèle et durable d'un écrit électronique irrégulier au sens des articles 1316-1 et 1316-462.

Enfin, la question se pose de déterminer quel service l'article 1348 alinéa 1er pourrait offrir au demandeur lorsqu'il ne dispose que d'un écrit électronique imparfait. En effet, la disposition autorise le demandeur à fournir une preuve par tous moyens alors même qu'il est en principe tenu de fournir une preuve par écrit lorsqu'il n'a « pas eu la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de l'acte juridique, soit a perdu le titre qui lui servait de preuve littérale, par suite d'un cas fortuit ou d'une force majeure ».

En théorie, cette disposition est intéressante à deux égards. Dans un premier temps, l'idée d'impossibilité matérielle d'établir une preuve littérale par voie électronique ne paraît pas absurde. Le demandeur peut à ce propos se prévaloir du haut degré d'exigence de la législation en vigueur pour démontrer l'impossibilité technique, en l'état actuel des sciences, de pouvoir établir un écrit électronique conforme aux exigences légales63.

Cette théorie demeure toutefois un peu spéculative dans la mesure où sa réception par le juge tendrait à faire échec aux exigences des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil. En effet, l'impossibilité matérielle prise en compte par l'article 1348 du Code civil est ponctuelle et ne peut pas tenir à une impossibilité générale de se conformer aux exigences de la preuve par écrit.

62 Voir en comparaison l'arrêt du rendu par la Cour de Cassation le 4 décembre 2008 par lequel elle soumet la copie électronique d'un document papier aux exigences de l'article 1316-1 du Code civil. Cass.Civ 2ème, 4 déc 2008, Bull. Civ. II, n° 259, Comm. Comm. Elect. Fev 2009. n° 19. E.A Caprioli

63 A.penneau, « la forme et la preuve du contrat électronique », in L'acquis communautaire, le contrat électronique, J. Rochfeld, Coll Etudes juridiques, édition 2010.

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Cependant, on peut plus légitimement admettre que le demandeur puisse plaider la défaillance technologique lorsque par exemple, il a été impossible aux parties de mettre en oeuvre un procédé de signature électronique sécurisé à la suite d'un problème informatique.

En second lieu, l'impossibilité d'établir une preuve littérale peut se présenter sous la forme d'un empêchement de nature morale. Cette exception pourrait notamment être admise sur le fondement d'une jurisprudence de la Cour de cassation ayant considéré que l'impossibilité d'établir un écrit pouvait résulter d'un usage de ne pas signer un acte64.

D'ailleurs, cette opinion est confortée par une partie de la doctrine considérant que « cette jurisprudence pourrait être utilisée en vue d'une libération prétorienne de la signature électronique du carcan probatoire dans lequel la loi du 13 mars 2000 l'a enfermée »65.

Il s'agirait de démontrer que les acteurs du commerce électronique ont toujours fait abstraction des exigences propres à la preuve littérale de sorte que s'est forgé au fur et à mesure du temps un usage né de cette pratique de ne pas signer les actes. Cet usage serait si ancré qu'il expliquerait une impossibilité morale pour les parties de mettre en oeuvre un procédé de signature électronique fiable, et par hypothèse, justifierait une exception pour les parties à l'obligation de signer. Cependant cette démarche est très incertaine.

Tout d'abord, elle ne serait pas en parfaite adéquation avec la théorie des sources du droit selon laquelle un usage a normalement pour fonction de suppléer la loi car c'est la solution inverse qui serait consacrée, la loi devenant supplétive à l'usage créé par la pratique.66

Cela dit, la seule constatation qu'il s'agirait d'un usage contra legem ne suffirait pas à pouvoir l'écarter dès lors que d'une part, nombreux sont les cas dans lesquels notre Droit accorde une portée à un usage contraire à la loi67 et que d'autre part, le régime légal probatoire est seulement supplétif de volontés68.

En second lieu, la primauté d'un usage sur la loi est en principe très ponctuelle. En effet,

64 Cass. Civ 1ère, 18 juin 1963, Bull. Civ. I, n° 324 ; Cass. Civ 1ère, 15 avr. 1980, Bull civ. I, n° 113, p. 93.

65 A.Penneau, « Forme et preuve du contrat électronique », in l'acquis communautaire ,le contrat électronique, Judith rochfeld. coll études juridiques, économica 2010 ; Avis partagé explicitement par P-Y Gauthier et X. Linant de Bellefonds, « De l'écrit électronique et des signatures qui s'y rattachent », JCP G 2000, I, 236. Implicitement par , L. Grynbaum, obs. Sous Cass. Com., 4 Oct. 2005, Comm. Comm. Electr. mars 2006, p. 35

66 Escarra, « De la valeur de l'usage commercial », in Annales de droit commercial, 1910, p. ; M. Pedamon, « Y'a-t-il lieu de distinguer les usages et les coutumes en droit commercial, RTD com. 1959, p. 335 ; J. Bourcourechlief, « Usages commerciaux, usages professionnel, élaboration et formulation », in Dix ans de droit de l'entreprise, Libraires techniques, 1978.

67 Par exemple le mécanise de la solidarité passive entre des débiteurs dans actes de commerce.

68 C.Cass, Civ 1ère 8 Novembre 1989, Bull. Civ. I, n° 342, JCP G 1990, II, 21576, note G Virassamy, D. 1990, p. 369, note ch. Gavalda, D. 1990, somm., p. 327, obs. J. Huet

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elle ne concerne en général que certains milieux professionnels69. Or, il s'agirait dans cette hypothèse d'étendre cette primauté à tout le domaine des contrats électroniques, l'usage étant né de la pratique de l'ensemble des acteurs du commerce électronique.

Également, l'origine conventionnelle de l'usage de ne pas signer est très discutable en matière de commerce électronique de sorte qu'il est difficile de pouvoir parler d'usage au sens strict du terme.

Les usages contra legem sont généralement reconnus parce qu'il trouvent leur source dans un consensus au sein des acteurs de la profession. Or, l'existence d'un tel consensus est très douteuse entre les acteurs du commerce électronique dans la mesure où les relations nouées ne sont pas exclusivement professionnelles. L'usage de ne pas signer est plutôt commandé par la seule initiative des cybercommerçants.

Enfin, la consécration d'un tel usage ferait sortir le juge de sa fonction juridictionnelle traditionnelle, laquelle contraint le juge à appliquer la loi, à en compléter les lacunes mais lui interdit en tout état de cause de s'arroger le droit de la contredire.

En revanche tel n'est pas le cas des parties qui peuvent souverainement écarter la loi en choisissant expressément les moyens de prouver leurs droits et obligations par l'intermédiaire d'un convention de preuve.

§2 La reconnaissance de l'écrit électronique par la volonté des parties

La rigidité du système légal probatoire peu adaptée à la prise en compte des nouveaux supports de conclusion et d'exécution des contrats a fait réagir la pratique. En effet, il n'est pas rare de voir les parties tromper l'incertitude en s'accordant sur les moyens de prouver leurs droits et obligations.

C'est ainsi que, conscientes des failles qui fragilisent leurs moyens de preuve, elles stipulent une clause réputant efficace tel ou tel procédé de preuve.

Cette pratique avait été entérinée par la jurisprudence sous l'empire du régime antérieur à la loi du 13 Mars 2000. Si la Cour de Cassation avait très tôt admis la pratique des conventions

69 Cass. Civ 1ère, 15 avr. 1980, Bull civ. I, n° 113, p. 93. Dans cet arrêt, l'usage concerne le milieu des éleveurs de chevaux.

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de preuves70, elle n'avait pas pour autant admis de manière générale leur validité de principe ni déclaré expressément -c'est pourtant un pré-requis- le caractère supplétif du régime légal probatoire. Il fallu attendre que se présente au juge du Droit la célèbre affaire Crédicas71.

Ainsi, la Cour de Cassation avait du se prononcer sur deux jugements rendus dans les mêmes termes et par le même tribunal. Les faits y étaient identiques : Un établissement de crédit demandait le paiement d'une créance de remboursement qu'elle détenait contre l'un de ses clients qui avait contracté un achat à l'aide de sa carte de crédit. L'établissement fournissait notamment à l'appui de sa demande plusieurs écritures électroniques établissant l'existence de ce paiement, et par hypothèse, celle de sa créance de remboursement envers le client.

Le tribunal ayant rejeté le moyen de preuve en énonçant que « la simple production de documents dactylographié et [...] d'une machine dont elle a la libre et entière disposition, est inopérante à constituer la preuve de l'engagement de rembourser... », la Cour de Cassation a cassé ces décisions au visa des articles 1341 et 1134 du Code Civil en considérant « qu'en statuant ainsi, alors que l'établissement de crédit invoquait l'existence, dans le contrat, d'une clause déterminant le procédé de preuve de l'ordre de paiement et que, pour les droits dont les parties ont la libre disposition, ces conventions relatives à la preuve sont licites, le Tribunal a violé les textes susvisés ; »

Le juge du Droit donnait ainsi raison à la doctrine moderne qui considérait -à la différence de la doctrine classique incarnée par Ihering- que lorsque les intérêts que poursuivaient les parties étaient purement privés -ce qui rejoint la notion de disponibilité des droits-, on devait leur reconnaître une liberté totale dans la preuve de leurs droits, l'article 1341 étant parfaitement optionnel72.

Qui plus est, la jurisprudence venait d'admettre que les conventions de preuve emportaient deux grandes conséquences. En premier lieu, ces conventions restreignaient la liberté des parties en admettant limitativement le ou les moyens de prouver leurs droits et obligations. Ainsi, elles ne pouvaient produire à l'appui de leurs demande un autre procédé de preuve et s'interdisaient par la même occasion à contester ce moyen de preuve.

En second lieu, ces conventions privaient le juge du pouvoir de dénier au procédé de preuve choisi la valeur probante que les parties avaient voulu lui conférer.

70 Voir par éxemple Cass.Civ, 23 novembre 1891 ; Cass.Civ, 20 Mars 1896

71 Voir note précitée 46

72 Planiol et Ripert, Traité pratique de droit civil, t.VII, par Gabolde, n° 1422 et 1428 et s. ; J.Guestin, Traité de droit civil, t. 1, 2e éd., 1983, par J.Gesthin et G.Goubeaux, n° 584, p. 491.

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L'effet de ces conventions devenait pour le moins radical et garantissait aux parties l'efficacité de leurs moyens de preuve.

La jurisprudence n'ayant pas limité -outre la condition de disponibilité des droits- le champ d'application de la règle qu'elle venait de poser, il y a tout lieu de penser qu'elle s'applique au-delà du paiement électronique, à la preuve du contrat électronique. Ainsi, il est loisible aux parties de décider que les e-mails échangés pourront être invoqués sans pouvoir être contestés.

Néanmoins, si la convention est établie électroniquement et par hypothèse, contenue dans l'instrumentum constatant le contrat électronique- les conditions générales de ventes mises en ligne par exemple-, il y a tout lieu de penser qu'elle sera inutile.

En effet, la convention de preuve ne peut être affranchie de l'article 1341 du Code civil et devra donc être prouvée dans les conditions légales applicables au contrat auquel elle se rapporte.

Si son objet est d'admettre un instrumentum électronique ne répondant pas aux conditions des articles 1341, 1316-1 et 1316-4 du Code civil, elle doit être contenue dans un autre instrumentum satisfaisant aux conditions légales, à défaut, la preuve de la convention est irrecevable et ne peut dès lors produire effet.

Ainsi, lorsque la demande dépasse 1500 euros et qu'elle est faite à l'encontre d'un particulier, la convention de preuve ne sera efficace que si elle est établie sur un support papier comportant une signature manuscrite. En dehors de ces cas, la preuve étant libre, elle peut être établie électroniquement.

Au surplus, depuis que la loi du 13 mars 2000 a introduit l'écrit électronique dans le régime légal probatoire en consacrant d'une part le principe d'équivalence de l'écrit électronique et de l'écrit papier et en déterminant d'autre part les conditions de cette équivalence, on peut s'interroger sur la pérennité de la jurisprudence Crédicas.

En effet, le législateur n'a réglementé que les conventions de preuve -sans reconnaître leur validité de principe- ayant pour objet de régler un conflit de preuves et on peut se demander si le silence sur les autres conventions doit s'interpréter comme un rejet de la jurisprudence Crédicas.

A priori, on peut penser le contraire. Plusieurs fondements peuvent démontrer la pérennité de cette solution.

Tout d'abord, il appartient à la jurisprudence de combler les lacunes de la loi, c'est à cette

43

dernière qu'il appartient de révoquer les jurisprudences dont elle ne se satisfait pas.73 On ne peut raisonnablement déduire de telles révocations du silence du législateur et en l'espèce le rejet de la jurisprudence Crédicas en raison du silence de la loi du 13 mars 2000.

En second lieu, de telles conventions de preuve peuvent être admises sur le fondement du principe de la liberté contractuelle. Dès lors que le législateur a reconnu aux parties le pouvoir de régler leurs conflits de preuve en vertu de l'article 1316-2 du Code civil, ne leur a t-il pas plus largement reconnu le pouvoir d'élaborer leur propre régime probatoire en dérogeant au régime légal ?

Cependant, il importe de prendre en compte les dispositions protectrices du consommateur dont l'objet est d'éviter le détournement des conventions de preuve. Ainsi, l'article

R 132 12° du Code de la consommation74 présume comme abusives et de manière irréfragable les clauses qui pour objet ou effet d'imposer au non-professionnel ou au consommateur la charge de la preuve, qui, en vertu du droit applicable, devrait incomber normalement au professionnel.

Or, dans bien des cas, les cyber-commerçants insèrent dans leurs conditions générales des stipulations de preuve qui prévoient que seules seront opposables entre les parties les données unilatéralement conservées par le professionnel.

Ces clauses reportent indiscutablement sur les épaules du consommateur la charge d'une preuve que le Droit commun ne lui imposerait pas : elles l'obligent à démontrer la fausseté de la preuve rapportée par le professionnel et doivent dont être réputées non écrites.

Enfin, la loi tend dans d'autres cas à accueillir indirectement un écrit électronique imparfait. En effet, d'une part, rien ne contraint les parties à soulever les vices entachant la régularité de la preuve de leur contrat. D'autre part, le Code civil et le Code de commerce ont consacré dans certaines conditions le principe de liberté de la preuve, de sorte que les parties ne sont pas tenues de fournir un acte électronique répondant aux conditions de l'article 1316-1 et 1316-4 du Code civil.

73 Jean-Etienne-Marie Portalis, discours préliminaire sur le projet de code civil présenté le 1er pluviose de l'an IX

74 Décret n° 2009-302 du 18 mars 2009, JORF 20 mars 2009, p. 5030

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Section 2 : Les remèdes indirects à l'imperfection de l'écrit
électronique

Le code civil oblige en son article 1323 la personne à qui on oppose un acte sous seing privé à avouer ou désavouer son écriture ou sa signature.

Par conséquent, rien n'empêche le défendeur de ne pas contester son écriture ou sa signature. Auquel cas, le juge n'est pas tenu de soulever d'office l'irrégularité de l'écrit électronique. Il n'est obligé d'ordonner une vérification d'écritures que lorsque le défendeur a dénié son engagement75.

Qui plus est, fort heureusement pour le commerce électronique, l'ultra-majorité des transactions conclues sont de faible montant de sorte que les parties seront libres de la manière dont elles veulent prouver leurs droits76.

D'ailleurs, lorsque le litige dépasse le seuil à compter duquel la preuve doit être faite par écrit, cette contrainte ne pèse sur le demandeur que lorsque sa demande en justice est exercée à l'encontre d'une personne qui n'est pas commerçante.

Dans le cas contraire, l'article L 110-3 du Code de commerce autorise le demandeur à se prévaloir du mode de preuve de son choix. Auquel cas, le demandeur peut se prévaloir d'un mail non signé ou, en tout cas, d'un écrit électronique ne mettant pas en oeuvre un procédé de signature électronique fiable. Sa seule obligation est de fournir au juge une preuve qui soit à même d'emporter sa conviction, c'est à dire qu'elle doit rendre vraisemblable l'existence du contrat allégué.

75 Ceci dit, la jurisprudence n'oblige pas toujours le juge à procéder à cette vérification d'écritures. Voir notamment un arrêt resté isolé (non publié) mais que certains interprètent comme démontrant que la procédure n'est pas obligatoire : C.Cass. Civ 1ère, 27 juin 2006, pourvoi n° 05-15-576, E-A. Caproli, « vérification d'écritures en matière d'écrit électronique, Comm. Comm. Elect. Octobre 2006, n°10 , p 149.

76 La preuve est libre pour les litiges dont le montant n'atteint pas 1500 euros selon l'article 1341 du Code civil et l'article 1 du décret n°80-533 du 15 juillet 1980

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CONCLUSION

En conclusion, nous avons pu démontrer que la réforme du droit de la preuve adoptée par le législateur français était nécessaire à l'efficacité du commerce électronique.

En effet, le régime probatoire français caractérisé par la réglementation et la hiérarchisation des modes de preuves, exige des parties qu'elles prouvent leurs droits au moyen d'un écrit lorsque leur demande, exercée à l'encontre d'un non commerçant, excède le montant de 1500 euros.

Tel qu'il avait été conçu par le législateur et la jurisprudence, l'écrit s'entendait d'une preuve manuscrite de sorte qu'il était indispensable à l'efficacité du contrat électronique d'admettre l'équivalence entre l'écrit papier et l'écrit dématérialisé.

Malgré tout, le système mis en place par la loi du 13 mars 2000 et le décret du 30 mars 2001 apparaît éminemment complexe. Une analyse approfondie de ces textes nous a permis de comprendre que rares sont les contrats électroniques qui sont conclus dans des conditions aptes à procurer aux parties un véritable écrit électronique au sens des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil.

Ce constat est d'ailleurs partagé par la commission européenne qui dénonce dans un rapport77 sur les effets de la directive du 13 décembre 199978 établi en 2006, l'échec de la signature électronique. A cet égard, la commission évoque plusieurs raisons en mettant notamment en évidence la complexité du système à clé publique et du recours au tiers de confiance, ainsi que la lourdeur du coût à supporter pour se doter d'un procédé de signature électronique sécurisé.

Un auteur évoque à cet égard un véritable « échec de l'écrit électronique »79. Selon lui, il est aujourd'hui nécessaire d'assurer un assouplissement des contraintes qui pèsent sur l'écrit électronique notamment pour la pérennité du commerce électronique.

Cette libéralisation est d'autant plus attendue que la jurisprudence récente relative à l'e-

77 Rapport du 15 mars 2006 de la commission au Parlement européen et au Conseil sur la mise en oeuvre de la directive 1999/93/CE sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques, COM (2006) 120 final, « Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, Comité économique et social européen et au Comité des régions », non publié au JOUE.

78 Directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques, JOCE n° L 13, 19 janv. 2000, p. 12

79 L.Grynbaum, « Le droit de l'écrit électronique : un frein au commerce en ligne (un e-mail n'est pas un écrit électronique au sens du Code civil, selon la Cour de Cassation) », Lamy Droit de l'immatériel, 2011, n° 67, p. 33

mail ne semble pas y être favorable80. Il ne fait aucun doute que cette question constitue un véritable enjeu pour la promotion de l'économie numérique.

Le défi est de taille, l'objectif est d'assurer la libéralisation des contraintes propres à l'écrit électronique tout en garantissant la sécurité du commerce électronique.

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80 Cass. Civ 1ère, 30 septembre 2010, Bull. Civ. I, n° 178, note précitée.

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-Cass, Civ 1ère 30 septembre 2010, Bull. Civ. I, n° 178. note L.Grynbaum, « Le droit de l'écrit électronique : un frein au commerce en ligne (un e-mail n'est pas un écrit électronique au sens du Code civil, selon la Cour de Cassation) », Lamy Droit de l'immatériel, 2011, n° 67, p. 33.






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