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Interactions et ancrage territorial des industries créatives: le cas de la Belle-de-Mai à  Marseille

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par hélène sEVERIN
Université Aix-Marseille - Master 2 géographie du développement 2015
  

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c) De la proximité organisationnelle à la proximité organisée

La notion de proximité organisationnelle est souvent traitée de façon très large. Les notions qui reviennent néanmoins fréquemment dans la littérature sont « espace », « interactions », « organisations ». La notion de proximité organisée fait référence au caractère agencé des activités humaines(et non à l'appartenance à une organisation en particulier).

Selon KIRAT et LUNG (1995), la proximité organisationnelle « [...] lie les agents participant à une activité finalisée dans le cadre d'une structure particulière. [...] [Elle] se déploie à l'intérieur des organisations - firmes, établissements, etc.- et, le cas échéant, entre organisations liées par un rapport de dépendance ou d'interdépendance économique ou financière - entre sociétés membres d'un groupe industriel ou financier, au sein d'un réseau, etc. - ». La proximité organisationnelle a donc pour seul but de lié les agents : elle ne peut être subit (elle est recherchée). Elle diffère de la proximité géographique de par sa distance qui devient sociale et non plus métrique. Par proximité sociale on entend des concordances sur les plans cognitifs et matériels(sexe, âge, santé, etc.). Pour qu'il y ait proximité organisationnelle, il faut que les acteurs soient similaires socialement. Mais une faible distance sociale ne suffit pas : ilfaut que les acteurs se coordonnent cognitivement et politiquement. Cela passe par une organisation autour de règles et de routines au sein d'une localisation.

D'un point de vue cognitif, la coordination permet la réduction de l'incertitude et la sécurisation des anticipations face aux décisions des acteurs les uns par rapport aux autres. Elle passe par des règles mécaniques et automatiques.

D'un point de vue politique, l'organisation ne présente pas deux acteurs sans les lier mais « deux partenaires qui doivent faire des choses différentes et dont les rôles et les statuts sont justement fixés par une règle établie, un usage social que les gens suivent » (DESCOMBES, 1996, p. 297). De cette façon, chaque acteur a une fonction qui lui est attribué de manière à ce que les acteurs soient complémentaires. Mais même les rôles sont fixés, une organisation doit bien évidemment avoir une constitution juridique qui renvoie au but de cette même organisation et surtout, qui exprime les relations de pouvoir et d'autorité. (BAZZOLI et DUTRAIVE, 2002). Cette organisation repose ainsi sur des règles externes (qui fondent l'existence de l'organisation) et internes (qui organise l'exercice de pouvoir).

La proximité organisationnelle ne peut donc pas seulement être associéeà une dimension cognitive qui renvoie au partage de représentations, de valeurs, de savoirs, mais doit également être régularisée par une dimension politique qui attribue des rôles aux acteurs et permet ainsi une coordination et un apaisement des conflits.

Une autre approche à la proximité organisationnelle peut être faite. C'est notamment le cas de l'analyse de BOSCHMA (2004). Selon lui, la proximité organisationnelle implique à la fois de l'intensité et de l'autonomie. Il faut donc exclure la proximité cognitive, bien qu'elle soit bénéfique à l'apprentissage et à l'innovation. Ce risque s'explique dans le fait que la création de connaissances va de pair avec l'incertitude et l'opportunisme. Il faudrait donc instaurer des mécanismes de contrôles. La proximité institutionnelle, par exemple, permet de répondre à ces problèmes. On ne parle alors plus de proximité organisationnelle mais de proximité organisée. Néanmoins, la proximité organisationnelle, si trop importante, peut nuire à l'innovation et à l'apprentissage.

On peut voir ici tout le paroxysme de ce paradigme. En effet, la proximité cognitive peut permettre la proximité organisée, mais cela doit passer par de la proximité institutionnelle. Néanmoins, si la proximité institutionnelle induit trop de restriction à l'organisation, celle-ci est alors dépourvue de tout pouvoir d'apprentissage de connaissances et d'innovations par rapport aux organisations extérieures. Finalement, la proximité organisée devrait être autonome, mais avec une limite d'ouverte sur l'extérieur. D'après BOSCHMA (2004), les réseauxne sont pasdes mécanismes qui coordonnent les transactions, mais on peut les voir comme « une sorte de véhicule permettant le transfert et l'échange d'information et de connaissances dans un monde plein d'incertitudes. ». Ce principe peut notamment s'expliquer par des échanges qui peuvent devenir spécifiques, mais aussi par des liens trop forts qui limitent l'accès aux ressources nouvelles, etc. Une proximité organisationnelle excessive s'accompagne d'un manque de souplesse, alors que si elle est trop faible, on a un manque certain de contrôle. A contrario, une organisation plus souple permet un accès certain aux apprentissages novateurs puisque plus large. Elle permet aussi la coordination des interactionset la communication par une autorité centrale.

Finalement, la proximité organisationnelle est nécessaire à la création de la connaissance par la maitrise de l'incertitude et de l'opportunisme.

La réalisation d'une proximité organisationnelle par le rapport cognitif au sein du réseau est possible. Elle émane d'un système où maitrise et souplesse vont de paire.

Enfin, dans une troisième approche, BEURET (2012), TORRE (2010) et RALLET (2002 et 2009) voit l'organisation comme favorable aux interactions. Ils tentent de mesurer la capacité d'une organisation à faire interagir ses membres. Il ressort ainsi deux principes :

1. Le fait d'appartenir à une organisation se traduit par l'existence d'interaction entre ces membres. En effet, par définition, « deux membres d'une organisation sont proches l'un de l'autre parce qu'ils interagissent, et que leurs interactions sont facilitées par les règles ou routines de comportement (explicites ou tacites) qu'ils suivent. » (RALLET, TORRE, 2004). La coopération sera donc plus facile entre personnes d'une même entreprise ou d'un même réseau d'innovation.

2. Il existe une « logique de similitude » au sein d'une même entreprise. En effet, les personnes doivent y partager un même système de représentations - ou ensemble de croyances - et les mêmes savoirs. Par exemple, des chercheurs qui font partie d'une même communauté scientifique auront des facilités à communiquer car ils ont le même langage.

Ces deux logiques sont donc complémentaires, mais elles sont aussi substituables.

Si l'organisation n'est pas dirigée par un caractère institutionnelle (par définition ce n'est donc plus vraiment une organisation mais plutôt une communauté informelle), c'est-à-direqu'elle est dirigée par un certainnombre de règles explicites fortes, cela peut entrainer une faible coopération entre les acteurs. C'est alors que la proximité cognitive entre en jeu : par la cohésion comportementale, la convergence des représentations, la proximité organisationnelle peut alors exister.

Finalement, la proximité organisationnelle est dépendante d'autres proximités. La proximité cognitive, par exemple, favorise les interactions entre les membres d'un réseau, et peu aboutir à une proximité organisationnelle. La proximité institutionnelle quant à elle, peut permettre de limiter les interactions afin d'éviter, dans certains cas, le surplus d'information ou les conflits d'intérêt. Dans le cas de la proximité cognitive, on entre dans une certaine logique d'appartenance. Cette logique désigne « le fait que deux ou plusieurs acteurs appartiennent à un même graphe de relations, ou encore à un même réseau, que leur relation soit direct ou intermédié.» (BEURET, TORRE, 2001). La coopération est facilitée par exemple entre chercheurs et ingénieurs qui appartiennent à une même entreprise, à un même consortium technologique ou à un même réseau d'innovation. Mais des similitudes peuvent aussi être positives. Par exemple, les normes sociales, le langage, participent aux interactions entre plusieurs acteurs. Plus les références culturelles de deux personnes sont correspondantes, plus elles auront des possibilités de cohésion.

Mais l'appartenance et la connectivité ne suffisent pas. Il faut de l'action humaine ! Les potentiels des proximités sont neutres par définition. Ce sont les actions et les perceptions qui vont les déclencher et leur donner un penchant positif ou négatif.

La proximité organisationnelle est donc un potentiel aux interactions entre les entreprises (BEURET, TORRE, 2004). Puisqu'elle constitue un potentiel, elle doit être activée ou mobilisée. Lorsqu'elle est activée, les liens qui se tissent entre les acteurs sont des liens en dehors de la proximité géographique. Les deux peuvent évidemment s'ajouter, mais elles ne sont pas immuables. Une proximité organisationnelle doit être dirigéepar un caractère institutionnel et devient ainsi organisée. Les proximités organisées sont en constante construction et déconstruction, au gré des dynamiques qui fondent les relations entre acteurs. Ces mouvements sont ainsi fondés sur les logiques d'appartenance et de similitude. Les relations changeantes permettent un changement de configuration des regroupements d'acteurs et de leurs interactions.

Finalement, pour comprendre d'une manière plus approfondie comment fonctionne un système productif local, il faut en étudier les proximités. En effet, la proximité stimule les interactions (BOSCHMA, 2004) et donc stimule l'innovation. Ainsi, en théorie, le cluster est forcement rendu possible par la proximité. Dans le cas d'une Fricheculturelle, les proximités géographique et institutionnelle entre les acteurs sont importantes. Cela permet à chacun de partager le lieu (que ce soit des associations, des entreprises, etc.). S'il n'y avait pas d'institutionnalisation par le caractère politique de la chose, il n'y aurait sans doute pas de durabilité dans le projet. De plus, une Friche peut tout à fait devenir, par extension, un cluster où entreprises et associations travailleraient ensemble dans un principe de concurrence/collaboration autour de projets communs. En fin de compte, la proximité est importante pour créer des liens, rendre durable un système et lui permettre d'innover. Mais il faut également faire attention à ce que la proximité ne soit pas trop importante sinon l'apprentissage n'est pas rendu possible. En effet, si on se trouve en présence d'un regroupement d'entreprises de même type, avec les mêmes connaissances, le même savoir-faire, les mêmes technologies, alors l'apport de connaissances est impossible et les entreprises ne peuvent innover : elles sont obligées d'aller chercher cette nouvelle connaissance ailleurs.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote