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La problématique du dédoublement fonctionnel du juge de paix et son impact sur la bonne administration de la Justice

( Télécharger le fichier original )
par Elysée AWAZI BIN SHABANI
Université de Goma - Graduat 2009
  

Disponible en mode multipage

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EPIGRAPHIE

Ce n'est pas pour une bonne action, c'est pour une mauvaise, que les magistrats sont à redouter.

ROMAINS 13 :3

DEDICACE

Pour un Etat de Droit,

Pour une justice équitable et impartiale,

A tous ceux qui aiment la science,

Amenant leur pierre d'édification pour la RDC.

AWAZI BIN SHABANI Elysée.

REMERCIEMENTS

La réalisation de ce travail se solde à la fin du premier cycle de nos études universitaires à la faculté de Droit.

Nos remords se penchent à exprimer le sentiment de reconnaissance et de gratitude à tous ceux qui ont contribué à la réalisation de ce travail, car il est la résultante d'une conjugaison d'efforts.

Merci au Seigneur notre Dieu, le maître de temps et de circonstance, qui a permis à ce travail ainsi que son auteur de voir le jour.

Nous remercions l'assistant Liévin LUNGENYI qui, d'avec les multiples occupations qu'il a, a consenti d'assumer une tâche responsable dans la direction de ce travail.

Nous adressons notre sentiment de gratitude et de reconnaissance au corps académique de l'UNIGOM, plus précisément la faculté de Droit ; trouvant ainsi leur expression dans ce travail suite à la formation que nous avons bénéficiée pendant les trois années dans cette Université ; car nous serons devenu l'idéal, auquel nous attend de nous la société.

A mes parents, SHABANI BIN SHABANI,

SHAMBUA AWAZI et LUZINGA,

Dont les valeurs, l'enthousiasme et la patience,

Ont permis à ce travail de voir le jour ;

A ECKO SIERRA et maître ZACHARIE N'TUMBA,

Dont le goût infatigable pour la recherche m'a fortement aidée dans les moments difficiles ;

A la famille SINGIRA ALI ;

A tous les SHABANI et alliés

Compagnons de lutte, amoureux du savoir : Maisha Chimanuka, Serge Nyakadekere, Thierry, Muhindo, Sabalya René, Trésor Lukusa, Kitoko Rays, CMG Toty, Eric Tshamala, Nephtali Mukendi, ainsi qu'à tous les nôtres ;

Trouvent ici notre gratitude.

AWAZI BIN SHABANI Elysée.

SIGLES ET ABREVIATIONS

AR : Arreté Royal.

CF : Code de la Famille.

CNS : Conférence Nationale Souveraine.

COCJ : Code d'Organisation et Compétence Judiciaire.

CSJ : Cour Suprême de Justice.

L'shi : Lubumbashi.

MP : Ministère public.

MP: Ministère Public.

O-L : Ordonnance Loi.

OMP : Officier du Ministère Public.

OP. CIT : Operato Citato.

OPJ: Officier de la Police Judiciaire.

PV: Procès Verbal.

RDC : République Démocratique du Congo.

RMP : Registre du Ministère Public.

TGI : Tribunal de Grande Instance.

Tripaix : Tribunal de paix.

UNIGOM : Université de Goma.

0. INTRODUCTION

01. PROBLEMATIQUE.

Le juge de paix remplit en même temps la fonction du Ministère public et la fonction du juge, il a donc un caractère hybride de fonction dit de double casquette. C'est ce qu'on appelle le dédoublement fonctionnel. Le juge de paix statue seul assisté de son greffier dans toutes les affaires tant pénales que civiles. Il est le seul dans la phase inquisitoriale dite pré juridictionnelle, étape dans laquelle il revêt la casquette du MP afin de procéder aux enquêtes préliminaires ; il a un pouvoir discrétionnaire dans cette phase en accomplissant toutes les attributions qui reviennent au MP. Au besoin il se fait accompagner de la force publique pour rechercher le suspect.

Après avoir enquêté et constaté les faits, il procède ainsi à l'instruction préliminaire. A cet effet, lorsque le juge de paix, MP pour qu'il statue cette fois-ci en qualité du juge en portant une autre casquette.

Cependant, une autre étude à laquelle nous voulons faire allusion, c'est celui de l'administration de la justice au tripaix qui est étouffée. Etant donné que la juge de paix est un juge de proximité dans le but de rapprocher la justice de justiciable, il est confronté aux coutumes locales auxquelles il doit dire le droit aux cas échéant concurremment avec les juges assesseurs choisies parmi les notables afin d'appliquer la coutume conformément aux lois de la République et aux bonnes moeurs.

L'application du droit coutumier dans une juridiction du droit écrit suscite un soit disant conflit de compétence positif opposant le juge de paix aux chefs coutumiers de la juridiction ; alors que les textes régissant les tribunaux coutumiers confèrent à ces chefs ce pouvoir de juger par manque d'installation d'un tribunal de paix sur l'espace territorial en vue d'éviter le vide judiciaire. Mais dès lors qu'il y a installation d'un tribunal de paix sur l'espace territorial, ces tribunaux coutumiers doivent cesser de fonctionner purement et simplement.

La pratique nous prouve le contraire, le tribunal de paix installé, les tribunaux coutumiers continuent à fonctionner normalement en indexant le juge paix de s'immiscer dans les pouvoirs qui ne sont pas les siens en jugeant les affaires coutumières. Ceci dit, le juge de paix connaît un étouffement de pouvoir épanouir ses prérogatives sur tout son ressort du fait que les chefs coutumiers se faisant juges continuent à trancher les différends opposant les citoyens de leurs entités, voire même les condamner.

Ø Quels sont les avantages et les inconvénients de ce dédoublement fonctionnel ?

Ø Quelle garantie de bonne administration de la justice présente le juge de paix en portant ces deux casquettes ?

Ø Quels sont les pouvoirs reconnus au juge de paix dans son ressort juridictionnel en dépit de tout juge coutumier d'en temps ?

Ø Comment mettre fin à ce problème qui corrobore le conflit de compétence positif entre le juge de paix et les juges coutumiers ?

02 HYPOTHESES.

L'hypothèse est une réponse dont la recherche a pour but de vérifier le bien fondé ou le mal fondé de la question que l'on se pose. Elle est donc une supposition que l'on se fait d'une situation possible ou non et dont on tire une conséquence logique1(*). Cela étant, l'analyse se propose de mettre en oeuvre le pragmatisme des textes légaux en vigueur en vue d'éclairer la religion de tous au sujet des textes, des règles protectrices des droits de la victime ou de l'inculpé. Le dédoublement fonctionnel du juge de paix est d'importance considérable du point de vue pouvoir qui lui est attribué dans la mesure où le pouvoir parait exorbitant. Nous suggérons dans la mesure du possible que le juge enquêteur, instructeur, ne soit pas le même qui conduira le procès pour que le prévenu bénéficie d'un procès équitable, ses droits de défense garantis en se basant su la présomption d'innocence qui est un principe sacro saint. Il faut rendre la phase pré juridictionnelle à son procureur naturel qui l'assumera en tant que garant de l'action publique dans la limite de la seule casquette et le juge de paix aussi la sienne en vue de garantir une bonne justice de paix, et ce en toute indépendance.

S'agissant du juge coutumier qui, jadis le pouvoir était sacré doit disparaître purement et simplement de son rôle de juge et garder son rôle de l'exécutif, restant en collaboration avec le juge de paix et que ce dernier s'épanouisse sur tout son ressort juridictionnel. Qu'il soit admis au chef coutumier dans une certaine mesure l'arbitrage à condition de la réunion de tous ses éléments. Tout tribunal coutumier, qu'il soit au chef lieu du territoire ou de collectivité et secteur puisse disparaître afin d'honorer le texte qui a prévu dans ses dispositions l'installation effective du tripaix qui a dans ses compétences toutes les prérogatives des tribunaux coutumiers.

03. CHOIX ET INTERET DU SUJET.

Soucieux de voir l'effectivité de ces textes légaux en la matière, nous avons opté le choix de notre sujet sur « La problématique du dédoublement fonctionnel du juge de paix et son impact sur la bonne administration de la justice ». C'est lors de notre passage dans un tribunal de paix où nous avions effectué notre stage professionnel qu'avons constaté la manière dont la justice fonctionne au tripaix par influence du pouvoir prépondérant de son juge par le dédoublement fonctionnel ; raison pour laquelle nous voulons en relever le défi et en envisager les pistes de solution. Sur le plan scientifique, nous voulons interpeller les intellectuels ayant achevé les études et ceux qui continuent les études à pouvoir obtempérer l'esprit du législateur dans les textes de loi, au besoin procéder à l'équité et rester dans cette dynamique sans se fier de son pouvoir personnel car le pouvoir absolu corrompt absolument le disait MONTESQUIEU. Le droit est une science d'égalité et de légalité, redorer sa qualité ainsi que sa raison d'être nécessite l'éthique de ses animateurs.

Par rapport à la société tout entière, nous l'informons le rôle premier du juge de paix de conciliateur, de conseiller des justiciables ; le juge de paix fait office d'édification d'une église au milieu du village puis de répression qui est son second rôle.

04. METHODE ET TECHNIQUE UTILISEES.

Le travail scientifique nécessite la prise en compte des méthodes, techniques de recherche et collecte des données le guidant en une bonne fin. La méthode étant une marche rationnelle de l'esprit vers la vérité ; ainsi pour la réalisation de ce travail, nous avons utilisé :

a. Méthodes ; premièrement c'est la méthode juridique, consistant à interpréter l'économie générale de la loi, la position jurisprudentielle et doctrinale dans l'interprétation de la loi. Il y a aussi la méthode exégétique consistant au recours du texte en vue d'établir son sens à travers son esprit et sa lettre ; c'est-à-dire de dégager les textes en tenant compte de l'intention du législateur, chercher sa volonté. Enfin c'est la méthode sociologique qui consiste à établir le texte grâce au contexte sociologique dans le quel il est né et les réalités sociales de son application, suivie de la méthode historique qui consiste à voir l'évolution du texte dans le temps et dans l'espace.

b. Les techniques: la première c'est la technique d'observation qui consiste à regarder un événement avec l'attention afin d'en tirer connaissance. Elle nous a permis d'analyser et de prouver la pratique de la mise en oeuvre du dédoublement fonctionnel du juge de paix. La technique d'interview, étant une technique d'investigation en situation d'interaction essentiellement verbale, mettant en contact deux personnes poursuivant un objectif préalablement fixé ; cette technique nous a permis à entrer en contact avec certains juges et avocats sur les questions en la matière. Enfin c'est la technique documentaire consistant à la lecture de certains ouvrages et codes et lois de la RDC.

05. DELIMITATION DU SUJET

Ce sujet sera délimité dans le temps et dans l'espace en vue de démontrer l'apparition du juge de paix sur la scène juridique et sa rétention dans le système juridique actuel. Dans l'espace nous toucherons sa création précisément en France, puis en Belgique par qui, suite à la colonisation, le Congo a également connu la création d'un juge de paix. Dans le temps, nous donnerons la date de la création du juge de paix, son évolution dans la justice, et pour enfin sa visibilité dans la justice tout en exhibant ses rôles actuels par rapport aux rôles d'en temps.

06. DIFFICULTES RENCONTREES.

Nous nous sommes heurté à des multiples difficultés rendant difficile la réalisation de notre travail; notamment par le manque d'un tribunal de paix sur notre ville de Goma où nous pouvions repérer certaines questions d'ordre juridique et les confronter à la pratique de la place, il y a aussi les conditions socio économiques, la conjoncture économico financière actuellement mondialisée ont eu des répercussions néfastes pour la réalisation du travail, raison pour laquelle nous prions à nos lecteurs de ne pas nous tenir rigueur sur certaines imperfections qu'ils constateraient tout au long de la lecture.

07. SUBDIVISION DU TRAVAIL.

Le travail porte essentiellement trois chapitres hormis l'introduction et la conclusion. Le premier chapitre parle aux généralités sur le juge de paix, où nous aurons à parler sur la procédure, compétence et organisation du tribunal de paix. Le second chapitre parle des actes du juge de paix dans la phase pré juridictionnelle où nous traiterons les matières relatives à la compétence du MP. Enfin c'est le troisième chapitre qui parlera de la culture et action du juge de paix dans la phase judiciaire où nous traiterons évidemment le conflit de compétence.

CHAP I : GENERALITES SUR LE JUGE DE PAIX

Section 1 : Historique du juge de paix

Il faut se dire que l'histoire de tribunaux de paix est vielle de quelques siècles. Pour ne prendre que l'exemple de la France d'abord, ces tribunaux ont été institués par la loi des 16 et 24 Août 1790 soit 2 siècles avant ceux du Congo.

En cette année-là, la France était principalement rurale comme le Congo aujourd'hui. C'est pour cette raison que la campagne avait été le cadre privilégié de cette nouvelle institution tel que cela ressort de l'article premier de cette loi :

« Le canton et le juge de paix naissent en même temps et vont de plus en plus se lier et se souder, correspondant à la nécessité d'une justice rapprochée du justiciable, prompte, gratuite, unifiée.»

L'objectif clairement avoué est d'offrir aux justiciables, surtout de la campagne une justice prompte, facile et pour dire clairement les choses, une justice simple et domestique n'exigeant ni procédure ruineuse ni l'application des formules compliquées, mais le bon sens. Le juge cantonal, juge de paix, non juriste, élu au départ cessa de l'être pour être nommé.

Mais cette nouvelle magistrature venait-elle à peine de commencer à fonctionner, écrit Dominique FRONIER, que des plaintes très nombreuses s'élevèrent contre les juges de paix : « on leur reprochait surtout d'ignorer la loi, de ne pas comprendre l'esprit de leur institution et d'user vis- à- vis des plaideurs de plus d'autorité que de bienveillance ».2(*)

Deux siècles après, ces critiques en plus sont d'actualité au Congo. Cette institution du juge de paix en France, malgré les améliorations qu'elle a connues, a fini à être abrogée par le législateur de 1958. Il semble que cette suppression n'est pas à considérer comme une sanction mais comme un réajustement des institutions par rapport aux changements profonds de la société française.3(*) En effet, la France industrialisée d'aujourd'hui n'a plus rien de commun avec celle de l'époque de la Révolution, période au cours de laquelle est née l'institution du juge de paix. Actuellement le tribunal d'instance peut être considéré comme l'héritier de l'ancien tribunal de paix.

Mais l'extranéité de l'origine française de tribunaux de paix est affirmée par un certain nombre d'auteurs. La juridiction de paix aurait une longue histoire et la France se serait inspirée, elle aussi, d'une semblable institution qui existait déjà au dix-huitième siècle en Angleterre et au Pays-Bas.4(*)

En Belgique, il a existé et existe encore les tribunaux de paix. Nous savons que l'organisation judiciaire de ce pays présente des nombreuses analogies avec le système français pour des raisons historiques évidentes. C'est ainsi que la Belgique tire l'existence des tribunaux de paix et de police de la loi française des 16 et 24 Août 1790. Diverses lois sont intervenues pour améliorer leur fonctionnement (la juridiction qui était cantonale à l'origine n'est plus implatée en fonction du critère géographique mais plutôt en fonction du facteur démographique; en plus les compétences sont actuellement très variées.5(*)

En Rdc, l'organisation du système juridique date de l'époque coloniale et a subi une évolution permanente et rapide jusqu'à l'ordonnance loi no 68/248 du 7 juillet 1968 portant code d'organisation et d'organisation et compétence judiciaire telle que modifiée par l'ordonnance loi no 69/010 du 21 Février 1969 laquelle ordonnance y a imprimé une grande réforme consistant entre autres à l'intégration des juridictions de droit traditionnel dans la pyramide unique des cours et tribunaux en créant des tribunaux de paix qui devaient être établis progressivement sur toute l'étendue de la République pour reprendre en grosso modo les attributions des tribunaux coutumiers. C'est l'étape embryonnaire du juge de paix en Rdc. Le juge de paix est né pour rapprocher la justice des justiciables avec pour mission première le conciliateur à l'amiable compositeur, il est considéré comme une église au milieu du village.

Section 2. L'organisation de la juridiction par le juge de paix

Il existe en principe une justice de paix par territoire ou canton, mais on peut réunir plusieurs territoires sous la juridiction d'un seul juge de paix. Le juge de paix statue seul dans les affaires qui sont de sa compétence ; il est assisté d'un greffier.6(*)

Le tribunal de paix siège au nombre d'un seul juge. Toutefois, il siège au nombre de trois juges dont deux assesseurs lorsqu'il y a lieu de faire application de la coutume. Dans le cas où l'effectif des juges assesseurs présents au lieu où ce tribunal siège ne permet pas de composer le siège, le président ou le juge peut assumer, au titre de ce juge assesseur, tout notable résidant dans ce ressort.7(*)

A coté du juge de paix siégeant en matière répressive, le procureur de la République peut désigner, pour exercer les fonctions du MP, soit un ou plusieurs officiers du ministère public, soit un ou plusieurs officiers de police judiciaire à compétence générale. A défaut d'une telle désignation, les juges de paix siégeant en matière répressive remplissent eux-mêmes au près de leurs juridictions, les fonctions du MP, sous la surveillance et la direction de l'officier du ministère public.8(*)

Section 3. Compétence du juge de paix

Le juge de paix est compétent pour C de tous les litiges, d'importance minime ou médiocre, de toute contestation portant sur le droit de la famille, les successions, les libéralités et les conflits fonciers collectifs ou individuels régis par la coutume. Il C de toutes les autres contestations susceptibles d'évaluation pour autant que leur valeur ne dépasse pas 5.000 dollars ; il connaît également de l'exécution des actes authentiques.9(*)

Le juge de paix est compétent à C des infractions punissables au maximum de 5 ans de servitude pénale principale et d'une amende, quel que soit son taux, ou de l'une de ces peines seulement. Il est également compétent de mettre à la disposition du Conseil Exécutif tout individu tombant sous l'application de la législation sur le vagabondage et la mendicité. Les jugements qu'il rend sont susceptibles d'opposition et d'appel; l'appel est porté devant le TGI. Le juge de paix est seul compétent pour prendre les mesures de garde, d'éducation et de préservation prévues par la législation en matière d'enfance délinquante10(*).

Section 4. Procédure devant le juge de paix

§1. Introduction de l'Instance

Celui qui veut intenter une action devant le juge de paix doit d'abord venir en conciliation devant ce magistrat. A cet effet, il demande au greffier d'envoyer à son adversaire un billet d'avertissement indiquant très succinctement l'objet de la demande. Si le défendeur se présente, et si les parties se concilient, il en est dressé un procès-verbal signé par le juge, le greffier et les parties. Si le défendeur ne se présente pas, ou si les parties ne se concilient pas, le juge délivre au demandeur un permis de citer, sur la présentation duquel celui-ci fait citer par acte d'huissier son adversaire à comparaître devant le juge de paix siégeant cette fois, non plus comme conciliateur, mais comme juge.

La citation se fait pour un jour déterminé de façon à laisser au défendeur pour comparaître dans un délai minimum de trois jours.

Ni le ministère des avoués ni celui des avocats n'est obligatoire. Les parties peuvent se présenter en personne ou se faire représenter par des mandataires de leur choix. Il convient de se montrer assez circonspect dans le choix de ces mandataires. Trop d'agents d'affaires véreux gravitent autour des prétoires des juges de paix et sollicitent la confiance des plaideurs sans avoir ni la compétence ni l'honnêteté qui la justifierait.

L'instance peut être définie comme une « suite d'actes de procédure allant de la demande en justice jusqu'au jugement »11(*). Son ouverture va déclencher entre les parties un lien juridique nouveau, le lien d'instance qui semble bien être d'origine légale et qui est distinct du rapport juridique fondamental qui est à l'origine du procès12(*). Ce lien d'instance établit aussi une relation entre les parties et le juge, fonctionnaire à compétence liée, qui ne peut se soustraire à son obligation de statuer sous peine de déni de justice. Les obligations respectives du juge et des plaideurs ont un caractère fonctionnel et trouvent leur origine dans la loi qui aménage les conditions du déroulement de l'instance.

§2. Instruction du procès

L'instruction du procès est simplifiée et abrégée. On se borne souvent à l'instruire verbalement à l'audience. Fréquemment le juge de paix statue séance tenante. Si le juge de paix ordonne une enquête, les témoins sont entendus à l'audience même. S'il ordonne une expertise, il délivre à la partie une autorisation pour appeler les experts et y fait mention du jour, de l'heure et du lieu de l'opération. Pour que ces mesures d'instruction ne retardent pas trop le procès, la loi décide que le jugement définitif doit être rendu au plus tard dans le délai de quatre mois à partir du jugement interlocutoire qui les a ordonnées.

§3. Le type mixte de procédure du juge de paix

Ce type est dit mixte, car le déroulement du procès revêt le caractère inquisitoire et secret durant l'instruction préparatoire mais à l'audience, l'instruction devient orale, publique, contradictoire et accusatoire. C'est le type de procédure que comparaître notre pays ; dans ce système, le juge de paix en tant qu'OM ou l'PJ chargé des enquêtes peut procéder aux enquêtes sans tenir le suspect au courant. Cependant, en cas d'arrestation, il doit lui faire PJ les motifs ainsi que tous les chefs d'accusation formulés contre sa personne. Jusqu'à l'envoi en fixation du dossier au tribunal, le juge de paix instructeur peut modifier comme il l'entend la prévention à retenir contre l'inculpé, et étendre les enquêtes à des faits nouveaux. En revanche, sa juridiction saisie des faits par lui-même en tant qu'OM ne peut pas instruire d'autres faits ni statuer sur eux quand bien même elle en aurait incidemment connaissance.

Le prévenu doit avoir la possibilité d'assister à tous les actes d'instruction à l'audience et pouvoir débattre de tout moyen de preuve présenté contre lui. Le juge de paix, quant à lui, doit rester neutre et non passif, car il a l'obligation d'éclairer sa religion comme tous les autres juges13(*). Le délai pour faire appel des décisions des juges de paix est au moins à dater de la signification du jugement et cet appel est porté devant le Tribunal de Grande Instance.

Avant, c'est-à-dire du temps où Louis XIV régnait encore à peu près paisiblement sur le royaume de France, c'était une vraie procédure qui est donc comparable à la procédure que connat actuellement notre pays au niveau du tripaix. Les juges ouvraient des enquêtes et de leur propre chef. Ils procédaient seuls à l'audition des témoins, ils arrêtaient les suspects et les interrogeaient sans leur notifier aucune charge. Evidemment le suspect n'avait pas accès à un avocat, ni même à la procédure. Lorsque le juge estimait que l'enquête était terminée, il tenait un procès, où l'on répétait les charges recueillies et on statuait sur la culpabilité et, le cas échéant sur la peine. C'était une procédure caractérisée par le fait que le juge décidait de l'ouverture de l'enquête, y procédait seul, et siégeait dans la composition de jugement. Voilà le type d'où le juge de paix avec sa double casquette tire origine dans notre pays.

Ce point met terme au premier chapitre et nous permet ainsi d'entamer le second chapitre qui se focalise aux actes du juge de paix dans la phase pré juridictionnelle.

CHAP II : L'ACTION DU JUGE DE PAIX EN PHASE PREJURIDICTIONNELLE

Section 1. L'exercice de l'action publique

L'action publique est celle qui a pour but la répression de l'infraction considérée comme ayant porté atteinte à l'ordre social et qui a pour objet l'application d'une peine ou d'une mesure de sûreté au délinquant. Ainsi, exercer l'action publique, c'est saisir les tribunaux répressifs et soutenir devant eux l'accusation en vue de faire pour les coupables, il y a cependant lieu de noter que lorsque le MP ouvre un dossier sur instruction préparatoire (RMP), il exerce déjà l'action publique. Mais la saisine du tribunal constitue le temps fort, le moment culminant de l'exercice de l'action publique.

Contrairement au domaine civil où, on a que les actions diverses et nombreuses; en procédure pénale, on ne que deux actions, l'action publique et l'action civile. Selon le code de procédure pénale la première, la première vise l'application des peines et la seconde vise la réparation du dommage causé. L'action publique peut être présentée comme le pouvoir légal reconnu au MP d'exiger d'un juge compétent, qu'ayant constaté un fait punissable et établi la culpabilité d'un individu, il prononce la peine ou la mesure de sûreté prévue par la loi.

Analysant cette hypothèse, le MP dont le juge de paix porte la qualité, il n'en connaît aucune exigence au point de vue d'un autre organe ; cela présente un avantage dans la mesure où les affaires peuvent connaître une accélération pour leur instruction14(*).

§1. Les poursuites.

Exercer l'action publique, c'est en réalité engager l'une des trois phases du procès pénal à savoir la poursuite. On sait que cette mission incombe au MP, au juge de paix en cas d'espèce. Nous ne voulons pas indiquer ici quelles sont les règles précises qui président à cet exercice ; on ne peut que rappeler quelques éléments essentiels.

Observons dans un premier temps que pour pouvoir agir, le MP doit d'abord être informé de l'existence des infractions. Les moyens d'informations sont à la fois nombreux et divers. Il peut s'agir de procédés non formalistes, comme par exemple la rumeur publique, la dénonciation par un tiers ou révélée par une plainte de la victime. A coté des plaintes simples qui peuvent être adressées directement au juge de paix ou qui transitent par les services de police, il y a la plainte avec la constitution de la partie civile qui, déposée entre ses mains en tant que juge d'instruction, lui oblige en revanche en tant que MP à mettre en mouvement l'action publique15(*).

§2. L'instruction préparatoire.

Si les affaires simples et peu importantes peuvent être portées à l'audience à la suite d'une enquête sommaire dont on peut laisser le soin à la police judiciaire, les affaires délicates ne peuvent venir utilement devant la juridiction de jugement qu'après que la lumière ait été suffisamment faite sur les circonstances de l'infraction et sur la personnalité du délinquant ; l'instruction définitive qui se fait à l'audience même ne saurait suffire à éclairer ces points, et une « instruction préparatoire » ou « information » apparaît nécessaire.

Grâce à l'instruction préparatoire, la juridiction de jugement peut se prononcer dans les meilleures conditions tant sur la culpabilité que sur la peine ; grâce à elle on évite d'envoyer devant cette juridiction des affaires douteuses qui se prestige des autorités publiques ; on évite également le désagrément d'une comparution en audience publique à des personnes injustement soupçonnées. En effet, le juge de paix, après une instruction menée de façon objective, appréciera s'il en résulte contre l'intéressé des charges suffisantes pour justifier son renvoi devant la juridiction de jugement. Ainsi, la procédure de l'instruction préparatoire est organisée en principe, sur le mode inquisitoire, c'est-à-dire qu'elle est écrite, secrète et non contradictoire.

§3. Clôture de l'instruction préparatoire.

Avant de parler de la clôture pré juridictionnelle et donc d'envisager les hypothèses de décision que le juge de paix en tant que MP peut être amené à prendre, il importe tout d'abord de voir comment se déroule cette phase de la répression dans notre pays. C'est une phase de la recherche des preuves de l'infraction et de la décision à prendre sur l'existence de l'infraction (inculpation). A cette fin, le juge de paix décidera souverainement en tant que garant de l'action publique de ce qu'il convient de faire, tout en restant dans la légalité16(*).

Le juge peut soit inculper le présumer coupable ; c'est un pas vers la possible mise en prévention. Il y a aussi le classement possible du dossier soit pour inopportunité des poursuites, ou insuffisance des charges ou prescription de l'action publique, soit par paiement des amendes transactionnelles.

L'instruction, étant prévue par les articles 11 à 14 du code de procédure pénale confère au de paix les pouvoirs dans leurs dispositions17(*).

Les pouvoirs de parquet reconnus au juge de paix lui permettent donc de procéder aux enquêtes, il fait l'instruction préparatoire et celle définitive menée à l'audience de sa juridiction de jugement lui permettant de déterminer s'il existe des charges suffisantes contre la personne poursuivie et pouvant justifier son renvoi devant sa juridiction.

Ces pouvoirs lui permettent également de tenir les registres du parquet à la seule exception il ne peut tenir le registre de tutelle qui est uniquement réservé au parquet près les TGI et les Cours.

Voici à titre illustratif les registres que tient le juge de paix dans son parquet :

1. Le RMP : c'est le registre le plus important dans le cadre du fonctionnement du MP. On y enregistre tous les faits infractionnels contre l'inculpé.

2. RI (registre d'information) : dans le cadre de la loi, cette information c'est l'enquete. Dans ce registre on enregistre les faits susceptibles d'enquete.

3. RFNI (registre des faits non infractionnels) : on y enregistre tous les faits non infractionnels.

4. RAT (registre d'amende transactionnelle).

5. RAP (registre autre parquet) : on y enregistre tous les dossiers transmis par les autres parquets pour disposition d'incompétence ou lorsque le parquet reçoit une commission rogatoire.

6. ROS (registre d'objet saisi).

7. RED (registre d'enfance délinquante).

Signalons que tous les actes qu'accomplit le juge de paix dans la phase pré juridictionnelle pour instruction ne peuvent pas tous connaître la bonne marche du déroulement ; les difficultés et insuffisance de charge sont certaines. C'est ainsi que le désavantage se présente dans son caractère hybride de fonction dans la mesure où, étant encore dans la phase pré juridictionnelle, l'inculpé sous mandat d'arrêt provisoire peut solliciter une mise en liberté provisoire. Cette dernière nécessite la convocation d'une chambre de conseil à laquelle y aura le MP qui, de sa part pourra solliciter la mise en détention préventive afin d'écarter la mise en liberté provisoire que sollicite l'inculpé.

Mais il peut arriver que le juge accorde avantage à l'inculpé lui accordant la mise en liberté provisoire en dépit du MP. Ce dernier a la latitude d'attaquer la juridiction d'appel contre l'ordonnance prise par le juge quant à ce. A cet effet, le juge de paix ne peut en tant que MP intenter une action en appel contre l'ordonnance qu'il a prise lui-même en qualité de juge.

§4. Le juge de paix entre les deux plateaux : d'enquêteur et d'accusateur.

Le problème qui se pose ici est celui du déroulement d'enquête par le juge ainsi que son rôle d'accusateur à l'audience.

De prime abord, il y a la phase d'enquête à laquelle le juge cherche à réunir les éléments de faits infractionnels. Lorsqu'il en jugera l'opportunité de poursuite, il remplira ainsi toutes les attributions du MP. S'il arrive en terme de la phase inquisitoriale dite pré juridictionnelle, et que, les indices de culpabilité ont été retenus dans le chef de l'inculpé ; il est évident pour le MP à saisir la juridiction compétente.

Notons qu'il n'existe aucun obstacle de principe pour que ce soit le juge de paix en sa casquette du MP puisse assumer la charge des investigations jusqu'à la poursuite devant le tribunal compétent ; lequel dans le cas d'espèce c'est le tribunal de paix.

Lorsqu'il s'agit de saisir le tribunal qui, dans les TGI et les Cours, doit être saisi par les Procureurs de la République ou les Procureurs généraux en matière pénale ; au tribunal de paix le juge se saisit et assume ainsi la fonction de l'accusateur et du juge instructeur. Cette fois là dans la phase judiciaire qui doit donc instruire à charge et à décharge.

Cela veut dire, le juge instructeur, enquêteur de la phase pré juridictionnelle se retrouve présent à l'audience comme accusateur et comme juge instructeur.

Dans ce cas comment prouver l'indépendance du parquet à l'égard des tribunaux ?

Etant donné qu'il a l'obligation d'accuser pleinement et d'instruire à charge et à décharge ; le juge régit le parquet d'une part et régit le tribunal de l'autre. Ainsi établir son contrôleur hiérarchique semble obscur du fait qu'il est sous mandat de deux ordres juridictionnels.

Section 2. Saisine du juge comme organe permanent.

Un idéal à atteindre dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme du 10 décembre 1948, adoptée et proclamée par l'assemblée générale de l'ONU ; en matière procédurale, cet idéal s'exprime à l'article 8 de ladite déclaration qui énonce que « toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux, qui lui sont reconnus par la constitution ou par la loi. »

Le juge de paix est saisi soit par requête aux fins de fixation d'audience, soit par une plainte de la victime.

§1. Le système accusatoire du juge de paix

Cette procédure inquisitoriale qui va vers une procédure accusatoire parait plus complexe à un prévenu devant le juge de paix. L'idée est que nous retrouvons deux thèses lors des audiences ; l'une de l'accusation, l'autre de la défense qui doivent indispensablement agir à égalité d'armes, et le juge doit rester arbitre des différends qui lui sont soumis par les parties.

En ceci, le juge de paix reste toujours l'acteur de l'enquête, ayant ainsi dirigé les investigations. Au moment de l'accusation, le juge de paix en tant que MP, doit accuser pleinement le prévenu enfin que ce dernier présente ses moyens de défense contre les prétentions du juge de paix. Sur ce, lorsqu'il poursuit l'action publique, il est l'adversaire du prévenu, il est donc partie principale au procès. Il jouit cependant de la présomption de n'avoir agi, tant dans l'exercice des poursuites que dans l'exercice de ses attributions en tant que juge de l'instruction, que le seul intérêt du droit et de l'ordre public. A cet effet, il doit accuser pleinement ; mais le corollaire est que dans la casquette du juge il doit instruire à charge et à décharge comme cela est de règle.

Section 3. Les missions du MP en matière civile

L'intervention du MP dans le procès civil est également de nature à accentuer, dans certains cas le caractère plus inquisitoire de la procédure. Indépendamment des hypothèses où le MP lui-même partie demanderesse18(*). Notons le rôle actif joué par le MP, en certaines matières dans l'instruction de l'affaire : ainsi en est-il des mesures d'investigation que le MP peut accomplir dans le contentieux familial ; ainsi en est-il également du rôle d'instruction que le MP près le tribunal de travail assume dans le contentieux de la sécurité sociale que le juge de paix ne peut pas.

En matière de droit privé, le MP a reçu les missions suivantes :

1. mission générale permanente d'assister à toutes les audiences. L'on ne peut pas concevoir une audience judiciaire en matière de droit privé sans que le MP ne soit là ; car en effet la loi exige que son assistance à toutes les audiences de la Cour suprême de justice et de toutes les autres juridictions, jusqu'au niveau des TGI ; la seule exception concerne le tribunal de paix19(*). La question qu'on se pose ici est de savoir pourquoi dans des juridictions de grand échelon à l'occurrence la CSJ, où nous retrouvons des grands juges dont l'age et leur ancienneté dans la carrière judiciaire font d'eux une certaine confiance de bien dire le droit, puissent siéger ensemble avec le MP qui joue une sorte de contrepoids et que les juges des tribunaux de rang inférieur à l'occurrence le tribunal de paix ne connaissent l'assistance du MP, chose grave encore puisqu'ils siègent à juge unique dans toutes les matières, sauf coutumières.

2. mission de donner des avis ; la loi exige que dans des cas bien déterminés, les dossiers judiciaires soient communiqués du MP pour qu'il donne son avis. Nous citerons les cas suivants : - les dossiers dans lesquels sont en cause l'Etat, les régions, les établissements publics, les assemblées régionales et les collectivités. - les dossiers relatifs aux litiges de successions. - les dossiers qui concernent les mineurs. Les dossiers relatifs aux mineurs, à la succession, aux collectivités sont de prime abord de la compétence du juge de paix. Parce que ce sont des matières substantielles, la loi a voulu un avis préalable du MP quoiqu'il n'y soit pas lié. Mais le juge de paix remplissant toutes les deux fonctions ne connaît ainsi aucun contrepoids. Le MP peut de lui-même demander que les dossiers où il croit pouvoir donner son avis lui soient communiqués. Une juridiction peut aussi estimer indiquer de communiquer les dossiers au MP pour recueillir son avis.

Dans des pays qui ont une vieille expérience judiciaire, ce sont des juristes spécialistes qui siègent en matière de droit privé. C'est pourquoi leurs avis sont entendus avec intérêt parce qu'ils constituent des véritables consultations des spécialistes20(*). Cela va nous permettre de parler dans la section suivante l'indépendance du MP à l'égard de parties et de tribunaux.

Section 4. L'indépendance du MP à l'égard des parties et des tribunaux.

La position du MP est différente dans le cas où il participe à la juridiction par voie d'avis et dans le cas où il est partie principale au procès. Tandis qu'il faut distinguer encore sa responsabilité comme partie publique de celle qu'il a comme partie privée (agissant en qualité de tuteur).

Lorsqu'il est partie principale au procès ; l'hypothèse est qu'il peut y avoir greffage au MP d'une partie civile cherchant ainsi la réclamation des dommages-intérets des préjudices qu'elle a subis. La partie principale doit à tout prix protéger la partie civile, même plaider en sa faveur pour la réparation. A cet effet, le MP et la partie civile ne doivent jamais se contredire. L'une cherche la réparation et l'autre la sanction en de garantir la sécurité publique. De la même manière cette hypothèse doit être appliquée au juge de paix en tant que MP. Mais le sort du prévenu, lequel doit être confronté au MP et à la partie civile semble confirmer sa condamnation d'autant plus que son adversaire (juge de paix en MP) est le seul que décidera de pouvoir ou ne pas le condamner. Voilà que l'audience solennelle ne sera qu'une formalité.

Participant à l'oeuvre de la juridiction, l'OMP est totalement indépendant et se trouve même relevé du lien hiérarchique ; son chef hiérarchique pourrait cependant lui donner pour instruction de faire lecture de son avis ou de l'avis d'un collègue, mais il ne peut empêcher le magistrat occupant le parquet à l'audience de faire connaître au tribunal son opinion personnelle, fut-elle dissidente de celle qu'il avait mandat de communiquer. Pour le juge de paix, la manifestation de l'opinion dissidente semble très opaque et un magistrat du parquet appelé à donner un avis peut être récusé et, a le devoir de se déporter au même titre que les juges21(*). Mais l'application de l'article 83 du code d'organisation et compétence judiciaires connaît des difficultés de pouvoir être pratiqué d'autant plus qu'il y a certains tribunaux de paix qui fonctionnent qu'avec un seul juge étant lui-même président de sa juridiction.

S'agissant de surveillance des services judiciaires, l'article 6, alinéa 2 du COCJ donne au MP une mission générale de surveillance des services judiciaires et de leur personnel, sauf les agents du greffe.

Ainsi disait Jean QUINCHART : « si, en vertu du principe dispositif, les plaideurs sont maîtres de l'expression judiciaire de leurs droits (saisine du juge, désistement, acquiescement, transaction), la conduite de l'instruction est désormais contrôlée, rythmée en état.» c'est-à-dire que le MP doit jouer un rôle de contre poids à coté des juges. Mais le juge de paix ne peut se jouer en lui-même un contrepoids. Ceci présente un inconvénient dans le cadre du bon fonctionnement de la justice.

De ce qui précède, nous allons bientôt présenter l'action du juge de paix dans la phase judiciaire et les répercussions y afférentes ; partant des actions menées par lui dans la phase pré juridictionnelle. Ceci constitue en fait notre troisième chapitre dans la chronologie de notre plan du travail.

CHAP III. CULTURE ET ACTION DU JUGE DE PAIX DANS LA PHASE JUDICIAIRE.

Section 1. Instruction de la cause

C'est la plus longue et la plus importante. Il s'agit ici de rechercher les moyens de preuve qui établissent les faits qui démontre le bien fondé de la demande introduite. C'est la phase où le demandeur s'affronte en un combat pacifique contre le défendeur. C'est le déroulement des débats ; cette phase est régie par des principes juridiques qui ont tous pour effet de permettre au tribunal d'aboutir à la lumière sur la cause qui lui est soumise.

L'instruction est appelée à proclamer la vérité au sujet des faits de la cause et des obligations des parties, toute juridiction a pour tache première de vérifier les données du litige qu'elle est appelée à trancher.

Dans le régime accusatoire mitigé que connaissent les juridictions congolaises, le fardeau de la preuve repose sur le demandeur ; mais le juge n'en est pas moins tenu de contrôler les allégations des parties et de vérifier leurs moyens de preuve ; il doit prendre l'initiative de l'instruction aux fins de former son intime conviction au sujet de la réalité des faits avant d'en proclamer la vérité légale.

§1. Le système accusatoire du juge de paix

Une procédure est accusatoire lorsqu'elle réserve aux parties un rôle prépondérant dans le déclenchement et dans la conduite du procès, dans la recherche des preuves. Le rôle du juge est alors d'arbitrer, de veiller à ce que les règles du jeu judiciaire soient correctement respectées. Par ses origines historiques, la procédure accusatoire est très ancienne, et remonte aux sociétés primitives. Une telle procédure est orale, publique et contradictoire ; elle fait confiance, le plus souvent, à un système de preuves légales qui interdit au juge de statuer suivant son intime conviction.

Ainsi, le rôle du juge devient de plus en plus actif dans l'instruction de la cause qu'il a la charge de trancher. A cet effet, ce juge peut d'initiative et d'office ordonner la production des documents détenus par les parties ou détenus par des tiers ; des pouvoirs d'investigations renforcés sont, dans certaines matières, le champ d'application des articles 220, 221 et 223 du code civil, pourvoir à la réunion d'information et de document qui lui sont nécessaires.

Etant donné que dans les TGI et les Cours, en matière pénale, la saisine s'effectue par une requête aux fins de fixation d'audience ou par une citation directe ; au tripaix c'est la même chose, mais la différence est que, au tripaix lors de l'audience, la présence du MP ne se fait pas voir. Et cette absence répercute sur les rôles essentiels du MP tans dans la phase d'instruction, de plaidoiries et de jugement ; ainsi que le cas de recours contre les jugements rendus par le tribunal.

Le juge de paix qui, jadis effectuait l'instruction pré juridictionnelle, est présent au tribunal pour accuser. Pour ce fait, il doit accuser pleinement parce que c'est présumé qu'il a effectué toute l'étape pré juridictionnelle et détient ainsi des charges suffisantes à l'endroit du prévenu. Ceci étant, il a encore l'obligation de porter sa casquette du juge pour assurer l'intérêt de la défense ; c'est ainsi qu'il doit instruire à charge et à décharge afin de garantir l'égalité entre l'accusation et la défense.

§2. Le juge instruit aussi bien à charge qu'à décharge

L'instruction a pour but de parvenir à la manifestation de la vérité. Le juge instruisant ne cherche pas à démontrer que le mis en cause est coupable, mais à connaître la vérité ; il ne doit donc pas hésiter à poursuivre des investigations qui confirment la thèse de la défense22(*).

Au surplus, tant le MP que la partie civile peuvent lui adresser des demandes écrites et motivées tendant à accomplir l'audition de témoins, une confrontation, un transport sur les lieux, ou à ordonner la production d'une pièce. Si le juge d'instruction estime ne pas devoir y procéder, il doit rendre une ordonnance motivée dans le délai d'un mois, laquelle ordonnance est susceptible d'appel23(*).

Le juge enquêteur devenu à l'audience juge d'accusation, cela peut encore etre admis. Mais le problème qui se pose ici, le juge instructeur peut-il se pencher qu'à des questions à charge ? Ou encore le juge instructeur doit remplir la fonction conforme du juge instructeur qui doit en principe instruire à charge et à décharge.

v En matière civile : en matière civile, nous pouvons encore affirmer que l'instruction du juge de paix sur le différend lui soumis par les parties conserve sa crédulité d'autant plus que les parties seules diligentent l'action. Toutefois, son avis est encore nécessaire en tant que MP et cela pourra avoir des répercussions sur le jugement définitif et prouverait en conséquence le penchant ou la partialité du juge de paix.

v En matière pénale : en matière pénale, le respect de la contradiction, autrement dit le respect des droits de la défense prend une importance toute particulière en raison des intérêts en jeu. Outre la présence des parties au procès, le principe implique également la possibilité d'être assisté par un défenseur, cette présence étant parfois obligatoire. On observe pourtant que le principe n'est pas toujours appliqué avec la même rigueur à tous les stades du procès.

Peut-on affirmer que la procédure devant le juge de paix lors d'instruction fasse l'objet d'un débat contradictoire ? Au sens où il y aurait égalité entre les parties privées et la partie publique la réponse est encore largement négative du fait que le juge de paix instruisant n'a pas affaire à une innovation ; ainsi parce qu'il a devant lui le même délinquant qu'il avait autre fois en chambre préliminaire. Il n'instruit en principe rien de nouveau, l'opportunité jugée par lui de communiquer le dossier au tribunal, c'est parce qu'il a préalablement repéré les indices de culpabilité à l'égard de l'inculpé.

Au coté du délinquant, le principe du contradictoire ne lui garantit presque rien ; sinon, il revient dans la phase judiciaire devant un monsieur qui a changé simplement le rôle, jadis instructeur à la phase préliminaire, cette fois-ci accusateur et juge qui doit évidemment instruire à charge qu'à décharge.

En effet, physiquement la personne reste la même et le délinquant ou le présumé auteur n'entend d'elle que le propos recueilli par elle-même sur le procès verbal à la phase préliminaire. Cette décharge d'instruction peut-elle réellement être garantie ? Le doute persiste.

Dans l'office du juge au cours du procès pénal, dans l'instruction, le juge est appelé à instruire les faits, de façon impartiale. C'est-à-dire que c'est lui qui les présente, sélectionne ce dont il va parler et c'est encore lui qui pose l'essentiel des questions. Il doit ainsi synthétiser, à travers les interventions les éléments à charge et ceux à décharge.

§3. Principe d'impartialité du juge

Ce principe est prévu par l'article 150 alinéa 1 et 2 de la constitution de la RDC qui dispose que « le pouvoir judiciaire est le garant des libertés individuelles et des droits fondamentaux des citoyens » et « les juges ne sont soumis dans l'exercice de leur fonction qu'à l'autorité de la loi ». Ainsi, les juges dans l'exercice de leur mission de dire le droit doivent montrer une attitude de neutralité et bien l'afficher. Ils doivent être au dessus de la mêlée pour solutionner des litiges soumis à leur juridiction.

Ceci étant, le juge de paix doit aussi sauvegarder sa neutralité quoi qu'il soit lui-même partie au procès, car la dernière décision qui est celui de rendre jugement lui revient afin de solutionner le litige qui lui opposait au prévenu en tant que garant de l'action publique. Les affaires retentissantes à charge et décharge, se trouverait positives qu'à mesure où le schéma soit clair parce que le juge lui-même est partie au procès, n'exhibe pas tout à fait sa position attendue et on doit bien illustrer le symbole de la balance, chaque plateau, comme servant et contrôleur des poids et mesures.

§4. Du contrôle d'actes accomplis

Qu'aucun n'ignore que l'instruction appelée à proclamer la vérité légale au sujet des faits de la cause et des obligations des parties, toute juridiction a pou tâche première de vérifier les données du litige qu'elle appelée à trancher.

Dans le cas sous examen, cette vérification est théorique mais son applicabilité connaît des difficultés. Le juge de paix lors de l'instruction pré juridictionnelle peut ou ne pas bien remplir son rôle de l'OMP ainsi que lors de l'instruction judiciaire en tant que juge.

En effet, n'appartient-il pas à la chambre de contrôler la régularité des actes du magistrat instructeur ? N'appartient-il pas au Procureur de faire appel de décisions du juge, de requérir l'accomplissement d'actes utiles à la manifestation de la vérité ?

En quoi le juge de paix avec sa double casquette peut-il se reprocher, se contrôler des décisions qu'il prend ou des actes qu'il commet. Le bon fonctionnement de la justice ne peut avoir lieu et les intérêts de la défense se verraient toujours bafoués. Voilà pourquoi nous réitérons un contrepoids entre les parquets et les tribunaux, car le juge de paix a un pouvoir exorbitant et disait MONTESQUIEU : « le pouvoir absolu corrompt absolument ». Cela a un impact négatif pour le bon fonctionnement de l'appareil judiciaire en RDC.

Note : Dans le régime accusatoire mitigé que connaissent les juridictions congolaises, le fardeau de la preuve repose sur le demandeur ; mais le juge n'en est pas moins tenu de contrôler les allégations des parties et de vérifier leurs moyens de preuve ; il doit prendre l'initiative de l'instruction aux fins de former l'intime conviction au sujet de la réalité des faits avant d'en proclamer la vérité légale24(*). Il arrive sans doute que l'instruction se réduise à peu de choses ; tel serait le cas lorsque le demandeur se présente, toutes preuves incontestées dans la main, ou encore lorsque le défendeur acquiesce sans réserves, et à l'abri de toute suspicion de collusion, aux allégations du demandeur.

En matière répressive, les pouvoirs d'instruction pré juridictionnels attribués aux magistrats de parquet permettent à la partie poursuivante de rassembler d'avance les preuves de faits dont elle saisit le tribunal ; si le prévenu ne conteste pas ces données et si celles-ci se révèlent concluantes, l'instruction à l'audience peut se borner à donner à l'instruction pré juridictionnelle le caractère contradictoire et public requis par la constitution25(*).

L'hypothèse que nous venons de soulever est celle dans laquelle le prévenu ne conteste pas les données contenues sur le PV du MP. Mais le prévenu peut, toutefois, nier tout ce qui est contenu dans le PV et cela amène de plus le juge à pouvoir soit ordonner l'instruction complémentaire du MP, et ce dans le motif où certains magistrats paresseux se contentent à requalifier les infractions retenues par les OPJ qui, en principe n'ont pas fait le Droit. La justice est encore une fois bâclée chez le juge de paix qui peut couvrir et se sécuriser avec ses insuffisances. C'est encore dommage pour un prévenu qui n'est pas assisté ou représenté à l'audience par un avocat, car ce dernier aide le juge dans les questions techniques pour trancher les litiges.

Voilà encore les inconvénients que présente le dédoublement fonctionnel du juge de paix, il ne peut pas être contrôlé là-dessus (comment reprocher à un juge à posteriori d'en avoir trop ou pas assez fait ?). Alors que dans le futur, chaque partie aura à charge de produire ses preuves pour étayer leurs hypothèses à charge au juge de les examiner, contrôler, valider et de rendre un jugement.

Ces 4 verbes (examiner, contrôler, valider et rendre) sont l'apanage du juge dans le procès ; dommage que le juge de paix est aussi partie au procès en tant que garant de l'action publique. A cet effet, la formation de sa conviction semble douteuse ; et cela constitue notre point suivant lequel nous essayerons de décortiquer la bonne conviction.

§5. La formation d'une bonne conviction

Le pacte international relatif aux droits civils et politiques veut que toute personne ait droit en ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi.

Pour répondre à cette exigence, le juge doit lors de la reconstitution ou l'établissement des faits ou lors de la production des actes doit s'appliquer non seulement physiquement en déterminant le contour exact ainsi que des raisons plausibles et les circonstances possibles de leur existence ou l'inexistence.

En droit, ce qui doit être prouvé ce sont les faits matériels ou juridiques qui servent de base à la présentation dont on veut établir le fondement : le droit ne se prouve pas par les parties au procès lesquelles se contentent de prouver l'existence d'un fait matériel ou juridique et d'évoquer le droit. C'est au juge qu'il appartient de déduire les conséquences juridiques de la loi ou l'usage attaché aux faits qui sont prouvés ; « c'est l'oeuvre du juge d'appliquer la règle de droit ».

En effet, la preuve ne peut être rapportée sur n'importe quoi ni toujours dans n'importe quelle forme, car, par respect des principes de la neutralité du juge et de la légalité des preuves, le juge ne peut statuer que sur ce qui est demandé par les parties et ne prend sa décision que si les moyens de preuve utilisés sont conformes aux règles fixées par la loi. Tandis qu'en procédure pénale où le système de preuve est libre, les moyens de preuve utilisés doivent être non interdits par la loi. Tel est par exemple, le cas des ordalies et les pratiques divinatoires qui ne sont pas considérées au Congo étant de nature à contribuer à la manifestation de la vérité26(*).

1. principes de base pour la formation de la conviction du juge

En ce qui concerne cette exigence de se former une bonne conviction, il ne suffit pas au juge d'adopter un model d'approche pour ce travail de recherche. Il faut encore que ce travail d'appréciation de preuve fourni se base sur des principes rigoureux, parmi ceux-ci nous pouvons citer :

Ø Le juge ne peut pas baser ses convictions sur ce qu'il connaîtrait des sciences personnelles en dehors des débats et qui n'aurait pas été soumis au caractère contradictoire que ceux-ci exigent.

Ø Dans ce travail d'appréciation de preuve le juge reste tout d'abord libre, il peut rejeter certaines preuves qui lui paraissent suspectes.

Ø L'appréciation du juge est toujours souveraine dans ce sens qu'il ne peut pas rendre compte (en matière pénale) des motifs intimes de sa conviction.

Toutefois, celle-ci doit être en toute matière raisonnablement étayée et non entachée d'un vice radical. Il y a lieu de signaler que ce système d'appréciation souveraine de la preuve par le juge est en matière pénale particulièrement appelé « système d'intime conviction » ou « système de preuve morale ».

Il a remplacé historiquement celui de « preuve légale ». Disons pour mémoire que le système de preuve légale qui a été applique sous l'ancien régime français (avant 1789), la valeur de preuve était déterminée par la loi. Le juge n'avait aucune liberté d'appréciation pour décider d'après sa conscience et sa conviction.

Le juge de paix devrait normalement sortir sa décision partant de la preuve déterminée par la loi au cas où il est partie au procès, d'autant plus que son intime conviction connaît de doute. S'agissant des matières où il n'est pas partie au procès, son intime conviction peut encore être admise.

La loi se borne à remonter les recherches, les constatations et les véracités d'un fait et laisse au juge toute liberté pour apprécier la valeur des preuves qui lui sont soumises. Il peut d'après sa conviction, sa conscience condamner, relaxer ou acquitter suivant qu'il est ou non convaincu de la culpabilité ; sans être obligé de donner une quelconque justification de la force probante qu'il attache aux preuves par lui retenues, sauf qu'il doit tenir compte de la valeur probante attachée par la loi à certains moyens de preuves.

Expliquant cet état de chose, le prévenu est à la seule disposition du juge de paix qui doit décider son tort, sans ignorer que celui-ci est partie au procès.

2. La charge de la preuve pénale

Tout procès, de quelle nature qu'il soit, oppose au moins deux personnes ou deux groupes de personnes. Il s'agit des accusateurs ou de l'accusateur (c'est-à-dire OMP et la partie civile au pénal d'une part, et, du demandeur au civil que du civilement responsable ou du défendeur de l'autre part). Quid de l'administration de la preuve par le juge lorsqu'il intervient comme partie au procès ?

Principe : la présomption d'innocence et l'intime conviction dominent les principes qui régissent la preuve en matière pénale. S'agissant de savoir su qui reposera le fardeau de la preuve, et quels sont à ce propos les pouvoirs du juge répressif.

Tout homme est innocent, présumé tel jusqu'à l'établissement de sa culpabilité tel que le stipule la Déclaration universelle des droits de l'Homme : « Toute personne accusée d'un acte délictueux est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès public ou toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées »27(*).

Il en résulte qu'en principe l'accusation doit apporter la preuve de l'existence de l'infraction et de la culpabilité de la personne poursuivie. Celle-ci toutefois, doit en règle faire la preuve des causes mais l'on aurait tort de transposer ici les principes de la charge de la preuve en matière civile, pendant que le défendeur doit établir le bien-fondé de ses moyens de défense.

D'une part, cette répartition du fardeau de la preuve ne saurait être à ce point tranchée : contre le MP devant prouver que l'accusé était sain d'esprit, la défense peut invoquer un état de démence dont elle sera amenée à faire la preuve.

3. Du principe « actori incumbit probatio » et « in dubio pro reo ».

La charge de la preuve en matière pénale ne se pose pas de la même manière qu'en matière civile. Le principe « actori incumbit probatio » est d'application en tant que principe général de droit car aucun texte légal ne le proclame. Mais ce principe connaît certains tempéraments résultant de la singularité de la matière pénale28(*). Nous estimons qu'en ce qui concerne la preuve, il appartient au MP (juge de paix) d'en assumer la preuve. Cela fait partie de sa mission en tant que partie poursuivante ; il doit faire preuve des faits qu'il allègue.

Il faut encore noter qu'il y a affirmation de la présomption d'innocence en cas d'insuffisance de preuves sur la culpabilité du prévenu ; ce dernier continuera à être présumé innocent lorsqu'il y a doute, ceci pourra prévaloir pour le prévenu selon la maxime « in dubio pro reo ».

Pour ce qui est de l'intime conviction, à la différence du juge civil qui doit en principe, se borner à entendre les parties du bien-fondé de leurs allégations29(*). Le juge pénal, devra utiliser tous les moyens d'investigations que la loi fournit, il doit jouer un rôle actif dans la recherche des preuves et apprécie la force probante des éléments de preuve d'après son intime conviction.

La loi dans une formule générale, ne demande pas compte aux juges des moyens par lesquels ils ont fondé leur conviction, elle ne leur prescrit pas des règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d'une preuve ; elle leur prescrit de s'interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement, et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelles impressions faites, sur leur raison, les preuves rapportées contre l'accusé et les moyens de sa défense.

La loi ne leur fait que cette seule question qui enferme toute la mesure devoir : « avez-vous une intime conviction ? ». Ainsi se trouve rejeté le système des preuves légales, prévoyant une sorte de tarification des preuves. Dans tous les cas, l'intime conviction a des limites naturelles : elle ne doit pas autoriser l'arbitraire, et elle doit respecter la légalité de la preuve ; toute preuve acquise illégalement doit être rejetée.

Un problème délicat se pose ici ; le juge de paix est partie principale au procès et parfois sans greffage de la partie civile lequel nous développerons dans la suite.

Comme nous venons de le dire, les preuves illégales doivent être rejetées, c'est présumé que les preuves dont présentera le juge de paix sont impeccables dans la mesure où c'est lui-même qui les apprécie et elles ne pourront être contredites par la partie adverse qui n'attend que du juge de paix soit son relâchement soit sa condamnation.

Nous sollicitons davantage la dignité de la justice qui ne doit pas être compromise par l'emploi d'artifices coupables dont le caractère déloyal menacerait les droits de la défense en général. Chaque partie doit rapporter la preuve des faits qu'elle allègue et le juge pénal joue un rôle très actif, il collabore activement à la recherche des éléments qui établiront sa conviction, et la preuve doit se justifier, sans ignorer que le prévenu continue à bénéficier de la présomption d'innocence.

En droit positif congolais, ce rôle actif du juge pénal dans la recherche et l'administration de la preuve résulte de la disposition de l'article 74 alinéa 6 du code de procédure pénale, qui permet au tribunal « d'ordonner toute mesure d'instruction complémentaire qu'il estime nécessaire à la manifestation de la vérité ».

Voilà certains commentaires cadrant à l'instruction judiciaire dont le juge de paix doit y tenir compte pour que l'accusation et la défense soient équilibrées et que les débats prennent un bon cheminement au cours de l'audience. C'est pourquoi nous entrons dans la nouvelle section qui a trait à la plaidoirie.

Section 2. Les débats : la plaidoirie

Il n'est pas possible, dans un précis consacré à la justice et à ses cadres institutionnels d'exposer d'une manière exhaustive comment se déroule un procès civil ou pénal dans nos juridictions. Le débat oral est la discussion publique des évidences. De cette confrontation doit jaillir une vérité tangible au-delà du doute raisonnable. L'accusation et défense doivent avoir matière à argumenter. L'oralité confronte les raisonnements, renforce ou anéantit les preuves. Le défaut est qu'elle ne favorise pas les taiseux surtout lorsque leur conseil manque d'inspiration. L'écrit, c'est la somme qui enferme la vérité ; l'oral, c'est la dispute qui la juge.

Ces caractères des débats se concrétisent lorsque les parties sont assistées ou représentées par les avocats ou défenseurs judiciaires qui ont la présomption de connaissance de procédure. Le juge de paix, c'est un juge de proximité, veut dire qu'il a affaire à des « indigènes » qui, d'habitude ont été sous l'égide de la coutume.

Le moderne pour eux, donc l'octroi des avocats devant le juge de paix parait charge inutile, alors que l'avocat guide le juge dans les questions techniques, cherche à sauver son client du gouffre que ce dernier est exposé à tomber dessus ; bref, évite le juge à ne pas tomber dans l'arbitraire et jugement inique.

Cet état de chose fait encore une crainte dans la manière de l'équilibre entre l'accusation (juge de paix) et la défense. Effectivement, sans éclaircissement sur ce point, la justice serait réellement à 2 vitesses : justice pour celles et ceux qui ont les moyens de se payer les avocats et justice pour les autres (vulnérables). La finalité d'une telle justice s'avère uniquement accessible aux plus favorisés économiquement, mais toujours aussi opaque pour les citoyens entourant le juge de paix.

§1. Le principe du contradictoire et du respect des droits des la défense

Considéré par la doctrine et la jurisprudence comme un principe général de droit applicable à toutes les juridictions, ce principe signifie que le juge ne peut statuer sans que les parties n'aient pu faire valoir, dans la liberté et l'égalité, tous les moyens aptes à soutenir leurs prétentions. Régie par le principe du contradictoire, la procédure réserve à chacune des parties le droit d'être entendue et elle assure de la sorte une confrontation des prétentions.

Ce principe domine l'ensemble du procès civil ; il sous-tend un nombre considérable de dispositions du code judiciaire et tout particulièrement les règles relatives aux actes de procédure et aux délais pour les accomplir. Le juge doit, en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Le respect du principe de contradictoire entraîne des conséquences tant en ce qui concerne les parties qu'en ce qui concerne le juge :

· La nécessité d'assurer la liberté de la défense implique que chacune des parties soit effectivement en mesure de connaître exactement les prétentions de son adversaire, ainsi que les moyens et les pièces sur lesquels il se fonde. Ceci implique que chacune des parties ait la possibilité de connaître et de discuter les documents produits par l'autre, les témoignages déposés, d'assister aux procédures de preuves (telles que l'enquête, l'expertise,...). Sans doute, advient-il que certaines procédures se déroulent de manière non contradictoire, soit que la nature même de la procédure exclue que l'adversaire, soit le prévenu, soit encore parce que l'adversaire fait défaut. Mais il demeure que dans ces diverses hypothèses, la personne qui n'était pas présente au procès, disposera d'un recours en rétractation lui permettant de revenir devant le même juge de manière à nouer un débat contradictoire (ce sera tantôt par voie d'opposition, tantôt par voie de tierce opposition).

· Le respect du principe du contradictoire s'impose également au juge :

· Ne saurait fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans les débats et doit écarter toutes pièces non communiquées dans le délai prescrit.

· Doit permettre aux parties de s'exprimer chaque fois qu'il est amené à prendre une initiative dont l'influence sur le litige peut être déterminante.

· Ne peut admettre qu'un tiers soit mis en cause par l'une des parties dans des conditions qui méconnaîtraient les droits de la défense de ce tiers.

I. La défense et la restauration du droit

L'ordre juridique est parfaitement maintenu lorsque tous les individus, collectivités et organismes nationaux et mondiaux respectent volontairement les normes d'un droit universel. La relativité du droit, les controverses au sujet de son interprétation abstraite ou son application concrète fait que des opinions fait contradictoire peuvent être soutenues. Par ailleurs, l'intérêt se révèle souvent mauvais conseiller ; il aveugle les parties, même de bonne foi, dans le choix des solutions qui leur sont favorables.

Enfin, il faut compter avec ceux qui, sciemment s'écartent des normes juridiques pour assouvir des passions coupables ou pour rechercher des avantages illégitimes. Le souci de la moralité, du civisme, ou simplement de l'intérêt bien compris, sont sans doute les meilleurs garants du respect du droit, une contrainte extérieure peut cependant être nécessaire pour assurer le respect des normes par les individus récalcitrants ; la vigueur et surtout l'inéluctabilité des moyens de contrainte apportent d'ailleurs aux citoyens et aux collectivités qui entendent respecter le droit, un encouragement au respect de la légalité en les mettant à l'abri du complexe de frustration.

Les inconvénients d'un régime où le magistrat chargé des poursuites instruit lui-même la cause ne peuvent être contestés : l'accusateur public est juge et partie. L'institution de juridiction d'instruction entraînerait cependant des retards considérables dans l'action de la justice, elle créerait des charges budgétaires énormes et elle se heurterait à la difficulté déjà si grande du recrutement de personnel judiciaire qualifié.

Si le magistrat instructeur est juge et partie, il est du moins une partie sans intérêt personnel à la cause. Si l'on peut néanmoins redouter une « déformation professionnelle » dans le chef des magistrats du parquet. Il faut se rappeler que, même en cours d'instruction, les mesures les plus graves sont soumises au contrôle du juge et qu'en tous cas dès sa fin de l'instruction préparatoire, les parties se trouvent sur pied d'égalité devant un juge qui peut compléter l'instruction30(*).

De ce qui précède, le danger se fait davantage sentir à la justice de paix où c'est le seul magistrat qui a ouvert le dossier, l'amènera ainsi à son terme par un jugement définitif.

II. Partie civile en greffage au MP (juge de paix)

En principe, la partie civile est une partie jointe dans un procès pénal au MP. Elle cherche ainsi un appui du MP et doit marcher avec ce dernier dans un même fil d'idée sans divergence. Quant au juge lui n'est pas lié aux parties, il doit garder l'impartialité en vue d'une bonne garantie de la justice. Mais alors, le juge de paix, il lui est reconnu la qualité de duplicité de la casquette (MP et juge) dite de dédoublement fonctionnel tel que nous l'avons annoncé. Peut-il nécessairement veiller à sauvegarder l'intérêt de la partie civile et marcher avec elle tout en gardant son impartialité du juge d'autant plus qu'il n'est pas lié aux parties ?

La réponse est assurément négative.

III. Nécessité effective d'un parquet permanent au tribunal de paix

Sans contredit, l'article 319 de code de la famille relatif à l'autorité parentale, c'est le MP qui, sur sa réquisition, la déchéance peut être prononcée. Par rapport au juge de paix avec sa duplicité fonctionnelle semblerait entrer dans l'arbitraire lorsqu'il va requérir et trancher également la demande lui soumise. Il est évident qu'on sente un contrepoids entre le juge et le MP.

De même, en vertu de l'article 359 du CF, en cas de refus de consentement des parents ou de l'un d'eux ou du tuteur au mariage du futur époux mineur, celui-ci, même non émancipé, peut saisir le conseil de famille. Si le refus persiste, le futur époux mineur ainsi que le MP peuvent saisir, par voie de requête, le tripaix du lieu où le mariage devrait être célébré. Le tripaix instruit à huis clos la requête en amiable compositeur.

Notons ici l'illogisme de la position légale ; en effet, nous avons déjà dit que le tripaix est la juridiction compétente chargée de trancher tous les litiges du droit de la famille. Hors, dans des nombreuses dispositions du CF, la loi fait intervenir le MP pour garantir un bon exercice de l'action publique. Et le juge de paix son intervention dans ce genre d'affaires et sa participation comme partie, puis juge est une dérogation au principe de la neutralité du juge et met ainsi en cause le doute sur son image d'impartialité.

IV. L'abstention et la récusation

a. L'abstention : lorsqu'un magistrat suppose qu'il se trouve dans un des cas de récusation prévus par la loi, ou estime en conscience qu'il doit s'abstenir, il se fait remplacer par un autre juge. Si plusieurs magistrats déclarent s'abstenir, si bien que la juridiction ne peut plus siéger régulièrement, on procède comme dans le cas de renvoi pour suspicion légitime.

b. La récusation : elle est une procédure par laquelle une partie, sans s'opposer à ce que la juridiction reste saisie, demande qu'un ou plusieurs juges soient écartés et remplacés par d'autres, s'il y a lieu, parce qu'ils sont suspects de partialité envers l'un des plaideurs. Elle est inutile si le magistrat s'abstient spontanément. On peut récuser le MP, s'il est partie jointe ; on ne le peut pas s'il est partie principale ; le greffier ne peut jamais être récusé. Quant aux arbitres, on ne peut les récuser que si la cause de la récusation s'est produite après leur nomination31(*).

Eu égard de ce qui précède, le justiciable du tripaix a une difficulté majeure pour que ses droits de défense soient garantis en matière pénale, car le garant de ses droits est aussi partie, donc son adversaire. Il peut chercher à récuser un juge, mais se trouve limité parce qu'il y a certains tribunaux de paix qui ne fonctionnent qu'avec un seul juge qui devint ainsi un monarque absolu de la justice de paix. C'est encore une cause des jugements iniques.

Section III. Le jugement du juge de paix

1. Définition :

Le jugement est une décision rendue par une juridiction légalement constituée sur une contestation existante entre parties conformément aux règles de procédure.

Le rôle premier du juge n'est pas de sanctionner les justiciables mais plutôt de les concilier pour préserver la haine, la rancoeur et garantir une paix sociale digne de ce nom.

Le droit et la justice sont inévitablement autre chose lorsqu'on les envisage dans une communauté restreinte, comme sont toutes les communautés d'Afrique et de Madagascar dans l'ère précoloniale, ou dans les communautés vastes comme sont les Etats d'Europe. La justice indigène (de paix), se présente comme une institution de paix, plus qu'elle ne vise à l'application d'un droit strict ; elle vise à réconcilier les parties et à restaurer l'harmonie dans la communauté. L'absence des procédures efficaces d'exécution des jugements rend au surplus nécessaire de réaliser une entente, car une décision fondée sur le principe d'autorité risquerait de demeurer inefficace. Dans un esprit de générosité, caractéristique de la société africaine, il n'est pas rare d'ailleurs, nous dit-on que celui qui a obtenu un jugement à son profit renonce à le voir exécuter32(*).

Parce que pour condamner quelqu'un, il ne suffit pas qu'il soit l'auteur des faits, mais il faut qu'il soit coupable ; autrement dit en état de contrition devant ses actes.

3. Quelques fléaux à bien considérer la vigilance dans la justice :

a. Juge unique et la collégialité

Le juge unique a une action plus personnalisée et donc peut être plus responsable, alors que la collégialité par son anonymat relatif est plus protectrice33(*).

Le juge unique plus facilement spécialisé traite vite les dossiers dont il a la charge, mais la collégialité n'est pas en soi source de lenteur et offre des garanties évidentes34(*).

En définitive, je n'ai pas la prétention d'apporter une solution mettant fin à la controverse ; l'essentiel est la manière dont fonctionne la collégialité et la qualité du juge unique ou des juges délibérant ensemble. Mieux vaut sans doute un juge unique ou spécialisé techniquement très compétent qu'une collégialité alliant des juges maîtrisant moins bien le contentieux abordé. Mais à l'inverse, la richesse d'un vrai délibéré est irremplaçable35(*). Tout juge doit avoir une formation effective, il est l'oeil du peuple. La collégialité est très importante dans la justice en dépit de la composition du juge e paix du fait du slogan « du choc des idées jaillit la lumière » ; et avec le nombre impaire élevé l'emporte et fait foi.

b. La corruption

Le problème embarrassant c'est la corruption au sein même de la justice. Rien ne pouvait davantage affaiblir la légitimité de l'institution judiciaire que le soupçon : si les magistrats, les juges, ou les autres membres de l'appareil touchaient des pots-de-vin, cela mettrait évidement en cause leur impartialité. La précarité de leur situation a mis à rude épreuve la conscience professionnelle de bien des magistrats congolais. Ils sont mal payés, trop mal parfois pour pouvoir faire vivre leur famille. Corrompre le juge unique est plus facile que la collégialité dans la mesure où il est le seul qui a le dossier entre ses mains. C'est d'ailleurs le point focal de notre souci contre le pouvoir du juge de paix qui met en jeu les intérêts de la défense lorsque lui-même est partie au procès. Le corrompre par rapport à la collégialité qui demande beaucoup de mécanismes parce qu'il doit y avoir au moins trois opinions, et les trois juges sont sensés être au courant de toute manoeuvre.

En matière civile on peut encore admettre l'unicité du juge de paix d'autant que les parties seules diligentent l'action ; mais la matière pénale est très substantielle dans la mesure où elle nécessite beaucoup plus l'activeté du juge pour éviter le jugement inique et condamner un innocent, car, mieux vaut laisser cent délinquant dans la cité en liberté que condamner un innocent.

c. Les conditions de rémunération du personnel judiciaire

La faiblesse des rémunérations dans la profession judiciaire explique en partie la corruption, bien qu'elle n'en fût pas la seule, ni même la principale cause. Ainsi disait Robert de la Tanzanie : « la corruption est un corollaire des problèmes de rémunération au sein de la justice. On parle beaucoup de la corruption des agents situés aux échelons inférieurs. Ces gens sont très mal payés ; les cas de corruption qui nous sont rapportés concernent des gens qui sollicitent des pots-de-vin allant de trois mille à dix mille shillings (de trois à dix dollars). Ces sont des sommes très faibles. Il s'agit des gens qui, de toute évidence, essaient tout simplement de joindre les deux bouts. C'est le cas le plus courant ». Le problème se posait en termes analogues dans les pays voisins36(*).

Si donc leur maigre salaire leur permet de nourrir et vêtir leur famille et d'assurer l'éducation de leurs enfants, il leur faut aussi mettre quelque chose (argent) de côté pour leurs vieux jours.

Pour réduire la tentation des magistrats et autre personnel judiciaire d'améliorer leurs revenus en prélevant une dîme sur les justiciables, notre estime essentiel et d'augmenter leurs salaires. C'est d'ailleurs une mesure que le gouvernement doit appliquer de plus en plus aux fonctionnaires judiciaires qui ont reçu la mission ou l'un des pouvoirs de Dieu « de pouvoir juger », dont l'efficacité et la probité sont indispensables au bon fonctionnement de la justice.

Section 4. Le juge de paix garant ultime de la justice.

§1. Des tribunaux indigènes sur le ressort du juge de paix.

Dans cette section nous en fait parler du pseudo conflit de compétence qui ne cesse d'opposer le juge de paix, aux juges coutumiers du ressort de sa juridiction. Il existait au temps de la colonisation deux catégories de juridiction : les unes spécialisées dans l'application du droit coutumier, les autres appliquant le droit moderne. Cette dualité a été remise en question lorsque les pays d'Afrique sont devenus indépendants.

Il a paru choquant alors que l'on ait dans un même Etat deux espèces de justice, dont l'une était facilement regardée, à tort ou à raison, comme étant d'un type inférieur à l'autre. D'importantes lois sont intervenues, ici et là, pour reformer l'organisation judiciaire.

Ces reformes ont voulu intégrer les juridictions indigènes dans un système unitaire d'administration de la justice. Certains Etats ont supprimé directement les tribunaux coutumiers (Sénégal, côte d'ivoire, Mali, Burundi, Rwanda), d'autres Etats (Cameroun, Bénin, Congo, Gabon, Niger, Togo) ont maintenu, à titre provisoire les deux types de juridiction37(*).

Les juridictions indigènes apparaissaient structuralement comme des juridictions d'exception, alors qu'elles jugeaient en fait l'énorme majorité des litiges du droit privé, notamment toutes les causes intéressant les congolais. Cette situation, défendable dans la logique d'un régime colonial, devenait intolérable dans un pays indépendant où la juridiction est censée être organisée avant tout pour les nationaux, quitte à en accorder libéralement le bénéfice aux étrangers, hôtes du pays.

Cependant, le régime hérité du colonisateur a été maintenu intégralement jusqu'à la promulgation du code d'organisation judiciaire du 10 juillet1968 ; cette législation de la République maintient encore au titre transitoire l'ensemble de l'organisation antérieure, stigmatisée comme étant « périmée » dans le principe38(*).

Les tribunaux de paix établis progressivement dans toute la République à raison d'un au moins par ville et par territoire ; ils résorberont au fur et à mesure de leur installation des tribunaux de police et les tribunaux indigènes dont ils reprendront grosso modo les attributions39(*).

Les tribunaux indigènes, survivance de la dichotomie judiciaire instaurée dans la logique du régime colonial pour assurer aux « indigènes » une justice conforme à leurs coutumes, parallèle à l'organisation judiciaire du pouvoir colonisateur, sont maintenus à titre transitoire. L'intention du constituant mise en oeuvre par l'O.- L. du 10 juillet 1968 est de les résorber en une pyramide unique de juridiction exerçant le pouvoir judiciaire national40(*).

§2. La disparition de l'autorité judiciaire indigène.

Les droits modernes de l'Afrique peuvent bien reprendre certains éléments fournis par la tradition des droits coutumiers. Ils tendent inéluctablement, à répudier ce qui était l'essence même de ces droits coutumiers. C'est par motif de sauvegarder le droit coutumier pour sa bonne application que l'article 24 alinéa 3 du COCJ stipule «  le tribunal de paix siège au nombre d'un seul juge. Toutefois, il siège au nombre de trois juges dont deux assesseurs lorsqu'il y a lieu de faire application de la coutume ».

Ainsi, le recours aux assesseurs, notables reconnus par les populations locales elles-mêmes, qui siégeraient à côté d'un juge de carrière dans ces juridictions de proximité, est un moyen d'intégration culturelle qui ferait éviter les rejets. Les juges congolais, en effet, sont crédités de la prétention d'un savoir illimité et sont censés être tous des PIC DE LA MIRANDOLE : le même juge siège aujourd'hui au pénal, demain, il est retenu dans la chambre des affaires commerciales, le lendemain il est appelé à trancher un litige individuel du travail et enfin, la liste n'est pas limitée, chargé d'un dossier de successions. Le tout peut se passer au cours d'une même semaine41(*).

En effet, la pratique par le juge de paix de son pouvoir sur toute l'étendue de son ressort est limitée dans la mesure où certains chefs coutumiers continuent à trancher les litiges alors que le tribunal de paix est déjà constitué. C'est pourquoi, nous qualifions de récidivistes d'Etat congolais les juges coutumiers qui continuent à siéger là où le tribunal de paix est déjà établi, d'autant plus ils sont au service de ce dernier et doivent se conformer aux normes établies qui leur attribue les pouvoirs et les reprend.

LES TEXTES :

a. Conférence Nationale Souverain

L'acte n° 8/CNS/92 de la conférence nationale souveraine réunie à Kinshasa en 1992 recommandait que la compétence du tribunal de paix installé dans un chef lieu de territoire se limite uniquement dans le ressort de la cité dans lequel il est implanté, afin de laisser subsister, de manière transitoire, les tribunaux coutumiers. Le souci de ce forum était d'éviter justement des situations de vide judiciaire dangereux pour la paix sociale.

b. Arrêté Royal

Entre les juridictions indigènes et les tribunaux judiciaires, le conflit d'attribution est éliminé par la « prévention » du tribunal judiciaire sur la juridiction indigène (art. 17, A.R. du 13 mai 1938).

c. Article 163 du COCJ

Dans cet article le législateur a pensé ; tant que les tribunaux de paix ne sont pas installés, les tribunaux de ville, de territoire, de centre, de secteur et de chefferie gardent la compétence qui leur était attribuée par l'A.R de coordination du 13 mai 1938 modifié par des dispositions ultérieures (art 163 du COCJ). Au fur et à mesure que les tribunaux de paix sont créés, les juridictions dites « indigènes » du ressort perdent toute compétence.

§3. Mécanismes pour rétablir le juge de paix dans ses attributions.

A. Du chef traditionnel (disparition).

Deux axes paraissent possibles : soit, par une décisions d'autorité, l'administration déciderait de ne plus reconnaître les chefs coutumiers en n'entérinant plus le choix fait par les populations concernées. Et, dans ce cas, se proclamer chef coutumier relèverait de la marginalité, un hors-la-loi qui aurait maille à partir avec la justice. Soit alors, par dégoût, les gens jugeant de l'inutilité du pouvoir coutumier, ne lui accorderait plus de crédit : celui-ci, lentement, mais sûrement, finirait par s'éteindre. Il importe d'examiner la validité de ces deux propositions42(*).

Puisque les changements sont inévitables en ce domaine, la patience et la vigilance des gouvernants constituent les seules armes adéquates pour rendre les autorités traditionnelles vulnérables.

Que gagnerait-on à lutter contre l'autorité traditionnelle si la population elle-même ne croit pas qu'il s'agit d'une institution rétrograde et antidémocratique comme la qualifient certains auteurs ? La référence à la coutume persiste parce que la population y croit profondément. Nous lui appelons aussi à pouvoir s'intégrer consciemment dans la justice moderne.

B. Opinion publique et initiation au Droit

Si l'on voulait obtenir l'adhésion du public à l'institution judiciaire, il était essentiel de lui permettre d'acquérir une compréhension générale des grands principes du droit. Les tribunaux ne peuvent rien faire pour clarifier les ambiguïtés de la loi ou décider de la constitutionalité d'une pratique juridique tant qu'un justiciable n'avait pas porté l'affaire devant la justice. Et pour qu'ils s'engagent dans une telle démarche, il faut que les gens aient une notion générale du type de questions que les tribunaux sont fondés à traiter et sachent qu'ils ont droit à bénéficier eux-mêmes des services que ceux-ci étaient en mesure d'apporter43(*).

Le plus grand danger qui menace l'Etat de droit, c'est l'ignorance dans laquelle est le public de ses droits et des moyens de les faire respecter. Les gens ignorent la marche à suivre pour recourir à la justice. Pour que les tribunaux jouent efficacement leur rôle, il faut que les gens soient informés de leurs droits et libertés fondamentaux, tel qu'ils sont inscrits dans la constitution ; il faut aussi qu'ils aient connaissance des procédures mises à leur disposition pour revendiquer ces droits en cas de violation44(*).

Dans notre pays la RDC, la majeure partie du peuple, surtout dans les zones rurales, où le juge de paix est appelé à faire fonction du juge de proximité, ignore largement ces droits. Surtout en matière pénale, l'immense majorité des suspects qui sont quotidiennement arrêtés par la police les ignorent. Conséquence : la violation de ces droits ne faisant pas l'objet de plaintes, la justice ne peut ni s'en saisir ni redresser les torts.

REPROCHES ET CHOIX DU JUGE DE PAIX

L'un des reproches adressés aux juges actuels de tribunaux de paix est leur incompétence. Au départ, ne devaient être affectés comme juges de paix que les magistrats ayant déjà une grande expérience. C'est ainsi qu'on avait pensé essentiellement aux juges des Tribunaux de grande instance et aux conseillers près une Cour d'appel.

Avec le temps, ce critère ne semblait plus être d'application et aujourd'hui on en est arrivé à nommer, dans ces juridictions des magistrats jeunes, fraîchement sortis de la faculté de droit. Le besoin de confier la charge du juges de paix à des personnes expérimentées a conduit certains juristes à suggérer la nomination des anciens juges coutumiers qui s'étaient déjà révélés compétents et honnêtes dans leur mission mais cela après une période de recyclage45(*).

Le choix des juges de paix doit nécessairement tenir compte de la compétence et de l'expérience. D'abord parce que le juge de paix est appelé à travailler souvent comme seul juge de carrière de la juridiction. Même si l'on adoptait le principe de recourir aux assesseurs, le juge de paix restera toujours le seul juriste de la juridiction. Ensuite, ce juge est appelé à oeuvrer dans une juridiction éloignée autour de laquelle il n'existe aucune autre juridiction proche de même rang ou de rand supérieur pour bénéficier d'informations scientifiques utiles, ainsi que de l'échange d'expérience.

Il n'y a pas non plus de bibliothèques dans nos juridictions et parquets. De plus, il y a lieu de se référer à la nature de juridictions de proximité dont le fonctionnement efficace dépend de la personnalité du juge considéré comme une personne de prestige, sage, honnête, compétente et donc d'un certain âge.

Le suggérait le Professeur Matadi Nenga GAMANDA,  que la nomination des juges de paix suive les critères suivants :

ü Avoir été 5 ans au moins juge du tribunal de grande instance avec une meilleure cotation ;

ü Etre conseiller près une Cour d'Appel avec meilleure cotation ;

ü Etre jeune magistrat et avoir réussi à un stage de formation organisé par l'école de la magistrature comme juge de paix ;

ü Avoir été juge devant un ancien tribunal coutumier et avoir réussi une formation comme juge de paix.

Comme on le voit, il faudra que soit organisée une formation pour les futurs juges de paix compte tenu de l'importance sociale de ces juridictions. Cette formation sera assurée par l'école de la magistrature46(*).

CONCLUSION

Nous venons de parcourir dans ses grandes lignes la problématique du dédoublement fonctionnel du juge de paix et son impact sur la bonne administration de la justice, relative à la protection judiciaire et à la promotion d'un Etat de droit en RDC.

Nous signalons à nos lecteurs que le travail présenté n'a pu remédier toutes les causes faisant défi au juge de paix et juge coutumier pour une bonne impartialité et efficacité du système judiciaire. Toutefois, certaines pistes de solution ont été envisagées pour résorber et en définitif juguler cette pratique d'une justice à double vitesse où est fait constat dans le chef du juge de paix qui est partie au procès et faisant une dérogation au principe d'une justice équitable pour tous.

Le juge de paix peut avoir la latitude de vite apporter ou produire des preuves parce qu'il est le seul qui a conduit l'enquête ; son contrôle s'avère inexistant parce que dans le futur, comme partie au procès, il a la charge de produire ses preuves pour étayer les hypothèses, à charge à lui-même comme juge de les examiner, contrôler, valider, pour enfin de rendre un jugement ; conséquence que le prévenu se verrait toujours exposé à la condamnation d'autant que le juge ne peut être reproché d'avoir ou de n'avoir pas assez investigué ; à cet effet, il y a également inexistence d'équilibre entre l'accusation et la défense. Les principes « actori incumbit probatio » et « in dubio pro reo » sont battus en brèche par le fait de double casquette du juge de paix qui lui amène à intervenir au procès en tant que garant de l'action publique.

Examinant l'unicité du juge de paix dans la composition ; nous avons ainsi pu aboutir au constat amer suivant lequel la précarité de leur rémunération est la conséquence logique de sollicitation aux pots-de-vin, à la corruption que, paradoxalement, il y a tendance à rendre des jugements iniques, avons-nous dit contraires à l'équité.

Par rapport à cette fin, les juges de paix doivent donc savoir qu'ils ont une mission essentielle qui à préserver la paix sociale en rétablissant les équilibres rompus dans les rapports juridiques liant les différents partenaires de la société.

S'agissant du juge coutumier d'en temps qui continue à étouffer le juge de paix, nous réitérons que sa disparition pure et simple dans la scène juridique est effective dès lors qu'il y a installation d'un tribunal de paix sur le ressort où oeuvraient les tribunaux indigènes qui les résorbera au fur et à mesure, et enfin prendra en grosso modo leurs attributions. Et ce, en vertu de l'Arrêté royal du 13 mai 1938, le code d'organisation et compétence judiciaires en son article 163 ainsi que la conférence nationale souveraine de 1992.

Par ce motif, seul un Etat de Droit dans la perspective de reconstruction nationale est indispensable, susceptible d'offrir la garantie nécessaire à sécuriser et à promouvoir les congolais sans penchant. Nous pouvons y espérer si est seulement si les animateurs de la justice sont doués de la probité et d'une compétence certaine ; sans dispenser la sanction à tout celui qui contreviendrait ; pour en définitif juguler la justice à double vitesse.

* 1 KISANGANI ENDANDA, méthode de travail scientifique, G1 Droit, UNIKIS-CUEG, 2OOO-2OO1, inédit.

* 2 FONIER (D.), le juge d'instance dans la société française, Paris, Economica, 1993, p. 43 cité par Matadi Nenga GAMANDA in la question du pouvoir judiciaire en République Démocratique du Congo, Droit et idées nouvelles, Kin, 2001, p. 351.

* 3 Idem

* 4 PERROT (R.), Institutions judiciaires, 6è éd., Montchrestien, 1994, p. 108, cité par Matadi Nenga op. cit, p. 351.

* 5 Matadi Nenga Gamanda, op. cit, p. 351

* 6 Lire article 22 du code d'organisation et compétence judiciaires.

* 7 Art. 24 du cocJ.

* 8 Art 17 du cocj

* 9 Art. 110 du cocj

* 10 Lire les articles 86 à 90 du COCJ.

* 11 J. VINCENT et GUINCHARD, la justice et ses institutions, 4 éd., Paris, Dalloz, 1996, p. 674.

* 12 J. VINCENT et GUINCHARD, lexique de termes juridiques, vo Instance ; no 468 et s.

* 13 A. LUSUMBE, procédure pénale, G2 Droit, UNIGOM, 2006-2007, inédit.

* 14 VINCENT et GUINCHARD ; op. cit ; p. 677.

* 15 Idem, p. 680.

* 16 A. LUSUMBE, op. cit.

* 17 Décret du 06 Aout 1959 portant code de procédure pénale, art 11-14.

* 18 Sur le pouvoir d'action du MP, voir. L'art. 138, al. 2 du code judiciaire.

* 19 Art 138, al. 3, op. cit.

* 20 M. KADOGO, organisation et compétence judiciaires, G2 Droit, UNIGOM, 2007-2008, inédit.

* 21 Art. 83 du COCJ.

* 22 G. LEVASSEUR, A. CHAVANNE, J. MONTREUIL et B. BOULOC, droit pénal général et procédure pénale, 13è éd., Dalloz, 1999, p. 209.

* 23 Idem

* 24 A. RUBBENS, Droit judiciaire congolais, Tome I, Bruxelles, 1970, p. 105.

* 25 Idem.

* 26 Nyabirungu Mwene SONGA, droit pénal général congolais, Kin, DES, 1989, p. 378.

* 27 Déclaration universelle des droits de l'Homme, art. 11, point 1 du 10 décembre 1948.

* 28 A. LUSUMBE, op. cit.

* 29 Kitoga KASILENGE, procédure civile, G2 Droit, UNIGOM, 2007-2008, inédit.

* 30 A. RUBENS. op. cit., p. 186.

* 31 VINCENT et GUINCHARD, la justice et ses institutions, Paris, Dalloz, 1996, p. 674.

* 32 J. VAN VELSEN, « procedure informality, Reconciliation and comparisons », in M. GLUCKMAN, Ideas and Procedures in African Customary Law, 1960. cite par René DAVID in Les grands systèmes de droit contemporains, 11è éd. ; p. 443.

* 33 C. BOLZE et P. PEDROT, les juges uniques, Paris, Dalloz, 1996, p. 91.

* 34 Idem.

* 35 Ibidem.

* 36 Jennifer A. WIDNER, construire l'Etat de Droit, Paris, 2003, p. 320.

* 37 D. S. RICHARDSON, « Whither lay justice in Africa ?, in M. GLUCKMAN, éd., Ideas and Procedures in African Customary Law, 1969. cite par René DAVID in les grands systèmes de droit contemporains, 11è éd., p. 443.

* 38 A. RUBBENS ; «  le pouvoir, l'organisation et la compétence judiciaires », Tome I, Kin, 1970, p. 1661-76.

* 39 Idem.

* 40 Voir exposé des motifs de l'O.- L. du 10 juillet 1968, Mon.,1968, n° 14, p. 1340 1343. cité par A. RUBBENS, p. 20.

* 41 Matadi Nenga GAMANDA, la question du pouvoir judiciaire en Rép. Dém. du Congo, Kin, Droit et idées nouvelles, 2001, p. 346.

* 42 E. BOSHAB, Pouvoir et droit coutumiers à l'épreuve du temps, Kin, droit africain, 2007, p. 172.

* 43 Jennifer A. WIDNER, op. cit., p. 325.

* 44 Idem.

* 45 KALAMBAY (G.), KAPETA NZOVU (H.) et LAMY (E.), « Analyse statistique de l'activité du tribunal de la ville de L'shi », in R.J.Z., n° 1, 1969, p. 113. cité par Matadi Nena Gamanda in la question du pouvoir judiciaire en Rép. Dém du Congo, Droit et idées nouvelles, Kin, 2001, p. 352.

* 46 Matadi Nenga GAMANDA, op. cit., p. 356.






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