WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des standards internationaux

( Télécharger le fichier original )
par Zied LOUKIL
Université du 7 novembre Carthage - Diplôme d'expert comptable 2010
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Sous chapitre 2 : Les réformes engagées post crise financière

La crise financière et économique actuelle est sans doute la crise la plus grave depuis la seconde guerre mondiale.

Certes, plusieurs crises d'origine et d'ampleur différentes se sont succédées depuis299, mais la crise actuelle est mondiale et le système bancaire était au coeur des difficultés300.

En tant que principale source de financement de l'économie et de son développement, tout dysfonctionnement dans le système bancaire peut altérer la confiance des opérateurs économiques, et déboucher sur un risque systémique.

La crise financière et économique actuelle peut être résumée en plusieurs étapes :

· Le retournement du marché immobilier américain au cours du 1er semestre 2007, la multiplication des incidents dans le secteur bancaire américain liés aux premières défaillances des crédits hypothécaires dits « subprimes », et premières turbulences financières,

· L'internationalisation des difficultés financières au cours du 2nd semestre 2007, et la propagation de la crise à l'ensemble des segments du marché financier en 2008,

· Le ralentissement brutal de la croissance mondial au cours du 2nd semestre 2008, généralisation de la crise de confiance, pertes exceptionnelles, hausse de la volatilité sur les marchés financiers et multiplication des défaillances financières,

· La faillite de Lehman Brothers en septembre 2008 et nette aggravation de la crise sur les marchés financiers et sur la liquidité sur le marché interbancaire.

Sur l'année 2008, les cours des indices boursiers ont fortement chuté (-38% aux Etats-Unis d'Amérique, de -49% en Europe et du -42% en Asie) et la capitation boursière détruite est chiffrée à environ 26 000 milliards de dollars américains (environ 2 fois le PIB des Etats-Unis d'Amérique ou 14 fois celui de la France)301.

· L'intervention coordonnée des états et des banques centrales pour atténuer les effets de la crise notamment a travers des apports massifs de liquidités aux systèmes bancaires, la baisse des taux directeurs, voire la participation à des opérations de sauvetage,

· Et l'accélération des réflexions sur les réformes de la régulation financière internationale.

L'ampleur et la gravité de cette crise et de ses impacts économiques et sociaux, ont suscité une
réaction sans précédent à l'échelle internationale, pour comprendre en profondeur les défaillances et

299 : Dont les principales sont les crises provoquées par les chocs pétroliers de 1973 et 1979, la crise économique asiatique de 1997, la crise financière russe de 1998, la crise économique argentine de 1998 à 2002, l'éclatement de la bulle Internet en 2000, l'affaire Enron et les attentats du 11 septembre en 2001 et la crise des « subprime » qui a démarré aux Etats-Unis d'Amérique et qui a débouché sur la crise financière et économique actuelle.

300 : Avis présenté par Mme Monique Bourven et M. Yves Zehr, « La crise bancaire et la régulation financière », Rapport du Conseil économique, social et environnemental (CESE), février 2009, page 11.

301 : Statistiques extraites du Rapport du Conseil économique, social et environnemental (CESE), « La crise bancaire et la régulation financière », février 2009, page 9.

Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des standards internationaux

les dysfonctionnements qui ont conduit à la crise, et définir les mesures réglementaires qui s'imposent pour une meilleure régulation bancaire et financière mondiale.

Dans le cadre de ce sous chapitre, nous allons présenté et analysé les principales critiques apportées au dispositif réglementaire et prudentiel en vigueur au moment de la crise, ainsi que les principales réformes réglementaires engagées et/ou en cours de mise en place, dans le domaine comptable, prudentiel et de supervision bancaire.

Section 1 : Les normes comptables

Les normes comptables internationales (IFRS) et américaines (US GAAP), et en particulier le principe de « fair value », son périmètre d'application et ses modalités d'estimation, ont fait l'objet de fortes critiques voire ont été accusées par certaines parties d'être un facteur d'accélération et d'amplification de la crise.

Certes, la crise financière n'a pas été déclenchée par les normes comptables, mais elle a mis en évidence certaines limites des normes internationales et américaines qui nécessitent des améliorations.

1.1. Les limites des normes comptables

Avant de présenter les principales critiques formulées envers les normes comptables, il nous semble
judicieux de rappeler le rôle informatif de la comptabilité qui est de « fournir la description la plus fiable

possible de la situation patrimoniale d'une entreprise, à un instant donné, dans l'environnement quiprévaut au moment de l'arrêté des comptes »302.

La crise financière a suscité un certain nombre de débats sur les normes comptables, qui se sont concentrés autour :

· des règles de comptabilisation et d'information financière relatives aux entités hors bilan,

· des modalités d'application du principe de juste valeur dans un contexte de crise et/ou d'illiquidité de marché, et son caractère pro cyclique, amplifié par l'application des accords de Bâle II,

· de l'insuffisance de l'information financière communiqué au marché, en particulier sur les modalités de valorisation comptable et sur les risques liés aux entités hors-bilan,

· et de l'amélioration du processus de normalisation comptable, notamment en matière d'homogénéisation des normes IFRS et US GAAP, de collaboration des normalisateurs comptables avec les régulateurs prudentiels, en particulier le couple IASB / Comité de Bâle, et la simplification des normes comptables de manière générale.

1.1. 1. Les entités hors bilan

Le mécanisme de titrisation des prêts hypothécaires immobiliers, dits de « subprime », a permis aux banques américaines de loger le risque de crédit dans des entités hors bilan, non soumises aux mêmes exigences réglementaires que celles applicables aux banques.

Selon de nombreux experts, le recours à ces entités hors bilan par les banques américaines est une pratique qui a largement contribué à la crise des financements immobiliers « subprime »303, et par conséquent à la crise financière et économique mondiale.

D'un point de vue comptable, la titrisation modifie le traitement du risque lié à l'actif, désormais
comptabilisé en portefeuille de négociation (trading book) et non plus en portefeuille bancaire (banking

302 : Lionel Escaffre, Philippe Foulquier et Philippe Touron, « La confusion entre le rôle de la comptabilité et celui du régulateur prudentiel à conduit à des amendements contre-productifs », Economie et Comptabilité, n°241, avril 200 9, pages 19 et 20.

303 : Thomas Maurice, « Le FASB va limiter les engagements hors-bilan des banques américaines », L'Agefi, édition du 20 mai 2009, page 4.

Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des standards internationaux

book). Le risque généré par l'actif n'est plus considéré comme un risque de crédit, mais comme un risque de marché.

Les exigences en fonds propres relatives au risque de marché associé à ce portefeuille de négociation sont calculées sur la base de la méthode de la Value at Risk (VaR) qui a démontré ses limites en période de crise.

D'un point de vue réglementaire, la titrisation a permis de réduire les exigences en fonds propres sur le risque de crédit rattaché aux prêts hypothécaires immobiliers, transformé en risque de marché, alors que le risque reste identique d'un point de vue marco économique.

Le mécanisme de titrisation a constitué une astuce comptable qui a permis aux banques américaines de dissimuler la large expansion des prêts immobiliers, vis-à-vis des régulateurs et des investisseurs.

Les limites des normes FASB en matière consolidation des entités hors bilan et d'information financière au titre de ces entités et des risques qu'elles portent, ont contribué à la perte de traçabilité et aux difficultés d'évaluation du risque porté par ces entités.

1.1.2. Le principe de « juste valeur »

La « juste valeur » est un principe commun aux normes IFRS et US GAAP qui consiste à évaluer obligatoirement ou sur option, certaines catégories d'actifs et de passifs financiers, dont la variation de valeur affecte le résultat ou les capitaux propres.

Le paragraphe 9 de la norme comptable IAS 39 «Instruments financiers : comptabilisation et évaluation» définit la juste valeur comme étant « le montant pour lequel un actif pourrait être échangé, ou un passif éteint, entre des parties bien informées, consentantes, et agissant dans des conditions de concurrence normale ».

Le principe de juste valeur est accusé aujourd'hui de permettre de gonfler les performances en période de croissance, et d'entraîner un cercle baissier en cas de crise engendrant ainsi un phénomène de défiance.

En effet, la combinaison du principe de « juste valeur » avec les normes prudentielles Bâle II, a crée un effet procyclique à la baisse lors de la crise financière.

Les normes prudentielles Bâle II définissent un niveau minimal de fonds propres des banques en fonction des risques de leurs activités.

En période de crise, les dépréciations constatées sur les actifs financiers affectent directement les fonds propres des banques d'une part, et la hausse du risque de crédit et du risque de marché induite par le contexte de crise et la dégradation des notations, augmente mécaniquement les exigences en fonds propres, d'autre part.

Cette situation a obligé les banques à céder leurs actifs financiers à des prix largement en dessous de leur valeur, qui a eu une double conséquence :

· le prix de vente, considéré comme le prix de marché, devient la juste valeur pour les autres banques, qui doivent à leur tour enregistrer de nouvelles dépréciations comptables, ce qui réduit par conséquent leurs fonds propres,

· la baisse des fonds propres amène les banques à céder tout ou partie de leurs actifs financiers pour les reconstituer dans un objectif de respect des normes prudentielles, ce qui amplifie la baisse de la valeur des actifs.

La crise de confiance et de liquidité sur le marché interbancaire a accentué les effets de cette spirale destructrice de valeur.

La forte pression sur les fonds propres des banques a limité sensiblement leur capacité d'octroi de crédits et de financement de l'économie.

Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des standards internationaux

La gravité de la situation sur les marchés bancaires et financiers, et ses répercussions négatives sur l'économie réelle, ont rendu indispensable l'intervention des Etats et des banques centrales pour restaurer la confiance et limiter les dégâts, à travers des injections massives de liquidités, la baisse des taux d'intérêt et le sauvetage de certains opérateurs financiers en difficultés.

Les principales étapes de cheminement de la crise sont présentées dans le schéma suivant304:

Les défenseurs des normes comptables ont rappelé le rôle informatif de la comptabilité qui ne constitue qu'un outil de mesure et d'évaluation de l'activité économique et non pas un outil de régulation du comportement des banques305.

Par ailleurs, ces derniers estiment que le principe de juste valeur a permis de détecter plus tôt la situation réelle des acteurs sur les marchés, de prendre conscience de l'ampleur de la crise et de mettre en place rapidement les mesures nécessaires de sauvetage.

Le principe de juste valeur ne constitue donc qu'un outil de mesure qui est censé traduire de manière pertinente et fiable la valeur réelle d'un actif ou d'un passif financier à un instant donné, en le situant dans son marché ou dans son environnement.

Le président du FASB, M. Robert Herz a précisé en décembre 2008 :« Le concept de juste valeur, quia été élaboré pour amener la transparence, a été vilipendé comme un traître par certains, et porté aux nues par d'autres, comme un sauveur révélant les problèmes à point nommé ».

Dans un rapport rendu public sur les normes comptables et leurs conséquences sur la crise financière
en octobre 2009306, son auteur M. Didier Marteau, professeur à l'ESCP précise que le débat actuel sur

304 : Banque de France, Direction de la Stabilité Financière, « La crise financière », Documents et débats, n°2, février 2009, page 12.

305 : Interview avec Philippe Danjou, membre du board de l'IASB, « Les normes comptables sont-elles des outils de régulation ? », Economie et Comptabilité, n°241, av ril 2009, pages 14 et 15.

Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des standards internationaux

la responsabilité des normes comptables IFRS/US GAAP dans l'accélération de crise repose sur une ambiguïté majeure qui est celle de l'assimilation implicite de la juste valeur au prix du marché.

Les normes comptables IFRS et US GAAP ne préconisent pas une application aveugle du prix de marché, qui reste conditionnée à l'existence d'un marché actif.

La norme IAS 39, AG 71 précise que « Un instrument financier est considéré comme coté sur un marché actif si des cours sont aisément et régulièrement disponibles auprès d'une bourse, d'un courtier, d'un négociateur, d'un secteur d'activité, d'un service d'évaluation des prix ou d'une agence réglementaire et que ces prix représentent des transactions réelles et intervenant régulièrement sur le marché dans des conditions de concurrence normale ».

Dans un contexte de crise, l'application réfléchie des normes comptables aurait pu conduire à considérer que les prix de marché n'étaient pas la valeur « juste » à retenir, et qu'en absence d'un marché actif, le référentiel IFRS renvoie à un consensus de fait des acteurs307.

De nombreux cas d'abus dans l'application du principe de juste valeur ont également été constaté, puisqu'une application élargie de ce principe a permis aux banques de dégager des résultats significatifs en période de croissance.

A noter que le G20 qui s'est tenu le 2 avril 2009 à Londres, a abordé le sujet des normes comptables et conformément aux recommandations du FMI, n'a pas remis en cause le cadre d'application de la juste valeur, tout en soulignant que la détermination de la juste valeur des instruments financiers doit tenir compte de sa liquidité et de son terme de détention308.

La vraie question serait donc la suivante : quelles sont les modalités de détermination de la juste valeur, en particulier dans un contexte de crise ou d'illiquidité des marchés ?

Par ailleurs, la combinaison du principe de « juste valeur » avec les normes prudentielles de Bâle II semble avoir eu clairement des effets procycliques. Il est donc crucial que les règles comptables et prudentielles soient cohérentes et compatibles, et doivent être abordées de façon combinée309.

La résolution de cette problématique passe inévitablement par la réforme du processus de normalisation comptable.

1.1.3. L'information financière

L'information financière publiée par les établissements financiers en pleine crise, notamment en ce qui concerne les méthodologies et les modalités d'évaluation des instruments financiers complexes et des risques encourus, en particulier sur les produits de titrisation, n'a pas permis de répondre aux inquiétudes et à la défiance des places financières.

La récente application des normes IFRS, les divergences des pratiques d'un pays à un autre et l'absence de convergence entre les normes IFRS et US GAAP, ont fortement nuit à la comparabilité et à l'analyse de l'information financière.

Par ailleurs, la non prise en compte des risques associés aux entités hors bilan a accentué la perte de confiance des investisseurs dans le secteur bancaire.

306 : Didier Marteau et Pascal Morand, « Normes comptables et crise financière : propositions pour une réforme du système de régulation comptable », Rapport établi dans le cadre de la mission diligenté en août 2009 par Christine Lagarde, ministre française de l'économie et des finances sur la responsabilité des normes dans la crise financière, octobre 2009, page 19.

307 : Benoît Pigé, « Le faux procès des normes comptables », Les Echos, n°20443 du 12 juin 2009, page 15.

308 : Lionel Escaffre, « La réforme du système financier : quelles conséquences pour les normes comptables internationales ? », Option Finance, n°1031 du 2 juin 2009, page 29.

309 : René Ricol, « Rapport sur la crise financière », établi dans le cadre de la mission confiée par le Président de la République Française, Nicloas Sarkozy, septembre 2008, Pages 58 et 61.

Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des standards internationaux

Le rapport sur la crise financière établi par René Ricol, recommande la prise de plusieurs mesures afin de combattre l'opacité de l'information financière fournie au public, garantissant ainsi le bon fonctionnement des marchés et la fluidité des échanges.

1.1.4. La normalisation comptable

L'IASB a travers les normes IFRS, a permis d'accomplir des progrès considérables en matière d'harmonisation comptable internationale au cours des cinq dernières années310, ce qui a permis « d'améliorer la visibilité de la situation de bon nombre d'acteurs et alerté plus vite sur les risques encourus », d'après M. Philippe Danjou, membre du board de l'IASB311.

La crise financière et économique a constitué le véritable premier test pour les normes IFRS et a permis d'identifier les principaux travaux à entamer par l'organe de normalisation comptable internationale, à savoir ;

· la poursuite de l'harmonisation des normes IFRS et des US GAAP,

· et le renforcement de la base institutionnelle de l'IASB et l'amélioration de la participation des parties prenantes, notamment les régulateurs prudentiels, dans le processus de normalisation comptable.

D'autres critiques ont été apportés au manque de réactivité de l'IASB face aux ajustements comptables auxquels n'a pas hésité à procéder en avril 2009 le FASB américain312.

En effet, et malgré les efforts d'harmonisation comptable accomplis entre l'IASB et le FASB au cours des dernières années, un certain nombre de divergences subsistent encore, en matière de définition de la juste valeur, des outils de mesure de la juste valeur, des modalités de reclassement des actifs financiers d'une catégorie à une autre et d'information financière (Cf. paragraphe précédent).

Ces divergences ont alimenté la défiance des acteurs sur les marchés bancaires et financiers et ont amplifié la distorsion de concurrence des banques européennes par rapport aux banques américaines313.

Par ailleurs, l'amélioration du processus de normalisation implique le renforcement de la base institutionnelle de l'IASB, notamment en associant d'avantage les parties prenantes et plus particulièrement les régulateurs (comité de Bâle, régulateur prudentiel bancaire, banques centrales...) et en développant les tests d'impact des nouvelles normes.

Tout l'enjeu pour l'IASB est de renforcer ses pouvoirs tout en préservant son indépendance par rapport au pouvoir politique et sa crédibilité à l'échelle internationale face au FASB.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire