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Analyse juridique de l'infraction d'enrichissement illicite et la problématique de sa répression en droit pénale burundais

( Télécharger le fichier original )
par Sadate Steven et Marthe NGABISHENGERA et NDIKURIYO
Université Martin Luther King - Burundi -  Licence en droit 0000
  

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« La Science et la FACULTE DE DROIT

 
 
 

REPUBLIQUE DU BURUNDI

UNIVERSITE MARTIN LUTHER KING

Sagesse au service de la Jeunesse »

 

ANALYSE JURIDIQUE DE L'INFRACTION
D'ENRICHISSEMENT ILLICITE ET LA
PROBLEMATIQUE DE SA REPRESSION
EN DROIT PENAL BURUNDAIS

Sous

la direction de :

par :

NDIKURIYO Marthe

et

NGABISHENGERA Sadate Steven

Mémoire présenté

publiquement

du grade de Licencié

et défendu

en vue de l'obtention en Droit

M.A. Pierre Claver NKESHIMANA

Bujumbura, août 2013

 

i

DEDICACES

A ma regrettée mère,

A mon cher père,

A mon cher époux, NDAYISABA Godefroid, A nos chers enfants, Chris Aymar, Don Danel, Queen Lys Chressie, Eden Edgar

A mes frères et soeurs,

NDIKURIYO Marthe.

A mon cher père, A ma chère mère, A ma chère épouse, KANYAMUNEZA Donagine, A notre fille, AKEZA Schymen Alpha.

NGABISHENGERA Sadate Steven.

ii

REMERCIEMENTS

Ce travail de mémoire est le fruit des efforts de plusieurs personnes à qui nous voudrions exprimer nos sentiments de reconnaissance.

Principalement et avant tout, à Dieu, le Tout Puissant en témoignage de notre reconnaissance infinie pour son amour, son pouvoir et sa fidélité.

Nos remerciements s'adressent à nos pères et mères qui ont tout fait pour que nous fréquentions l'école.

Nous remercions également nos éducateurs de l'école primaire jusqu'à l'université pour la formation tant humaine que scientifique qu'ils nous ont donnée.

Nous tenons à remercier d'une façon particulière Monsieur Pierre Claver NKESHIMANA, notre Directeur de Mémoire qui s'est donné corps et âme pour que ce travail puisse aboutir. Ses conseils avisés, ses nombreuses remarques et sa très grande disponibilité ont éclairé cette route et grandement contribué à la concrétisation de ce travail. Son amour du travail et ses qualités scientifiques nous guideront toujours.

Nos remerciements vont aussi au personnel des différentes bibliothèques du Ministère de la justice, de l'Université du Burundi, du Centre d'Etudes et de Documentations Juridiques ainsi que le personnel du Centre d'Information des Nations Unies pour le Burundi qui ont mis à notre disposition la documentation nécessaire pour la réalisation de ce travail.

Nous remercions les acteurs de lutte contre la corruption en général et l'enrichissement illicite en particulier qui nous ont fait part de leurs opinions tout en nous fournissant des informations et données nécessaires pour mener ce travail au complet.

Enfin, que toutes nos parentés, nos amis et toutes nos connaissances qui de près ou de loin ont contribué pour la réalisation de ce travail, trouvent ici l'expression de notre profonde gratitude.

iii

PRINCIPALES ABREVIATIONS

Art. : Article

B.O.B. : Bulletin Officiel du Burundi

BSAC. : Brigade Spéciale Anti-corruption

CDBA : Commission de Déclaration de Biens et Avoirs,

CEDJ : Centre d'Etudes et de Documentations Juridiques

CELAM. : Conseil Episcopal Latino-américain

CNUCC. : Convention des Nations Unies Contre la Corruption

Coll. : Collections

Ed. : Edition

GOPAC : Global Organization of Parliamentarians against Corruption

GRADIS : Groupe de Recherche et d'Appui au Développement des Initiatives Démocratiques

GRECO : Groupe d'Etats Contre la Corruption

IBM : Institut de la Banque Mondiale

IFES : International Foundation for Electoral Systems

(Fondation Internationale pour les Systèmes Electoraux)

N° : Numéro

O.N.G. : Organisations non gouvernementales

O.N.U. : Organisation des Nations Unies

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement

Op.cit. : Opere citato (ouvrage déjà cité)

p. : Page

P.U.F. : Presses Universitaires de France

PNUD. : Programme des Nations Unies pour le Développement

pp. : De la page telle à la page telle autre

T.G.I. : Tribunal de Grande Instance

U.B : Université du Burundi

U.M.L.K. : Université Martin Luther King.

Vol. : Volume

www : World Wide Website

1

INTRODUCTION GENERALE

L'enrichissement illicite en tant qu'infraction connexe à la corruption constitue une menace pour l'humanité toute entière en général et pour le Burundi en particulier. Les Etats cherchent les moyens nécessaires pour combattre le phénomène et le Burundi essaie de fournir ses efforts pour combattre ce fléau bien qu'il soit souvent critiqué pour les pratiques de corruption qui y sévissent.

Les différentes incriminations et les sanctions prévues dans la législation pénale burundaise ne parviennent pas à éradiquer le fait surtout que de plus en plus les fortunes injustifiées s'observent à travers tout le pays. Comme le constate l'International Crisis Group, l'accès à la haute fonction publique et à ses avantages ainsi que le contrôle des marchés publics et des administrations financières se perçoivent comme une voie loyale de s'enrichir.1

Le dernier classement du Transparency International2, place le Burundi au 7ème rang des pays les plus corrompus au monde, sur un total de 176 pays, avec une note de 1.9 sur 10.

L'inclusion de l'enrichissement illicite dans la répression de la corruption se justifie par le fait que la corruption est une infraction astucieuse. En effet, la preuve de négociation entre le corrompu et le corrupteur ainsi que le pacte de corruption sont difficilement rapportés3, mais peuvent se manifester par l'immense richesse d'un agent public en dépit de son salaire officiel modeste. L'enrichissement illicite constitue ainsi un signe indicateur et indéniable de corruption dans un pays.

1International Crisis Group, Burundi : La crise de corruption, Rapport Afrique N° 185, 21 mars 2012, p.6 2Cfr Transparency International, Rapport d'Indice de perception de corruption, 5 décembre 2012, Berlin, p.3. 3ERIC D., La responsabilité pénale des agents publics, 1ère éd, PUF, 108 Boulevard Saint Germain 75006, Paris, 1998, p.p.18-19.

2

Un fonctionnaire, un mandataire politique par exemple peut, à quelques mois de service être en possession de biens meubles et immeubles dont la valeur est de loin disproportionnelle à son revenu légitime. L'incrimination du fait d'enrichissement illicite est donc une façon d'enrayer la corruption d'une manière qui soit pratique.

L'esprit d'incrimination du fait d'enrichissement illicite se lit dans la constitution de la République elle-même. En effet, l'article 69 de la constitution burundaise en vigueur dispose : «Les biens publics sont sacrés et inviolables. Chacun est tenu de les respecter scrupuleusement et de les protéger. Chaque Burundais a le devoir de défendre le patrimoine de la nation. Tout acte de sabotage, de vandalisme, de corruption, de détournement, de dilapidation, ou tout autre acte qui porte atteinte au bien public est réprimé dans les conditions prévues par la loi».4

C'est pour venir à bout de ces actes que le Burundi se joint à la communauté internationale en incriminant l'enrichissement illicite. Le Burundi fait partie de plusieurs conventions dont la Convention des Nations Unies Contre la Corruption (CNUCC) et la Convention de l'Union Africaine sur la Prévention et la Lutte Contre la Corruption qui interdisent les actes de corruption en général et d'enrichissement illicite en particulier. Le Burundi fournit un effort louable du moins en mettant en place le cadre juridique et institutionnel de lutte contre l'enrichissement illicite.

4 Loi n°1/ 010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la constitution de la République du Burundi, art.69, in B.O.B. n° 3 ter /2005.

3

On peut donc mener une critique sur la politique criminelle burundaise face à l'infraction d'enrichissement illicite au regard du droit en vigueur. Il est question ici de voir tous les moyens mis en oeuvre avant la commission de l'infraction jusqu' à la sanction.

D'emblée, nous ne pouvons oublier que la politique criminelle est « l'ensemble des moyens qu'un Etat emploie pour lutter contre la criminalité»5. Delmas Marty Mireille, elle, la considère comme «l'ensemble des procédés par lequel le corps social organise la réponse au phénomène criminel».6Son but essentiel est le maintien de l'ordre social.

Le cadre juridique et institutionnel en place au Burundi suffit-il pour dire qu'il lutte effectivement contre ce phénomène? Le Président burundais a déclaré une guerre contre ce fléau: « Pour que le Burundi soit un havre de paix et de développement pour tous, nous devons changer de comportement. Nous allons consolider la Bonne Gouvernance. Nous proclamons déjà la Tolérance zéro à tous les coupables d'actes de corruption, de malversations économiques et d'autres infractions connexes ». 7

Nous constatons qu'au-delà du discours officiel, cette lutte contre l'enrichissement illicite se caractérise par un bilan mitigé. Cela se démontre par la quasi impossibilité d'exercer la poursuite de certaines personnes alors que des soupçons et des indications de fortunes injustifiées par leurs revenus légitimes se lisent.

5 LEVASSEUR G., Droit pénal général complémentaire, Alexandre Cote, Paris, 1960, p.213.

6 DELMAS-MARTY M., Les grands systèmes de politique criminelle, coll. Thémis, PUF, Paris, 1992, p.433.

7 Extrait du discours prononcé par SE. M. Pierre NKURUNZIZA à l'occasion de la cérémonie son investiture en tant que Président élu de la République du Burundi, le 26 août 2010 publié en ligne : www.presidence.bi/spip.php?, visité le 17/02/2013.

4

Nous avons un double intérêt qui a motivé notre choix. La première préoccupation consiste à l'analyse des moyens dont dispose l'Etat burundais notamment le cadre juridique et institutionnel et de savoir s'ils suffisent pour lutter efficacement contre le phénomène longtemps décrié. La seconde préoccupation est d'ordre social et nous permet de voir si la nouvelle infraction inspire crainte et pousse les individus à changer de comportements pour autant dans la gestion de la chose publique.

Notre intérêt personnel dans ce travail réside dans le fait qu'il permet d'approfondir nos connaissances en matière de corruption en général et d'enrichissement illicite en particulier quant aux méfaits de celle-ci dans les différents domaines de la vie nationale. Notre objectif est d'éclairer et d'assister le législateur burundais et les institutions qui oeuvrent dans la lutte contre le phénomène de corruption en général et d'enrichissement illicite en particulier pour mieux réussir la lutte et faire asseoir un Etat de droit.

Notre travail de fin d'études universitaires porte sur l' « Analyse juridique de l'infraction d'enrichissement illicite et la problématique de sa répression en droit pénal burundais »

Notre étude est menée en trois chapitres :

Le premier chapitre se consacre aux « Généralités sur l'infraction d'enrichissement illicite ».Nous parlons successivement de la notion générale sur le concept de l'enrichissement illicite où nous le distinguons des autres notions connexes, nous montrons la spécificité de l'infraction d'enrichissement illicite ainsi que les éléments constitutifs de l'infraction d'enrichissement illicite avant de parler de ses causes et conséquences.

5

Le deuxième chapitre concerne « la prévention de l'infraction de l'enrichissement illicite » où nous étudions successivement des actions préventives étatiques, une occasion pour parler de la déclaration des biens et les personnes qui en sont assujetties, les biens à déclarer et les organes compétents pour recevoir ces déclarations. Nous montrons aussi les actions menées par les organes non étatiques à savoir le rôle de la société civile et les médias dans la lutte contre l'enrichissement illicite.

Le troisième chapitre porte sur la répression de l'infraction d'enrichissement illicite où nous voyons la détection de l'infraction d'enrichissement illicite, des organes de répression et leurs compétences. Il est également question des sanctions et des obstacles rencontrés quant à l'efficacité de la répression de cette infraction.

Notre travail se termine par une conclusion générale dans laquelle quelques recommandations sont émises pour une lutte efficace contre l'infraction d'enrichissement illicite.

6

CHAPITRE I : GENERALITES SUR L'INFRACTION

D'ENRICHISSEMENT ILLICITE

Sous ce premier chapitre nous dégageons successivement les notions générales sur l'enrichissement illicite dans sa première section où nous donnons quelques définitions, les éléments constitutifs de l'infraction de l'enrichissement illicite et les spécificités de celle-ci. Les notions connexes à l'infraction d'enrichissement illicite occupent la deuxième section avant de parler de ses causes et ses conséquences dans la troisième section.

Section I. Notions générales sur le concept de l'enrichissement illicite

Toute augmentation des biens du patrimoine doit être justifiée par des ressources légitimes faute de quoi elle est suspecte et constitue une menace à la société. Les auteurs des différentes définitions données à l'enrichissement illicite convergent au caractère de celui-ci qui est une absence de justification des biens nouvellement acquis.

Les instruments internationaux qui luttent contre le fait d'enrichissement illicite ont été ratifiés par le Burundi et le fait a été érigé en infraction par le législateur pénal burundais. Le fait réunit tous les éléments requis pour toute infraction et présente ses spécificités.

§.1 Définitions

Etymologiquement, le terme «illicite» vient du mot latin «illicitus», l'adjectif qui désigne ce qui n'est pas permis par la loi ou la morale. L'enrichissement illicite est un concept qui désigne le fait de s'enrichir par des moyens contraires

7

à la loi.8 D'habitude, la notion est employée pour faire allusion aux fonctionnaires publics qui profitent de leur pouvoir et de leur autorité pour réaliser des activités illégales ou qui obtiennent de l'argent grâce à des pots-de-vin.

Dans la CNUCC, l'enrichissement illicite est défini comme : «une augmentation substantielle du patrimoine d'un agent public que celui-ci ne peut raisonnablement justifier par rapport à des revenus légitimes»9. Il y a une augmentation substantielle du patrimoine d'un individu, mais avec la particularité que les revenus de cet individu ne peuvent pas être justifiés en qualité et en quantité.

La Convention Interaméricaine contre la corruption, dans le même ordre d'idée, considère l'enrichissement illicite comme une augmentation significative du patrimoine d'un fonctionnaire qu'il ne peut raisonnablement justifier par rapport aux revenus perçus légitimement dans l'exercice de ses fonctions.10

La Convention de l'Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption va plus loin en définissant l'enrichissement illicite comme: « Une augmentation substantielle des biens d'un agent public ou de toute autre personne que celui-ci ne peut justifier au regard de ses revenus»11. La responsabilité pénale ne se limite pas seulement à la personne de l'agent public, mais aussi à toute autre personne, soit publique ou privée dont l'augmentation de biens ne peut être justifiée par ses revenus légitimes.

8 http://lesdefinitions.fr/illicite, visité le 03/02/2013.

9Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.20, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne :

www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013 10Convention Interaméricaine contre la corruption du 29 mars 1996, art. IX, en ligne : www. conseilsgratuits.wordpress.com/2009/09/08/convention-interamericaine-contre-la- corruption/, visité le 22/06/2013.

11 Convention de l'Union Africaine sur la Prévention et la Lutte Contre la Corruption du 11 juillet 2003, art. 1, en ligne :www.africaunion.org/Official_documents/Treaties_Conventions_fr/Convention%20sur%20la%20 lutte%20contre%20la%20corruption.pdf, visité le 22/06/2013..

8

Selon la loi malienne portant répression du crime d'enrichissement illicite: «Ont le caractère de biens illicites ceux acquis à l'aide d'infraction à la loi (vol, corruption, concussion, extorsion de fonds, trafic d'influence, fraudes économiques ou fiscales, perception de commission ou tout autre moyen analogue en fraude des droits de l'Etat, des collectivités, des sociétés et entreprises d'Etat, des divers organismes publics et parapublics)».12

Le législateur pénal burundais a érigé le fait d'enrichissement illicite en infraction. Nous rappelons qu'il faut entendre par infraction, le comportement actif ou passif (action ou omission) prohibé par la loi pénale et passible selon la gravité de la peine principale, soit criminelle, soit correctionnelle, soit de police, éventuellement assortie de peines complémentaires ou de mesures de sûreté.13 Il s'agit également d'un terme générique englobant « crime, délit ou contravention » qui comprend trois éléments à savoir l'élément légal (l'existence d'une incrimination légale), l'élément matériel (action ou abstention qui forme la base de cette infraction) et l'élément psychologique ou moral (intention délictuelle).14

Le code pénal burundais définit l'infraction comme étant une action ou une omission qui se manifeste comme une atteinte à l'ordre social et que la loi sanctionne par une peine.15

12 Loi no82-39/AN-RM du 26 mars 1982 portant répression du crime d'enrichissement illicite au Mali, art.2, publié sur : www.droit-afrique.com/images/textes/Mali/mali%20-%20enrichissement%20illicite.pdf ,visité, le 19/03/2013.

13 CORNU G., vocabulaire juridique, 8 éd., Quadrige, PUF, Paris, 2009, P.490.

14 Idem, p.490

15 Loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, art.1, in B.O.B n° 4 bis/2009.

9

Ainsi, l'article 58 de la loi portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes punit d'une servitude pénale de trois à cinq ans et d'une amende portée du simple jusqu'au double de la valeur du bien toute personne dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public, ou investie d'un mandat électif public, dont l'origine illicite aura été établie par une décision judiciaire.16 Le code pénal en son article 438 reprend intégralement la même disposition17.

Le législateur pénal burundais est muet quant à la définition du caractère illicite de l'infraction d'enrichissement illicite, ce qui peut semer la confusion quant à la détermination de l'origine illicite de la richesse pour le juge saisi.

Le code pénal sénégalais par exemple présume que le délit d'enrichissement illicite est constitué lorsque, sur simple mise en demeure, l'agent public ou privé soupçonné se trouve dans l'impossibilité de justifier de l'origine licite des ressources qui lui permettent d'être en possession d'un patrimoine ou de mener un train de vie sans rapport avec ses revenus légaux.18

De ces définitions, il y a lieu de conclure que l'enrichissement illicite est l'augmentation des avoirs en biens meubles ou/et immeubles sans que le détenteur puisse en justifier l'origine par rapport à ses revenus légitimes.

§2. Les éléments constitutifs de l'infraction de l'enrichissement illicite

Comme toute autre infraction, l'infraction d'enrichissement illicite doit réunir trois éléments à savoir : l'élément légal, l'élément matériel et l'élément moral.

16 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.58, in B.O.B n° 4/2006.

17 Loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, art.438, in B.O.B n° 4 bis/2009.

18 Loi de base n° 65-60 du21 juillet 1965 portant code pénal sénégalais, art.163 bis, publié en ligne : www.droit-afrique.com/images/textes/Senegal/Senegal%20-%20Code%20penal.pdf, visité le 19/03/2013.

10

1. L'élément légal

L'enrichissement illicite est prévu et réprimé par la loi n° 1/12/ du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes et la loi n° 1/05 du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, respectivement en leurs articles 58 et 438.

2. L'élément matériel

Aux termes des articles ci-haut cités, l'infraction est constituée quand on est en possession des biens dont l'origine est illicite. La qualité de la personne en possession de ces biens doit être un dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat public électif.

Selon l'article premier de la convention africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption le seul fait d'avoir à sa possession les biens dont le revenu officiel ne peut pas justifier suffit pour conclure qu'il y a consommation de l'infraction.

3. L'élément moral

Il s'agit de la possession des biens en parfaite connaissance de leur origine illicite. Ces biens doivent provenir d'une infraction et dans ce contexte, d'une infraction de corruption ou/et des infractions connexes.

§.3. Les spécificités de l'enrichissement illicite

Il serait judicieux de préciser que l'enrichissement illicite est une infraction du droit pénal international car c'est une infraction qui peut se produire avec un élément d'extranéité quelconque.

11

En effet, des conventions à caractères soit universel19, soit régional20 ont été ratifiées par le Burundi pour lutter contre cette infraction. C'est également une infraction de droit commun.

Nous pouvons en cela dire que l'enrichissement illicite est une infraction formelle, en ce sens que le seul accroissement des biens que les revenus du propriétaire ne peuvent justifier constitue l'infraction. La CNUCC du 31 octobre 2003 en son article 3.al.2 précise qu'il n'est pas nécessaire que l'infraction cause un dommage ou un préjudice patrimonial à l'État.

Bien plus, la convention Interaméricaine contre la corruption signée le 29 mars 1996 à son article XII est de même avis en précisant qu'il n'est pas nécessaire que l'infraction d'enrichissement illicite cause un dommage ou un préjudice patrimonial à l'État.

On constate une inversion de la charge de la preuve car la personne suspectée d'enrichissement illicite devrait démontrer l'origine, la provenance, les sources de ses biens ; ceux-ci devraient raisonnablement justifier l'équilibre entre les revenus et lesdits biens. A défaut, on sera poursuivi pour le délit d'enrichissement illicite. Nous n'irions pas pour autant parler de présomption d'innocence avec cette particularité qu'il y a inversion de charge de la preuve. On pourrait plutôt parler d'une présomption favorable à l'accusation.21

19Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.20, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne :

www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

20 Convention de l'Union Africaine sur la Prévention et la Lutte Contre la Corruption du 11 juillet 2003, art. 1, en ligne :www.africaunion.org/Official_documents/Treaties_Conventions_fr/Convention%20sur%20la%20 lutte%20contre%20la%20corruption.pdf, visité le 22/06/2013.

21 MERLE R. et VITU A., Traité de droit criminel, procédure pénale, Cujas,4° éd.,vol.2, Paris, Cujas , 1989,p. 289.

12

Nous trouvons que le ministère public n'a pas beaucoup à souffrir en recherchant les éléments de preuve à conviction, mais qu'il revient plutôt de manière évidente aux personnes soupçonnées d'enrichissement illicite de prouver l'origine de l'accroissement subi et disproportionné de la valeur de leur patrimoine.

Toutefois, le principe de la présomption d'innocence et l'obligation faite au parquet d'apporter les preuves de la culpabilité sont les principes généraux majeurs susceptibles de constituer des facteurs limitatifs.

Section II. L'enrichissement illicite et les notions connexes

L'enrichissement illicite étant l'une des infractions connexes à la corruption, il doit avoir des relations avec elles sans toutefois en être confondus. Ainsi, nous allons montrer les relations qu'entretiennent l'enrichissement illicite avec l'infraction de corruption elle-même, avec celle du détournement, celle de la gestion frauduleuse et celle du blanchiment. Il sera opportun aussi de différencier l'enrichissement illicite de l'enrichissement sans cause.

§1.L'enrichissement illicite et la corruption

Etymologiquement22, le terme «corruption» vient du latin « corruptio » et signifie « altération de la substance par décomposition. Dans ce sens, un jugement, un goût, un langage, ...peuvent être altérés, corrompus. Dans un sens plus restreint, et en se situant dans le domaine de ce travail de recherche, la corruption est définie comme l'« abus de position publique à des fins d'enrichissement personnel.»23

22 Encyclopédie universaliste, in Enquête diagnostique sur la gouvernance au Burundi, Rapport mai 2008, p.15

23 KAUFMAN D., Finances et développement: dix idées reçues sur la gouvernance et la corruption, Banque Mondiale vol.42, n° 3, septembre 2005, p.41.

13

Pour Roger Lenglet, « la corruption est la perversion ou le détournement d'un processus ou d'une interaction avec une ou plusieurs personnes dans le dessein, pour le corrupteur, d'obtenir des avantages ou des prérogatives particulières ou, pour le corrompu, d'obtenir une rétribution en échange de sa bienveillance. Elle conduit en général à l'enrichissement personnel du corrompu ou à l'enrichissement de l'organisation corruptrice. »24

Quant à Ursula Cassani et Anne Héritier, «la corruption est l'infraction par laquelle un avantage indu est accordé à un agent public ou privé en échange d'un acte ou d'une omission dans l'exercice de sa charge ou de ses devoirs d'employé ou de mandataire. Le corrupteur se rend coupable de corruption active, alors que l'agent corrompu commet un acte de corruption passive».25

Nicolas QUELOZ distingue la petite et la grande corruption. La première est pratiquée par les petites gens pour survivre tandis que la seconde est celle des élites dirigeantes qui en font moyen de s'enrichir illicitement.26

Le législateur pénal burundais définit la corruption comme le fait de toute personne qui, pour acquérir des profits illicites, sollicite ou agrée, donne ou propose sans droit, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, des offres, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour l'accomplissement ou l'abstention d'accomplir un acte qui relève de ses attributions ou pour accomplir un acte injuste.27

24ROGER L., Comment certains industriels font pression contre l'intérêt général : Lobbying et santé, éd. Pascal/Mutualité Française, Paris, 2009, p. 89.

25 CASSANI U., La lutte contre la corruption : vouloir, c'est pouvoir ? In: URSULA CASSANI / ANNE HERITIER LACHAT (éd.), Lutte contre la corruption internationale. The never ending story, Schulthess, 2011, p. 33.

26 QUELOZ N., Recherche sur les processus de corruption en suisse, Harmattan, Paris, 1999, p.3

27 Voir loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, art.420-429, in B.O.B n° 4 bis/2009.

14

Ainsi, nous trouvons, comme l'affirme VERON M. que l'infraction de corruption implique deux ou plusieurs personnes à savoir le corrupteur, qui offre ou accepte une rémunération au corrompu qui, en échange accomplit ou s'abstient d'accomplir un acte relevant de ses fonctions;28alors que l'infraction d'enrichissement illicite implique une seule personne dont l'augmentation substantielle injustifiée du patrimoine est constatée. Dans tous les cas, les actes de corruption conduisent à l'enrichissement illicite et celui-ci constitue le corps du délit de corruption.

§2. L'enrichissement illicite et le détournement des biens

Cette infraction de détournement des biens consiste au détournement ou la destruction d'un acte ou un titre, de fonds publics ou privés, d'effet, pièces ou titres en tenant lieu, ou de tout autre objet qui en lui a été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission, par toute personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, tout comptable public, tout dépositaire public ou l'un de ses subordonnés ou par un tiers suite à la négligence d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, d'un comptable public ou d'un dépositaire public.29

Nous trouvons ici que l'infraction de détournement des biens concerne le plus un agent public qui fait disparaître frauduleusement les biens qui lui avaient été remis en raison de sa mission. La différence fondamentale avec l'infraction d'enrichissement illicite réside dans la production de la preuve. Ici, le suspect doit prouver qu'il n'a pas volé alors que dans le détournement, les pouvoirs publics ou le ministère public doivent rapporter la preuve de détournement de l'agent public.

28 VERON M., Droit pénal des affaires, 4éd, Dalloz, Armand Colin, Paris, 2001, pp.58-59.

29 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et répression de la corruption et des infractions connexes, art.56-57, in B.O.B n° 4/2006.

15

3. L'enrichissement illicite et le blanchiment

L'infraction de blanchiment peut être perçue comme le recel de la richesse illicite à voir les actes qui la constituent à savoir: la conversion, l'acquisition, la possession ou l'utilisation, le transfert ou la cession des biens, produits d'une infraction en vue de dissimuler ou déguiser leur origine illicite ou d'aider toute personne impliquée dans la commission de l'infraction à échapper à la poursuite30.

La personne qui a acquis des biens illégalement essaie tous les moyens pour les faire entrer dans la légalité par des canaux compliqués. Ce qui signifie que celui qui a peur d'être poursuivi pour l'enrichissement illicite peut procéder par blanchiment comme moyens d'échapper à ses conséquences, la poursuite et éventuellement la répression.

4. L'enrichissement illicite et l'enrichissement sans cause

L'enrichissement sans cause qui est sanctionnée par l'action "de in rem verso", appartient à la catégorie des quasi-contrats. L'action est admise lorsque le patrimoine d'une personne s'est enrichi au détriment d'une autre et que l'appauvrissement corrélatif qui en est résulté ne trouve sa justification, ni dans une convention ou une libéralité, ni dans une disposition légale ou réglementaire.31

30 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression et de la corruption et des infractions connexes, art.62, in B.O.B n° 4/2006.

31 BOULANGER B., observations sous 1ère Civ., 3 novembre 2004, Bull., I, n° 248, p. 206, in : La semaine juridique, éd. Générale, 23 février 2005, n° 8-9, jurisprudence II, 10024, p. 394-396.

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Ainsi l'enrichissement sans cause est le produit d'un engagement qui se forme sans convention et qui résulte de la seule autorité de la loi. Le paiement de l'indu et la gestion d'affaires en sont de bons exemples.

L'enrichissement illicite a des similitudes avec l'enrichissement sans cause en droit civil par le fait d'accroissement démérité de la richesse d'un individu au détriment d'un autre. Les deux notions se diffèrent par leurs domaines, la première étant la notion du droit pénale alors que la seconde relève du droit civil et la seule sanction n'est autre que la restitution de la personne enrichie (désormais débitrice) à l'appauvrie (créancière) ce qu'il a retiré de son patrimoine.

Section III. Les causes et les conséquences de l'enrichissement illicite

On ne peut parler de causes et conséquences de l'enrichissement illicite en isolant la corruption qui est une origine de celui-ci.

Les pratiques de corruption prospèrent dans un système qui les rend possible et diminue les risques pour l'auteur. Dès fois même, celui qui prend le risque de dénoncer l'enrichissement illicite devient la cible de moqueries, voire de représailles. Elles prospèrent surtout dans un contexte où les institutions de contrôle sont inexistantes ou lâches et où les groupes de pression sont faibles.32

32 NIMUBONA J. et SEBUDANDI C., Le phénomène de la corruption au Burundi : Révolte silencieux et résignation, GRADIS, Bujumbura, 2007, p.25.

33 IFES., Guide pratique pour l'aide à la mise en oeuvre d'un dispositif anti-corruption au Burundi, Bujumbura, p.12.

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§1. Les causes de l'enrichissement illicite

Les causes de l'enrichissement illicite au Burundi sont multiples et complexes et prennent aussi les formes différentes. Elles se trouvent à différents niveaux et sans prétendre être exhaustifs nous allons insister en particulier sur : une politique anti-corruption incomplète et la fragilité du système judiciaire, le sentiment d'insécurité personnelle et la perversion des pratiques sociales.

1. Une politique préventive incomplète et la fragilité du système judiciaire

La non prise de conscience de l'importance de certaines questions comme l'éthique professionnelle, les conflits d'intérêts, le refus des cadeaux et autres avantages qui finissent par créer des relations troubles ou mal perçues par les tiers reste un défi. Comment pourrait-on interpréter par exemple un geste de soutien matériel par des commerçants envers le Directeur chargé de la passation des marchés publics pour son projet de construction d'une maison d'habitation ? Au lendemain, pourra-t-il résister aux sollicitations de la personne qui lui a offert cent sacs de ciments ?

L'offre, l'acceptation des dons et prix pour les personnes à la tête des postes décisionnaires devraient être mis sous contrôle d'une norme juridique. L'appareil judiciaire dont le degré d'indépendance est insuffisant ne peut donc pas poursuivre pour l'enrichissement illicite certaines autorités. Dès lors que, certaines personnes semblent être au-dessus de la loi, la justice risque d'être découragée.33

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2. Le sentiment d'insécurité personnelle

D'une part, l'insécurité concerne le fait d'un agent public et même privé dans l'exercice de ses fonctions. Celui-ci, craignant toujours son départ imminent et les jours sombres qui vont suivre, sera tenté par les pots-de-vin.34 C'est aussi le cas des fonctionnaires en fin de carrière qui s'imaginent leur sort quand ils seront en retraite.

D'autre part, l'insécurité concerne le fait que le revenu est insuffisant et est en perpétuelle dégradation.35 Le Burundi souffre d'une récession économique, à grande inflation et sa monnaie perd dangereusement sa valeur face aux devises, ce qui rend le coût de vie chère. Il sera difficile de pratiquer les vertus d'intégrité pour un fonctionnaire dont le salaire ne peut pas couvrir même ses besoins primaires.

C'est également le cas des mandataires politiques qui ont peur d'être relevés de leurs fonctions d'un moment à l'autre alors qu'ils ont déjà pris goût de la belle vie. L'incertitude de son avenir lui procure l'audace de passer à l'acte illicite pour s'assurer de son lendemain.

3. Perversion des pratiques sociales et culturelles

Au Burundi comme dans la plupart des pays africains, les valeurs traditionnelles caractérisées par un fort sentiment de domination du groupe sur l'individu, recourir au pouvoir (politique, économique) dont on dispose pour favoriser un membre du groupe, est tout à fait approuvé.36

34PNUD, Problématique de corruption et développent humain, Presses du Faso, Ouagadougou, 2003, p.21.

35 IFES., op.cit., p.13.

36 PNUD, op.cit, p.9

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Aussi, il ne faut pas ignorer que l'honneur et la considération sociale se mesurent par la richesse de la personne, sa capacité d'intervenir pour la satisfaction des besoins financiers de ses parentés voire des voisins.

En effet, dans la culture burundaise, la pauvreté est prise pour une maladie comme on le dit:«Ubukene ni indwara» et le pauvre est la cible de tous les malheurs d'où l'assertion: «Umukene na nyina aramwanka» pour dire que le pauvre est détesté par tous y compris sa mère. Devenir riche se traduit en Kirundi par«Gukira ubukene» qui signifie guérir de sa maladie de pauvreté. S'enrichir pour un Burundais, qui en trouve l'opportunité est une façon de se faire un homme de parole et se doter d'un statut social acceptable.

D'autres se réfugient derrière certains proverbes burundais encourageant le détournement comme «Impene irisha aho iziritse» qui signifie que la chèvre broute là où elle est attachée.

§2. Les conséquences de l'enrichissement illicite

Les effets de l'enrichissement illicite sont dévastateurs et touchent tous les aspects de la vie nationale. «L'acquisition illicite de richesses personnelles peut être particulièrement préjudiciable aux institutions démocratiques, aux économies nationales et à l'Etat de droit ».37

En principe, l'Etat doit consentir ses efforts pour l'amélioration de la situation socio-économique et culturelle de ses citoyens en assurant une justice distributive comme le stipule la constitution en son article 52 :« Toute personne est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels

37 Préambule Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne : www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

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indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personne, grâce à l'effort national et compte tenu des ressources du pays»38. Or, la corruption fausse cette équité et tous les efforts sont voués à l'échec.

Dans les lignes qui suivent, nous allons donner certaines des conséquences de la corruption, source de l'enrichissement illicite sur les plans politique, économique et socioculturel.

1. Sur le plan politique

Les conséquences néfastes se manifestent principalement par l'indiscrétion des institutions étatiques envers les citoyens et les bailleurs. La corruption en général et l'enrichissement illicite en particulier érodent la primauté du droit dans plusieurs domaines.39

Dans l'administration publique, elle entraîne l'inégalité, l'incertitude dans la prestation des services et elle mine la confiance envers l'appareil étatique et ses institutions. Elle attaque la finalité de la gestion publique, la stabilité nationale et même la légitimité du processus politique.40 La sécurité nationale et les valeurs mêmes de la démocratie sont ébranlées tandis que la réalisation des objectifs de développement est menacée. L'intérêt général est sacrifié au profit des intérêts particuliers par les autorités politiques ou administratives investies de pouvoirs de gestion de la chose publique et la politique est réduite en un domaine d'affaires où chacun cherche ses profits

Cela nous conduit à soutenir Porta Donatella qui constate que la corruption et l'enrichissement illicite emmènent d'importants changements dans le système

38 Loi n°1/ 010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la constitution de la République du Burundi, art. 52, in B.O.B. n° 3 ter /2005.

39 PNUD, op.cit. p.18.

40 Voir GOPAC, Combattre la corruption : Manuel du parlementaire, IBM, Washington, août 2005, p. 26.

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politique et facilitent l'émergence d'une classe de politiciens d'affaires où les partis politiques se livrent dans les activités illégales pour subsister.41 Les citoyens n'ont plus de confiance dans leurs élus et associent la personne du politicien à celle d'un menteur ou d'un escroc et croient à certaines affirmations comme : « la politique est l'art de mentir ». Les bailleurs de fonds doutant de l'intégrité des personnes dans les institutions étatiques procèdent au gel de fonds destinés à la réalisation des programmes pour la réduction de la pauvreté.42

Elle est l'une des premières causes des violations des droits de l'homme et accentue l'impunité, fausse les règles du jeu démocratique et permet à des personnes moins méritantes d'être aux commandes des affaires de l'Etat.43

2. Sur le plan économique

Elles concernent surtout l'enfreint au développement économique et la distorsion du rôle distributif de l'Etat.

Elles entraînent l'arrêt de la croissance économique, de l'investissement direct étranger et de l'investissement national. Il y a fluctuation de la monnaie locale qui connaît une dépréciation profonde devant les devises qui tendent à dominer dans les transactions sur le marché local.44

41PORTA D., La corruption dans les démocraties occidentales, Revue des sciences Sociales 1996, p.356.

42 PNUD, op.cit., p.1.

43 PNUD, op.cit., p.18

44 IFES, op.cit., 13.

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L'enrichissement illicite peut également affecter la taille et la composition des dépenses publiques, les systèmes financiers, le secteur privé ainsi que la mesure dans laquelle les sociétés sont entraînées.45 Les investissements dans l'infrastructure sont peu susceptibles de viser les groupes à faible revenu d'autant plus que ces projets ne contribuent pas à accroître les recettes provenant de la corruption.

Même la construction d'écoles ou de cliniques de santé procurera peu d'avantages aux pauvres si les gains obtenus par corruption en augmentent les coûts.46 Les services sociaux destinés aux pauvres sont de mauvaise qualité, ils font face à un fardeau fiscal proportionnellement plus élevé, ou à des services moins nombreux, car la part de la facture fiscale imposée à ceux qui n'ont ni pouvoir ni richesse pour payer les percepteurs d'impôts augmente.47

Selon le rapport de la Banque Mondiale, plus de mille milliards de dollars, illicitement acquis sont versés chaque année dans les banques des pays développés48, le Burundi étant particulièrement concerné: Il est classé parmi les 7 premiers pays les plus corrompus du monde.49

3. Sur le plan socioculturel

Les conséquences de l'enrichissement illicite se manifestent également par la distorsion du rôle distributif de l'Etat et la pauvreté des masses. L'enrichissement illicite tend à concentrer les richesses du pays dans les mains d'un petit groupe de personnes comme le dit l'OLUCOME, «La corruption enrichit peu de gens et en tue beaucoup»50.

45 BRUCE M.B, la lutte contre la corruption : Guide d'introduction, Agence canadienne de développement International 200, promenade du Portage Gatineau, Québec, 2000, p.10.

46 Voir GOPAC, Combattre la corruption : Manuel du parlementaire, op.cit., p.26.

47 BRUCE M.B, Lutte contre la corruption. Questions et stratégies, Gatineau, Québec, 2000, p.18.

48 Voir www : http://go.worldbank.org/1DP1BLNKJ0, visité le 24/05/2013.

49 Voir supra, p.1.

50 OLUCOME, La Corruption enrichit peu de gens et en tue beaucoup, RCN Justice &Démocratie, 2è éd., Bujumbura, s.d,p.47.

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Ainsi, un groupe de gens travaille et roule sur l'huile et l'autre groupe croupit dans la misère. Cette situation peut contribuer grandement aux inégalités sociales et aux conflits.51 Elle sépare les pauvres des riches, pousse les pauvres à percevoir le gouvernement comme prédateur et oppresseur plutôt qu'un facilitateur.52 Elle contribue à diviser les collectivités et occasionne des sentiments de rivalité et de jalousie.

De ce qui précède, nous espérons avoir montré que l'enrichissement illicite constitue un mal qui guette la communauté internationale toute entière, le Burundi se présentant comme la victime potentielle. Alors, il importe d'analyser les mécanismes soit juridiques ou institutionnels mis en place par le législateur burundais pour la prévention de l'enrichissement illicite, ce qui sera l'objet du deuxième chapitre.

51 Voir GOPAC, Combattre la corruption : Manuel du parlementaire, op.cit., p. 29.

52 Ibidem.

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CHAPITRE II: DE LA PREVENTION DE L'ENRICHISSEMENT

ILLICITE EN DROIT BURUNDAIS

Conformément à l'adage «Vaut mieux prévenir que guérir», nous allons examiner ici les actions menées ou prévues par les pouvoirs publics burundais pour empêcher les cas d'enrichissement illicite. Nous nous intéressons à tout ce qui pourrait entraîner un individu à éviter de s'enrichir illicitement ou les divers moyens pouvant l'en empêcher contre sa volonté.

Le 18 Janvier 2005, le Burundi a ratifié les instruments internationaux de lutte contre la corruption à savoir: la CNUCC et la Convention Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. Quinze mois plus tard, il a promulgué la loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes.

Dans la première section, nous allons examiner la prévention par les organes étatiques où nous parlerons de la déclaration du patrimoine, de l'obligation de mise en place des mécanismes de prévention de la corruption et des infractions connexes.

Dans la deuxième section, nous allons analyser le rôle des organes non étatiques dans la lutte préventive de l'enrichissement illicite pour dégager le rôle de la société civile et celui des médias.

Section I. Prévention par les organes étatiques.

La CNUCC décrit une série d'actions que les Etats peuvent mettre en place pour améliorer la déontologie et la performance des agents publics. Les procédures de recrutement, de promotion des fonctionnaires et des autres agents

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de la fonction publique peuvent être renforcées pour assurer qu'elles soient transparentes et respectueuses de la méritocratie. La qualité du travail et le respect des normes éthiques peuvent être améliorées par des programmes de formation rappelant aux fonctionnaires la manière convenable et adéquate d'assurer la prestation de services. Les fonctionnaires peuvent également rédiger des codes de conduite sur-mesure répondant à la particularité de leurs tâches tandis que les fonctionnaires les plus expérimentés peuvent renforcer leur intégrité en acceptant de déclarer leurs biens et les éventuels conflits d'intérêt.53

Nous allons analyser le rôle des organes étatiques dans la prévention de l'enrichissement illicite tel qu'il est prévu par la loi portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes.

§1. La déclaration du patrimoine

La Convention de l'Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption demande aux Etats parties, dans leurs lois internes d'exiger que tous les agents publics ou ceux qui sont désignés par la loi déclarent leurs biens lors de leur prise de fonctions, pendant et à la fin de leur mandat.54

L'article 70 de la loi anti-corruption est du même avis et dispose que les cadres et agents de l'Administration Publique sont tenus de faire la déclaration de leur patrimoine à leur entrée en fonction et à la fin de cette dernière devant une juridiction compétente et suivant la procédure définie par la loi.55La déclaration de leurs biens servira d'évaluer dans l'avenir le rapport entre l'augmentation de leur patrimoine et le revenu lié à la fonction occupée.

53 Voir Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.5-9, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne : www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

54 Convention de l'Union Africaine sur la Prévention et la Lutte Contre la Corruption du 11 juillet 2003, art. 7 al.1, en ligne :www.africaunion.org/Official_documents/Treaties_Conventions_fr/Convention%20sur%20 la%20lutte%20contre%20la%20corruption.pdf, visité le 22/06/2013.

55 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.70, in B.O.B n° 4/2006.

56 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.29, in B.O.B n° 4/2006.

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1. Les personnes assujetties à l'obligation de la déclaration du patrimoine

Les personnes assujetties à l'obligation de déclaration des biens et patrimoine sont énumérées aux articles 29 à 36 de la loi anti-corruption.

Il s'agit en premier lieu du Président de la République, des Vices- Présidents de la République, des membres du Gouvernement, des membres des Bureaux de l'Assemblée Nationale et du Sénat.56 Ils ne déclarent pas seulement leurs propres biens, mais aussi ceux de leurs conjoints et enfants mineurs.

En deuxième lieu, il s'agit des personnes ayant la qualité de responsable de service public, d'agent public ou mandataire public. Il s'agit notamment :

? des responsables des services, à savoir les chefs des Cabinets Ministériels, les Directeurs Généraux dans les Ministères et les Directeurs de Départements, les Administrateurs Communaux et les Directeurs Généraux ou Directeurs des établissements publics, des sociétés à participation publique ou d'économie mixte, des organismes bancaires, des unités autogérées de consommation, de production industrielle ou agricole, tout organisme de droit privé assurant la gestion d'un service public ;

? des responsables des organes financiers au sein du service entre autres : les directeurs, sous-directeurs, chef de service ou de bureau, etc. ;

? des responsables du maniement des deniers et valeurs du même service et de l'enregistrement de leurs mouvements dont les chefs comptables, comptables principaux, chefs de services de caisse et de comptabilité, comptables provinciaux ou communaux, receveurs ou percepteurs des recettes ou des dépenses ;

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> Présidents, Présidents Directeurs Généraux ou autres, les Présidents de l'organe collégial doté des pouvoirs d'administration à titre de conseil d'Administration ou, à défaut, Assemblée Générale des actionnaires dans des sociétés à participation publique et des sociétés d'économie mixte ;

> des agents ou mandataires publics qui procèdent personnellement, soit à l'engagement, soit à la liquidation, soit à l'ordonnancement des recettes d'une personne publique ;

> des agents ou mandataires public chargés personnellement ou comme membre d'un organe collectif, soit de l'expression d'avis sur les marchés ou contrats de toute nature, passés par les personnes morales de droit public ;

> les agents ou mandataires publics exerçant des fonctions des commissions prévues au Cahier Général des charges applicables aux marchés publics et ceux ayant la qualité de fonctionnaire dirigeant au sein du même Cahier Général des Charges et ;

> à caractère supplétif, des agents ou mandataires publics en raison de son titre, de sa qualité ou de sa fonction. 57

2. Des biens à déclarer et délais de déclaration

Aux termes de l'article 31 de la loi anti-corruption, les biens sur lesquels doit porter la déclaration des biens et patrimoine sont notamment :

> les actions et autres intérêts financiers ;

> les propriétés et immeubles ;

> les biens mobiliers d'une valeur de plus de deux millions de francs Burundais.58

57 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.32-36, in B.O.B n° 4/2006.

58Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.31, in B.O.B n° 4/2006.

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Quant au statut juridique des biens concernés, il s'agit des biens dont on est propriétaire, usager ou détenteur habituel.59

Concernant les délais, la loi anti-corruption oblige seulement le Président de la République, les Vices- Présidents de la République, les membres du Gouvernement, les membres des Bureaux de l'Assemblée Nationale et du Sénat de le faire dans un délai n'excédant pas quinze jours à partir de leur entrée en fonction.60 Pour d'autres personnes astreintes à cette obligation, cette loi est muette quant aux délais de déclaration malgré l'obligation initiale de l'article 70 exigeant l'assujetti de procéder à la déclaration endéans six mois à partir de l'entrée en vigueur de ladite loi.

3. Les organes dépositaires

Les personnes assujetties à l'obligation de déclaration doivent le faire devant les Cours et Tribunaux désignés par la loi anti-corruption. Notamment la Cour Suprême, la Cour d`appel et le Tribunal de Grande Instance.

a. La Cour Suprême

Sous le contrôle de son Président et devant sa chambre judiciaire, la Cour Suprême est compétente pour recevoir la déclaration expresse des biens et patrimoine du Président de la République, des Vice-présidents de la République, des membres du Gouvernement, des membres des bureaux de l'Assemblée Nationale et du Sénat aussi bien lors de leur entrée en fonctions qu'à la fin de celles-ci.61 Au cours de la première législature, sur plus de

59 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.29, in B.O.B n° 4/2006.

60Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.29, in B.O.B n° 4/2006.

61 Loi n° 1/07 du 25 février 2005 régissant la Cour Suprême, art.31, in B.O.B., n° 3quater /2005.

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cinquante déclarations attendues, la Cour Suprême a reçu trente déclarations dont vingt en 2005, six en 2006, deux en 2007 et deux aussi en 2008. Aucune déclaration à la fin de fonctions n'a été reçue. Depuis la deuxième législature, sur plus de trente deux déclarations attendues jusqu` en avril 2013, vingt huit déclarations sont déjà reçues dont quinze en 2010, deux en 2011et six en 2012. Seulement cinq déclarations à la fin de fonctions ont été enregistrées.62

b. La Cour d'appel

L'article 32 de la loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes renvoie à l'article 32 du code d'organisation et compétence judiciaires. Ainsi, toutes les personnes justiciables devant la Cour d'appel et qui sont assujetties à l'obligation de déclaration de leurs biens et patrimoine doivent le faire devant celle-ci.63

Puisque la Cour anti-corruption a la compétence de juger les militaires, autres que les officiers généraux, nous pouvons en conclure que les officiers supérieurs se trouvant dans la catégorie des personnes assujetties sont tenus de faire la déclaration de leurs biens devant la Cour d'appel.64Nous avons remarqué que l`obligation n'est pas bien respectée à ce niveau.

En guise d'exemple, la Cour d'Appel de Bujumbura a reçu depuis la deuxième législature jusqu`en avril 2013 cent quarante huit déclarations dont un gouverneur de province, six administrateurs communaux, six assistants des ministres, d'autres étant des secrétaires permanents, les directeurs généraux, les chefs de cabinet, les directeurs adjoints, les directeurs administratifs et financiers.

62 Registre des déclarations des biens et patrimoine, Cour Suprême de la République du Burundi, avril 2013.

63 Loi n° 1/08 du 17 mars 2005 portant Code de l'organisation et de la compétence judiciaires, art.32, in B.O.B., 3quater/ 2005.

64 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.28, in B.O.B n° 4/2006.

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Toutefois, aucune déclaration à la fin des fonctions n'a été enregistrée.65 Pourtant, dans sa circonscription juridictionnelle, les secrétaires permanents, les assistants des ministres, les directeurs dans les différents ministères, les sociétés parapubliques et les administrateurs communaux seuls font un effectif de plus de deux cent personnes.

c. Le Tribunal de Grande Instance

Toutes les personnes assujetties ne bénéficiant ni d'immunité ni de privilège de juridiction, doivent exécuter l'obligation de déclaration de leurs biens et patrimoine devant les Tribunaux de Grande Instance.66

Les militaires assujettis ayant le grade inférieur à celui de major doivent exécuter cette obligation devant le TGI.67 Il nous semble que les personnes assujetties à l'obligation de déclarer leurs biens devant le TGI ignorent complètement cette obligation. Pour illustration, le TGI en province de Bujumbura et celui de Bubanza n'ont enregistré aucune déclaration depuis la promulgation de la loi portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes jusqu'en juillet 2013.68Pourtant, les comptables, les percepteurs d`impôts et taxes par exemple sont tenus de déclarer leur bien et patrimoine devant lesdits Tribunaux.

Nous félicitons ceux qui se sont conformés à la loi et encourageons l`Etat de contraindre les défaillants au ressaisissement. Concernant les organes dépositaires, il y a lieu de remarquer que c'est la compétence personnelle répressive en général, si on ignore la Haute Cour de Justice, la Cour Militaire et

65 Registre des déclarations de biens et patrimoine, Cour d'Appel de Bujumbura, avril 2013.

66 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.32, in B.O.B n° 4/2006 et la loi n° 1/08 du 17 mars 2005 portant Code de l'organisation et de la compétence judiciaires, art. 17, in B.O.B., 3quater /2005.

67 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.28&32, in B.O.B n° 4/2006.

68Présidences du T.G.I en provinces de Bujumbura et Bubanza juillet 2013.

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le Conseil de Guerre dont les justiciables assujettis à l'obligation de déclaration doivent l'accomplir respectivement devant la Cour Suprême, la cour d'appel et le Tribunal de Grande Instance.

Toutefois, dans la catégorie des personnes justiciables devant la Cour Suprême69, seuls les membres du Gouvernement, les membres des Bureaux de l'Assemblée Nationale et du Sénat sont expressément visés par la loi anticorruption comme ayant l'obligation de déclarer leurs biens et patrimoine devant la Cour Suprême. Par exemple, l'article 28 de la loi anti-corruption rappelle le privilège de juridiction des officiers généraux de l'armée, mais ignore de préciser la juridiction devant laquelle ils doivent accomplir l'obligation de déclaration de leurs biens. Nous pensons néanmoins que l'absence d'une obligation expresse de déclarer leurs biens n'empêcherait pas ceux qui veulent faire preuve d'intégrité de le faire devant la Cour où ils sont justiciables.

De plus, la déclaration des biens devant les différentes juridictions rend difficile le suivi et le contrôle de l'exécution de l'obligation par les assujetties. Au cas où il y aurait une seule institution (juridiction ou commission) devant laquelle toutes les personnes astreintes doivent exécuter l'obligation de déclarations de biens et patrimoine, il serait facile d'identifier les contrevenants et de les ramener à l'ordre.

Au Cameroun par exemple, toutes les personnes assujetties à l'obligation de déclaration de leurs biens le font devant la Commission de Déclaration de Biens et Avoirs (CDBA).70 Au Burundi, nous pensons que la Cour anti-corruption serait la mieux indiquée pour recevoir les déclarations de biens des assujetties justiciables devant elle.

69 Loi n° 1/07 du 25 Février 2005 régissant la Cour Suprême, art.32, in B.O.B. n° 3quater /2005.

70 Voir la Loi n 003 2006 du 25 avril 2006 portant déclaration des biens et avoirs au Cameroun, art.6, publié sur : www.spm.gov.cm/fr/documentation/textes-legislatifs, visité le 19/03/2013.

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4. Le sort des déclarations

Les déclarations sont reçues de façon confidentielle et les dépositaires sont tenus d'en garder le secret.71 Les officiers de la Brigade Spéciale Anticorruption, munis d'un mandat écrit délivré par le Procureur Général près la Cour anti-corruption ont les prérogatives de passer à l'examen et exploitation des informations contenues dans les déclarations du patrimoine.72

Nous trouvons que la confidentialité des déclarations pourrait donc faire face à une application entre deux hypothèses surtout avec la non publication ou divulgation prévue à l'article 36bis de la loi anti-corruption.

La première consisterait à éviter de rendre convenablement la justice dans la mesure où les populations devraient connaître à peu près les avoirs de leurs gouvernants ; ce qui permettrait de démontrer l'engagement ferme de la classe dirigeante dans la lutte contre l'enrichissement illicite et qu'elle est de moins en moins impliquée dans les actions qui compromettent le développement.

La seconde se placerait dans un souci de protection des assujettis car c'est une expérience que celui qui occupe une place de choix se voit méfié par la société.

Nous pensons que le principe de bonne gouvernance devrait combiner un savant dosage et une digne symbiose des deux idées pour parvenir à un résultat fiable dans l'optique de l'adage « il ne suffit pas que la justice soit rendue, il faut que chacun se rende compte qu'il l'a été».

71 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.36 bis, in B.O.B n° 4/2006.

72 Idem, art.7.al.3.

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L'illustration des deux hypothèses est le cas récent du Sénégal où le Président Macky Sall73 précédé de celui du Nigeria, Umaru Yar'Adua74 a publiquement déclaré ses avoirs malgré l'absence d'une contrainte légale pareille pour montrer que la bonne gouvernance et la transparence lui tenaient à coeur, ce qui a suscité des félicitations et une excitation joyeuse du peuple qui a senti un engagement solennel de leur Président à combattre l'enrichissement illicite.

Si même le législateur burundais puisse obliger la publication des biens et patrimoine de certains assujettis, cela serait perçu comme un progrès vers la transparence de la gestion de la chose publique.

La République Algérienne Démocratique et Populaire nous en sert d'exemple où la loi rend obligatoire la publication du contenu de la déclaration du patrimoine de certains mandataires et hauts fonctionnaires dont le Président de la République, les Parlementaires, le Président et les membres du Conseil constitutionnel, le Chef et les membres du Gouvernement, le Président de la Cour Suprême, le gouverneur de la banque centrale, les ambassadeurs etc. en vue de garantir la transparence de la vie politique et administrative ainsi que la protection du patrimoine public et la préservation de la dignité des personnes chargées d'une mission d'intérêt public.75

73 Président du Sénégal depuis le 25 mars 2012.

74 Président du Nigéria de Mai 2007 à mai 2010.

75 Voir la loi n° 06-01 du 21 Muharram 1427 correspondant au 20 février 2006 relative à la prévention et la lutte contre la corruption en République Algérienne Démocratique et Populaire, art.6, 1ère éd., O.N.T.E 2006.

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§2. Obligation de mise en place des mécanismes de prévention de la corruption et des infractions connexes.

La loi anti-corruption oblige les responsables des services publics, des établissements privés et des organisations non gouvernementales de mettre sur pied des mécanismes de prévention de la corruption et des infractions connexes. A cet effet, ils doivent notamment :

1° avoir un manuel de procédures qui indique comment les décisions sont prises; 2° déterminer le délai butoir de prise des décisions et les règles y afférentes ;

3° respecter les principes de publicité et de mise en concurrence prévus par la loi

sur les marchés publics ;

4° avoir un service d'audit ;

5° arrêter le Code de conduite du personnel ;

6° recruter le personnel sur concours ou sur des bases transparentes ;

7° garantir et veiller à la déontologie professionnelle ;

8° faire périodiquement des déclarations et des rapports financiers semestriels aux organes habilités.76

Cette obligation pèse également sur les institutions et les organisations internationales oeuvrant ou désirant oeuvrer au Burundi qui doivent sous réserve des conventions internationales ratifiées par le Burundi, mettre sur pied des mécanismes de prévention de la corruption et des infractions connexes.77

L'article 40 de la même loi exige les supérieurs dans leurs services respectifs d'évaluer les activités de leurs subalternes et de vérifier s'il n'y a pas d'actes de corruption ou d'enrichissement illicite. Ils doivent sensibiliser régulièrement leur personnel sur les dangers de la corruption et d'enrichissement illicite en particulier.

76 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art. 38, in B.O.B n° 4/2006.

77 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art. 39, in B.O.B n° 4/2006.

78 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art. 41, in B.O.B n° 4/2006.

35

Il est exigé des services publics, des établissements privés, des organisations non gouvernementales, des institutions et des organisations internationales oeuvrant au Burundi et des institutions anti-corruption elles-mêmes de mettre à l'entrée de leurs bureaux, dans un endroit apparent, une boîte à suggestions pour les usagers désirant dénoncer les faits qualifiés de corruption ou d'enrichissement illicite 78.

L'Etat devrait mettre en place un mécanisme de suivi de la mise en pratique de ces mécanismes de prévention de corruption en général et de l'enrichissement illicite en particulier et prévoir des mesures correctionnelles aux défaillants.

Les organes étatiques ne peuvent seuls réussir cette lutte de prévention d'où la nécessité de faire intervenir les organes non étatiques à savoir la société civile et les médias.

Section II. Prévention par les organes non étatiques

Nous nous intéresserons ici aux rôles que jouent la société civile et les médias. Les fondements idéologiques de la participation de la société civile sont nombreux et peuvent se résumer en deux:

Primo, l'enrichissement illicite constitue une menace pour la stabilité des Etats au point que les autorités publiques seules ne puissent réussir la lutte.

Secundo, le principe de bonne gouvernance est une particularité de la démocratie qui participe à la bonne gestion des affaires publiques. Tout cela est par ailleurs le reflet de l'article 5.al.1 de la CNUCC qui dispose que la participation de la société serait gage de « L'Etat de droit, de bonne gestion des affaires publiques et des biens publics, d'intégrité, de transparence et de responsabilité ».

36

La constitution du 18 mars 2005 garantit la liberté d'expression, la liberté de réunion et d'association ainsi que le droit de fonder des associations et organisations. 79 Elle accorde à tout Burundais le droit de participer à la direction et la gestion des affaires de l'Etat dont les biens publics sont sacrés et chacun est tenu de les respecter, de les protéger avec le devoir d'en défendre le patrimoine.80 Ce qui implique le droit de regard de la société civile sur la gestion de la fortune publique et de limiter les abus des dirigeants dans le cadre de leur gestion quotidienne de la chose publique. En effet, la société civile et les médias seront là pour critiquer, dénoncer, marquer leur indignation pour ramener les gestionnaires de la chose publique au ressaisissement.

Ceci permet d'affirmer sans doute qu'il est nécessaire d'associer la société civile et les médias pour que la lutte soit une affaire de tous et pour la modération de certains abus politiques.

§1. La société civile

Le rôle de la société civile dans le cadre de la lutte contre l'enrichissement illicite n'est pas sans importance. Nous allons d'abord analyser les moyens de lutte dont dispose la société civile avant de parler de la modération des abus des gouvernants par celle-ci.

1. Les moyens de lutte

La société civile doit participer à la gestion des affaires et à l'éducation des populations afin que celles-ci puissent être à même de combattre l'enrichissement illicite.

79 Voir loi n°1/ 010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la constitution de la République du Burundi, art. 31, 32, 51, et 69, in B.O.B. n° 3 ter /2005.

80 Voir supra, p.2.

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a. La participation à la gestion

Les conventions signées ou ratifiées par le Burundi insistent sur le délicat problème de la société civile dans le cadre de la lutte contre l'enrichissement illicite. En effet, il faudrait « créer un environnement favorable qui permet à la société civile d'amener les gouvernements à faire preuve de transparence et de responsabilité dans la gestion des affaires publiques ».81 Encore qu'il faudrait « accroître la transparence des processus de décision et promouvoir la participation du public à ces processus».82

Cela dit, le rôle essentiel que doit jouer la société civile pour combattre ce phénomène n'est autre que de participer à la gestion des affaires de l'Etat. Et pour que ceci soit effectif, il faudrait éduquer la population.

b. L'éducation de la population

La société civile a un rôle d'éduquer la population pour que nous puissions tous reconnaître les méfaits de l'enrichissement illicite au lieu de s'y conformer comme une habitude. Dans le même sens, la société civile devrait être à même d'expliquer à la population ce que c'est l'enrichissement illicite. Cela permettrait peut-être une vulgarisation indirecte de la loi et le peuple pourrait alors avoir une compréhension plus ou moins suffisante sur l'enrichissement illicite et ses méfaits. La société civile doit amener la population à comprendre qu'elle est la première victime de l'enrichissement illicite et l'encourager de se mettre dans les rangs de lutte contre ce mal.

81 Convention de l'Union Africaine sur la Prévention et la Lutte Contre la Corruption du 11 juillet 2003, art. 12, en ligne :www.africaunion.org/Official_documents/Treaties_Conventions_fr/Convention%20sur%20la%20 lutte%20contre%20la%20corruption.pdf, visité le 22/06/2013.

82 Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.13 al. a, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne : www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

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Au Burundi, dans son rôle de contre-pouvoir et de défense des intérêts des citoyens, la société civile, à travers de nombreuses associations nationales devraient s'investir dans le combat contre ce fléau, particulièrement dans les domaines de sensibilisation, d'éducation, de documentation et d'initiation des stratégies de dissuasion.

Les moyens dont dispose la société civile pour lutter contre l'enrichissement illicite ont un objectif de modérer les abus de ceux qui gèrent la fortune publique.

2. La modération des abus des gouvernants

Une société bien éduquée peut aider l'Etat à une distribution équitable des richesses car le gouvernement collaborera avec elle, ceci parce que cette société disposerait de tous les moyens de pression.

a. La collaboration avec le gouvernement

La société civile devrait collaborer avec les pouvoirs publics pour parvenir à empêcher les cas d'enrichissement illicite. Nous pensons que cela rappellera les éventuels délinquants au ressaisissement et éviteront au maximum de s'enrichir illicitement.

L'article 13 de la loi portant mesures de prévention et répression de la corruption et des infractions connexes encourage les citoyens à dénoncer les cas de corruption et d'enrichissement illicite sous promesse, soit de bénéficier d'un cinquantième de la valeur des biens faisant objet d'infraction, soit d'une somme d'argent variant de cent mille à trois cent mille francs burundais si le fait dénoncé a conduit à une condamnation.

83 Préambule de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 en France, en ligne http://mjp.univ-perp.fr/france/ddh1789.htm

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Le gouvernement ne peut se dispenser de cette collaboration pour éviter des pressions ou soupçons inopportunes.

b. Les moyens de pression

La société civile devrait être un agent de respect du droit. A ce titre, elle aurait une place importante dans la prévention de l'enrichissement illicite. Cela signifie que la population devrait inciter le gouvernement à ne pas violer la loi. Il faudrait qu'on sente que la loi est appliquée par le gouvernement pour que le peuple se sente concerné et surtout que toute la lutte voulue ne soit pas factice. Ceci conduirait à la promotion du droit.

Ainsi, la société civile aurait un rôle important pour prévenir les cas d'enrichissement illicite. C'est aussi parce que l'information est l'un des moyens utilisés par la société civile que nous faisons intervenir le rôle des medias.

§2. Le rôle des médias

L'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme sont les causes de malheurs tels que la perpétuité des crimes dont l'enrichissement illicite.83 Une information s'avère nécessaire pour éviter de tels déboires. L'article 10 de la CNUCC appelle aux Etats d'informer le public. Les médias seraient donc d'un grand secours pour parvenir à ce but dans l'optique de remplir cette mission. Ainsi le rôle principal des médias serait de donner l'information au public pouvant se résumer à la vulgarisation de la loi, le suivi de sa mise en oeuvre et la sensibilisation.

40

1. Vulgarisation de la loi

La publication de la loi et son accessibilité sont des moyens médiatiques de vulgarisation de la loi permettant de combattre l'enrichissement illicite.

D'abord, pour la vulgarisation de la loi, il ne s'agit pas pour les médias de remplacer les pouvoirs publics dans leurs missions de promulgation et de publication de la loi, mais d'en faciliter une large diffusion en permettant un grand nombre à y accéder. La population serait au moins au courant qu'une loi interdisant un tel comportement est en vigueur et peut-être l'aiderait à informer ses proches des risques de s'enrichir illicitement. Nous ne pouvons que souhaiter que les textes mis à la disposition du public soient fiables pour garantir une accessibilité effective.

Quant à l'accessibilité de la loi, les medias peuvent vulgariser la loi et la rendre accessible à tous. Il faudrait que la loi soit comprise par tous et dans tous ses contours. Pour cela, les médias devraient s'entourer des spécialistes du droit (professeur d'université, avocats, magistrats etc.) pour ne pas dénaturer la loi, ni en altérer le sens.

Publier la loi et la rendre accessible auraient peu de sens s'il n'y avait pas le suivi effectif de sa mise en pratique.

2. Le suivi de la mise en pratique de la loi

Les médias seraient plus utiles dans la lutte s'ils entreprenaient des activités d'information du public à ne pas tolérer l'enrichissement illicite par des différents programmes d'éducation de ce public. L'enrichissement illicite dans ses facettes serait appréhendé par la population et il serait aisé à la population de provoquer les actions judicaires.

41

Les médias devraient faire le suivi de la pratique judiciaire sans toutefois enfreindre la loi car « Nul ne peut être inquiété pour ses opinions »84.Cette idée nous amène à penser que les médias doivent suivre la pratique judiciaire. Ainsi, les médias constitueraient une menace aux délinquants éventuels et beaucoup éviteront de s'enrichir illicitement parce que les médias pourraient les dénoncer et ensuite les suivre devant les tribunaux. C'est-à-dire que les médias vont essayer de mettre une pression sur les tribunaux, mais à condition de ne pas porter atteinte à la présomption d'innocence et aux règles de procès équitable.

Les actions préventives d'enrichissement illicite démontrent une version de contrer l'infraction en amont. On peut sans complexe dire que la lutte à ce niveau serait relativement efficace si elle est bien organisée. Il faut toutefois comprendre que la prévention ne peut pas totalement empêcher la commission de l'infraction puisqu'il pourrait y avoir certains qui échapperaient aux mailles du filet. Nous ne pouvons pas alors oublier que l'action répressive doit intervenir pour relever l'échec de l'action préventive ; c`est ce qui sera analysé au cours du Troisième et dernier chapitre de notre travail.

84Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, art.19, Résolution 2200 A (XXI) de l'Assemblée Générale des Nations Unies du 16 décembre 1966, en ligne : http://www2.ohchr.org/french/law/ccpr.htm, visité le 25/06/2013

42

CHAPITRE III : DE LA REPRESSION DE L'INFRACTION D'ENRICHISSEMENT ILLICITE EN DROIT BURUNDAIS

Il s'agit d'une lutte curative à soigner un mal qui a déjà été commis. Ce qui signifie dans le cadre de l'enrichissement illicite que l'infraction aurait déjà été commise. Nous nous intéresserons à la réaction du législateur pénal burundais pour voir les remèdes prescrits pour soigner ce mal.

Dans ce chapitre, nous allons analyser dans sa première section la phase de détection des cas d'enrichissement illicite ; une occasion de parler de la coopération tant sur le plan national qu'international.

Dans sa deuxième section, nous parlerons des juridictions répressives de cette infraction tout en passant en revue leur organisation, fonctionnement et leurs compétences.

Dans sa troisième section, nous allons analyser les différentes sanctions prévues à cette infraction avant de passer à l'analyse des obstacles à l'efficacité de la répression de celle-ci.

Section I. La détection des cas d'enrichissement illicite

Dans son rôle préventif, la détection permet de limiter les dégâts tout en fournissant une orientation à l'action répressive.

Le sens des relations entre les différents partenaires est ici essentiel. Si elles sont conflictuelles, il serait difficile de parvenir à la détection. Par contre, si la collaboration est au centre desdites relations, la détection serait mieux assurée. Ce serait une façon de limiter les chances aux délinquants d'échapper au calvaire de la justice. Cela peut se faire par la coopération qui se manifeste sur le plan national et international.

85 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.7 al.1, in B.O.B n° 4/2006.

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§1. La coopération au plan national

Les personnes morales, spécialement les organismes financiers coopèrent dans la lutte contre l'enrichissement illicite sans oublier la coopération des personnes physiques.

1. La collaboration des personnes morales

Elle est manifeste et contourne certaines opposabilités liées au domaine. La collaboration peut être enclenchée par la demande des instances nationales ou les dénonciations propres de l'institution.

L'article 39 de la convention des Nation Unies appelle les Etats parties à prendre des mesures nécessaires pour encourager la coopération entre les autorités nationales chargées des enquêtes et des poursuites et les entités du secteur privé sur des questions concernant la commission d'infractions de corruption et d'enrichissement illicite.

La loi anti-corruption contient une disposition similaire. Aux termes de l'article 7 al.1 de cette loi, les institutions publiques, parapubliques ou privées ont l'obligation de coopérer avec l'officier de la BSAC muni d'un mandat du Procureur Général près la Cour anti-corruption pour la vérification et l'examen de tout document, toute donnée ou dossier utile à l'enquête.85

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Aucune disposition de la loi portant mesures de prévention et répression de la corruption et des infractions connexes n'oblige la personne morale de dénoncer les opérations suspectes de leurs clients. Mais nous trouvons que l'article 421 de la loi n°1 / 05 du 22 avril 2009 portant révision du code pénal l'oblige de s'acquitter de son devoir de solidarité publique sous peine de sanction.

De plus, l'article 16 de la loi n° 1/02 du 04 février 2008 portant lutte contre le Blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme oblige toute personne rendant un service public de dénoncer, auprès de la cellule Nationale du Renseignement financier (dénommée Cellule) toute opération (de leurs clients) dont le déroulement est d'une complexité inhabituelle ou injustifiée ou qui semble n'avoir aucune justification économique ou cause licite.

Par ailleurs, c'est une façon pour ces institutions de participer au renforcement de l'Etat de droit ; surtout que des inopposabilités permettraient de mieux progresser dans la détection des cas d'enrichissement illicite. En effet, le secret bancaire et la confidentialité des titres pouvant empêcher une institution à coopérer ne sont pas ici opposables.86

Le décret N°100/103 du 17 novembre 2005 portant organisation et fonctionnement du Ministère de la Bonne Gouvernance, de l'Inspection Générale de l'Etat et de l'Administration Locale en son article 3 accorde les pouvoirs étendus aux inspecteurs de l'Etat et commissaires aux comptes dont le secret bancaire ne leur est pas opposable. L'article 35 de la loi n° 1/02 du 04 février 2008 portant lutte contre le Blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme va dans le même sens. Cette mesure qui serait déjà efficace dans le cadre de la criminalité économique peut se révéler utile dans le cadre de la lutte contre l'enrichissement illicite.

86Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.40, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne :

www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

45

Il ne serait en aucun cas difficile pour une banque, par exemple, de livrer les données utiles à la matérialisation de la vérité. Par contre, la banque qui s'abstient de répondre à cette obligation peut être suspectée d'exercer des

activités illicites, comme le détournement (dans la complicité) ou le
Blanchiment de capitaux.

Cette lutte n'est donc pas réservée à une seule catégorie de personne, elle concernerait l'ensemble des acteurs intervenant dans la gestion des fonds et dans l'exercice du service public (directement ou indirectement). Si la coopération avec les personnes morales parait efficace dans la détection de l'infraction, cela n'est pas le cas pour les personnes physiques.

2. La collaboration des personnes physiques

Les moyens de coopération sont ici spécifiques entre autres la plainte et la dénonciation tout en songeant à la protection de ces collaborateurs. Les citoyens peuvent se plaindre ou alors dénoncer les cas d'enrichissement illicite.

L'article 37 de la CNUCC est intitulé « Coopération avec les services de détection et de répression »87. En effet, les missions principales de la BSAC est l'exploitation des doléances ou plaintes relatives aux faits soupçonnés de corruption en général et d'enrichissement illicite en particulier.88 Par ailleurs, l'absence de plaintes constitue un indicateur neutre de corruption.89

87 Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.37 al.1.a, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne : www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

88 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art. 6 al.1, in B.O.B n° 4/2006.

89 IFES., Guide pratique pour l'aide à la mise en oeuvre d'un dispositif anti-corruption au Burundi, Bujumbura, s.d., p.46.

46

La dénonciation par les personnes physiques s'inscrit dans la volonté d'instaurer une transparence intégrale, en voulant éradiquer le secret des mauvais comportements.

Ainsi, les personnes physiques pourraient aider les autorités à détecter les cas d'enrichissement illicite; d'où la nécessité d'assurer la protection de celles-ci. Les personnes physiques qui ont collaboré dans la détection de l'infraction d'enrichissement illicite bénéficient une protection de la source d'information.90 On verra alors ici la portée positive et la visée pragmatique des plaintes et dénonciations.

La loi anti-corruption prévoit « la protection des dénonciateurs et des témoins »91. On constate une volonté de garantir la sécurité des citoyens de bonne foi et leur protection contre les pressions et les menaces éventuelles des personnes dénoncées ou de leur entourage. Néanmoins, est réprimé l'auteur des déclarations écrites ou verbales fausses ou ne reflétant pas la vérité par rapport à l'infraction d'enrichissement illicite.92

Il nous convient aussi de remarquer que la coopération au plan interne peut se révéler insuffisante ; d'où le recours à la coopération au plan international.

§2. La coopération au plan international

Nous l'avons déjà dit, l'infraction d'enrichissement illicite peut se produire avec un élément d'extranéité ; d'où ses répercussions sur la scène internationale. Tous les pays du globe devraient agir en concert dans le but d'enrayer ce fléau.

90 Voir Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 Octobre 2003, art.33.

91 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art. 12-13, in B.O.B n° 4/2006.

92Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art. 14, in B.O.B n° 4/2006.

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L'extradition et l'entraide judiciaire peuvent en être de bons moyens pour mener une lutte efficace contre l'enrichissement illicite.

1. L'extradition

L'article 44 al.2 de la CNUCC pose le principe de la double incrimination comme condition. L'alinéa 2 permet à un Etat d'accorder l'extradition pour enrichissement illicite alors que son droit interne ne permet pas la punition dudit acte. Les articles 36 et 37 de la loi portant lutte contre le Blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme prévoit les conditions et modalités d'extradition des personnes poursuivies pour les infractions de Blanchiment des capitaux dont l'enrichissement illicite.

Nous voyons que tout est mis en oeuvre pour que les enrichis illicitement soient extradés. Un individu n'irait donc plus se cacher dans un Etat qui ne punit pas (en tant qu'infraction ou absence de sanctions) car il serait appréhendé. Il éviterait donc quelques endroits que ce soient pour commettre l'infraction d'enrichissement illicite.

Toutefois, l'extradition est refusée s'il y a de sérieuses raisons de penser que la demande a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son origine ethnique ou de ses opinions politiques, ou que donner suite à cette demande causerait un préjudice à cette personne pour l'une quelconque de ces raisons.93 L'article 37 de la loi portant lutte contre le Blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme est du même avis.

93Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.44 al.15, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne : www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

48

Il faudrait donc aux autorités nationales d'afficher une volonté réelle de combattre le phénomène, indépendamment des affinités et des intérêts privés, égoïstes contraires au développement de l'Etat.

2. L'entraide judicaire

«Les Etats parties s'accordent mutuellement l'entraide judiciaire la plus large possible lors des enquêtes, poursuites et procédures concernant les infractions visées par la présente convention».94 Cette disposition permet de voir que la coopération au plan international permettrait d'éradiquer les cas d'enrichissement illicite.

L'article 33 de la loi portant lutte contre le Blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme envisage l'entraide judiciaire dans le recueil des témoignages ou dépositions, la fourniture d'une aide pour la mise à disposition des autorités judiciaires de l'Etat requérant des personnes détenues ou d'autres personnes, aux fins de témoignages, d'aide ou tout autre renseignement et information nécessaire dans la conduite d'enquête.

Nous pensons dans ce cas que les autorités d'un Etat doivent donner les informations nécessaires à un autre Etat dans lequel une procédure judiciaire serait en cours. Cela permettrait de rassembler les preuves, contrôler l'exactitude des déclarations et la fiabilité des informations fournies.

Au demeurant, plusieurs actions sont prévues pour détecter les cas d'enrichissement illicite et éventuellement pour sa répression. Qu'elle soit effectuée au plan national ou international, nous pouvons dire que la détection est une action indispensable pour faciliter le travail des juridictions répressives en matière d'enrichissement illicite.

94 Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.46 al.1, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne : www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

49

Section II. Organes de répression

L'enrichissement illicite comme toutes les autres infractions de corruption rentrent dans les compétences d'une juridiction spéciale, la Cour anti-corruption, son Parquet Général et la BSAC.

La Cour Suprême étant la haute juridiction ordinaire de la République95, elle s'occupe des affaires répressives soit en appel ou de pourvoi en cassation en général et statue au premier degré pour les personnes justiciables devant celle-ci poursuivies pour l'infraction d'enrichissement illicite en particulier. Il faut noter malheureusement que cette dernière est frappée d'incompétence pour juger les hautes personnalités de la République.96

§1: La Cour anti-corruption

La cour est instituée par la loi n° 1/136 du 13 décembre 2006 portant création de la Cour anti-corruption. L'organisation, le fonctionnement et les compétences de la cour sont définies dans la loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes.

1. De l'organisation et fonctionnement de la Cour

L'organisation de la Cour anti-corruption est définie dans la loi n° 1/136 du 13 décembre 2006 portant création de la Cour anti-corruption aux articles 15 à 21 et l'ordonnance ministérielle n° 550/176 du 27 février 2007 portant règlement d'ordre intérieur de la Cour anti-corruption dans ses articles 1 à 9. Elle détermine la composition de la Cour elle-même et celle de son siège. Elle comprend un Président, un Vice-président et autant de conseillers que de besoin.

95 Voir loi n° 1/07 du 25 février 2005 régissant la Cour Suprême, art.1, in B.O.B. n° 3quater /2005.

96 Voir infra, p.51.

50

Le Président de la Cour veille au règlement des affaires, à la gestion et la discipline de la Cour, au bon fonctionnement des services de la Cour anticorruption et exerce sa surveillance sur les magistrats du siège.

La Cour est dotée d'un Secrétariat Général qui assure l'intendance de la Cour et de son Parquet Général, suit la gestion des crédits budgétaires affectés au fonctionnement de la Cour et de son Parquet Général. Il assure aussi la fonction de porte-parole de la Cour.

2. Les compétences de la Cour

Les compétences de la Cour anti-corruption sont définies dans la loi portant mesures de prévention et répression de la corruption et des infractions connexes et dans la loi n° 1/36 du 13 décembre 2006 portant création de la Cour anticorruption. Nous allons brièvement parler de sa compétence territoriale, matérielle et personnelle.

Pour ce qui est de la compétence territoriale, la Cour anti-corruption exerce sa compétence sur l'ensemble du territoire de la République du Burundi97.

Les arrêts rendus par la Cour anti-corruption sont susceptibles d'opposition, d'appel devant la chambre judiciaire de la Cour Suprême et de cassation, devant la Cour Suprême siégeant toutes chambres réunies. Ils sont également susceptibles de révision.98

Quant à la compétence matérielle, la Cour anti-corruption est la seule compétente pour connaître les infractions de corruption et des infractions

97 Loi n° 1/36 du 13 décembre 2006 portant Création de la Cour anti-corruption, art.1, in B.O.B. n° 12/2006.

98 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.23, in B.O.B n° 4/2006.

51

connexes99. C'est une Cour spéciale ne pouvant pas recevoir aucune affaire qui n'a pas trait à la corruption.

En ce qui concerne la compétence personnelle, elle est comparable à celle dévolue à la Cour d'appel en matière répressive.100

Ainsi, la Cour anti-corruption n'est pas compétente à connaître les infractions ayant trait à la corruption commise par :

;101

1° Le Président de la République, les Vices Présidents de la République, le Président de l'Assemblée Nationale et le Président du Sénat qui sont justiciables devant la Haute Cour de Justice

2° Un député, un sénateur, un membre du Gouvernement, un magistrat de la Cour Suprême, un magistrat du Parquet Général de la République, un magistrat de la Cour Constitutionnelle, un mandataire politique ou public ayant au moins le rang de Ministre, un officier général des Forces Armées, un magistrat de la Cour Militaire ou de l'Auditorat Général, un gouverneur de province, un magistrat de la Cour d'appel, un magistrat de la Cour Administrative, un magistrat du Parquet Général près la Cour d'Appel qui sont justiciables devant la Cour Suprême.102

A cette liste, on y ajoute d'autres personnes qui sont rendues justiciables devant la Cour Suprême par les statuts spéciaux régissant leurs corps comme les officiers de Police Nationale revêtus de grade de commissaire par exemple.

99 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.22, in B.O.B n° 4/2006.

100Voir loi n° 1/07 du 25 février 2005 régissant la Cour Suprême, art.32, in B.O.B., n° 3quater /2005.

101 Loi n°1/ 010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la constitution de la République du Burundi, art. 243, in B.O.B. n° 3 ter/ 2005.

102 Loi n° 1/07 du 25 février 2005 régissant la Cour Suprême, art.32, in B.O.B., n° 3quater/ 2005.

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§2. Le Parquet Général près la Cour anti-corruption

Le Parquet Général près la Cour anti-corruption est instituée par la loi n° 1/136

du 13 décembre 2006 portant création de la Cour anti-corruption. L'organisation, le fonctionnement et les compétences de celui-ci sont définies dans la loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes.

1. De l'organisation et fonctionnement du Parquet Général près la Cour Anti-corruption

L'organisation du Parquet Général près la Cour anti-corruption est définie dans la loi n° 1/136 du 13 décembre 2006 portant création de la Cour anti-corruption, la loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes et l'ordonnance ministérielle n° 550/176 du 27 février 2007 portant règlement d'ordre intérieur de la Cour anticorruption respectivement à leurs articles 2, 17 et 2.

Le Parquet Général près la Cour Anti-corruption est constitué du Procureur Général près la Cour Anti-corruption assisté d'un premier Substitut Général et d'autant de Substituts Généraux que de besoin.

Le Procureur Général a autorité sur les membres du ministère public près de ladite Cour, sur le service du secrétariat du Parquet Général et sur la BSAC.103 Le secrétariat du Parquet Général près la Cour Anti-corruption est dirigé par un Secrétaire en chef ayant l'autorité sur tous les agents du secrétariat.104

103 Ordonnance n° 550/176 du 27/2/2007 portant règlement d`ordre intérieur de la Cour anti-corruption, art.5, In B.O.B. n°2/2007.

104 Ordonnance n° 550/176 du 27/2/2007 portant règlement d`ordre intérieur de la Cour anti-corruption, art.11, In B.O.B. n°2/2007.

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2. Les compétences du Parquet Général près la Cour anti-corruption

Les compétences du Parquet Général près la Cour anti-corruption sont définies dans la loi portant mesures de prévention et répression de la corruption et des infractions connexes et dans la loi n° 1/36 du 13 décembre 2006 portant création de la Cour anti-corruption. Le Parquet Général près la Cour anti- corruption intervient dans l'exécution des décisions de la Cour anticorruption conformément aux dispositions de l'article 133 du Code de l'Organisation et de la Compétence Judiciaires.105

Pour ce qui est de la compétence territoriale, le Parquet Général près la Cour anti-corruption connaît les cas faisant objet de corruption en général et d'enrichissement illicite en particulier sur tout le territoire national de la République du Burundi sous la supervision du Procureur Général de la République.106

Quant à la compétence matérielle, Il est le seul compétent pour connaître les infractions de corruption et des infractions connexes.107Il reçoit les dénonciations y relatives, fait tous les actes d'instruction et saisit la Cour lorsqu'il ne décide pas du classement sans suite. Il reçoit aussi les dossiers provenant de la Brigade Spéciale anti- corruption, de la Cour des Comptes, ou toute institution de contrôle des finances publiques ainsi que les rapports d'audit contenant des infractions prévues par la loi anti-corruption.108

En ce qui concerne la compétence personnelle, le Parquet Général près la Cour anti-corruption, Sous la supervision du Procureur Général de la République

105 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.26, in B.O.B n° 4/2006.

106 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.24, in B.O.B n° 4/2006

107 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.22, in B.O.B n° 4/2006.

108 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.24, in B.O.B n° 4/2006.

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recherche à charge des personnes qui ne bénéficient pas du privilège de juridiction les infractions de corruption en général et d'enrichissement illicite en particulier. 109 Il est aussi compétent d'exercer les poursuites sur la personne des militaires pour les infractions de corruption à l'exception des officiers revêtus le grade de général.110

§3. La Brigade Spéciale Anti-corruption

La BSAC a été mise en place par la loi n°1/27 du 3 août 2006 portant création, organisation et fonctionnement de la BSAC. La BSAC a une mission globale de moralisation de la vie publique, de dissuasion en matière de corruption et d'infractions connexes ainsi que de leur répression.111

1. Missions de la Brigade Spéciale Anti-corruption

Aux termes de la loi n° 1/27 du 03 août 2006, la BSAC a pour missions spécifiques suivantes:

? Combattre le phénomène de la corruption et autres crimes organisés dans une approche interdisciplinaire intégrant le renseignement, les investigations et les poursuites ;

? Constater les actes de corruption et de malversations économiques et financières ;

? Se saisir d'office des affaires de corruption et de malversation dont elle a connaissance et qui ne font pas objet de poursuites judiciaires ;

109 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.24, in B.O.B n° 4/2006.

110 Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.28, in B.O.B n° 4/2006

111 Loi n° 1/27 du 03 août 2006 portant Création, organisation et fonctionnement de la Brigade Spéciale Anticorruption, art.2, in B.O.B. n° 8/2006.

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? Explorer les doléances ou plaintes relatives aux faits soupçonnés de corruption ou d'infractions connexes;

? Saisir le Procureur Général près la Cour anti-corruption à l'issue de ses investigations, des faits susceptibles de constituer des infractions de corruption ou des infractions connexes ;

? Coopérer avec les organismes nationaux et internationaux de lutte contre la corruption et les infractions connexes.112

2. L'organisation et le fonctionnement de la Brigade Spéciale Anti Corruption

En ce qui est de l'organisation, la BSAC est une administration personnalisée disposant d'un patrimoine et jouissant d'une autonomie de gestion. Elle est placée sous la tutelle du ministre ayant la bonne gouvernance dans ses attributions.113 Elle est organisée en un commissariat général et en commissariats régionaux qui sont au nombre de neuf.114

Le Commissariat Général est dirigé par un Commissaire Général et un Commissaire Général Adjoint assistés par des officiers de la BSAC.

Chaque commissariat régional est dirigé par un commissaire de région assisté par des officiers de la BSAC.115

112 Loi n° 1/27 du 03 août 2006 portant création, organisation et fonctionnement de la Brigade Spéciale Anti-Corruption, art.2 al.6, in B.O.B. n° 8/2006.

113 Loi n° 1/27 du 03 août 2006 portant création, organisation et fonctionnement de la Brigade Spéciale Anti-Corruption, art.2, in B.O.B. n° 8/2006.

114 Voir Décret n° 100/339 du 13 novembre 2006 portant création des commissariats régionaux de la Brigade Spéciale Anti-corruption, art.1, in B.O.B. n° 11 quater/ 2006.

115 Loi n° 1/27 du 03 août 2006 portant Création, organisation et fonctionnement de la Brigade Spéciale Anti-Corruption, art.14, in B.O.B. n° 8/2006.

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Quant à son fonctionnement, la BSAC peut agir d'initiative ou sur ordre du Procureur Général près la Cour anti-corruption ou encore sur ordre du ministre ayant la bonne gouvernance dans ses attributions. Les officiers enquêteurs, après avoir exploité les doléances ou les plaintes relatives aux faits soupçonnés de corruptions ou d'infractions connexes dont l'enrichissement illicite, communiquent les procès-verbaux avec une note de synthèse au Commissaire qui, à son tour, les transmet au Commissaire Général.

3. Les compétences de la Brigade Spéciale Anti-corruption

Au point de vue territorial, la BSAC opère sur toute l'étendue du territoire de la République.116

Au point de vue matériel, la BSAC est une Police à compétence restreinte.117 Elle a les mêmes pouvoirs que ceux dévolus aux officiers de Police Judiciaire conformément aux dispositions du Code de Procédure Pénale.118 Elle dispose d'une compétence exclusive en matière de corruption. Ainsi, les officiers de la BSAC sont investis des pouvoirs octroyés aux officiers de Police Judiciaire. A ce titre, ils sont habilités à constater les infractions de corruption et des infractions connexes, à en rassembler les preuves, à en rechercher les auteurs et, le cas échéant, à procéder à la garde à vue conformément au Code de Procédure Pénale.119

Au point de vue personnel, les Officiers de la BSAC sont investis des pouvoirs octroyés aux officiers de Police Judiciaire sans préjudice aux pouvoirs dévolus à ces derniers.120 Ainsi, les officiers de la BSAC ne peuvent pas enquêter sur les

cas d'enrichissement illicite dont les suspects bénéficient d'un privilège de

116 Loi n° 1/27 du 03 août 2006 portant Création, organisation et fonctionnement de la Brigade Spéciale Anticorruption, art.1, in B.O.B. n° 8/2006.

117 Loi n° 1/27 du 03 août 2006 portant Création, organisation et fonctionnement de la Brigade Spéciale Anticorruption, art.1, in B.O.B. n° 8/2006.

118Loi n° 1/27 du 03 août 2006 portant Création, organisation et fonctionnement de la Brigade Spéciale Anticorruption, art.1, in B.O.B. n° 8/2006.

119 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.6, in B.O.B n° 4/2006.

120 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.6, in B.O.B n° 4/2006.

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juridiction, et qui sont justiciables soit devant la Cour d'Appel, soit devant la Cour Suprême.121

Section III: Les sanctions

Les sanctions sont prévues dans la loi anti-corruption et dans le code pénal de 2009. On distingue les sanctions principales et les sanctions complémentaires.

1. Des peines principales

« Est punie d'une servitude pénale de trois à cinq ans et d'une amende portée du simple jusqu'au double de la valeur du bien».122 Ici, la peine d'amende et celle

de servitude pénale sont combinées et non alternatives, ce qui pourrait inspirer une intimidation pour les personnes tendant à commettre cette infraction.

2. Des peines complémentaires

Les peines complémentaires que peuvent encourir les personnes coupables d'infraction d'enrichissement illicite sont entre autres123 :

1° la confiscation : il s'agit ici d'une confiscation spéciale portant sur l'ensemble des biens constituant la richesse illicitement acquise au profit du trésor public ;124

2° l'interdiction, il s'agit d'une interdiction définitive du territoire burundais pour une durée ne pouvant pas être inférieure à cinq ans pour tout étranger qui,

121 Loi n°1/10 du 03 avril 2013 portant révision du Code de procédure Pénale, art.20, in B.O.B n°4/2013. 122Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des

infractions connexes, art. 58, in B.O.B n° 4/2006, p.243 et art.438 de la loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant

révision du code pénal burundais, in B.O.B n° 4 bis/2009.

123 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art.67, in B.O.B n° 4/2006, p.245 et la loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, art.443, in B.O.B n° 4 bis/2009.

124 Voir loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, art. 61, in B.O.B n° 4 bis/2009.

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après l'exécution de la peine principale, est conduit immédiatement à la frontière.125

Pour un burundais, elle peut porter sur le non exercice d'une fonction publique ou toute autre fonction à l'occasion d'exercice de laquelle la personne s'est illicitement enrichie. La mesure ne peut pas excéder une durée de dix ans ;

3° l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée de la condamnation soit publiée intégralement ou par extraits dans le B.O.B, dans une ou plusieurs autres publications de presse ou dans un ou plusieurs services de communication audiovisuelle ou par affichage dans les lieux décidés par la juridiction du jugement et le tout aux frais du condamné.126

Nous ne pouvons pas laisser de côté l'incompressibilité des peines pour les condamnés en moins qu'ils aient exécuté les réparations civiles prononcées par la juridiction du jugement qui n'est pas moins une sanction.127

125Voir loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, art.443al.2-3, in B.O.B n° 4 bis/2009.

126Voir loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, art.91, in B.O.B n° 4 bis/2009. 127 Voir loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, art.445, in B.O.B n° 4 bis/2009.

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§2.Des exemptions et atténuation des peines

Dans le but d'encourager les délinquants éventuels de corruption en général et d'enrichissement illicite en particulier à coopérer avec les institutions judiciaires ou administratives pour lutter contre la corruption et l'enrichissement illicite, le législateur burundais a prévu les mesures d'exemption ou d'atténuation des peines.

L'exemption de peines est accordée à toute personne, auteur ou complice de la corruption active qui, avant toute poursuite, a révélé l'infraction à l'autorité administrative ou judiciaire et permis d'identifier les autres personnes mises en

cause.128

La loi semble exclure l'auteur de l'infraction d'enrichissement illicite parmi les bénéficiaires de cette mesure. Nous trouvons qu'il serait mieux d'étendre cette grâce législative aux éventuels délinquants d'enrichissement illicite qui se seraient repentis et auraient fait des restitutions nécessaires.

L'atténuation de la peine quant à elle constitue une offre faite à l'auteur ou complice d'une des infractions de corruption ou d'enrichissement illicite de voir sa peine réduite à la moitié si, après l'engagement de poursuites, il a permis ou facilité l'arrestation des autres personnes en cause.129 Cette offre conditionnelle est profitable pour les juridictions chargées de lutter contre l'enrichissement illicite qui voient leur travail facilité par la collaboration du délinquant et pour ce dernier qui voit sa peine diminuer en récompense de sa collaboration utile.

128 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art. 69, in B.O.B n° 4/2006.

129Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art. 69, in B.O.B n° 4/2006.

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Nous trouvons que le législateur burundais est animé d'une volonté de réprimer l'infraction d'enrichissement illicite à voir les moyens de répression mis en place. Toutefois, ces moyens ne sont pas sans lacunes ; d'où on observe beaucoup d'obstacles à l'efficacité de la répression de celle-ci.

Section IV. Les obstacles à l'efficacité de la répression de l'infraction d'enrichissement illicite

La répression de l'infraction d'enrichissement illicite devrait aboutir à l'éradication du fléau si elle était effective ; ce qui n'est pas le cas au Burundi. En effet, les instruments juridiques disponibles comportent des lacunes pour aboutir à une répression efficace de cette infraction.

Qu'il nous soit permis d'indiquer que jusqu'à l'heure où nous rédigeons le présent travail, aucun dossier d'enrichissement illicite n'est ni en instance ni en instruction devant la Cour anti-corruption ou la Cour Suprême.130

Ces obstacles s`ajoutent à l'absence de la définition du caractère illicite de l`enrichissement illicite et l`absence de sanctions aux contrevenants de l`obligation de la déclaration de biens et patrimoine. Ces obstacles sont principalement liés aux immunités et privilèges de juridiction de certaines personnes, décalage de traitement entre les magistrats de la Cour anti-corruption et ceux de la Cour Suprême, l'obstacle lié à la prescription de l'action publique et le problème lié à la protection des dénonciateurs et témoins.

130 Cour Suprême &Cour anti-corruption, avril 2013.

131 Loi n°1/ 010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la constitution de la République du Burundi, art.117, in B.O.B. n° 3 ter/ 2005.

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§1. Des immunités et privilèges de juridictions

Les nouvelles institutions réputées spécialisées dans la lutte contre la corruption et l'enrichissement illicite en l'occurrence la Cour anti-corruption, le Parquet Général près la Cour anti-corruption et la BSAC ne sont pas compétentes pour connaître les cas d'enrichissement illicite dont peuvent se rendre coupables certaines personnalités de la République suite aux immunités et privilèges de juridiction consentis par la constitution et d'autres textes de lois.

1. Les immunités

Il s'agit ici de l'immunité présidentielle. En effet, aucune poursuite ne peut être engagée contre le président de la République en exercice pour n'importe quelle infraction sauf en cas de haute trahison.131

L'immunité en soit vaut la peine pour la protection d'une personnalité aussi importante comme le Président de la République et pour la stabilité de la Nation, mais n'empêcherait pas pour autant aux institutions compétentes de se renseigner, sans que sa collaboration ne soit nécessaire, sur l'augmentation de son patrimoine pour le poursuivre dans l'avenir et au moment opportun pour un cas éventuel d'enrichissement illicite.

2. Les privilèges de juridiction

Les privilèges de juridictions consentis par la constitution et d'autres textes de lois, bloquent les effets attendus de la Cour anti-corruption, de son parquet général ainsi que ceux de la BSAC. En effet, certaines personnes sont épargnées des poursuites pouvant être engagées contre elles par lesdites institutions parce qu'elles sont justiciables soit devant la Haute Cour de Justice ou devant la Cour Suprême.

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a. Les personnes justiciables devant la Haute Cour de Justice.

Le Président de la République, le Président de l'Assemblée Nationale, le Président du Sénat, le Premier Vice-président de la République et le deuxième Vice-président de la République sont justiciables devant la Haute Cour de Justice pour crimes et délits commis au cours de leur mandat.132

Jusqu'à l'heure actuelle, aucune poursuite pour l'infraction d'enrichissement illicite n'est possible à l'encontre des excès des hauts dignitaires se trouvant dans cette catégorie car la juridiction compétente pour les juger n'a pas encore vu le jour alors qu'elle est prévue par la constitution. 133

b. Les personnes justiciables devant la Cour Suprême

Beaucoup d'autres personnes ne peuvent être jugées que devant la Cour Suprême.134

L'article 24 de la loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes reconnaisse l'incompétence personnelle de la Cour anti-corruption et son parquet Général d'exercer des poursuites à l'encontre des personnes suspectes de l'infraction d'enrichissement illicite qui bénéficient d'un privilège de juridiction prévu par la loi régissant la Cour Suprême. A cela, on y ajoute l'incompétence personnelle de la BSAC sur la personne des suspects de l'infraction d'enrichissement illicite justiciables devant la Cour d'Appel.

132 Loi n°1/ 010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la constitution de la République du Burundi, art. 234, in B.O.B. n° 3 ter /2005.

133 Loi n°1/ 010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la constitution de la République du Burundi, art. 233, in B.O.B. n° 3 ter/ 2005.

134 Voir supra, p.51.

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Les immunités et privilèges de juridiction privent les chances aux institutions chargées de lutter contre l'enrichissement illicite de faire des progrès dans la lutte. Pourtant, la CNUCC appelle les Etats à prendre les mesures nécessaires pour établir ou maintenir un équilibre approprié entre toutes immunités ou tous privilèges de juridiction accordés à ses agents publics dans l'exercice de leurs fonctions, et la possibilité, si nécessaire, de rechercher, de poursuivre et de juger l'infraction d'enrichissement illicite.135

L'article 7 alinéas 5 de la convention de l'Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption va dans le même sens. Le législateur pénal burundais devrait s'inspirer de ces dispositions pour l'extension de la compétence de la Cour anti-corruption.

Ainsi, la Cour anti-corruption n'inspire pas crainte aux personnes bénéficiant un privilège de juridiction car ils savent qu'en cas d'infraction d'enrichissement illicite, les poursuites seront retardées ou n'auront pas lieu.

Les institutions spécialisées dans la lutte contre les infractions d'enrichissement illicite en particulier se trouvent les bras liés et ne vont s'occuper que des affaires moins importantes en la matière car les grands gérants de la chose publique, avec une grande probabilité de s'enrichir illicitement, échappent à l'aiguillon et la rigueur de la Cour anti-corruption.

135Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.30 al.2, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne : www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

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§2. Obstacle lié à la prescription de l'action publique

« Lorsqu'il y a lieu, chaque Etat Partie fixe, dans le cadre de son droit interne, un long délai de prescription dans lequel des poursuites peuvent être engagées du chef d'une des infractions établies conformément à la présente convention et fixe un délai plus long ou suspend la prescription lorsque l'auteur présumé de l'infraction s'est soustrait à la justice ».136

Contrairement au prescrit de cette disposition, la prescription de l'action publique de l'infraction d'enrichissement illicite au Burundi joue en faveur du suspect. En effet, le code pénal burundais étend la prescription de l'action publique à dix ans si l'infraction commise constitue un crime punissable de cinq ans à dix ans de servitude pénale.137

L'enrichissement illicite étant un délit punissable de cinq ans de servitude pénale au plus, le suspect a plus de chances d'échapper aux poursuites du fait que l'infraction d'enrichissement illicite ne peut être constatée qu'après un délai plus ou moins long dès sa commission. En Algérie par exemple, ni la prescription de l'action publique ni celle des peines ne joue si le produit de l'infraction aurait été transféré en dehors du territoire national.138

136 Voir la Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.29, Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne : www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

137 Voir loi n° 1/05/ du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, art.146 al.3, in B.O.B n° 4 bis/2009.

138 Voir loi n° 06-01 du 21 Muharram 147 correspondant au 20 février 2006 relative à la prévention et la lutte contre la corruption en République Algérienne Démocratique et Populaire, art.4&5, éd. 1ère, O.N.T.E 2006.

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§4. Problème de protection des dénonciateurs et témoins

La CNUCC en son article 32 prescrit la protection des témoins, des experts et des victimes contre des actes éventuels de représailles ou d'intimidation aux témoins et aux experts qui déposent concernant les infractions de corruption et d'enrichissement illicite.

L'intimidation des témoins, directe ou indirecte, peut prendre différentes formes, mais elle vise presque toujours à éliminer les preuves à la charge du défendeur en vue de leur acquittement pour défaut de preuves et/ou pour se venger. 139La protection s'étend aussi aux personnes qui leur sont proches. Il faut une protection « effective et appropriée »140 qui fait référence à la nécessité d'adapter le niveau de protection aux menaces qui pèsent sur les collaborateurs de justice, les témoins et les indicateurs. Dans certains cas, il suffit par exemple de préserver leur anonymat pendant le procès. Dans d'autres cas, ils ont besoin de gardes du corps. Dans des cas extrêmes, des mesures de protection de témoins de plus grande envergure, notamment un changement d'identité, d'emploi et de domicile (même à l'étranger), peuvent être nécessaires.141

L'article 33 de la même convention prévoit la protection des personnes contre tout traitement injustifié de toute personne qui signale aux autorités compétentes, de bonne foi et sur la base de soupçons raisonnables qui communiquent des informations ou tout fait concernant les infractions de corruption en général et d'enrichissement illicite en particulier.

139 Union Européenne, Convention pénale sur la corruption, publié sur www : Conventions.coe.int/treaty/fr/ Reports/Html/173.htm visité le 05/03/2013

140 Union Européenne, Convention pénale sur la corruption, publié sur www : Conventions.coe.int/treaty/fr/ Reports/Html/173.htm visité le 05/03/2013

141 Office contre la drogue et le crime, Guide législatif pour l'application de la Convention des Nations Unies contre la corruption, NU, New-York, 2007, p.131.

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La loi anti-corruption au Burundi exige de l'autorité compétente, pendant l'enquête, l'instruction et le procès, de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection des témoins et dénonciateurs de corruption et d'enrichissement illicite.142 Toutefois, la disposition est sans détails quant à la forme de protection à fournir et ignore les formes de menaces que ces personnes peuvent subir.

Au Burundi les dénonciateurs et témoins peuvent subir différentes formes de menaces dont l'élimination physique, perte d'emploi, mauvaise cotation au travail, le non avancement de grade, mutation non désirées, montage etc. Les menaces peuvent être exercées soit directement sur la personne du dénonciateur ou témoin soit indirectement sur la personne de ses proches, conjoint, enfants, parents etc.

Cette lacune dans la protection du dénonciateur ou témoin amènent les gens à garder secret les informations sur l'enrichissement illicite qui seraient utiles pour la poursuite des suspects. Ainsi, nous remarquons une absence d'intimidation dans la personne des textes et institutions qui luttent contre l'enrichissement illicite. Les délinquants potentiels ne sentent aucune menace et passent à la commission du crime en ne s'inquiétant de rien.

C'est ainsi que certaines gens aillent même plus loin pour qualifier la loi et les institutions anti-corruption d' «épouvantail dans un champ de blé ou de riz, juste fait pour effrayer les oiseaux», comme le note Gabriel Rufyiri, le Président de l'OLUCOME qui poursuit: «une fois que les oiseaux se rendent compte que ce n'est qu'un leurre, donc un mannequin grossier recouvert de haillons flottants

142 Voir loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, art. 12, in B.O.B n° 4/2006.

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pour les éloigner, tous les oiseaux se donnent rendez-vous dans ce champ et se posent même sur cet épouvantail pour picorer ou saccager le champ». 143

Nous notons que nonobstant l'existence du cadre juridique et institutionnel anticorruption, le bilan de la lutte est mitigé et l'amélioration est largement souhaitée.

143 Gabriel Rufyiri, cité dans le journal « Iwacu », publié sur www.iwacu-burundi.org/spip.php?article1506.

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CONCLUSION GENERALE

Au terme de ce travail de mémoire, il convient de rappeler qu'il porte sur l'analyse juridique de l'infraction d'enrichissement illicite et la problématique de sa répression en droit pénal burundais.

La Convention de l'Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption définit clairement l'enrichissement illicite comme une augmentation substantielle des biens d'un agent public ou de toute autre personne que celui-ci ne peut justifier au regard de ses revenus. Dans la loi pénale burundaise, le sens de l'expression "enrichissement illicite" est ambigu ; ce qui rend difficile les poursuites des suspects.

Le besoin de lutter contre l'infraction d'enrichissement illicite est une priorité parce que ses effets se répercutent sur la vie sociale, économique et juridique burundais.

Le bilan de lutte contre la l'enrichissement illicite est loin d'être satisfaisant. Sur papier, le cadre juridique et institutionnel accuse encore de lacunes; dans les faits, le défi est grand.

Il ne suffit donc pas de vouloir éradiquer l'enrichissement illicite pour y parvenir, mais faut-il une volonté réelle et manifeste sans laquelle l'échec est assuré.

La bataille de lutte contre l'enrichissement illicite est une affaire de tous et chaque personne devrait jouer son rôle avec plénitude et apporter le soutien nécessaire aux autres pour que la lutte soit efficace et effective. Lutter donc contre l'enrichissement illicite reviendrait à encourager la promotion et le respect du droit de l'homme. Ceux-ci sont une condition du développement et leur

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respect effectif est l'une des préoccupations majeure de la communauté internationale, le Burundi étant membre de celle-ci.

Les obstacles liés aux immunités et privilèges de juridictions, la protection non effective et non appropriée des dénonciateurs et témoins, le problème lié à la prescription de l'action publique etc. doivent être levés si on veut que la lutte soit menée d'une manière efficace.

Nous félicitons l'Etat burundais de l'effort jusqu'ici fourni dans le cadre de la lutte contre l'enrichissement illicite. Il a ratifié la CNUCC et la Convention de l'Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption ; il a permis la promulgation de la loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de prévention et de répression de la corruption et des infractions connexes, la création de la Cour anti-corruption et de son Parquet Général ainsi que BSAC. Mais, nous rappelons que leur application effective dans toutes leurs dispositions est sans alternative si on veut les rendre plus judicieux. Cela éviterait aux uns et aux autres de s'enrichir illicitement et la société serait également fière de voir que ceux qui ont bafoué les principes de démocratie et de bonne gouvernance soient punis et réprimés conformément à la loi.

70

RECOMMANDATIONS

La CNUCC recommande aux pays parties d'évaluer périodiquement les instruments juridiques et mesures administratives pertinents en vue de déterminer s'ils sont adéquats pour prévenir et combattre l'enrichissement illicite.144

Au vu de la situation actuelle des mécanismes de la lutte contre l'infraction d'enrichissement illicite, le Burundi doit faire l'évaluation de bilan de la lutte contre l'infraction d'enrichissement illicite depuis la mise en place du cadre légal et institutionnel à cette fin pour des réformes nécessaires tout en tenant compte de nos propositions et recommandations suivantes :

1° Mettre en place la Haute Cour de Justice prévue par la constitution
chargée de juger les hautes autorités pour qu'aucun auteur de l'infraction d'enrichissement illicite n'échappe à la justice ;

2° Définir l'infraction d'enrichissement illicite comme «Une augmentation
substantielle des biens d'un agent public ou de toute autre personne que celui-ci ne peut justifier au regard de ses revenus légitimes »145 pour lever les confusions actuelles ;

3° Etendre la compétence personnelle de la Cour anti-corruption qui est une
juridiction spécialisée jusqu'à la personne des ministres, gouverneurs de provinces, des hauts gradés de l'armée et de la police qui jusqu'ici bénéficient du privilège de juridiction ;

4° Créer une chambre d'appel au sein de la Cour anti-corruption pour
permettre le traitement rapide des dossiers d'enrichissement illicite traité au 1er degré de celle-ci ;

5° Prévoir des sanctions pour les assujetties qui contreviennent à l'obligation

144Convention des Nations Unies contre la corruption du 31 octobre 2003, art.5 al.3, Résolution 58/4 de

l'Assemblée Générale des N.U du 31 octobre 2003, en ligne : www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013. 145 Convention de l'Union Africaine sur la Prévention et la Lutte Contre la Corruption du 11 juillet 2003, art. 1, en ligne :www.africaunion.org/Official_documents/Treaties_Conventions_fr/Convention%20sur%20la%20 lutte%20contre%20la%20corruption.pdf, visité le 22/06/2013.

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de la déclaration des biens et patrimoine;

6° Fixer un long délai de prescription, qui courrait jusqu'à 30 ans de l'action
publique pour l'infraction d'enrichissement illicite;

7° Définir les formes de protection garantie à la personne du témoin ou
dénonciateur de l'infraction d'enrichissement illicite notamment contre les menaces et traitement injustes par les personnes qui en ont les pouvoirs;

8° Traduire la loi anti-corruption en langue nationale146, comme il est le
prescrit de la constitution pour faciliter sa vulgarisation.

Enfin, nous ne pouvons pas prétendre avoir épuisé le sujet, raison pour laquelle nous invitons d'autres chercheurs intéressés par les mécanismes de lutte contre l'infraction d'enrichissement illicite à nous compléter et à nous communiquer éventuellement leurs critiques dans le but d'améliorer ce travail de recherche.

146 Loi n°1/ 010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la constitution de la République du Burundi, art.5, in B.O.B. n° 3 ter / 2005.

72

BIBLIOGRAPHIE

I. INSTRUMENTS JURIDIQUES.

A. Instruments juridiques internationaux

1. Convention des Nations Unies contre la corruption adoptée par la Résolution 58/4 de l'Assemblée Générale des Nations Unies du 31 octobre 2003.

2. Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques adopté par la Résolution 2200 A (XXI) de l'Assemblée Générale des Nations Unies du 16 décembre 1966.

B. Instruments juridiques régionaux.

1. Convention de l'Union Africaine sur la Prévention et la Lutte Contre la Corruption du 11 juillet 2003.

2. La convention Interaméricaine contre la corruption du 29 mars 1996.

C. Instruments juridiques burundais

3. Loi n°1/010 du 18 mars 2005 portant promulgation de la constitution de la République du Burundi, in B.O.B. n° 3 ter/2005.

4. Loi n°1/36 de la 13/12/2006 portant création de la Cour anti-corruption, in B.O.B. n° 12/2006.

5. Loi n°1/10 du 03 Avril 2013 portant révision du Code de procédure Pénale, in B.O.B. n°4/2013

6. Loi n° 1/05 du 22 avril 2009 portant révision du code pénal burundais, in B.O.B. n° 4 bis/2009.

73

7. Loi n° 1/02 du 04 février 2008 portant lutte contre le Blanchiment de capitaux et le financement du Terrorisme, in B.O.B. n° 2/2008.

8. Loi n° 1/27 la 3/8/2006 portant création, organisation et fonctionnement de la Brigade Spéciale Anti-corruption, in B.O.B. n° 8/2006.

9. Loi n° 1/12 du 18 avril 2006 portant mesures de répression de la corruption et des infractions connexes, in B.O.B. n° 4/2006

10. Loi n° 1/08 du 17 mars 2005 portant Code de l'organisation et de la compétence judiciaires, in B.O.B. n° 3quater/2005.

11. Loi n° 1/07 du 25 février 2005 régissant la Cour Suprême, in B.O.B. n° 3quater/ 2005.

12. Loi n°1/002 du 31 mars 2004 portant création, missions, organisation et fonctionnement de la cour des comptes, in B.O.B. n°3bis/2004.

13. Décret n°100/277 du 27 septembre 2006 portant création, attributions, organisation et fonctionnement de l'Inspection Générale de l'État, in B.O.B n°9/2006.

14. Ordonnance n° 550/176 du 27/2/2007 portant règlement d`ordre intérieur de la Cour anti-corruption In B.O.B. n°2/2007.

D. Instruments juridiques étrangers

1. Loi n 003 2006 du 25 avril 2006 portant déclaration des biens et avoirs au Cameroun.

2. Loi n° 06-01 du 21 Moharram 1427 correspondant au 20 février 2006 relative à la prévention et la lutte contre la corruption en République Algérienne Démocratique et Populaire, 1ère éd., O.N.T.E 2006.

3. Loi No82-39/AN-RM DU 26 MARS 1982 portant répression du crime d'enrichissement illicite en République du Mali.

4. Loi de base n° 65-60 du21 juillet 1965 portant code pénal sénégalais.

74

5. Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 en

France.

II. OUVRAGES

1. BOULANGER B., Observations sous 1ère Civ., 3 novembre 2004, Bull., I, n°248, p. 206, La semaine juridique, éd. générale, 23 février 2005, n°8-9, jurisprudence, II, 10024, 860 p.

2. BRUCE M.B, La lutte contre la corruption : Guide d'introduction, Agence canadienne de développement International 200, promenade du Portage Gatineau, Québec, 2000, 62p.

3. BRUCE M.B, Lutte contre la corruption. Questions et stratégies, Gatineau, Québec, 2000, 68 p.

4. CASSANI U et ANNE H. L., Lutte contre la corruption internationale. The never ending story, Schulthess, 2011,178 p.

5. CORNU G., Vocabulaire juridique, 8 éd., Quadrige, PUF, Paris, 2009, 986p.

6. DELMAS-MARTY M., Les grands systèmes de politique criminelle, coll. Thémis, PUF, Paris, 1992,462 p.

7. DOMMEL D., Face à la corruption: peut-on l'accepter/peut-on la prévenir ? peut-on la combattre ?, Tropique, Karthala, 2003,296p.

8. ERIC D., La responsabilité pénale des agents publics, 1ère éd, PUF, 108 Boulevard Saint Germain 75006, Paris, 1998, 127p.

9. HUET A. et KOERING - JOULIN R. Droit pénal International, PUF, 2ème éd., Thémis, 2001, 425 p.

10. KAUFMAN D., Finances et développement: dix idées reçues sur la gouvernance et la corruption, Banque Mondiale vol.42, n° 3, septembre 2005, 43 p.

75

11. PIERRE L., Une démocratie corruptible : Arrangements, favoritisme et conflits d'intérêts, coll. La république des idées, coll. Seuil, Paris, 2011, 100p.

12. LEVASSEUR G., Droit pénal général complémentaire, Alexandre Cote, Paris, 1960, 641p.

13. MERLE R. et VITU A., Traité de droit criminel, procédure pénale, 4ème éd., vol.2, Paris, Cujas, 1989, 1008p.

14. NIMUBONA J. et SEBUDANDI C., Le phénomène de la corruption au Burundi: Révolte silencieux et résignation, GRADIS, Bujumbura, 2007, 55p.

15. PORTA D., La corruption dans les démocraties occidentale, Revue des sciences Sociales 1996, 433 p.

16. QUELOZ N., Recherche sur les processus de corruption en Suisse, Harmattan, Paris, 1999, 204 p.

17. ROGER L., Comment certains industriels font pression contre l'intérêt général : Lobbying et santé, éd. Pascal/Mutualité Française, Paris, 2009,447/p.

18. VERON M., Droit pénal des affaires, 4éd, Dalloz, Armand Colin, 31-35 rue Froidereaux, Paris, 2001,363p.

III. THESES ET MEMOIRES

1. KINEZA K. et RUSINGWA T., L'infraction de corruption face aux Droits de l'Homme au Burundi, Travail de mémoire pour le grade de Licencié en Droit, UMLK, décembre 2010, Bujumbura, 59 p.

2. MFOMO S.P. Lutte contre la corruption au Cameroun: Contribution à l'étude de l'élaboration de la mise en oeuvre d'une politique publique. Thèse de doctorat Ph.D en Science Politique, Université de Yaoundé II, novembre 2006, 98 p.

76

IV. AUTRES DOCUMENTS

1. GOPAC, Combattre la corruption : Manuel du parlementaire, IBM, Washington, août 2005, 89 p.

2. IFES, Guide pratique pour l'aide à la mise en oeuvre d'un dispositif anticorruption au Burundi, Bujumbura, s.d. 259 p.

3. International Crisis Group Burundi, La crise de corruption, Rapport Afrique N° 185, Bujumbura, 21 mars 2012,42 p.

4. Ministère à la Présidence Chargé de la Bonne Gouvernance et de la Privatisation au Burundi, Stratégie nationale de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption 2011-2015, PNUD, Bujumbura, 2012,79 p.

5. Ministère à la Présidence Chargé de la Bonne Gouvernance, de la Privatisation, de l'Inspection Générale de l'Etat et de l'Administration Locale, Enquête diagnostique sur la gouvernance au Burundi, Rapport mai 2008,80 p.

6. Office contre la drogue et le crime, Guide législatif pour l'application de la Convention des Nations Unies contre la corruption, NU, New-York, 2007, 316p.

7. OLUCOME, La Corruption enrichit peu de gens et en tue beaucoup, RCN Justice &Démocratie, Bujumbura, 2è éd. s.d, p.44 p.

8. PNUD, Problématique de corruption et développent humain, Presse du Faso, Ouagadougou, 2003, 187 p.

9. Transparency International, Rapport d'Indice de perception de corruption, 5 décembre 2012, Berlin 5 p.

77

V. Sites visités

1. www.ifes.org/files/burundi_2008.pdf, visité le 19/03/2013

2. www.lesdefinitions.fr/illicite, visité le 03/02/2013

3. www : presidence.bi/spip.php ?article 694, visité le 17/02/2013

4. www.spm.gov.cm/fr/documentation/textes-legislatifs, visité le 19/03/2013

5. www.droit.mjustice.dz/loi_prev_lut_corrupt.pdf, visité le 08/03/2013

6. www.go.worldbank.org/1DP1BLNKJ0, visité le 24/05/2013

7. www.droit-afrique.com/images/textes/Mali/mali%20-%20enrichissement%20illicite.pdf, visité le 19/03/2013

8. www.droit-afrique.com/images/textes/Senegal/Senegal%20-20Code%20penal.pdf, visité 13/03/2013

9. www.africaunion.org/Official_documents/Treaties_Conventions_fr/Conve ntion%20 sur%20la%20lutte%20contre%20la%20corruption.pdf,visité le 22/06/2013

10. www.unodc.org/documents/treaties/UNCAC/Publications/Convention/08-50027_F.pdf , visité le 19/03/2013.

11. www.conseilsgratuits.wordpress.com/2009/09/08/convention-interamericaine-contre-la-corruption/, visité le 19/03/2013.

12. www.mjp.univ-perp.fr/france/ddh1789.htm visité le 22/06/2013.

13. http://www2.ohchr.org/french/law/ccpr.htm, visité le 25/06/2013

14. www.spm.gov.cm/fr/documentation/textes-legislatifs, visité le 19/03/2013.

78

TABLE DES MATIERES

DEDICACES i

REMERCIEMENTS ii

PRINCIPALES ABREVIATIONS iii

INTRODUCTION GENERALE 1

CHAPITRE I : GENERALITES SUR L'INFRACTION

D'ENRICHISSEMENT ILLICITE 6

Section I. Notions générales sur le concept de l'enrichissement illicite 6

§1 Définitions 6

§2. Les éléments constitutifs de l'infraction de l'enrichissement illicite 9

1. L'élément légal 10

2. L'élément matériel 10

3. L'élément moral 10

§.3. Les spécificités de l'enrichissement illicite 10

Section II. L'enrichissement illicite et les notions connexes 12

§1.L'enrichissement illicite et la corruption 12

§2. L'enrichissement illicite et le détournement des biens 14

§3. L'enrichissement illicite et le blanchiment 15

§4. L'enrichissement illicite et l'enrichissement sans cause 15

Section III. Les causes et les conséquences de l'enrichissement illicite 16

§1. Les causes de l'enrichissement illicite 17

1. Une politique préventive incomplète et la fragilité du système judiciaire 17

2. Le sentiment d'insécurité personnelle 18

3. Perversion des pratiques sociales et culturelles 18

§2. Les conséquences de l'enrichissement illicite 19

79

1. Sur le plan politique 20

2. Sur le plan économique 21

3. Sur le plan socioculturel 22

CHAPITRE II: DE LA PREVENTION DE L'ENRICHISSEMENT

ILLICITE EN DROIT BURUNDAIS 24

Section I. Prévention par les organes étatiques. 24

§1. La déclaration du patrimoine 25

1. Les personnes assujetties à l'obligation de la déclaration du patrimoine 26

2. Des biens à déclarer et délais de déclaration 27

3. Les organes dépositaires 28

a. La Cour Suprême 28

b. La Cour d'appel 29

c. Le Tribunal de Grande Instance 30

4. Le sort des déclarations 32

§2. Obligation de mise en place des mécanismes de prévention de la corruption

et des infractions connexes. 34

Section II. Prévention par les organes non étatiques 35

§1. La société civile 36

1. Les moyens de lutte 36

a. La participation à la gestion 37

b. L'éducation de la population 37

2. La modération des abus des gouvernants 38

a. La collaboration avec le gouvernement 38

b. Les moyens de pression 39

§2. Le rôle des médias 39

1. Vulgarisation de la loi 40

2. Le suivi de la mise en pratique de la loi 40

80

CHAPITRE III : DE LA REPRESSION DE L'INFRACTION

D'ENRICHISSEMENT ILLICITE EN

 

DROIT

BURUNDAIS

 

42

Section I. La détection des cas d'enrichissement illicite

 

42

§1. La coopération au plan national

 

43

1. La collaboration des personnes morales

 

43

2. La collaboration des personnes physiques

 

45

§2. La coopération au plan international

 

46

1. L'extradition

 

47

2. L'entraide judicaire

 

48

Section II. Organes de répression

 

49

§1: La Cour anti-corruption

 

49

1. De l'organisation et fonctionnement de la Cour

 

49

2. Les compétences de la Cour

 

50

 

§2. Le Parquet Général près la Cour anti-corruption

 

.52

1. De l'organisation et fonctionnement du Parquet Général

 
 

Près la Cour anti-corruption

 

52

2. Les compétences du Parquet Général près la Cour anti-corruption

 

..53

 

§2. La Brigade Spéciale Anti-corruption 54

1. Missions de la Brigade Spéciale Anti-corruption 54

2. L'organisation et le fonctionnement de la

Brigade Spéciale Anti-corruption 55

3. Les compétences de la Brigade Spéciale Anti-corruption 56

Section III: Les sanctions 57

§1. Des peines principales 57

§2. Des peines complémentaires 57

§2.Des exemptions et atténuation des peines 59

81

Section IV. Les obstacles à l'efficacité de la répression de l'infraction

d'enrichissement illicite 60

§1. Des immunités et privilèges de juridictions 61

1. Les immunités 61

2. Les privilèges de juridiction 61

a. Les personnes justiciables devant la Haute Cour de Justice. 62

b. Les personnes justiciables devant la Cour Suprême 62

§3. Obstacle lié à la prescription de l'action publique 64

§4. Problème de protection des dénonciateurs et témoins 65

CONCLUSION GENERALE 68

BIBLIOGRAPHIE 72






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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle