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La Constitution à  l'épreuve des accords politiques dans le nouveau constitutionnalisme africain


par Pihame BARBAKOUA
Université de Lomé Togo - Diplôme d'études approfondies en droit public fondamental 2008
  

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SECTION II : LES ACCORDS POLITIQUES : UN INSTRUMENT REGISSANT LES INSTITUTIONS AU SEIN DE L'ETAT

Dans la perspective de résoudre la crise, les accords politiques éditent un ensemble de normes, de principes, en feuille de route, souvent immédiatement applicables. Pour le Professeur DU BOIS DE GAUDUSSON, les accords définissent une nouvelle constitution et que leur objectif est précisément de réviser les dispositions institutionnelles et de contenir des recommandations non conformes à celles toujours en vigueur74.

S'il est vrai que le plus souvent, « le constituant de fait »75 édite des règles qui régissent le fonctionnement de l'exécutif par la mise sur pied d'un gouvernement d'union nationale avec à la clef un programme, il vise aussi le législatif qui est ainsi

73AGOKLA (K.M.) Cours polycopié de droit pénal international. Université de KARA, quatrième année, droit public, 2008, p.40 et suiv.

74« Accord de Marcoussis... » op.cit., p.46.

75 KPODAR (A.) « La communauté internationale et le Togo... » op.cit., p.42

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mis sous perfusion. Au-delà, des pouvoirs exécutif et législatif (Paragraphe I), les accords politiques instituent plus généralement des organes ad hoc, ou irriguent ceux déjà existants (Paragraphe II).

Paragraphe I : Des bouleversements institutionnelles

Les accords politiques ont souvent pour principal objectif de mettre sur pied des gouvernements de crise totalement déconnectés des prescriptions constitutionnelles (A). Par ailleurs, ils soumettent le parlement à une véritable corvée, consistant à l'enregistrement des lois préalablement établies par eux. Ce qui a fait dire de celui-ci, qu'il est mis sous curatelle (B).

A : Des exécutifs inconstitutionnels

Les exécutifs mis sur pied par les accords sont souvent connus sous le nom de gouvernements de crise. Gouvernement d'union nationale, gouvernement d'ouverture ou de large ouverture, gouvernement de mission, gouvernement de transition, une générosité terminologique et sémantique pour désigner une seule réalité au double plan originel(1) et fonctionnel(2).

1 : L'instauration des gouvernements de crise

Dans la théorie du droit constitutionnel, le gouvernement apparaît comme la clé de l'existence de l'ordre public, la réalité de la conception anthropologique de l'Etat. C'est lui qui incarne le pouvoir exécutif que Montesquieu qualifiait « puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit des gens »76, et c'est lui qui « en Afrique, représente le pouvoir tout court »77. Selon les principes fondamentaux de la théorie de la démocratie représentative majoritaire en vogue dans le nouveau constitutionnalisme africain78, seule la majorité gouverne. Cependant, les accords mettent sur pied un composite multiforme en violation flagrante des constitutions.

En effet, si on peut relever que dans certains cas, il y a la majorité et l'opposition, comme au Togo et en Côte d'Ivoire du moins jusqu'en 2005, il s'agit le plus souvent, d'un partage de portefeuilles ministériels aux belligérants, en dehors et au mépris des règles constitutionnelles préétablies. L'exemple le plus en vue et peut-être le plus illustratif se trouve être le cas du Kenya et du Zimbabwe. Dans le premier

76 MONTESQUIEU, L'esprit des lois, Livre XI, Chapitre VI.

77 FALL (I.M.) Le pouvoir exécutif dans le constitutionnalisme des Etats d'Afrique, L'Harmattan, 2008, p.310

78 KPODAR (A), « La communauté internationale et le Togo... », op.cit., p.45.

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cas, il s'agit de l'accord du 28 février 2008 qui consacre le partage du pouvoir entre Mwai KIBAKI (qui gagne le poste de président) et Railla ODINGA qui s'en sort avec la primature. Il en est de même au Zimbabwe, où les résultats des élections sont tout simplement mis de côté, avec pour finalité, la nouvelle version de la « conférence de Berlin »79. Robert Mugabe conserve le fauteuil présidentiel et son éternel rival Morgane Swinguerai, la primature. On se trouve là en présence de la matérialisation de l'approche consociationnelle, chère à Pierre MOUKOKO MBONJO80.

L'inconvénient majeur de ces gouvernements est en réalité le nombre exorbitant de ministres qu'ils contiennent81. Au-delà, ils sont composés sans aucune considération de compétences. Or faut-il le rappeler, ce gouvernement a un programme à mettre en exécution.

2 : La prescription d'un programme

Les gouvernements de crise ont le plus souvent deux missions fondamentales. Il s'agit d'une part, de pacifier le pays et d'autre part, de conduire à l'organisation des élections libres et transparentes. Ce rôle se retrouve essentiellement dans la mission qu'il a, d'assurer l'effectivité de l'accord. Dans le cas ivoirien par, l'art. 3a résume la mission du gouvernement de réconciliation en ces termes : «il sera chargé de renforcer l'indépendance de la justice, de la restauration de l'administration et des services publics et du redressement du pays. Il appliquera le programme de la table ronde qui figure en annexe et qui comporte notamment des dispositions dans le domaine législatif et règlementaire ». Et à l'art. 3b d'ajouter qu' « il préparera les échéances électorales aux fins d'avoir une élection crédible et transparente et en fixera les dates ». On le voit bien, ce gouvernement aura à mettre en application l'accord en usant des moyens mis à sa disposition par celui-ci (notamment la constitution), pour atteindre les objectifs fixés. La constitution devient alors fidèle servante de l'accord politique qui désormais tient lieu de loi fondamentale. En outre, le parlement passe lui aussi sous le règne de l'accord politique.

79 Il s'agit en réalité une retrouvaille de partage du pouvoir semblable à la conférence de Berlin organisée par le Chancelier allemand Bismarck de novembre 1884 à Février 1885 qui établit les règles d'occupation coloniale que les historiens considèrent comme la table de partage de l'Afrique.

80 MOUKOKO MBONJO (P.), « Pluralisme et démocratie en Afrique : l'approche consociationnelle ou du « POWER-SHERING » », Afrique 2000, p.39 et suiv.

81 Or le Professeur VIGNON avait déjà déploré ce fait qui atteste d'ailleurs de la mal administration des pays africains. « Les aspects structurels de la mal administration au Togo », Annales de l'Université du Benin. T XVII, 1997-1998. Par ailleurs, on peut s'interroger sur l'effet d'une telle débilité sur les budgets nationaux.

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